II. L'ACTION DES POUVOIRS PUBLICS

A. LES CRISES DE SANTÉ ANIMALE

1. L'encéphalopathie spongiforme bovine

a) L'interdiction des farines

En vigueur depuis 1991 pour les bovins et, depuis 1994, pour l'ensemble des ruminants, l'interdiction d'utiliser des protéines animales dans l'alimentation a été étendue à l'ensemble des animaux de rente par un arrêté du 14 novembre 2000. Depuis cette date est ainsi suspendue l'autorisation d'incorporer dans l'alimentation et la fabrication d'aliments pour animaux :

- des farines de viande, des farines d'os, des farines de viande osseuse, ainsi que toute autre protéine d'origine animale, à l'exception des protéines issues du lait, des produits laitiers ou des ovoproduits et de la gélatine de porc ;

- des graisses issues de la transformation des os destinés à la production de gélatine et des graisses obtenues à partir des farines de viande, des farines d'os et des farines de viande osseuse, des farines de volailles, des farines de plumes et des farines de poisson.

Par dérogation à ces dispositions, restent toutefois admis :

- les produits issus de poissons, de crustacés ou coquillages dans l'alimentation des poissons ;

- les farines de poisson dans l'alimentation des animaux autres que ruminants. Cette mesure est autorisée dès lors qu'aucun ruminant n'est détenu sur l'exploitation faisant usage des farines de poisson. Cette mesure, conforme à la décision 2001/9/CE, est introduite par l'arrêté du 13 février 2001.

Ces dispositions ont été complétées par un arrêté du 24 août 2001 qui interdit l'utilisation, pour l'ensemble des animaux de rente :

- des graisses de ruminants, à l'exception des tissus adipeux de bovins collectés à l'abattoir avant fente de la colonne vertébrale ;

- des graisses issues de la transformation des os de ruminants destinés à la production de gélatine ;

- ou des graisses contenant des tissus osseux de ruminants.

L'arrêté précité interdit également l'incorporation dans l'alimentation des ruminants :

- de phosphate bicalcique dérivé d'os ;

- de protéines hydrolysées issues de poissons et de plumes.

Les graisses de ruminants encore valorisables sont, par ailleurs, soumises à des traitements spécifiques -filtration des impuretés et traitement thermique à 133°, sous trois bars de pression pendant vingt minutes-, conformément à deux arrêtés du 9 avril 2001 et du 2 août 2001.

Des mesures de précaution ont également été prises à l'égard de l'alimentation des animaux de compagnie, un arrêté du 15 juin 2001 interdisant dans ce cas l'emploi de :

- protéines animales transformées issues de ruminants, telles que les farines de viande et d'os, les farines de cornes et de sang, ainsi que les cretons séchés ;

- graisses extraites de protéines animales transformées issues de produits de ruminants.

Depuis le 14 novembre 2000, les co-produits de viande provenant des abattoirs continuent à être transformés en farines et graisses, avant d'être détruites.

Compte tenu de leurs caractéristiques qui les rapprochent du fuel lourd, les graisses animales ont rapidement trouvé un débouché commercial comme combustible.

En revanche, la faiblesse des capacités de destruction des farines animales -essentiellement les cimenteries- a rendu nécessaire leur stockage dans une vingtaine de sites.

Selon les déclarations du ministre de l'agriculture devant la Commission des Affaires économiques, le 7 novembre dernier, le volume de farines stockées devrait atteindre 450.000 tonnes d'ici la fin de l'année 2001.

L'ouverture d'un site de stockage est cependant rendue difficile par les réticences des populations riveraines qui craignent les nuisances environnementales, olfactives, ainsi que les risques d'accidents qu'une telle présence pourrait occasionner.

Le financement du service de collecte et de transformation en farines des co-produits animaux est temporairement assuré par l'Etat qui verse, sur le fondement du décret n° 2000-1166 du 1 er décembre 2000, une indemnité dans ce but aux équarrisseurs. Il semblerait que cette prestation de service doive, à terme, être financée par les industriels des viandes eux-mêmes.

