Avis n° 283 (2009-2010) de M. Bruno RETAILLEAU , fait au nom de la commission de l'économie, déposé le 10 février 2010
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INTRODUCTION
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I. LE CADRE GÉNÉRAL DU COLLECTIF
BUDGÉTAIRE
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II. LE SECTEUR « FILIÈRES
INDUSTRIELLES ET PME »
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III. LE SECTEUR « DÉVELOPPEMENT
DURABLE »
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IV. LE SECTEUR
« NUMÉRIQUE »
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I. LE CADRE GÉNÉRAL DU COLLECTIF
BUDGÉTAIRE
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ANNEXE - LISTE DES PERSONNES
AUDITIONNÉES
N° 283
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010
Enregistré à la Présidence du Sénat le 10 février 2010 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , de finances rectificative pour 2010 ,
Par M. Bruno RETAILLEAU,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine , président ; MM. Gérard César, Gérard Cornu, Pierre Hérisson, Daniel Raoul, Mme Odette Herviaux, MM. Marcel Deneux, Daniel Marsin, Gérard Le Cam , vice-présidents ; M. Dominique Braye, Mme Élisabeth Lamure, MM. Bruno Sido, Thierry Repentin, Paul Raoult, Daniel Soulage, Bruno Retailleau , secrétaires ; MM. Pierre André, Serge Andreoni, Gérard Bailly, Michel Bécot, Joël Billard, Claude Biwer, Jean Bizet, Yannick Botrel, Martial Bourquin, Jean Boyer, Jean-Pierre Caffet, Yves Chastan, Alain Chatillon, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Marc Daunis, Denis Detcheverry, Mme Évelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fauconnier, François Fortassin, Alain Fouché, Francis Grignon, Didier Guillaume, Michel Houel, Alain Houpert, Mme Christiane Hummel, M. Benoît Huré, Mme Bariza Khiari, MM. Daniel Laurent, Jean-François Le Grand, Philippe Leroy, Claude Lise, Roger Madec, Michel Magras, Hervé Maurey, Jean-Claude Merceron, Jean-Jacques Mirassou, Jacques Muller, Robert Navarro, Louis Nègre, Mmes Renée Nicoux, Jacqueline Panis, MM. Jean-Marc Pastor, Georges Patient, François Patriat, Philippe Paul, Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Marcel Rainaud, Charles Revet, Roland Ries, Mmes Mireille Schurch, Esther Sittler, Odette Terrade, MM. Michel Teston, Robert Tropeano, Raymond Vall. |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : |
2239 , 2268 et T.A. 413 |
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Sénat : |
276 , 278 et 284 (2009-2010) |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
La France, qui demeure la cinquième puissance économique au monde, possède de multiples atouts pour conserver et même accroître son rang dans la compétition internationale. Elle n'en présente pas moins certaines faiblesses structurelles dont les effets sur notre économie, aggravés par la crise actuelle, pourraient s'avérer menaçants pour notre modèle social.
Le monde, en effet, a formidablement changé au cours des dernières décennies sans que notre pays ait toujours su évoluer en conséquence. L'arrivée de nouveaux acteurs sur les marchés a considérablement accru la concurrence internationale dans l'appropriation de la valeur ajoutée. Dans le même temps, une économie de l'immatériel, valorisant la connaissance, le savoir-faire et la durabilité, s'est progressivement mise en place.
Face à ces changements, les États occidentaux, qui ont créé leurs richesses sur une économie de type essentiellement industrielle, ont dû réviser leurs modèles de développement et ajuster leurs facteurs de production. Handicapée par une certaine inertie au changement, la France n'a pas su totalement réorienter son système de production vers les secteurs et procédés qui feront demain la richesse des nations.
Un tel constat est à la base des travaux de la commission Investir pour l'avenir 1 ( * ) mise en place à la suite de l'annonce faite par le Président de la République, lors de son discours devant le Parlement réuni en Congrès le 22 juin 2009, d'une réflexion sur « nos priorités nationales » et la « mise en place d'un emprunt pour les financer ».
Constituée au mois d'août 2009, cette commission, présidée par MM. Alain Juppé et Michel Rocard, préconise, de façon très générale, de « nous engager dans la transition vers le modèle de développement de demain, un modèle de développement durable fondé à la fois sur la matière grise et l'économie verte ». A cette fin, elle recommande la mise en oeuvre de sept priorités stratégiques correspondant à un investissement de l'État de 35 milliards d'euros tourné vers l'innovation.
L'essentiel des propositions de la commission a été repris par le Chef de l'État lors d'une conférence de presse tenue le 14 décembre 2009, où a été annoncé un « grand emprunt » national d'un montant équivalent, visant à mettre notre économie sur la voie d'une croissance durable. Le présent texte a pour objet d'en prévoir la mise en oeuvre juridique et financière.
Votre commission s'en est saisie pour avis concernant les aspects économiques. Ceux-ci recouvrent les mesures en faveur de l'industrie et des petites et moyennes entreprises (PME), du développement durable et de l'économie numérique, qui font l'objet d'autant de programmes budgétaires. Après avoir situé le cadre général dans lequel s'inscrit le « grand emprunt », le présent rapport pour avis analyse successivement les trois programmes précités.
I. LE CADRE GÉNÉRAL DU COLLECTIF BUDGÉTAIRE
Opération exceptionnelle de mobilisation de crédits en vue de remettre notre pays sur le chemin d'une croissance innovante, riche en emplois et durable, le « grand emprunt » fait appel à des modalités originales de gestion des fonds qui devraient permettre de minimiser son impact sur les finances publiques.
Son efficacité sera toutefois liée à l'adoption de principes de bonne gouvernance associant l'ensemble des acteurs de façon transversale, tout en assurant un suivi et une évaluation pertinents.
A. UNE MOBILISATION SANS PRÉCÉDENT POUR DYNAMISER UNE ÉCONOMIE « VERTE ET GRISE »
1. La France peine à retrouver un fort potentiel de croissance
La crise économique mondiale a largement affecté notre pays, même s'il a plutôt mieux résisté que l'ensemble de ses partenaires d'un niveau de développement équivalent. Ce choc systémique a appauvri nombre de nos entreprises et fragilisé leurs structures de financement, réduisant d'autant leur capacité à investir et à innover. Ces effets négatifs se font tout particulièrement ressentir dans le domaine des technologies d'avenir, encore émergentes et nécessitant des prises de risques importantes, pour un retour sur investissement pouvant être long.
Sur le plus long terme, la France a accumulé un certain nombre de handicaps bridant sa productivité et son dynamisme. Le projet de loi de finances pour 2010 soulignait ainsi que la croissance potentielle de notre économie, qui était de 2,1 % par an en moyenne entre 1998 et 2009, retomberait à 1,7 % entre 2009 et 2013, chiffre que l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) réduit même à 1,4 % pour la période 2011-2017.
Le ralentissement des gains de productivité horaire moyenne en France depuis le milieu des années 70 explique une grande partie de ce constat. Sur la période 1980-1990, cette productivité se serait améliorée de 3 % par an. Sur la période 2001-2007, elle a augmenté de seulement 1,5 % chaque année. C'est donc le moteur principal de la croissance qui semble s'être grippé.
Notre insuffisante propension à investir et à innover constitue le premier facteur explicatif de cette atonie de la croissance. Dans sa contribution aux travaux de la commission pour la libération de la croissance française 2 ( * ) , l'OCDE jugeait en 2007 que notre pays faisait preuve d'une faible capacité d'innovation. Cet état de fait est à mettre en corrélation avec la faiblesse de l'investissement national en recherche et développement. Ainsi que le montre le graphique ci-dessous, l'effort global de notre pays en ce domaine en part de PIB, reste inférieur à la moyenne de l'OCDE et bien en deçà de l'objectif de 3 % en 2010 fixé par la stratégie de Lisbonne.
Plus inquiétante peut-être est la répartition de l'effort de recherche et développement entre la sphère publique et l'initiative privée. « En France, l'effort public de recherche atteint un niveau relativement élevé, mais (celui) des entreprises y est, en revanche, comparativement plus faible », relevait ainsi un rapport du Sénat 3 ( * ) , qui ajoutait que « le fait que la France soit un des pays de l'OCDE où la part de recherche et développement financée par l'État est la plus élevée trouve un élément d'explication dans la mesure où la recherche publique y intervient dans des domaines spécifiques : défense, énergie nucléaire, espace et aéronautique ».
Or, la part de la recherche privée ne semble pas appelée à croître substantiellement dans un proche avenir. Ainsi, en 2008, la France a vu les dépenses de recherche et développement de ses entreprises croître de 0,7 % seulement, ce qui place notre pays en avant-dernière position à l'échelle européenne, loin derrière les leaders en ce domaine (Allemagne et Royaume-Uni, avec respectivement + 11,2 % et + 8 %). Pour l'année 2009, les perspectives sont plus sombres encore : les entreprises déclarant leur budget de recherche et développement trimestriel l'ont globalement réduit de 7,4 % durant le premier trimestre.
D'autre part, si notre pays possède des atouts en matière de recherche fondamentale, la valorisation de cette dernière, mesurée notamment par le nombre de brevets déposés, reste insuffisante. Ainsi, 40 brevets par million d'habitants sont déposés en France chaque année, contre 60 en Allemagne ou 100 au Japon. Et les profits financiers que notre pays retire, en bout de chaîne, de sa recherche théorique sont inférieurs à ceux de ses partenaires et concurrents.
Enfin, notre pays souffre d'une insuffisante fluidité dans la chaîne de création de valeur, allant de la découverte scientifique à son application industrielle. Ainsi que le relève la commission Investir pour l'avenir , « trop souvent la phase de pré-industrialisation, de la preuve de concept jusqu'à la première série, bute sur un manque de financement pour des plates-formes technologiques mutualisées ou des démonstrateurs ».
2. Le recours à un « grand emprunt » engendrera un effet de levier significatif
La légitimité des pouvoirs publics à investir pour favoriser la recherche, l'innovation et, in fine , la croissance, a été théorisée depuis les années 80 par les économistes dits de la « croissance endogène ». Selon ces derniers, l'État peut intervenir dans la sphère économique afin d'y instaurer ou rétablir les conditions de la croissance. Certaines étapes indispensables au processus de production et de création de valeur (recherche, développement, tests...) impliquent en effet des coûts extrêmement élevés que les agents privés ne peuvent supporter à eux seuls du fait de leur incertaine rentabilité, alors même qu'ils engendrent des externalités positives, c'est-à-dire une augmentation du bien-être de l'ensemble de la société.
Ainsi que le souligne la commission Investir pour l'avenir , « l'État a une responsabilité directe en matière d'enseignement supérieur et de recherche publique. Mais sa responsabilité va au-delà. En matière de recherche, d'innovation, de développement de réseaux d'informations, d'efficience énergétique, les investissements ne doivent pas être appréciés au seul regard de leur retour financier direct pour l'investisseur privé. Ces investissements portent en eux des bénéfices pour le reste de la société. L'État doit donc renforcer les incitations à les réaliser. Il peut se porter là où les défaillances de marché sont avérées ».
Cette philosophie générale sous-tend la stratégie liée au « grand emprunt ». Il est ainsi indiqué, dans le dossier de presse du projet de loi, que « l'intervention de l'État est nécessaire pour financer certains projets à haut potentiel pour l'économie » et que « certains investissements lourds ne peuvent pas être réalisés par le secteur privé alors qu'ils génèrent des rendements importants pour l'économie ».
Le « grand emprunt » vise donc à donner une impulsion publique forte pour inverser la tendance française à prendre du retard dans le domaine de l'accumulation des savoirs et de l'innovation, et mettre la France au niveau des standards internationaux les plus élevés. Au total, et selon les documents explicatifs fournis par le ministère en charge de l'économie, les dépenses financées par l'emprunt national augmenteraient la croissance de près de 0,3 points de PIB par an sur la décennie. Ce sursaut de croissance devrait permettre d'accélérer le passage de l'économie française vers une économie de la connaissance où le triptyque recherche/innovation/industrie serait au coeur du développement.
Outre ses effets positifs sur notre trend de croissance et les structures de notre économie, l'effort d'investissement porté par le « grand emprunt » devrait contribuer à « passer le cap » de la crise. Ainsi, sur un plan conjoncturel, les dépenses du « grand emprunt » prennent, dans une certaine mesure, le relais du plan de relance, qui a déjà permis à la croissance de redevenir positive au deuxième trimestre de cette année, ainsi que de la réforme de la taxe professionnelle. « Élément de la stratégie de sortie de crise », le « grand emprunt » vise, selon le Gouvernement, à « assurer une reprise durable à partir de 2010 ».
3. 35 milliards d'euros de soutien à une économie durable de la connaissance
L'affectation d'une enveloppe de 35 milliards d'euros au soutien direct de l'économie française s'inscrit dans la droite ligne des grandes politiques industrielles menées par notre pays depuis les années 60, qui lui ont permis de faire émerger de véritables filières d'excellence reconnues au niveau mondial (aéronautique, nucléaire...).
Il s'en distingue cependant à plusieurs égards : dans son montant, particulièrement élevé, et surtout dans ses modalités. Les financements publics ne serviront pas, en effet, à alimenter la commande publique sur un petit nombre de projets de grande ampleur, mais à irriguer une multitude de projets dans des domaines innovants et prospectifs proposés et portés par les acteurs privés. Au contact direct du marché, ces derniers semblent en effet les mieux placés pour déterminer les secteurs les plus porteurs et les plus prometteurs.
Dans ce cadre, l'État et les pouvoirs publics n'agiront pas comme prescripteurs, mais davantage comme accompagnateurs, coordinateurs et facilitateurs. Par leur intervention, ils mettront à disposition des porteurs de projets les fonds que ceux-ci ne sont pas toujours en mesure de lever sur les marchés financiers et feront se rencontrer des acteurs que leurs intérêts rapprochent.
L'enveloppe de 35 milliards d'euros consacrée au « grand emprunt » devrait, par effet de levier vis-à-vis des financements privés, locaux et européens, correspondre à un investissement total de plus de 60 milliards d'euros selon la commission Investir pour l'avenir . Elle sera ventilée en cinq grands axes permettant de financer des « investissements d'avenir », dans des proportions fixées par la figure ci-dessous. Ces investissements reprennent les préconisations de ladite commission, laquelle reprend elle-même les orientations fixées par le Président de la République le 14 décembre 2009.
Trois des cinq axes précités (l'industrie et les PME ; le développement durable ; l'économie numérique), qui représentent 16,1 milliards d'euros, soit 46 % de l'ensemble des crédits, relèvent de la compétence directe de votre commission et font donc l'objet du présent rapport pour avis 4 ( * ) .
Répartition des investissements par secteur (en milliards d'euros et en pourcentages)
Quant aux actions dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui relèvent plus spécifiquement de la commission des affaires culturelles mais intéressent également votre commission du fait de leurs implications étroites en matière d'innovation industrielle, elles s'élèvent à 18,9 milliards d'euros - soit 53 % du total - selon quatre priorités :
- doter la France d'universités de stature mondiale (10 milliards d'euros). 8 milliards serviront à doter un petit nombre de campus de visibilité internationale, 1,3 milliard va compléter l'opération campus et 1 milliard ira au développement du campus scientifique de Saclay, avec l'ambition d'en faire le plus important d'Europe ;
- favoriser le développement de l'alternance (500 millions d'euros) et de l'égalité des chances (500 millions d'euros, notamment pour la création d'internats d'excellence) ;
- investir 8 milliards d'euros dans la recherche. 3,5 milliards d'euros seront mobilisés pour la valorisation de la recherche publique, notamment en intensifiant le lien avec le monde économique et le développement des applications industrielles ; 2 milliards d'euros soutiendront l'équipement des meilleurs laboratoires de recherche et 2,4 milliards la recherche médicale et les biotechnologies.
B. UNE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE ORIGINALE AU REGARD DE CELLE DU « PLAN DE RELANCE »
La manière dont les dépenses du « grand emprunt » s'inscrivent dans le budget s'inspirent en partie de la méthode que la loi de finances rectificative du 4 février 2009 avait retenue pour la mise en place du « plan de relance » de l'économie.
1. Les quelques points communs
Le projet de loi de finances rectificatives du janvier 2010 reprend du « plan de relance » de l'économie le principe de la création de programmes budgétaires spécifiques. Le « grand emprunt » se décline ainsi en 14 programmes originaux, qui s'ajoutent aux programmes du budget déjà existants. Cette méthode permet d'isoler, au sein de la dépense globale, les dépenses spécifiques du « grand emprunt » et, ainsi, d'assurer à la fois la lisibilité des actions entreprises et la sanctuarisation des crédits destinés à financer les investissements d'avenir.
Source : projet de loi de finances rectificative pour 2010
Il est créé un poste de Commissaire général à l'investissement (CGI), placé directement sous l'autorité du Premier ministre et chargé de suivre la mise en oeuvre du « grand emprunt ». Cette structure centralisée jouera un rôle de pilotage analogue à celui du ministère de la relance, même si le CGI n'a pas lui-même rang de ministre.
2. Les nombreuses différences
Il n'est pas créé une mission budgétaire spécifique pour le « grand emprunt ». En effet, contrairement au « plan de relance », dont les trois programmes avaient été rassemblés au sein d'une mission dédiée, les quatorze programmes du « grand emprunt » sont dispersés au sein des missions « pérennes » du budget. Votre rapporteur pour avis estime que c'est un choix pertinent car l'exécution de la mission « plan de relance de l'économie » a montré que le choix d'une mission dédiée ne présentait pas que des avantages.
La méthode retenue pour inscrire le « grand emprunt » dans le budget 2010 profite donc des enseignements livrés par l'expérience du « plan de relance ». Le ministère de la relance étant une structure de pilotage légère, et non pas une administration gestionnaire, les crédits ouverts sur la mission « plan de relance » pour 2009 ont, en effet, été intégralement redirigés vers leurs utilisateurs finaux, soit au moyen de décrets de transfert, soit par versement direct à des opérateurs de l'État. Qu'ils aient emprunté l'un ou l'autre de ces circuits, les crédits budgétaires de la mission « plan de relance de l'économie » ont donc eu pour conséquence, dans les faits, d'accroître les crédits de certaines missions « pérennes » du budget, et ce dans des proportions parfois fortes par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Ainsi, la mission « économie », dotée d'environ deux milliards d'euros par la loi de finances pour 2009, a absorbé plus de 40 % des moyens de la mission « plan de relance de l'économie », ce qui s'est traduit par une multiplication par trois de ses crédits initiaux. La réalité de son exécution n'a donc eu que peu de lien avec ce qu'affichait la loi de finances initiale pour 2009.
Faire le choix d'une mission dédiée aux « investissements d'avenir » se serait traduit par une perte de lisibilité comparable pour certaines missions du budget 2010, notamment les missions « économie » et « recherche et enseignement supérieur », puisque le « grand emprunt » conduit à accroître leurs moyens, respectivement, de 8 et 25 milliards d'euros.
Dans ces conditions, la méthode consistant à créer des programmes budgétaires pour porter spécifiquement les crédits du « grand emprunt », sans pour autant les réunir dans une mission dédiée, permet d'assurer la lisibilité et le suivi des dépenses d'avenir tout en évitant la perte de lisibilité des autres missions du budget . C'est donc une méthode optimale.
Enfin, les liens entre l'État et les opérateurs concrètement chargés de mettre en oeuvre les « dépenses d'avenir » sont renforcés. Une gouvernance spécifique doit, en effet, être mise en place chez les organismes gestionnaires qui pourront utiliser les fonds uniquement dans le respect des conditions fixées dans le cadre de conventions de gestion signées avec l'État 5 ( * ) . On notera qu'un amendement de M. Michel Bouvard a, par ailleurs, prévu l'avis de la commission de surveillance de la CDC sur l'ensemble des concours que celle-ci apportera à la mise en oeuvre des investissements d'avenir.
