IV. LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTIONS INSTITUTIONNELLES OU STATUTAIRES
1. Une revendication d'évolution institutionnelle
Les deux
missions d'information conduites en 1999-2000 par la commission des Lois afin
de préparer l'examen du projet de loi d'orientation pour
l'outre-mer
22(
*
)
, ont
montré la
revendication par les départements français
d'Amérique d'un statut « cousu main ».
Ils considèrent en effet que le statut de département d'outre-mer
issu de la loi du 19 mars 1946 constitue un carcan juridique, en raison
notamment de l'interprétation restrictive donnée par le Conseil
constitutionnel de l'article 73 de la Constitution
23(
*
)
.
Les prémices sont à rechercher dans la déclaration de
Basse-Terre du 1
er
décembre 1999 par laquelle les
présidents des conseils régionaux de Guadeloupe, Martinique, et
Guyane, Mme Lucette Michaux-Chevry, M. Alfred Marie-Jeanne et
M. Antoine Karam, demandaient l'instauration d'un
régime
d'autonomie interne
en réclamant «
une modification
législative, voire constitutionnelle, visant à créer un
statut nouveau de région d'outre-mer
, dotée d'un
régime fiscal et social spécial, dans le cadre de la
République française et de l'Union
européenne »
.
Ce projet, qui emprunte sans le dire aux statuts de la Corse et de la
Polynésie française, mais également au texte sur
l'Assemblée unique dans les régions monodépartementales
d'outre-mer, déclaré non conforme à la Constitution en
1982, se réfère aussi, explicitement cette fois, aux statuts des
collectivités autonomes des Canaries, de Madère et des
Açores (qui font partie des régions
ultra-périphériques). Les régions d'outre-mer auraient la
possibilité de légiférer dans leurs domaines de
compétence (qui seraient considérablement étendus, l'Etat
ne conservant que la justice, la police, la santé, la défense et
la monnaie), et notamment en matière fiscale, sociale et de
contrôle de l'immigration.
A la suite du rapport de MM. Claude Lise, sénateur de la Martinique, et
M. Michel Tamaya, député de la Réunion, de juin 1999,
« Les départements d'outre-mer aujourd'hui : la voie de
la responsabilité », a été votée la loi
d'orientation pour l'outre-mer du 13 décembre 2000.
Cette loi a permis plusieurs avancées en matière
institutionnelle :
A été créé dans chaque département
d'outre-mer un congrès des élus départementaux et
régionaux, réunion des membres du conseil général
et du conseil régional, ainsi que des parlementaires,
chargé
de formuler des propositions d'évolution statutaire ou
d'aménagement de compétences
. La délibération
du congrès doit ensuite être adoptée par les deux
assemblées. Le Gouvernement pourra alors préparer un projet de
loi organisant la consultation des populations intéressées. Cette
évolution institutionnelle se fera donc à l'initiative des
collectivités et doit permettre un débat
différencié pour chaque DOM.
Le Sénat était opposé à une telle
création
, considérant que six des huit assemblées
locales concernées avaient émis un avis défavorable, que
la procédure envisagée serait particulièrement lourde,
risquant d'aboutir en fait à la création d'une troisième
assemblée locale au rôle ambigu. Le Conseil constitutionnel a
cependant, dans sa décision du 7 décembre 2000, validé
cette création, considérant que le congrès ne pouvait
être défini comme une troisième assemblée.
2. L'utilisation de la procédure du congrès
Six mois
après la promulgation de la loi d'orientation sur l'outre-mer la Guyane,
la Martinique et la Guadeloupe ont déjà réuni cette
assemblée.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, a clairement
indiqué être favorable à une révision de la
Constitution, en particulier pour permettre la fusion des deux
assemblées, souhaitée par beaucoup dans les DOM, mais
rejetée par le conseil constitutionnel en 1982. De même, le
président de la République, lors de sa visite à la
Réunion, s'était dit favorable à une révision du
titre XII de la Constitution relatif aux collectivités territoriales.
a) Des réflexions très avancées en Guyane
A la
suite des émeutes de novembre 1996, une réflexion
réunissant élus locaux et représentants consulaires a
abouti à l'adoption à une large majorité (80 %) le 27
février 1999
par les assemblées régionale et
départementale de Guyane réunies en
« congrès » du «
pacte de
développement pour la Guyane
», qui
préconise
l'instauration d'une collectivité territoriale unique et d'un pouvoir
législatif et réglementaire local autonome.
