ITALIE
L'article 39-4 de la Constitution
prévoit que
"
les syndicats enregistrés (...) peuvent conclure des
conventions collectives de travail dont l'effet est obligatoire pour tous les
membres des catégories professionnelles auxquelles la convention se
rapporte.
"
|
1) La place respective de la loi et de la négociation collective
L'article 35 de la Constitution, selon lequel "
La
République protège le travail sous toutes ses formes et dans
toutes ses applications
", est interprété comme confiant
à la loi le soin d'assurer la protection des salariés. Par
conséquent, la loi garantit les dispositions minimales auxquelles la
négociation collective ne peut pas déroger.
Par ailleurs, la méfiance des syndicats à l'égard des
pouvoirs publics, qui a notamment empêché l'adoption de la loi
prévue par l'article 39 de la Constitution et qui les auraient
dotés d'un statut juridique explicite, explique le partage entre, d'une
part, loi et règlement et, d'autre part, négociation collective.
Traditionnellement, les relations individuelles entre salariés et
employeurs sont régies par la loi et le règlement, tandis que les
relations collectives sont régies par la négociation.
Par
conséquent, le droit syndical, les accords collectifs et la
participation financière relèvent principalement de la
négociation.
Avec le temps, les interférences entre la loi et la
négociation collective se sont multipliées
. Ainsi, la loi de
1970 portant statut des salariés, intégrant d'ailleurs de
nombreux éléments présents dans des accords collectifs,
visait à promouvoir l'activité des syndicats sur les lieux de
travail et se voulait la principale source du droit des relations sociales. De
même, depuis la fin des années 70, il est arrivé à
plusieurs reprises que la loi pose des principes et qu'elle envisage des
dérogations par voie conventionnelle. À l'opposé, la loi
apporte parfois des restrictions à la négociation collective,
notamment pour en contrôler les éléments salariaux.
L'affaiblissement du système politique qui a résulté de la
découverte des affaires de corruption dans les années 80 s'est
notamment traduit par la revalorisation des organisations syndicales et par la
signature de
plusieurs pactes tripartites entre le gouvernement et les
partenaires sociaux
.
Celui de juillet 1993, en refondant le
système de négociation collective
, renoue avec la tradition
selon laquelle les relations collectives ne sont pas régies par la loi,
le gouvernement jouant toutefois un rôle non négligeable dans
cette refondation.
2) Les principales caractéristiques de la négociation collective
a) Les différentes catégories d'accords
Les
négociations collectives ont lieu à trois niveaux :
- interconfédéral ;
- de branche ;
- d'entreprise.
En outre, elles peuvent se dérouler au niveau national ou
régional, de sorte que les principales catégories d'accords
collectifs sont les suivants :
-
accords interconfédéraux
, auxquels le gouvernement
peut être associé, qui règlent des questions de principe et
déterminent les dispositions minimales applicables à tous les
salariés ;
-
accords nationaux de branche
, qui fixent les dispositions
minimales applicables à tous les salariés d'un secteur
d'activité ;
-
accords provinciaux de branche
, dans quelques secteurs comme
l'agriculture ou le bâtiment ;
-
accords d'entreprise
, qui régissent essentiellement les
questions d'organisation du travail.
Cette structure correspond à l'organisation des syndicats de
salariés et des associations patronales, qui repose à la fois sur
des fédérations de branche subdivisées en sections
provinciales, locales, voire d'entreprise, et sur des structures territoriales
interbranches.
La place relative du niveau interconfédéral et du niveau
sectoriel varie selon les périodes, la négociation au niveau
interconfédéral se développant essentiellement en
période de crise. Par ailleurs, la multiplication des petites
unités de production explique l'importance des accords d'entreprise.
La pluralité des niveaux de négociation et l'absence de
coordination entre eux freinent le développement du système.
C'est pourquoi
l'accord tripartite du 23 juillet 1993,
qui vise
à refonder le système des relations sociales, se propose de
rationaliser la structure de la négociation collective et de ne
conserver que deux niveaux :
- l'accord collectif national de branche ;
- l'accord décentralisé, au niveau de l'entreprise, les
petites entreprises pouvant toutefois être couvertes par des
négociations menées au niveau local ou provincial par les
organisations de branche.
L'accord tripartite de juillet 1993 précise également que les
accords décentralisés ne doivent pas être redondants par
rapport aux accords nationaux de branche, mais que les deux niveaux de
négociation doivent être articulés. Les accords
décentralisés doivent obéir aux prescriptions
fixées dans les accords nationaux et seule une clause explicite de
renvoi dans l'accord collectif national justifie la négociation
décentralisée. Ainsi, la négociation de branche
détermine les augmentations salariales cohérentes avec les
prévisions d'inflation et la négociation d'entreprise peut
prévoir des augmentations supplémentaires liées à
la rentabilité.
b) Les signataires des accords collectifs
En
fonction du niveau de la négociation collective, les accords sont
signés par :
- les confédérations syndicales et patronales ;
- les syndicats et les associations patronales de branche
considérés comme représentatifs ;
- l'employeur et la "
représentation syndicale
unitaire
" (
RSU
).