C. DES CONSÉQUENCES LIMITÉES SUR LES FINANCES PUBLIQUES
1. Un impact modeste sur le déficit au sens du traité de Maastricht
L'impact du « grand emprunt » sur les finances publiques peut être apprécié selon une compatibilité budgétaire, qui retrace les encaissements et les décaissements au cours de l'exercice, mais aussi selon une compatibilité en droits constatés, qui a notamment pour conséquence de requalifier certains flux budgétaires en constitution ou destruction d'actifs. C'est cette dernière approche qui est retenue par la comptabilité nationale et Eurostat pour apprécier le déficit public et la dette publique au sens du traité de Maastricht et qui, de fait, est la plus pertinente pour apprécier la situation financière de l'État, dans la mesure où elle tient compte de l'impact patrimonial des choix budgétaires.
Si l'on raisonne en comptabilité de caisse, la mise en oeuvre du « grand emprunt » se traduit bien entendu par l'ouverture de 35 milliards d'euros de crédits supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, et donc, toutes choses égales par ailleurs, par un creusement d'un montant équivalent du déficit. Le déficit prévisionnel établi par le projet de loi de finances rectificative est cependant inférieur à 35 milliards d'euros (en l'occurrence 31,9 milliards), car le projet de loi anticipe également d'autres mouvements de caisse (surplus de rentrées fiscales, coût de la charge de la dette générée par le « grand emprunt », annulations de crédits...).
Si l'on raisonne en comptabilité nationale, l'impact du « grand emprunt » sur les finances publiques pour 2010 apparaît beaucoup plus modeste . En effet, une part majoritaire des dépenses du « grand emprunt » (22 à 25 milliards d'euros, soit entre 63 % et 71 % du total des crédits) ne correspond pas à des dépenses de fonctionnement ou d'intervention, mais à des constitutions d'actifs sous forme de prises de participations (3,6 milliards d'euros), de prêts (2,9 milliards d'euros) et de dotations non consomptibles 6 ( * ) (15,5 milliards d'euros). Il y a encore une incertitude quant au fait de savoir si les avances remboursables, qui représentent 8 % des dépenses du « grand emprunt », correspondent à du « déficit maastrichtien » ou pas. Cela dépendra du traitement que fera Eurostat de la question. Cet examen se fera au cas par cas, selon les conditions encadrant le remboursement. Quoi qu'il en soit, en tenant compte de cette incertitude, le « déficit maastrichtien » peut être estimé entre 10 et 13 milliards 7 ( * ) d'euros sur le total de la période de mise en oeuvre des dépenses du « grand emprunt », soit cinq ans. Si l'on prend comme hypothèse un rythme des paiements progressif et uniforme des dépenses sur cinq ans, au fur et à mesure de la sélection des projets d'investissements 8 ( * ) , on obtient un impact budgétaire au sens du traité de Maastricht de 2 à 2,6 milliards d'euros par an .
2. La compensation du supplément de service de la dette généré par le « grand emprunt »
Le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'État » au sein de la mission budgétaire « Engagements financiers de l'État » enregistre une ouverture de crédits de 500 millions d'euros, qui correspond au coût estimé du supplément de service de la dette occasionné, en 2010, par le financement du « grand emprunt ».
Pour compenser cette augmentation des dépenses courantes de l'État, la loi de finances rectificative pour 2010 procède à des annulations équivalentes de crédits sur des dépenses de fonctionnement réparties sur les autres missions budgétaires.
Votre rapporteur pour avis se félicite de cette mesure de saine gestion.
3. Un mode de financement qui limite les besoins en trésorerie de l'État
Le financement des projets d'investissement par l'octroi de dotations non consomptibles est une méthode relativement originale qui semble présenter certains avantages :
- la dotation est immédiate, ce qui donne aux attributaires l'assurance qu'ils disposeront bien de la totalité des sommes prévues ; c'est une différence par rapport à une loi de programmation classique, puisque l'expérience a montré que les dépenses initialement « programmées » ont généralement tendance à être revues à la baisse d'une année sur l'autre ;
- la dotation n'est pas immédiatement consommable mais bloquée sur un compte auprès du Trésor ; l'État en dispose ainsi pour sa trésorerie.
D. DES QUESTIONS RESTANT TOUTEFOIS EN SUSPENS
1. Une gouvernance à conforter
La gouvernance du « grand emprunt » sera assurée au moyen de trois structures.
La première est le Commissariat général à l'investissement (CGI), présidé par un commissaire éponyme. Créé par le décret n° 2010-80 du 22 janvier 2010 relatif au commissaire général à l'investissement, ce poste a été confié à M. René Ricol. Placé sous l'autorité du Premier ministre, celui-ci sera chargé de la coordination générale du programme, ce qui impliquera pour lui :
- de préparer, en liaison avec les ministères concernés, la contractualisation avec les organismes chargés de la gestion des crédits et de coordonner l'élaboration des cahiers des charges qui serviront de base pour les appels à projets ;
- de préparer, sous l'autorité du Premier ministre, la position de l'État sur les décisions individuelles d'investissement ;
- d'évaluer la rentabilité des investissements publics entrepris dans le cadre des « priorités nationales », ex ante comme ex post ;
- de dresser un bilan annuel de l'exécution du programme d'investissements d'avenir pouvant conduire, le cas échéant, au redéploiement des crédits en cas de performance insuffisante.
Au sein des différents organismes gestionnaires chargés d'instruire les projets, des comités de gestion seront mis en place pour réaliser les appels à projets sur la base des cahiers des charges validés au niveau interministériel et établir la liaison à la fois avec le CGI et avec les acteurs économiques impliqués dans les projets.
Ces organismes feront l'objet de conventions de gestion avec l'État, détaillant précisément les modalités d'instruction des dossiers, d'emploi des fonds, et d'évaluation des résultats obtenus. Elles permettront d'assurer à l'État un pouvoir de décision en dernier ressort.
Les comités de gestion seront composés de façon à regrouper des personnalités qualifiées aptes à évaluer la pertinence des dossiers présentés. A cet égard, il sera fait appel à des personnalités extérieures à l'administration ayant une expérience du monde économique et à même de juger de la rentabilité des projets.
Enfin, il est prévu d'instituer un comité de surveillance du « grand emprunt ». Coprésidé par MM. Juppé et Rocard, et regroupant des parlementaires, des personnalités qualifiées et des partenaires sociaux, il sera plus spécifiquement chargé du suivi et de l'évaluation ex post des projets d'investissement. Il dressera un rapport public annuel, le CGI devant lui rendre régulièrement compte de l'exécution du programme.
Votre rapporteur pour avis attire l'attention sur l'importance de cette gouvernance dans la réussite globale du « grand emprunt » . Sa mise en oeuvre comportera en effet un nombre élevé de lieux de décision et de gestion des projets (les trois précités, auxquels s'ajouteront les échelons ministériels et l'arbitrage interministériel) entre lesquels il s'agira de créer des relations à la fois régulières, souples et opératoires.
Votre rapporteur pour avis a ainsi relevé une grande préoccupation des porteurs de projets potentiels quant à l'identification de leurs interlocuteurs. Il importera que les organismes gestionnaires soient aisément accessibles pour ces acteurs, et qu'ils jouent à leur égard le rôle de « guichets unique » pour le dépôt et l'instruction des projets. S'il convient de conserver une gouvernance « par le haut » pour garantir un effet structurant et éviter la dissémination des projets, il faudra également veiller à maintenir une transversalité minimale et à éviter un effet bottom-down dans la gestion des projets.
Il conviendra également, semble-t-il, de planifier et éventuellement de redéfinir les moyens des organismes gestionnaires en vue de la réception, de l'instruction et de la gestion des projets. Ces organismes vont, en effet, devoir faire face à un afflux massif de dossiers dont la rapidité de traitement influera en partie sur l'efficacité de la mise en oeuvre du « grand emprunt ». Ils auront également à gérer des fonds dont l'importance est sans commune mesure, pour certains, avec ceux qu'ils ont l'habitude de traiter. Là encore, une révision de leurs moyens de fonctionnement sera peut-être nécessaire.
Le CGI lui-même n'échappera d'ailleurs pas à une réflexion sur l'optimisation de ses moyens. En effet, l'efficacité de son action impliquerait, dans l'idéal, la mise en place en son sein d'un interlocuteur spécialisé par thématique et de comités de pilotage spécifiques par catégories de projets, soit des moyens matériels et humains sans commune mesure avec ceux qu'il possède pour l'instant.
Afin de clarifier la gouvernance, votre commission a, sur proposition de votre rapporteur pour avis, adopté un amendement à l'article 4 du projet de loi tendant à :
- donner valeur législative au comité de surveillance des investissements d'avenir et au CGI ;
- renforcer les missions de ce comité, afin d'éviter notamment qu'il puisse être reproché au CGI d'être à la fois juge et partie. Ce dernier s'occuperait ainsi de l'instruction des dossiers, tandis que le comité de surveillance des investissements procéderait à l'évaluation de leur mise en oeuvre ainsi que de leur impact socio-économique ;
- de prévoir la participation au comité de surveillance des investissements d'avenir de quatre députés et quatre sénateurs, désignés par le président de leur assemblée respective, afin que le président et le rapporteur général des commissions chargées des finances ainsi qu'un représentant des autres commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat puissent en être membres.
2. La nécessité de décloisonner les actions et les financements au sein d'« écosystèmes » cohérents
Le découpage de l'enveloppe de 35 milliards d'euros en sept missions et quatorze programmes, dotés chacun d'actions dont les montants des sous-actions ne sont pas nécessairement tous précisés, s'il amoindrit parfois la lisibilité du projet de loi, présente en revanche l'avantage de procurer de la souplesse aux gestionnaires des crédits au regard de l'évolution des besoins ressentis. S'il est en effet possible - et souhaitable, pour le contrôle parlementaire - de préciser les grandes masses d'affectation des crédits au niveau de chaque programme - dont les montants font chacun l'objet d'une approbation lors de l'examen du texte -, il convient en revanche de conserver une certaine liberté dans la répartition des enveloppes entre actions et sous-actions contenues dans ces programmes au regard des projets présentés .
Il paraît ainsi indispensable, en vue de donner un maximum d'efficacité à la dépense publique, d'opérer une gestion horizontale et décloisonnée des projets et des financements en créant de véritables « écosystèmes » cohérents. De nombreuses personnes auditionnées par votre rapporteur pour avis ont souhaité une mise en oeuvre « collaborative » et « participative » des actions du « grand emprunt ». En effet, les secteurs d'activité visés par le texte ne sont pas étanches, certains projets aux problématiques connexes ne relevant pas nécessairement des mêmes programmes ou actions. Il en va ainsi, par exemple, des smart grids 9 ( * ) , qui ressortent à la fois des programmes « économie numérique », « développement durable », « industries et PME » et « recherche ». Et il en va pareillement du traitement de nombreux pôles de compétitivité, qui relèvent en outre du programme « enseignement supérieur ». Il importe donc d'éviter toute architecture en « silo » et de favoriser la coordination des sources de financement au sein de projets de nature transversale.
Par ailleurs, il semble à votre rapporteur pour avis indispensable de veiller à éviter toute discrimination dans l'allocation des crédits. A ce titre, il conviendra, dans la mesure du possible, de favoriser les acteurs de taille petite ou intermédiaire, et non les seuls grands groupes . Certes, la renommée et la fiabilité de ces derniers minimisent les risques pour l'investisseur public, qui peut être tenté de sécuriser ses financements en privilégiant de tels « grands comptes » de l'économie. Un tel biais irait cependant à l'encontre de l'esprit même du « grand emprunt », qui consiste à irriguer les très nombreux opérateurs économiques qui, bien que dynamiques et porteurs d'innovations souvent remarquables, ne parviennent pas, le plus souvent, à accéder à des financements adaptés à leurs besoins du fait de leur trop faible envergure. Il convient également, selon votre rapporteur pour avis, de traiter équitablement les acteurs de l'« ancienne » et de la « nouvelle » économie, mais également les entreprises récentes ou en phase de décollage et celles plus anciennement installées. L'une des faiblesses de l'économie française tient au manque de coopération entre les grandes entreprises et les PME-ETI 10 ( * ) . Dans ses usages, le « grand emprunt » devra veiller à favoriser l'émergence d'écosystèmes collaboratifs qui sont l'une des clefs de la compétitivité.
3. Un contrôle parlementaire limité
S'il n'est pas inexistant, le contrôle exercé par le Parlement sur les modalités d'exécution du « grand emprunt » semble relativement succinct.
Certes, le Parlement est naturellement saisi du présent projet de loi portant affectation des crédits du « grand emprunt » et est appelé à les voter après en avoir examiné l'opportunité.
De plus, les parlementaires seront directement représentés par quatre d'entre eux - deux députés et deux sénateurs, désignés par le président de leur assemblée respective - au sein du comité de surveillance des investissements, qui sera chargé du suivi et de l'évaluation de la mise en oeuvre du « grand emprunt ».
Enfin, le texte lui-même prévoit, dans son article 4, l'information régulière du Parlement au moyens de documents - les « jaunes » budgétaires - annexés chaque année au projet de loi de finances et retraçant la mise en oeuvre des mesures du « grand emprunt ». En outre, les 14 programmes nouvellement créés feront l'objet, au printemps 2011, de rapports annuels de performances (RAP) annexés au projet de loi de règlement de l'année 2010.
Cependant, les principes d'unité et d'annualité budgétaire sont l'objet d'un respect tout relatif. Ainsi que cela a déjà été exposé, les crédits seront ouverts, au sein du budget de l'État, sur des programmes sui generis et consommés en une seule fois d'un point de vue budgétaire. L'autorisation par le Parlement de dépenser 35 milliards d'euros est en effet délivrée immédiatement et définitivement par le seul vote du présent projet de loi . Leur consommation sera en revanche progressive, les organismes gestionnaires devant l'étaler sur les trois à cinq prochaines années, selon la répartition dans le temps des besoins.
Ce transfert de crédits en-dehors du budget de l'État, à des opérateurs qui les utiliseront sur plusieurs années, permet de sécuriser les enveloppes correspondantes, qui ne feront plus l'objet d'examens annuels les soumettant à un risque d'annulation ou de réaffectation lors de la conception ou du vote du budget. Il répond à la dérive qui avait consisté à réduire progressivement l'effort d'investissement de l'État, afin de limiter la dégradation des finances publiques. Il contredit, en revanche, les principes d'unité et d'annualité budgétaire, dans la double mesure où les mouvements de fonds correspondants ne seront plus retracés dans le budget de l'État et ne feront plus l'objet d'un contrôle chaque année par la représentation nationale.
Le rapporteur général du budget pour l'Assemblée nationale, M. Gilles Carrez, a largement relevé et commenté les faiblesses du contrôle parlementaire accompagnant ce projet de loi 11 ( * ) . Il a d'ailleurs fait adopter par les députés deux amendements. Le premier prévoit la transmission aux commissions des finances des deux assemblées de l'ensemble des conventions liant l'État aux organismes gestionnaires des fonds avant leur signature. Le second demande au Gouvernement de présenter, en annexe générale au projet de loi de finances de l'année, un rapport décrivant, pour les années précédentes, l'année en cours et les années à venir, les conséquences sur les finances publiques des investissements financés par les crédits ouverts sur les programmes créés par le présent texte. Il est précisé que ce rapport détaille leurs conséquences sur le montant des dépenses publiques, des recettes publiques, du déficit public et de la dette publique, en précisant les administrations publiques concernées.
Votre rapporteur pour avis approuve ces modifications apportées au projet de loi. Il considère qu'il revient également aux commissions dont les domaines de compétences sont concernés par les ouvertures de crédit proposées dans le présent projet de loi - et plus spécifiquement votre commission ainsi que la commission des affaires culturelles - d'exercer un contrôle régulier sur l'emploi de ces fonds. Celui-ci peut prendre diverses formes, dont l'audition des ministres ou des responsables administratifs concernés, la publication de rapports de suivi et d'évaluation, l'organisation de débats en séance publique...
C'est dans cet esprit qu'il a fait adopter par votre commission un amendement prévoyant la transmission des conventions signées entre l'État et les organismes destinataires des fonds du « grand emprunt », non seulement à la commission des finances de chaque assemblée, mais également à leurs commissions en charge de l'économie, ainsi que de la recherche et de l'enseignement supérieur.
Par ailleurs, votre rapporteur pour avis considère que le « grand emprunt » pourrait s'inspirer de l'exemple du « plan de relance » de l'économie. Le reporting trimestriel effectué par le ministère de la relance auprès des assemblées parlementaires et le fonctionnement de son portail internet ont en effet permis de suivre, quasiment en temps réel, le déroulement du plan de relance. Cet effort de transparence, qu'il convient de saluer, pourrait également être mis en oeuvre par le futur CGI.
4. Une eurocompatibilité des mesures à vérifier
Si la majorité des crédits prévus par le « grand emprunt » ne pose a priori pas de problèmes particuliers au regard de la réglementation communautaire, tel n'est pas le cas de ceux pouvant être analysés comme des aides financières à des entreprises, dont l'enveloppe totale avoisine 7 milliards d'euros, soit un cinquième du total des crédits.
Une société qui reçoit des pouvoirs publics un soutien de quelque nature que ce soit, accordé sur une base sélective, obtient un avantage sur ses concurrents, alors que l'article 87 du traité instituant la Communauté européenne interdit de manière générale le recours aux aides d'État dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres.
Cependant, dans certaines circonstances, l'intervention de l'État est nécessaire pour permettre un fonctionnement efficace et équitable de l'économie. Le droit européen prévoit bien de telles dérogations, notamment en matière de soutien à la recherche, au développement et à l'innovation des entreprises.
L'encadrement communautaire des aides d'État
à la recherche,
Applicables à partir du 1er janvier 2007, les dernières lignes directrices remplaçant l'encadrement de 1996 sur les aides à la recherche et développement sont valables jusqu'au 31 décembre 2013 12 ( * ) . Aux termes de cette réglementation, les aides doivent remédier à une défaillance du marché, elles doivent être bien ciblées et les distorsions de concurrence et d'échanges en découlant doivent être suffisamment circonscrites. Dans la mesure où elles respectent ces critères, peuvent être déclarées compatibles par la Commission, après notification des États membres et examen : - les aides en faveur de projets de recherche et développement ; - les aides aux études de faisabilité technique ; - les aides destinées à couvrir les frais liés aux droits de propriété industrielle des PME ; - les aides aux jeunes entreprises innovantes ; - les aides en faveur de l'innovation de procédé et d'organisation dans les services ; - les aides pour le recours à des services de conseil en innovation et de soutien à l'innovation ; - les aides pour l'engagement temporaire de personnel hautement qualifié à l'intention des PME ; - les aides aux pôles d'innovation. Les règles fixent notamment un taux maximal de subvention, ou « intensité de l'aide », qui est d'autant plus élevé que les activités aidées sont situées en « amont » de la filière recherche et développement. Ce taux maximal de subvention, qui varie selon la taille de l'entreprise aidée, est de 13 ( * ) : - 100 % pour la recherche fondamentale ; - 50 % (grandes entreprises) à 70 % (petites entreprises) pour la recherche industrielle ; - 25 % (grandes entreprises) à 45 % (petites entreprises) pour le développement expérimental. Ces taux, lorsqu'ils sont inférieurs à 100 %, peuvent être majorés sous certaines conditions : coopération entre entreprises, coopération avec un organisme de recherche, diffusion des résultats ou (pour les grandes entreprises) coopération transfrontalière ou avec au moins une PME. |
Il découle de la diversité de cette liste une marge de manoeuvre appréciable pour les aides prévues dans le cadre du « grand emprunt ». Par ailleurs, un règlement général d'exemption publié en 2008 par la Commission européenne 14 ( * ) assouplit le régime des aides. Les principaux apports de ce règlement consistent à rendre moins restrictive la définition de la PME, dont le chiffre d'affaires et le bilan sont désormais plus élevés, ainsi qu'à supprimer - sous certaines conditions - l'exigence d'une notification préalable des aides à la recherche, au développement et à l'innovation.
