ROYAUME-UNI (Angleterre)
Le Royaume-Uni fait montre d'une grande diversité dans le domaine de ce qu'il est convenu d'y appeler les « pourvoyeurs d'enseignement supérieur » (higher education providers) qui sont indépendants en ce sens qu'ils n'appartiennent pas à l'État même s'ils reçoivent des financements de sa part et autonomes sur le plan budgétaire et universitaire (choix des programmes de cours, recrutement des enseignants et sélection des étudiants notamment).
Parmi ceux-ci, on distingue environ 160 « organismes reconnus » (Recognised Bodies) qui ont le pouvoir de délivrer des diplômes et qui sont reconnus par les autorités britanniques au moyen d'une charte royale ou d'un acte du Parlement. Toutes les universités britanniques et certains collèges sont des « organismes reconnus ».
S'y ajoutent environ 700 collèges et autres établissements dénommés « organismes énumérés » (Listed Bodies) qui n'ont pas cette qualité mais proposent des programmes d'études complets conduisant à des diplômes reconnus par l'État. Les études dispensées sont validées par les « organismes reconnus ».
S'agissant d'une matière dévolue, l'Angleterre, le Pays de Galles, l'Ecosse et l'Irlande du Nord déterminent leur propre politique d'enseignement supérieur. Chacune de leurs administrations a son propre conseil de Financement de l'enseignement supérieur, (Higher Education Funding Council) chargé, entre autres, de distribuer les fonds publics aux établissements d'enseignement supérieur afin « de promouvoir notamment les possibilités, le choix et l'excellence dans l'enseignement, la recherche, et l'échange des savoirs 5 ( * ) ».
A. L'ÉVALUATION EXTERNE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
1. L'organisme d'évaluation
La loi de 1992 sur l'enseignement supérieur entrée en application le 1 er avril 1993 avait confié à chacun des quatre conseils de Financement de l'enseignement supérieur qu'elle créait la mission d'évaluer la qualité de l'enseignement dans les établissements auxquels il versait des fonds.
Depuis 1997, l'évaluation externe de l'enseignement supérieur est confiée à l'Agence d'assurance qualité pour l'éducation supérieure, la QAA (Quality Assurance Agency for Higher Education) dont la mission est de garantir les niveaux et d'améliorer la qualité de l'enseignement supérieur en Angleterre, Pays de Galles, Irlande du Nord et Ecosse.
Organisme indépendant, la QAA a la forme d'une société à but non lucratif à responsabilité limitée enregistrée comme association philantropique (Charity) dont les membres sont les organismes représentatifs des établissements d'enseignement supérieur du Royaume-Uni.
Son conseil d'administration est composé de 17 membres non rémunérés par la CAA, dont les déclarations d'intérêts sont publiées :
- 4 nommés par les organismes représentatifs des chefs d'établissements d'enseignement supérieur du Royaume-Uni ;
- 4 par les organismes de financement de l'enseignement supérieur anglais, gallois, écossais et d'Irlande du Nord ;
- 1 par le Conseil des collèges du Royaume-Uni (UK Council of Colleges) ;
- 1 par le syndicat national des Étudiants (National Union of students) ;
- et 7 membres « indépendants » nommés par le conseil d'administration dont 1 étudiant et 6 membres ayant l'expérience des sujets industriels, commerciaux ou financiers ou encore une pratique professionnelle.
Leur mandat est de 3 ans renouvelable au plus une fois.
Le président du conseil d'administration est choisi parmi les membres indépendants.
Le conseil d'administration nomme un directeur exécutif chargé de la direction et de la gestion quotidienne de la QAA. La charge de travail est répartie entre 5 groupes opérationnels dont un chargé de l'activité d'inspection et d'audit.
La QAA emploie environ 170 salariés et dispose d'un répertoire d'environ 600 personnes susceptibles de réaliser des expertises.
Elle est essentiellement financée par les organismes de financement de l'enseignement supérieur et les établissements d'enseignement supérieur.
La QAA est membre de l'European Association for Quality Assurance in Higher Education , (ENQA), à laquelle elle a notamment soumis, en mars 2013, un dossier d'autoévaluation pour confirmation de sa qualité de membre à part entière afin de démontrer qu'elle applique les normes et les lignes directrices européennes pour l'assurance qualité (Standards and Guidelines for Quality Assurance in the European Higher Education Area, ESG) .
