Rapport de groupe interparlementaire d'amitié n° 145 - 16 mai 2017
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AVANT-PROPOS
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OUVERTURE
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TABLE RONDE 1 : LA TUNISIE, UNE PERLE EN
MÉDITERRANÉE
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TABLE RONDE 2 : LA TUNISIE AUTREMENT
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CONCLUSION
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ANNEXE
Groupe interparlementaire d'amitié
France-Tunisie (1 ( * ))
Revenir en Tunisie Pour une reprise durable du tourisme en Tunisie et pour une coopération France-Tunisie en ce domaine |
Actes du colloque Sénat du 23 mars 2017
Sous le haut patronage de
M. Gérard LARCHER,
Président du Sénat
Palais du Luxembourg
Salle Clemenceau
Carte de la Tunisie
AVANT-PROPOS
Île de Djerba (Crédits : Discover Tunisia)
Le tourisme en Tunisie a été profondément affecté par les attentats qui ont meurtri le pays en 2015. Le colloque organisé le 23 mars 2017, au Palais du Luxembourg, par le groupe interparlementaire d'amitié France-Tunisie est le témoignage de son soutien à la reprise du tourisme tunisien.
Les échanges ont permis de constater la forte implication des autorités tunisiennes ainsi que des professionnels du tourisme, tout particulièrement des entreprises du voyage et des tour operators . Malgré une désaffection certaine de la clientèle française à la suite de ces événements, la destination Tunisie a continué à être proposée. Elle n'a d'ailleurs pas trouvé de réel substitut auprès du grand public, les offres touristiques alternatives de ses voisins méditerranéens n'étant pas en mesure d'absorber le report de la clientèle française qui se rendait habituellement en Tunisie, tant en termes quantitatifs que qualitatifs. Le dialogue entre les professionnels du tourisme des deux rives n'a ainsi jamais été rompu.
Des efforts considérables ont été accomplis pour renforcer la sécurité sur les sites touristiques tunisiens et pour lutter contre le terrorisme. Ces derniers mois ont témoigné d'une hausse de la fréquentation des touristes, bien qu'elle n'ait pas encore retrouvé son niveau d'antan. Le tourisme a été l'un des moteurs du développement de la Tunisie, qui lui a permis de se faire connaître auprès de la clientèle européenne.
La Tunisie est en effet une destination accessible, tant en termes de proximité géographique que d'offre tarifaire. Grâce au partage permis par la langue française et l'hospitalité reconnue du peuple tunisien, un accueil de qualité a toujours été réservé aux touristes français, renforçant encore les liens entre nos deux pays.
La crise du tourisme de ces dernières années a été l'occasion pour la Tunisie de repenser et de diversifier son offre pour tenir compte des attentes nouvelles des touristes et des évolutions du marché. Des réformes sont menées pour accompagner ce mouvement, telles que la mise en place d'un label « Qualité tourisme tunisien » pour toutes les filières du secteur ou la négociation d'un accord « Ciel ouvert » avec l'Union européenne pour faciliter la desserte aérienne des principales destinations en Tunisie.
La Tunisie a souhaité tirer pleinement parti des trésors de son histoire millénaire, par la promotion du tourisme culturel, autour notamment de ses sites classés au patrimoine mondial de l'humanité de l'UNESCO comme Carthage, Kairouan et Dougga. La valorisation des richesses de son territoire ne se limite plus aux nombreuses stations balnéaires qu'offrent ses 1 300 kilomètres de littoral, le tourisme culturel est devenu un réel atout. La promotion du tourisme saharien, dans le Sud tunisien offre de belles perspectives et des paysages uniques. Le tourisme d'affaires, stimulé par la stratégie économique régionale de la Tunisie, et le tourisme médical, soutenu par une offre de soins de qualité, ont également leur rôle à jouer.
Ce colloque, dont les pages suivantes livrent le compte rendu, a permis de développer toutes ces perspectives et a montré combien la promotion du patrimoine culturel tunisien était un atout décisif pour le renouveau et le développement du tourisme en Tunisie. Il a aussi permis de renforcer la nécessaire coopération entre les professionnels du tourisme - et les différents acteurs du tourisme - tunisiens et français.
OUVERTURE
Message de M. Gérard LARCHER,
Président du Sénat
lu par M. Jean-Pierre SUEUR,
Ancien
ministre,
Sénateur du Loiret,
Président du groupe
interparlementaire d'amitié France-Tunisie
M. Gérard Larcher, président du Sénat, en déplacement à Lyon, qui accorde une grande importance à ce colloque, m'a fait l'honneur de me demander de vous lire sa déclaration :
« Madame la ministre du Tourisme et de l'Artisanat de la République tunisienne,
Messieurs les ambassadeurs,
Mes chers collègues parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
Ce colloque est celui de la solidarité et de l'amitié.
