EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une séance tenue le mercredi 21 novembre 2001, sous la
présidence de M. Jacques Valade, la commission a examiné le
rapport pour avis de
Mme Danièle Pourtaud
,
sur les
crédits des relations culturelles scientifiques et techniques
extérieures inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.
Mme Marie-Christine Blandin
a regretté le fréquent clivage
entre le rôle croissant de la coopération
décentralisée, et la variété des actions mises en
oeuvre par les collectivités locales en matière de relations
culturelles extérieures, et l'inertie souvent opposée aux
demandes d'attribution de bourse qu'il arrive à celles-ci d'appuyer pour
faciliter l'inscription d'étudiants étrangers dans les
établissements d'enseignement supérieur situés sur leur
territoire.
M. Louis Duvernois
a souscrit aux critiques présentées
dans le récent rapport de M. Yves Dauge sur le fonctionnement des
centres culturels français.
Il a estimé que la rénovation de l'ensemble du réseau
d'influence animé par le ministère des affaires
étrangères, qui consomme près de la moitié de ses
crédits, était indispensable.
Il a rappelé que l'apprentissage du français était en
régression constante, y compris dans des pays de tradition francophone
comme l'Italie ou la Suisse. Notant que l'apprentissage du français
avait souvent lieu dans les établissements de l'Alliance
française, largement tournés vers des partenariats avec le
secteur privé, il a regretté la tendance des services culturels
des postes diplomatiques à transposer les pratiques des administrations
centrales et a souhaité que l'idée de diplomatie culturelle, qui
implique la création de liens étroits avec des partenaires
privés locaux, inspire de plus en plus le comportement des agents.
Exprimant son soutien au renforcement de TV5, et se félicitant de
l'unification de Satellimages TV5 et de TV5-Amériques, il a
regretté la faiblesse de l'opérateur francophone sur les grands
marchés porteurs que sont les Etats-Unis et le Japon. Si la diffusion de
TV5 sur un deuxième satellite aux Etats-Unis est une initiative
opportune, il n'en faudra pas moins vérifier dans un an les
résultats concrets des choix actuels. Il a demandé quelle
était la fiabilité des mesures d'audience
présentées par TV5.
M. Louis de Broissia
a enfin jugé très insuffisant le
crédit de 2 millions de francs accordé au programme FLAM,
destiné à favoriser l'apprentissage de notre langue par les
élèves français scolarisés dans des
établissements étrangers et a souhaité que la commission
propose d'augmenter ces crédits qui satisfont un besoin important
exprimé par les Français expatriés.
M. Michel Guerry
, évoquant lui aussi la diminution de
l'apprentissage du français, a regretté que l'insuffisance des
bourses versées aux élèves français interdise
l'accès des établissements français à
l'étranger à de nombreux enfants issus des classes moyennes. Il a
rappelé que les droits d'écolage se situaient entre 10.000 et
50.000 francs et a estimé que la mesure nouvelle prévue en
faveur des bourses était insuffisante au regard de la situation. Il
conviendrait de résorber l'écart entre le coût
budgétaire d'un enfant scolarisé en France, évalué
à 29.000 francs, et celui d'un enfant scolarisé dans un
établissement du réseau de l'AEFE, évalué à
10.000 francs.
Le meilleur moyen d'y arriver, a-t-il indiqué, serait d'obtenir la
contribution du ministère de l'éducation nationale à
l'effort consenti en faveur de l'enseignement français à
l'étranger.
Il a enfin regretté les difficultés d'accès aux
universités françaises des élèves, français
ou étrangers, issus des établissements de l'AEFE, rappelant que
le ministre des affaires étrangères s'était engagé
à ce que l'ensemble des élèves français aient
accès aux universités françaises à partir de 2002.
M. Ivan Renar
a rappelé que de nombreux centres culturels
français à l'étranger travaillaient dans des conditions
difficiles et que certains centres avaient été fermés en
Allemagne. Il a estimé que la place du français à
l'étranger était liée à celle que la France accorde
aux langues étrangères, dont il importe donc de développer
le rôle.
S'appuyant sur le cas de la ville de Baalbek, au Liban, où la demande
d'enseignement français est en forte progression depuis l'installation
d'une municipalité non intégriste, il a relevé
l'importance des besoins non satisfaits, et a regretté que de nombreux
libanais francophones et francophiles soient dans l'impossibilité de
donner un enseignement français à leurs enfants.
Il a aussi regretté la faiblesse des crédits culturels des
ambassades.
Rappelant les succès actuels du cinéma français à
l'étranger, il a enfin demandé s'il existait des aides pour
favoriser le passage en salle des films français.
M. Jacques Legendre
a constaté l'existence d'une distorsion entre
l'effort financier consenti en matière de politique culturelle
extérieure, d'une part et, d'autre part, l'insuffisant souci de
maintenir le rang du français en France à l'étranger.
