II. DES MOTIFS D'INTERROGATION

D'autres dossiers sont avant tout pour votre commission des motifs d'interrogations.

A. LA PRISE EN COMPTE DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE DANS LA POLITIQUE DE SOUTIEN AUX PME, AU COMMERCE ET À L'ARTISANAT : AMÉNAGER LE FISAC

La volonté d'assurer une meilleure prise en compte de l'aménagement du territoire dans la politique de soutien au commerce et à l'artisanat a conduit l'Etat à mettre en place, dans le cadre du Fonds d'Intervention pour la Sauvegarde de l'Artisanat et du Commerce (FISAC), des opérations visant à revitaliser le tissu commercial et artisanal dans les zones rurales et urbaines.

Votre commission se félicite de ce que le Gouvernement soutienne ces opérations concourant à l'aménagement du territoire. Le commerce et l'artisanat peuvent, en effet, jouer un rôle essentiel dans l'animation des communes rurales comme des centres-villes des agglomérations urbaines. Votre commission s'interroge cependant sur l'efficacité des dispositifs mis en place et leur adaptation à la politique d'aménagement du territoire.

1. Les opérations de revitalisation du commerce et de l'artisanat dans les zones rurales et urbaines financées par le FISAC

Le FISAC, outil au service du développement local, s'appuie sur des synergies entre acteurs économiques locaux et privilégie à ce titre les projets menés en partenariat avec les collectivités locales, chambres consulaires et associations de commerçants et artisans.

a) Les mesures destinées à rétablir les activités commerciales et artisanales dans les zones urbaines

L'aide aux collectivités locales pour conserver et fortifier un tissu commercial et artisanal diversifié en centre-ville constitue également un axe d'effort prioritaire du FISAC.

Des actions sont menées à cette fin, en liaison étroite avec les collectivités locales et les chambres consulaires, pour revitaliser le centre des villes. A titre d'illustration, le FISAC a permis, en 2000, de délivrer 38,11 millions d'euros (250 millions de francs) de subventions pour ce type d'actions, au bénéfice d'environ 300 communes de plus de 2.000 habitants.

En outre, la mise en oeuvre d'un partenariat conclu avec la Caisse des dépôts et consignations en 1997 a contribué à promouvoir localement une stratégie globale de réinvestissement du commerce, de l'habitat, des équipements et aménagements publics.

Au plan local, cette démarche nouvelle s'organise autour de trois principes :

- adoption par les collectivités locales d'un projet cohérent concernant la revitalisation du centre-ville ;

- organisation d'un partenariat « public-privé » pour la promotion de centres-villes équilibrés sociologiquement et dotés d'une offre commerciale attractive ;

- mise en cohérence des divers outils et procédures opérationnelles par la désignation d'un « ensemblier » chargé, sous l'autorité de la collectivité locale, de la conduite du projet d'ensemble.

L'accord conclu avec la Caisse en 1997, et qui s'est achevé en mai 2000, concernait 18 quartiers centraux des villes de : Amiens, Bergerac, Bordeaux, Châlons-sur-Saône, Châteauroux, Châtellerault, La Ciotat, Laval, Le Havre, Lille, Longwy, Marseille, Meaux, Nevers, Orléans, Perpignan, Poitiers et Rouen.

0,15 million d'euros (1 million de francs), financés en parts égales par la Caisse et l'Etat, a été consacré à chacune des villes concernées. Il conviendra d'évaluer l'impact de ces opérations, en temps utile, en liaison avec les collectivités impliquées.

Ces opérations ont été complétées par l'action de l'établissement public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA). Cet établissement, créé par la loi du 14 novembre 1996 et organisé par le décret du 12 février 1997, n'a été opérationnel qu'à compter du 2 septembre 1998, date de la réunion de son premier conseil d'administration.

L'EPARECA a fait l'objet d'une dotation initiale de 19,8 millions d'euros (130 millions de francs), versée le 30 décembre 1998, imputée sur l'excédent de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat.

Le premier budget (1999), qui s'est élevé à 0,79 million d'euros (5,2 millions de francs), fut donc essentiellement un budget de fonctionnement. La section « investissement » n'a quasiment pas enregistré d'opérations en 1999, les premières prises de participations par l'EPARECA dans les SARL porteuses des projets de restructuration n'étant intervenues qu'en 2000.

Le total des dépenses d'investissement s'est élevé à 1,49 million d'euros (9,8 millions de francs) en 2000.

