II. EXAMEN DU RAPPORT
Réunie le mercredi 28 novembre 2007 , sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Anne Marie Payet sur le projet de loi de finances pour 2008 (mission « Outre mer »).
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis , a indiqué que le projet de budget de la mission « Outre-mer » s'élève à 1,73 milliard d'euros en crédits de paiement et à 1,76 milliard d'euros en autorisations d'engagement. A périmètre constant, il augmente de 3 % en crédits de paiement et de 2,6 % en crédits d'engagement, ce qui confirme le rétablissement d'un rapport raisonnable entre l'engagement et la dépense initié l'année dernière dans le secteur du logement.
Ceci étant, ces crédits ne représenteront en 2008 que 13,5 % de l'ensemble de l'effort budgétaire de l'Etat en faveur de l'outre-mer, lui-même en augmentation de 3,5 % par rapport à 2007. Enfin, le montant des dépenses fiscales profitant à l'outre-mer est estimé à 2,8 milliards d'euros, soit 5 % de plus qu'en 2007.
Le projet de budget comporte d'importants changements de périmètre : la mission « Outre-mer », qui comportait jusqu'ici trois programmes, est désormais réduite à deux : le programme 123 « conditions de vie outre-mer » et le programme 138 « emploi outre mer ».
Deux actions du programme supprimé sont transférées sur le programme 123 « conditions de vie outre-mer » de la mission « Outre-mer », une troisième, l'action « soutien et état-major », est transférée sur la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » du ministère de l'intérieur. L'objectif, louable, de ce transfert est la mutualisation des moyens de gestion dans le cadre du rattachement de l'outre-mer au ministère de l'intérieur et des collectivités territoriales.
Par ailleurs, et ce mouvement est tout aussi significatif, une partie des crédits du programme 138 « emploi outre-mer » sera transférée vers la mission « Travail et emploi », répartie entre le ministère des finances et celui du travail. Celle-ci va désormais gérer l'ensemble des contrats aidés outre-mer, dans le secteur marchand comme dans le secteur non marchand. Il s'agit de lancer la réorientation du secrétariat d'Etat vers son rôle naturel de coordination. De nombreux audits récents ont préconisé ce recentrage dont la réussite suppose que le secrétariat d'Etat exercera, sur le plan interministériel, son expertise avec toute l'autorité nécessaire.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis , a estimé indispensable d'apprécier l'évolution des dotations en fonction de l'ensemble de ces mouvements.
Ainsi, les crédits de l'emploi diminuent de 12 % en raison des ajustements comptables. Mais en réalité, au sein du programme « emploi outre mer », les crédits de l'action « abaissement du coût du travail », entièrement dédiée l'année prochaine à la compensation des exonérations de charges sociales, augmentent de 5,3 %. En revanche, dans le même programme, l'action « aide à l'insertion et à la qualification professionnelle », désormais vidée de l'essentiel de sa substance dans la mesure où la plupart des contrats aidés sont désormais comptabilisés sur la mission « Travail et emploi », diminue de 55,2 %.
Le secrétariat d'Etat ne conserve en 2008, en matière de contrats aidés, que la mise en oeuvre de la formation en mobilité ainsi que la gestion des mesures propres aux collectivités du Pacifique.
Au vu de cette dispersion de la présentation des actions, Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis , a estimé qu'il faudra trouver un moyen de concilier l'indispensable évolution du secrétariat d'Etat vers la fonction de coordination justifiant pleinement la plupart des transferts avec une présentation budgétaire capable de donner au Parlement un panorama satisfaisant des aides spécifiques à l'outre-mer.
En ce qui concerne les exonérations de charges sociales, elle a indiqué que les 867 millions d'euros prévus en 2008 seront insuffisants, dans la mesure où le montant prévisionnel des remboursements pour 2008 s'élève à 1,13 milliard. Elle a souhaité que la dette de l'Etat à l'égard des organismes de sécurité sociale, qui pourrait atteindre 330 millions d'euros en 2007, n'augmente pas en 2008.
Evoquant la préparation d'une nouvelle loi de programme pour l'outre-mer, elle a indiqué que 2008 sera peut-être l'occasion de procéder à quelques ajustements de ces dispositifs très utiles.
Pour les actions en faveur du logement, les crédits de paiement progressent de 13,8 %, alors que les autorisations d'engagement augmentent de 12 %. L'écart sera de 36 millions, contre 35 millions en 2007, année qui a déjà marqué un progrès très sensible dans ce domaine. Pour autant, la dette comptable de l'Etat à l'égard des opérateurs sociaux, totalement apurée au début de 2007, ne doit pas progresser à nouveau durant les prochaines années.
