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N° 114

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 27 novembre 2008

PROPOSITION DE LOI

tendant à prévenir le surendettement ,

PRÉSENTÉE

Par M. Claude BIWER, Mme Muguette DINI, M. Michel MERCIER et les membres du groupe de l'Union centriste (1),

Sénateurs

(Renvoyée à la commission des Affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

(1) Ce groupe est composé de : MM. Nicolas About, Jean-Paul Amoudry, Jean Arthuis, Denis Badré, Claude Biwer, Didier Borotra, Jean Boyer, Marcel Deneux, Yves Détraigne, Mme Muguette Dini, MM. Daniel Dubois, Jean-Léonce Dupont, Pierre Fauchon, Mme Françoise Férat, MM. Christian Gaudin, Adrien Giraud, Mmes Nathalie Goulet, Jacqueline Gourault, MM. Jean-Jacques Jégou, Joseph Kergueris, Hervé Maurey, Jean-Claude Merceron, Michel Mercier, Mmes Catherine Morin-Desailly, Anne-Marie Payet, MM. Yves Pozzo di Borgo, Daniel Soulage, Jean-Marie Vanlerenberghe et François Zocchetto.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 30 janvier 2006, le ministre de l'économie et des finances et la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, ont réuni le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) visant à répondre aux problèmes relatifs à l'exclusion bancaire. Il s'agit, en particulier, d'assurer à chacun, l'accès à un compte bancaire et de faire, ainsi, du droit au compte, un service universel.

Cependant, l'exclusion bancaire est le plus souvent le résultat et le symptôme d'un lent processus de marginalisation qui trouve sa source dans le surendettement. C'est pourquoi il semble urgent que le législateur se saisisse de cette question, à l'origine de situations de détresse graves.

Si le traitement du surendettement a été amélioré ces dernières années, aucune démarche sérieuse n'a été entreprise pour le prévenir et anticiper ainsi des situations de profonde détresse, et ceci en dépit des nombreuses consultations et concertations avec les professionnels du crédit.

En effet, en 2003, une procédure de rétablissement personnel, visant à apporter des réponses à la détresse des foyers surendettés a été adoptée. Hélas, les dispositions de prévention du surendettement concernant l'amélioration de l'information des souscripteurs de prêts sont encore insuffisantes pour réduire le nombre de foyers surendettés. Cette année, ce sont près de 180 000 foyers nouveaux qui seront confrontés à ce drame. Or, nous savons parfaitement que le surendettement est lié à l'attribution parfois abusive de crédits à la consommation.

En février 2006, Mme Muguette DINI a déposé une proposition de loi tendant à prévenir le surendettement.

En mars 2006, M. Claude BIWER en a fait de même.

Ces propositions de loi n'ont jamais débouché sur un débat en séance.

Devant la situation économique nouvelle à laquelle nous sommes confrontés, il nous a semblé urgent de reprendre ces propositions de loi.

Il ressort du résumé des conclusions de l'enquête réalisée par la Banque de France (14 février 2002) que 80 % des dossiers de surendettement comportent plus de quatre crédits revolving. Ces crédits sont accordés sans étude approfondie de la situation des bénéficiaires, parfois directement à la caisse d'un grand magasin.

Nous savons que cette situation n'a fait que s'aggraver depuis 2002.

Afin de responsabiliser les établissements de crédit, il apparaît urgent d'exiger qu'ils étudient la situation financière des souscripteurs. Les établissements de crédit doivent connaître avec précision la solvabilité des demandeurs de crédits à la consommation avant de répondre positivement à leur demande.

S'il apparaît que l'établissement de crédit n'a pas procédé à cette vérification, il serait dès lors responsable de la non-solvabilité éventuelle du souscripteur et ne pourrait donc pas engager de procédures de recouvrement, sauf si le souscripteur a délibérément fourni de fausses informations le concernant ( article 1 er ).

Il semble dès lors nécessaire de rendre obligatoire un délai d'agrément de sept jours, tant pour l'établissement de crédit que pour l'emprunteur, afin que la banque ait le temps de procéder à l'étude de la solvabilité de l'emprunteur ( articles 2 et 3 ).

