CHAPITRE II :
LES RECETTES :
FINANCER LES
35 HEURES ET " TUER " LA CSG
I. LE FINANCEMENT DES 35 HEURES
A. À LA RECHERCHE DU FOREC ET DE SON FINANCEMENT
1. Le FOREC existe-t-il ?
a) Les 35 heures auraient dû être financées par le FOREC dès cette année
L'article 5 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000 a créé un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, dénommé FOREC , dont les dispositions figurent aux articles L. 131-8 et suivants du code de la sécurité sociale.
Le FOREC a pour objet de financer :
- d'une part, les allégements de charges sociales patronales, qui ont été prétendument " réformées " ;
- et, d'autre part, les aides à la réduction du temps de travail.
La création du FOREC résulte donc directement de la décision du gouvernement d'imposer la durée hebdomadaire du travail à 35 heures, tant aux entreprises qu'aux salariés.
Pour " sauver " les 35 heures, le gouvernement a dû, en effet, se rallier aux allégement de charges sociales sur les bas salaires, nouvelle orientation que le gouvernement issu des élections législatives de 1993 avait donnée à la politique de l'emploi.
Il reconnaissait ainsi a posteriori , et bien tardivement, la pertinence des positions défendues par le Sénat, même si votre rapporteur pour avis considère que l'adoption de la proposition de loi déposée, en son temps, par M. Christian Poncelet aurait permis de donner plus d'ampleur aux créations d'emplois résultant de l'allégement du coût du travail peu qualifié.
b) Une existence jusqu'à présent virtuelle
La réduction du temps de travail est le dispositif sans doute le plus symbolique de l'action du gouvernement, et a été menée au pas de charge.
Pourtant, curieusement, le FOREC n'a toujours, pour l'instant, qu'une existence virtuelle.
En effet, les décrets d'application de l'article 5 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée n'ont toujours pas été publiés , ni le directeur ni les membres du conseil d'administration nommés, ni les conventions financières régissant les relations Etat/FOREC et FOREC/sécurité sociale rédigées.
Les règles de fonctionnement du FOREC Le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale est un établissement public national à caractère administratif. Il peut donc faire l'objet de contrôles par la Cour des comptes. Ses règles de fonctionnement comme ses personnels relèvent d'un statut de droit public. Un décret en Conseil d'Etat doit fixer : - la composition du conseil d'administration, qui sera constitué de représentants de l'Etat ; - la composition du conseil de surveillance, qui comprendra, notamment, des membres du Parlement et des représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national ; - les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds. Le statut du fonds de financement est semblable à celui du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à celui du fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie (CMU). En effet, comme eux, le FOREC gère des transferts financiers entre l'Etat et les organismes sociaux. Il est prévu que les frais d'assiette et de recouvrement des impôts, droits, taxes et contributions constituant les recettes du fonds, sont à la charge de ce dernier, en proportion du produit qui lui est affecté. Leur montant est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale. Par ailleurs, sont prévues des conventions entre le fonds de financement et les organismes de protection sociale, d'une part, et le fonds de financement et l'Etat, d'autre part, afin de régler leurs relations financières respectives. Ces conventions sont notamment destinées à garantir la neutralité en trésorerie des flux financiers pour les organismes de sécurité sociale. Il s'agit en effet d'éviter un éventuel décalage entre le bénéfice de l'exonération de cotisations patronales et sa compensation par le fonds. |
En raison de l'absence, à la date d'aujourd'hui, de publication de ces décrets, les ressources du FOREC sont versées à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et centralisées par elle, à titre transitoire, et jusqu'à la création effective du fonds de financement.
Les circuits financiers de remontée des recettes fiscales L'annexe f au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 précise que, dans l'attente de la mise en place du FOREC, pour laquelle le gouvernement se garde bien de fixer une date, des circuits financiers ont été mis en place à titre transitoire : - sont recouvrées par les services des douanes les recettes suivantes : les droits de consommation sur les tabacs et les alcools, ainsi que l'ensemble des composantes de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), à l'exception de la part sur les installations classées, recouvrée par les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) ; - la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés (CSB) est collectée par les trésoreries générales. |
Ce retard dans la publication des textes d'application du FOREC est pour le moins étrange s'agissant d'une mesure aussi emblématique pour le gouvernement, et ne laisse pas d'étonner, y compris au sein des services de l'Etat. Ainsi le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, M. Didier Migaud, avait-il reproduit, dans son rapport établi à l'occasion du collectif du printemps 2000 11 ( * ) , une réponse du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, indiquant : " il paraît indispensable de lancer la procédure en Conseil d'Etat au plus tard courant juillet et nommer un directeur en septembre, dernier délai pour lui laisser trois mois pour préparer le budget 2001 et les conventions ".
Ce " dernier délai " est aujourd'hui dépassé : au début du mois de novembre, le décret précisant les modalités d'organisation, de fonctionnement et de gestion du FOREC est, paraît-il, toujours en cours d'examen par le Conseil d'Etat.
* 11 Assemblée nationale, rapport n° 2387, pages 50 et 51, XIème législature.