B. LA VIE CULTUELLE DANS LA RÉPUBLIQUE, CENT ANS APRÈS LA LOI DE 1905
1. Les relations entre l'Etat et les cultes : le régime de la neutralité
Aux termes de l'article 2, premier alinéa, de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat, « la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ».
Toutefois, le même article permet à l'Etat de rémunérer les aumôniers des écoles, collèges, lycées, hospices, asiles et prisons. Par conséquent, si la séparation des Eglises et de l'Etat implique en théorie l'interdiction de toute subvention, directe ou indirecte, en faveur d'une communauté religieuse, ce régime n'est pas monolithique .
L'article 12 de la loi du 9 décembre 1905 dispose en effet que « les édifices qui [...] servent à l'exercice public des cultes ou au logement de leurs ministres [...] sont et demeurent propriétés de l'État, des départements, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale ayant pris la compétence en matière d'édifice des cultes ». Aussi l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale peuvent-ils engager des dépenses pour assurer l' entretien et la conservation des édifices du culte dont la propriété leur est reconnue.
Par ailleurs, la loi du 31 décembre 1959 relative aux rapports entre l'État et les établissements d'enseignement privé prévoit que ces derniers peuvent bénéficier d'aides publiques, s'ils passent un contrat avec l'État.
La laïcité à la française est ainsi, comme l'avait démontré la commission de réflexion sur l'application du principe de laïcité dans la République dans son rapport remis au Président de la République le 11 décembre 2003, « un principe juridique appliqué avec empirisme » .
En outre, selon le même rapport « la laïcité n'a pas les mêmes contours à Paris, Strasbourg, Cayenne ou Mayotte » 63 ( * ) , le régime de droit commun défini par la loi du 9 décembre 1905 ne s'appliquant pas à tout le territoire français.
En effet, le régime concordataire demeure applicable dans les trois départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle , qui appartenaient à l'Empire allemand lors de l'adoption de la loi du 9 décembre 1905. Par conséquent, pour les quatre cultes dits « reconnus », soit les cultes catholique, luthérien, réformé et juif, les ministres du culte sont rémunérés par l'État et des cours d'enseignement religieux sont dispensés dans les écoles publiques.
Enfin, le champ d'application de la loi de 1905 est limité outre-mer à la Martinique, à la Guadeloupe et à la Réunion, les autres collectivités étant soumises à des régimes particuliers 64 ( * ) .
* 63 Rapport de la commission de réflexion sur l'application du principe de laïcité dans la République, remis au Président de la République le 11 décembre 2003, p. 19.
* 64 En Guyane, les ministres du culte catholique sont rémunérés par le département. Le décret-loi du 16 janvier 1939 « Institution aux colonies de conseils d'administration des missions religieuses », dit « décret Mandel », permet aux collectivités de Nouvelle-calédonie, de Polynésie française, de Wallis-et-Futuna, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon de subventionner le culte catholique, organisé en mission.