CHAPITRE II -

Dispositions relatives au parc locatif social

Composé de neuf articles (41 à 49), le chapitre II contient des dispositions relatives au parc locatif social et à la création d'établissements publics fonciers d'Etat.

Article 41 -

Dispositions de programmation en faveur
du parc locatif social

Cet article de programmation prévoit la réalisation de 500.000 logements locatifs sociaux en cinq ans et la mobilisation de moyens budgétaires conséquents pour atteindre cet objectif . Il constitue le deuxième exercice de programmation en matière de logement social proposé par le Gouvernement, un an et demi après la définition du programme national de rénovation urbaine (PNRU).

Le programme national de rénovation urbaine

L'article 6 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine indique que le programme national de rénovation urbaine vise à restructurer les quartiers classés en zone urbaine sensible et, à titre exceptionnel, ceux présentant des caractéristiques économiques et sociales analogues. Ce programme comprend des « opérations d'aménagement urbain, la réhabilitation, la résidentialisation, la démolition et la production de logements, la création, la réhabilitation et la démolition d'équipements publics ou collectifs, la réorganisation d'espaces d'activité économique et commerciale, ou tout autre investissement concourant à la rénovation urbaine » .

Pour la période 2004-2008, la loi du 1 er août 2003 prévoit la création d'une offre nouvelle de 200.000 logements locatifs sociaux, la réhabilitation de 200.000 logements locatifs sociaux et, en cas de nécessité liée à la vétusté ou à la mise en oeuvre du projet urbain, la démolition de 200.000 logements. Pour mettre en oeuvre ce programme ambitieux, la loi a créé une Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), chargée d'attribuer des financements pour la réalisation des projets urbains locaux. L'Agence est dotée de moyens financiers propres, issus, pour l'essentiel, de subventions de l'Etat, de contributions de l'Union d'économie sociale du logement (fonds dits du 1 % Logement) et de subventions de la Caisse des dépôts et consignations.

Selon l'article 7 de cette loi, les crédits consacrés par l'Etat à la mise en oeuvre du PNRU, ouverts par les lois de finances entre 2004 et 2008, sont fixés à 2,5 milliards d'euros, aucune dotation annuelle au cours de cette période ne pouvant être inférieure à 465 millions d'euros . Ces crédits sont affectés, dans les conditions fixées par les lois de finances, à l'ANRU.

Il ressort du dernier exercice budgétaire que l'Etat a respecté ses engagements puisque 515 millions d'euros en autorisations de programme ont été ouverts pour les interventions de l'ANRU (215 millions par le Ministère de la ville, 250 millions par le Ministère du logement et 50 millions par la CDC au titre du fonds de renouvellement urbain). Pour 2005, un montant similaire devrait également être consacré par l'Etat au financement du PNRU 9 ( * ) . Certes, l'Etat n'a pas versé les montants équivalents en crédits de paiement (130 millions en 2004 et 273 millions en 2005), mais ce décalage est lié à la montée en puissance progressive des actions de l'Agence et à la difficulté de finaliser les projets de rénovation urbaine dont la mise en oeuvre s'avère particulièrement lourde.

Cet important effort financier et ces objectifs ambitieux de construction visant à réhabiliter en profondeur les quartiers les plus défavorisés ne concernent néanmoins qu'une partie du territoire car ils s'inscrivent exclusivement dans le cadre de la politique de la ville. Le but du programme de cohésion sociale est plus large car il tend à accroître sensiblement l'effort annuel de construction de logements locatifs sociaux pour apporter une réponse à la crise actuelle de l'offre locative sociale , en le répartissant sur l'ensemble du territoire en fonction des besoins.