Ce document, contesté par les deux députés (Mme Christiane
Taubira-Delannon, du parti Walwari, demandant d'abord un bilan de la
décentralisation et M. Léon Bertrand, RPR, étant dans un
premier temps favorable à la création d'un deuxième
département), a cependant inspiré des initiatives
ultérieures, telles que la déclaration de Basse-Terre, qui a
réuni le 1
er
décembre 1999 les trois présidents
des conseils régionaux des DFA.
S'est alors créé le Komité pou nou démaré la
Gwyane (KPNDLG), destiné à promouvoir le Pacte de
développement, qui regroupe des socio-professionnels, dont le syndicat
UTG (union des travailleurs guyanais) pro-indépendantiste, des
associations de quartier et de défense de la terre, ainsi que trois
grands partis de gauche : le Parti socialiste guyanais (PSG, non
affilié au PS), les Forces démocratiques de Guyane (FDG, le parti
du sénateur M. Georges Othily) et le Mouvement de
décolonisation et d'émancipation sociale (MDES).
Une période troublée s'est alors ouverte, avec les
échauffourées de mars 2000 en marge de la visite de l'ancien
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, M. Jean-Jack Queyranne, la
séquestration le 20 novembre 2000 du directeur du centre des
impôts de Cayenne et les émeutes les 27, 28 et 29 novembre 2000,
sur fond de débat statutaire, le Komité réclamant
l'application du pacte de développement.
Parallèlement, M. Georges Othily, sénateur de la Guyane, a
rédigé (mais non déposé) en mars 2000 une
proposition de loi « d'orientation pour le développement
réel et durable de la Guyane », s'inspirant du statut corse
défini par la loi du 13 mai 1991 ainsi qu'une proposition de loi
constitutionnelle sur le statut de la Guyane n° 197 (2000-2001) le 23
janvier 2001, prévoyant de transformer la Guyane en un « pays
d'outre-mer », dont l'Assemblée délibérante
serait habilitée à prendre des « lois du
pays », soumises au contrôle du Conseil constitutionnel avant
leur publication, et définissant une citoyenneté guyanaise
autorisant des discriminations positives.
Le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, a invité les
élus et les partis à une table ronde à Paris le 18
décembre 2000, auxquels ont participé les trois parlementaires,
le président du conseil régional M. Antoine Karam, le
président du conseil général de l'époque M.
André Lecante (divers gauches) ainsi que les représentants des
maires et des principaux partis, dont le parti Walwari, à l'exception
des indépendantistes du MDES et du Komité.
A l'issue de cette table ronde, il a été précisé
que le processus d'évolution serait déterminé dans le
cadre de la LOOM et des institutions de la République. Lors de sa visite
en Guyane en janvier 2001, M. Christian Paul a rappelé qu'une
consultation de la population ne pourrait intervenir qu'après l'adoption
par le Parlement d'un projet de loi.
Au plan local, les élus engagés dans le processus de la table
ronde se sont réunis à plusieurs reprises afin de finaliser un
« avant-projet d'accord relatif à l'avenir de la
Guyane ». Les élus du PSG, du FDG, du MDES, du RPR et le
KPNDLG ont participé à ces discussions.
La première réunion du congrès
, tenue après
les élections de mars 2001,
le 29 juin 2001
sous la
présidence de M. Joseph Ho Ten You, nouveau président du conseil
général, a vu l'adoption à une très large
majorité (38 voix sur 50 pour, aucune voix contre) d'un avant-projet
portant sur l'organisation administrative et les compétences de la
« Collectivité Territoriale de la Guyane » dans le
cadre de la République et de l'Europe, qui s'inspire très
largement du pacte de développement de février 1999. Le parti
Walwari n'était représenté que par un observateur.
-
Le département et la région seraient supprimés au
profit d'une nouvelle « Collectivité Territoriale de
Guyane »
, composée d'une assemblée et d'un conseil
exécutif. Quatre districts seraient créés sur le
territoire de la Guyane.
- L'avant-projet confèrerait à l'assemblée de la
collectivité un
pouvoir d'initiative pour l'adaptation ou la
modification des textes à caractère législatif ou
réglementaire
afin de tenir compte des spécificités
locales. Enfin, s'inspirant des institutions de la Nouvelle-Calédonie,
l'avant-projet prévoirait également la possibilité pour
l'assemblée territoriale d'adopter des
lois de pays
dans des
activités ou domaines qui par leur nature seraient spécifiques
à la Guyane.
La mise en oeuvre de ce projet nécessiterait une
révision constitutionnelle.
