III. LES DIFFICULTÉS INHÉRENTES À LA MÉTHODE PROGRAMMATIQUE
A. UNE PROGRAMMATION INDICATIVE PAR NATURE
Certes, en terme de visibilité de la dépense publique, la programmation présente un intérêt qui ne peut être contesté. Mais , comme au sein de toute loi de programmation, les échéanciers de dépenses ont un caractère purement indicatif 17 ( * ) .
Le Conseil économique et social, dans son avis rendu par sur l'avant-projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, après avoir concédé que « les moyens prévus ne sont pas négligeables puisqu'ils sont supposés atteindre 12,8 milliards d'euros sur la période 2005-2009 , auxquels pourraient s'ajouter les abondements éventuels des collectivités territoriales et des acteurs privés », précise qu'« on peut néanmoins s'interroger sur le caractère réellement contraignant de cet engagement : la montée en charge du dispositif prévu s'avère, en effet, pour le moins très progressive, puisque, pour 2005, première année d'application du Plan, ne serait débloqué que 1,1 milliard d'euros , cette somme devant être portée à 2,4 milliards en 2006 et autour de 3 milliards en 2007 et 2009 (...) ».
Le Conseil économique et social estime utile de préciser : « Ainsi que le reconnaissait le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale lors de son intervention devant notre assemblée le 7 juillet dernier, la formule de la loi de programmation qui a été finalement retenue ne saurait être assimilée à une « caution bancaire » , comme le montre d'ailleurs les difficultés rencontrées dans d'autres domaines tels que la Défense (le Premier ministre avait, dans un premier temps, envisagé la création d'un fonds budgétaire spécifiquement dédié à la cohésion sociale qui aurait dû être alimenté par le produit de la taxation du rapatriement des capitaux placés à l'étranger pour échapper au fisc. Ce sont les débats nourris autour d'un tel projet d'amnistie fiscale qui ont incité le gouvernement à y renoncer) ».
En outre, dès la loi de finances pour 2006, la fongibilité des crédits prévue par la LOLF ne permettra pas au gouvernement de faire voter par le Parlement une autorisation de dépense correspondant strictement, en volume comme en affectation, à la présente programmation.
Ainsi, seules les lois de règlement permettront de mesurer la véritable portée du présent engagement . Or, la loi de règlement se rapportant à l'exécution, en 2006, de la présente programmation ne sera votée qu'en 2007, tandis que la dernière loi de règlement se rapportant à l'ensemble de cette programmation ne le sera qu'en 2010...
Par ailleurs, le lien entre la programmation des dépenses et la réalisation du plan est d'autant plus incertain cette dernière suppose la participation d'intervenants extérieurs à l'Etat, en particulier des collectivités locales. Les cofinancements susceptibles d'être sollicités concernent principalement le logement locatif social et l'accompagnement des enfants en difficulté.
Votre rapporteur pour avis souligne toutefois que le présent projet de loi ne prévoit aucune participation obligatoire des intervenants extérieurs à l'Etat, en particulier des collectivités territoriales , même si la réalisation des objectifs programmés implique a priori de telles sollicitations. S'agissant, en particulier, du logement social, des conventions sont en cours d'élaboration avec l'Union sociale pour l'habitat et avec l'Union économique et sociale pour le logement. Dans le cadre de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, l'attribution des aides de l'Etat au logement locatif social pourra être déléguée aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et aux départements qui en feront la demande. Des conventions seront alors conclues entre l'Etat et la collectivité délégataire pour fixer le moyens mis en oeuvre et les objectifs à atteindre.
* 17 Il convient, à cet égard, de rappeler les termes de l'article 34 de la Constitution, selon lequel « Les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'Etat ».