Elle est également membre de l'International Network for Quality Assurance Agencies in Higher Education qui compte 250 membres dans le monde entier.
2. La procédure d'évaluation
Est décrite ici la procédure d'évaluation institutionnelle standard (Standard Institutional Review) en Angleterre 6 ( * ) qui a lieu tous les 6 ans.
Les travaux préparatoires avant le début de l'année de l'évaluation :
- 18 mois avant le début de l'année de l'évaluation : la QAA prend contact avec l'université et lui demande des informations afin de préparer et transmettre le calendrier de l'évaluation ;
- 12 mois avant : l'université évaluée fournit davantage d'informations à la QAA (nombres d'étudiants, de programmes etc.) et procède à la nomination du « facilitateur institutionnel » (Institutional Facilitator, IF) et du « représentant principal des étudiants » (Lead Student Representative, LSR), choisi par l'organe représentant les étudiants au sein de l'université ;
- 9 mois avant : la QAA confirme la taille de l'équipe chargée de l'inspection, le nom du responsable chargé de la coordination de l'évaluation ;
- 6 mois avant : la QAA précise la thématique de l'inspection (un thème unique est annoncé tous les ans au mois de mars) qui complète l'évaluation de base ;
- 4 ou 5 mois avant : le « facilitateur institutionnel » et le « représentant principal des étudiants » reçoivent une information particulière sur leur mission.
Les semaines consacrées à l'évaluation :
- 16 semaines avant : réunion préparatoire entre le responsable de la QAA chargé de la coordination et l'université ;
- 11 semaines avant : l'université transmet par voie électronique toutes les informations requises y compris le document d'autoévaluation et la contribution écrite des étudiants (Student Written Submission, SWS) , cette dernière ayant pour objet de faire savoir « à quoi cela ressemble d'être un étudiant dans cette université » et la façon dont les étudiants sont pris en compte dans le processus décisionnel ainsi que dans les procédures d'assurance qualité;
- 7 semaines avant : l'équipe chargée de l'inspection prend connaissance de toute la documentation afin de se faire une idée de l'ensemble des informations publiques et de la procédure d'assurance qualité de l'université ;
- 6 semaines avant : l'équipe chargée de l'inspection fait une première visite d'un jour et demi sur place pour exposer de ses premières remarques, décider des pistes à explorer, demander des informations supplémentaires et organiser le programme de la visite d'inspection (rencontres avec la direction, les représentants des étudiants et des membres des personnels) ,
- 5 semaines avant : la QAA confirme le déroulement de l'inspection sur place ;
- la visite d'inspection : elle dure entre 3 et 5 jours (rencontres notamment avec des membres des personnels, un grand échantillon d'étudiants, de récents diplômés, des employeurs) ;
- 2 semaines après : la QAA fait part à l'université et au conseil de Financement de l'enseignement supérieur pour l'Angleterre, le HEFCE, (Higher Education Funding Council for England) de ses principales observations ;
- 6 semaines après : la QAA adresse un projet de rapport à l'université ;
- 9 semaines après : l'université apporte des corrections matérielles et la QAA finalise le rapport ;
- 12 semaines après : la QAA publie le rapport sur son site, si l'appréciation finale est satisfaisante, l'université peut utiliser le logo et la notation de la QAA ;
- 22 semaines après : l'université inspectée a 10 semaines à compter de la publication du rapport pour élaborer et publier sur son site un plan d'action en relation avec les recommandations de la QAA, le représentant principal des étudiants et les syndicats d'étudiants sont associés à sa rédaction ou invités à y adjoindre un commentaire qui sera également publié ;
- 3 années de suivi du plan d'action et publication de comptes rendus sur les avancées jusqu'à la réalisation de l'ensemble des mesures envisagées.
3. Le contenu de l'évaluation
L'assurance qualité est conduite en fonction des exigences auxquelles sont soumis les établissements d'enseignement supérieur décrites dans le code qualité pour l'enseignement supérieur britannique, le UK Code for Higher Education (the Quality Code) rédigé par la QAA après consultation de l'enseignement supérieur et prise en compte des références européennes pour le management de la qualité ( ESG) .
