2. L'AFD « opérateur pivot » ?
L'Agence française de développement se voit confier la responsabilité des opérations dans les secteurs suivants : agriculture et développement rural, santé, éducation primaire et secondaire, formation professionnelle, environnement, secteur privé, infrastructures et développement urbain ; sa compétence s'étend « de l'élaboration d'une politique sectorielle dans un pays donné à la réalisation des programmes et des projets qui en découlent ».
En conséquence, la direction de la coopération technique du ministère des Affaires étrangères devient la direction des politiques du développement afin de mieux affirmer le rôle de pilotage stratégique du ministère des Affaires étrangères.
Le CICID de juillet 2004 a décidé de ne pas limiter ce transfert de compétences aux nouveaux projets mais de transférer les projets en cours qui se poursuivent au delà de 2005. Sur 482 projets FSP, 62 seront transférés à l'AFD. 32 relèvent des secteurs de l'éducation, de la santé et de la formation professionnelle, 24 du secteur rural et de l'environnement, 6 des infrastructures et du développement urbain. Le montant des autorisations d'engagement transférées est de 100 millions d'euros, celui des crédits de paiement d'environ 50 millions d'euros.
Votre rapporteur porte un regard positif sur ce transfert qui s'inscrit dans le cadre de ses propositions sur la création d'une grande agence pour le développement. Les crédits consacrés aux interventions sur subventions devraient cependant être renforcés pour conférer à l'Agence une véritable capacité pour l'action dans les pays pauvres. Faute de quoi, ses actions se porteront plutôt, comme c'est le cas actuellement sur des interventions sur prêts dans des pays dont le développement est plus avancé.
3. La gestion de l'assistance technique
L'affirmation de l'exclusivité de l'AFD sur les secteurs dont les projets sont transférés induit d'importantes modifications dans la gestion de l'assistance technique.
Quels que soient les secteurs, le ministère des Affaires étrangères conserve la gestion des assistants techniques placés en position de conseil auprès des autorités des pays partenaires ainsi que de ceux placés auprès des organisations multilatérales ou régionales.
Il continue à gérer directement les assistants techniques dans les secteurs relevant de sa compétence : gouvernance, coopération culturelle, francophonie, recherche, enseignement supérieur et coopération non gouvernementale.
Il délègue en revanche les crédits nécessaires à la rémunération de l'assistance technique mobilisée sur les projets mis en oeuvre par l'Agence française de développement en abondant l'enveloppe de subventions. 320 postes devraient ainsi être transférés, dont 91 en 2006. Ce chiffre est le résultat d'un compromis entre les estimations de l'AFD et du Quai d'Orsay quant à l'effectif d'assistance technique correspondant aux secteurs transférés.
L'AFD s'engage à maintenir ce volume de 320 postes d'assistants techniques et à réserver 80 % des postes à des ressortissants français. L'AFD n'assure jamais la maîtrise d'ouvrage des projets qu'elle finance, c'est pourquoi elle ne sera pas l'employeur des assistants techniques transférés. La gestion en est confiée au GIP France Coopération Internationale FCI dont le rôle est renforcé pour l'ensemble de l'assistance technique française. La « commande » d'assistance technique sera passée par le partenaire local bénéficiaire des financements de l'AFD. Afin d'éviter un double transfert de crédits, cette commande devrait cependant pouvoir être réglée directement par l'AFD, à l'instar des pratiques en vigueur dans d'autres Etats membres de l'Union européenne.
Cette réforme suppose la montée en puissance de l'opérateur FCI, structure légère de coordination et intervenant en matière de coopération administrative qui sera désormais chargé d'une mission générale de conseil en recrutement, de suivi et de formation des assistants techniques fonctionnaires ou agents publics, rebaptisés « experts techniques internationaux ». Les assistants techniques fonctionnaires, auparavant mis à disposition du ministère des Affaires étrangères par leur administration d'origine, seront désormais en position de détachement auprès de FCI et bénéficiaires d'un contrat de droit privé.
Cette nouvelle mission devrait porter le chiffre d'affaires de FCI à 10 millions d'euros puis, à terme, à 30 millions, ce qui le fera figurer parmi les opérateurs de bonne taille. La subvention du ministère des Affaires étrangères, en baisse, à vocation à s'éteindre pour laisser place à une rémunération de l'opérateur sur frais de gestion.
On peut attendre de cette réforme davantage de souplesse dans la mobilisation de l'assistance technique actuellement placée sous forte contrainte. Votre rapporteur a pu observer à plusieurs reprises les impasses auxquelles conduit la rigidité du statut. Le décalage entre la date de conclusion du contrat d'assistance technique et celle du déblocage des crédits peut conduire à des situations où l'assistant technique est en poste, mais sans moyens. La limitation de la durée du contrat, alors que la durée moyenne d'exécution des projets est supérieure, conduit au départ d'assistants techniques en cours de projet, ce qui suscite l'incompréhension des autorités locales et la frustration des intéressés. Il convient qu'un assistant technique puisse être recruté pour la durée d'exécution du projet.
Le niveau des effectifs de l'assistance technique est actuellement à l'étiage : 1753 assistants dont 320 volontaires internationaux ont été maintenus dans le mouvement de décrue observé depuis dix ans.
Cette diminution est certes due à l'abandon de la coopération de substitution et au développement des capacités locales, elle peut en cela être comparée à l'évolution du nombre de salariés détachés. Elle témoigne cependant aussi du déclin de la place de l'aide projet dans l'aide française et de la tendance à la multilatéralisation des dépenses d'APD.
Votre rapporteur considère que l'assistance technique est un enjeu essentiel de la présence française dans le monde et de la valorisation de son savoir faire. Le maintien d'un niveau élevé d'assistants techniques n'est nullement incompatible avec la multilatéralisation de l'aide française, comme en témoigne le volume de crédits communautaires mobilisé par FCI, qui représente les deux tiers du chiffre d'affaires du GIP. C'est davantage par sa présence dans les équipes de terrains et de direction que par le volume de ses financements que notre pays peut faire entendre sa voix dans les enceintes multilatérales.
Cette réforme doit donc être le moyen de valoriser l'expertise française, de lui donner plus de souplesse et de réactivité et d'enrayer ainsi le déclin des effectifs.