B. LE PASSAGE NÉCESSAIRE AU TRÈS HAUT DÉBIT
Depuis longtemps, les réseaux numériques représentent, au même titre que les infrastructures routières, une part essentielle de l'activité des professionnels et un élément de la qualité de vie quotidienne . Or les « autoroutes de l'information » évoquées dans les années 1990 feraient figure aujourd'hui de sentiers à peine carrossables : les besoins actuels d'interactivité et de transfert de fichiers, notamment multimédias, exigent d'aller bien au-delà du haut débit défini officiellement, rappelons-le, comme un accès à seulement 512 kilo-octets par seconde.
Le très haut débit va donc devenir au cours des années à venir un élément clé de l'attractivité des territoires , notamment pour l'implantation de nouvelles entreprises.
Or, si les pouvoirs publics se reposent sur l'action des opérateurs sans engager une action volontariste, la fibre optique sera déployée seulement dans les grandes métropoles. Une nouvelle fracture numérique opposera alors celles-ci aux villes moyennes et aux zones rurales : la généralisation d'internet, loin de faciliter comme on pourrait le croire l'installation des entreprises à la campagne grâce aux possibilités de communication à longue distance qu'il offre, risque au contraire de les pousser à rejoindre les zones urbaines.
L'enjeu économique est essentiel et représente, selon la Commission européenne, un million d'emplois au niveau de l'Union et 0,6 % de croissance supplémentaire. Le coût du déploiement d'un réseau à très haut débit sur l'ensemble du territoire est également considérable : environ 40 milliards d'euros en France, un quart pour couvrir 40 % de la population (en zone urbaine) et les trois autres quarts pour le reste du territoire 16 ( * ) .
Or, la commission dirigée par MM. Alain Juppé et Michel Rocard, chargée de formuler des recommandations sur la mise en oeuvre du « grand emprunt » annoncé par le Président de la République, recommande dans son rapport rendu le 19 novembre 2009 de créer un fonds dédié pour accélérer la transition de la France vers le très haut débit . Ce fonds serait doté de deux milliards d'euros et agirait en complément de l'action des collectivités territoriales pour les zones les moins denses.
Votre rapporteur pour avis est favorable à la création d'un tel fonds , dont la création a aussi été proposée par la proposition de loi de notre collègue M. Xavier Pintat relative à la fracture numérique, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale.
Le grand emprunt a en effet vocation à financer des dépenses d'investissement susceptibles de permettre le retour à une croissance durable. La couverture numérique du territoire en accès à haut débit approchant de son terme grâce au plan France Numérique 2012, il faut d'ores et déjà se lancer dans la généralisation progressive du très haut débit.
Le déploiement du très haut débit doit être fondé, comme l'a indiqué notre collègue Bruno Retailleau dans son rapport 17 ( * ) sur la proposition de loi précitée, sur une vision stratégique du territoire : si les initiatives privées trouveront dans les zones les plus urbanisées un modèle économique pour déployer un ou plusieurs réseaux concurrents, l'intervention de la puissance publique sera légitime et nécessaire dans les zones peu denses, notamment par la voie du grand emprunt. Il faudra pour cela conjuguer les technologies les plus adaptées sur des critères de qualité de service et en fonction des caractéristiques des territoires : si la fibre optique demeure la solution de choix et sera sans doute la plus utilisée, les technologies satellitaires ou de téléphonie mobile (notamment le LTE ou Long Term Evolution ) permettront d'apporter des débits élevés en zone rurale.
* 16 Rapport du cabinet IDATE.
* 17 Rapport n° 559 (2008-2009) de M. Bruno Retailleau, fait au nom de la commission de l'économie, déposé le 15 juillet 2009.