Est également prévu un transfert significatif de
compétences :
- la collectivité territoriale de Guyane serait notamment
compétente en matière d'aménagement du territoire, le
domaine foncier de l'Etat étant transféré aux
collectivités, la fiscalité locale, la coopération
régionale, l'enseignement primaire et l'action sanitaire et
sociale ;
- seraient créées des
compétences partagées
s'agissant de
l'organisation administrative de la justice
et du droit
coutumier, de la sécurité publique (la collectivité
territoriale de Guyane, les districts et les communes étant
associés à la définition et à l'exécution de
la politique de
police
et de sécurité), de la
réglementation et du contrôle de l'
immigration
, de
l'enseignement du second degré et de l'enseignement supérieur.
Des mesures de rattrapage financier seraient prévues par une loi de
programmation. Le document prévoit également une consultation
populaire sur l'avenir institutionnel de la Guyane.
Le texte a ensuite été transmis au conseil général
et au conseil régional, qui l'ont adopté respectivement par 13
voix contre 19 et 25 voix pour et une abstention, les 30 et 20 juillet, puis
remis lors de sa visite à M. Christian Paul, secrétaire
d'Etat à l'outre-mer, le 18 septembre 2001.
M. Jacques Chirac, président de la République, a rencontré
le 26 octobre 2001 une délégation d'élus guyanais, et
leur aurait signifié son accord, tout en indiquant qu'il serait
nécessaire d'arrêter au préalable des règles
définissant de manière globale les dispositions
constitutionnelles rénovées pour l'outre-mer.
Le
16 novembre dernier, M. Christian Paul a transmis aux élus
guyanais les propositions du gouvernement
, acceptant le principe d'une
collectivité territoriale unique et de districts, ainsi que l'octroi
d'un pouvoir réglementaire. En outre, l'assemblée territoriale de
Guyane pourrait, dans ses domaines de compétences et à son
initiative, être autorisée par le Parlement à prendre,
pendant un délai déterminé, des mesures qui sont
normalement du domaine de la loi. Les délibérations
adoptées par l'assemblée de Guyane entreraient en vigueur
dès leur publication, mais un projet de loi de ratification devrait
être déposé avant une certaine date. Les dispositions qui,
dans ce cadre, ne seraient pas ratifiées par le Parlement, garderaient
valeur réglementaire et seraient soumises aux voies de recours devant la
juridiction administrative. La question du transfert du foncier de l'Etat
à la nouvelle collectivité et des mesures de rattrapage reste
cependant encore à débattre.
La prochaine étape serait la finalisation d'un accord politique avec le
gouvernement, puis le dépôt d'un projet de loi organisant la
consultation de la population guyanaise. Il est probable que l'aboutissement de
ce processus d'inspiration institutionnelle, qui
nécessiterait une
révision constitutionnelle
, ne pourra intervenir avant les
échéances électorales de 2002, contrairement aux souhaits
du Komité, le Gouvernement souhaitant dissocier clairement les
échéances présidentielles et institutionnelles.
Comme l'a rappelé M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à
l'outre-mer lors de son audition par la commission des Lois, M. Lionel Jospin,
Premier ministre, a, face aux maires des DOM-TOM réunis à
l'Hôtel de ville de Paris le 19 novembre 2000 à la veille de
l'ouverture du congrès de l'Association des maires de France (AMF),
posé des conditions à l'évolution des statuts des
départements français d'Amérique, à savoir
l'unité de la République, les liens avec l'Europe,
l'égalité des droits et une consultation préalable des
populations.
Rappelons que
le principe d'une consultation de la population
sur cet
accord politique
résulte de la loi d'orientation
, qui a introduit
un nouvel article L. 5916-1 du code général des
collectivités territoriales prévoyant que le Gouvernement peut
déposer un projet de loi organisant une consultation pour recueillir
l'avis de la population du département concerné au vu
« notamment » des propositions du congrès et des
délibérations du conseil général et du conseil
régional.
Le
Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2000-435 DC du
7
décembre 2000, a avalisé cette disposition
en
considérant que « les autorités de la République
sont, dans le cadre de la Constitution, habilitées à consulter
les
populations d'outre-mer
intéressées notamment sur
l'évolution statutaire de leur collectivité à
l'intérieur de la République », tout en posant comme
conditions que les autorités soient libres de définir
l'objet de la consultation, que le projet de loi organisant la consultation
satisfasse à la double exigence constitutionnelle de clarté et de
loyauté et que le législateur ne soit pas tenu par le
résultat de la consultation.
