ALLEMAGNE
À
partir de l'article 9-3 de la Loi fondamentale, qui dispose que
" Le
droit de fonder des associations pour la sauvegarde et l'amélioration
des conditions de travail et des conditions économiques est garanti
à tous et dans toutes les professions "
, le droit de
déterminer les rémunérations et les conditions de travail
dans des accords collectifs librement négociés,
indépendamment de toute intervention, notamment de l'État, a
été reconnu aux partenaires sociaux.
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1) La place respective de la loi et de la négociation collective
La
loi sur les accords collectifs
précise à l'article premier
qu'ils régissent les droits et devoirs des signataires, et qu'ils
contiennent des normes qui peuvent, d'une part, organiser le contenu, la
formation et la fin du contrat de travail, et, d'autre part, régler les
questions relatives à la gestion des entreprises et à leur
organisation interne.
Dès les années 50, la jurisprudence a restreint le pouvoir
normatif des partenaires sociaux aux
rémunérations et aux
autres conditions de travail,
qui forment le
" noyau dur " de
la négociation collective.
Cependant, en autorisant les partenaires à négocier sur les
questions concernant l'entreprise et son organisation, la loi leur permet de
traiter des droits des salariés en tant que membres du personnel, et non
pas seulement en tant qu'individus, et d'exercer une influence sur les organes
prévus par la législation sur l'organisation de l'entreprise
(1(
*
))
.
Actuellement, la loi et les accords collectifs se partagent ainsi le domaine
social :
-
la sécurité sociale est essentiellement
régie par la loi, quelques accords collectifs comportant cependant des
améliorations aux prestations prévues par la loi ;
- la loi détermine les dispositions minimales en matière de
relations et de conditions de travail (délais de licenciement,
durée du travail et des congés, par exemple), mais des accords
collectifs améliorent de façon substantielle ces
différents minimaux ;
- les conditions individuelles de travail et les
rémunérations sont exclusivement fixées par accord
collectif.
2) Les principales caractéristiques de la négociation collective
a) Les différentes catégories d'accords
Il y a
deux catégories d'accords :
- les
accords collectifs
stricto sensu
, signés entre,
d'une part, une organisation syndicale et, d'autre part, un employeur ou une
association d'employeurs ;
- les
accords d'établissement,
conclus entre le conseil
d'établissement et l'employeur.
Les accords collectifs
Selon le
niveau
auquel ils sont signés, on distingue :
- les
accords de branche
, conclus entre un syndicat et
une
association d'employeurs ;
- les
accords d'entreprise,
conclus entre un syndicat et un
employeur. La représentation du syndicat dans l'entreprise
résulte essentiellement de l'application du principe de
subsidiarité et de la jurisprudence. En effet, la loi reconnaît
aux syndicats certains droits dans l'entreprise (demande de la mise en place
d'un conseil d'établissement, contestation des élections au
conseil d'établissement par exemple), mais elle ne prévoit aucune
structure syndicale d'entreprise.
Les accords de branche peuvent s'appliquer à la branche tout
entière (l'industrie métallurgique par exemple) ou à
certains secteurs seulement (la machine-outil par exemple). Ils peuvent
s'appliquer à l'ensemble du territoire fédéral ou à
certaines régions
. En règle générale, ils sont
conclus au niveau régional et les résultats d'une région
servent de référence.
Les accords de branche sont les plus courants
, sauf dans certains secteurs
comme l'industrie aéronautique ou l'industrie pétrolière,
où les accords les plus fréquents sont des accords d'entreprise.
À la fin de l'année 2000, le ministère
fédéral du Travail recensait 33 400 accords de branche
et 21 600 accords d'entreprise en vigueur. Au cours de l'année
2000, plus de 8 500 accords collectifs ont été
signés.
Il n'existe pas d'accord collectif interprofessionnel
, ce qui n'exclut
pas la concertation préalable à la négociation au sein des
différentes branches. Il n'y a pas non plus de tradition d'accord
tripartite, même si des rencontres informelles avec le gouvernement ont
lieu.
Selon l'
objet
de l'accord, on distingue :
- les accords collectifs de base, conclus pour plusieurs années et
qui régissent les conditions de travail (durée de la
période d'essai, durée du préavis de licenciement, travail
de nuit...) ;
- les accords cadres salariaux, d'une durée plus longue ;
- les accords salariaux, conclus pour une période assez courte, en
général comprise entre un et deux ans.
Les accords d'établissement
Les accords d'établissement lient l'employeur au conseil
d'établissement, qui est exclusivement composé de membres
élus par le personnel et qui, à la différence du
comité d'entreprise français, se réunit sans l'employeur.
En règle générale, les conseils d'établissement
sont composés à environ 80 % de salariés
syndiqués.
Les accords d'établissement ont peu ou prou les mêmes effets que
les accords collectifs sur les relations de travail individuelles. Ils ne sont
pas régis par la loi sur les accords collectifs, mais par la loi sur la
l'organisation sociale de l'entreprise. Ils s'appliquent à la
totalité du personnel de l'établissement et sont conclus pour une
durée déterminée ou indéterminée. Ils
portent sur les matières auxquelles la codécision
(2(
*
))
s'applique, comme la discipline, les heures
supplémentaires ou les oeuvres sociales.