Compte tenu des problèmes soulevés par le stockage des farines, les pouvoirs publics souhaiteraient voir se développer la technique de l'incinération des déchets crus, en particulier au niveau des abattoirs. Un décret du 16 mars 2001 encourage le développement de ce procédé, qui semble, pour l'heure, n'être pas encore opérationnel.

b) La systématisation du dépistage
(1) La mise en place du dépistage systématique de l'ESB à l'abattoir

La décision, prise par un arrêté du 2 janvier 2001, de soumettre systématiquement à un test de dépistage tous les bovins de plus de trente mois entrant dans la chaîne alimentaire, est une mesure de prévention sanitaire complémentaire à celle du retrait des MRS.

Elle a également constitué une mesure de réassurance des consommateurs qui a contribué à faire remonter le niveau de la consommation de viande bovine, tombé très bas au cours du dernier trimestre de l'année 2001.

Rendu obligatoire à compter du 1 er janvier 2001, ce dépistage a quelque peu désorganisé l'activité d'abattage durant les deux premiers mois de l'année, dans la mesure où il impliquait d'intégrer, dans l'organisation interne des établissements, le délai d'analyse par les laboratoires des échantillons prélevés.

Pour la mise en oeuvre du dépistage systématique, le ministère de l'agriculture et de la pêche a autorisé le recours au test Biorad, développé par le Commissariat à l'énergie atomique et produit par une entreprise américaine, et au test Prionics, développé par une société suisse. Cer dernier a été le plus souvent choisi, parce qu'il avait déjà été utilisé dans le cadre du programme pilote de dépistage de l'ESB sur les bovins à risque.

Le dépistage systématique de l'ESB sur les bovins abattus en vue de la consommation humaine a été étendu aux animaux âgés de vingt-quatre mois et plus par un arrêté du 19 juillet 2001.

Au 13 novembre 2001, 58 cas d'ESB ont été diagnostiqués dans le cadre du dépistage systématique à l'abattoir.

(2) Le dépistage dans le cadre du programme national de surveillance de l'ESB sur les bovins à risque

Un programme national de surveillance de l'ESB sur les catégories de bovins à risque a été lancé en juin 2001. Il consiste à pratiquer un dépistage systématique de l'ESB sur tous les bovins de plus de 24 mois arrivant dans les équarrissages après avoir été trouvés morts ou euthanasiés.

Ce programme, qui devrait concerner 200.000 bovins sur la période comprise entre juin 2001 et juin 2002, a pour l'instant permis de diagnostiquer 61 cas d'ESB.

Il prend la suite de l'étude dite « pilote » réalisée en 2000, principalement dans les douze départements du grand Ouest, sur les bovins à risque de plus de 24 mois.

Portant sur 56.000 bovins, morts à la ferme, malades ou abattus d'urgence pour cause d'accident, cette étude avait permis de détecter 60 cas d'ESB en 2000 et 14 en 2001, soit un total de 74 cas.

Les résultats intermédiaires du programme, rendus publics par l'AFSSA le 11 décembre 2000, ont fait apparaître un taux de prévalence assez important de 2,1 pour mille de l'ensemble des catégories à risque, et de 3 pour mille chez les bovins abattus d'urgence à la suite d'un accident.

Afin de tenir compte de ce dernier résultat, les bovins accidentés ont été totalement exclus de la chaîne alimentaire par un arrêté du 7 février 2001, alors qu'ils pouvaient auparavant être vendus en vue d'être consommés, dans le délai maximal de 48 heures après l'accident.

(3) La détection de l'ESB dans le cadre du réseau national d'épidémio-surveillance

Depuis le 13 juin 1990, date à laquelle l'ESB a été reconnue comme maladie contagieuse à déclaration obligatoire, est en place un réseau national de surveillance clinique de cette maladie, qui fait intervenir les éleveurs, les vétérinaires sous mandat sanitaire, les laboratoires départementaux d'analyse, les services vétérinaires et le laboratoire national de référence -l'AFSSA-.

Ce dispositif vise à repérer tout bovin vivant présentant des troubles neurologiques suspects en élevage ou à l'abattoir et à assurer la collecte et l'analyse de ces bovins suspects.

Il a diagnostiqué 102 cas d'ESB en 2000 et 84 cas en 2001 (résultat au 13 novembre 2001).

Au total, depuis l'apparition de la maladie en 1991, 458 cas d'ESB avaient été diagnostiqués en France, dont 217 (58 lors du dépistage systématique à l'abattoir, 75 dans le cadre du programme de recherche sur les animaux à risque et 84 par le réseau d'épidémio-surveillance) en 2001 (résultats au 13 novembre 2001).