Pour 2001, le budget prévisionnel de l'EPARECA est de 13,93 millions d'euros (91,4 millions de francs) en fonctionnement dont 7,16 millions d'euros (47 millions de francs) au titre de la ligne « Achats stockés-terrains ou immeubles à aménager », et de 2,59 millions d'euros (17 millions de francs) en investissement (dépenses dites d'immobilisations financières). Les prévisions de l'EPARECA intègrent deux recrutements que la fonction de maître d'ouvrage assurée par l'EPARECA dans la plupart des opérations justifie.

Votre rapporteur pour avis soutient la montée en puissance progressive de l'Etablissement ; il souhaite l'engagement de nouvelles opérations et l'avancée rapide de celles déjà en instance.

Globalement, depuis mars 1999, l'EPARECA a été saisi de 127 demandes d'intervention de la part de collectivités locales (chiffre arrêté au 2 mai 2001).

56 dossiers sont en instance. Parmi eux, on dénombre un dossier réalisé (Créteil), 5 dossiers au stade de l'appel d'offres ou à celui des travaux (Argenteuil, Châlon-en-Champagne, Clichy-sous-Bois, Floirac et Hérouville-Saint-Clair) ; deux opérations sont en cours d'acquisition (Bourges et Saint-Fons), sept dossiers en phase opérationnelle (Bron, Cenon, Mulhouse, Pantin, Reims, Saint-Ouen-l'Aumône et Roubaix), 41 dossiers étant encore à l'étude.

En outre, 39 demandes n'ont pu être prises en compte (demandes inéligibles ou abandonnées par les villes, ou opérations non viables). Les autres dossiers sont en attente de prise en compte.

Les opérations d'investissement sont, parfois, conduites en partenariat avec d'autres investisseurs, telle la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC). En règle générale, les opérations sont montées par l'intermédiaire de sociétés de portage de type SARL.

Les collectivités locales investissent également dans ces opérations. Le partenariat se développe aussi avec les commerçants eux-mêmes : les moyennes surfaces sont souvent propriétaires de leurs propres murs qu'elles aménagent ; les investisseurs ou commerçants exploitants restent dans certaines opérations propriétaires et financent également leur part de travaux.

Pour 2002, l'action de l'EPARECA devra se traduire par la réalisation concrète des dossiers actuellement en phase opérationnelle.

L'élargissement du champ de compétence de l'Etablissement aux territoires prioritaires des contrats de ville par la loi « solidarité et renouvellement urbains » de décembre 2000 est de nature à amplifier sensiblement à l'avenir son activité. Le nombre de dossiers en attente risque donc de s'accroître.

b) Les opérations de revitalisation du commerce et de l'artisanat dans les zones rurales : des aménagements en cours

Les interventions du FISAC prennent la forme de subventions de fonctionnement et d'investissement qui sont calculées sur la base du plan de financement du projet.

En fonctionnement, le montant maximum de l'aide ne peut excéder 50 % du montant des dépenses subventionnables plafonné à 0,76 million d'euros (5 millions de francs) par tranche, soit 0,38 million d'euros (2,5 millions de francs). En ce qui concerne les dépenses d'investissement, le montant maximum de l'aide ne peut excéder 20 % du montant des dépenses subventionnables plafonné à 1,9 million d'euros (12,5 millions de francs) par tranche, soit 0,38 million d'euros (2,5 millions de francs).

Pour ce qui concerne les entreprises, le montant des dépenses d'investissement subventionnables est limité à 45.735 euros (300.000 francs), ce qui correspond à un montant maximal de subvention de 9.145 euros (60.000 francs).

Le total des subventions du FISAC durant l'année 2000 en zone rurale représente près de 14,3 millions d'euros (94 millions de francs)

Votre rapporteur pour avis regrette que le souci légitime de la Commission nationale du FISAC d'encourager les synergies entre acteurs privés et publics le conduise à refuser son soutien à des initiatives privées qui ne peuvent déjà pas obtenir le soutien de leur commune rurale d'implantation du fait de l'étroitesse de son budget. Cette interprétation discutable de la circulaire du 21 juin 1999 prive certains artisans de toute aide publique dans leurs démarches de réhabilitation ou de modernisation.

En outre, votre rapporteur pour avis s'interroge sur la comptabilité du FISAC avec la politique des pays, puisque les opérations en zone rurale (ORAC) ne visent que les bassins d'emplois de moins de 30.000 habitants. Il constate qu'en l'état actuel de la circulaire, des pays se voient donc théoriquement fermer tout accès aux financements du FISAC, ce qui nuit à la cohérence de la politique d'aménagement du territoire.