Compte tenu de la relative confusion qui règne autour de la notion de
représentativité
(11(
*
))
,
la reconnaissance mutuelle prévaut pour les négociations
collectives de branche. Elle repose essentiellement sur l'acceptation de
critères implicites.
La RSU est l'organe de représentation des salariés dans les
établissements de plus de quinze salariés
. Elle se
substitue à la " représentation syndicale
d'entreprise ". Elle a été instituée par l'accord
interconfédéral du 1
er
mars 1991 et
légitimée par l'accord tripartite du 23 juillet 1993. Les
modalités de désignation de ses membres ont été
déterminées par l'accord interconfédéral du
1
er
décembre 1993 : deux tiers de ses membres sont
élus par l'ensemble du personnel, tandis que le dernier tiers est
constitué de représentants des syndicats qui ont signé
l'accord collectif national de branche couvrant l'établissement. Dans
les entreprises où les RSU n'ont pas encore été
élues
(12(
*
))
, les accords
collectifs sont signés par la " représentation syndicale
d'entreprise ".
c) La force obligatoire des accords collectifs
La loi
prévue par l'article 39 de la Constitution n'ayant jamais
été adoptée, les accords collectifs sont régis par
le droit des contrats et n'ont en principe de force obligatoire que pour les
employeurs et les salariés appartenant aux organisations signataires
(13(
*
))
.
L'article 2077 du code civil
précise en effet que les
contrats de travail des salariés couverts par un accord collectif
doivent respecter le contenu de ce dernier et que les clauses des contrats qui
le contredisent sont implicitement remplacées par les dispositions de
l'accord qui sont plus favorables aux salariés.
En pratique, les accords collectifs de branche sont le plus souvent applicables
à tous les salariés de la branche considérée, car
la jurisprudence considère comme couvertes par l'accord les
entreprises dont les employeurs ne sont pas signataires. La jurisprudence
estime en effet qu'ils adhèrent, explicitement ou implicitement.
D'après la jurisprudence, l'adhésion explicite de l'employeur
peut résulter de la présence, dans le contrat de travail ou dans
la lettre d'embauche, d'une référence à l'accord collectif
considéré. En outre, lorsque l'employeur applique certaines
clauses significatives de l'accord, le juge estime que l'employeur manifeste
tacitement sa volonté d'y adhérer. Or, l'employeur est souvent
incité à appliquer partiellement les accords collectifs pour
bénéficier de certaines aides publiques, comme des
allégements de charges sociales.
Par ailleurs, la référence à l'article 36 de la
Constitution, qui affirme le droit pour tout salarié de recevoir une
juste rémunération, permet l'extension par les tribunaux des
accords salariaux de branche.
Les accords collectifs doivent préciser leur durée de
validité. En règle générale et conformément
à l'accord tripartite du 23 juillet 1993, les accords collectifs
conclus au niveau national sont conclus pour une durée de quatre ans,
mais leurs clauses dites économiques (qui concernent les niveaux et les
augmentations de salaires) ne sont valables que pendant deux ans. Les accords
d'entreprise s'appliquent pendant quatre ans.
d) Le respect de la paix sociale dans les entreprises couvertes par des accords collectifs
L'accord tripartite du 23 juillet 1993 suggère aux partenaires de présenter leurs programmes de négociation au moins trois mois avant l'expiration des accords collectifs, cette période devant, tout comme le mois suivant, constituer une période d'apaisement, pendant laquelle aucune forme de conflit social n'est admise.
e) Le renouvellement des accords collectifs
Traditionnellement, les pouvoirs publics jouent un rôle
actif
de médiation lors du renouvellement des accords collectifs de branche.
Il arrive souvent que cette médiation se transforme en arbitrage.
Par ailleurs, pour encourager le renouvellement rapide des accords collectifs,
l'accord tripartite du 23 juillet 1993 impose à l'employeur le
versement d'une indemnité de "
vacance contractuelle
"
qui garantit à tous les salariés une progression de leur pouvoir
d'achat. Lorsque l'accord collectif national de branche est échu depuis
trois mois et qu'il n'est pas renouvelé, le montant de cette
indemnité est de :
minimum salarial contractuel X taux anticipé de l'inflation X 30 % |
Au bout de dix mois, ce pourcentage passe à 50 %.