(4) Programme de dépistage du prion pathogène chez les ovins et les caprins

La prévention d'un éventuel risque d'ESB chez le mouton passant par un renforcement des mesures de lutte contre la tremblante, tous les Etats membres de l'Union européenne devront obligatoirement, à compter du 1 er janvier 2002, procéder à des tests de dépistage de cette maladie sur une partie de leur cheptel d'ovins et de caprins âgés de 18 mois.

Pour la France, ce programme impliquera au minimum la réalisation de 3.000 tests sur des ovins et caprins à risque : morts ou euthanasiés pour cause de maladie ou d'accident, et de 15.000 tests sur des animaux sains.

c) L'extension de la liste des matériaux retirés de la chaîne alimentaire

Dès 1996, la France a établi une liste des matériaux à risque spécifiés (MRS) dont le retrait est imposé à l'abattoir, compte tenu de leur exposition particulière au risque de contamination par l'ESB.

(1) Le retrait des MRS chez les bovins

Cette liste, qui comprenait, jusqu'à l'automne 2000, l'encéphale, la moelle épinière, les amygdales, l'iléon (partie de l'intestin), la rate, ainsi que, pour les bovins nés avant le 1 er mai 1999, le thymus, a été étendue par un arrêté du 10 novembre 2000 au thymus, aux amygdales et aux intestins des bovins, quel que soit leur âge.

Les obligations françaises vont plus loin que la réglementation européenne qui distingue selon l'âge des bovins pour certains matériaux.

Par ailleurs, des mesures de précaution ont été prises à l'égard de la colonne vertébrale, compte tenu du risque de projection de moelle épinière lors de la fente des carcasses, mais aussi de la présence de ganglions nerveux rachidiens.

L'obligation de retirer la moelle épinière avant la fente des carcasses à l'abattoir -dite opération de démédullation- entrera en vigueur le 1 er janvier 2002.

Par ailleurs, des dispositifs de retrait ont été définis avec les professionnels de la découpe et avec les bouchers détaillants, afin d'assurer que la manipulation des viandes contenant de l'os vertébral, incontournable dans cette profession, soit réalisée dans des conditions satisfaisantes pour la santé humaine.

Un avis du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie aux distributeurs de viande bovine, publié au journal officiel du 30 octobre 2001 définit ainsi le contenu des cahiers des charges des bouchers et des ateliers de découpe s'agissant du retrait des os de la colonne vertébrale des bovins de plus de douze mois.

(2) Le retrait des MRS chez les ovins et les caprins

L'obligation de retrait des matériaux à risque spécifiés concerne également les ovins et caprins. Jusqu'en 2001, étaient inclus dans cette liste l'encéphale, la moelle épinière, la rate et les amygdales des ovins de plus de douze mois.

Un arrêté du 24 juillet 2001 renforce ces mesures. En premier lieu, il abaisse l'âge à partir duquel le système nerveux central doit être retiré et détruit. Dorénavant le crâne entier sera détruit quel que soit l'âge de l'animal, à l'exception des muscles des joues et de la langue.

La cervelle des animaux de moins de six mois pourra être commercialisée sous réserve que l'âge puisse effectivement être prouvé à l'abattoir. En outre, à partir du 1 er janvier 2002, date à laquelle tous les abattoirs devront être équipés du matériel de prélèvement nécessaire, la moelle épinière sera éliminée sur toutes les bêtes de plus de six mois, ou quel que soit l'âge, si ce dernier ne peut être attesté par l'éleveur.

Enfin, dans son avis du 14 février 2001, l'AFSSA recommande le retrait et l'élimination des intestins d'ovins et caprins quel que soit leur âge. Cependant ces intestins subissent avant d'entrer dans la chaîne alimentaire un traitement mécanique, appelé délimonage, qui est en théorie susceptible d'éliminer les tissus nerveux et lymphoïdes seuls susceptibles d'être contaminants. Aucune donnée scientifique ne permet à ce jour de vérifier l'efficacité de ce processus de délimonage. C'est pourquoi l'AFSSA mène actuellement une étude visant à évaluer l'efficacité de ce processus.

2. La fièvre aphteuse

L'apparition en Grande-Bretagne d'une épizootie de fièvre aphteuse le 20 février 2001 a conduit à l'adoption de mesures drastiques de prévention en France, qui ont permis de limiter son extension à seulement deux foyers.