Le Gouvernement étudie actuellement une réforme de la circulaire du 21 juin 1999 relative au FISAC, prévoyant une redéfinition des opérations en zone rurale : sauf dans le cas d'aménagement de halles, de marchés couverts ou de marchés de plein vent, ces opérations auraient exclusivement un caractère individuel. Elles viseraient à inciter les propriétaires de locaux commerciaux et artisanaux, qu'il s'agisse des collectivités territoriales ou des exploitants, à les réhabiliter et les moderniser.

En outre, une nouvelle catégorie d'opérations devrait être créée : les opérations collectives de modernisation de l'artisanat et du commerce, qui se substituerait aux opérations collectives en zone rurale. Le projet remplace la notion de « bassin d'emplois regroupant plusieurs communes dont la population globale n'excède pas 30.000 habitants », pour prendre en compte les pays, les groupements de communes hors communautés d'agglomération, ainsi que les bassins d'emplois ruraux menacés de fragilisation par l'évolution démographique ou les mutations économiques.

La population de la zone géographique concernée ne pourrait excéder 50.000 habitants.

Ces opérations collectives auraient pour but de consolider les entreprises commerciales et artisanales par la mise en oeuvre coordonnée d'aides indirectes collectives (actions sur l'environnement immédiat, conseil, groupement de commerçants et d'artisans, regroupement éventuel des entreprises, animation, promotion) et d'aides directes individuelles (réhabilitation du local d'activité, modernisation de l'outil de travail).

Votre rapporteur pour avis attend donc que le Gouvernement finalise son projet et étende aux bassins d'emploi comptant jusqu'à 50.000 habitants l'éligibilité au FISAC. Il estime toutefois que ce plafond de 50.000 habitants ne devrait pas s'appliquer aux pays : cette dérogation permettrait de préserver la valeur ajoutée propre des pays, qui consiste à fédérer des projets et animer un territoire.

B. L'ÉQUILIBRE CRÉÉ PAR LA LOI RELATIVE AUX NOUVELLES RÉGULATIONS ÉCONOMIQUES

Dans un contexte marqué par un mouvement de concentration de la grande distribution, le Gouvernement a souhaité revoir certaines dispositions de l'ordonnance de 1986 afin de rééquilibrer les rapports entre fournisseurs et distributeurs.

Rappelons que la loi du 1 er juillet 1996 sur la loyauté et la concurrence avait, déjà, simplifié les règles de facturation, réformé l'interdiction de la revente à perte, interdit certaines pratiques abusives de prix de prédation, prohibé les primes de référencement sans contrepartie réelle, les menaces de déréférencement pour obtenir des avantages financiers importants et les ruptures brutales et abusives de relations commerciales. Elle avait, aussi, assoupli les règles relatives au refus de vente, qui désavantageaient les fournisseurs dans leurs rapports avec les grandes surfaces, et renforcé la législation contre les ventes « sauvages ».

Le Gouvernement a souhaité revenir sur cette réforme pour améliorer certains dispositifs.

La loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, définitivement adoptée par l'Assemblée nationale le 2 mai dernier et publiée au Journal Officiel du 16, est entrée en vigueur, pour une grande partie de ses dispositions, le 18 mai 2001 ; d'autres ne seront applicables qu'après la publication de décrets, qui sont pour la plupart en cours d'élaboration.

S'agissant du domaine du commerce, la loi sur les nouvelles régulations économiques avait pour objectif, dans le titre Ier de sa deuxième partie intitulé « moralisation des pratiques commerciales », le rééquilibrage des relations contractuelles entre fournisseurs et distributeurs, principalement dans le domaine de la grande distribution.

Les dispositions relatives aux pratiques commerciales restrictives de concurrence tendent à améliorer les relations entre fournisseurs et distributeurs, notamment par une meilleure identification des pratiques abusives.

La loi a créé une Commission d'examen des pratiques commerciales, instance de dialogue entre les différents maillons de la chaîne -du producteur au distributeur-, à laquelle participeront également des parlementaires, des magistrats, des fonctionnaires et des personnalités qualifiées. Cette commission rendra des avis et des recommandations, ainsi qu'un rapport -public- au Gouvernement et au Parlement et pourra ainsi promouvoir de bonnes pratiques. Un décret d'application relatif à la mise en place de la Commission d'examen des pratiques commerciales a été élaboré et devrait être signé et publié prochainement. Votre rapporteur pour avis s'interroge sur l'efficacité et la portée de cette future commission.

