B. LA POURSUITE DE LA LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE ET L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE
1. Un taux de délinquance stabilisé
L'année 2007 a vu le niveau de la délinquance se stabiliser dans l'ensemble des quatre départements d'outre-mer, avec 102.936 infractions constatées, soit un nombre similaire à celui de l'année 2006.
La tendance à la baisse déjà constatée en 2006 en Martinique et à La Réunion s'est poursuivie, quoique à un niveau moins important (avec des baisses respectivement de 1,58 % et 1,92 % par rapport à 2006). Ces bons chiffres se relèvent notamment pour les faits de délinquance de proximité, en baisse de 14,66 % et 27,30 %. Cependant, votre commission souligne, pour la Martinique, l'augmentation de plus de 17,52 % des faits de délinquance mettant en cause des mineurs : si le taux de délinquance constaté dans ce département (13,56 %) reste encore inférieur à celui observé en métropole (18,04 %), il témoigne d'une évolution préoccupante .
Comme l'année passée, la Guyane se distingue de cette évolution générale, avec une augmentation de 2,08 % des infractions recensées. Pour autant, selon les données fournies par le secrétariat d'Etat à l'outre-mer, cette hausse résulte du niveau jusqu'ici jamais atteint des infractions constatées à la législation sur les étrangers, qui représentent 51 % de l'ensemble des infractions constatées dans le département. Au contraire, la délinquance générale, la délinquance de proximité ainsi que la délinquance des mineurs connaissent une baisse réelle, avec respectivement des taux de - 6,4 %, - 25,68 % et - 2,81 %.
En Guadeloupe, l'évolution de la délinquance apparaît en revanche contra-cyclique, avec une hausse de 4,29 % en un an des faits de délinquance. Il semblerait néanmoins que cette évolution résulte en partie d'une plus forte activité des services de lutte contre les stupéfiants, le nombre d'infractions constatées dans ce domaine augmentant de plus de 20 %.
Faits de délinquance constatés (2005-2007) |
|||||
2005 |
2006 |
2007 |
Evolution 2006/2007 |
Rappel évolution 2005/2006 |
|
Guadeloupe |
24.765 |
24.872 |
25.939 |
+4,29 % |
+0,4 % |
Martinique |
22.252 |
21.585 |
21.244 |
-1,58 % |
-3 % |
Guyane |
23.458 |
24.333 |
24.839 |
+2,08 % |
+3,73 % |
La Réunion |
34.177 |
31.518 |
30.914 |
-1,92 % |
-7,78 % |
Total DOM |
104.652 |
102.308 |
102.936 |
-0,61 % |
-1,86 % |
Total national |
3.775.838 |
3.725.588 |
3.589.293 |
- 3,66 % |
-1,33 % |
Source : secrétariat d'Etat à l'outre-mer. |
Cette stabilisation de la délinquance se traduit par une amélioration de l'indice de criminalité qui s'établit désormais à 55,51 %o -son plus bas niveau depuis 8 ans-, liée à l'accroissement de la population des départements d'outre-mer.
Ainsi, en Guyane, le taux de criminalité a sensiblement décru, passant de 124 %o en 2006 à 118 %o en 2007. Il baisse à nouveau en Martinique et à La Réunion pour atteindre son plus bas niveau depuis 2000. En Guadeloupe, à l'inverse, ce taux passe de 62 %o à 63,3 %o, reflet de l'augmentation des faits délictueux constatés sur son territoire en 2007.
Sur ce point, l'évolution constatée dans les départements et régions d'outre-mer correspond à celle de la métropole, où l'indice de criminalité s'élève désormais à 58,3 %o.
Évolution de l'indice de criminalité de 2000 à 2007 (pour 1.000 habitants) |
||||||
Guadeloupe |
Martinique |
Guyane |
La Réunion |
Total
|
Total
|
|
2000 |
60,6 %o |
58,4 %o |
100,9 %o |
40,6 %o |
63,41 %o |
64,21 %o |
2001 |
63,97 %o |
64,91 %o |
87,81 %o |
46,50 %o |
63,41 %o |
68,8 %o |
2002 |
69,38 %o |
64,45 %o |
111 %o |
48,25 %o |
63,41 %o |
69,3 %o |
2003 |
65,89 %o |
58,21 %o |
115,85 %o |
45,67 %o |
59,97 %o |
66,98 %o |
2004 |
64,44 %o |
59,92 %o |
110,75 %o |
44,79 %o |
59,86 %o |
63,55 %o |
2005 |
61,55 %o |
55,82 %o |
122,82 %o |
44,10 %o |
59,44 %o |
62,72 %o |
2006 |
62 %o |
54,26 %o |
124,15 %o |
40,14 %o |
57,61 %o |
61,89 %o |
2007 |
63,3 %o |
52,9 %o |
118,8 %o |
38,9 %o |
55,51 %o |
58,3 %o |
Source : secrétariat d'Etat à l'outre-mer |
La tendance générale à la stabilisation de la délinquance ne doit pas conduire le Gouvernement à relâcher ses efforts afin d'assurer aux personnes résidant outre-mer la sécurité qu'ils sont en droit d'attendre de la République.
Aussi votre commission souhaite-t-elle que les actions des groupements d'intervention régionaux (GIR) soient encore renforcées à l'avenir et que les actions de lutte contre l'orpaillage clandestin en Guyane se poursuivent à un rythme soutenu.