Elle a ensuite rappelé la nécessité d'obtenir une programmation pluriannuelle des crédits du logement social et la défiscalisation des acquisitions foncières des collectivités territoriales, et a approuvé certaines pistes récemment évoquées pour la réforme de la loi de programme : la réorientation de la défiscalisation vers le logement social, le renforcement du partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales pour un meilleur pilotage de la politique du logement, la sécurisation et la diversification des financements afin d'accroître l'offre de logements à loyers et prix maîtrisés.
Le fait que le gouvernement accorde un caractère prioritaire à la construction en 2008 des 12 500 logements sociaux prévus à l'article 23 de la loi instituant le droit au logement opposable est un point très positif, mais la résorption de l'habitat insalubre, ne sera dotée que de 21,3 millions d'euros, contre 34,5 en 2007.
En ce qui concerne la continuité territoriale, qui bénéficiera en 2008 de 54,2 millions d'euros contre 54 millions en 2007, Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, a rappelé que parmi les dispositifs ainsi financés se trouve le passeport mobilité. Celui-ci recevra une dotation de 15,8 millions d'euros, contre 16 millions en 2007, alors que le coût effectif du dispositif s'est élevé à 19,8 millions en autorisations d'engagement en 2006. Elle a estimé que des économies sensibles sont à faire du côté des compagnies aériennes, en fixant des prix plafond.
Enfin, sur l'action sanitaire et sociale, dotée en 2008 de 35,2 millions d'euros en crédits de paiement, contre 56,8 millions en 2007, il faut regretter l'absence, dans le projet de budget, d'explication sur la disparition d'un certain nombre de dispositifs mentionnés les années précédentes.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis , a conclu en rappelant quelques nécessités susceptibles d'être prises en compte soit dans le cadre de la prochaine loi de programme, soit au plan réglementaire :
- lutter contre les addictions, en particulier en interdisant la vente du tabac sans licence dans les Dom et en taxant le tabac à rouler ;
- ouvrir le droit à l'allocation logement aux personnes résidant dans des logements-foyers non conventionnés ;
- concernant le barème de l'allocation logement, remettre à niveau le « forfait charges » spécifique des Dom afin de contenir, dans des marges acceptables, le taux d'effort effectif des bénéficiaires.
Enfin, elle a proposé à la commission de se prononcer en faveur de l'adoption des crédits 2008 de la mission « Outre-mer ».
Répondant à M. Alain Milon, Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, a confirmé que le droit à l'allocation logement n'est pas ouvert, dans les Dom, aux personnes résidant dans des logements-foyers non conventionnés.
M. Nicolas About, président , a demandé si une consommation insuffisante des crédits de résorption de l'habitat insalubre en 2007 peut expliquer la diminution des montants prévus pour 2008.
M. Guy Fischer a noté que le manque d'ouvriers non spécialisés ralentit souvent la construction de logements.
M. Serge Larcher a indiqué que la consommation des crédits du logement social est satisfaisante dans les Dom et a estimé que la dette de l'Etat n'a pas été totalement apurée au début de l'exercice 2007.
L'indivision constitue un frein important à la construction et à la réhabilitation en provoquant le gel de terrains, il est donc nécessaire de régler ce problème si l'on veut relancer la politique du logement.
Par ailleurs, le projet de budget manque d'objectifs clairs et chiffrés : combien d'emplois compte-t-on obtenir grâce à la défiscalisation et aux exonérations de charges, combien de logements veut-on construire en 2008, par exemple ?
Les difficultés de comparaison suscitées par le changement de périmètre de la mission « Outre-mer » posent la question de la sincérité des montants affichés : il faudrait disposer d'un budget recensant l'ensemble des crédits consacrés à l'outre-mer par l'ensemble des ministères.
Enfin, en l'absence d'objectifs clairs, il n'est pas possible de mener les évaluations nécessaires.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis , a estimé qu'effectivement l'indivision représente un problème important outre-mer. Afin de surmonter cette difficulté et de libérer du foncier, certaines collectivités ont proposé, à la Réunion, de rembourser aux héritiers leurs frais de succession.
M. Serge Larcher a rappelé avoir déposé, sur la loi portant réforme des successions et des libéralités, un amendement, non adopté finalement, tendant à faciliter le règlement de certaines situations inextricables sur le modèle de ce qui est appliqué en Corse.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis , s'est déclarée favorable à la réorientation de la défiscalisation vers le logement social, sous réserve que cela ne conduise pas à une diminution de la ligne budgétaire unique de financement du logement outre-mer. Un tel basculement, dont le coût serait au demeurant très important, aurait des conséquences catastrophiques sur le logement social.
Par ailleurs, des objectifs chiffrés de construction de logement social, 12 500 en 2008, figurent dans la loi instituant le droit au logement opposable.
En ce qui concerne l'information sur les crédits globaux de l'Etat aux Dom, un « document de politique transversale », annexé chaque année au projet de loi de finances, devrait comptabiliser de façon exhaustive, d'ici à 2010, l'ensemble des crédits consacrés à l'outre-mer.
Enfin, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer » pour 2008.