Par ailleurs, la loi précise les pratiques discriminatoires et abusives , comme les procédés visant à obtenir des avantages, notamment financiers, sans contrepartie aucune ou manifestement disproportionnée, telle la participation des fournisseurs aux acquisitions réalisées par les distributeurs.

Elle étend le champ d'application de l'interdiction des abus de dépendance économique. L'abus est prohibé dès lors qu'il est « susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence » et non plus seulement s'il peut porter atteinte au jeu de la concurrence « sur un marché ». En outre, la liste des pratiques caractérisant un abus de dépendance économique a été allongée.

Afin de mieux traiter les abus contractuels si le fonctionnement du marché, le fait, pour un opérateur, d'abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient son partenaire, engagera sa responsabilité. La loi a aussi mis un frein à des pratiques anormales, telles le bénéfice rétroactif d'avantages non prévus initialement ou le paiement d'un droit d'accès au référencement avant toute commande : désormais, de telles clauses sont nulles de plein droit, ce qui devrait garantir une meilleure protection aux PME.

Le ministre de l'économie, qui avait déjà un pouvoir d'action devant le juge civil ou commercial, peut demander la nullité des clauses ou contrats illicites, la répétition de l'indu, et, novation du texte, le prononcé d'une amende civile d'un maximum de 2 millions d'euros.

Enfin, la loi sur les nouvelles régulations économiques a été l'occasion de transposer en droit français la directive 2000/35/CE du 29 juin 2000 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales. Elle prévoit notamment que, dans le silence du contrat, le délai de paiement ne pourra excéder 30 jours et que des pénalités de retard dont le taux d'intérêt sera égal au taux de la banque centrale européenne majoré de 7 points de pourcentage s'appliqueront sans mise en demeure préalable.

On peut simplement signaler une disposition spécifique au secteur du commerce, introduite par l'article 64 de la loi à l'article L. 124-1 du code du commerce. Elle concerne les coopératives de commerçants détaillants qui peuvent désormais définir et mettre en oeuvre une politique commerciale commune propre à assurer le développement et l'activité de leurs associés notamment par la réalisation d'opérations commerciales publicitaires ou non pouvant comporter des prix communs.

Votre rapporteur pour avis s'interroge sur la cohérence globale de ces dispositions et sur la capacité du dispositif proposé à atteindre ses objectifs. Il partage avec le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques 2( * ) , M. Pierre Hérisson, l'idée que le législateur ne peut remettre en cause le principe de la coopération commerciale, qui relève de la libre négociation contractuelle, mais qu'il convient cependant de s'assurer que cette coopération s'inscrit bien dans le cadre voulu par la loi.

Les conditions générales de vente n'interdisent pas aux clients de proposer aux fournisseurs des services particuliers, ni aux parties de mener ensemble des actions se traduisant, pour chacune, par des avantages équilibrés. La coopération commerciale doit être considérée comme un accord contractuel conclu entre un fournisseur et un distributeur qui, dans le cadre de leur politique respective, décident de collaborer pour augmenter, à un moindre coût, leur efficacité commerciale.

Tout indique cependant qu'un des effets pervers de la loi du 1 er juillet 1996, qui a mieux encadré le régime de la revente à perte et pesé sur les marges « avant », fut de généraliser le recours aux « marges arrières », c'est-à-dire l'ensemble des rabais et ristournes obtenus de façon « plus ou moins consensuelle » et qui n'apparaissent pas sur la facture d'achat ou de vente des biens ou services.

Pour votre commission, il importe que les relations contractuelles entre distributeurs et fournisseurs se déroulent dans le cadre de transparence et non dans une opacité qui favorise tous les abus. Les mesures adoptées devraient pouvoir y contribuer. Elle semblent toutefois insuffisantes pour réduire la domination qu'exercent aujourd'hui les distributeurs sur les PME dans le secteur tant industriel qu'agroalimentaire.

C. LE FONCTIONNEMENT DES COMMISSIONS DÉPARTEMENTALES D'ÉQUIPEMENT COMMERCIAL

L'année dernière a été la quatrième année de pleine application de la loi du 5 juillet 1996 qui a modifié le dispositif de la loi d'orientation du commerce et de l'artisanat, dite « loi Royer ».