En application de la loi n° 91-639 du 10 juillet 1990 relative à la fièvre aphteuse, le programme de préalerte fièvre aphteuse a été appliqué dès le lendemain de l'annonce du premier cas en Grande-Bretagne, ce qui a conduit, tout d'abord, à recenser et à mettre sous séquestre toutes les exploitations ayant reçu des animaux du Royaume-Uni, ainsi que toutes les carcasses et viandes d'ovins importées de ce pays entre le 31 janvier et le 21 février 2001.

A partir du 28 février, a été mise en oeuvre la destruction de tous les animaux importés de Grande-Bretagne -essentiellement des ovins-, de l'ensemble des animaux avec lesquels ces derniers ont été en contact, ainsi que des animaux sensibles à la fièvre aphteuse dont l'origine n'avait pu être établie avec certitude, soit en tout près de 50 000 bêtes, auxquelles il convient d'ajouter quelques 10 000 carcasses.

9000 animaux en provenance des Pays-Bas et d'Irlande, pays dans lesquels s'étaient, entre-temps, déclarés des foyers de fièvre aphteuse, ont également été abattus.

En Grande-Bretagne, le nombre total d'animaux abattus s'est élevé, rappelons-le, à plus de trois millions.

Des prélèvements sanguins ayant été réalisés sur une partie des animaux euthanasiés afin d'évaluer leur contact avec le virus de la maladie, des périmètres de protection ont pu être instaurés autour des élevages ayant révélé des cas séro-positifs pendant quatre semaines après l'abattage.

Des systèmes de désinfection des personnes -pédiluves- et des véhicules -rotoluves- ont été mis en place autour de ces périmètres de protection, ainsi que dans les zones côtières en relation avec le Royaume-Uni et les aéroports.

Les mouvements et les rassemblements d'animaux des espèces sensibles, ainsi que les déplacements d'équidés ont été interdits à partir du 6 mars 2001.

Deux foyers de fièvre aphteuse ont été recensés en France, le premier dans le département de la Mayenne, l'autre en Seine-et-Marne. Si ce chiffre reste sans commune mesure avec les quelque 2000 foyers déclarés en Grande-Bretagne, les restrictions de mouvements d'animaux et de denrées animales imposées par la Commission européenne dans les départements touchés et les départements voisins n'en ont pas moins affecté significativement l'activité économique autour de ces foyers.

Les indemnisations versées aux éleveurs dont les animaux ont été abattus se sont élevées à près de 7,3 millions d'euros (48 millions de francs), auxquels il convient d'ajouter 5 millions d'euros (33 millions de francs) dépensés pour la mise en oeuvre des différentes mesures de maîtrise de l'épizootie, telles que la surveillance sanitaire, l'euthanasie et la destruction des animaux, ou encore la désinfection. Le coût pour le budget de l'Etat s'est élevé à plus de 12,2 millions d'euros (80 millions de francs), l'Union européenne devant toutefois prendre en charge 60% de cette somme.

DÉTAIL DES INDEMNISATIONS VERSÉES

(en euros)



Origine

Montant des indemnisations par espèce


Montant
des
indemnisations

Ovins

Bovins

Porcins

Caprins

Nombre

75,5 €/anl

Nombre

984 € /anl

Nombre

165 €/anl

Nombre

107 €/anl

RU

47 850

3 610 347

558

398 885

396

50 966

216

22 995

4 083 193

PB

1 868

142 387

707

7 166 655

6 673

810 190

0

0

1 890 633

F1

0

0

112

239 345

3 133

828 067

0

0

1 086 422

F2

1 447

107 629

119

116 959

26

915

1

152

225 655

TOTAL

51 165

3 860 363

1 496

1 471 844

10 228

1 687 398

217

23 147

7 300 772

RU : Royaume-Uni et contacts

PB : Pays-Bas

F1 : Foyer n° 1 et périfocaux

F2 : Foyer n° 2 et périfocaux

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche

Dans son rapport 2( * ) , au nom de la mission d'information de la Commission des Affaires économiques sur la lutte contre l'épizootie de fièvre aphteuse, présidée par M. Philippe Arnaud, notre collègue Jean-Paul Emorine a relevé l'insuffisante indemnisation des préjudices indirects générés par les mesures de restriction de la circulation, qui ont paralysé des secteurs comme l'élevage, les industries agroalimentaires ou le tourisme.

