N° 427 rectifié
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005
Annexe au procès-verbal de la séance du 27 juin 2005 |
PROPOSITION DE LOI
tendant à abroger l' article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 qui tend à l' apologie du colonialisme,
PRÉSENTÉE
Par M. Guy FISCHER, Mmes Nicole BORVO COHEN-SEAT, Eliane ASSASSI, M. François AUTAIN, Mme Marie-France BEAUFILS, MM. Michel BILLOUT, Pierre BIARNÈS, Robert BRET, Yves COQUELLE, Mmes Annie DAVID, Michelle DEMESSINE, Evelyne DIDIER, M. Thierry FOUCAUD, Mme Gélita HOARAU, MM. Robert HUE, Gérard LE CAM, Mmes Hélène LUC, Josiane MATHON, MM. Roland MUZEAU, Jack RALITE, Ivan RENAR, Bernard VERA et Jean-François VOGUET,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
Enseignement. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 stipule que « les programmes scolaires reconnaissent en particulier le caractère positif de la présence française outre mer, notamment en Afrique du Nord et accordent à l'histoire et aux sacrifices des combattants de l'armée française issus de ces territoires, la place éminente à laquelle ils ont droit. »
Cet article 4 doit être supprimé pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, sur un plan formel, il n'est pas souhaitable que le Parlement fixe le contenu des programmes scolaires.
De nombreux enseignants et historiens soulignent avec raison que ces programmes doivent se fonder sur les acquis de la recherche scientifique. De nombreuses associations, dont l'APHG (association des professeurs d'histoire et géographie), ont pris position pour l'abrogation.
La demande proposée par la disposition incriminée tend, au contraire, à élaborer ces programmes en fonction d'objectifs politiques de pure opportunité.
Les auteurs rappellent au ministre délégué aux Anciens combattants ses propres écrits : « Prétendre imposer une pensée officielle aux historiens et diffuser une histoire homologuée en classe, serait stupide et n'a jusqu'à présent été réalisé sur notre continent que par des régimes totalitaires. Ni le législateur ni le gouvernement n'ont eu le projet, ni même l'idée. Il appartient aux historiens d'écrire l'histoire et aux enseignants de l'enseigner. » (Le Monde 8 mai 2005).
Ensuite, les auteurs constatent que l'adoption de l'article 4 de la loi du 23 février 2005 intervient dans un contexte de réhabilitation de ceux qui ont défendu jusqu'au bout par la terreur, la violence et les assassinats, le principe de la colonisation.
Ainsi le 6 juillet 2005 certains nostalgiques ont tenté d'inaugurer un monument dédié « aux fusillés de l'OAS » à Marignane dans les Bouches-du-Rhône. 71 personnes tombèrent sous le coup de cette organisation d'extrême droite en métropole et 399 furent blessées. 2 200 au moins furent assassinées en Algérie. L'un de ses chefs Roger DEGUELDRE fut alors fusillé le 6 juillet 1962. L'émotion et l'intervention de nombreuses personnalités et associations ont amené les pouvoirs publics à annoncer l'interdiction de cette initiative et à la faire respecter.
Enfin, les auteurs estiment choquant lorsque l'on sait quels furent les fondements de la colonisation, c'est-à-dire l'exploitation sans vergogne de ressources minières, végétales et humaines de pays et continents entiers et les conséquences désastreuses de celles-ci, déstructuration des sociétés, maintien, aujourd'hui encore, d'un tutorat politique et économique bridant le développement, d'inscrire dans la loi de notre pays qui se proclame « patrie des droits de l'Homme », le caractère « positif » de la présence française outre-mer.
Les auteurs estiment urgent de rectifier cette loi, susceptible d'être ressentie comme une insulte pour les millions d'hommes et de femmes, leurs descendants, qui ont été victimes de la colonisation.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
L'article 4 de la loi 2005-158 du 23 février 2005, portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, est abrogé.