Elle constate donc avec satisfaction qu'après celles de la Guyane, les unités d'organisation et de commandement (UOC) des GIR de la Guadeloupe et de La Réunion sont devenues, depuis le début de l'année 2008, des structures à caractère permanent, ce qui constituera un élément d'efficacité supplémentaire dans la lutte contre la délinquance organisée dans ces deux départements.
Par ailleurs, elle se félicite des effets positifs des opérations « Anaconda » et « Harpie » en Guyane. La plus grande disponibilité des forces armées en Guyane dans le cadre de ces opérations de lutte contre l'orpaillage illégal a conduit à d'incontestables résultats en trois ans, en permettant de déstabiliser les filières d'orpaillage clandestin en forêt guyanaise.
Le nombre d'opérations « Anaconda » n'a cessé d'augmenter, passant de 37 en 2003 à 113 en 2007. Elles ont donné lieu, pour l'année 2007, à la saisie ou la destruction de matériels estimés à 23 millions d'euros. A la suite de ces opérations, 691 étrangers en situation irrégulière ont été reconduits à la frontière.
Les 211 opérations « Harpie » qui leur ont succédé à compter du début de l'année 2008 ont déjà permis des saisies et des destructions de matériels pour un montant de 28 millions d'euros. 624 étrangers en situation irrégulière ont été reconduits à la frontière à cette occasion.
Les effectifs globaux de la police nationale ou de la gendarmerie nationale restent relativement stables par rapport à l'an passé .
Il convient de saluer en particulier la hausse des effectifs de police de plus de 5 % en Guadeloupe et de 15 % en Guyane , ce dernier département étant doté d'un effectif de 88 agents supplémentaires.
Quant à la gendarmerie mobile, elle est toujours fortement présente en Guyane, cinq escadrons étant à l'oeuvre sur ce seul territoire.
Évolution des
effectifs de la police nationale
|
||||||
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
Evolution
|
|
Guadeloupe (1) |
916 |
909 |
906 |
930 |
978 |
+ 5,1 % |
Martinique |
773 |
822 |
873 |
863 |
837 |
- 3 % |
Guyane |
531 |
590 |
588 |
575 |
663 |
+ 15 % |
La Réunion |
932 |
991 |
1.052 |
1.096 |
1.056 |
- 3,6 % |
(1) Effectifs hors Saint-Barthélemy et Saint-Martin |
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Source : secrétariat d'Etat à l'outre-mer. |
Évolution des effectifs de la gendarmerie
nationale
(1)
|
||||||
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
Evolution
|
|
Guadeloupe (2) |
607 |
607 |
603 |
600 |
596 |
- 0,6 % |
Martinique |
626 |
626 |
626 |
626 |
620 |
- 0,9 % |
Guyane |
445 |
445 |
451 |
479 |
469 |
- 2 % |
La Réunion |
725 |
725 |
725 |
735 |
736 |
+ 0,1 % |
(1) Hors escadrons de gendarmerie mobile. (2) Effectifs hors Saint-Barthélemy et Saint-Martin. |
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Source : secrétariat d'Etat à l'outre-mer. |
Votre commission souhaite par ailleurs que la réforme de la carte militaire ne mette pas à mal la participation des forces armées, notamment en Guyane, à des opérations de maintien de l'ordre ponctuelles ou d'aide aux victimes en cas de sinistres liés à des calamités naturelles, fréquentes outre-mer .
Selon la décision arrêtée par le président de la République, quatre unités de l'armée seront en effet fermées à l'horizon 2011 dans les départements d'outre-mer : le 41ème Bataillon d'infanterie de marine de Baie-Mahaut (Guadeloupe), le 33ème Régiment d'infanterie de marine de Fort-de-France et la Base aérienne 365 du Lamentin (Martinique), ainsi que la Base aérienne 181 de Sainte-Clotilde (La Réunion). Ainsi, l'effectif actuel de 5.590 personnes devrait être réduit à 4.520.
Le caractère souvent transfrontalier de la délinquance dans les départements et régions ultramarines a conduit le Gouvernement à conclure des accords avec certains Etats voisins destinés à faciliter la coopération policière transfrontalière . Votre commission estime que cette démarche doit être poursuivie et amplifiée.
Un accord de coopération transfrontalière en matière policière a été signé avec le Suriname le 29 juin 2006. Il prévoit des patrouilles communes, des échanges d'informations et le détachement d'un fonctionnaire dans l'Etat voisin.
Avec le Brésil, la conclusion de deux accords de coopération est envisagée, notamment afin de faire face à la nouvelle situation créée par l'édification du pont sur l'Oyapock, reliant l'Etat d'Amapa à Saint-Georges de l'Oyapock. Un premier accord devrait porter sur la création d'un « Bureau de contrôles nationaux juxtaposés » (BCNJ), chargé du contrôle de la circulation des personnes et des biens à la butée du pont. Le second devrait mettre en place un « Centre de coopération policière et douanière », afin de faciliter l'échange d'informations entre les administrations des deux Etats.
Votre commission insiste tout particulièrement sur l'importance d'une coopération policière régionale dans la lutte contre le trafic de stupéfiants dans la zone Antilles-Guyane , 75 % des saisies de cocaïne réalisées en France, l'ayant été dans cette zone, à l'occasion d'interceptions en mer. Cette coopération est d'autant plus nécessaire que le nombre d'infractions constatées à la législation sur les stupéfiants a crû de près de 30 % entre 2006 et 2007.