Il n'en reste pas moins que la procédure d'examen préalable, par les pouvoirs publics nationaux, de l'« eurocompatibilité » des aides prévues dans le cadre du « grand emprunt », ainsi que la notification de celles qui le nécessiteront auprès des institutions communautaires, requerra nécessairement certains délais et allongera d'autant l'instruction des dossiers. Votre rapporteur pour avis insiste donc sur la nécessité de procéder dès maintenant et aussi vite que possible à l'examen juridique des dispositions, afin de permettre une entrée en vigueur du texte dans les plus courts délais.
II. LE SECTEUR « FILIÈRES INDUSTRIELLES ET PME »
A. LA PRIORITÉ « CROISSANCE DES PME »
La faible taille des PME françaises et leur difficulté à « grandir » dans les années qui suivent leur création sont identifiées, depuis plusieurs années, comme des éléments-clé pour expliquer la dégradation du potentiel de croissance et de la compétitivité de la France. C'est en effet à travers le développement rapide des entreprises porteuses de projets techniques et commerciaux innovants que s'opèrent la recomposition du tissu productif national et la réallocation des ressources productives vers les domaines d'activité les plus dynamiques. Faciliter la croissance des PME et des ETI devrait donc avoir un impact macro-économique au niveau du potentiel de croissance.
Même si les causes de la panne de croissance des PME françaises sont multiples, il existe désormais un consensus assez large pour considérer que le principal goulet d'étranglement est lié aux difficultés d'accès aux financements externes, qu'ils soient bancaires ou de marché, de court ou de long terme. C'est pourquoi l'un des axes de la politique économique française consiste à faciliter l'accès de ces entreprises aux capitaux.
Beaucoup a été fait dans ce sens ces dernières années, notamment en utilisant le levier de la dépense fiscale [réforme du crédit d'impôt recherche (CIR), dispositif TEPA-ISF] ou en réorganisant divers opérateurs de l'État (création d'OSEO et du FSI, notamment). Tant du point de vue de la nature des actions engagées que de l'ampleur des moyens mobilisés, le « grand emprunt » se situe donc dans la continuité des réformes structurelles déjà entreprises. Les actions du programme « croissance des PME » s'attachent ainsi, pour l'essentiel, à consolider ou à compléter les dispositifs de financement déjà existants en identifiant les axes stratégiques d'investissement et en renforçant les moyens d'intervention des deux grands opérateurs de l'État que sont le Fonds stratégique d'investissement (FSI) et le groupe OSEO.
1. La création d'un fonds dédié au financement de l'amorçage des entreprises innovantes
L'amorçage est l'un des segments du marché du capital investissement. Ce dernier désigne, de manière générale, l'activité consistant à investir en fonds propres ou en quasi fonds propres dans une société innovante qui a besoin de capitaux pour se développer. L'amorçage correspond au segment amont du capital investissement : il s'adresse à une société qui existe déjà juridiquement, mais qui en est encore au stade de la mise au point du produit (prototype, essais sur l'animal ...), donc avant sa mise en marché. Cette phase, très risquée, s'achève lorsque le produit, enfin élaboré, est commercialisé. Le capital création ou post-création prend alors le relais pour financer les premières phases du développement industriel et commercial. Encore en aval, le capital-développement s'adresse aux entreprises en phase de maturité, qui ont validé le potentiel de leur marché et qui ont besoin de financements, moins risqués mais plus conséquents, pour accélérer leur croissance interne ou externe.
Le segment de l'amorçage est désormais identifié comme le maillon faible de la chaîne du capital investissement, ce qui justifie l'effort supplémentaire consenti dans le cadre du « grand emprunt ». Il existe en effet, un « trou de financement » ( financing gap ) qui correspond à cette phase du cycle de vie des entreprises. D'un côté, les prêts de la famille ou des amis ( love money ) ou l'investissement personnel des business angels permettent de trouver les quelques milliers ou dizaines de milliers d'euros nécessaires au pré-amorçage d'une entreprise innovante, quand l'entrepreneur dispose avant tout d'un projet (une idée de produit susceptible de rencontrer un marché). De l'autre, les investisseurs professionnels, banquiers ou fonds de capital risque, sont en mesure d'apporter des fonds de l'ordre du million d'euros et au-delà aux entreprises en phase de post-amorçage, qui peuvent mettre en avant un produit achevé et des perspectives de débouchés bien identifiées. Cependant, pour des besoins de financement intermédiaires de quelques centaines de milliers d'euros, on constate un manque de financeurs.
Ce niveau de financement excède en effet les capacités d'intervention du love money , tandis que les capital-risqueurs ne souhaitent pas s'y engager car cela ne correspond pas à leur coeur de métier. De fait, l'amorçage exige non seulement des capitaux, ce dont les capital-risqueurs disposent, mais aussi un apport d'expertise technique, juridique et commerciale, ainsi qu'un accompagnement personnalisé du porteur de projet sur une période de plusieurs mois, voire de plusieurs années, ce que les fonds de capital-investissement ne savent généralement pas faire. D'où la nécessité de développer ce métier spécifique de l'amorçage qui mêle apports de fonds, de temps et de savoir-faire.
C'est dans ce but que le projet de loi de finances rectificative pour 2010 propose d'ouvrir un crédit de 400 millions d'euros au FSI fléché vers le financement de l'amorçage, ce qui constitue une somme considérable à l'échelle de ce domaine d'activité. On sait que le FSI, à travers son programme France Investissement, est déjà l'un des acteurs majeurs du marché du capital-investissement, présent théoriquement sur ses différents segments, de l'amorçage au développement. Il est en réalité très peu actif, actuellement, sur l'amont de la chaîne du capital-investissement. La raison en est sans doute que le FSI est avant tout un fonds d'investissement et qu'il ne possède donc pas le savoir-faire très particulier que requiert l'accompagnement d'une entreprise en phase d'amorçage.
Cela explique probablement le choix de la stratégie « indirecte » retenue par les pouvoirs publics pour stimuler l'amorçage. En effet, les nouveaux crédits attribués au FSI sont supposés lui permettre d'alimenter un nouveau fonds national d'amorçage, qui financera à son tour les dispositifs d'amorçage publics existants, qu'ils soient autonomes ou liés aux structures de valorisation de l'innovation placées auprès de grands organismes de recherche. Il ne s'agirait donc pas, pour le FSI, de se substituer aux spécialistes de l'amorçage, mais de s'appuyer sur eux en démultipliant leurs possibilités financières d'intervention.
Juridiquement, ce nouveau fonds national d'amorçage prendra la forme d'un fonds commun de placement à risques (FCPR), dont l'État sera l'unique actionnaire. Au niveau de la gouvernance, le règlement du FCPR déterminera la politique d'intervention, ainsi que les objectifs assignés au fonds national. En outre, dans un souci d'évaluation de l'impact de cette politique, il est prévu qu'à chaque prise de participation dans un fonds d'amorçage, une convention entre le fonds national et le fonds concerné précise les modalités d'un reporting permettant de connaître l'évolution économique des entreprises financées, notamment en termes d'emploi.
Votre rapporteur pour avis se félicite de l'attention portée à la question de l'amorçage. Le développement des entreprises innovantes exige en effet la continuité de la chaîne de financement du capital investissement, du pré-amorçage jusqu'à la prise de relais par les marchés financiers, et donc le comblement du financing gap qui existe actuellement.
Dans la mesure où semble désormais se dessiner un partage clair entre le FSI et OSEO, le premier intervenant en fonds propres à la différence du second, le choix de confier la gestion du fonds national d'amorçage au FSI semble cohérent. Votre rapporteur pour avis note toutefois qu'OSEO, à travers OSEO Innovation, est déjà présent dans le soutien aux start-up dans les phases de pré-amorçage et d'amorçage et qu'il possède l'expertise utile pour identifier et accompagner les projets prometteurs. Cela pose la question du développement des synergies entre OSEO et le FSI sur ce segment précis d'activité.
2. Le financement de l'activité du groupe OSEO
Issu du rapprochement en 2005 de l'Agence nationale de valorisation de la recherche en charge de l'aide à l'innovation (ANVAR), de la Banque du développement des PME (BDPME) et de la Sofaris-Garantie, le groupe OSEO a absorbé l'Agence de l'innovation industrielle (AII) en janvier 2008 et intervient désormais dans trois domaines-clé du financement des entreprises :
- le financement de l'innovation à tous les stades de vie des entreprises (OSEO Innovation) ;
- le financement bancaire ou plutôt du co-financement , puisqu'OSEO intervient aux côtés des établissements de crédit (OSEO Financement) ;
- la garantie sur les prêts ou les investissements en fonds-propres (OSEO Garantie).
On constate que l'activité d'OSEO a connu une forte croissance depuis 2008, ce qui s'explique :
- par la mise en place de mesures d'urgence de soutien des PME et des ETI dans le cadre du plan de relance ;
- par la montée en puissance de la politique structurelle visant à faciliter l'accès des entreprises aux fonds nécessaires au financement de l'innovation et de leur croissance.
Ainsi, comme l'illustre le tableau suivant, entre 2008 et 2009, le montant des risques pris par OSEO a crû de 22 % dans le domaine du soutien à l'innovation, de 76 % dans celui de la garantie et de 25 % dans celui du financement de long terme. Au total, les risques pris par le groupe OSEO sont en augmentation d'un tiers sur cette période, pour atteindre le niveau record de 13 389 milliards d'euros.
Or, des règles prudentielles issues de l'accord Bâle II, à l'application desquelles veille la commission bancaire, s'imposent à OSEO et l'obligent à respecter un certain ratio entre les risques pris dans ses activités de financement et de garantie et le niveau de ses fonds propres. Le développement récent des engagements financiers d'OSEO implique donc le renforcement de son haut de bilan, faute de quoi le groupe ne respecterait plus les règles prudentielles. C'est la raison principale qui justifie le renforcement des fonds propres à hauteur de 500 millions d'euros.
Source : informations recueillies auprès d'OSEO
Votre rapporteur pour avis prend note par ailleurs qu'un amendement du Gouvernement, adopté par l'Assemblée nationale, modifie le circuit financier permettant le renforcement du capital d'OSEO. Sur les 500 millions d'euros prévus, 360 devraient en effet provenir de l'affectation de la taxe exceptionnelle sur les bonus. Cela a un impact sur le budget de l'État (moindre endettement), mais ne se traduit pas par l'octroi d'un surcroît de ressources à OSEO.
3. Le prêt au groupe OSEO
Le projet de loi de finances rectificative pour 2010 prévoit l'octroi d'un prêt à OSEO d'un milliard d'euros afin de permettre le refinancement de l'ensemble des activités du groupe. Ce prêt, inscrit sur le compte de concours financier « prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », vise en particulier à financer une des mesures du « plan PME » annoncé en octobre 2009 par le Président de la République, à savoir la distribution des contrats de développement participatifs (CDP) aux PME et ETI désireuses de renforcer leur haut de bilan sans perdre le contrôle de leur capital.
Le plan PME d'octobre 2009 : financement en fonds propres ou quasi-fonds propres des PME et des ETI Le 5 octobre 2009, le Président de la République a annoncé un nouveau plan, de deux milliards d'euros, pour consolider les fonds propres et encourager l'investissement des PME. Ce plan prévoit que les deux opérateurs principaux de l'État dans ce domaine, OSEO et le FSI, interviennent chacun à hauteur d'un milliards d'euros : - OSEO met en place un CDP. Il s'agit d'un prêt de longue durée, de 5 à 7 ans, sans garantie, à remboursement différé. L'octroi repose sur un principe de co-financement entre les investisseurs en fonds propres ou quasi fonds propres (un euro d'apport de fonds propres permettant l'apport d'un euro à travers le CDP) et avec les banques (la levée de deux euros de dette bancaire permettant l'apport d'un euro sous forme de CDP) ; - le FSI finance, pour 100 millions d'euros, un nouveau fonds de consolidation des entreprises ; il réserve une ligne d'investissement direct de 300 millions d'euros pour les entreprises à fort potentiel de croissance ; il injecte 300 millions d'euros dans les fonds régionaux de capital-risque et consacre, enfin, 300 millions au financement de quasi fonds propres sous forme d'obligations convertibles. |
Votre rapporteur pour avis souscrit à la nécessité d'assurer le financement des mesures décidées dans le cadre du dernier « plan PME » en faveur du renforcement du haut de bilan des PME et des ETI.
Une question peut toutefois se poser au sujet des modalités de refinancement d'OSEO. En effet, votre rapporteur pour avis se demande si, au lieu d'accorder au groupe un renforcement des fonds propres de 500 millions couplé à un prêt de 1 milliard d'euros, il n'aurait pas été préférable de lui accorder un montant de fonds propres plus important (par exemple un milliard d'euros) en réduisant à due concurrence l'enveloppe du prêt. Deux arguments plaident en faveur de cette modification.
Premièrement, elle aurait, dans le pire des cas, un impact neutre sur les comptes de l'État . D'une part, en effet, que l'État fournisse à OSEO des fonds propres ou une avance, cela l'oblige dans l'un et l'autre cas à emprunter la même somme, au même prix, sur les marchés financiers. Le coût du refinancement pour l'État est donc identique. D'autre part, si l'État réduit le montant de son prêt à OSEO en contrepartie d'une dotation en fonds propres plus importante, il subit une perte de revenu liée au fait que le prêt consenti à OSEO est un prêt payant. En prêtant moins, l'État perd donc une fraction de la rémunération de ce prêt. En contrepartie cependant, il voit sa rémunération d'actionnaire d'OSEO augmenter car ce dernier, grâce à des conditions de refinancement moins onéreuses, voit son revenu d'exploitation s'améliorer. Au total, d'après les simulations fournies par OSEO, une dotation en fonds propres d'un milliard d'euros couplée à un prêt de l'État de 500 millions d'euros se traduirait par un gain pour l'État compris dans une fourchette de 3 à 18 millions d'euros .
Deuxièmement, elle aurait impact bénéfique sur les capacités d'intervention d'OSEO auprès des PME :
- OSEO, en effet, en tant qu'emprunteur, va prochainement être soumis à la notation des agences internationales spécialisées, note qui contribuera à déterminer le degré de risque du groupe et donc le coût auquel il pourra se refinancer sur les marchés. Or, l'importance des fonds propres est l'un des critères essentiels pour accéder à une note élevée et bénéficier de taux d'intérêt avantageux. Dans cette perspective, une dotation plus généreuse en fonds propres pourrait contribuer à réduire le coût du refinancement d'OSEO à l'avenir ;
- à plus court terme, un refinancement par fonds propre plutôt que par endettement semble avoir un effet de levier plus fort sur la capacité d'intervention d'OSEO auprès des PME . En effet, en s'endettant auprès de l'État pour financer ses propres engagements envers les PME, OSEO prend un risque pour lui-même, ce qui l'oblige, par ricochet, à limiter d'autant ses prises de risque auprès des entreprises. Ainsi, d'après les estimations fournies par OSEO, un refinancement d'un euro sous forme de fonds propres permet au groupe d'accorder 10 euros de risques supplémentaires aux PME, alors que ce ratio est seulement de 1 pour 7 euros dans le cas d'un refinancement par la dette.
4. Le renforcement des pôles de compétitivité
Les pôles de compétitivité constituent depuis 2004 un instrument important de politique industrielle et de dynamisation des territoires .
Comme le souligne le rapport final des États généraux de l'Industrie 15 ( * ) , « la mise en place des pôles de compétitivité a permis en quatre ans de mettre en oeuvre pour plus de quatre milliards d'euros de projets collaboratifs financés à 30 % par l'État et les collectivités territoriales, le reste par les entreprises » .
La politique des pôles est aujourd'hui entrée dans une seconde phase appelée « Pôles 2.0 », avec 1,5 milliard d'euros affectés par le Gouvernement sous forme de crédits budgétaires de l'État et d'interventions de la CDC.
La politique des pôles de compétitivité a été lancée en 2004 lors du comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires (CIACT) du 14 septembre pour rassembler, sur un territoire donné, des entreprises, des centres de recherche et des organismes de formation dans une stratégie commune de développement sur le modèle des clusters européens. Elle s'inscrit dans la nécessité d'accroître les moyens de la compétitivité de la politique industrielle française, via une mise en réseau efficace et dynamique. Sa mise en oeuvre repose sur des appels à projets, basés chacun sur un cahier des charges. Après le bilan positif de la première phase (2006-2008) de cette politique, l'État a décidé d'accorder 1,5 milliard d'euros, tout au long d'une seconde phase (2009-2011), qui seront principalement dédiés à trois objectifs : - le renforcement de l'animation et du pilotage stratégique des pôles, notamment avec la création des « contrats de performance » ; - de nouvelles modalités de financement, notamment pour les plates-formes d'innovation ; - le développement d'un écosystème d'innovation et de croissance, via notamment les financements privés et la recherche de meilleures synergies territoriales. On compte aujourd'hui 71 pôles de compétitivité. Ces derniers regroupent 9 000 chercheurs travaillant sur 1 000 projets labellisés. Parmi eux, on compte sept pôles mondiaux et dix pôles à vocation mondiale. |
Si les crédits alloués à la politique « Pôles 2.0 » s'élèvent au même montant que lors de la première phase, le Gouvernement a bien indiqué qu'il souhaitait aller plus loin. Certes, les grands principes du premier dispositif mis en oeuvre sont maintenus :
- les pôles demeurent des lieux de collaboration entre entreprises, laboratoires de recherche et universités ;
- la priorité est donnée aux projets collaboratifs de recherche et développement ;
- les structures locales d'animation des pôles bénéficient d'un appui public ;
- l'action des collectivités territoriales et celle de l'État sont coordonnées.
Mais les nouveaux axes retenus pour cette deuxième période de la politique des pôles de compétitivité tendent à les faire se doter d'une véritable stratégie à trois-cinq ans, inscrite dans une feuille de route, et à les responsabiliser plus fortement via la signature des « contrats de performance ». Ainsi, les enseignements tirés du bilan de la première phase amènent à un nouvel objectif : se positionner à la fois dans leur environnement concurrentiel, tenant compte de toutes ses dimensions technologique, économique, commerciale et internationale, et bâtir un plan stratégique d'actions à court ou moyen terme.
La priorité, pour cette seconde phase, est de créer les conditions nécessaires au développement de véritables écosystèmes d'innovation , sur le modèle des clusters internationaux.
Source : http://www.competitivite.gouv.fr/
Le projet de loi de finances rectificative pour 2010 prévoit ainsi, dans ce contexte, d'affecter une enveloppe supplémentaire de 500 millions d'euros dans le domaine des projets structurants des pôles de compétitivité.
La répartition des crédits à l'intérieur de ce programme pourra être ainsi ventilée :
- 300 millions d'euros, gérés par OSEO , seront consacrés au cofinancement de projets de recherche et développement visant à structurer les filières industrielles.