Cette réforme s'est articulée autour de quatre axes principaux :

- l'introduction de l'emploi et de l'environnement parmi les critères d'examen des dossiers soumis aux commissions départementales d'équipement commercial (CDEC) et à la commission nationale d'équipement commercial (CNEC) ; à ces critères, l'article 3 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains en a ajouté trois nouveaux : l'impact global du projet sur les flux de voitures particulières et de livraison, la qualité de la desserte en transports publics et alternatifs et les capacités d'accueil pour le chargement et le déchargement des marchandises.

- l'extension du champ d'application de la loi, avec l'abaissement à 300 m 2 du seuil de création ou d'extension des surfaces commerciales, la soumission à autorisation des changements de destination d'un commerce d'une surface supérieure à 2.000 m 2 , les créations et extensions d'hôtels et d'ensembles de salles de cinéma dépassant certaines capacités, et l'obligation d'une enquête publique pour les projets de plus de 6.000 m 2 de surface de vente ;

- la modification de la composition des commissions départementales d'équipement commercial. Celles-ci comptent désormais six membres, la décision d'autorisation n'étant accordée que lorsque quatre membres ont voté favorablement ;

- le renforcement des sanctions en cas d'exploitation des surfaces commerciales sans autorisation, afin de les rendre plus dissuasives ;

- la mise en place de schémas de développement commercial.

La réforme opérée par la loi du 5 juillet 1996 a entraîné une augmentation importante de l'activité des commissions d'équipement commercial. L'extension du champ d'application du régime d'autorisation a, en effet, engendré un accroissement du nombre de dossiers soumis aux commissions d'équipement commercial .

L'année 2000 a été marquée par une progression de 7 % du nombre de projets examinés par rapport à 1999. Cette augmentation est moins forte que celle enregistrée en 1999, qui était de l'ordre de 39 % par rapport à 1998 et de plus de 100 % par rapport à l'année 1997.

Il est clair que l'abaissement du seuil à 300 m² explique, au moins en partie, cette augmentation ainsi que la réduction de la surface moyenne par projet qui, après 1.745 m² en 1995, est descendue à 981 m² en 1997 pour se stabiliser aux alentours de 1.200 m² en 1999 et 2000.

DOSSIERS EXAMINÉS PAR LES COMMISSIONS DÉPARTEMENTALES
D'ÉQUIPEMENT COMMERCIAL (1995-2000)

 

TOTAL DES DOSSIERS

AUTORISATIONS

TAUX D'AUTORISATION DES SURFACES

SURFACE MOYENNE DES PROJETS

 

Nombre

surface en m²

Nombre

surface en m²

 

en m 2

1995

1 090

1 901 669

782

1 195 827

63 %

1 745

1996

760

1 200 198

512

711 583

59 %

1 579

1997

1 757

1 724 266

1 199

1 098 494

64 %

981

1998

2 355

2 618 453

1 682

1 695 567

65 %

1 112

1999

3 054

3 626 995

2 281

2 519 208

69 %

1 190

2000

3 276

3 962 894

2 511

2 820 987

71 %

1 210

Source : DEcas

Sur 3.276 décisions prises par les commissions départementales d'équipement commercial en 2000, on recense 2.511 autorisations. Le pourcentage de surfaces ainsi autorisées atteint 71 %, soit une surface de vente totale de 2.820.987 m 2 . Ces chiffres, en augmentation constante depuis 1997, confirment le comportement de moins en moins restrictif des CDEC. La progression du taux d'autorisation s'observe pour tous les types de commerce, avec une augmentation significative pour les magasins spécialisés.

En tenant compte des décisions de la Commission nationale d'équipement commercial, le bilan de l'année 2000 se caractérise encore par une augmentation du taux global d'autorisation qui passe, de 1996 à 2000, de 48 à 76 % pour les surfaces demandées.

TAUX DES SURFACES AUTORISEES
PAR RAPPORT AUX SURFACES DEMANDEES (en %)

 

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Hypermarchés

47

32

37

32

39

22

21

22

40

70

70

61

63

Supermarchés

57

50

43

42

49

37

52

50

40

62

62

72

73

équipement maison

65

63

66

44

46

55

56

37

59

75

87

80

83

bricolage/jardinage

51

45

53

44

55

43

63

49

41

74

72

74

76

autres

47

46

51

45

46

48

45

47

55

75

65

53

79

Ensemble

51

45

48

42

46

42

48

43

48

72

71

74

76

Deux facteurs peuvent notamment expliquer le comportement global des CDEC :

- l'abaissement du seuil à 300 m² a eu pour effet de soumettre à l'examen des commissions un nombre accru de projets aux dimensions limitées et portés par des entrepreneurs locaux dont l'activité n'est pas nécessairement identifiée à la grande distribution ; on peut remarquer que la surface moyenne des projets sur lesquels les CDEC ont statué favorablement atteint 1.210 m² en 2000 après 1.190 m² en 1999 et 1.579 m² en 1996 ;

- l'exigence de quatre voix favorables pour une autorisation a pu conduire de la part de tous les acteurs concernés à une recherche de consensus sur les projets présentés.

