EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France souffre d'un étrange paradoxe. Les jeunes ne se sont jamais autant mobilisés pour des causes qui leur tiennent à coeur : féminisme, lutte antiraciste, mobilisation en faveur du climat et pour la préservation de la planète, cause animale, acquisition de nouveaux droits... Ce sont autant d'exemples de la politisation croissante des jeunes. Mais en même temps, élection après élection, leur abstention s'aggrave. Au premier tour des municipales de mars 2020, seuls 28 % des électeurs de 18-24 ans se sont rendus aux urnes, contre 57 % des plus de 60 ans.

Dans son ouvrage intitulé «Politiquement Jeune», Anne Muxel, directrice de recherches au CNRS analyse les usages démocratiques contemporains des jeunes. Elle confirme la contradiction : malgré leur méfiance envers les responsables politiques, les jeunesses conservent un intérêt pour la politique et la chose collective. Ils sont nombreux à s'engager dans des formes non conventionnelles de participation et d'expression politique, à l'instar des manifestations ou des pétitions, par exemple.

Face à ce constat, notre pays, notre société ne semblent pas être à la hauteur de la volonté d'engagement et de prise en compte de la voix des jeunes.

Cette proposition de loi vise à répondre à ces aspirations et à cet engagement qui s'expriment partout dans le pays, à élargir la participation électorale ainsi qu'à développer davantage l'apprentissage à la vie politique française et européenne, ainsi qu'à les initier aux sciences politiques.

Le premier chapitre est consacré à la question de l'élargissement du droit de vote.

« Si la jeunesse n'a pas toujours raison, la société qui la méconnait et qui la frappe a toujours tort », disait le Président François Mitterrand. Entendre toute la jeunesse, c'est ne pas en cantonner une partie aux contestations et à la rue, mais c'est permettre à la majorité d'entre elle de compter dans les urnes.

En effet, le dernier abaissement de l'âge du droit de vote date de la réforme relative au passage de la majorité de 21 à 18 ans en 1974. En 45 ans, les jeunes ont largement prouvé qu'ils étaient dignes de la confiance que l'on a pu leur accorder, et la crise sanitaire que nous traversons démontre encore une fois, s'il en était besoin, la responsabilité dont ils savent faire preuve. À nous, aujourd'hui, de la reconnaître pleinement et de leur accorder enfin la place légitime qu'ils ont au sein de notre République. De plus, des chercheurs ont démontré que plus on vote jeune, plus on a de chance de devenir un votant fidèle, et ce, dans la durée.

Ainsi, l'article 1 er tend à octroyer le droit de vote aux Françaises et Français dès l'âge de seize ans. Cette disposition concernerait environ 1 500 000 jeunes. Cette possibilité existe déjà dans d'autres pays européens. De plus, en France, à partir de cet âge-là, les jeunes acquièrent déjà un ensemble de droits comme la conduite accompagnée, la possibilité d'obtenir le Brevet d'Aptitude aux Fonctions d'Animateur (BAFA), de faire une demande d'émancipation, de créer une junior association, d'être salarié...

L'article 2 quant à lui, vise à introduire un enseignement obligatoire aux sciences politiques et à l'histoire de la vie politique française et européenne à l'ensemble des collégiens. Cet enseignement permettrait notamment de développer les connaissances des élèves sur le fonctionnement de notre vie démocratique, sur l'exercice du vote et les moyens de participation citoyenne...C'est aussi tout le rôle de l'école qui est garante de l'égalité devant l'exercice et la pratique de ce nouveau droit.

Enfin, l'article 3 a pour objet de préparer et former, les enseignants et futurs enseignants à ce nouvel enseignement.

Le chapitre deux est consacré, pour sa part, au déploiement des conseils de jeunes. Il est composé d'un article unique 4 qui vise à généraliser, pour les communes de plus de 5000 habitants ainsi que pour les conseils départementaux, les conseils de jeunes introduits par la loi relative à l'Égalité et à la citoyenneté du 27 janvier 2017. Les conseils de jeunes constituent un outil pertinent pour compléter le panel des possibilités pour s'entrainer à l'exercice du jeu démocratique. Cet article améliore leur fonctionnement et leur composition et complète les compétences qui leur sont attribuées.

Cette généralisation concernerait donc près de 2200 communes en France, ainsi que l'intégralité des départements. Elle permettra aux jeunesses de contribuer à la mise en place de politiques publiques concrètes dans leur commune et dans leur département, et ainsi d'en faire de véritables outils d'engagement, des instances d'apprentissage et de renforcement de leur citoyenneté. Par ailleurs, la commune nous apparaît être l'échelon le plus opportun, au regard de la largesse des aspirations des jeunesses, tant sur les questions sociales, et environnementales qu'économiques. En effet, depuis la loi pour une Nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), seule la commune conserve la clause de compétence générale.

Cet article y ajoute le principe de publicité des travaux de cette instance. En effet, ne pouvant lui accorder légalement des pouvoirs délibératifs, il convient néanmoins de lui permettre d'influencer le débat public.

Enfin, il y introduit le minimum de 15 membres pour la composition de l'instance. Cette mesure permettrait au moins à 33 000 jeunes de s'engager dans ces instances de démocratie participative.

Le chapitre 3 comporte un article 5 unique précisant que les dispositions contenues dans la présente proposition de loi entreront en vigueur au 1er janvier 2022.

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