Ces crédits prendront la forme de 150 millions d'euros de subventions et de 150 millions d'euros d'avances remboursables. Ils viendront ainsi compléter, pour des projets de plus grande ampleur, les projets de recherche et développement collaboratifs déjà financés par le fonds unique interministériel des pôles de compétitivité (FUI). Ces projets impliquant à la fois les grandes entreprises et les PME, mais aussi les laboratoires, votre rapporteur pour avis estime que l'apport de ces fonds devra surtout mettre l'accent sur le financement des projets industriels de recherche appliquée ;
- 200 millions d'euros, gérés pour le compte de l'État par la CDC , pour le cofinancement de plateformes mutualisées d'innovation pour les pôles de compétitivité.
Cette intervention prendra deux formes : 100 millions d'euros de subvention à ces plateformes et 100 millions d'euros de prise de participations minoritaires dans les plateformes ou dans un des éléments constitutifs de la plateforme.
Votre rapporteur pour avis rejoint à ce titre, les observations formulées par le groupe de travail relatif à la politique des pôles de compétitivité constitué au sein de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire du Sénat, qui avait insisté dans son rapport 16 ( * ) , publié en octobre 2009, sur le rôle essentiel de ces plateformes d'innovation, qui constituent des infrastructures regroupant des moyens, des services et des ressources humaines mutualisées .
En matière de gouvernance, le rapport final des États généraux de l'industrie , publié le 29 janvier 2010, souligne que les habitudes de partenariat liées à la mise en place des pôles de compétitivité affichent un bilan positif. Il ajoute néanmoins que, s'ils sont « le plus souvent motivés par la proximité géographique et l'appartenance territoriale » et qu'il est important de susciter, au niveau territorial, « des écosystèmes d'acteurs locaux jouissant d'une certaine autonomie d'organisation » . Il apparaît nécessaire, parallèlement, de prolonger cette approche territoriale par une approche « par filière » , plus globale, sur des thèmes clés.
A cet égard, le rapport préconise une véritable mise en réseau des pôles travaillant sur des thématiques proches pour « pouvoir démultiplier l'effet de levier, échanger sur les projets en cours, partager les bonnes pratiques et définir les axes de travail communs ». Le concept d'interpole est ainsi mis en avant et le « grand emprunt » devrait renforcer cette dynamique.
Votre rapporteur pour avis estime qu'il est en effet indispensable de privilégier une gouvernance globale plus transverse des pôles de compétitivité , plus à même d'engendrer un effet structurant, plutôt que des groupes ad hoc , efficients seulement à court terme. Par ailleurs, l'évaluation des projets candidats pourrait utilement veiller à ce que les grandes entreprises ne soient pas les seules concernées, mais que soit au contraire privilégiée une véritable coopération avec les petites entreprises, dont la capacité en innovation et en ruptures technologiques n'est plus à prouver, au sein d'un écosystème collaboratif .
5. Le financement de l'économie sociale et solidaire
Cette action est dotée de 100 millions d'euros qui serviront à financer un fonds de soutien aux organismes de l'économie sociale.
Le secteur de l'économie sociale désigne l'ensemble des acteurs intervenant dans le champ de l'économie marchande et monétaire (ils produisent et vendent), mais sans suivre pour autant un but lucratif. Il s'agit donc d'entreprises de type non capitaliste. Ce secteur de l'économie est loin d'être marginal. Selon l'INSEE, en 2007, il représente près de 10 % de l'emploi salarié national hors agriculture.
Parce qu'ils ne sont pas tournés vers l'accumulation du capital et la maximisation du profit, et qu'ils fonctionnent donc selon une logique inverse des banques et des fonds d'investissements classiques dont les placements sont décidés sur selon des critères d'optimisation du gain, les acteurs de l'économie sociale ont le plus grand mal à lever les capitaux nécessaires à leur développement. Pourtant, ils peuvent être le vecteur d'innovations sociales dont l'impact, sinon sur le PIB, du moins sur le bien-être collectif, est significatif .
On peut citer, notamment, le rôle des structures d'insertion par l'activité économique : qu'elles soient de statut associatif ou commercial, ces organisations contribuent à l'insertion des personnes exclues du marché du travail lorsque leur distance à l'emploi est telle que les formes conventionnelles d'accompagnement au retour à l'emploi sont inopérantes. Proposant une mise en situation de travail au sein d'activités économiques variées (bâtiment, nettoyage industriel, imprimerie, restauration ou encore aide à domicile), elles ont cette spécificité de traiter le problème de l'exclusion dans sa globalité, en offrant un accompagnement qui prend en compte l'ensemble des problématiques de la personne (santé, logement, endettement, formation ...).
Dans le domaine agricole, on peut également citer les associations pour le maintien d'une agriculture paysanne (AMAP), qui visent à préserver l'existence de fermes de proximité dans une logique d'agriculture durable et socialement équitable (fixation d'un prix qui rémunère le producteur). Dans ce cadre, un groupe de consommateurs s'engage à soutenir un maraîcher en préfinançant sa récolte pour l'aider et en apportant une aide à la ferme (récolte, désherbage ...).
La préconisation faite par la commission Investir pour l'avenir , reprise dans le projet de loi de finances rectificative pour 2010, est d'accompagner le développement de ce secteur d'activité par des outils de financement adaptés à ses caractéristiques. C'est à ce besoin que répond la dotation du fonds de soutien aux organismes de l'économie sociale.
B. LA PRIORITÉ « AUTOMOBILE, TRANSPORT TERRESTRE ET MARITIME »
La croissance des trafics de voyageurs, de marchandises et la progression des transports routiers est en grande partie responsable des émissions de polluants et de gaz à effet de serre. La nécessité de garantir les approvisionnements énergétiques et les engagements de réduction des émissions de 80 % d'ici 2050 appellent le développement et la mise en oeuvre rapide de nouvelles technologies de mobilité plus propres, d'autant que, en matière d'émissions de gaz à effet de serre, le secteur des transports est le premier émetteur de gaz carbonique (27 % des émissions en France de gaz à effet de serre, 33 % des émissions de CO 2 ). Ces émissions ont d'ailleurs connu une progression de 8 % entre 1990 et 2008.
C'est dans cette optique que le « grand emprunt » prévoit de confier un milliard d'euros à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) pour financer des programmes de recherche et développement et d'industrialisation, visant à réduire fortement l'impact des matériels de transport sur l'environnement. Des démonstrateurs - ou pré-prototypes - seront ainsi financés dans le cadre d'appels à projets, même si l'agence n'en a encore jamais lancé dans les secteurs ferroviaire et naval.
Le projet de loi de finances rectificative pour 2010 rejoint ainsi les préconisations du rapport de la commission Investir pour l'avenir , qui proposait de cofinancer des projets de démonstrateurs et de plateformes expérimentales dans tous les domaines de la mobilité durable et des véhicules du futur.
Ces crédits sont ouverts au sein d'un nouveau programme « véhicule du futur », créé au sein de la mission « écologie, développement et aménagement durables », dédié à l'expérimentation et à la promotion des technologies et organisations en matière de déplacement moins productrices de gaz à effet de serre. Les crédits alloués pourraient être répartis entre trois filières :
- 10 % pour le secteur de la construction navale ;
- 15 % pour le secteur ferroviaire (150 millions d'euros) ;
- 75 % pour le secteur de la construction automobile (750 millions d'euros).
Les projets financés dans le cadre de ces actions prioritaires seront sélectionnés par un comité de pilotage constitué par le CGI, dont le secrétariat sera assuré par l'ADEME et la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS).
Votre rapporteur pour avis constate que cette répartition des crédits est indicative et qu'elle aura vocation à être précisée et affinée au fur et à mesure de la mise en place des projets. Cette flexibilité permettra d'ailleurs d'adapter les actions aux priorités mises à jour.
1. La construction automobile
L'Union européenne a défini un objectif d'émission de CO 2 de 95 g par kilomètre pour les véhicules particuliers à l'horizon 2020.
Dans la lignée des États généraux de l'automobile, le « pacte automobile », présenté par le Président de la République le 9 février 2009, élaboré avec l'ensemble des acteurs du secteur, avait mis l'accent sur le soutien à l'innovation en prévoyant 250 millions d'euros de prêts bonifiés pour les programmes de recherche et développement collaboratifs et l'industrialisation des véhicules « décarbonés ».
Le « grand emprunt » permet de poursuivre cet effort dans le secteur automobile , via un fonds de 750 millions d'euros , principalement consacré, outre le financement d'infrastructures de charge de véhicules électriques, aux projets relatifs :
- au développement de moteurs thermiques optimisés ;
- au développement de la chaîne de traction électrique ;
- à l'allègement des masses ;
- à la recherche et développement dans le domaine de la recharge.
Votre rapporteur pour avis souligne que ces actions pourront aisément prendre appui sur les principaux pôles de compétitivité axés sur les transports du futur, comme les pôles « véhicule du Futur », « mobilité et transports avancés », « advancity » ou encore « ID4 car ». La gestion du financement de ces programmes doit être flexible et ne passera pas nécessairement par le biais d'appels à projets.
2. La construction ferroviaire
Dans le secteur ferroviaire , des efforts doivent être mis en oeuvre, en complément de l'engagement national pour le fret ferroviaire, signé le 16 septembre 2009. Ce dernier a pour ambition de relancer le fret ferroviaire pour atteindre les objectifs du « Grenelle de l'environnement ». En effet, les engagements pris dans la loi de programmation du 3 août 2009 relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement a fixé combinée aux objectifs du sommet de Copenhague impliquent de donner une nouvelle orientation au développement du transport de marchandises afin de le rendre plus performant et plus sobre en carbone.
Des travaux de recherche et développement doivent ainsi être engagés pour favoriser les innovations qui permettront à cette filière industrielle de demeurer compétitive :
- la conception d'une nouvelle génération motrice de trains à grande vitesse (TGV), plus performants d'un point de vue énergétique ; outre les trains et locomotives hybrides, il est nécessaire également de mettre l'accent sur les chaînes de traction innovantes faisant appel à de nouveaux types de moteurs de traction ;
- la mise au point de sous-stations capables de récupérer l'énergie issue du freinage et de la convertir en électricité ;
- l'innovation en matière de systèmes d'aide à la conduite ou encore via l'optimisation des systèmes APS (alimentation par le sol) des tramways.
Par ailleurs, les avancées sur la sécurité des logiciels complexes et l'usage des TIC doivent être soutenues pour mieux répondre aux besoins d'accroissement de la capacité de l'infrastructure ferroviaire existante et offrir à bord les services de haut niveau attendus par les voyageurs.
Un appel à projets doté de 150 millions d'euros sera lancé afin d'engager, en ce sens, des programmes de recherche et développement ainsi que la mise au point de démonstrateurs.
3. La construction navale
En matière de construction navale , 100 millions d'euros seraient investis pour financer des programmes permettant de développer le « navire du futur », moins consommateur d'énergie fossile, plus sûr et bénéficiant des innovations permises par les TIC.
Le « grand emprunt » s'inscrit ainsi dans la ligne des préconisations du récent « Grenelle de la mer » 17 ( * ) , qui recommandait le lancement d'un programme de recherche destiné à concevoir un navire « économe, opérationnel, sûr, propre et intelligent », avec pour objectifs des gains de 50 % de la consommation d'énergie fossile, le développement des énergies renouvelables et une réduction de 50 % de l'impact environnemental concernant tout type de navire.
Votre rapporteur pour avis se réjouit de l'effort conséquent consenti dans ce secteur. Toutefois, il est à noter que l'ADEME ne possède pas d'expérience particulière en matière navale et il sera donc important de renforcer son action par l'expertise de spécialistes de ce secteur.
C. LA PRIORITÉ « ÉTATS GÉNÉRAUX DE L'INDUSTRIE »
A la demande du Président de la République, le ministre chargé de l'industrie a lancé le 15 octobre 2009 les États généraux de l'industrie , qui ont pris la forme d'une vaste concertation de l'ensemble des acteurs de ce secteur, regroupés en ateliers, avec comme objectif de réfléchir à la viabilité du modèle industriel français, dans sa dimension économique comme dans sa dimension environnementale, et de proposer des pistes d'adaptation de ce modèle afin que l'industrie retrouve sa place centrale au coeur de l'économie française .
Autre volet de l'action dédiée au financement des entreprises innovantes au sein du programme « croissance des petites et moyennes entreprises », une enveloppe d'un milliard d'euros est réservée au financement des mesures qui seront prises dans ce cadre. Au moins 60 % de ces financements prendront la forme de prêts, d'avances remboursables ou de prises de participation.
L'accent sera particulièrement mis sur :
- des « prêts verts » bonifiés , accordés à des entreprises qui investissent pour améliorer leur compétitivité via l'amélioration de la performance environnementale de leur process industriel ou de leurs produits ; la moitié de l'enveloppe y sera consacrée sous la forme de prêts proprement dits (60 %) et d'une bonification de prêts accordés par des organismes bancaires (40 %) ;
- le financement, via des avances remboursables pour un montant de 185 millions d'euros, de la mise en place d'un dispositif en faveur de la relocalisation compétitive d'entreprises industrielles .
Le rapport final des États généraux de l'industrie 18 ( * ) a en effet observé que les stratégies de délocalisations d'entreprises vers des pays à faible coût de production, dits low cost country (LCC), n'avaient pas toujours bien évalué les gains de compétitivité potentiels et avaient souvent sous-estimé l'importance des coûts dits « cachés » induits par de telles implantations. Ce dispositif de relocalisation compétitive devrait ainsi prendre la forme d'un accompagnement des entreprises désireuses de délocaliser leur activité en dehors du territoire de l'Union européenne, notamment par le biais d'une aide à la réalisation d'études destinées à mettre en évidence les coûts complets, de benchmark et d'analyse de marchés cibles afin d'étudier la faisabilité, l'opportunité et les gains réels d'une relocalisation.
Votre rapporteur pour avis estime que l'effort gagnerait aussi à porter, parallèlement, à une amélioration plus en amont de l'environnement - sur le plan de la compétitivité - des entreprises.
L'ensemble de ces fonds sera géré par OSEO, sur la base de contrats indiquant les modalités de leur utilisation, signés par le Premier ministre après avis du CGI.
Enfin, une part de ces 2,5 milliards d'euros de crédits affectés au nouveau programme « croissance et développement des PME » créé au sein de la mission « économie » sera consacrée au financement d'une deuxième action, destinée à assurer la mise en place d'un fonds pour les entreprises sociales.
D. LA PRIORITÉ « ESPACE »
La France occupe, dans le domaine spatial, une position de leadership et représente environ 40 % des capacités européennes dans ce secteur. Elle rassemble aujourd'hui toutes les compétences dans les domaines scientifique, technologique et de maîtrise d'ouvrage, ainsi que dans le domaine industriel.
C'est pour conserver cette place de leader et pouvoir coopérer d'égal à égal avec les autres grandes puissances spatiales que le projet de loi de finances rectificative pour 2010 prévoit le financement de projets spatiaux ambitieux.
Il crée un nouveau programme « projets thématiques d'excellence », doté de 3,05 milliards d'euros, au sein de la mission « recherche et enseignement supérieur », et dont les crédits sont répartis entre trois actions différentes. Outre les équipements d'excellence et les biotechnologies dans le domaine de la santé, 500 millions d'euros sont ainsi consacrés au secteur spatial.
Ces fonds prendront la forme d'une dotation au Centre national d'études spatiales (CNES) et les projets sélectionnés par l'État seront gérés distinctement du reste de son budget.
Les crédits pourraient être répartis selon deux priorités :
- les travaux sur une nouvelle génération de lanceur baptisée Ariane 6 à travers le lancement d'un programme d'études et de démonstrations technologiques sur les différentes options ouvertes au niveau européen.
Le rapport sur l'avenir de la politique spatiale européenne en matière de lanceurs 19 ( * ) rendu au Premier ministre le 18 mai 2009 avait en effet préconisé d'initier le processus de définition puis de développement d'un nouvel outil stratégique de lancement, moins coûteux, tandis que le lanceur Ariane 5, qui a donné la capacité à l'Europe d'accéder librement à l'espace, arrive bientôt à la moitié de sa vie ;
- des projets de satellites , qui seraient choisis après avis du CGI, sur le fondement notamment de leur utilité économique et sociale.
Le CNES a, à cet égard, proposé un certain nombre de projets présentant le meilleur « retour sur investissement », c'est-à-dire pouvant être lancés immédiatement, et dont les applications rejoignent des enjeux primordiaux, comme par exemple l'observation directe par satellite des émissions de gaz à effet de serre :
le microsatellite MicroCarb, dédié à la mesure des flux de dioxyde de carbone, dont le lancement pourrait être prévu en 2014, permettrait de développer une véritable filière de surveillance du climat et de contrôle de la gestion d'une économie « décarbonée ». Le coût d'un tel projet est chiffré à 120 millions d'euros ;
le microsatellite CHARME, dédié à la mesure des flux de méthane, est un projet en coopération avec l'Allemagne et dont le coût s'élèverait pour la France à 60 millions d'euros pour un lancement en 2016. Il s'inscrit dans le cadre d'une politique industrielle indispensable dans le domaine du changement climatique ;
le satellite SWOT permettra de mesurer la hauteur des eaux des océans, des fleuves, lacs et zones inondées. Le coût de ce projet s'élève à 150 millions d'euros (pour un lancement en 2019).
Votre rapporteur pour avis se réjouit d'un tel investissement dans l'innovation spatiale, d'autant plus que ce dernier permet un effet de levier particulièrement important sur l'industrie, sur l'économie, sur les sciences ainsi que sur la société et les politiques publiques par le biais d'applications utiles pour des secteurs comme l'aménagement du territoire, les catastrophes naturelles, les prévisions météorologiques ou encore l'information et la communication. A titre d'illustration, un investissement de 7 milliards d'euros dans le domaine des lanceurs et des satellites peut créer un effet de levier atteignant un rapport de 1 à 19, en permettant d'injecter 130 milliards d'euros dans l'économie.
E. LA PRIORITÉ « AÉRONAUTIQUE »
Suivant les préconisations du rapport de la commission Investir pour l'avenir , le projet de loi de finances rectificative propose d'attribuer 1,5 milliard d'euros à des programmes de recherche aéronautique qui mettent l'accent sur une adaptation des aéronefs à l'économie « décarbonée » de demain. Il crée pour cela un nouveau programme « recherche dans le domaine de l'aéronautique » au sein de la mission « recherche et enseignement supérieur ».
1. Un enjeu environnemental de premier plan
L'analyse par mission annexée au projet de loi de finances rectificative indique que les programmes de recherche co-financés par les crédits du « grand emprunt » devraient notamment mettre l'accent sur la limitation de la consommation de carburant, dont dépendent directement les émissions de CO 2 produites par les avions.
Le transport aérien est en effet souvent présenté comme une source importante d'émission de CO 2 . S'il ne représente que 4 % des émissions françaises totales de CO 2 , cette part devrait augmenter avec la tendance au développement du transport aérien sur le long terme (+ 65 % entre 1990 et 2008).
Votre rapporteur pour avis rappelle toutefois que le défi environnemental ne se limite pas, pour les avions, aux seules consommations de carburant.
Le trafic aérien libère également des oxydes d'azote, des sulfates et des suies. Au niveau européen, les acteurs du transport aérien se sont fixés comme objectif pour 2020 20 ( * ) :
- une réduction de la consommation de carburant et des émissions de CO 2 de 50 % par passager et par kilomètre ;
- une réduction de 80 % des émissions de NO X (oxydes d'azote) ;
- une réduction de 50 % du bruit perçu.
Ces objectifs ont été précisés au niveau français dans le cadre d'un accord entre le Gouvernement et les acteurs du transport aérien le 28 janvier 2008, dans le prolongement des travaux du « Grenelle de l'environnement ».