La QAA se livre à plusieurs types d'évaluations selon qu'il s'agit de l'Angleterre, du Pays de Galles, de l'Ecosse ou de l'Irlande du Nord et selon le type d'établissement d'enseignement supérieur. Ces évaluations peuvent également porter sur un thème spécifique.
L'évaluation institutionnelle standard (Standard Institutional Review) en Angleterre constitue l'occasion d'examiner :
- le niveau de connaissance et de compétence que les étudiants doivent atteindre pour l'obtention de diplômes universitaires reconnus au Royaume-Uni ;
- tout ce qui est mis à la disposition des étudiants pour leur permettre d'obtenir ces diplômes : enseignement, soutien personnel et académique, ressources (bibliothèques, supports informatiques et électroniques etc...) ;
- les mesures adoptées d'un point de vue institutionnel pour améliorer la qualité de l'apprentissage universitaire (notamment prise en compte des « retours » des étudiants et participation de ceux-ci à la prise de décision) ;
- et la fourniture d'informations exactes et fiables à destination du public sur l'enseignement dispensé.
Cette évaluation, une fois achevée, est assortie de l'une des mentions suivantes :
- pour le premier point :
• satisfait aux exigences britanniques,
• ne satisfait pas aux exigences
britanniques,
- et pour les trois autres points :
• félicitations,
• satisfait aux exigences britanniques,
• nécessite des améliorations pour
satisfaire aux exigences britanniques,
• ne satisfait pas aux exigences britanniques.
B. L'ÉVALUATION DE LA RECHERCHE UNIVERSITAIRE
1. L'organisme d'évaluation
En Angleterre la mission d'évaluation de la recherche universitaire est confiée au conseil de Financement de l'enseignement supérieur pour l'Angleterre, le HEFCE.
Le HEFCE est un organisme public non ministériel, NDPB (non-departmental public body) , catégorie dont relèvent tous les organismes qui remplissent une mission de service public de manière autonome sans distinguer la nature du contrôle ministériel exercé sur eux. Ceux-ci emploient en général leur propre personnel, ont leur propre budget et jouissent d'une grande indépendance dans la prise de décision. Créé par loi de 1992 précitée, le HEFCE est indépendant du ministère de l'Enseignement supérieur, même s'il remplit sa mission 7 ( * ) dans le cadre fixé par celui-ci.
Il est dirigé par un conseil d'administration composé de 12 à 15 membres (y compris le président et le directeur exécutif chargé de la gestion) rémunérés dont les déclarations d'intérêts sont publiées.
À l'exception du directeur exécutif désigné par le conseil d'administration avec l'approbation du ministre, ils sont nommés par le ministère de l'Enseignement supérieur pour une période de 3 ans éventuellement renouvelable, sur la base de leurs compétences dans le domaine de l'enseignement et de leur expérience professionnelle ou dans l'industrie. Les candidats sont recrutés par voie de presse et sélectionnés par le ministère et le HEFCE.
Des comités permanents dont un comité d'audit ainsi que des groupes de travail font des recommandations au conseil d'administration et au directeur exécutif sur des sujets spécifiques entrant dans le champ de compétence du HEFCE. Le directeur exécutif est assisté par 3 directeurs chargés respectivement des finances, de l'enseignement et de la recherche.
2. La procédure d'évaluation
Une nouvelle procédure d'évaluation, la REF (Research Excellence Framework) , sera utilisée pour l'évaluation 2014 de la recherche dans les établissements d'enseignement supérieur. Elle se substitue à la RAE (Research Assessment Exercice) conduite pour la dernière fois en 2008.
Cette procédure menée conjointement par tous les conseils de financement de l'enseignement supérieur du Royaume-Uni servira de base à l'affectation des fonds publics pour les années 2015 et 2016. Comme les précédentes, elle permettra également de rendre compte de la bonne affectation des fonds publics et offrira un classement des établissements de recherche.
Il s'agit d'une procédure d'expertise dans laquelle tous les établissements concernés sont invités à soumettre, le 29 novembre 2013 au plus tard, un rapport à l'une des 36 unités d'évaluation (Units of assessment, UOA) des diverses disciplines.
