C. UN EFFORT DE PROSPECTIVE ENCORE INSUFFISANT

1. Une filière de réussite...

Les résultats des dernières enquêtes statistiques mettent en avant les deux atouts de l'enseignement technique agricole que sont, d'une part, le caractère promotionnel de cet appareil de formation qui favorise les poursuites d'études et, d'autre part, sa capacité à répondre à la demande de formation.

S'agissant des taux de poursuite d'études, si la rénovation pédagogique conduite entre 1987 et 1997 a permis de créer de nouvelles passerelles entre les formations agricoles mais également entre ces dernières et celles dispensées au sein de l'éducation nationale, force est de constater que chacun des diplômes préparés au sein de l'enseignement agricole conserve une spécificité propre adaptée aux besoins des secteurs de formation.

Au niveau V, le CAPA, qu'il soit préparé sous statut scolaire ou par la voie de l'apprentissage, demeure un diplôme d'insertion professionnelle, dont les enquêtes attestent au demeurant le succès en dépit d'une tendance à la diminution des poursuites d'études. A l'inverse, le BEPA, qui constitue environ 80 % de l'offre de formation de niveau V, voit sa fonction propédeutique renforcée au fil des ans. Ainsi près de 80 % des diplômés de 1994, dernière année étudiée, ont poursuivi des études alors que ce taux n'atteint guère plus de la moitié pour les CAPA.

On observe un phénomène analogue au niveau IV, phénomène nouveau lié à la diversification de l'offre de formation à la suite de la mise en place du BTA rénové, des baccalauréats professionnels, des baccalauréats technologiques et du baccalauréat scientifique.

Ainsi, les diplômés du baccalauréat technologique ont une propension très forte à poursuivre des études (95 %), ce qui est conforme aux objectifs de ce diplôme, tandis qu'au fil des ans le BTA voit confortée sa fonction d'insertion professionnelle comme formation permettant d'accéder à la capacité professionnelle requise pour bénéficier des aides à l'installation, les taux de poursuite d'études diminuant régulièrement. On observe un phénomène comparable pour les titulaires du baccalauréat professionnel, qui sont moins de 50 % à poursuivre des études.

Enfin au niveau III, la fonction professionnelle du BTSA se confirme, ses diplômés s'engageant moins que par le passé dans la poursuite d'études.

L'enseignement agricole se distingue au sein de l'enseignement technologique et professionnel par ses performances en termes d'insertion professionnelle.

A l'exception de quelques difficultés pour les titulaires du CAPA ou du baccalauréat professionnel, les résultats de l'enseignement agricole en ce domaine sont en constante amélioration alors que le flux des diplômés a augmenté et que les champs professionnels se sont diversifiés.

2. ... dont les acquis doivent être préservés

La rénovation pédagogique a contribué à faire de l'enseignement agricole " une filière de réussite ", assurant tout à la fois une fonction de promotion de ses élèves et, pour certains d'entre eux, une fonction de remédiation.

Ses méthodes pédagogiques fondées sur des liens étroits entre formation théorique et pratique professionnelle y sont sans doute pour beaucoup.

L'enseignement agricole après avoir connu un vif succès -considéré par d'aucuns comme excessif- est désormais entré dans une phase de stabilisation, résultat de la tendance générale à la baisse démographique de la population d'âge scolaire et de l'arrivée à maturité des formations agricoles.

Parallèlement, le modèle d'entrée dans l'enseignement agricole se modifie : les arrivées d'élèves issus de l'éducation nationale sont moins massives que par le passé, l'évolution des effectifs résultant désormais essentiellement des taux de poursuite d'études et de la capacité de cet enseignement à retenir les jeunes dans les formations secondaires et supérieures courtes.

La pérennité de l'enseignement agricole dépend donc largement de sa capacité à apparaître comme un enseignement professionnel qui marche, c'est-à-dire qui dispense une formation conduisant à l'emploi.

Cet enseignement a parfaitement su jusqu'ici répondre à la demande de formation et aux mutations du monde rural et des métiers de l'agriculture.

Cet acquis doit être préservé grâce à une réflexion prospective sur les métiers auxquels prépare cet appareil de formation.

La tentative de recentrer les formations sur le secteur de la production qui s'était manifestée dans la période de forte croissance des effectifs semble désormais écartée. Votre rapporteur ne pourra que s'en féliciter.

La multifonctionnalité de l'agriculture affirmée par l'article premier de la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 implique une vision ouverte de l'enseignement et de la formation agricoles. Les évolutions du métier d'agriculteur comme la diversification croissante des modes d'installation nécessitent des compétences professionnelles plus variées que par le passé et une plus grande ouverture sur les besoins du secteur de la transformation et de la commercialisation. Cette exigence trouve désormais un écho particulier avec l'accroissement de la demande sociale en matière de qualité et de sécurité sanitaire de la production.

Par ailleurs, comme l'a souvent souligné votre rapporteur, l'enseignement agricole ne peut se réduire à la formation des agriculteurs, sauf à être condamné à un lent dépérissement compte tenu de la tendance actuelle à la stabilisation du nombre des installations. L'enseignement agricole doit également répondre aux exigences de la revitalisation du monde rural. En ce domaine, de réels besoins existent, besoins qui imposent une diversification des formations.

Au regard de ses enjeux, votre rapporteur ne peut qu'appuyer la réflexion lancée par le ministre de l'agriculture afin d'élaborer un " projet pour le service public d'enseignement agricole " (PROSPEA).

Cependant, force est de constater que ses résultats, au terme de la première phase, consacrée à des débats au niveau local comme au niveau national, ne permettent pas pour l'heure d'y voir l'ébauche d'une véritable démarche prospective capable d'assurer l'adaptation de l'enseignement agricole à la demande de formation. Votre rapporteur souligne que la volonté affichée au terme de cette première phase de calquer le contenu des formations sur les métiers relevant du champ de compétences du ministère de l'agriculture et de la pêche constitue sans doute une garantie de l'adaptation de l'enseignement à la demande de formation. Cependant, cette conception ne doit pas imposer une vision trop réductrice des formations alors que la production agricole est aujourd'hui au coeur des questions liées à la protection de l'environnement et au renforcement de la sécurité sanitaire, questions qui dépassent le champ de compétences du ministère.

Cette absence de réelle ambition pour l'enseignement agricole ne peut qu'inquiéter alors qu'il subit aujourd'hui le contrecoup d'une politique malthusienne de maîtrise des effectifs, qui demeure encore peu ou prou d'actualité, ce que votre rapporteur regrettera.

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