Dès le 23 juin 2001, la France a pu demander à l'Office international des épizooties (OIE) sa requalification en pays indemne de fièvre aphteuse, ce qui permet la levée des restrictions aux échanges de la part de pays tiers.

Ce statut, qui ne peut être attribué que trois mois après que le dernier cas a été traité et que le dernier animal vacciné a été abattu, a été officiellement reconnu à la France le 19 septembre 2001.

Si la gestion de cette crise a illustré le bon fonctionnement de l'organisation sanitaire française, elle a souligné l'enjeu que représentent les mouvements d'animaux sur le plan tant économique que sanitaire. Cet épisode aphteux a révélé à cet égard les lacunes du système d'identification des ovins, qui devrait prochainement être renforcé.

Le rapport de la mission d'information sénatoriale sur la fièvre aphteuse s'interroge, quant à lui, sur la possibilité de rétablir la vaccination contre la fièvre aphteuse, compte tenu du risque non négligeable de survenue d'une nouvelle épidémie, dès lors que ce virus existe à l'état endémique sur les trois quarts du globe. Il propose notamment de prendre en considération les progrès récents des techniques vaccinales, qui permettent désormais de distinguer les animaux infectés de ceux vaccinés.

Il recommande, en outre, de renforcer la veille sanitaire par la réalisation de contrôles sérologiques réguliers, et plaide en faveur d'une délimitation plus précise des périmètres soumis à embargo.

B. LA GESTION DES CRISES SECTORIELLES

1. La crise bovine

a) Une succession de plans d'aides
(1) Les mesures communautaires

? Face à l'ampleur de la crise qui gagnait l'ensemble des pays de l'Union européenne, le Conseil agriculture du 4 décembre 2000 a pris des décisions visant à rétablir l'équilibre du marché. Il s'agit :

- de la mesure de retrait ( régime dit d'achat-destruction ) des bovins de plus de trente mois présenté à l'abattage et n'ayant pas fait l'objet d'un test ESB. 500.000 tonnes de viande bovine devaient à l'origine être détruites dans le cadre de ce programme.

Financée à 70 % par le budget communautaire, cette mesure devait être appliquée de 1 er janvier au 30 juin 2001.

- de la mise en oeuvre du régime d'intervention publique sur le marché de la viande bovine, qui oblige la Commission a procéder à des achats lorsque les prix du marché tombent en dessous d'un certain niveau de prix.

? Un nouveau régime de retrait à caractère obligatoire, dit « régime de retrait spécial » a été instauré en mars 2001, en vue de remplacer le régime facultatif d'achat-destruction. Il concerne les bovins non éligibles à l'intervention, âgés de plus de trente mois et ayant donné un résultat négatif au test de l'ESB. Il laisse le choix aux Etats de procéder au stockage des carcasses retirées plutôt qu'à leur destruction. Cette dernière disposition vise à répondre aux préoccupations de l'opinion publique de certains pays comme l'Allemagne, qui désapprouve les destructions massives.

A la différence du régime d'achat-destruction, basé sur des prix préfixés auxquels les éleveurs peuvent souscrire en proposant leurs bovins de plus de trente mois à la destruction en contrepartie d'indemnités, le régime spécial met en oeuvre une procédure d'adjudication, en moyenne deux fois par mois, les abattoirs présentant eux-mêmes les offres aux agences d'intervention. Le financement de cette mesure, applicable jusqu'à la fin de l'année 2001, est assuré à 70 % par le budget communautaire.

? Lors du Conseil agricole du 20 juin 2001, les ministres européens de l'agriculture ont adopté la réforme de l'organisation commune de marché de viande bovine présentée par la Commission en février 2000.

Cette réforme a relevé de 350.000 à 500.000 tonnes le plafond de l'intervention publique, pour l'année 2001, afin de permettre un dégagement plus efficace du marché dans un contexte marqué par l'importance de l'excédent de production. Ce plafond est ainsi relevé, et maintenu à 350.000 tonnes pour le premier semestre 2002, avant la suppression de l'intervention.