Outre le « dividende environnemental », un avion « propre » qui prendrait en compte l'ensemble de ces paramètres posséderait donc un avantage compétitif certain, la concentration d'un trafic aérien important autour des grands hubs suscitant une sensibilité particulière du public aux nuisances qui l'accompagnent.
En conséquence, une vision globale de l'impact sur l'environnement des transports aériens s'impose : c'est dans cet esprit que le projet de loi portant engagement pour l'environnement, en cours d'examen au Parlement, étend aux émissions atmosphériques polluantes le champ de compétences de l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNE).
2. Un enjeu économique pour la France et pour l'Europe
Le secteur aéronautique et spatial emploie plus de 200 000 personnes en France. Si le chiffre d'affaires du secteur représente une faible part du PIB, le transport aérien contribue tout de même largement à l'activité économique en facilitant les déplacements de personnes et les échanges de biens dans le contexte d'une interdépendance croissante des économies.
Les compagnies aériennes transportent ainsi plus de 2 milliards de passagers chaque année dans le monde, soit trois fois plus qu'en 1980. Le trafic, malgré une légère baisse actuelle due à la crise, suit une courbe ascendante sur le moyen et long terme : le nombre de passagers-kilomètres a ainsi augmenté de 41 % entre 2000 et 2008 21 ( * ) .
Cet enjeu ne peut s'apprécier au seul niveau national. L'Europe dispose en effet le leader mondial, avec EADS et ses filiales Airbus et Eurocopter, d'un secteur aérien multinational. Si les projets de recherche directement financés par le « grand emprunt » devraient, selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, être menés pour l'essentiel en France, les retombées concerneront le secteur de la construction aéronautique dans son ensemble.
Or la France et l'Europe doivent faire face à une concurrence croissante : outre les États-Unis, les pays émergents (Chine, Brésil, Russie) ambitionnent de devenir des acteurs incontournables du marché de la construction aéronautique.
Le maintien et le développement de l'industrie de construction aéronautique est donc, au-delà de l'impératif climatique, un enjeu essentiel pour l'économie de notre pays. S'agissant d'un secteur qui fait un usage aussi intensif en hautes technologies, l'effort de recherche doit être massif mais doit mettre l'accent sur la mise en oeuvre pratique des technologies élaborées en laboratoire.
Afin de convertir l'excellence technique en réussite économique, la valorisation de la recherche devra donc mettre l'accent sur la phase de pré-production industrielle. À cet égard, l'engagement des crédits du « grand emprunt » devra bien entendu suivre les règles européennes, d'autant que les sommes en jeu seront particulièrement importantes puisqu'elles pourront atteindre plusieurs dizaines de millions d'euros par projet.
Les crédits engagés devront ainsi, dans la mesure du possible, être rentables pour l'État grâce au remboursement des avances accordées et aux royalties qui seront perçues auprès des industriels au fur et à mesure de la mise en oeuvre et de la commercialisation des aéronefs. Les subventions devront de plus respecter l'encadrement des aides d'État tel qu'il est précisé par l'Union européenne.
3. Un opérateur reconnu dans le domaine de la recherche aéronautique et spatiale
Le projet de loi de finances rectificative prévoit de confier la gestion des crédits provenant du « grand emprunt » à l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (Onera).
Créé par la loi n° 46-895 du 3 mai 1946, l'Onera est un établissement public à caractère industriel et commercial, doté de l'autonomie financière et placé sous l'autorité du ministre de la défense 22 ( * ) . Il emploie plus de 2 000 salariés sur huit sites en France. Son budget était en 2008 de 202 millions d'euros. Son président est M. Denis Maugars depuis le 28 janvier 2010.
L'office oriente et conduit des recherches dans les domaines aéronautique et spatial, avec une visée applicative dans le domaine industriel. Il possède notamment le premier parc européen de souffleries.
À ce titre, l'Onera apparaît comme l'opérateur naturel pour l'utilisation des crédits du « grand emprunt ».
Il s'agira toutefois d'un rôle nouveau pour l'office, qui conduit habituellement lui-même les recherches. Il mettra cette fois sa compétence technique au service de la gestion de projets confiés à des organismes divers, notamment dans le domaine industriel.
4. Des projets porteurs
Un effort d'orientation de la recherche en aéronautique réunit déjà l'ensemble des acteurs du secteur. Créé à l'initiative du Gouvernement en juillet 2008, le Conseil stratégique pour la recherche aéronautique civile (CORAC) rassemble aussi bien les industriels que les transporteurs, les aéroports, les organismes de recherche et les administrations. Sa mission consiste à fixer des objectifs de recherche à chacun de ses membres afin de parvenir à la mise en oeuvre des objectifs posés par le « Grenelle de l'environnement ».
Le projet de loi de finances rectificative prévoit deux types de projets :
- des démonstrateurs technologiques aéronautiques ; l'État apportera, par l'intermédiaire de l'Onera, des subventions à la mise en place de ces systèmes qui facilitent le passage à une mise en oeuvre industrielle des technologies, laquelle représente trop souvent le point faible de la chaîne d'innovation ;
- des projets de développement de nouveaux appareils ; l'Onera proposera des avances remboursables au fur et à mesure de la commercialisation des aéronefs.
Ces projets comportent une part de risque indéniable, la mise en oeuvre industrielle des programmes de recherche engagés ne pouvant être garantie a priori . Ce risque est toutefois le corollaire d'une ambition indispensable au maintien de la capacité industrielle de notre pays dans ce domaine.
L'État joue ainsi un rôle qui, dans notre pays, lui est traditionnel en soutenant des projets de grande ampleur, dont les résultats ne s'apprécient que sur le moyen et long terme. Il faut en effet compter, dans le secteur aéronautique, de cinq à quinze ans pour passer des premiers travaux de recherche à l'application concrète et au succès commercial.
Les projets étant validés par le Premier ministre, après avis du CGI, un partenariat technique devra être mis en place pour l'instruction des dossiers et la définition précise des projets. On peut envisager que la direction générale de l'aviation civile (DGAC), dont le directeur général est le responsable du programme budgétaire, et la direction générale de l'armement, apportent leur expertise en complément de celle de l'Onera.
Conscient du défi technique et économique que représentent ces projets, votre rapporteur pour avis est sensible à l'ambition affichée et considère que les compétences déjà présentes en France et en Europe dans ce secteur permettent d'être confiant dans la réussite des projets. Il approuve en conséquence l'emploi des crédits accordés à la recherche aéronautique par le projet de loi de finances rectificative.
Il fait toutefois observer que le suivi sera fondamental afin de garantir que les recherches sont bien susceptibles d'aboutir à des projets économiquement viables. Le Parlement devra être pleinement associé à ce suivi afin de prendre la mesure, sur la durée, de la bonne utilisation des fonds.
III. LE SECTEUR « DÉVELOPPEMENT DURABLE »
A. LA PRIORITÉ « TRANSPORT ET URBANISME DURABLE »
La nécessité d'entreprendre, dans certaines aires urbaines, un effort quantitatif et qualitatif de construction visant à permettre l'émergence de villes ou morceaux de villes véritablement durables a été reconnue à plusieurs occasions, et notamment lors des tables rondes du « Grenelle de l'environnement ». « Laboratoires de la modernité urbaine (...), vitrines de l'excellence française et (...) à la pointe de l'innovation en matière d'excellence architecturale, de haute qualité environnementale, des technologies de transports et de communication », selon le Président de la République 23 ( * ) , les « écocités » devront s'inscrire dans la continuité d'agglomérations déjà existantes et promouvoir des liens étroits entre nouveaux et anciens quartiers.
Un montant de crédits d' un milliard d'euros sera consacré au financement de ce type de programmes, avec un fort effet d'entraînement (transports en commun, développement des énergies renouvelables, développement d'infrastructure numérique à très haut débit, gestion de réseaux, infrastructure de charge de véhicules électriques ...).
Ces interventions prendront la forme de subventions dans une proportion de 60 % et, pour le solde, de financements non consomptibles. Cette intervention de l'État visera notamment à soutenir les collectivités locales par un mécanisme de prêts bonifiés . Les prêts seront différenciés en taux d'intérêt (0 %, 1 % ou 2 %) en fonction des projets financés et notamment de leur ambition environnementale.
B. LA PRIORITÉ « ÉNERGIES RENOUVELABLES ET DÉCARBONÉES »
1. La problématique générale des énergies renouvelables :
Le rapport de la commission Investir pour l'avenir a bien posé la problématique des énergies renouvelables en France. Notre pays s'est fixé pour objectif, dans le cadre de la loi de programmation du 3 août 2009 relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement et conformément à ses engagements européens, de porter la part des énergies renouvelables à 23 % de sa consommation d'énergie finale d'ici 2020 . Actuellement, cette part n'est que de 11,5 %. Cet objectif équivaut donc à un accroissement de 120 à 130 % de la production d'énergie à partir de sources renouvelables, après une période de trente années de stagnation de leur part dans la consommation finale d'énergie du pays.
Or, dans la mesure où les capacités hydrauliques sont déjà pleinement exploitées et où l'énergie photovoltaïque est encore très loin d'avoir atteint la maturité industrielle 24 ( * ) , l'effort national en faveur des énergies renouvelables ne pourra porter, à l'horizon 2020, que dans trois directions :
- l'éolien croît tendanciellement au rythme de 1000 MgW de capacité supplémentaire installée par an. Mais, dans la mesure où cette forme d'énergie dépendante du vent est intermittente, la puissance installée du parc actuel, soit 4 500 MgW, n'équivaut, en production effective, qu'à celle d'une grosse centrale à charbon.
Toutefois, cet inconvénient de l'intermittence de l'énergie éolienne pourra être atténué par un « effet de foisonnement » avec la multiplication des éoliennes, favorisée par l'existence en France de trois régimes de vents décorrélés, ainsi que par le développement de capacités de modélisation pour la prévision de la production éolienne ;
- les biocarburants permettront une diversification bienvenue du mix énergétique des transports, alors que ceux-ci sont aujourd'hui dépendants à 97 % des hydrocarbures, et contribueront à réduire les émissions de CO 2 . L'objectif européen d'incorporation de 10 % d'énergie renouvelable dans les transports à l'horizon 2020 ne pourra être atteint qu'en s'appuyant sur les filières de biocarburants de première et deuxième générations.
Les biocarburants de première génération , produits à partir de matières premières agricoles (sucre de canne et de betterave, céréales et oléagineux), sont mûrs technologiquement mais ont un potentiel limité en volume, en raison notamment de la concurrence avec les usages alimentaires.
L'effort doit donc porter prioritairement sur les biocarburants de deuxième génération , qui permettent de mobiliser des volumes plus importants de biomasse (résidus forestiers, paille, cultures dédiées ...) et présentent de multiples avantages (utilisation de la plante entière et de matières premières non destinées à un usage alimentaire, coûts plus faibles, bilans environnementaux plus favorables ...). Ces biocarburants de deuxième génération sont aujourd'hui l'objet de projets partenariaux de démonstrateurs de recherche : Futurol, pour la voie biochimique, vise une mise sur le marché à l'horizon 2015, tandis que BioTfuel, pour la voie thermochimique, vise une mise sur le marché à l'horizon 2017.
A plus long terme, l'Institut français du pétrole (IFP) explore la piste des carburants de troisième génération , obtenus à partir d'algues, qui sont potentiellement très intéressants pour le secteur de l'aéronautique ;
- le bois-énergie représenterait un tiers du gisement des énergies renouvelables pouvant être exploité à l'horizon 2020. Actuellement, 7,4 millions de foyers et quelques collectivités sont équipés. Le fonds chaleur, mis en place en 2008 et doté de 960 millions d'euros de crédits sur la période 2009-2011, dont 150 millions en 2009, vise à en accélérer le développement.
Toutefois, comme le souligne le rapport de la commission Investir pour l'avenir , les technologies de production d'énergie renouvelable ont encore des coûts élevés et des rendements insuffisants. Il convient donc de développer des solutions technologiques rentables et économiquement viables, qui puissent être diffusées largement.
Par ailleurs, dans ces filières industrielles émergentes, les positions de leadership demeurent mouvantes au niveau international. La France peut encore se hisser dans les toutes premières places, à condition de valoriser sa recherche d'excellence et de faire émerger des acteurs industriels. C'est le cas pour les technologies énergétiques décarbonées telles que le captage-stockage de CO 2 , le stockage de l'électricité, l'énergie solaire, les biocarburants de troisième génération, les énergies marines, la géothermie ...
2. Une dotation de 2,6 milliards d'euros
Le projet de loi de finances rectificative pour 2010 comporte un programme intitulé « démonstrateurs et plateformes technologiques en énergies renouvelables et décarbonées et chimie verte », doté de 1,6 milliard d'euros en crédits de paiement , comme en autorisations d'engagement.
Ces crédits seront affectés au fonds démonstrateur de l'ADEME de manière à poursuivre et accélérer le déploiement des « technologies vertes », en soutenant des projets innovants de démonstrateurs de recherche et la mise en place de plateformes technologiques associant acteurs publics et acteurs privés et en mutualisant les moyens et des projets d'expérimentations, faisant ainsi le lien entre la recherche amont et la pré-industrialisation.
Dans la continuité du fonds démonstrateur existant, les filières concernées seront notamment l'énergie solaire photovoltaïque et thermodynamique, les énergies marines, la géothermie intermédiaire et profonde, le captage-stockage du CO 2 , le stockage de l'énergie et les vecteurs énergétiques (hydrogènes, piles à combustible ...), les bâtiments à énergie positive et faiblement carbonée, la chimie verte (dont les biocarburants et les applications agricoles), ainsi que le secteur de « l'économie circulaire », c'est-à-dire le tri et la valorisation des déchets, la dépollution et l'éco-conception des produits industriels.
Selon le dossier de presse associé à la présentation du projet de loi de finances rectificative pour 2010, la répartition de ce montant de 1,6 milliard de crédits serait de 1,35 milliard d'euros pour les énergies renouvelables et décarbonées et de 250 millions d'euros pour « l'économie circulaire ».
Par ailleurs, le projet de loi de finances rectificative pour 2010 comporte un autre programme intitulé « instituts thématiques d'excellence en matière d'énergies décarbonées », doté d' un milliard d'euros en crédits de paiement comme en crédits d'engagement. Ces crédits seront consacrés à la constitution de campus d'innovation technologique en matière d'énergies renouvelables visant une dimension mondiale. Cinq à dix instituts seraient ainsi créés, dans la logique poursuivie par les pôles de compétitivité et en cohérence avec les priorités de la stratégie nationale de recherche sur l'énergie. Ce qui porte le total des sommes consacrées aux énergies renouvelables, dans le cadre de l'emprunt national, à 2,6 milliards d'euros. La dotation allouée à ces instituts d'excellence pourra être consommée à hauteur de 25 % du capital, soit 250 millions d'euros.
Votre rapporteur pour avis se félicite de la création de ces instituts thématiques d'excellence, qui permettront de structurer la recherche développement dans le domaine des énergies décarbonées. Il lui paraît essentiel qu'un institut soit mis en place dans chacune des filières concernées, même si certains de ces instituts pourront être transversaux à plusieurs filières.
3. De véritables percées technologiques possibles
D'une manière générale, votre rapporteur pour avis constate que, en matière d'énergies renouvelables, on a jusqu'à présent beaucoup encouragé la demande en aval. Il est temps de pousser l'offre en amont, par le développement technologique. Le coup de pouce qui pourra être donné à la recherche par une utilisation intelligente des recettes de l'emprunt national aura un effet diffusant par l'intermédiaire des démonstrateurs industriels.
Votre rapporteur pour avis estime que, contrairement à ce qui a trop souvent été fait par le passé, ce sont les demandes des entreprises qui doivent orienter la recherche, et non pas l'inverse. Il est aujourd'hui essentiel d'être à l'écoute des industriels, et de ne pas s'engager uniquement dans des technologies à l'horizon de vingt ans, en négligeant des possibilités plus immédiates de percées technologiques.
En particulier, l'appoint de l'emprunt national devrait permettre de multiplier par cinq les montants disponibles pour le fonds chaleur, essentiel pour une accélération dans l'exploitation du gisement de bois-énergie à l'horizon 2020. Or la filière française du chauffage à bois domestique , très structurée, est entièrement composées de PME qui détiennent 80 % du marché national et exportent en sus 20 % de leur production. Ces PME innovent beaucoup, sans bénéficier le plus souvent d'autre aide publique que celle fournie par le mécanisme du CIR. Cela n'a pas empêché les rendements des chaudières à bois de passer, en l'espace d'une décennie de 50 à 70 %, tandis que les émissions de polluants étaient divisées par six.
Un autre exemple est celui de l'énergie solaire photovoltaïque. Si elle est encore marginale en puissance installée, une percée technologique et industrielle est possible, par le développement de panneaux de silicium ou d'autres matériaux, éventuellement organiques, en couches très minces. Alors que les technologies actuelles permettent de récupérer 10 % de l'énergie solaire reçue, ce pourcentage pourrait s'élever à 40 % dans trente ans. Parallèlement, les coûts de production, qui sont aujourd'hui massivement subventionnés, pourraient être divisés par deux à l'horizon 2030.
Les énergies décarbonées correspondent à autant de filières nouvelles. Or, en l'absence de soutien aux industriels français, le développement mondial de ce secteur d'activité nouveau risque de se faire sans la France. Il est aujourd'hui fondamental d'aider nos entreprises à passer du stade de la conception à celui du pilote industriel. Mais il convient de raisonner par phases, car les différentes technologies dans le domaine des énergies décarbonées en sont à des stades très différents.
Par exemple, les énergies marines, qui constituent une vraie ressource potentielle, n'en sont encore qu'au stade de la démonstration et ne devraient pas déboucher sur le stade de l'exploitation industrielle avant 2030, réserve faite des usines marémotrices, dont on maîtrise déjà la technologie, mais qui peuvent poser un problème d'acceptabilité sociale.
Votre rapporteur pour avis souhaite que l'on associe systématiquement les PME, même si dans certaines filières, les grandes industries sont particulièrement qualifiées. C'est notamment le cas pour les énergies marines, où interviennent de grandes structures telles que DCNS, l'IFREMER ou les aménageurs portuaires Il existe aussi un important potentiel d'échanges thermiques avec les fonds sous marins en outre-mer, pour lequel Total possède des capacités technologiques. En fait, la solution souvent la plus pertinente consiste dans l'association, au sein de consortiums , de grandes entreprises et de PME, qui bénéficient ainsi d'un puissant effet de levier.
Selon le degré de maturité des filières concernées, les retours sur investissement seront plus ou moins importants et plus ou moins rapides. Ainsi, un tiers des crédits consacrés aux énergies renouvelables et décarbonées devrait prendre la forme de subventions à la recherche, et deux tiers celle d'avances remboursables. L'ADEME bénéficiera de retours, soit par l'intermédiaire des royalties sur les brevets déposés, soit directement par des prises de participation dans les sociétés bénéficiaires de son aide.
En ce qui concerne les appels à projets lancés par l'ADEME et financés par le fonds démonstrateur de recherche, votre rapporteur pour avis estime qu'ils ne seront un succès qu'en respectant les trois conditions suivantes : qu'ils soient réalisés annuellement pendant une période minimale de trois ans ; que leur cahier des charges soit suffisamment simple pour permettre aux PME d'y répondre ; que l'horizon de commercialisation des innovations aidées soit relativement court , de l'ordre de deux à trois ans maximum.