Or, ces besoins sont aujourd'hui très importants. Entre le 1 er janvier 2003 et le 31 décembre 2003, plus de 1,8 million de demandes de logement social avaient été enregistrées . Après déduction des radiations et des demandes multiples (près de 24 % des demandeurs), le nombre réel de demandeurs peut être estimé à environ 1,3 million (environ 100.000 demandeurs pour la seule ville de Paris). L'outil statistique de recensement, qui s'appuie sur le numéro unique d'enregistrement, permet de déterminer que, sur ces 1,3 million de demandeurs, plus de 450.000 sont déjà logés dans le parc social, que 50 % sont âgés de moins de 35 ans et que 36 % d'entre eux sont des personnes seules.

Votre rapporteur pour avis juge que, face à une situation qui peut être qualifiée de crise de l'offre locative -qui ne touche d'ailleurs pas uniquement le segment social de l'offre d'habitat mais aussi le secteur privé locatif-, il est urgent de faire preuve de volontarisme en la matière. L'Etat et l'ensemble des acteurs du monde du logement doivent impérativement se doter des moyens nécessaires pour résoudre la crise du logement . Le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale -et plus particulièrement le présent article 41- apporte ainsi un premier élément de réponse.

Le texte du projet de loi

Le premier alinéa de cet article et le tableau qui s'y rapporte prévoient la réalisation, de 2005 à 2009, de 500.000 logements locatifs sociaux, compte non tenu du programme national de rénovation urbaine présenté ci-dessus. Sur ce total, 90.000 logements seraient réalisés en 2005, 100.000 par an en 2006 et 2007 et 105.000 en 2008 et 2009.

La répartition selon les différents types de logement social est précisée dans le tableau reproduit ci-dessous :

Nombre de logements

2005

2006

2007

2008

2009

Total

Logements financés par des prêts locatifs à usage social (PLUS) et prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI)

58 000

63 000

63 000

63 000

63 000

310 000

Logements financés par des prêts locatifs sociaux (PLS)

22 000

27 000

27 000

32 000

32 000

140 000

Logements construits par l'association agréée prévue à l'article 116 de la loi de finances pour 2002 (association foncière logement)

10 000

10 000

10 000

10 000

10 000

50 000

TOTAL

90 000

100 000

100 000

105 000

105 000

500 000

Alors que l'Etat avait prévu la réalisation de 48.000 PLUS et PLAI en 2004, votre commission note que, dès 2005, une impulsion notable est donnée en faveur de la construction de logements sociaux avec une hausse de 10.000 du nombre de prêts locatifs aidés .

Il est également à noter que le nombre de PLS serait doublé par rapport à l'an dernier. Votre rapporteur pour avis ne peut que se féliciter de cette orientation dans la mesure où il est clair que ce produit locatif répond à un besoin aujourd'hui non satisfait : celui de la demande de logements intermédiaires qui émane des classes moyennes, notamment en banlieue parisienne et dans les agglomérations de province où les marchés locatifs sont tendus.

Enfin, l'association foncière logement devrait réaliser 10.000 logements par an .

Pour mémoire, votre commission rappelle que les conventions du 11 octobre et du 11 décembre 2001 ont créé une association foncière logement (AFL), gérée sous la responsabilité des partenaires sociaux. Bénéficiant de subventions du 1 % Logement, l'AFL doit progressivement investir deux milliards d'euros par an, à l'horizon 2006, dans des programmes immobiliers locatifs. Ces programmes sont destinés à être transférés, à l'issue d'une période d'au moins quinze ans, aux régimes de retraite complémentaire, de façon à participer aux futurs besoins de financement de ces régimes.

La convention d'application du 11 décembre 2001 a précisé que les opérations financées par l'AFL sont :

- d'une part, réalisées, pour au moins 40 % des sommes investies, sur les terrains reçus par l'Association foncière logement en contrepartie du soutien du 1% Logement aux opérations de renouvellement urbain. Ces logements ne seront soumis ni à plafond de loyer, ni à plafond de ressources ;

- d'autre part, construites ou acquises dans les communes souffrant d'une insuffisance de l'offre locative sociale (en particulier celles qui sont soumises à l'article 55 de la loi SRU). Dans ces communes, un tiers des logements doivent être financés par des PLAI, un autre tiers par des PLUS et le dernier tiers par des PLS (ces derniers ne venant pas s'imputer dans ce cas sur le contingent des directions départementales de l'équipement).

