C. LA REMISE EN CAUSE DE LA GARANTIE FINANCIÈRE DE L'ÉTAT
1. L'enquête approfondie de Bruxelles
Enfin, La Poste doit encore affronter une dernière incertitude relative à la garantie de couverture par l'Etat de ses obligations financières.
Au regard des règles de l'Union européenne sur les aides d'Etat existantes, la Commission avait déjà recommandé à la France de mettre fin à la garantie de l'Etat en faveur de La Poste d'ici la fin 2008. Les négociations alors engagées avec la France n'étant pas apparues conclusives, la Commission européenne a finalement ouvert, le 23 octobre 2007, une enquête approfondie sur la garantie illimitée de l'Etat français dont bénéficie La Poste en tant que personne morale de droit public : cette garantie publique permet à La Poste de se financer à des conditions particulièrement avantageuses, que ce soit pour ses activités de service postal universel ou pour ses activités commerciales, ce qui, aux yeux de Bruxelles, constitue un avantage déloyal à l'égard de ses concurrents à la veille de l'ouverture totale des marchés postaux.
La Poste se défend en faisant observer qu'elle ne bénéficie pas de la note triple A de l'Etat, mais d'un AA justifié par la solidité de son actionnaire unique et ses bons fondamentaux économiques. Conformément à la Communication de la Commission sur l'application des règles du traité CE aux aides d'Etat sous forme de garanties (2000/C71/07), la Commission considère, pour sa part, que cette garantie permet à La Poste d'obtenir des conditions de crédit plus favorables que ce qu'elle aurait autrement obtenu.
2. Le précédent « EDF »
Certes, la Commission ne remet pas en question la propriété publique de La Poste, ni ne conteste son statut de personne morale de droit public en tant que tel. Ceci dit, elle rappelle que les règles de concurrence du traité CE doivent s'appliquer de la même manière aux entreprises privées et publiques. Dans le cas de La Poste, la Commission affirme considérer que la garantie ne résulte pas de la propriété mais du statut juridique de l'entreprise.
Votre rapporteur pour avis rappelle que la Commission européenne a obtenu en 2003 la fin de la garantie équivalente dont bénéficiait EDF, EDF ayant été transformée en société anonyme par la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.
En effet, on voit mal comment un établissement public pourrait être dépourvu de la garantie de l'Etat : l'Etat pourrait-il dégager par avance toute responsabilité quant à la bonne fin du paiement des dettes d'une entité soumise à sa tutelle ? Comme l'écrivait 24 ( * ) le rapporteur du projet de loi de 2004 relatif à EDF, M. Ladislas Poniatowski, « comment un établissement public pourrait-il se procurer du crédit si l'Etat affirmait par avance qu'il refuserait de le soutenir en cas de cessation de paiement, alors même que l'article L. 620-2 du code de commerce exclut les établissements publics des procédures de redressement et de liquidation ? ».
En conséquence, la transformation en société anonyme d'EDF (et de GDF) est apparue comme un point de passage obligé. C'est pourquoi votre rapporteur pour avis tient à faire observer que la procédure lancée par la Commission européenne pourrait conduire à modifier la forme juridique de La Poste.
En conclusion, votre rapporteur pour avis estime nécessaire de rester attentif au contrat 2008-2012 que La Poste va bientôt signer avec l'Etat et relève que ce contrat est en mesure d'offrir à La Poste française un avenir en Europe, tout en confortant le service public postal auquel il rappelle son profond attachement.
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Lors de sa réunion du mercredi 21 novembre 2007, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Développement et régulation économiques » et des articles 42 et 43 du projet de loi de finances qui y sont rattachés, les groupes socialiste et communiste, républicain et citoyen s'abstenant. |
* 24 Rapport n° 386 (2003-2004) de M. Ladislas PONIATOWSKI, fait au nom de la commission des affaires économiques.