La Guyane étant particulièrement avancée en matière
de débat institutionnel,
votre rapporteur a donc tenu à
rencontrer les parlementaires guyanais
, M. Georges Othily, sénateur,
et Mme Christiane Taubira-Delannon, députée,
M. Léon Bertrand, député, n'ayant pour sa part
pas souhaité être reçu.
b) Les départements antillais
(1) la Guadeloupe
En
Guadeloupe
, le congrès s'est réuni le 18 juin 2001 et a
constaté un large accord sur l'opportunité d'une évolution
du statut de la Guadeloupe. Une résolution adoptée par 73
élus s'est prononcée pour la création d'une
« nouvelle collectivité de Guadeloupe, dans le cadre de la
République française et de l'Union européenne ».
Cette résolution préconise l'attribution de
« compétences élargies, un pouvoir local effectif,
renforcé notamment par la capacité de légiférer
dans ses domaines de compétences et instaurant de nouveaux rapports avec
l'Union européenne ».
Une «
commission de synthèse pour un projet
guadeloupéen
» composée de 22 membres issus des
deux assemblées locales a été chargée
d'élaborer un projet définitif qui devrait être soumis au
congrès le 18 décembre prochain, selon Mme Lucette
Michaux-Chevry, présidente du conseil régional.
(2) La Martinique
En
Martinique
, la première réunion du congrès s'est tenue
le 12 juin 2001, sous la présidence de M. Claude Lise (PPM,
apparenté PS), ferme partisan de l'autonomie. Une
commission ad
hoc
composée de 20 membres (10 conseillers généraux et
10 conseillers régionaux) et élargie aux parlementaires a
également été chargée de l'élaboration d'un
projet de statut. En juillet 2001, la troisième réunion n'avait
toujours pas réussi à dégager de consensus.
Il semble cependant que l'accord des populations guadeloupéennes, et
surtout martiniquaises quant à une réforme de leur statut ne soit
pas acquis.
3. L'attachement de la Réunion au statut de DOM
Au
contraire des départements français d'Amérique, la
Réunion souhaite conserver son statut de département
d'outre-mer
. La loi d'orientation a logiquement consacré cette
divergence d'approche, en reconnaissant, dans son article 1
er
« l'attachement des Réunionnais à ce que
l'organisation de leur île s'inscrive dans le droit
commun
».
Le débat institutionnel se concentrait essentiellement sur
l'opportunité de scinder la Réunion en deux départements.
Le projet de loi d'orientation prévoyait la
bidépartementalisation de la Réunion, à laquelle le
Sénat s'était opposé
, constatant l'avis
défavorable du conseil régional comme du conseil
général et l'hostilité de la population
réunionnaise consultée par sondages. En lecture
définitive, les élus réunionnais, reconnaissant
l'inconstitutionnalité des importantes modifications effectuées
en nouvelle lecture, avaient suscité la suppression de ces dispositions,
renvoyant le projet de bidépartementalisation au dépôt
d'une proposition de loi.
Les élections municipales de mars 2001 ayant vu la défaite de la
gauche favorable à ce thème, M. Christian Paul, secrétaire
d'Etat à l'outre-mer, a indiqué lors de son déplacement
à la Réunion en mai dernier qu'un consensus préalable de
la population serait nécessaire.
Cependant, l'article sur la bidépartementalisation ayant
été finalement retiré du projet de loi, la Réunion
était de facto maintenue dans le champ des régions
monodépartementales d'outre-mer et à ce titre dotée d'un
congrès. Afin de bien marquer le refus de la population et des
élus de toute évolution statutaire et la volonté de
maintenir la Réunion dans le droit commun, le sénateur Edmond
Lauret présenta en mai 2001 lors de la discussion au Sénat d'un
projet de loi d'habilitation
24(
*
)
concernant l'outre-mer un
amendement
revenant sur la loi d'orientation pour l'outre-mer afin de
limiter l'institution du congrès aux seules régions
françaises d'Amérique
, qui a été adopté
conforme par l'Assemblée nationale.
La situation de la Réunion doit donc être nettement
distinguée de celle des départements français
d'Amérique
. M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à
l'outre-mer, a d'ailleurs déclaré lors de son audition avoir pris
acte de la volonté des Réunionnais de conserver leur statut.
4. Le nouveau statut de Mayotte
Mayotte,
seule île des Comores à avoir souhaité rester au sein de la
République française en 1974, vivait depuis 24 ans avec un statut
provisoire issu de la loi du 24 décembre 1976.