Amitié entre la Tunisie et la France, inscrite dans le temps et la géographie, sur les deux rives de cette mer Méditerranée, qui nous unit plus qu'elle ne nous sépare. Amitié entre deux nations dont les populations ne cessent d'aller à la rencontre l'une de l'autre. Solidarité de deux pays victimes du terrorisme islamiste et qui, courageusement, se dressent contre lui, pour ne rien abdiquer de leurs valeurs et de leur mode de vie.
Il y a deux ans, presque jour pour jour, le 7 avril 2015, le Président de la République tunisienne, M. Caïd Essebsi, était à la tribune du Sénat. Il est le seul président d'un pays de la rive sud de la Méditerranée à s'être exprimé du haut de cette tribune dans l'histoire du Sénat français. C'est un hommage, en vérité, à un pays cher, la Tunisie, qui a su préserver, dans l'adversité la plus absolue, l'héritage de ce qu'il est convenu de nommer les « printemps arabes » et la démocratie.
Bien des périls doivent encore être surmontés par les pays engagés dans la lutte contre le terrorisme islamiste, qui prône l'anéantissement de tous ceux qui ne partagent pas son idéologie nihiliste, quelles que soient leurs croyances ou leurs convictions, et qui dégrade la dignité de la femme.
Mais la Tunisie entrevoit une lueur d'espoir. Même si elle n'est pas à l'abri d'un nouvel attentat - qui peut l'être malheureusement ? -, la situation sécuritaire s'est notablement améliorée, grâce à la mobilisation conjointe des autorités tunisiennes, des forces de sécurité et de la population. La protection a été renforcée dans les lieux les plus touristiques. Des réformes courageuses sont en cours. L'économie montre des signes de redressement nombreux.
Le groupe d'amitié parlementaire du Sénat, son président, M. Sueur, dont je salue l'énergie infatigable en faveur de la Tunisie, et moi-même, avons plaidé sans relâche pour que la France soit présente aux côtés de la Tunisie, afin de soutenir son combat contre le terrorisme islamiste et en faveur du redressement.
Le Gouvernement français a entendu, en partie, cet appel. Force est de constater cependant que nous aurions pu mieux répondre, plus vite et de façon plus conséquente, aux besoins de coopération. Il faudra faire plus et mieux à l'avenir.
Ce colloque nous en donne l'occasion, et je remercie M. Sueur et le groupe interparlementaire d'amitié France-Tunisie de l'avoir organisé, à quelques jours de la fête nationale tunisienne, en lien étroit avec tous nos partenaires, en particulier l'ambassade de Tunisie en France et l'ambassade de France en Tunisie.
Conforter la confiance, reconstruire l'un des secteurs d'activités qui comptent le plus pour la Tunisie - le tourisme - apporter un nouvel élan au redémarrage de l'activité touristique en Tunisie : tel est le dessein simple mais ambitieux de ce colloque, pour que les effets du terrorisme islamiste ne perdurent pas sans fin à la suite des actions terroristes, pour que, tout en restant vigilants et en ayant conscience que le terrorisme islamiste peut toucher chacun d'entre nous, n'importe où et à n'importe quel moment, nous ne cédions pas aux peurs collectives que les terroristes cherchent à semer de façon durable dans les esprits.
Vive la Tunisie ! Vive la France ! Vive l'amitié franco-tunisienne ! »
M. Jean-Pierre SUEUR
Ancien
ministre,
Sénateur du Loiret,
Président du groupe
interparlementaire d'amitié France-Tunisie
Madame la ministre,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les députés,
Nous sommes très heureux d'accueillir Mme Selma Elloumi Rekik, ministre du Tourisme et de l'Artisanat de la République tunisienne.
Madame la ministre, votre homologue français, M. Matthias Fekl, devait être présent aujourd'hui, mais il est devenu entre-temps ministre de l'Intérieur...
Il nous a toutefois fait parvenir une déclaration vidéo que nous entendrons tout à l'heure.
J'ai également le plaisir d'accueillir M. Olivier Poivre d'Arvor, ambassadeur de France en Tunisie, ami fidèle, tout comme M. Ghazi Gherairi, ambassadeur de Tunisie auprès de l'UNESCO. Je dois excuser M. Abdelaziz Rassâa, ambassadeur de Tunisie en France, que nous avons accueilli il y a quelques jours au Sénat, et qui pris par sa tâche, ne peut être présent parmi nous.
J'accueille également M. Houcine Jaziri, député de l'Assemblée des représentants du peuple de la Tunisie, et président du groupe interparlementaire d'amitié Tunisie-France au sein du Parlement tunisien.