Votre rapporteur pour avis s'interroge sur la cohérence de la politique menée. D'une part, le Gouvernement affirme vouloir encourager la création d'entreprises en simplifiant les formalités administratives pour les PME et le commerce et, d'autre part, il s'accommode d'un système d'autorisation exigeant des commerçants ( dès que leur surface de vente dépasse 300 m 2 ) la mise au point de dossiers très lourds pour finalement autoriser la quasi totalité de ces projets (près de 8 sur 10). Certes, la commission pour les simplifications administratives (COSA) a annoncé, le 17 avril 2001, la simplification de ces dossiers de demandes d'autorisation de création ou d'extension de surfaces commerciales mais n'a fixé aucun calendrier pour la réalisation effective de cette simplification.

Votre rapporteur pour avis s'interroge également sur la portée des schémas de développement commercial qui devraient être mis en place cette année.

Il faut rappeler que l'alinéa 5 de l'article 28 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat a prévu la mise en place des schémas de développement commercial, dont les modalités d'élaboration et de publicité devaient être déterminées par un décret en Conseil d'Etat.

Avant toute rédaction dudit décret, le gouvernement avait souhaité que des expérimentations soient entreprises sur différentes parties de notre territoire.

Les conclusions de ces expérimentations, qui ont fait l'objet d'un rapport transmis au Parlement au début de l'année 1998, ont fait apparaître que les schémas de développement commercial devaient être des documents non normatifs et non contraignants, servant d'outils d'aide à la décision pour les acteurs locaux du commerce.

Un projet de décret, rédigé en ce sens, a été transmis au cabinet du Premier ministre pour accord avant examen en Conseil d'Etat . Les schémas de développement commercial auront un contenu souple et résulteront d'un travail de concertation au niveau local. Ils définiront, dans le champ considéré, les orientations stratégiques en matière de développement d'équipements commerciaux en précisant les secteurs d'activité commerciale à privilégier.

Il est envisagé de confier aux observatoires d'équipement commercial la mission d'élaboration du document unique dans lequel seront rassemblés tous les schémas de développement commercial d'un même département. Une exception sera faite pour la région Ile-de-France où ne sera rédigé, par l'observatoire d'équipement commercial d'Ile-de-France, qu'un seul document pour toute la région.

Les premiers documents rassemblant les schémas de développement commercial devront être élaborés dans les dix huit mois qui suivent la signature du décret, mais un délai de vingt-quatre mois est prévu pour la région Ile-de-France.

Afin que les observatoires puissent se mettre en place en attendant l'adoption du décret, le Secrétaire d'Etat aux Petites et Moyennes Entreprises, au Commerce, à l'Artisanat et à la Consommation a pris deux arrêtés le 4 mai 2001. L'un modifie la composition des observatoires d'équipement commercial, afin de rendre leur composition plus opérationnelle, tout en veillant au maintien de la représentation de toutes les parties intéressées par le développement du commerce et de l'artisanat. L'autre arrêté met en place l'Observatoire d'équipement commercial pour la région Ile-de-France.

Votre rapporteur pour avis souhaite la parution rapide du décret annoncé et se demande quelle sera la portée concrète de ces schémas de développement commercial. Ces schémas ne devaient être à l'origine qu'un recueil de données statistiques sur le commerce dans les zones de chalandise concernées. Mais l'absence de caractère normatif des schémas de développement commercial ne semble pas priver ces derniers de valeur juridique.

L'article 28 de la loi précitée prévoyant que les décisions des commissions départementales d'équipement commercial doivent se référer aux travaux des observatoires départementaux d'équipement commercial, ceux-ci incluent nécessairement les schémas de développement commercial. En outre, la loi n° 2000-1208 relative à la solidarité et au renouvellement urbains du 13 décembre 2000, adoptée en décembre 2000 , prévoit à son article 2 que le périmètre des schémas de cohérence territoriale ,-qui ont une valeur normative- tient compte des périmètres des schémas de développement commercial.