A la suite du rapport des préfets Bonnelle et Boisadam visant à
une évolution progressive du statut actuel de collectivité
territoriale vers celui de département d'outre-mer, conformément
aux souhaits des élus locaux, les discussions avec les principales
formations politiques, les élus et les représentants de la
société civile, aboutissaient à l'élaboration d'un
« document d'orientation » signé au mois
d'août 1999 par les représentants de l'ensemble de formations
politiques mahoraises, mais non par le député et le
sénateur représentant la collectivité territoriale de
Mayotte.
Sur cette base,
l'accord de Paris a été signé le 27
janvier 2000
par le président du conseil général, les
représentants des principaux partis politiques représentés
au conseil général et le secrétaire d'Etat à
l'outre-mer. Consulté sur cet accord,
l'électorat mahorais
s'est prononcé à 73 % en sa faveur le 2 juillet 2000
(le taux de participation ayant atteint 70 %).
Aux termes de l'accord, Mayotte passe du statut de
« collectivité territoriale » à celui de
« collectivité départementale ».
Cet
accord a suivi de base au projet de loi relatif à Mayotte discuté
au printemps 2001 et finalement promulgué le 11 juillet 2001. Si le
statut de département d'outre-mer, auquel aspirent les Mahorais, ne
parait pas envisageable à l'heure actuelle, l'adjectif
« départementale » accolé à la
collectivité vise à faciliter la transition à terme vers
le statut de département.
L'article 1er reconnaît tout d'abord que Mayotte fait partie de la
République et ne peut cesser d'y appartenir sans l'accord de sa
population.
La loi vise essentiellement à appliquer la décentralisation
à Mayotte, c'est-à-dire la loi du 2 mars 1982 pour les grands
principes régissant l'organisation administrative, l'extension des lois
de 1983 relatives à la répartition des compétences
n'étant pas possible en raison de la structure financière des
collectivités mahoraises.
Cette réforme se caractérise par son caractère progressif,
afin d'éviter de plaquer brutalement une organisation inadaptée
à la réalité mahoraise.
L'exécutif de la collectivité, actuellement, le préfet,
est transféré en 2004 au président du conseil
général, une tutelle allégée a priori du
préfet sur les actes de la collectivité départementale
perdurant cependant jusqu'en 2007.
Mayotte, pour laquelle un effort sensible d'actualisation et de modernisation
du droit applicable a été mené notamment par le biais
d'ordonnances, demeure soumise au principe de spécialité
législative, de nombreux domaines étant cependant régis
par le régime de l'assimilation législative : la
nationalité, l'état et la capacité des personnes, le droit
patrimonial de la famille, le droit pénal et la procédure
pénale, la procédure administrative contentieuse et non
contentieuse, les postes et télécommunications. L'identité
législative sera progressivement instaurée, avec l'objectif de la
généraliser en 2010.
Sont également prévues des dispositions visant au
développement économique par la création d'un fonds
mahorais de développement, d'une agence de développement, de
chambres consulaires, l'aménagement foncier étant
aménagé avec l'instauration d'un cadastre et le code de
l'urbanisme applicable à Mayotte modernisé. La fin du
régime fiscal spécifique à Mayotte doit intervenir au
1
er
janvier 2007. Une fiscalité locale sera progressivement
instaurée, l'Etat continuant à aider les collectivités
locales en matière d'enseignement primaire et
préélémentaire.
De timides dispositions traitent également du statut civil de droit
local, afin de préciser les modalités de la renonciation à
ce statut, ainsi que pour clarifier les conflits de statuts.
Une réforme de la justice cadiale est cependant initiée, puisque
le tribunal de droit commun est rendu compétent en matière de
droit personnel, les cadis siégeant en tant qu'assesseurs. Une
commission a été créée afin de
réfléchir à une évolution possible du statut
personnel.
De plus, des ordonnances devraient être prises avant le 31
décembre 2002 en matière notamment de réforme du statut
des cadis, de modernisation du régime communal, les projets de loi de
ratification des ordonnances devant être déposés sur le
bureau du Parlement avant le 30 juin 2003.
Une
clause de rendez-vous, fixée en 2010
, prévoit que le
Gouvernement et les principales forces politiques de Mayotte feront ensemble le
bilan de l'application de ce nouveau statut.
Le conseil
général pourrait alors proposer au Gouvernement de nouvelles
évolutions institutionnelles pour la collectivité
départementale de Mayotte
.
*
* *
Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission des Lois a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés aux départements d'outre-mer et aux collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon dans le projet de budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer pour 2002.