2. La réforme des organismes de recherche
Conformément à la lettre de mission adressée le 5 juillet 2007 par le Président de la République à la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, les grands organismes de recherche français évoluent vers un modèle fondé sur la double mission d'opérateur et d'agence de moyens.
Déjà engagée par plusieurs institutions, cette réforme concerne prioritairement le CNRS et l'INSERM.
a) Le CNRS
Rappelons que dans son rapport annuel de février 2008, la Cour des comptes avait estimé que le CNRS n'était « pas parvenu dans les dernières années à inscrire une stratégie dans la durée ».
Depuis cette date, une réforme du CNRS a été engagée et son conseil d'administration a adopté, le 1er juillet dernier, son nouveau plan stratégique, intitulé « Horizon 2020 ».
Ce dernier définit la réorganisation du CNRS en neuf instituts . Ceux-ci correspondent chacun à un domaine cohérent : mathématiques et application, physique et nanosciences, chimie, technologies, informatique, environnement et biodiversité, sciences de l'univers, physique des particules, sciences humaines et sociales.
Les instituts ont une double mission :
- d'opérateur d'un noyau de laboratoires et d'unités stratégiques dans leur domaine d'intervention ;
- d'agence de moyens pour des laboratoires extérieurs, notamment universitaires, s'inscrivant dans leur champ de compétences, et qui ont vocation à exercer des missions de coordination dans leurs thématiques principales.
Précisons que les directeurs des instituts font partie du comité de direction du CNRS et que la direction de ce dernier est renforcée.
La gestion de structures plus ou moins nombreuses sera confiée à un seul organisme, ce qui allégera considérablement les procédures de gestion trop bureaucratiques à l'heure actuelle (jusqu'à cinq tutelles différentes). En outre, l'allocation des financements sera aussi beaucoup plus précise car une enveloppe donnée sera dirigée vers un laboratoire donné et non vers l'université qui l'héberge.
Le CNRS souhaite faire évoluer ses partenariats avec les établissements d'enseignement supérieur et de recherche , avec un format mieux adapté à l'autonomie de ces derniers. Dans le cas où d'autres organismes sont concernés, une coordination plus étroite doit être instaurée avec eux. Ces partenariats doivent être refondés sur la base d'objectifs stratégiques et de responsabilités partagés, centrés sur l'excellence, la pertinence vis-à-vis des enjeux nationaux et internationaux, ainsi que la formation.
Des « conventions de partenariat global » doivent être signées. Il est prévu que chaque partenaire mette des moyens humains et financiers à disposition des projets et reste employeur de ses personnels. Ce partenariat implique un partage d'information et la formalisation d'une stratégie partagée en termes d'objectifs scientifiques et de ressources humaines. Dans les UMR (unités mixtes de recherche), le principe du mandat unique de gestion confié à l'hébergeur est progressivement mis en place.
Relevons que la commission permanente de la CPU a récemment « déploré l'attitude actuelle du CNRS » concernant la mise en place de chaires « jeunes chercheurs », car elle regrette que le CNRS propose « directement aux laboratoires de recherche la création de chaires, en court-circuitant les passages indispensables devant les instances universitaires ». Pour elle, « dans la mesure où toute chaire impose la mise à disposition d'un poste de maître de conférences et l'attribution de moyens financiers connexes par l'université, il est impératif qu'une négociation réelle ait lieu, chaire par chaire, entre la présidence de chaque université concernée et le CNRS. En l'absence d'une telle négociation ouverte et équitable, en amont de la procédure », la commission permanente de la CPU demande aux universités de « suspendre jusqu'à nouvel ordre le processus de publication d'emploi permettant la création d'une chaire ».
Vos rapporteurs souhaitent qu'une concertation constructive entre établissements de recherche et d'enseignement supérieur permette la mise en place intelligente et efficace des chaires « jeunes chercheurs ».
b) L'INSERM
La réforme de l'INSERM est également en cours. Le gouvernement souhaite faire de cet organisme le véritable pivot de la recherche biomédicale française , qui souffrait de l'émiettement et de la complexité des structures.
Il s'agit de lui confier également un rôle renforcé de coordination et d'agence de moyens. L'objectif est de clarifier le paysage de la recherche médicale française, afin d'atteindre une meilleure efficacité et une meilleure lisibilité du dispositif. L'INSERM devra devenir l'acteur institutionnel national de la coordination de l'ensemble des programmes de recherche biomédicale.
Dans cet esprit, l'organisme a conclu, pour la première fois depuis sa création, un contrat pluriannuel d'engagements avec l'État pour la période 2008-2011. En mars 2008, son conseil d'administration a approuvé la création de huit instituts thématiques . Actuellement ces instituts couvrent les domaines suivants : neurosciences, neurologie, psychiatrie ; génétique et développement ; cancer ; maladies infectieuses ; immunologie, hématologie, pneumologie ; circulation, métabolisme, nutrition ; santé publique ; technologies pour la santé.
Une des principales missions de ces instituts est de réaliser un état des lieux et d'améliorer la visibilité de la recherche biomédicale française dans ces grandes thématiques, mais surtout de contribuer de manière plus efficace à l'animation de la communauté scientifique et de proposer, pour chaque domaine, une stratégie, les grands objectifs à court, moyen et long termes et une programmation associée. Elle doit aussi favoriser les nécessaires transversalités entre les domaines thématiques.
Dans ce cadre, ces instituts sont chargés d'une coordination nationale et doivent associer étroitement des représentants des différents opérateurs concernés par les domaines thématiques (CNRS, CEA, INRA, IRD, CIRAD, les fondations et des agences de financement).
Cette réorganisation pose certains problèmes de périmètre , notamment pour ce qui concerne les sciences du vivant, mais aussi dans le domaine des sciences et technologies du logiciel.
L'AERES vient de rendre public, en novembre 2008, son rapport d'évaluation sur l'INSERM, dont les principales recommandations figurent dans l'encadré ci-après.
Votre rapporteur forme le voeu que la réforme en cours les prenne en compte.
RECOMMANDATIONS DE L'AERES I - Recommandations principales - La France doit faire preuve d'audace pour rationnaliser et unifier son mode de pilotage de la recherche dans le domaine des sciences de la vie et de la santé - Créer un Institut national unique pour la recherche dans le domaine des sciences de la vie et de la santé chargé de financer et non de gérer tous les programmes de recherche dans ce domaine - Réévaluer le statut, la rémunération et la carrière professionnelle des chercheurs français en sciences de la vie et en santé - Établir une stratégie spécifique de mise en oeuvre destinée à garantir la continuité pendant les quelques années de transition II - Recommandations complémentaires - Rationnaliser les processus de jugement par les pairs d'évaluation - Unifier et simplifier la gestion des questions de propriété intellectuelle - Examen approfondi de la répartition du budget de l'INSERM - Améliorer les relations avec toutes les parties prenantes de la recherche, en particulier le grand public - Maximiser l'utilisation et la coordination des financements pour la recherche clinique - Réduire le nombre et la taille des comités consultatifs |