D. DES QUESTIONS RESTANT TOUTEFOIS EN SUSPENS

1. Une gouvernance à conforter

La gouvernance du « grand emprunt » sera assurée au moyen de trois structures.

La première est le Commissariat général à l'investissement (CGI), présidé par un commissaire éponyme. Créé par le décret n° 2010-80 du 22 janvier 2010 relatif au commissaire général à l'investissement, ce poste a été confié à M. René Ricol. Placé sous l'autorité du Premier ministre, celui-ci sera chargé de la coordination générale du programme, ce qui impliquera pour lui :

- de préparer, en liaison avec les ministères concernés, la contractualisation avec les organismes chargés de la gestion des crédits et de coordonner l'élaboration des cahiers des charges qui serviront de base pour les appels à projets ;

- de préparer, sous l'autorité du Premier ministre, la position de l'État sur les décisions individuelles d'investissement ;

- d'évaluer la rentabilité des investissements publics entrepris dans le cadre des « priorités nationales », ex ante comme ex post ;

- de dresser un bilan annuel de l'exécution du programme d'investissements d'avenir pouvant conduire, le cas échéant, au redéploiement des crédits en cas de performance insuffisante.

Au sein des différents organismes gestionnaires chargés d'instruire les projets, des comités de gestion seront mis en place pour réaliser les appels à projets sur la base des cahiers des charges validés au niveau interministériel et établir la liaison à la fois avec le CGI et avec les acteurs économiques impliqués dans les projets.

Ces organismes feront l'objet de conventions de gestion avec l'État, détaillant précisément les modalités d'instruction des dossiers, d'emploi des fonds, et d'évaluation des résultats obtenus. Elles permettront d'assurer à l'État un pouvoir de décision en dernier ressort.

Les comités de gestion seront composés de façon à regrouper des personnalités qualifiées aptes à évaluer la pertinence des dossiers présentés. A cet égard, il sera fait appel à des personnalités extérieures à l'administration ayant une expérience du monde économique et à même de juger de la rentabilité des projets.

Enfin, il est prévu d'instituer un comité de surveillance du « grand emprunt ». Coprésidé par MM. Juppé et Rocard, et regroupant des parlementaires, des personnalités qualifiées et des partenaires sociaux, il sera plus spécifiquement chargé du suivi et de l'évaluation ex post des projets d'investissement. Il dressera un rapport public annuel, le CGI devant lui rendre régulièrement compte de l'exécution du programme.

Votre rapporteur pour avis attire l'attention sur l'importance de cette gouvernance dans la réussite globale du « grand emprunt » . Sa mise en oeuvre comportera en effet un nombre élevé de lieux de décision et de gestion des projets (les trois précités, auxquels s'ajouteront les échelons ministériels et l'arbitrage interministériel) entre lesquels il s'agira de créer des relations à la fois régulières, souples et opératoires.

Votre rapporteur pour avis a ainsi relevé une grande préoccupation des porteurs de projets potentiels quant à l'identification de leurs interlocuteurs. Il importera que les organismes gestionnaires soient aisément accessibles pour ces acteurs, et qu'ils jouent à leur égard le rôle de « guichets unique » pour le dépôt et l'instruction des projets. S'il convient de conserver une gouvernance « par le haut » pour garantir un effet structurant et éviter la dissémination des projets, il faudra également veiller à maintenir une transversalité minimale et à éviter un effet bottom-down dans la gestion des projets.

Il conviendra également, semble-t-il, de planifier et éventuellement de redéfinir les moyens des organismes gestionnaires en vue de la réception, de l'instruction et de la gestion des projets. Ces organismes vont, en effet, devoir faire face à un afflux massif de dossiers dont la rapidité de traitement influera en partie sur l'efficacité de la mise en oeuvre du « grand emprunt ». Ils auront également à gérer des fonds dont l'importance est sans commune mesure, pour certains, avec ceux qu'ils ont l'habitude de traiter. Là encore, une révision de leurs moyens de fonctionnement sera peut-être nécessaire.

Le CGI lui-même n'échappera d'ailleurs pas à une réflexion sur l'optimisation de ses moyens. En effet, l'efficacité de son action impliquerait, dans l'idéal, la mise en place en son sein d'un interlocuteur spécialisé par thématique et de comités de pilotage spécifiques par catégories de projets, soit des moyens matériels et humains sans commune mesure avec ceux qu'il possède pour l'instant.

Afin de clarifier la gouvernance, votre commission a, sur proposition de votre rapporteur pour avis, adopté un amendement à l'article 4 du projet de loi tendant à :

- donner valeur législative au comité de surveillance des investissements d'avenir et au CGI ;

- renforcer les missions de ce comité, afin d'éviter notamment qu'il puisse être reproché au CGI d'être à la fois juge et partie. Ce dernier s'occuperait ainsi de l'instruction des dossiers, tandis que le comité de surveillance des investissements procéderait à l'évaluation de leur mise en oeuvre ainsi que de leur impact socio-économique ;

- de prévoir la participation au comité de surveillance des investissements d'avenir de quatre députés et quatre sénateurs, désignés par le président de leur assemblée respective, afin que le président et le rapporteur général des commissions chargées des finances ainsi qu'un représentant des autres commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat puissent en être membres.

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