IV. DES AIDES À LA PERSONNE INSUFFISANTES ?
A. LES CIRCUITS DE FINANCEMENT DES AIDES À LA PERSONNE
Le circuit de financement des aides à la personne se caractérise par sa relative complexité.
Le fonds national des prestations familiales (FNPF) qui finance l'allocation de logement familiale (ALF) est alimenté par les cotisations familiales des employeurs et 1,1 % de CSG. De ce fait, le budget du ministère du logement ne participe pas au financement de l'ALF.
Le fonds national d'aide au logement (FNAL), créé par la loi du 16 juillet 1971, finance l'allocation de logement sociale (ALS), l'aide aux organismes qui hébergent à titre temporaire des personnes défavorisées et l'aide à la gestion des aires de nomades. Il est alimenté par :
- une contribution de l'Etat ;
- le produit d'une cotisation à la charge des employeurs assise sur les salaires plafonnés, à un taux de 0,10 % ;
- le produit d'une contribution à la charge des employeurs ayant plus de neuf salariés, à l'exception de l'Etat et des collectivités locales, de leurs établissements publics administratifs et des employeurs relevant du régime agricole au regard des lois sur la Sécurité sociale. Le taux de cette contribution, assise sur la totalité des salaires déplafonnés, s'élève à 0,40 %.
Le fonds national de l'habitat (FNH), institué par la loi du 3 janvier 1977, finance l'aide personnalisée au logement (APL). Il est alimenté par :
- des contributions provenant des régimes de prestations familiales (fonds national des prestations familiales et budget annexe des prestations sociales agricoles) et du fonds national d'aide au logement, représentant les allocations de logement (familiales ou sociales) qui auraient été financées par ces régimes en l'absence d'APL ;
- une subvention d'équilibre inscrite au budget du ministère du logement.
Le total des prestations versées a atteint 13,3 milliards d'euros en 2002 , dont 6,2 milliards d'euros pour l'aide personnalisée au logement (APL), 3,9 milliards d'euros pour l'aide au logement sociale (ALS) et 3,2 milliards d'euros pour l'aide au logement familiale (ALF). Au total, la part de l'Etat dans le financement des aides à la personne pour le logement (40 %) est inférieure à celle des entreprises.
PART DE L'ETAT DANS LE FINANCEMENT DES DIFFÉRENTES AIDES
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1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
TOTAL ETAT (1) en M € |
4 925 |
5 104 |
5 262 |
4 997 |
5 419 |
TOTAL EMPLOYEURS en M€ |
7 111 |
7 436 |
7 465 |
7 870 |
8 139 |
PART DE L'ETAT DANS LE FINANCEMENT TOTAL |
40,9% |
40,7% |
41,3% |
38,8% |
40,0% |
Source : Ministère du logement
Cette part a eu tendance à se réduire ces dernières années avec l'augmentation des cotisations employeurs et la baisse corrélative des prestations. Entre 1997 et 2002, les versements des employeurs ont progressé d'un milliard d'euros pour atteindre 8,1 milliards d'euros, tandis que les versements de l'Etat se sont stabilisés autour de 5 milliards d'euros. L'Etat a donc pleinement profité de la croissance, sans avoir à réaliser des économies.
B. LE NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES DES AIDES À LA PERSONNE
Pour la deuxième année consécutive, le nombre total des bénéficiaires des aides à la personne est en très légère diminution en 2002 (-0,5 %). Cette réduction est due à la poursuite de la baisse (-11,5 %) des bénéficiaires en APL accession, les nouveaux entrants ne compensant pas les sorties de bénéficiaires des générations très importantes des années 1980. Le nombre d'allocataires en locatif est quasiment stable (+0,4 %), l'évolution étant toutefois différente suivant les aides : +0,3% en APL, hausse de 1,3% en ALS après une forte baisse en 2001, poursuite de la baisse en ALF (-0,8% en 2002). Au total, les aides personnelles au logement concernent 6,2 millions de ménages, dont 5,3 millions au titre de la location et 803 millions au titre de l'accession .