4. L'importance d'une bonne gouvernance
Votre rapporteur pour avis souhaite appeler l'attention sur l'organisation mise en place par l'État pour le pilotage du développement des énergies renouvelables et décarbonées. En effet, trop d'administrations ont des missions ponctuelles dans ce domaine, et il risque de manquer une coordination générale. Ainsi, pas moins de sept ministères sont représentés au sein du comité de pilotage placé auprès de l'ADEME pour la gestion du fonds démonstrateur. La mise en place d'un CGI peut être une solution, à la condition de ne pas être simplement une nouvelle structure qui se surajoute à celles déjà existantes.
Indépendamment du besoin de coordination, un autre risque est que chacune des administrations compétentes, prise séparément, ne dispose pas de suffisamment de ressources humaines pour atteindre la masse critique qui seule peut permettre de développer une véritable expertise .
Cette expertise existe, sans conteste, du côté de l'ADEME. Mais votre rapporteur pour avis souligne que les moyens humains de celle-ci devront être étoffés pour accompagner l'extension continue de son champ d'intervention. En particulier, l'agence n'a pas encore d'expérience dans la prise de participations, qui sera pour elle un métier nouveau.
C. LA PRIORITÉ « NUCLÉAIRE DE DEMAIN »
1. La problématique du nucléaire du futur
Parmi les grands sujets nucléaires de demain, il convient de citer en premier lieu la quatrième génération de réacteur , appelée à succéder à la troisième génération constituée par l'EPR et ses dérivés. Actuellement, cette quatrième génération en est au stade des études de faisabilité, et le projet est sur le point d'être mis en route. Un avant-projet détaillé est prévu pour 2017, qui devrait déboucher sur la construction d'un prototype en 2018, pour une entrée en fonctionnement en 2020.
L'enjeu de cette quatrième génération de réacteurs, dont ressortissait le réacteur SuperPhénix, est de parvenir à améliorer dans une grande mesure le recyclage du combustible. Ainsi, les réacteurs de cette génération devraient utiliser 50 fois moins d'uranium pour produire une quantité d'énergie équivalente. Accessoirement, les matières dérivées inutilisables que sont les actinides seraient également produites en bien moindres quantités.
Toutefois, votre rapporteur pour avis souligne, que le coût des réacteurs de quatrième génération ne sera pas forcément moindre, car ils seront beaucoup plus complexes que ceux des générations précédentes.
Un deuxième grand sujet du nucléaire de demain est le projet de réacteur de recherche Jules Horovitz , qui permettra de conduire des études en grandeur nature sur la résistance des matériaux aux radiations. L'enjeu sera d'affiner les études de sûreté des centrales nucléaires existantes, dont on veut prolonger la durée de vie. Par ailleurs, ce réacteur de recherche permettra de produire des radionucléides à usage médical (IRM, radiothérapies).
Un troisième grand sujet est le traitement des déchets nucléaires , notamment afin de préparer, à terme, le suivi du fonctionnement de la quatrième génération de réacteurs.
Dans cette perspective, il convient d'accélérer les programmes de l'Agence nationale de gestion des déchets radioactifs (ANDRA) sur le retraitement et les méthodes de stockage. Mais il convient également de veiller, en amont, à réduire les quantités de déchets produits et à en améliorer le recyclage. A l'horizon 2040, il est permis d'espérer une meilleure utilisation du combustible et une « fermeture » de son cycle de vie.
2. Une dotation d'un milliard d'euros
Le projet de loi de finances rectificative pour 2010 comporte un programme intitulé « nucléaire de demain », qui est doté d' un milliard d'euros en crédits de paiement comme en crédits d'engagement.
Ces crédits visent à dynamiser des recherches déterminantes pour l'énergie nucléaire à long terme et finançant un programme d'études qui permettra au CEA de démarrer la construction d'un prototype de réacteur de quatrième génération à horizon 2018, la construction d'un instrument d'expérimentation visant à étudier les composants irradiés dans les réacteurs ainsi que des programmes de recherche permettant de réduire le volume et la dangerosité des déchets radioactifs.
Ces crédits seront versés directement aux opérateurs de l'État concernés, l'ANDRA et le CEA, qui sera renommé à l'occasion de ce projet de loi Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives, conformément à la suggestion faite par le Président de la République.
3. Un besoin de recyclage à ne pas négliger
Votre rapporteur pour avis approuve l'équilibre qui a été trouvé, pour ce programme, entre la préparation du futur lointain, avec la quatrième génération de réacteur, et des préoccupations plus immédiates, avec l'étude du vieillissement des matériaux et le stockage des déchets nucléaires.
Dans la perspective du long terme, il souhaite appeler l'attention sur l'intérêt de donner également au CEA et à AREVA les moyens d'effectuer des recherches sur ce que pourrait être « l'usine de recyclage du futur ». En effet, la France dispose actuellement de capacités de traitement de l'uranium naturel, mais pas de l'uranium de retraitement, qui est pour l'instant envoyé en Russie pour y être recyclé.
Un léger surcroît de recherche, dans un domaine qui ne nécessite pas de rupture technologique considérable, permettrait à la France de se doter de l'usine de recyclage qui lui fait encore défaut et de préparer ainsi la transition entre la troisième et la quatrième génération de réacteurs. Accessoirement, certaines avancées technologiques permettraient à cette « usine de recyclage du futur » de consommer beaucoup moins d'énergie pour son propre fonctionnement.
D. LA PRIORITÉ « RENOVATION THERMIQUE DES LOGEMENTS PRIVÉS »
1. La problématique du secteur des bâtiments
Le secteur du bâtiment absorbe 40 % de la consommation d'énergie nationale et produit 25 % des émissions de gaz à effet de serre. Le « Grenelle de l'environnement » a fixé un objectif de diminution de 38 % de la consommation d'énergie du parc de bâtiments à l'horizon 2020 . Or, dans la mesure où la construction de bâtiments neufs ne représente, chaque année, que 1 % du parc existant, l'enjeu véritable est bien la rénovation thermique des bâtiments anciens .
Le dispositif d'aides publiques incitant à la rénovation thermique des logements correspond déjà à un effort important, qu'il s'agisse de l'éco-prêt à taux zéro ou des prêts à taux réduits dont bénéficient les organismes de logements sociaux. En pratique, davantage que d'avancées technologiques, ce secteur présente un besoin général de formation des professionnels qui interviennent dans la rénovation thermique , car ceux-ci n'ont pas encore tous suffisamment la maîtrise des techniques déjà existantes. La Fédération nationale du bâtiment (FNB) et la Chambre des artisans et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) oeuvrent, en partenariat avec des organismes publics tels que l'ADEME et l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), à améliorer les compétences de leurs affiliés dans le domaine de l'efficacité énergétique.
2. Une dotation de 500 millions d'euros
Le projet de loi finances rectificative pour 2010 comporte un programme intitulé « rénovation thermique des logements », doté de 500 millions d'euros , tant en crédits de paiement qu'en autorisations d'engagement.
Ce programme a pour objet de soutenir la rénovation thermique des logements en aidant les ménages propriétaires occupants à faibles revenus (premier décile) à mener à bien des travaux améliorant la performance énergétique de leur logement au travers de diverses actions : repérage des situations à traiter, diagnostic énergétique et financier, financement des travaux.
Les crédits de ce programme seront versés à un fonds d'aide à la rénovation thermique des logements privés géré par l'ANAH, qui est devenue l'opérateur unique de l'État pour les interventions sur le parc privé depuis la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion. Ce fonds participera à la mise en oeuvre du programme d'aide à la rénovation thermique des logements privés sur la période 2010-2017.
3. Un accent mis sur la lutte contre la précarité énergétique
Votre rapporteur pour avis estime particulièrement bienvenue la priorité ainsi donnée, dans l'utilisation des sommes dégagées grâce à l'emprunt national, à la lutte contre la précarité énergétique. Avec le renchérissement du coût de l'énergie, celle-ci devient un problème aigu pour un nombre croissant de nos concitoyens aux revenus les plus modestes. Il ne s'agit pas d'un problème urbain seulement, puisque l'on estime que 50 % des personnes frappées par la précarité énergétique vivent en milieu rural.
L'ANAH sera donc l'opérateur principal de la réduction de la précarité énergétique. Elle procédera sur un mode contractuel avec les départements, dont les services d'aide sociale sont qualifiés pour identifier les ménages en difficulté. Elle aura aussi un rôle de conseil auprès des artisans du bâtiment, et de vérification de la qualité des travaux de rénovation thermique que ceux-ci mèneront à bien.
Votre rapporteur pour avis souligne que ce programme est potentiellement tout à fait rentable, en termes de retours sur investissement. On estime qu'un montant de travaux de 10 000 euros seulement par logement permettrait de réduire de 15 % la consommation d'énergie annuelle du logement concerné.
4. Les progrès à venir de la réglementation thermique
Toutefois, des progrès technologiques peuvent encore être espérés dans le domaine de l'efficacité énergétique des bâtiments. D'ailleurs, la loi de programmation du 3 août 2009 relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement a fixé, pour toutes les constructions nouvelles à compter de 2012, une norme de consommation maximale d'énergie primaire de 50 kWh par mètre carré et par an.
Un récent rapport fait par les députés Christian Bataille et Claude Birraux, au nom de l'Office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), retrace les perspectives dans ce domaine 25 ( * ) .
Votre rapporteur pour avis approuve les recommandations finales de ce rapport parlementaire, qui tournent autour de deux idées principales :
- d'une part, la nécessité de mettre à profit l'opportunité de la baisse de la consommation d'énergie dans les bâtiments pour faire progresser l'offre technologique justifie que l'on respecte la norme de consommation d'énergie précitée, de 50 kWh par mètre carré et par an, sans modification du coefficient de conversion de l'électricité 26 ( * ) ;
- d'autre part, le besoin d'imposer aux énergies fossiles une contribution plus explicite à la lutte contre l'effet de serre et de favoriser les énergies renouvelables justifierait que l'on fixe une seconde contrainte exprimée en émissions de CO 2 , qui pourrait être au maximum de 5 kilos de CO 2 par mètre carré et par an.
Le Gouvernement ne s'est pas encore prononcé sur les conclusions du rapport de l'OPECST, alors que la prochaine réglementation thermique pour 2012 est en préparation, Pour sa part, votre rapporteur pour avis est convaincu que seule l'articulation entre ces deux contraintes peut garantir une utilisation optimale des différentes sources d'énergies, électriques, fossiles ou renouvelables, dans le secteur du bâtiment.
IV. LE SECTEUR « NUMÉRIQUE »
Représentant plus du quart de la croissance et 40 % des gains de productivité, le secteur numérique est, selon les termes retenus par la commission Investir pour l'avenir , « au coeur du progrès économique et technologique ». Ce constat, désormais très largement partagé, l'a conduit à consacrer le septième de ses axes de développement à la « société numérique ».
Afin de favoriser et d'accélérer l'avènement de cette « société de la connaissance », la commission a identifié deux leviers d'action distincts :
- d'une part, les infrastructures informatiques et les réseaux de télécommunication , qui constituent « l'indispensable substrat des échanges d'information et du développement des services numériques ». La commission a préconisé de mobiliser deux milliards d'euros en vue de soutenir la couverture du territoire en réseau très haut débit, chiffre qui a été repris et validé par le présent projet de loi. Ce dernier retient ainsi les préconisations de votre rapporteur pour avis, qui avait clairement suggéré lors de l'examen de la loi relative à la lutte contre la fracture numérique de recourir à cet instrument financier 27 ( * ) ;
- d'autre part, les services et les contenus, qui constituent la « finalité même de l'économie numérique » et représentent des « leviers puissants de modernisation et de compétitivité des entreprises ». La commission a proposé de dégager une enveloppe d'également deux milliards d'euros en vue de soutenir le développement de ce secteur d'activité, chiffre qui a été porté à 2,5 milliards d'euros par le présent projet de loi.
Celui-ci, qui relève dans son exposé des motifs que l'investissement dans le secteur des TIC a contribué durant la période 2001-2005 à 60 % de la croissance française et que le sous-investissement de notre pays en ce domaine explique 60 % de notre écart de croissance avec les États-Unis depuis 2000, reprend cette architecture générale au sein du programme « Développement de l'économie numérique ».
La dotation de 4,5 milliards d'euros qui y est mobilisée sera versée à un fonds spécialement créé, intitulé Fonds national pour la société numérique (FSN). La gestion de cet opérateur sera confiée à la CDC - qui ne sera pas impliquée dans le choix des projets financés - par un contrat signé par le Premier ministre après avis du CGI. Sa gouvernance stratégique relèvera, là aussi, du chef du Gouvernement via ledit commissaire général. Y seront associés le secrétariat d'État chargé du développement de l'économie numérique et les ministères chargés de la culture, de l'industrie, de l'enseignement supérieur, de la recherche, de la santé, de la défense, de l'économie, de l'écologie, de l'aménagement du territoire et du budget.
A. LA PRIORITÉ « EQUIPEMENT DE LA F RANCE EN TRÈS HAUT DÉBIT »
Le développement d'un réseau de très haut débit 28 ( * ) sur l'ensemble du territoire national, en tant qu'il permettra d'améliorer la compétitivité de nos entreprises et de « désenclaver numériquement » les territoires les plus ruraux, constitue un défi majeur pour notre pays dans les années à venir. Ce réseau doit en effet permettre à chaque opérateur économique et à chaque habitant d'accéder aux nouveaux usages du numérique, tels que la navigation sur l'Internet 3.0, le téléchargement de fichiers lourds, la visualisation de la télévision en haute définition ou en relief ...
La fibre optique, qui offre aujourd'hui des débits dépassant les 100 Mbit/s par abonné sans dégradation du signal, mais présente des capacités physiques permettant d'envisager un débit quasiment illimité dans les années à venir, en constitue le principal vecteur. De la même façon que le chemin de fer, l'électricité ou le téléphone par le passé, son déploiement va conditionner la vitalité et l'attractivité de notre pays pour les années et les décennies à venir.
Cependant, le coût de la couverture numérique de notre territoire en très haut débit est excessivement élevé, nécessitant des investissements de l'ordre de 30 à 40 milliards d'euros selon les estimations. La seule initiative privée ne sera donc pas en mesure d'y pourvoir, du moins en dehors des zones les plus densément peuplées, où le retour sur investissement est à peu près garanti.
Or, le déploiement du très haut débit est source d'externalités positives pour notre économie et notre société, en tant qu'il est facteur de croissance, d'emploi, de lien social et, plus largement, de maximisation du bien-être collectif. Ce constat justifie pleinement une action structurante des pouvoirs publics qui, par des mécanismes financiers, doivent inciter les acteurs privés à investir dans des territoires qu'ils auraient naturellement délaissés au regard de la pure rationalité économique.
C'est ainsi que le projet de loi, reprenant et affinant les propositions de la commission Investir pour l'avenir , mobilise deux milliards d'euros pour la couverture numérique du territoire en très haut débit. Quatre zones et autant de modes d'intervention des différents acteurs peuvent être distingués dans ce cadre :
- dans les zones dites « denses », les travaux de génie civil nécessaires pour desservir un nouvel abonné au très haut débit sont relativement réduits. En effet, les immeubles, qui forment un tissu urbain plus ou moins continu, regroupent souvent un grand nombre de logements.
Il y est donc économiquement viable pour plusieurs opérateurs de déployer leurs propres réseaux, notamment sous forme de fibre optique jusqu'à l'abonné (FTTH). Dès lors, l'intervention publique n'y est pas nécessaire et le libre jeu du marché devrait permettre à lui seul de déployer un réseau couvrant l'ensemble des lieux d'habitation.
Afin de délimiter précisément cette première zone, l'ARCEP a établi une liste de 148 communes (grandes métropoles) représentant 5 millions de foyers, calculée à partir de la densité et du nombre d'immeubles. L'autorité de régulation a par ailleurs édicté des règles communes à l'ensemble des opérateurs fixant le cadre à respecter pour pouvoir intervenir au sein de cette première zone, en validant notamment le modèle multifibres 29 ( * ) ;
- dans les zones moyennement denses , où l'habitat est plus diffus mais relativement regroupé, les opérateurs n'auront généralement pas les moyens d'installer plusieurs réseaux de fibre optique. Dès lors, et comme votre rapporteur pour avis le préconisait lors de l'instruction de la loi relative à la lutte contre la fracture numérique, la couverture de ces zones devra passer par un modèle coopératif fondé sur le co-investissement des opérateurs, la mutualisation du réseau et l'engagement des pouvoirs publics.
C'est bien la solution retenue par le projet de loi, qui prévoit l'intervention du FSN sous forme de prêts à hauteur d'un milliard d'euros. Ils seront attribués au moyen d'appels à projets à des exploitants de réseaux, afin de favoriser une mutualisation des investissements. L'engagement public, qui visera un effet de levier de 1 à 2 sur l'investissement privé selon l'exposé des motifs du projet de loi, devrait permettre d'amorcer et soutenir les projets des opérateurs.
Les sommes accordées par le FSN dans ces zones moyennement denses, il est important de le souligner, ne correspondront pas à des subventions publiques. De plus, l'opérateur agira en « investisseur avisé », c'est-à-dire en sélectionnant des projets rentables et en ne favorisant pas un acteur plutôt qu'un autre. Son intervention présentera à ce titre d'importants avantages. Ainsi, il viendra en appui des politiques publiques et pourra donc prendre en compte des choix d'aménagement du territoire. De plus, il apportera, par l'intermédiaire de la CDC, son expérience dans l'investissement au profit de projets structurants pour le territoire.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, les appels à candidature pour l'attribution de prêts dans le cadre de la zone 2, qui interviendront peu après la publication par le régulateur courant mai ou juin du cadre règlementaire, présenteront un double critère de co-investissement 30 ( * ) et de projet de couverture suffisamment exhaustive sur une zone donnée.
Si les formes sous lesquelles s'engageront les opérateurs sur cette zone intermédiaire restent encore floues, la solution du co-investissement à deux ou plus devrait donc être privilégiée. Les propos tenus à votre rapporteur pour avis lors des auditions, mais également l'expérience récente initiée par deux opérateurs, semblent aller en ce sens. Un accord de ce type a ainsi été signé à la mi-janvier entre Orange et SFR dans ces zones moyennement denses, probablement sous l'égide d'un groupe commun. Les deux opérateurs s'y sont engagés à construire, pour une zone de 100 à 1 000 logements, chacun un réseau relié à un point de mutualisation à partir duquel un seul opérateur déploiera la fibre optique vers les foyers. Les autres opérateurs auront la possibilité de louer ce réseau afin de commercialiser leurs offres, mais également de co-investir dans le groupe commun ainsi formé. Une expérimentation en ce sens est prévue dans deux villes d'Ile-de-France 31 ( * ) .
Votre rapporteur pour avis tient toutefois à souligner une incertitude tenant à l'articulation des dispositions du présent projet de loi avec les déclarations de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique, voici quelques mois. Cette dernière a en effet présenté au Conseil des ministres du 6 mai 2009 le volet numérique du plan de relance, qui prévoit l'intervention de la CDC pour constituer un fonds de 750 millions d'euros en fonds propres destiné à financer des projets de développement du réseau fibre en zone 2. Or, aucune des personnes auditionnées par votre rapporteur pour avis n'a été en mesure d'indiquer de façon certaine si cette enveloppe de 750 millions d'euros se surajoutera, ou bien se substituera, à celle d'un milliard d'euros prévue par le présent texte ;
- dans les zones peu denses , caractérisées par la présence de très petites villes et d'espaces ruraux, l'initiative privée ne peut suffire à assurer l'équipement en fibre optique. En effet, le coût du raccordement d'un abonné potentiel y est supérieur, même en mutualisant les réseaux, au bénéfice qui en serait retiré. Dès lors, une intervention forte de la puissance publique est pleinement justifiée
Afin de pallier les carences de l'initiative privée, une intervention publique forte est donc nécessaire. Elle passe tout d'abord par une planification des territoires à couvrir, des investissements nécessaires et du rôle de chacun des acteurs. Le plan France Numérique 2012, repris en cela par la loi relative à la lutte contre la fracture numérique, encourage ainsi les collectivités à élaborer des SDTAN.