Le deuxième alinéa et le tableau qui s'y rapporte indiquent que les crédits alloués par l'Etat à la réalisation de ce programme et aux autres actions financées par la ligne budgétaire consacrée au logement locatif social hors politique de la ville (soit l'actuelle ligne 65-48 article 10 du budget du logement) seront ouverts par les lois de finances des années 2005 à 2009 pour les montants suivants (en millions d'euros valeur 2004) :

Années

2005

2006

2007

2008

2009

Total

Autorisations de programme

442

482

482

482

482

2 370

Crédits de paiement

465

594

610

610

482

2 761

Pour ce qui concerne l'année 2005, les montants indiqués dans l'article sont conformes aux dispositions du projet de loi de finances qui prévoient que la ligne budgétaire 65-48 article 10 (opérations locatives sociales et renouvellement urbain hors politique de la ville) sera dotée de 465 millions d'euros en crédits de paiement et de 442 millions en autorisations de programme . Pour mémoire, ces dotations s'établissaient respectivement à 362 millions et à 287,8 millions en 2004, soient des hausses de 28 % et de 53 % .

Ces crédits seront affectés à la réalisation proprement dite des logements locatifs sociaux financés par les PLUS et les PLAI.

Selon les informations transmises par le Ministère du logement à votre rapporteur pour avis, les 442 millions d'euros ouverts en autorisations de programme se répartiraient de la manière suivante :

 

Dotation budgétaire en 2005

PLUS

130,2

PLAI

58,8

Surcharge Foncière

176,0

Palulos

48,0

Renouvellement urbain hors ZUS et actions d'accompagnement

29,0

Total Etat (65-48/10)

442,0

Source : Ministère du logement

Rapportés au nombre de logements prévus (53.000 PLUS et 5.000 PLAI), ces montants permettent d'obtenir une subvention moyenne par logement de 2.456 euros pour les PLUS et de 11.760 euros par PLAI. Votre rapporteur pour avis relève que la subvention moyenne par logement avait été diminuée lors de la dernière loi de finances, même si une telle baisse était notablement compensée par la baisse du taux du Livret A. Le tableau ci-dessous retrace ainsi l'évolution de la subvention moyenne par logement entre 2003 et 2004 :

 

Programme physique

Coût moyen par logement (euros)

 

2003

2004

2003

2004

Variation

PLAI

4 500

5 000

15 000

12 000

-20%

PLUS ancien

7 500

8 000

6 700

3 750

-44%

PLUS neuf

25 000

35 000

5 400

1 800

-66%

Sous-total

37 000

48 000

6 840

3 190

-53%

PALULOS

33 500

40 000

1 200

1 200

-

Total

70 500

88 000

4 160

2 280

-45%

Source : Ministère du logement

Sur la base des calculs effectués par votre rapporteur pour avis, la subvention moyenne par logement resterait stable pour les logements financés par PLAI, augmenterait pour les PLUS neufs et diminuerait pour les PLUS anciens.

Le plan de financement global de ce programme

Les financements budgétaires d'Etat sont considérablement accrus pour financer la bonne réalisation du programme de cohésion sociale . Toutefois, votre commission pour avis tient à souligner que malgré l'aide budgétaire et fiscale 10 ( * ) considérable qu'apporte l'Etat pour la réalisation des opérations, qui représente près de 15 % du plan de financement d'un logement PLUS, ce programme ne pourra réussir qu'avec la participation d'autres acteurs majeurs de la politique du logement, au premier rang desquels les collectivités territoriales et leurs groupements .

