2. Les enjeux juridiques
La question des brevets est fondamentale. Les entreprises de biotechnologies n'ont essentiellement de valeur que par les brevets qu'elles peuvent obtenir, avant de pouvoir générer un chiffre d'affaires. Dans ce contexte, il est important que la France ratifie l'accord de Londres afin de diminuer le coût du brevet européen. Les négociations sur le brevet communautaire sont également décisives et doivent aboutir afin que les entreprises puissent disposer d'une juridiction unique pour la défense des droits de propriété intellectuelle dans toute l'Union européenne.
La transposition de la directive 98/44/CE relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques doit également intervenir rapidement. Le droit français est fondé sur la non patrimonialisation des éléments du corps humain en tant que tels. La directive européenne, en son article 5, reprend ce principe, tout en précisant « qu'un élément isolé du corps humain (...) y compris la séquence partielle d'un gène, peut constituer un élément brevetable » à condition que l'application industrielle de la séquence du gène soit concrètement exposée dans la demande de brevet. Aucune date n'est prévue à l'heure actuelle pour la transposition de cette directive et le débat sur la transposition de cet article 5 n'est pas clos, comme dans d'autres pays de l'Union d'ailleurs.
En France, la situation juridique, déjà complexe du fait d'un article de la loi bioéthique n° 94-654 du 29 juillet 1994 excluant, comme étant contraire à l'ordre public et aux bonnes moeurs, la brevetabilité du corps humain ainsi que de ses produits et éléments en tant que tels (pour ce même motif, la simple connaissance d'une séquence ADN était exclue de la brevetabilité), s'est encore compliquée à la suite du vote par l'Assemblée nationale en première lecture le 22 janvier 2002, d'un article 12bis, du projet de loi relatif à la bioéthique portant révision des lois de bioéthiques adoptées en 1994, prévoyant que les éléments isolés du corps humain sont exclus de la brevetabilité, ce qui est en contradiction avec l'article 5.2 de la directive 98/44.
Enfin, la question de l'utilisation des cellules-souches embryonnaires à des fins de recherche constitue, du point de vue industriel, l'aspect le plus sensible du cadre législatif. Dans le cadre du projet de loi de révision mentionné plus haut, le précédent gouvernement a souhaité ouvrir la possibilité de mener des recherches sur les embryons humains ne faisant plus l'objet d'un projet parental ( embryons surnuméraires ) si elles s'inscrivent dans une finalité médicale. La discussion de ce projet de loi se poursuivra au début de l'année 2003 devant votre Haute assemblée.
En outre, cette question se pose au niveau européen, dans la mesure où les législations sur le sujet sont disparates. Actuellement, le VI ème programme-cadre de recherche et de développement technologique exclut la recherche sur le clonage humain à but reproductif, la création d'embryons par la recherche ainsi que les activités modifiant l'héritage génétique des êtres humains. En revanche, il finance la recherche sur les embryons surnuméraires de moins de deux semaines dans les pays où elle est autorisée. Toutefois, l'Allemagne, l'Italie, l'Irlande et l'Autriche, qui avaient initialement donné leur accord le 27 juin dernier, semblent revenir sur ce compromis. La situation est donc confuse et votre rapporteur plaide pour une clarification de cette question.