Mais cette intervention publique passe également et surtout par un soutien financier. C'est en ce sens que le projet de loi prévoit l'attribution par le FSN d'une enveloppe de 750 millions d'euros de subventions en zones peu denses. Elles seront affectées, selon l'exposé des motifs, à des projets d'initiative publique, par exemple sous forme de délégations de service public. Cette dernière procédure aura l'avantage de garantir l'existence d'un « bien de retour » demeurant dans le patrimoine de la personne publique concédante.
L'effet incitatif attendu est, toujours selon le projet de loi, de 1 à 2 sur les subventions des collectivités locales et de l'Union européenne, qui pourront intervenir en co-financement, ainsi que sur les investissements privés. Il est vrai que le montant des sommes à réunir est très élevé : d'après les estimations communiquées à votre rapporteur pour avis lors de l'instruction de la loi relative à la lutte contre la fracture numérique, le besoin de subvention serait de 5 à 10 milliards d'euros pour un coût total de 30 milliards environ, sous réserve que les taux d'intérêt soient bas et que soit instauré un mécanisme de péréquation.
Si les sommes allouées pour ces zones restent donc relativement faibles au regard des besoins de financement, elles auront cependant le mérite de créer un début de dynamique et d'amorcer les projets, et ceci concomitamment - et non ultérieurement - à l'effort de couverture en zone 2. Votre rapporteur pour avis estime impératif, dans la mise en oeuvre des appels à projet en zone 3, d'éviter tout « pilotage par le haut », qui risquerait de planifier le développement du réseau de très haut débit sans tenir compte de la diversité des situations locales. Il recommande de construire et lancer ces appels à projets à partir des territoires, en retenant comme taille minimale de maillage le département, par cohérence avec l'échelle retenue pour les SDTAN.
Votre rapporteur pour avis souligne par ailleurs la nécessité de mener de concert l'effort de couverture en très haut débit dans l'ensemble des zones définies, afin de ne pas créer de « laissés pour compte » de l'aménagement numérique. Il fait observer, à cet égard, que le recours à des technologies permettant la « montée en débit » des réseaux existants constitue une solution transitoire qu'il convient de soutenir dans la zone 3 - voire dans la zone 2 -, notamment par l'élaboration d'un cadre concurrentiel clair, équitable et adapté .
Votre rapporteur pour avis tient enfin, s'agissant de la zone 3, à faire part de ses interrogations quant à l'articulation entre le présent texte et la loi relative à la lutte contre la fracture numérique. Celle-ci prévoit en effet la constitution d'un fonds d'aménagement numérique des territoires, qui a pour mission de contribuer à la mise en oeuvre de schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (STDAN) définis localement. Un comité national de gestion du fonds doit rassembler, à parts égales, les représentants de l'État, des opérateurs de communications électroniques et des syndicats mixtes d'aménagement numérique. Le fonds doit accorder des aides aux maîtres d'ouvrage des travaux prévus par les SDTAN, les décisions d'attribution des aides étant prises par les ministres chargés des finances et des communications électroniques. Or, il n'est pas fait référence à ce fonds dans le cadre du présent texte, qui n'évoque en la matière que le FSN. A cet égard, votre rapporteur pour avis souhaite vivement que l'enveloppe de 750 millions d'euros prévue en zone 3 abonde le fonds d'aménagement numérique des territoires et en respecte les principes de gestion ;
- enfin, dans les zones les plus reculées , l'idée même de déployer un réseau de fibre optique semble à écarter au nom de la rationalité économique et des principes d'usage de fonds publics.
Ces zones, qui se situent dans les milieux ruraux les plus enclavés ou en région de montagne, ne doivent pas pour autant être écartées de l'offre en très haut débit ; bien au contraire, leur développement harmonieux passera par leur irrigation en réseau numérique à forte bande passante. Si la fibre optique ne peut être retenue, le principe de neutralité et d'équivalence technologique commande de recourir à d'autres procédés techniques à même de fournir des débits équivalents. En attendant le déploiement d'un réseau LTE (long term evolution), soit la future norme de réseau mobile de quatrième génération (4G), une optimisation des vecteurs satellitaires semble devoir être recherchée.
Là encore cependant, l'importance des investissements à réaliser au regard de la population intéressée - 750 000 foyers environ, selon le projet de loi - légitiment une intervention incitative des pouvoirs publics. C'est en ce sens que le texte prévoit d'isoler 250 millions d'euros sous forme, pour moitié de subventions afin d'initier des appels à projet en recherche et développement, et pour l'autre moitié de prises de participation, directes ou indirectes, par le FSN dans le consortium d'exploitation bâti à cet effet sous forme de partenariat public-privé. Le coût total du projet, qui vise in fine à apporter le très haut débit aux 750 000 foyers précédemment évoqués d'ici cinq ans, serait de 500 millions d'euros selon l'exposé des motifs, dont une moitié serait donc financées sur fonds publics. Le projet MegaSat, porté par le Centre national d'études spatiales (CNES), y répond en visant à fournir une connexion Internet avec un débit de 50 - voire 100 - Mbits par seconde à 750 000 foyers concernés par les zones blanches.
On notera que le projet de loi assortit le programme « développement de l'économie numérique » d'un objectif ciblé de couverture de 70 % de la population nationale en très haut débit d'ici dix ans, et d'un indicateur adapté à la mesure de l'avancement de cet objectif.
L'opérateur satellite auditionné par votre rapporteur pour avis a fait état d'un projet de desserte de 500 000 foyers par la voie satellitaire offrant, pour 35 euros par mois -les frais d'équipement en parabole n'étant pas inclus-, une bande passante de 50 Mb/s en flux descendant et 10 en montant. Il a également attiré l'attention sur l'opportunité qu'il y aurait à privilégier le recours à une délégation de service public - qui permet, une fois l'opérateur sélectionné, de lui déléguer entièrement la gestion de l'activité - à un partenariat public-privé, qui contraindrait les pouvoirs à assurer une « interface » entre l'opérateur et les clients finaux ne relevant pas pleinement de leur compétence.
Votre rapporteur pour avis souscrit entièrement à la décision de soutenir le déploiement d'une offre satellitaire dans la mesure où elle constitue un complément irremplaçable à une offre plus massive que représente la fibre . Il souligne le caractère serré du calendrier prévu - 2014 -, du fait du délai - trois ans - nécessaire à la construction d'un satellite. Il fait également observer qu'il importera, au sein des SDTAN, de déterminer clairement quelles zones dépourvues de solution alternative à la connexion à un réseau de très haut débit seront éligibles à une telle offre satellitaire, afin d'éviter que celle-ci ne soit en partie utilisée par des foyers n'en ayant pas ou plus besoin.
B. LA PRIORITÉ « DÉVELOPPEMENT DES USAGES ET CONTENUS INNOVANTS »
Si l'établissement d'un réseau d'infrastructures numériques apportant le très haut débit sur l'ensemble du territoire est indispensable à la transition vers une réelle société de la connaissance et de l'innovation, la création de services permettant d'alimenter ces réseaux n'en a pas moins d'importance. En effet, contenants et contenus interagissent et s'interpénètrent : l'existence de « tuyaux » est aussi indispensable à la consommation de services numériques, que l'offre de ces derniers conditionne le développement des premiers.
Or, la part de recherche et d'innovation intégrée dans les contenus numériques est sans doute aussi élevée que celle des infrastructures de réseaux, et les risques associés à leur commercialisation aussi grands. De plus, le tissu d'entreprises spécialisées dans ces services est particulièrement riche en PME, dont la surface financière et les capacités de recherche et développement sont nécessairement réduites.
Ces considérations légitiment, là encore, une intervention des pouvoirs publics pour amorcer et accompagner l'initiative privée à court et moyen termes. C'est en ce sens que le FSN mobilisera 2,5 milliards d'euros pour favoriser le développement des usages, services et contenus numériques au travers de quatre principaux axes.
1. Le développement de l'« informatique dans les nuages »
QU'EST CE QUE L'« INFORMATIQUE DANS LES NUAGES » ? Le terme d'« informatique dans les nuages », cloud computing en anglais, trouve son origine dans la schématisation par les architectes de réseau d'Internet sous forme de nuage dans leurs croquis, évoquant l'interconnexion d'une quantité illimitée d'utilisateurs. La notion s'est depuis affinée pour désigner l'utilisation des capacités de stockage et de calcul d'ordinateurs distants les uns des autres et reliés par un réseau tel Internet. Concrètement, le cloud computing permet aux utilisateurs - particuliers, administrations ou entreprises - de s'épargner le stockage ou l'enregistrement de données et logiciels sur leurs propres ordinateurs, dès lors que ceux-ci ont été « virtualisés » au sein de serveurs distants interconnectés accessibles le plus souvent par un navigateur web. Cette évolution a pu être comparée à celle qu'a connue le secteur de l'électricité. Les entreprises, qui à l'origine possédaient chacune des mini centrales de production électrique, les ont abandonnées au fur et à mesure qu'elles ont pu satisfaire leurs besoins énergétiques en s'approvisionnant auprès de grandes compagnies spécialisées dans la production d'électricité. Les avantages sont évidents pour les utilisateurs. La mutualisation des matériels et logiciels informatiques permet de réduire les coûts d'équipement des particuliers et entreprises. Les économies d'échelle ainsi réalisées iraient de 20 à 80 % des coûts originels et seraient d'autant plus intéressantes pour l'opérateur qu'il est de taille réduite. Les systèmes sont optimisés par de puissants logiciels de façon à pouvoir réallouer en permanence les capacités de calcul et de stockage non utilisées. Ils se distinguent à cet égard des « simples » centres de données, ou data center , qui se « contentent » d'accumuler des informations numériques sans les gérer de façon réellement optimisée. Par ailleurs, l'accessibilité aux données est renforcée puisqu'un simple point de connexion Internet est suffisant, sans qu'il soit nécessaire de s'encombrer des supports physiques de stockage (ordinateurs, disques durs portatifs, clés USB, CDRom ou DVD ...). Enfin, l'évolutivité du système est assurée par l'hébergeur, et non par l'utilisateur, qui n'a donc plus à s'en préoccuper. L'« informatique dans les nuages » est aujourd'hui couramment utilisé par les particuliers, qui y ont par exemple recours pour la gestion en ligne de leurs courriels, de leurs photos ou même de documents de toutes sortes. Des entreprises de services informatiques leur proposent ainsi l'hébergement, gratuit ou contre rémunération, de quantités généralement limitées de données sur leurs serveurs. Si cette technique est amenée à se développer rapidement dans le secteur professionnel, peu d'entreprises y ont en revanche recours. Selon une étude réalisée en 2009 32 ( * ) , moins de 10 % de celles interrogées indiquaient l'utiliser pour l'hébergement de leurs infrastructures et applications informatiques. |
Certes, les atouts du cloud computing sont majeurs et devraient motiver son développement rapide. Il devra cependant pour ce faire surpasser plusieurs obstacles concernant sa sécurisation et son financement, ce à quoi tente de répondre le présent texte.
Le problème principal de l'« informatique dans les nuages » réside dans la sécurisation de l'accès aux données sur les serveurs en ligne. Si leur numérisation et leur mise en ligne les rend virtuelles, elles n'en sont pas moins présentes sur des supports physiques que sont des racks de traitement et stockage rassemblés dans les bâtiments climatisés des sociétés les hébergeant.
Or, l'ensemble de ces entreprises est aujourd'hui essentiellement américain, qu'il s'agisse de Salesforce, Amazon 33 ( * ) , Google 34 ( * ) , IBM ou Microsoft. Fin juillet 2008, Intel, Hewlett Packard et Yahoo ! ont constitué un partenariat afin de promouvoir la recherche en ce domaine. Et les pouvoirs publics soutiennent cet engouement : ainsi, la loi de finances américaine pour 2009 contenait des crédits destinés au cloud computing .
Le retard de notre pays et, plus globalement, de l'Europe 35 ( * ) en la matière en fait un réel enjeu de souveraineté . Le fait d'avoir ses données stockées sur des serveurs étrangers ou de pays tiers n'est en effet pas sans conséquences potentielles sur leur degré de sécurisation, en particulier pour les plus sensibles, qu'elles soient de nature personnelle ou qu'elles relèvent de la confidentialité politique ou du secret industriel.
Si cet enjeu est aujourd'hui bien identifié, y répondre pose de nouveaux problèmes en termes de financement. En effet, les investissements matériels à consentir pour créer une plateforme de cloud computing de taille critique se chiffrent en centaines de millions d'euros. De plus, des dépenses de recherche et développement extrêmement importantes sont indispensables pour garantir l'avance technologique des systèmes. Les sommes en jeu sont excessivement élevées pour ne pouvoir dépendre que d'acteurs isolés, mais aussi que de l'initiative privée. Dès lors, une mutualisation des efforts et un soutien des pouvoirs publics sont indispensables pour assurer le décollage des projets.
C'est dans cet objectif que le projet de loi prévoit l'intervention du FSN pour un montant - non précisé dans le projet de loi - qui devrait atteindre 600 ou 700 millions d'euros environ et revêtirait deux formes distinctes :
- très majoritairement, par des prises de participation et/ou des prêts dans une société privée à capitaux mixtes publics-privés chargée de concevoir, construire et exploiter une infrastructure de cloud computing composée de grandes centrales numériques de calcul et de stockage. La rémunération de cette société sera assurée par les utilisateurs de l'infrastructure, qu'il s'agisse de fournisseurs de logiciels en mode software as a service 36 ( * ) ou d'entreprises ou d'administrations l'utilisant pour leurs besoins propres de calcul ou de stockage.
L'objectif est de développer, par un partenariat public-privé, une infrastructure de cloud computing qui soit en mesure de constituer rapidement une alternative française et européenne dans un secteur encore en devenir, où les leaders de demain émergent dès maintenant et où, outre les États-Unis, la menace d'une concurrence chinoise se fait déjà sentir. Une concentration rapide des plateformes existantes étant anticipée, il importe que notre pays parvienne à se hisser parmi les quatre ou cinq acteurs principaux du secteur.
Il existe déjà en ce domaine un projet d'ampleur que l'enveloppe mobilisée par le « grand emprunt » devrait en fait soutenir. Un consortium a ainsi été initié entre les entreprises Dassault, Thalès et Orange, spécialisées respectivement dans les technologies liées aux logiciels, à la sécurité et aux réseaux . Selon les personnes auditionnées par votre rapporteur pour avis, une répartition tripartite et égalitaire des financements entre les sociétés prenant part au consortium (soit les trois d'origine auxquelles s'adjoindraient quelques autres), l'État et les acteurs financiers, serait opportune. L'enveloppe globale devrait, selon elles, s'élever à 2,5 milliards d'euros sur cinq ans ;
- pour le solde, par des subventions et avances remboursables dans des appels à projets de recherche et développement en liaison avec les ministères chargés de l'industrie et de la recherche et dédiés aux thématiques de l'« informatique en nuage » et du calcul intensif.
En effet, de lourds investissements seront indispensables, outre pour la mise au point de la plateforme de cloud computing , en vue de perfectionner les logiciels assurant son exploitation ainsi que les puissants calculateurs la faisant fonctionner. Ces derniers instruments, dits de « calcul intensif », sont d'ailleurs amenés à prendre une place prédominante, au-delà du seul cloud computing , pour la mise au point d'applications de très haute technologie dans les champs scientifiques, militaires ou industriels. La modélisation et la simulation numériques qu'ils rendent possibles permettent en effet de réduire substantiellement les phases de conception et d'expérimentation de systèmes complexes à très haute valeur ajoutée.
On notera qu'un programme « calcul intensif et simulation », qui a pour objectif de développer le calcul intensif et la simulation numérique et de promouvoir leur utilisation dans les activités de recherche, dont la mise en oeuvre a été confiée au CEA, a été lancé depuis plusieurs années par l'Agence nationale pour la recherche (ANR), et qu'il conviendrait donc d'en coordonner le contenu avec les projets retenus par le « grand emprunt ».
2. La numérisation des contenus
L'intervention du FSN en vue de soutenir la numérisation et l'exploitation des contenus patrimoniaux culturels, éducatifs et scientifiques, qui mobilise une enveloppe de 750 millions d'euros, relève de la compétence de la commission des affaires culturelles et fait l'objet de développements dans le rapport pour avis de cette dernière.
3. Le développement des technologies de base du numérique
Les technologies numériques de base sont les maillons indispensables de la chaîne du numérique permettant d'aboutir à la mise au point des applications du futur, soit les « nouveaux usages numériques » constituant le dernier des quatre axes de l'action 02.
Elles rassemblent des activités aussi diverses que :
- les futures générations de la nanoélectronique afin de répondre aux besoins de filières industrielles porteuses (transports, systèmes sécurisés, énergie, santé, éclairage ...) ;
- les technologies génériques du logiciel (logiciel embarqué, technologies Web génériques ...) ;
- les prochaines générations de technologies pour les réseaux de télécommunications [projet long term evolution (LTE), protocole IP multimedia subsystem (IMS) ...].
L'intervention du FSN en soutien à ces technologies, dont le montant total n'est pas précisé dans le projet de loi mais devrait s'élever, selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, à 400 ou 500 millions d'euros, se fera sous forme de subventions à hauteur au plus des trois-quarts de l'enveloppe, et d'avances remboursables pour le solde. Elle visera à financer des partenariats public-privé, autour de projets de recherche et développement ambitieux s'appuyant sur les principaux sites industriels français de production.
4. Le développement de nouveaux usages numériques
Le terme de « nouveaux usages du numérique » recouvre plusieurs réalités technologiques :
- les réseaux d'électricité « intelligents » , ou smart grids . Ces réseaux d'énergie du futur utilisent les technologies informatiques en vue d'optimiser la production et la distribution et de mieux mettre en relation l'offre et la demande entre producteurs et consommateurs d'électricité. Ils ont pour ce faire massivement recours à des capteurs électroniques ultrasensibles, à des interfaces animées par des logiciels spécialisés permettant à des appareils de communiquer entre eux ou encore à des compteurs intelligents.
La gestion rationnelle des réseaux qu'ils permettront sera porteuse de nombreux avantages, tels que la réduction des pics de consommation, la sécurisation des réseaux et l'évitement des pannes dues à leur surcharge, la diminution des émissions de gaz à effet de serre, l'intégration d'un bouquet de sources d'énergies alternatives et durables (éoliennes, hydroliennes, photovoltaïque, petit hydraulique ...), la facilitation du transport d'énergie sur de longues distances ou encore l'abaissement des facturations pour le consommateur.
Diverses études ont conclu à l'efficacité de cette technologie en gestation. Le département d'État américain de l'énergie 37 ( * ) a conclu à une économie d'émission de gaz à effet de serre de 53 millions de voitures et de financements de 46 à 117 milliards de dollars d'ici 2023, dans le cas où les smart grids amélioraient de 5 % seulement le réseau électrique national. Selon une étude européenne 38 ( * ) , les smart grids permettraient même à l'Union de passer dès 2050 à un réseau d'énergie uniquement alimenté par des ressources propres, sûres et renouvelables.
Les États-Unis se sont déjà résolument investis dans le soutien à la filière des réseaux électriques intelligents. En octobre 2009, le président Barack Obama a ainsi annoncé la mise en place d'un plan gouvernemental de 3,4 milliards de dollars en vue de développer des applications industrielles adaptées aux besoins.