En contrepartie, les Etats membres ont dû accepter des mesures tendant à restreindre certaines aides, en vue d'encourager la maîtrise de la production. C'est ainsi que :

- le taux de chargement maximal à l'hectare pour bénéficier de la prime au maintien du troupeau de vache allaitante (PMTVA) et de la prime spéciale pour les bovins mâles (PSBM) a été réduit de 2 à 1,9 unité de gros bovin (Ugb) pour 2002 et à 1,8 Ugb pour 2003 ;

- les plafonds régionaux de droits à la prime spéciale pour bovins mâles ont été diminués pour les années 2002 et 2003. Cette diminution atteint 1  pour la France et 9 % pour l'ensemble des pays européens ;

- la part maximale de génisses dans les troupeaux éligibles à la prime à la vache allaitante a été portée de 15 à 40 %, sauf lorsque l'éleveur a droit à moins de 14 primes ;

- la possibilité pour les Etats d'introduire des dérogations au plafond de 90 têtes de bétail par exploitation pour la prime spéciale au bovin mâle a été supprimée ;

- enfin, les droits à PMTVA reversés à la réserve nationale ont été gelés jusqu'à la fin de l'année 2003.

Votre rapporteur pour avis déplore le manque de solidarité dont a fait preuve l'Union européenne en refusant le versement d'aides directes aux éleveurs . Il convient, par ailleurs, de regretter le comportement de certains Etats qui, à l'instar de l'Allemagne, ont refusé d'appliquer chez eux les mesures européennes de dégagement de marchés, contribuant ainsi à aggraver et à prolonger la crise à l'échelle de l'Union européenne.

(2) Les plans français

Le Gouvernement a annoncé un premier train de mesures en faveur de la filière bovine le 21 novembre 2000 .

Doté d'une enveloppe de 3,2 milliards de francs (0,49 milliards d'euros), ce plan prévoyait le versement d'environ 1,6 milliard de francs aux éleveurs sous la forme de reports de cotisations sociales (1,2 milliards de francs) et d'allègements de charges (400 millions de francs).

A la suite de l'échec des Etats membres à s'accorder sur l'attribution d'aides communautaires aux éleveurs, le Gouvernement a mis en place un second plan de soutien aux éleveurs le 28 février 2001 , comportant 1,2 milliard de francs de crédits destinés :

- au versement d'aides ciblées, plafonnées, et décentralisées, pour un montant d'un milliard de francs ;

- au versement de 100 millions de francs d'aides à la filière « veaux de boucherie » ;

- au versement, pour 100 millions de francs, du complément national de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes.

En apparence significatives, ces mesures ont cependant déçu le monde agricole dans la mesure où elles n'ont pas permis une couverture satisfaisante des pertes subies du fait de la crise. En outre leur versement est apparu souvent tardif, ce qui a contribué à fragiliser la trésorerie de nombreux éleveurs.

Enfin, après l'annonce de versements anticipés de diverses primes, le Gouvernement a rendu public, le 17 octobre 2001 , un nouveau plan de vingt mesures , parmi lesquelles :

- la mise au point, sur la base d'une enquête nationale, relative à la situation de l'élevage bovin, d'un plan d'accompagnement des éleveurs en difficulté, qui ne devrait toutefois pas entrer en application avant l'année 2002 ;

- une réflexion sur les moyens de valoriser les jeunes veaux dans des filières spécifiques telles que l'alimentation des animaux domestiques (petfood) ;

A court terme devrait toutefois être instauré un dispositif de dégagement des jeunes veaux.

- le lancement d'une mission sur l'avenir du bassin allaitant ainsi qu'une réflexion autour de la différenciation de la viande issue du troupeau allaitant .

Votre rapporteur pour avis espère que ces mesures seront appliquées dans les plus brefs délais. Il souhaite également que l'accent soit mis plus fortement sur les actions de promotion et de communication, lesquelles sont indispensables pour rétablir le niveau de la consommation.

b) Une crise sans précédent

La nouvelle crise de l'ESB, déclenchée à l'automne 2000, a plongé l'élevage bovin français dans un marasme profond et durable.

Les premiers mois de l'année 2001 ont été marqués par la rétention d'un gros volume d'animaux sur les exploitations, la chute brutale du niveau de la consommation et les difficultés liées à la mise en place du dépistage systématique à l'abattoir ayant pour conséquence une forte diminution de l'activité d'abattage.

En dépit de la mise en place de mesures de dégagement du marché, qui ont permis de retirer plus de 150.000 tonnes de viande bovine, la filière reste durablement engorgée . Un excédent estimé à 80.000 tonnes subsiste à l'échelle européenne.