Se déclarant satisfait de l'évolution des moyens octroyés
à l'action culturelle extérieure, ainsi que de l'avancement de la
réforme de TV5, il a regretté que l'effort consenti dans ces
domaines le soit aux dépens des crédits de la coopération
au développement. Il a aussi relevé la faible évolution du
nombre des étudiants étrangers en France et la modestie des
moyens mis à la disposition d'Edufrance, rappelant par ailleurs les
problèmes auxquels les étudiants étrangers de heurtent
pour obtenir des visas.
Il a enfin proposé à la commission d'émettre un voeu en
faveur de la réouverture rapide du lycée français de
Kaboul.
Mme Danièle Pourtaud, rapporteur pour avis
, a
présenté les réponses suivantes :
- les moyens de l'action culturelle extérieure sont
nécessairement modestes par rapport à l'immensité des
tâches à remplir, aussi est-il utile que les parlementaires se
mobilisent pour obtenir l'augmentation des dotations ;
- une partie très significative de l'action culturelle extérieure
de la France est le fruit de l'initiative des collectivités locales. Il
conviendrait d'entreprendre un bilan de cet aspect de notre politique ;
- le rapport Dauge sur les établissements culturels à
l'étranger montre que certains besoins sont mal satisfaits. Certaines
évolutions sont nécessaires. Il s'agit en particulier du
redéploiement géographique du réseau. L'exemple de
l'Allemagne, où le maillage peut apparaître excessif compte tenu
de la rapidité des moyens de transport et de l'existence de la
chaîne Arte, est significatif à cet égard ;
- l'enseignement du français régresse, encore que le nombre des
locuteurs augmente. Les établissements français à
l'étranger font face à l'insuffisance du nombre de places
disponibles et à au niveau élevé des frais
d'écolage. Le ministère des affaires étrangères est
conscient des problèmes que cette situation pose aux ressortissants
français, ainsi d'ailleurs qu'aux enfants étrangers issus des
classes moyennes, de plus en plus écartés de nos
établissements. La réforme récente du système des
bourses et l'abondement régulier des crédits correspondants est
une première réponse à cette situation. En ce qui concerne
les élèves étrangers, s'il est frustrant de ne pas
répondre à l'ensemble des demandes d'accueil, on ne saurait non
plus considérer que le rôle des établissements
français est de pallier les défaillances de l'enseignement public
national. Un équilibre doit être trouvé entre
l'intérêt d'appuyer notre politique d'influence culturelle sur
l'efficacité de notre réseau éducatif et la
nécessité de ne pas encourager l'affaiblissement de
l'enseignement public national ;
- une collaboration étroite entre le ministère des affaires
étrangères et le ministère de l'éducation nationale
favoriserait sans doute l'augmentation des moyens mis à la disposition
de l'enseignement français à l'étranger ;
- les estimations d'audience de TV5, à distinguer du chiffre de
130 millions de foyers initialisés, c'est-à-dire pouvant
accéder aux programmes de la chaîne, sont fiables car ils
procèdent d'enquêtes effectuées sur place. Au demeurant,
l'augmentation des recettes de publicité de TV5, qui prend appui sur
l'évaluation de l'audience par les annonceurs, confirme la pertinence de
ces mesures ;
- les faibles performances de TV5 sont plus critiquables aux Etats-Unis qu'au
Japon dans la mesure où des moyens importants sont engagés sur le
continent américain, dont on est en droit d'attendre des
résultats. La progression de l'audience y passera vraisemblablement dans
les prochaines années par le développement du sous-titrage des
programmes ;
- l'un des services rendus par Edufrance aux étudiants étrangers
est la prise en charge de la préinscription dans les universités,
ce qui contribue à résoudre les difficultés
rencontrées dans ce domaine ;
- il existe 151 centres culturels français à
l'étranger, généralement animés par un personnel
extrêmement dévoué. Une mesure nouvelle de 20 millions
de francs est inscrite dans le projet de budget pour 2002 en faveur de ces
centres ;
- il est délicat pour le rapporteur pour avis sur les crédits des
relations culturelles extérieures de prendre dans son rapport position
sur l'évolution de la politique de coopération au
développement, qui n'entre pas dans ses attributions ;
- Edufrance contribue à l'augmentation du nombre des étudiants
étrangers en France en agissant comme une structure de concertation
entre les différents acteurs nationaux, sans se substituer aux
universités et aux grande écoles qui souhaitent conserver une
démarche autonome dans le domaine de l'accueil. Ce dispositif
récent et encore un peu expérimental a
bénéficié à un millier d'étudiants qui se
sont cette année adressés à lui pour organiser et payer
leur scolarité en France. Ce chiffre significatif montre que l'action
d'Edufrance commence à être reconnue dans un certain nombre de
pays, spécialement d'Afrique et d'Amérique latine, qui n'ont pas
une forte tradition de scolarisation dans l'enseignement supérieur
français. Le nombre total des étudiants étrangers en
France a été de 172.000 en 2001, chiffre en augmentation de
12.000 par rapport à 2000. Ce progrès est vraisemblablement aussi
le résultat de l'évolution de la politique des visas.
Au terme de ce débat, la commission a décidé de donner
un avis défavorable à l'adoption des crédits pour 2002
des relations culturelles scientifiques et techniques.