Extrêmement prometteuse, la technologie des réseaux électriques intelligents devra toutefois surmonter certains défis en Europe et dans notre pays. Outre ses implications en termes de recueillement de données personnelles, elle requerra la mise au point de normes standard communes à l'ensemble des filières qu'elle irrigue potentiellement (infrastructures réseaux, électroménager, domotique ...).
Une enveloppe de 250 millions est mobilisée dans le cadre du « grand emprunt » pour financer le développement de ces réseaux du futur. Transitant par l'ADEME, ils permettront la conduite d'expérimentations à grande échelle dans les domaines des réseaux de transport et de distribution d'électricité d'une part, des compteurs communicants de l'autre. Il s'agira notamment, selon l'exposé des motifs du projet de loi, de soutenir des projets de démonstration au moyen, tout d'abord, de subventions en recherche et développement pour la mise au point d'un démonstrateur puis, dans un second temps, d'avances remboursables, voire de prises de participation pour sa mise en oeuvre ;
- la « e-santé ». Ce terme désigne l'utilisation d'outils basés sur les technologies de l'information et de la communication (TIC) dans le secteur de la santé, en vue d'améliorer la prévention, le diagnostic, le traitement et le suivi médical ainsi que la gestion de la santé et du mode de vie. Les solutions retenues sont destinées tant aux autorités sanitaires qu'aux professionnels de la santé, aux patients et aux citoyens. Il peut s'agir de réseaux d'information médicale, de dossiers médicaux électroniques, de services de télémédecine ou de portails en ligne sur la santé, de maintien ou d'hospitalisation à domicile.
Il est attendu du FSN qu'il favorise la constitution d'une filière industrielle dans ce domaine. A cette fin, et aux termes de l'exposé des motifs du projet de loi, il soutiendra les PME innovantes par des avances remboursables, des prêts, des appels à projets en recherche et développement et des investissements en capital. L'effet de levier escompté doit être du double de celui des investissements réalisés.
Les secteurs qui feront l'objet d'action privilégiés seront ceux répondant à des besoins sociaux prioritaires :
- en termes d'accès aux soins pour compenser le déclin de la démographie médicale et le fort accroissement des maladies chroniques (téléradiologie ; téléconsultations spécialisées dans quelques domaines prioritaires comme les maladies cardiovasculaires, via de nouveaux dispositifs de permanence des soins comme les « boxes » de téléconsultation en officine ; capteurs pour la télésanté ...) ;
- ou bien en termes de qualité des soins et d'accompagnement de la dépendance (services de télésurveillance et solutions alternatives à l'hospitalisation) ;
- la sécurité et la résilience des réseaux .
L'indisponibilité de certains réseaux ou sites provoquée récemment par des cyber-attaques de la part de « pirates » de l'Internet, voire d'organisations étatiques, est devenue une problématique importante en tant qu'elle affecte l'économie de l'Union, la sécurité de ses États membres et la vie privée de ses citoyens. Elle a mis en avant la nécessité de sécuriser lesdits réseaux et d'améliorer leur résilience, c'est-à-dire leur capacité à résister à des manipulations volontaires ou accidentelle nuisant à leur fonctionnement normal. En effet, et comme le souligne un rapport de 2007 sur la question 39 ( * ) , « la vulnérabilité de notre société en cas de dysfonctionnement de ces réseaux reste mal mesurée et la préparation pour y faire face encore laborieuse ».
Afin que soient mises au point des solutions technologiques permettant d'anticiper et de contrer ces risques d'un nouveau type, il est attendu du FSN le lancement de plusieurs appels à projets. Ils viseront à soutenir la recherche et le développement par le biais de subventions, d'avances remboursables auprès de PME ou de prises de participation dans des démonstrateurs.
Gérés par des consortiums public/privé, ces derniers se rémunéreront en prestations de service visant au renforcement des infrastructures critiques de l'Internet. Les solutions techniques proposées devraient permettre la sécurisation physique des sites sensibles (points d'échanges du web, centrales de stockages ...) et la sécurisation de bout en bout des usages professionnels d'Internet (protocoles sécurisés, virtualisation de serveurs, techniques matérielles et logicielles ...) ;
- les systèmes de transport intelligents .
Ce terme recouvre l'ensemble des applications des TIC au domaine des transports en vue d'en optimiser le rendement, la sécurité, la fiabilité, la mobilité, l'interopérabilité ou encore la consommation énergétique. Leur fonctionnement repose sur des technologies reproduisant les aptitudes liées à l'intelligence humaine (capacités sensorielles, mémoire, communication, traitement de l'information et comportement adaptatif). Ils font appel pour ce faire à des instruments et procédés électroniques extrêmement sophistiqués (technologies de capteurs, de localisation, de calcul, de communication sans fil ...).
En fixant comme objectif à la politique des transports de contribuer au développement durable et de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020, afin de les ramener au niveau atteint en 1990, la loi de programmation du 3 août 2009 relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement a redonné une actualité et une utilité prééminentes à ces technologies. Leur usage permettra en effet d'optimiser l'utilisation des modes de transport collectifs (pour les voyageurs) ou « massifiés » (pour les marchandises), sources de très importantes économies d'énergie.
L'intervention du FSN dans ce cadre se ferait au travers de subventions en recherche et développement, d'avances remboursables ou de prises de participation au développement. Ses actions viseraient à favoriser l'équipement du réseau routier national ou du réseau ferroviaire par des systèmes d'exploitation dynamiques permettant d'améliorer l'information des usagers et la gestion et la régulation des trafics. Pour le réseau ferré, il consisterait à soutenir le développement du système GSM-R, standard de communication sans fil basé sur le GSM et développé spécifiquement pour le rail.
Enfin, il favoriserait l'envol des solutions de communication embarquée, à la fois entre véhicules, mais également entre véhicules et infrastructures, dites de « route intelligente » 40 ( * ) . Le LAVIA (Limiteur s'adaptant à la vitesse autorisée) en est l'exemple le plus connu aujourd'hui. Mais le projet de « route intelligente » intègre aussi les recherches sur les équipements automobiles et les voiries routières capables de s'auto-diagnostiquer ou encore équipées de capteurs capables de détecter des incidents météorologiques nécessitant une modification du mode de conduite ;
- la « ville numérique ».
La concentration dans les centres urbains d'une partie largement majoritaire (75 %) de la population française, la multiplication des réseaux de télécommunication, le dynamisme du web 2.0 et la prise de conscience progressive des élus incitent au développement de la « ville numérique », soit un ensemble ouvert et fluide au centre duquel l'usager-habitant interagirait avec son environnement grâce aux technologies d'information et de communication les plus modernes.
Plusieurs systèmes en ce sens sont déjà en cours de développement. La possibilité d'utiliser les fonds de carte urbains (de type Google earth ) et de les combiner avec d'autres données (ce que l'on appelle le mashup ) donne naissance à de la « réalité augmentée », que l'on peut consulter notamment sur son écran de téléphone portable. Ainsi, un appareil appelé city scan , qui permet la collecte d'un maximum de données possibles (pollution, données météo, trafic routier, images issues de caméras de vidéosurveillance ...) pour créer des applications cartographiques à forte valeurs ajoutées, est en cours d'expérimentation.
Dans ce cadre, le projet de loi fait référence, dans son exposé des motifs, à un appel à projet pour le développement d'usages innovants numériques liés à la ville de demain. Il renvoie également à un appel à manifestations d'intérêt qui serait lancé auprès des collectivités territoriales et des acteurs privés sur la réalisation d'un projet ambitieux (ville ou quartier de grande ville) préfigurant la ville de demain dans toutes ses dimensions (utilisation du numérique pour les infrastructures de transport, de commerce, de tourisme, de loisirs ; prise en compte de l'environnement ; nouveaux services mobiles sans contact ...). Les projets retenus feront l'objet d'un investissement partagé entre l'État, les collectivités et les acteurs privés, en ciblant des réalisations qui pourraient servir de vitrine et de plate-forme d'expérimentation ;
- la « e-éducation ». L'utilisation de l'effet de levier du numérique dans le développement de méthodes et contenus pédagogiques, qui relève davantage de la compétence de la commission des affaires culturelles, pourrait faire l'objet d'un soutien du FSN au travers de subventions ou d'avances remboursables et d'appels à projets ciblés. Seraient prioritairement financés des projets concernant l'enseignement des langues, la lutte contre l'illettrisme et l'accompagnement individuel.
On notera que l'Assemblée nationale, sur proposition du rapporteur général au nom de la commission des finances, M. Gilles Carrez, et de M. Patrice Martin-Lalande, a inséré un article additionnel avant l'article 1 er réduisant à 100 000 euros, au lieu de 150 000 actuellement, le montant minimum des budgets de production requis pour l'éligibilité des projets au crédit d'impôt jeux vidéos (CIJV). Ceci, selon ses auteurs, afin de tenir compte de l'évolution structurelle du marché du jeu vidéo vers le jeu en ligne et de rétablir une égalité de traitement entre la forme ancienne du jeu vidéo sur support physique et cette nouvelle forme du jeu vidéo.
ANNEXE - LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer
- M. Youenn Dupuis , conseiller « énergie et climat » auprès du ministre ;
- M. Benoît Mélonia , conseiller « affaires économiques et budgétaires » auprès du ministre.
Dassault System
- M. Omri Benayoun , conseiller en charge de la stratégie.
Groupe ILIAD
- M. Maxime Lombardini , directeur général ;
- M. Olivier de Baillenx , directeur des relations institutionnelles.
Cap Digital
- M. Henri Verdier , président du pôle de compétitivité.
Systematic
- M. Dominique Vernay , président du pôle de compétitivité.
Centre national d'études spatiales
- M. Yannick d'Escatha , président ;
- M. Pierre Tréfouret , directeur de la communication externe, de l'éducation et des affaires publiques ;
- M. Thierry Duquesne , directeur de la prospective, de la stratégie, des programmes, de la valorisation et des relations internationales ;
- M. Laurent Germain , directeur financier ;
- M. Brice Lamotte , chargé des relations avec le Parlement.
Caisse des dépôts et consignations
- M. Philippe Braidy , directeur du développement territorial ;
- M. Didier Janci , directeur du département « stratégie, économie et développement durable » ;
- M. Arnaud Richard , responsable des relations institutionnelles.
Orange
- M. Pierre-Antoine Badoz , directeur des affaires publiques ;
- M. Eric Debroeck , directeur des affaires réglementaires ;
- Mme Florence Chinaud , directeur des relations institutionnelles.
Eutelsat :
- M. Yves Blanc , directeur des relations institutionnelles et de la stratégie ;
- Mme Astrid Bonté , responsable des relations institutionnelles.
ADEME :
- M. Philippe Van de Maele , président.
ARCEP :
- M. Jean-Ludovic Silicani , président ;
- M. Philippe Distler , directeur général ;
- M. Nicolas Potier , chargé de mission auprès du président ;
- M. Igor Primault , conseiller auprès du directeur général.
OSÉO :
- M. François Drouin , président.
Direction générale de la compétitivité de l'industrie et des services au sein du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :
- M. Luc Rousseau , directeur général ;
- Mme Véronique Barry , sous-directrice de l'innovation, de la compétitivité et du développement des PME ;
- Mme Cécile Dubarry , chef du service des technologies de l'information et de la communication.
Syndicat national des jeux vidéo
- M. Nicolas Gaume , président ;
- M. Julien Villedieu , délégué général.
PSA Peugeot Citroën
- Mme Thérèse Martinet , directeur des relations institutionnelles ;
- M. Hervé Pichon , délégué à la direction des relations institutionnelles, chargé des relations avec le Parlement.
EDF
- M. Yves Bamberger , directeur de la recherche et développement ;
- M. Bertrand Le Thiec , directeur-adjoint chargé des affaires publiques.
SFR
- Mme Marie-Georges Boulay , directeur de la réglementation et des relations extérieures ;
- M. Arnaud Lucaussy , directeur de la réglementation et des études économiques.
ASMEP-ETI
- Mme Bénédicte Michon , déléguée générale ;
- M. Frédéric Coirier , président du directoire du groupe Poujoulat.
SANOFI-AVENTIS / CNEGI
- M. Jean-François Dehecq , président.
Syndicat des énergies renouvelables
- M. André Antolini , président ;
- M. Jean-Philippe Roudil , délégué général ;
- M. Alexandre de Montesquiou , consultant (AI2P).
AREVA
- M. Edouard Philippe , directeur des affaires publiques.
Fonds stratégique d'investissement
- M. Bertrand Finet , membre du comité exécutif ;
- M. Arnaud Barthélémy , responsable des affaires publiques.
CGPME
- M. Olivier Midière , président de la commission « économie numérique » ;
- M. Michel Jeannerod , représentant des industries mécaniques ;
- Mme Jennifer Bastard , juriste.
Ministère du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État
- M. Alexis Vuillemin , conseiller auprès du ministre ;
- Mme Annabelle Archien , conseiller technique auprès du ministre ;
- Mme Claire Bueno , conseiller technique auprès du ministre ;
- M. Pierre Pédinielli , conseiller parlementaire auprès du ministre.
* 1 Investir pour l'avenir - Priorités stratégiques d'investissement et emprunt national , rapport au Président de la République, novembre 2009.
* 2 Appelée également « commission Attali », du nom de son président Jacques Attali, cette commission avait été chargée par le Président de la République de rédiger un rapport fournissant des recommandations et des propositions afin de relancer la croissance économique de la France, qu'elle avait rendu le 23 janvier 2008.
* 3 Recherche et innovation en France : surmonter nos handicaps au service de la croissance ; rapport d'information n° 392 (2007-2008) de MM. Joseph Kergueris et Claude Saunier, fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 11 juin 2008.
* 4 Exceptés les 750 millions d'euros affectés à la numérisation des contenus.
* 5 Voir infra.
* 6 Une dotation non consomptible est une dotation en capital qui ne peut être consommée. Elle est obligatoirement placée et son propriétaire dispose seulement de la libre utilisation des revenus générés par le capital. Les dotations non consomptibles dans le cadre du grand emprunt ont ceci de particulier que leur bénéficiaire n'est même pas libre de les placer : elles sont en effet obligatoirement déposées sur un compte au Trésor. Elles ne génèrent pas véritablement un revenu financier, puisque c'est l'État qui décide de la rémunération qui leur sera attribuée.
* 7 10 milliards d'euros de dotations consomptibles et 3 milliards d'euros d'avances remboursables.
* 8 Il s'agit bien d'une hypothèse car aucun programme d'investissement opérationnel n'est évidemment disponible pour l'heure.
* 9 Voir infra , deuxième partie, chapitre II.
* 10 Entreprises de taille intermédiaire.
* 11 Collectif budgétaire pour 2010, rapport de M. Gilles Carrez, rapporteur général pour la commission des finances de l'Assemblée nationale, n° 2268, voir notamment pp. 23 à 25 et 42 et 43.
* 12 Journal officiel des Communautés européennes, 2006/C 323/01, 30 décembre 2006.
* 13 Commission européenne, Vade-mecum - Législation communautaire en matière d'aides d'État, 30 septembre 2008.
* 14 Règlement n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité.
* 15 États généraux de l'industrie -Bilan de la concertation. Rapport final, 1 er février 2010.
* 16 Les pôles de compétitivité : bilan et perspectives d'une politique industrielle et d'aménagement du territoire. Rapport d'information présenté par MM. Michel Houel et Marc Daunis au nom du groupe de travail sur les pôles de compétitivité, constitué par la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire du Sénat (2009-2010).
* 17 Le livre bleu des engagements du « Grenelle de la mer », synthèse du groupe n° II : Entre menaces et potentiels, une mer fragile et promesse d'avenir, 10 et 15 juillet 2009
* 18 États généraux de l'industrie : bilan de la concertation, rapport final, 1 er février 2010
* 19 L'enjeu d'une politique européenne de lanceurs : assurer durablement à l'Europe un accès autonome à l'espace, rapport fait par MM. Bernard Bigot, Yannick d'Escatha et Laurent Collet-Billon.
* 20 Une vision pour 2020, janvier 2001. Ce rapport a abouti à la création de l'ACARE ou « Advisory Council for Aeronautics Research in Europe ». Les objectifs concernent les aéronefs construits en 2020.
* 21 Données de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).
* 22 Articles R. 3423-1 et suivants du code de la défense.
* 23 Discours du 11 décembre 2007 à Vandoeuvre-lès-Nancy.
* 24 La production d'énergie solaire photovoltaïque est encore très marginale. Le parc installé des panneaux photovoltaïques est de 200 MgW. Avec un rendement de 15 %, sa production équivaut à celle de 80 éoliennes.
* 25 La performance énergétique des bâtiments : comment moduler la règle pour mieux atteindre les objectifs - Rapport de l'OPECST, n° 2141, Assemblée nationale, treizième législature / n° 135 Sénat (2009-2010) - MM. Christian Bataille et Claude Birraux, députés.
* 26 Le coefficient de conversion de l'électricité rend compte de la quantité d'énergie primaire utilisée en amont pour produire un kilowatt heure d'électricité consommée par l'utilisateur final. Ce coefficient est actuellement fixé à 2,58 par la réglementation.
* 27 En priorité, et aux côtés d'autres instruments tels que les fonds européens, la participation des collectivités territoriales ou encore le produit du « dividende numérique ».
* 28 Selon la définition de l'ARCEP, les offres très haut débit incluent un service d'accès à Internet avec un débit crête descendant supérieur à 50 Mbit/s et un débit crête remontant supérieur à 5 Mbit/s.
* 29 Selon lequel tout opérateur peut demander à l'opérateur d'immeuble (c'est-à-dire l'opérateur choisi par la co-propriété pour fibrer l'immeuble) de disposer d'une fibre supplémentaire dédiée pour chaque logement, moyennant un préfinancement de son installation et un co-financement de l'investissement initial.
* 30 Intimant au minimum l'engagement de l'opérateur candidat à co-investir avec un autre opérateur le désirant.
* 31 Palaiseau pour Orange et Bondy pour SFR.
* 32 Approches d'hébergement avec le cloud computing et la virtualisation, 2009-2011, MARKESS International.
* 33 Qui a investi 2 milliards de dollars par an sur les deux dernières années.
* 34 Qui a investi quant à lui un milliard de dollars par an.
* 35 La Grande-Bretagne projette cependant de développer une plateforme de cloud computing.
* 36 Souvent associé au cloud computing , le software as a service (Saas) est un mode spécifique de consommation des applications : celles-ci sont utilisées et payées à la demande, par minute de consommation par exemple, et non plus acquises une fois pour toutes par l'achat de licences.
* 37 Exploring the imperative of revitalizing America's electric infrastructure : how a smarter grid works as an enabling engine for our economy, our environment and our future ; préparé pour le département d'État américain de l'énergie par Litos strategic communication, 2009.
* 38 Développement durable, changement global et écosystèmes ; thématiques prioritaires du sixième programme communautaire de recherche pour la période 2002-2006, septembre 2002.
* 39 Rapport sur la résilience des réseaux de télécommunications ; fait par le Conseil général des ponts et chaussées, le Conseil général des technologies de l'information, le Contrôle général des armées, le Conseil général des mines, l'Inspection générale de l'administration et l'Inspection générale des finances ; juin 2007.
* 40 La route de cinquième génération, dite « route intelligente », capable de dialoguer avec les véhicules, devrait voir le jour d'ici dix à vingt ans. Elle fait appel à des capteurs et émetteurs placés le long de la chaussée, qui envoient des informations au véhicule pour l'informer de sa position exacte mais aussi lui recommander une vitesse adaptée à l'état du revêtement et aux conditions météos.