C. LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT POUR 2001 : DE L'ILLUSION À LA CONFUSION
1. L'illusion
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 apparaît à maints égards comme un exercice d'illusionnisme. Le gouvernement veut faire croire qu'il retrouve le excédents, mais il les gaspille ; il veut faire croire qu'il engage des réformes, mais il les oublie complètement ; il veut faire croire qu'il réduit les prélèvements, mais il les reporte et les augmente. L'excédent : gaspillé !
Ainsi, les excédents se retrouvent gaspillés . L'illusion réside ainsi dans l'affichage de soldes positifs conventionnels et variables alors que ceux-ci sont en fait utilisés et gaspillés. Il s'agit d'abord de la différence entre le solde tendanciel des régimes de sécurité sociale et le solde après imputation du coût des mesures du projet de loi de financement. La seule dégradation de ce solde est en elle même condamnable dans la mesure où le passif de la sécurité sociale est lourd : la dette sociale à rembourser et l'avenir des retraites justifieraient à eux seuls un effort particulier. Au lieu de quoi, le gouvernement se lance dans le financement de grandes réformes inutiles et coûteuses comme les 35 heures et ponctionne les excédents là où ils se trouvent. L'autre illustration du gaspillage se retrouve dans le rapprochement de l'utilisation des recettes supplémentaires totales d'un exercice à l'autre et de leur utilisation. Elles sont toutes, à un milliard de francs près, utilisées pour des dépenses, qu'il s'agisse de hausses volontaires ou bien de hausses mécaniques. A quoi auront donc servi les recettes éphémères de la croissance économique ? A de nouvelles dépenses sans réflexion ni vision. L'excédent de 4 milliards de francs de la sécurité sociale prévu pour 2001 n'est alors plus une source de triomphalisme mais le minimum de solde positif qu'il fallait bien conserver pour s'en féliciter.
Dans le même temps, évidemment, les réformes sont oubliées . La seule vraie réforme proposée dans le présent projet de loi de financement consiste en la création du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Pour le reste, le gouvernement avance la réforme de la CSG et de la CRDS, celle des prestations familiales et celle des retraites. La confrontation avec la réalité est cependant plus rude. Il n'y a pas de réforme de la CSG mais une complexification dangereuse remettant en cause le principe même du lien qui unit les salariés à leur protection sociale maladie. De plus, cette " réforme " apportera inégalités, injustices, désillusions (cf. infra ). S'agissant de la CRDS, la " réforme " consiste à reporter sur les autres redevables la charge de l'exonération, inégalitaire et injuste, en leur faisant verser pendant deux ans supplémentaires la CRDS. Par ailleurs, la mesure fragilise la CADES qui n'en avait guère besoin (cf infra ). En matière de retraites, le texte du projet de loi de financement règle certes le litige opposant l'Etat à l'AGIRC et à l'ARRCO, litige né du non respect de la parole donné en 1984. Mais sinon, il ne traite ni des régimes par répartition et de mesures propres à en assurer l'équilibre ou, au moins, la visibilité, ni du fonds de réserve toujours en attente de substances (cf infra ). Quant à la maladie, le gouvernement ne cherche même pas à donner une quelconque illusion. La plupart des articles consacrés à la branche maladie pourraient plus sûrement d'ailleurs figurer dans un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social. Ce n'est pas cela qu'attendent l'ensemble des parties prenantes au système de santé.
Enfin, les prélèvements ne cessent d'être augmentés . On aurait pu penser que le gouvernement profiterait de la croissance économique pour réformer le système social. Ce n'est pas le cas. En aurait-il alors profité pour réduire les prélèvements ? Non. Il semble en réalité parfaitement décidé à leur faire poursuivre leur courbe ascendante, estimant peut-être qu'un prélèvement ne doit jamais baisser et surtout que la particularité française en la matière ne doit pas être mise en cause.