Je salue M. le consul général Ali Chaalali, ami fidèle, le Docteur Mohamed Ghannem, président de la Fédération des associations franco-tunisiennes, mon ami Maher Ben Azzouz, secrétaire général de cette même fondation qui a activement participé à l'organisation de ce colloque, Najia Ben Abdelhafidh, députée des Tunisiens de France et Mesdames et Messieurs les députés ici présents, et toutes les hautes autorités de Tunisie et de France qui nous font l'honneur d'être parmi nous.
Madame la ministre, Messieurs les ambassadeurs, Mesdames et Messieurs, le groupe d'amitié interparlementaire France-Tunisie du Sénat est un groupe qui, comme tous les groupes parlementaires, est totalement pluraliste et où toutes les formations politiques du Sénat sont représentées.
Nous avons eu l'idée d'organiser ce colloque à la suite de nombreux contacts. Madame la ministre nous a déjà fait l'honneur de venir au sein de notre Sénat.
Les attentats, que le discours de notre président a beaucoup évoqués, ont touché la Tunisie de manière dramatique, tout autant que la France.
Nous avons, en débutant ce colloque, une pensée pour nos amis de Grande-Bretagne, qui ont connu hier encore un attentat qui a touché des personnes de différentes nationalités, dont trois jeunes Français qui traversaient un pont.
On ne peut mettre un policier derrière chaque personne, mais nous devons nous battre ensemble pour la paix, la sécurité, et contre les idéologies meurtrières.
Je veux saluer ici le combat héroïque du peuple tunisien depuis la révolution. Vous avez voté une Constitution qui trace un chemin pour l'histoire universelle, une Constitution qui reconnaît la liberté de conscience, l'égalité des femmes et des hommes, et honore la démocratie.
Certains, au nom d'une religion, prétendent-ils, entendent abattre tout ceci. Un philosophe, lors d'un colloque qui s'est tenu à Tunis et auquel Olivier Poivre d'Arvor et moi participions, à l'occasion de l'anniversaire de la révolution, a dit que si ces gens-là lisaient le Coran, ils n'agiraient pas ainsi. Il faut en effet qu'ils le lisent, car ce qu'ils font est à l'opposé du message des religions.
Cette situation se rencontre dans nos deux pays, et il faut que nous soyons solidaires. À cet égard, je tiens à saluer ce qui a été fait en matière de coopération pour la sécurité et le renseignement entre nos deux ministères de l'Intérieur. Il faut que nous soyons forts face aux ennemis de la démocratie et de la République. Beaucoup de travail a été réalisé entre nos deux pays, et il faut continuer en ce sens.
Nous devons aussi, en tant qu'Européens, défendre une certaine idée de l'Europe. L'Europe s'est élargie, mais beaucoup d'amis du Maghreb estiment qu'il faut veiller que son centre de gravité ne se déplace pas vers le nord ou le nord-est de l'Europe, de telle manière qu'on oublie le lien étroit, qui est fondamental, entre les pays du Maghreb et l'Europe.
L'Europe doit vivre avec le Sud. Comme l'a dit le président du Sénat, la mer Méditerranée ne doit pas constituer une rupture, mais un trait d'union.
Nous nous sommes rendus à la grande conférence Tunisia 2020 2 ( * ) , qui était fort impressionnante. Beaucoup d'hommes politiques étaient présents, dont M. Manuel Valls, alors Premier ministre.
J'ai le souvenir d'un certain nombre de conférences, comme celle de Deauville 3 ( * ) , qui comportaient également des engagements. Le groupe d'amitié France-Tunisie du Sénat a écrit au Président de République française pour insister sur le fait qu'il était important que les engagements qui ont été pris soient respectés. Ceci est essentiel. Nous devons, en tant qu'amis, nous dire la vérité.
Il nous faut veiller à ce que toutes les paroles se traduisent par des actes concrets. Je sais que nos ambassadeurs y sont attentifs les uns et les autres.
À cet égard, nous sommes attachés au fait que, dans le domaine touristique, les choses évoluent par coopération. J'ai ici tous les chiffres. Madame la ministre en parlera plus savamment que moi. Ils montrent qu'il y a véritablement eu une décrue dans ce domaine en raison de la révolution.
Je le dis aux Français, qui ont fait leur propre révolution en 1789 : ce n'est pas parce qu'un pays fait une révolution pacifiste et progressiste qu'il faut cesser d'y aller ! Au contraire, ce devrait être une raison supplémentaire de s'y rendre.
