3. La fin programmée des commissions versées par Air France
Un dernier facteur va gravement affecter la rémunération des agences de voyages françaises l'an prochain : la remise en cause du système de commissionnement propre à Air France, à compter du 1 er avril 2005 .
Actuellement, 50 % des billets aériens vendus par les agences de voyages opérant en France sont des billets de la compagnie nationale et 73 % du chiffre d'affaires desdites agences est à imputer à la billetterie . Ainsi, la suppression des commissions d'Air France va tarir la source de revenus majoritaire de ces professionnels , qui a globalement représenté 529 M€ pour l'exercice 2003-2004. Dès lors, les agences devront prélever des frais sur chaque dossier client pour se rémunérer et, ce faisant, s'adapter à un nouveau modèle économique où, étant libres de fixer leurs prix de vente , elles devront effectuer des arbitrages entre la nécessité de couvrir leurs charges et de réaliser des bénéfices, d'une part, et de satisfaire leur clientèle à des tarifs compétitifs, d'autre part. On relèvera également que la fin des commissions ouvre la perspective d'un nouveau type de négociations commerciales entre agences et transporteurs aérien s portant, comme dans le secteur de la grande distribution, sur l' obtention de marges arrières en contrepartie de « coopération commerciale ».
La compagnie nationale prévoit certes des mesures compensatoires transitoires : elle versera aux agences de voyages, pendant un an (jusqu'au 31 mars 2006), un montant forfaitaire par coupon de vol de 1 à 2 euros selon les niveaux de tarifs, et, pendant trois ans (jusqu'au 31 mars 2008), une compensation pouvant aller jusqu'à 0,6 % des ventes annuelles par agence de billets Air France.
Cette modification des relations entre Air France et les agences de voyages n'est pas seulement grave pour leurs résultats , quelles que soient la nature et l'ampleur des mesures de compensation proposées par la compagnie, qui seront au reste transitoires : elle est également inquiétante pour leur volume d'activités . En effet, le nouveau dispositif de distribution de billets va être affecté par une importante distorsion de concurrence fiscale entre les agences et la compagnie (13 ( * )) : en tant que transporteur, celle-ci applique en effet une TVA à 5,5 % sur ses ventes en direct, alors que les agences sont soumises au taux normal de taxation, soit 19,6 %. C'est la raison pour laquelle Air France a consenti à une troisième mesure d'accompagnement après la suppression des commissions : un forfait de 0,75 euros par coupon de vol sur la métropole pendant la première année de l'accord, et de 0,5 % la seconde.
Reste que toutes ces compensations transitoires seront structurellement insuffisantes pour éviter aux agences de souscrire à de coûteuses mutations pour ne pas disparaître .
* (13) Qui vient s'ajouter à celle que qu'imposent déjà aux agences de voyage traditionnelles les agences en ligne établies dans des pays dont les taux de TVA sont inférieurs au taux français.