Si le niveau de consommation est remonté depuis l'automne dernier, il reste encore inférieur de 8 % à ce qu'il était avant la crise. Considérée comme structurelle, la diminution de la consommation concerne autant les achats des ménages que les commandes de la restauration collective.

Il en résulte une forte baisse des cours à la production, dont le niveau a chuté de 25 à 30% depuis un an, avec pour conséquence une dégradation substantielle du revenu des éleveurs . Dans ces conditions, le maintien à un niveau élevé des prix de vente aux consommateurs, expliqué partiellement par la répercussion du coût des tests et de l'augmentation de la taxe d'équarrissage, pose la question de la répartition des marges entre les différents opérateurs de la filière.

De même, l'afflux sur le marché français de viande bovine étrangère à bas prix a déclenché la colère légitime des producteurs français au début de l'automne.

Les initiatives prises au sein de la filière, en particulier la signature, le 24 octobre 2001, d'un accord entre producteurs et abatteurs convenant d'une grille de prix d'achat des bovins et suspendant provisoirement les importations de viande bovine, ont toutefois contribué à apaiser les tensions.

Alors que les trésoreries des éleveurs restent vides, votre rapporteur pour avis plaide pour l'attribution rapide des aides directes annoncées dans le cadre du dernier plan gouvernemental. Il tient également à souligner la nécessité de mettre en place, de manière urgente, le programme d'abattage temporaire des veaux laitiers, afin de dégager le marché à moyen terme.

De nombreuses exploitations sont au bord de la faillite. Une étude de l'Institut national de la recherche agronomique évalue à 59 000 le nombre des exploitations directement menacées. Sans un engagement massif en faveur des éleveurs, notamment du bassin allaitant, l'effondrement de toute une filière est à craindre, qui fragiliserait l'équilibre économique de nombreuses régions, sans parler des conséquences en termes d'occupation de l'espace rural.

Les deux composantes du cheptel bovin français ont été affectées par la crise de confiance. Traditionnellement valorisées dans la production de steak haché, les vaches laitières de réforme ont vu leur principal débouché se restreindre.

Le cheptel allaitant a quant à lui subi les conséquences de la diminution des achats de broutards par l'Italie. L'organisation de l'élevage allaitant en France, essentiellement tourné vers l'activité de naissage a démontré ses faiblesses à l'occasion de cette crise. Alors qu'il semble exister, en France, une demande spécifique des consommateurs à l'égard des races bovines dites à viandes, il conviendrait de développer une activité d'engraissement dans les zones françaises de production.

A cet égard, votre rapporteur pour avis attend avec intérêt les propositions que devrait formuler l'expert désigné par le Gouvernement sur l'avenir du bassin allaitant.

Estimant que la filière ne fera pas l'économie d'une réflexion sur la maîtrise de sa production, il considère aussi comme indispensable la réforme de l'organisation commune de marché. Celle-ci devra notamment renforcer les outils de gestion du marché et permettre une meilleure prise compte de l'élevage bovin allaitant, qui reste une spécificité française.

2. La crise viticole

Le secteur viticole a connu une année difficile, notamment en raison de la surproduction et de la mévente des vins de table et des vins de pays du sud est.

Cette crise provoquée par la tendance confirmée au recul de la consommation française et par la concurrence accrue des vins des nouveaux pays producteurs s'est traduite par une augmentation de l'excédent qui devrait s'établir à 5 millions d'hectolitres à la fin de l'année 2001. Il est vrai que les parts de marché de la France à l'exportation ne cessent de baisser. Après le niveau record de 15 millions d'hectolitres vendus en 1998, les exportations ont connu un repli de 0,6 million d'hectolitres en 1999, confirmé par une nouvelle diminution de 0,7 million d'hectolitres sur l'année 2000.

La chute des ventes a entraîné une baisse des prix des vins de l'ordre de 30 % , qui a contraint les coopératives à diminuer les acomptes versés à leurs adhérents. Ceux-ci ont très vite été confrontés à un manque de trésorerie, compte tenu de l'importance de leurs charges.

Les producteurs de vins de pays et de vins de table de la région Languedoc-Roussillon ont exprimé leur mécontentement au cours de plusieurs manifestations qui se sont déroulées avant l'été. La tension été particulièrement forte à l'égard de la grande distribution, accusée d'accorder sa préférence à la vente de vins européens.