Il convient donc de donner les moyens aux établissements de s'informer de la situation d'endettement personnelle des emprunteurs. À cette fin, la présente proposition de loi établit la création d'un répertoire des crédits aux particuliers pour des besoins non professionnels ( article 4 ).

Ce répertoire offrirait une double protection aux consommateurs : il serait géré par la seule Banque de France à l'exclusion de tout organisme privé, bancaire ou non, et les établissements de crédit n'auraient accès aux informations que dans l'hypothèse où l'emprunteur potentiel les y aurait explicitement autorisés, interdisant ainsi tout usage commercial de ce répertoire. La mise en place de ce répertoire serait assurée par une contribution des établissements de crédit.

Il est imposé aux établissements de crédit de faire figurer sur leurs publicités un avertissement visant à alerter les emprunteurs potentiels des risques de surendettement ( article 5 ).

Enfin, l' article 6 impose les mêmes règles à l'offre préalable de crédit.

Telles sont les principales orientations de la présente proposition de loi qu'il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

Après l'article L. 311-10 du code de la consommation, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. 311-10-1. - Le prêteur qui a accordé un crédit sans s'être préalablement informé de la situation de solvabilité de l'emprunteur, et notamment de sa situation d'endettement global et de ses revenus, ne peut exercer de procédure de recouvrement à l'encontre de l'emprunteur défaillant, ou de toute personne physique ou morale s'étant portée caution, sauf si l'emprunteur a, en connaissance de cause, fait des fausses déclarations ou remis des documents inexacts en vue d'obtenir un crédit. »

Article 2

Les deux premières phrases de l'article L. 311-15 du code de la consommation sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :

« Dans un délai de sept jours à compter de son acceptation de l'offre, l'emprunteur peut revenir sur son engagement. »

Article 3

La première phrase de l'article L. 311-16 du code de la consommation est ainsi rédigée :

« Le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que dans le délai de sept jours, ledit emprunteur n'ait pas usé de la faculté de rétractation visée à l'article L. 311-15 et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit. »

Article 4

Après l'article L. 313-6 du code monétaire et financier, il est inséré une division ainsi rédigée :

« Sous-section 4

« Répertoire national des crédits aux particuliers pour des besoins

«  non professionnels

« Art. L. 313-6-1. - Il est institué un répertoire national recensant les crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels. Ce fichier est géré par la Banque de France. Il est soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Les établissements de crédit visés par la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit ainsi que les services financiers de La Poste sont tenus de déclarer à la Banque de France les principales caractéristiques des crédits accordés à chaque emprunteur, et notamment le montant, le taux effectif global et l'échéancier de remboursement. Les établissements prêteurs transmettent à la Banque de France les modifications des conditions du crédit.

« L'inscription est conservée pendant toute la durée d'exécution du contrat.

« La Banque de France est seule habilitée à centraliser les informations visées au premier alinéa.

« La Banque de France est déliée du secret professionnel pour la diffusion, aux établissements de crédit et aux services financiers susvisés, des informations nominatives contenues dans le fichier à la demande de ceux-ci avec l'accord écrit préalable du souscripteur.

« Un règlement du comité de la réglementation bancaire, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et du comité visé à l'article L. 614-1, fixe notamment les modalités de collecte, d'enregistrement, de conservation et de consultation de ces informations.

« Dans les départements d'outre-mer, l'institut d'émission des départements d'outre-mer exerce, en liaison avec la Banque de France, les attributions dévolues à celle-ci par le présent article.

« Des décrets en Conseil d'État déterminent les conditions d'application du présent article. »

Article 5

Après le quatrième alinéa (3°) de l'article L. 311-4 du code de la consommation, il est inséré un 4° ainsi rédigé :

« 4° Comporter les mentions suivantes : « Attention au surendettement. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager ». Cet avertissement couvre au moins 10 % de la surface totale de la publicité, est visible, clairement lisible et figure à un endroit apparent sur fond contrastant. »

Article 6

L'article L. 311-10 du même code est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° Comporte les mentions suivantes : « Attention au surendettement. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager ». Cet avertissement couvre au moins 10 % de la surface totale de l'offre préalable, est visible, clairement lisible et figure à un endroit apparent sur fond contrastant. »

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