Les collectivités locales, en particulier les grandes communes et les EPCI les plus importants, sont devenues des acteurs incontournables de la politique du logement. D'une part, elles jouent un rôle déterminant pour l'apport de terrains à bâtir pour réaliser des logements sociaux. D'autre part, elles apportent de manière quasi-systématique une subvention directe par logement social afin de boucler le financement des opérations.

Pour mémoire, votre commission rappelle qu'en 2002 les aides directes et indirectes en faveur du logement des collectivités territoriales se sont élevées à 327 millions d'euros pour les communes , 62 millions pour les départements et 87 millions pour les régions . En outre, les communes et les EPCI apportent leur garantie d'emprunt pour la réalisation des opérations pour un montant de 70 milliards d'euros et les départements à hauteur de 18 milliards d'euros .

Cette participation financière est appelée à s'intensifier au cours des prochaines années pour plusieurs raisons. En premier lieu, les dispositions de la loi relative aux libertés et responsabilités locales ont prévu que les départements et les EPCI, selon des modalités exposées dans le commentaire de l'article 42, pourront être délégataires de la gestion et de l'attribution des aides à la pierre. Cette délégation de compétences va mécaniquement accroître l'implication et les responsabilités des élus locaux en matière de politique du logement. En second lieu, compte tenu de la hausse du nombre de logements découlant du programme de cohésion sociale, la participation financière des collectivités locales au financement des opérations est appelée à augmenter dans des proportions qui pourraient s'avérer non négligeables , et ceci hors de tous crédits budgétaires délégués.

De la même manière, les fonds propres des organismes HLM pourraient être sollicités de manière plus systématique, dans des proportions importantes.

Un autre acteur majeur ayant vocation à participer à cet effort de construction est le 1 % Logement, représenté par l'Union d'économie sociale pour le logement (UESL). Votre commission rappelle tout d'abord que les fonds collectés au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) (fonds du 1 % Logement) viennent abonder dans une proportion importante la réalisation du programme de rénovation urbaine. Ils financent également un grand nombre d'opérations PLS par l'intermédiaire de l'association foncière logement et permettent d'accorder des subventions directes dans le cadre d'opérations de réhabilitation.

Surtout, l'Etat est actuellement en train de négocier une convention avec l'UESL pour définir les conditions de sa participation à la mise en oeuvre du programme de cohésion sociale. Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, qui n'a néanmoins pas eu connaissance de ce projet de convention, le 1 % Logement s'engagerait à participer à ce programme à hauteur de 210 millions d'euros par an sous formes de subventions directes (ce qui équivaut à une enveloppe de prêts de 450 millions d'euros) pour financer directement les opérations.

Ces subventions directes se substitueraient à un dispositif élaboré en 2001 11 ( * ) . La nouvelle convention viserait à ce que, sur les 690 millions d'euros de prêts accordés chaque année par le 1 % Logement en faveur du logement social, 210 millions soient affectés directement au financement des opérations prévues au titre du plan de cohésion sociale.

Au total, votre commission note que l'ensemble des acteurs sera mobilisé pour participer au plan et que les conditions financières sont réunies pour assurer la bonne réussite de ce programme ambitieux de relance de la construction locative sociale. La mobilisation d'une masse financière conséquente implique néanmoins une analyse de la manière dont les sommes ainsi investies seront attribuées et gérées. C'est l'objet de l'article 42 du projet de loi, commenté ci-après.

Votre commission pour avis vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 9 192 millions d'euros par le Ministère de la ville, 223 millions par le Ministère du logement et 100 millions au titre du fonds de renouvellement urbain.

* 10 TVA à 5,5 %, exonération de TFPB etc...

* 11 En effet, l'avenant du 7 mars 2001 à la convention du 3 août 1998 signée entre l'Etat et l'UESL avait institué un concours privilégié, dit « milliard PLUS », d'un montant de 152 millions d'euros, porté à 180 millions d'euros en 2003.

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