Service des études juridiques (Novembre 2009)
NOTE DE SYNTHÈSE
En France, c'est dans le cadre du suivi socio-judiciaire institué par la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs que les détenus peuvent, sur la base du volontariat, suivre un traitement médicamenteux visant à réduire la production de testostérone. Ce traitement est administré par voie orale ou par injection. Il est couramment qualifié de « castration chimique » bien qu'il ne présente aucun caractère irréversible, car ses effets sont supprimés lorsque l'administration des médicaments cesse. Actuellement, le dispositif n'est pas obligatoire, mais les détenus qui n'y participent pas ne peuvent prétendre à des remises de peine ou à la libération conditionnelle.
Le 27 septembre 2007, M. Bernard Debré, député, avait déposé une proposition de loi tendant à imposer la castration chimique aux personnes condamnées après avoir commis une agression sexuelle. Selon les termes de la proposition, le juge pénal aurait eu la faculté d'obliger les intéressés à suivre un traitement. Celui-ci aurait commencé pendant l'exécution de la peine et aurait pu, le cas échéant, se poursuivre après la sortie de prison.
Le projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale qui doit être prochainement examiné par le Parlement devrait modifier les dispositions sur la castration chimique. Il devrait notamment remettre en cause le principe du volontariat en renforçant les incitations à accepter le traitement médicamenteux proposé. En cas de refus, les intéressés seraient en effet susceptibles d'être réincarcérés ou placés en détention de sûreté.
Les expériences étrangères sont souvent citées à l'appui des propositions tendant à imposer aux délinquants sexuels un traitement médicamenteux. Elles sont également mentionnées lorsque la castration physique est évoquée.
Il a donc semblé utile d'examiner les normes applicables dans les pays européens auxquels il est généralement fait référence dans ce débat : l'Allemagne, l'Angleterre et le pays de Galles, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, la Pologne et la Suède.
L'analyse comparative fait apparaître que :
- la castration chimique n'est obligatoire dans aucun pays, mais le Parlement polonais est sur le point d'adopter un texte tendant à imposer aux délinquants sexuels un traitement médicamenteux ou psychologique ;
- la castration physique des délinquants sexuels n'est prévue que par la loi allemande sur la castration volontaire.
1) La castration chimique n'est obligatoire dans aucun pays, mais le Parlement polonais est sur le point d'adopter un texte tendant à imposer aux délinquants sexuels un traitement médicamenteux ou psychologique
a) La castration chimique n'est jamais imposée
La castration chimique peut constituer un élément du traitement administré aux délinquants pendant leur incarcération, une condition mise à leur libération conditionnelle ou un substitut à une peine de prison. Elle peut être régie - de façon implicite - par des dispositions générales sur l'exécution des peines ou par des mesures spécifiques. Elle peut être pratiquée de manière assez courante, dans le cadre de projets-pilotes ou à titre exceptionnel. Dans tous les cas, elle repose sur le volontariat, est subordonnée à une expertise psychiatrique des intéressés et complète une psychothérapie.
L'exemple le plus révélateur à cet égard est certainement celui du Danemark, où la castration chimique, pratiquée depuis de nombreuses années dans un établissement spécialisé dans l'accueil des psychopathes, est encadrée depuis 1997 par des dispositions réglementaires du ministère de la justice. Ces textes définissent les cas dans lesquels la castration chimique peut être pratiquée : pour les auteurs de certaines infractions sexuelles réalisées sans recours à la violence, elle peut constituer un substitut à l'incarcération tandis que, pour les délinquants sexuels condamnés à des peines de prison ferme et qui ont été considérés comme susceptibles de tirer profit d'un tel traitement, la castration chimique est réalisée pendant l'incarcération ou pendant la période de liberté conditionnelle. Dans tous les cas cependant, l'accord de l'intéressé est nécessaire, et le traitement médicamenteux accompagne une psychothérapie.
De même, la Catalogne, dont le statut d'autonomie inclut la mise en oeuvre de la politique pénitentiaire, devrait commencer à appliquer avant la fin de l'année 2009 un programme de traitement des délinquants sexuels les plus dangereux prévoyant la castration chimique. La participation à ce programme sera facultative.
Par ailleurs, en Espagne, alors que les ministres de la justice et de l'intérieur avaient annoncé en 2008 une vaste réforme du code pénal incluant la castration chimique des délinquants volontaires, le ministre de la justice a déclaré en août 2009 que le projet de loi de réforme du code pénal, qui doit être prochainement déposé au Congrès des députés, ne prévoirait aucune disposition relative à la castration chimique.
b) Le Parlement polonais est sur le point d'adopter un texte prévoyant le traitement obligatoire des délinquants sexuels
Le 25 septembre 2009, la Diète polonaise a adopté un texte portant diverses dispositions d'ordre pénal qui traite notamment de la castration chimique. Le juge pénal aurait l'obligation d'imposer un traitement médicamenteux ou psychologique aux auteurs de viols sur des enfants ou sur des membres de la famille. Pour les autres personnes condamnées à des peines privatives de liberté après avoir commis des infractions sexuelles, le juge apprécierait la nécessité de prescrire un tel traitement. En aucun cas, le suivi du traitement ne reposerait sur le volontariat des intéressés.
Les articles de ce texte qui portent sur la castration chimique ont été adoptés sans modification par le Sénat le 22 octobre 2009, mais la procédure législative n'est pas achevée.
2) La castration physique des délinquants sexuels est prévue par la loi allemande sur la castration volontaire
La loi allemande du 15 août 1969 sur la castration volontaire permet à certaines personnes de faire pratiquer une castration chirurgicale. Les intéressés doivent être âgés de plus de 25 ans, avoir fait l'objet d'une expertise et être volontaires. Cette loi est en particulier applicable aux personnes souffrant de déviances sexuelles et considérées comme susceptibles de commettre certaines infractions sexuelles particulièrement graves, des agressions sur des mineurs ou des viols par exemple.