II. LA SITUATION DE L'ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

A. L'ÉVOLUTION DE LA POPULATION CARCÉRALE

1. Une augmentation brutale du nombre de détenus

Au 1 er janvier 2002, 48.594 personnes étaient détenues en France, contre 47.837 au 1 er janvier 2001. Pour la première fois depuis 1997, le nombre de détenus a augmenté d'une année sur l'autre.

Cette évolution s'est fortement accélérée au début de l'année 2002 puisque les prisons françaises accueillaient 56.385 détenus le 1 er juillet dernier (ce nombre a diminué à la suite de l'amnistie pour atteindre 53.680 le 1 er octobre mais a de nouveau augmenté ensuite pour s'établir à 54.438 le 1 er novembre). Entre le 1 er juillet 2001 et le 1 er juillet 2002, le nombre de détenus a augmenté de 13,4 % .



L'augmentation des entrées en détention constatée entre le premier semestre 2001 et le premier semestre 2002 a concerné tant les entrées pour crime (+ 21 %) que les entrées pour délit (+ 23 %).

Les entrées en détention pour vols criminels ont fortement augmenté (+ 39 %). Les entrées pour viols et violences criminelles ont respectivement augmenté de 14 et 23 %. Entre 1994 et 2000, le nombre d'incarcérations pour vols criminels avait diminué de 36 %, tandis que les incarcérations pour viols ou violences criminelles enregistraient une augmentation (respectivement + 11 % et + 18 %).

Parmi les entrées en détention pour délit, l'augmentation concerne plus particulièrement les délits de masse comme le vol avec circonstance aggravante (+ 33 %), les recels (+ 36 %), les entrées et séjours irréguliers sur le territoire national (+ 32 %) et les cessions et trafics de stupéfiants (+ 28 %).

Par ailleurs, la durée moyenne de détention continue d'augmenter. Elle est passée de 4,6 mois en 1980 à 8,4 mois en 2001.

En ce qui concerne la structure de la population pénale par quantum de peine, le nombre des condamnés à moins de cinq ans d'emprisonnement a diminué de 11 % entre 1996 et 2001 alors que le nombre de condamnés à cinq ans d'emprisonnement et plus a augmenté de 17 %. Au 1 er janvier 2002, les condamnés exécutant une peine de vingt à trente ans de réclusion étaient au nombre de 984 et les condamnés à perpétuité au nombre de 578. Ces condamnés à de très longues peines formaient 5 % des condamnés.

2. Une surpopulation carcérale préoccupante

Dans ses avis précédents, votre rapporteur pour avis constatait une diminution régulière du taux d'occupation des établissements pénitentiaires. La situation est radicalement différente cette année.

Au 1 er juillet 2002, notre pays comptait 47.982 places de détention dont 47.471 étaient effectivement disponibles. Compte tenu de l'augmentation du nombre de détenus, le taux d'occupation des établissements pénitentiaires, qui était de 103 % au 1 er juillet 2001 est passé à 119 % au 1 er juillet 2002 .

Cette densité varie fortement selon la catégorie d'établissement, puisqu'elle s'établit à 134 % dans les maisons d'arrêt . Parmi ces dernières, 16 ont une densité dépassant 200 % : Tulle, Bayonne, Lyon Montluc, Bonneville, Lyon Saint Paul, Grasse, Orléans, Gagny, Fontenay le Comte, La Roche sur Yon, Le Mans, Laval, Saint Brieuc, Foix, Béziers, Albi.

La situation actuelle est préoccupante. La surpopulation carcérale rend plus difficile le maintien d'un haut niveau de sécurité dans les établissements. Elle contribue à la survenance d'autoagressions (automutilations, suicides...) ou d'agressions à l'encontre des personnels. Elle peut également entraîner le non-respect de certaines dispositions du code de procédure pénale, notamment en ce qui concerne la séparation des prévenus et des condamnés. Enfin, elle rend largement théorique l'exercice de la mission de réinsertion confiée à l'administration pénitentiaire.

Le Gouvernement vient d'annoncer le lancement d'un programme de construction, qui devrait permettre d'augmenter le nombre de places dans les établissements pénitentiaires. Toutefois, ces établissements ne seront livrés que dans un délai de quatre à six ans. A plus court terme, aucune augmentation significative du nombre de places de détention n'est à attendre car la livraison prochaine des établissements du programme « 4.000 places » s'accompagnera de la fermeture d'établissements vétustes.

Le développement du placement sous surveillance électronique pourrait permettre de soulager quelque peu les établissements pénitentiaires. La recherche d'alternatives à l'incarcération pour les peines les moins graves mérite d'être poursuivie. A cet égard, la mission sur l'exécution des courtes peines d'emprisonnement confiée à M. Jean-Luc Warsmann, député, par M. le garde des Sceaux, pourrait conduire à de nouvelles évolutions sur cette question.

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