II. LA NÉCESSITÉ D'UNE PLUS GRANDE PRÉSENCE FRANÇAISE
La délégation du groupe sénatorial a été impressionnée par la chaleur de l'accueil qu'elle a reçue de la part de ses interlocuteurs yéménites. Elle a pu constater le caractère privilégié des liens entre la France et le Yémen. Si elle a apprécié le dynamisme et l'excellence de la coopération française dans les domaines culturels et scientifiques, elle a été frappée par les faibles montants engagés par la France, en comparaison avec les autres pays européens, et la faible diversification des actions engagées. La prise en compte de l'environnement régional du Yémen et de sa proximité avec Djibouti devrait donner à terme à la coopération française une autre dimension.
A. EXPLOITER LES BONNES RELATIONS POLITIQUES ET LA SITUATION GÉOSTRATÉGIQUE DU YÉMEN
1. Des relations politiques cordiales en attente d'une concrétisation sur le plan économique
Les
relations politiques franco-yéménites bénéficient
d'acquis solides :
§ Le soutien au processus de réunification a été
constant et ferme de la part des autorités françaises, tant en
1990 qu'en 1994. Les autorités yéménites sont ainsi encore
reconnaissantes à la France de ses positions durant la guerre civile et
la considèrent comme leur principal soutien politique à
l'échelle internationale.
§ La médiation française, par le biais de l'Ambassadeur
Guttman
40(
*
)
, dans le contentieux
des îles Hanish entre le Yémen et l'Erythrée a directement
contribué au règlement pacifique du conflit.
§ Le Yémen et la France ont des positions voisines sur les
questions régionales (Iraq, Iran...). Le Yémen respecte
l'indépendance de la diplomatie française sur ces questions et
approuve la politique française dans la région.
§ La fréquence des rencontres entre les deux chefs d'État
depuis 1995. Le Président Ali Abdallah Saleh est très
attaché à son déplacement annuel à Paris, en visite
de travail ou en visite officielle. A l'occasion de son entretien avec la
délégation du groupe sénatorial, le Président de la
République a invité Jacques Chirac à se rendre au
Yémen.
Les relations politiques entre France et Yémen ont néanmoins
commencé à être affectées par l'absence de visites
de haut niveau au Yémen, depuis celle de Christian Pierret,
secrétaire d'État à l'Industrie en février 1998. La
reprise des visites françaises à l'occasion du dixième
anniversaire de l'unification du Yémen a été
appréciée. Après la délégation du groupe
sénatorial, les autorités yéménites ont reçu
récemment M. Loïc Hennekine, secrétaire
général du Quai d'Orsay et attendent tout prochainement M.
Charles Josselin, ministre délégué chargé de la
coopération.
Il est dommage que l'excellence de ces relations politiques n'ait pas davantage
de répercussions sur le plan économique. Malgré
l'obtention de grands contrats (Airbus, Total, Thomson-CSF), preuve de la
très bonne disposition des autorités yéménites
à l'égard de la France, les entreprises françaises sont
encore peu présentes au Yémen. La délégation du
groupe sénatorial n'a ainsi pu rencontrer au Yémen que peu
d'entreprises françaises : Total/Ipedex, BNP/Paribas, Alcatel et la
Compagnie Générale de Géophysique, entreprise
française la mieux implantée au Yémen.
Il paraît également étonnant, compte tenu toujours de
l'excellence des relations politiques entre la France et le Yémen, que
la coopération entre les deux pays ne soit pas davantage
développée.
2. Aider le Yémen : un intérêt géostratégique pour la France
Le
Yémen occupe en effet une position géostratégique forte.
C'est un pays charnière, qui, si le port d'Aden se développe,
pourrait jouer un rôle majeur dans le trafic maritime entre Canal de
Suez/Mer Rouge d'une part, Afrique, Golfe persique et Océan Indien
d'autre part.
La proximité de Djibouti, où la présence de la France est
forte et les ressortissants yéménites nombreux, milite pour une
intégration régionale de la coopération française
et la prise en compte de son environnement le plus proche. La
coopération franco-yéménite paraît ainsi
complémentaire de la présence française à Djibouti.
Enfin, le Yémen est le seul pays de la péninsule arabique qui
n'ait pas fait de ses relations avec les États-Unis la clef de
voûte de sa diplomatie. Une présence française croissante
au Yémen favoriserait ainsi un rééquilibrage des
influences occidentales dans la région.