Il serait donc souhaitable que le Gouvernement éclaire le Parlement sur la portée qu'il entend donner à ces schémas et sur leur compatibilité . Les professionnels du commerce s'en inquiètent également, redoutant que les schémas de cohérence territoriale ne cantonnent les commerces dans des « corridors ». Dans de tels « parcs commerciaux », il serait exclu pour le commerce de développer des zones annexes d'activités et de tests (comme l'envisagent notamment les magasins de sport et loisirs), au détriment de leurs clients comme des collectivités locales, qui reconnaissent la qualité environnementale de telles implantations.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis appelle le Gouvernement à lever l'incertitude née des dispositions de la même loi -relative à la solidarité et au renouvellement urbains-, concernant les places de stationnement . Le commerce a besoin de précisions sur la nouvelle règle limitant la surface de stationnement à une fois et demie la SHON (surface hors oeuvre nette) des bâtiments affectés au commerce.

D'une part, le Gouvernement se doit de clarifier la notion de « SHON des bâtiments affectés au commerce », qui sert de base au calcul. Une interprétation extensive de cette notion (incluant les bureaux, les réserves...) permettrait d'élargir la base à laquelle s'applique le coefficient de 1,5.

D'autre part, les professionnels du commerce sont fondés à demander une lecture stricto sensu de la notion de « surface de stationnement » -que la loi veut limiter-, qui en exclurait les espaces verts, les espaces de rangement des chariots, les voiries de desserte, les voies de secours et les places de stationnement du personnel.

En l'état actuel des textes, une certaine latitude subsiste quant à la définition de la base de calcul comme de son résultat. Cette latitude pourrait permettre d'offrir une certaine souplesse dans l'application fort contraignante du coefficient de 1,5 au commerce. Un tel assouplissement rejoindrait la préoccupation de votre rapporteur pour avis.

D. LA QUESTION DU FINANCEMENT DE L'APPRENTISSAGE

On sait l'importance que revêt la formation professionnelle pour le secteur du commerce, de l'artisanat et des services, toujours confronté à des évolutions d'ordre technique, économique, commercial et réglementaire et au besoin d'une main d'oeuvre qualifiée.

Sans revenir sur la politique d'encouragement à l'apprentissage menée par le Gouvernement, votre rapporteur pour avis souhaite particulièrement évoquer la question épineuse de son financement.

De graves inégalités affectent les ressources des Centres de formation d'apprentis (CFA) et un certain nombre d'établissements, notamment ceux qui forment le plus de jeunes en situation difficile, fonctionnent dans un très grand dénuement.

En déposant le projet de loi de modernisation sociale, qui a déjà fait l'objet de deux lectures au Parlement, le Gouvernement a voulu modifier le dispositif actuel pour réduire les écarts de financement injustifiés entre établissements, clarifier la compatibilité des CFA et assurer aux réseaux qui sont les acteurs majeurs du service public de l'apprentissage, les ressources minimales indispensables à l'exécution de leur mission.

C'est dans cette perspective que l'article 44 du projet de loi de modernisation sociale prévoyait un plafonnement des ressources par apprenti, a fixer par arrêté ministériel et, la subordination de l'ouverture d'un CFA à un minimum de ressources par apprenti, par domaine et par niveau de formation.

La question n'est pas tant d'assurer que les CFA disposeront d'un montant minimum de ressources que de garantir ce minimum nécessaire au financement dudit CFA ou de la section. Par ailleurs, le montant des seuils prévus, par domaine et par niveau de formation -à partir des coûts de l'apprentissage- serait complexe à déterminer du fait de la diversité des facteurs en prendre en compte. Ceci a d'ailleurs empêché la fixation des plafonds par apprenti que le Gouvernement doit déjà prendre par décret en application de l'article 3 de la loi n° 96-376 du 6 mai 1996 (article L. 118-2-2, deuxième alinéa du Code du travail).

Le dispositif proposé n'est donc pas satisfaisant. Des dispositions simples devraient organiser un encadrement des ressources en taxe d'apprentissage, et achever ainsi la mise en place du système de péréquation nationale voulu par le législateur en 1996, mais qui n'a jamais correctement fonctionné, faute de mesures adéquates d'application.

La fixation d'un montant minimum de perception de taxe d'apprentissage par apprenti est une mesure simple et équitable, facile à mettre en oeuvre. Le Trésor et les régions pourraient assurer sans difficulté la gestion de ce dispositif dès 2002.