Dans les entreprises importantes, une dizaine d'accords d'établissement
sont signés chaque année. Ils peuvent régler des questions
ponctuelles, comme l'aménagement des congés, ou des sujets
permanents, comme la notation du personnel.
De plus,
la loi sur l'organisation sociale de l'entreprise affirme à
l'article 77-3 la primauté de l'accord collectif, quel que soit le
niveau auquel il est conclu, sur l'accord d'établissement
:
dès qu'une question est - ou "
est
habituellement
" - réglée par un accord collectif,
elle ne peut l'être par un accord d'établissement. Cette
disposition, qui cherche à empêcher qu'un accord collectif ne soit
vidé de son contenu, s'impose quand bien même l'application d'un
accord d'établissement serait plus favorable aux salariés.
Cependant, un accord collectif peut contenir une " clause
d'ouverture " prévoyant que certaines questions seront
ultérieurement réglées par accord d'établissement.
Les accords d'établissement sont de plus en plus souvent
utilisés, parfois en contravention avec la loi. Il est en effet
arrivé que des employeurs concluent avec le conseil
d'établissement des accords appartenant au domaine des accords
collectifs et comportant des dispositions moins favorables que l'accord de
branche.
Cette évolution, plus ou moins admise par la jurisprudence, correspond
à une certaine
crise de la négociation de branche,
particulièrement nette dans les Länder de l'Est
, où les
normes fixées par l'accord collectif de branche sont parfois
considérées comme difficiles à appliquer.
Toutefois, le projet de loi tendant à réformer la loi sur
l'organisation sociale de l'entreprise ne prévoit pas d'en modifier
l'article 77-3 afin de transférer le pouvoir de négocier au
niveau des établissements ou des entreprises.
b) Les signataires des accords collectifs
L'employeur peut être partie à titre individuel.
Les
associations patronales peuvent également être signataires, sans
avoir à remplir aucun critère.
En revanche,
seuls les " syndicats " de salariés
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*
))
,
reconnus comme tels
,
c'est-à-dire satisfaisant à
certains critères
(indépendance, réelle capacité de négocier,
durée d'existence...), peuvent l'être. La plupart des accords
collectifs sont donc signés par les syndicats de branche membres du
DGB.
c) La force obligatoire des accords collectifs
Les
dispositions des accords collectifs régissant le contenu du contrat de
travail sont impératives. Seules des mesures plus favorables aux
salariés peuvent y déroger, à moins que l'accord ne
permette lui-même des dérogations défavorables.
Juridiquement, seuls les membres des organisations signataires sont
liés, de sorte qu'un accord collectif ne s'applique qu'aux
salariés membres des associations signataires ou dont les employeurs
font partie d'associations patronales signataires.
En pratique, tous les
salariés en bénéficient quelle que soit leur appartenance
syndicale.
Cependant, il n'est théoriquement pas exclu que deux
syndicats signent des accords différents et que les salariés
soient traités différemment en fonction de leur appartenance
syndicale. De plus, en période de crise, il est possible d'exclure du
champ de l'accord les salariés non syndiqués.
Lorsque les employeurs liés par un accord collectif emploient au moins
50 % des salariés relevant du champ d'application de l'accord, ce
dernier peut, à la demande d'un des signataires, être
étendu par le ministre fédéral du Travail
et
devenir ainsi applicable à l'ensemble des entreprises du secteur
d'activité.
Une telle extension suppose l'assentiment de la majorité des membres
d'une commission paritaire qui réunit trois représentants de
chacune des parties à l'accord. Inversement, le ministre n'est pas
lié par une prise de position favorable de la commission. La plupart de
ces accords d'application générale concernent les secteurs du
bâtiment et du commerce de détail, où le grand nombre de
petites entreprises requiert l'application de dispositions minimales. À
la fin de l'année 2000, le ministère fédéral du
Travail en recensait 514.
La durée des accords collectifs est en principe limitée. Elle
varie selon leur nature. Cependant, les dispositions normatives,
c'est-à-dire celles qui s'appliquent aux salariés, restent en
vigueur jusqu'à la conclusion d'un nouvel accord.
La loi sur les juridictions du travail permet aux partenaires sociaux de
régler leurs différends d'interprétation relatifs aux
accords collectifs sans intervention du tribunal, mais en recourant à
une instance arbitrale paritaire.
d) Le respect de la paix sociale dans les entreprises couvertes par des accords collectifs
Le
devoir de paix sociale constitue l'une des obligations contractuelles des
parties à l'accord. Il se traduit par deux obligations :
- l'
obligation de paix sociale
, qui vaut pendant toute la
durée de l'accord et qui s'applique aux seules matières couvertes
par l'accord, les partenaires pouvant convenir d'une durée un peu plus
longue, par exemple quelques semaines après l'expiration de
l'accord ;
- après l'échéance d'un accord, l'
obligation
d'épuiser toutes les possibilités de négociation avant de
recourir à la grève.
e) Le renouvellement des accords collectifs
En cas
d'échec de la négociation, la plupart des accords collectifs
prévoient une procédure transactionnelle
(4(
*
))
. Organisée de façon
différente selon les branches, elle suppose en général la
nomination d'une commission paritaire présidée par une
personnalité extérieure. La proposition de la commission n'a pas
force obligatoire, à moins que les partenaires ne l'aient
décidé.
C'est seulement lorsque la procédure conventionnelle de rapprochement
échoue que l'administration peut intervenir.