BÉNÉFICIAIRES DES AIDES AU LOGEMENT
Nombre en milliers
|
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Location |
5 057 |
5 176 |
5 186 |
5 360 |
5 368 |
5 391 |
5 345 |
5 365 |
Accession |
992 |
973 |
994 |
943 |
905 |
887 |
853 |
803 |
TOTAL |
6 010 |
6 158 |
6 169 |
6 303 |
6 274 |
6 278 |
6 198 |
6168 |
Source : Ministère du logement
C. LES DOTATIONS BUDGÉTAIRES EN 2004
La contribution de l'Etat au financement des aides à la personne, aide personnalisée au logement (APL) et allocation de logement sociale (ALS) atteindrait 5,04 milliards d'euros en 2004 soit une diminution de 193 millions d'euros (-3,4 %) par rapport à 2003.
Dotation budgétaire demandée pour 2004 (en millions d'euros)
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Ch.46-40 |
LFI 2003 |
5 239,00 |
PLF 2004 |
5 046,00 |
|
|
écart 2004/2003 |
-193,00 |
dont |
|
extension en année pleine de l'actualisation au 1/07/2003 |
49,00 |
mesures d'économies sur les barèmes |
-185,00 |
ajustement du tendanciel |
-57,00 |
Source : Ministère du logement
Trois évolutions expliquent cette variation :
- la revalorisation des allocations réalisées au 1 er juillet 2003 (extension du barème en année pleine) pour un montant de 49 millions d'euros ;
- des mesures d'économies en raison de l'évolution tendancielle des prestations s'élevant à 57 millions d'euros ;
- diverses mesures d'économies seraient mises en oeuvre sur le barème pour un montant de 185 millions d'euros.
Cette dotation apparaît pourtant bien insuffisante pour couvrir deux évolutions contradictoires . D'une part, selon le ministère du logement, le coût budgétaire de l'actualisation en année pleine, allant du 1 er juillet 2003 au 30 juin 2004, serait de 140 millions d'euros. Les 49 millions ont vocation à couvrir l'extension du barème sur la période 1 er juillet 2003-31 décembre 2003, l'impact de la revalorisation sur le premier semestre 2004 étant compris dans le « tendanciel ». Le montant prévu pour financer l'actualisation est donc insuffisant de 21 millions d'euros. D'autre part, le ralentissement des versements des employeurs devrait s'élever à 60 millions d'euros en 2004. Comme le souligne notre collègue Paul Girod, rapporteur spécial de la commission des finances, la dotation de l'Etat pourrait être, au total, insuffisante de plusieurs dizaines de millions d'euros.
Par ailleurs, votre rapporteur pour avis note qu'il ne lui a pas été possible d'obtenir le détail de ces diverses mesures d'économies, le ministère lui répondant, sans plus de précision, que ces mesures seraient présentées prochainement au Conseil national de l'habitat et qu'elles auraient pour souci de corriger certaines anomalies actuelles, qui privilégient certains bénéficiaires par rapport à d'autres sans que cela ne soit justifié ni par l'importance de la dépense logement, ni par le nombre des personnes à charge du bénéficiaire.
Votre rapporteur pour avis tient à faire plusieurs observations. Tout d'abord, il convient de réfléchir à une simplification du mode de financement des aides à la personne, notamment envisager la fusion entre le FNAL et le FNH et à l'opportunité, dans un souci de rationalisation, de procéder à la revalorisation du barème au 1 er janvier, ce qui simplifierait les prévisions budgétaires. Le Gouvernement annonce d'ailleurs que des travaux sont en cours et permettraient d'appliquer ce nouveau système à compter du 1 er janvier 2005.
Au delà, votre rapporteur pour avis juge que la réduction des moyens affectés aux aides à la personne est inquiétante à plus d'un titre . Comme l'a rappelé un rapport récent de votre commission, présenté par notre collègue Marcel-Pierre Cléach 3 ( * ) , il a été constaté au cours des deux dernières années une forte envolée des loyers du secteur privé, parfois spectaculaire sur les marchés tendus des grandes agglomérations. Cette progression des loyers, couplée à la diminution des aides au logement, impliquera nécessairement la hausse de contribution locative de certains ménages, ce qui ne sera pas sans effet sur les plus modestes d'entre eux.
* 3 Rapport d'information n° 22 (2003-2004) fait au nom de la Commission des Affaires économiques par M. Marcel-Pierre Cléach, Logement : pour un retour à l'équilibre.