Dans chacune de ces unités un sous-panel d'experts effectue l'évaluation sous la direction de 4 panels principaux, avec l'aide d'assesseurs qui peuvent être des personnes dotées d'une expérience professionnelle dans l'utilisation, l'application ou la valorisation de la recherche universitaire ou des chercheurs en exercice dotés de compétences spécifiques pour aider notamment à l'évaluation des résultats de recherche.
Un panel principal est composé d'un président, des présidents des sous-panels entrant dans son domaine de compétence, de membres possédant une expérience internationale et d'autres ayant une expérience dans l'utilisation, l'application et les avantages plus larges de la recherche. 1950 organismes ont été désignés pour proposer des candidats.
Un sous-panel est composé d'un président ainsi que de 10 à 30 membres sélectionnés parmi des chercheurs en exercice qui représentent collectivement un spectre suffisant d'expertise en matière de recherche et qui ont la confiance de leurs pairs. S'y ajoutent en principe des membres du secteur privé, public ou tertiaire ayant une expertise dans la commande, l'application ou l'utilisation de la recherche. Les conseils de financement de l'enseignement supérieur du Royaume-Uni ont lancé des appels à candidature.
Les membres des panels et des sous-panels ont été nommés pour la plupart fin 2010 par l'exécutif des 4 Conseils de financement de l'enseignement supérieur.
3. Le contenu de l'évaluation
En principe, chaque établissement universitaire de recherche ne peut soumettre qu'un seul rapport à chaque unité d'évaluation. Plusieurs établissements qui coopèrent dans la recherche peuvent déposer des rapports conjoints. Le rapport soumis contient des informations sur l'activité et les résultats obtenus par « l'unité soumise à évaluation » :
- des informations sur le personnel en poste au 31 octobres 2013 dans l'unité sélectionnée pour participer à l'évaluation conformément au code de bonne pratique sur la sélection du personnel en vue de la participation à l'évaluation REF adopté par chaque établissement ;
- des détails relatifs aux publications et aux autres formes de résultats produits entre le 1 er janvier 2008 et le 31 décembre 2013 (jusqu'à 4 par personne de l'unité soumise à évaluation) ;
- un formulaire dûment complété décrivant l'approche de l'unité soumise à évaluation entre le 1 er janvier 2008 et le 31 juillet 2013 pour l'évaluation de « l'impact » 8 ( * ) de sa recherche ainsi que des études de cas décrivant les « impacts » obtenus pendant la période d'évaluation et qui ont été renforcés par la recherche de l'unité soumise à évaluation entre le 1 er janvier 1993 et le 31 décembre 2013 ;
- des données sur les diplômes de doctorat de recherche accordés dans cette unité et les financements de la recherche entre le 1 er août 2008 et le 31 juillet 2013 ;
- et un formulaire dûment complété décrivant l'environnement de la recherche entre le 1 er janvier 2008 et le 31 juillet 2013.
Pour chacun des 3 éléments de l'évaluation (résultats de recherche, « impacts » et environnement), chaque sous-panel établit une sous-évaluation (sub-profile) qui montre le pourcentage du dossier soumis par niveau de qualité classé dans l'ordre décroissant en 4, 3, 2 et 1 étoiles.
Les résultats de recherche sont notés en nombre d'étoiles en fonction de « leur originalité, de leur signification et de leur rigueur », les « impacts » en fonction de « leur portée et de leur signification » et l'environnement en fonction de sa « vitalité et de son caractère durable ».
À partir des sous-évaluations, le sous-panel dresse le profil général de qualité de l'unité soumise à évaluation en les pondérant de la manière suivante :
- 65 % pour les résultats de recherche ;
- 20 % pour les « impacts » ;
- et 15 % pour l'environnement.
* 5 Voir Infra.
* 6 Voir Infra.
* 7 Voir Supra.
* 8 L'impact est défini comme « un effet sur, un changement ou un bénéfice apporté à l'économie, la société, la culture, les politiques publiques ou les services, la santé, l'environnement ou la qualité de la vie au-delà du domaine purement universitaire ».