Elle permettrait une meilleure concertation entre les CFA et le Conseil régional en donnant à celui-ci une plus grande capacité à rétablir les équilibres financiers entre les différents établissements.

En outre, le financement régional que solliciterait un CFA prêt à créer une section nouvelle pour répondre à la demande des entreprises serait plus réduit s'il venait compléter un minimum de financement sur fonds de péréquation de 1.000 euros par apprenti, qui serait garanti, quel que soit, par ailleurs, le coût de la formation.

Enfin, afin de permettre l'évolution du dispositif, il serait souhaitable que le Gouvernement puisse, par décret en Conseil d'Etat après avis du comité de coordination des programmes régionaux d'apprentissage et de formation continue, fixer annuellement le minimum de collecte de taxe d'apprentissage par apprenti sans le rendre inférieur à 1.000 euros. Un tel dispositif tendrait à sécuriser le financement des CFA les plus fragiles et à mieux répartir les financements entre CFA par des mécanismes de péréquation.

Il permettrait également aux chambres de métiers, confrontées à de graves difficultés de financement (évoquées ci-après, dans le chapitre III) d'assurer un socle de financement pour les CFA qu'elles gèrent.

E. L'AVENIR DES CHAMBRES DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE (CCI)

La place des CCI dans la vie économique des territoires français est indéniable. Toutefois, pour clarifier leur positionnement qui prête à débat depuis de nombreuses années, le secrétaire d'Etat aux PME, au commerce, à l'artisanat et à la consommation a saisi le Conseil économique et social (CES), lequel a adopté un avis sur l'avenir des chambres de commerce et d'industrie en avril 2001.

Cet avis préconise de s'atteler avant tout à conforter les chambres dans l'exercice de leurs missions, par quatre priorités :

- renforcer leur rôle essentiel de représentation et de service aux entreprises, puisque ce rôle fonde leur légitimité ;

- affirmer la mission consulaire d'expertise économique et développer la veille économique ;

- redéfinir le rôle consultatif des chambres, qui sont un interlocuteur économique reconnu dans le cadre de la décentralisation ;

- développer le savoir-faire par des partenariats entre les chambres de commerce et d'industrie, les services de l'Etat (DRIRE, DREE, DRCE, etc...), ceux des collectivités locales, et les chambres de métiers.

Mais l'avis du CES appelle surtout à une réforme en profondeur des CCI et à une optimisation du fonctionnement du réseau consulaire, par un renforcement pragmatique de l'interconsularité (notamment pour certains aspects de gestion administrative).

Votre rapporteur pour avis souligne à ce sujet la nécessité de lever l'obstacle fiscal au rapprochement des chambres que constitue la soumission à la TVA des structures interconsulaires, alors que les chambres prises individuellement échappent à cet impôt.

Au-delà de la réforme du système électoral des chambres, l'ambition plus large de redonner aux CCI une dimension à la hauteur des besoins économiques locaux passe par une analyse du financement de ces chambres. Les ressources fiscales des CCI n'ont pas augmenté depuis quatre ans, alors que -au-delà de la seule dérive inflationniste- les charges en personnel s'alourdissaient en raison de l'accroissement du personnel statutaire et de la mise en place de la réduction du temps de travail, comme dans les chambres de métiers d'ailleurs.

Votre rapporteur pour avis estime prioritaire de prendre la mesure des exigences financières qu'entraînerait toute réforme de fond visant l'amélioration de l'efficacité des chambres.

Le secrétaire d'Etat aux PME a relevé l'aspect consensuel de la réforme électorale . La refonte du système électoral fait en effet partie des propositions de réforme à envisager à l'horizon des élections de 2003. Les chambres de commerce et d'industrie réunies au sein de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie ont fait connaître leurs premiers points de vue en la matière, lors de l'Assemblée générale du 31 mai 2001 : elles souhaitent que les élections se tiennent tous les cinq ans, et renouvellent intégralement les membres (rééligibles une seule fois).

La loi portant réforme des tribunaux de commerce, examinée en première lecture à l'Assemblée nationale et déposée au Sénat en mars 2001, devrait permettre le déclassement dans le domaine réglementaire du processus électoral des chambres de commerce et d'industrie et en particulier de la loi n° 87-550 du 16 juillet 1987 relative aux juridictions commerciales et au mode d'élection des délégués consulaires et des membres des chambres de commerce et d'industrie.

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