A la suite de réunions qui se sont tenues en juillet à l'ONIVINS, la Fédération du commerce et de la distribution, (FCD), qui représente une partie des distributeurs, s'est engagée à mettre en avant les vins français dans les linéaires.

Par ailleurs, la France a dû recourir à plusieurs distillations de crise pour assainir le marché. Du 9 janvier au 15 février 2001, une première distillation de crise avait été réalisée en vue de transformer en alcool quelques 800.000 hectolitres de vins. Cette distillation s'étant avérée insuffisante pour redresser les cours, le Gouvernement français, sur la demande des professionnels, a obtenu en juin dernier de la Commission européenne l'autorisation de distiller 1,5 million d'hectolitres supplémentaires.

En juillet dernier, un rapport 3( * ) sur la situation du secteur viticole français au regard du marché mondial des vins a été remis au ministre de l'agriculture et de la pêche.

Dans la droite ligne de ce rapport, le Ministre de l'agriculture a annoncé, le 25 septembre 2001, un plan d'adaptation pour la viticulture , invitant par ailleurs les acteurs professionnels à élaborer avec Jacques Berthomeau une stratégie pour la filière à l'horizon 2010.

Le plan d'adaptation rendu public définit les objectifs suivants :

- accélérer et achever la restructuration du vignoble ;

Il s'agit de reconvertir, avec le soutien de la nouvelle OCM viti-vinicole, les surfaces produisant des vins pour lesquels il n'existe plus de demande.

- moderniser et restructurer l'outil de vinification ;

Cette action sera fondée sur des schémas de restructuration établis au niveau départemental, en vue de favoriser une meilleure adéquation entre les vignobles et les caves. Elle implique un recours accru des caves aux services d'oenologues. Un soutien à l'accompagnement technique serait est prévu dans ce but.

- renforcer la puissance commerciale de la filière ;

Ce renforcement nécessite une concentration dans le secteur du négoce, actuellement très éclaté. Les soutiens publics, y compris les aides classiques telles que les primes d'orientation agricole (POA), seront conditionnés à des projets s'inscrivant dans des stratégies définies au niveau départemental.

- améliorer l'OCM viti-vinicole ;

Il s'agirait de reconnaître aux Etats membres la possibilité de rendre obligatoire tout ou partie de la distillation de crise qu'ils sollicitent. Une demande en ce sens devait être formulée par le Gouvernement français. De même devrait être demandées la mise en place d'une mesure de reconversion différée et l'instauration d'un délai indemnisé entre l'arrachage et la replantation.

Dans l'immédiat  devraient être appliquées des mesures destinées à constituer le premier volet du plan d'adaptation . Le Ministre de l'agriculture a ainsi annoncé :

- la demande, auprès des autorités communautaires, d'une distillation supplémentaire d'un volume de 4 à 5 millions d'hectolitres, ainsi que l'autorisation d'attribuer une aide nationale pour relever le prix payé aux producteurs ;

- l'affectation d'une enveloppe de 15 millions de francs en vue du versement aux jeunes agriculteurs d'aides à la trésorerie ;

- le paiement des aides à la restructuration du vignoble - pour un montant de 141 millions de francs - et des primes d'orientation agricole - pour un montant de 841 millions de francs - dont le versement est en retard.

Le Gouvernement a, en outre, promis l'attribution, dès cette année, de 115 millions de francs à l'ONIVINS en vue de soutenir l'amélioration des structures de production et de vinification.

Prenant la mesure des enjeux auxquels est aujourd'hui confrontée notre filière viti-vinicole, la Commission des affaires économiques a récemment décidé la c réation d'un groupe de travail sur l'avenir de la viticulture française.

Ce groupe de travail cherchera à analyser les causes structurelles de la diminution des ventes de vin en France, et les problèmes liés à la surproduction, à l'insuffisante organisation des producteurs et à l'inadaptation partielle de l'offre. Il s'agira également de prendre la mesure de la percée des nouveaux pays producteurs sur le marché mondial des vins, d'identifier leurs facteurs de réussite, notamment en termes de communication et de stratégie commerciale, et de formuler des propositions en vue de préserver l'avenir de ce secteur.

Il devrait rendre ses conclusions au cours du premier trimestre de l'année 2002.

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