La menace des attentats est partout la même. Je me rends souvent en Tunisie. Lorsque j'arrive à l'aéroport de Carthage et quand j'en repars, je suis contrôlé désormais trois fois. Il faut le dire, vous avez fait, Madame la ministre, d'immenses efforts en peu de temps en matière de sécurité !
Il faut se rendre en Tunisie : la Tunisie est belle, les Tunisiens sont accueillants et nous devons développer de nouvelles formes de tourisme. Une des tables rondes de cet après-midi traitera de ce sujet : connaître la Tunisie profonde, donner au tourisme de nouvelles dimensions économiques et susciter de nouveaux centres d'intérêts. Beaucoup d'orientations nouvelles peuvent être prises dans ce secteur.
J'adore me rendre en Tunisie et y faire des rencontres, et pas seulement dans les endroits emblématiques. On peut aimer Djerba, les îles Kerkennah, Gafsa, Gabès, Hammamet, mais aussi Chebika, Tamerza ou Midès.
Nous devons parler ensemble et prendre des engagements. Il y a ici des acteurs du tourisme français et tunisien, des responsables de chaînes, d'hôtels, de circuits. Il faut créer des coopérations concrètes et efficaces.
Nous sommes ici pour cela.
Je vous remercie pour votre attention, et je donne la parole à Mme Selma Elloumi Rekik, ministre du Tourisme et de l'Artisanat de la République tunisienne.
Mme Selma ELLOUMI REKIK,
Ministre du Tourisme et de
l'Artisanat de la République tunisienne
Monsieur le président du groupe interparlementaire d'amitié,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les députés,
Permettez-moi d'exprimer aujourd'hui ma profonde joie d'être ici.
Les marques de fraternité et de solidarité de la France envers la Tunisie se multiplient et se confirment. Cela nous enchante et nous indique que nous sommes sur la bonne voie.
Après 61 ans d'indépendance, la Tunisie mesure le long chemin parcouru dans nos échanges avec plus d'objectivité et de maturité.
Aujourd'hui, notre patrimoine s'élargit pour englober des pans entiers de ce que nous appelons le « patrimoine du XX e siècle ». Cela correspond à un riche héritage, que nous intégrons avec conscience dans nos politiques de conservation et de valorisation.
Les traces de notre histoire commune constituent une richesse. Nos mémoires, nos imaginaires, nos réflexions s'entrelacent de références croisées. Nos racines culturelles plongent dans le même creuset. Nos rêves s'éclairent de la même lumière.
Le rôle joué par la France dans la tenue et le succès de la Conférence internationale sur l'investissement en Tunisie montre que rien ne peut remplacer cette précieuse coopération et que la France est déterminée à accompagner la Tunisie dans sa transition démocratique et économique.
Chers amis, la Tunisie entame l'année avec beaucoup d'espoir et de détermination. Notre gouvernement d'union nationale a décrété que 2017 serait l'année de la relance économique.
Nous avons franchi des pas indéniables en matière démocratique. Il s'agit maintenant de remettre la machine du développement économique et social en marche. Pour que la Tunisie retrouve les conditions de son plein épanouissement, elle a besoin de redoubler d'efforts et de vaincre les obstacles que vous connaissez.
Le tourisme tunisien, secteur vital de notre économie, a subi ces dernières années les effets néfastes du terrorisme, qui a frappé dans des lieux de haute valeur symbolique, au Bardo et à Sousse. Ce mal absolu, qui a sévi aussi en France et ailleurs, nous sommes sur le point de le vaincre, et la situation sécuritaire est aujourd'hui plus que rassurante. La Tunisie est redevenue cette terre d'accueil, calme et paisible, conviviale et chaleureuse que connaît le monde.
Nous avons également redoublé d'efforts pour développer des segments nouveaux de notre tourisme, en diversifiant l'offre, en puisant davantage encore dans nos richesses patrimoniales pour faire de nos sites et paysages des lieux de découverte et de divertissement pour tous.
Nous envisageons l'avenir avec beaucoup d'espoir et de conviction, parce que nos choix sont ceux de l'humanité libre et sont fondés sur des valeurs partagées.
Avec la France, nous partageons un héritage commun, basé sur une longue histoire, une culture et une solidarité agissante. Nous voudrions que cette fraternité dans l'action se poursuive et devienne un exemple à suivre pour les peuples et les nations des deux rives de la Méditerranée et au-delà.
Face aux défis et aux menaces, notre idéal commun, forgé par les efforts de générations d'hommes et de femmes libres, est plus fort que jamais.
Plus que jamais, nous devons veiller que nos deux pays restent accueillants.
Agissons ensemble pour faire rayonner nos cultures et nos valeurs, faites d'ouverture, de tolérance et de solidarité pour la paix !
Le monde a besoin de nous pour résorber les foyers de tensions et les conflits. Il a besoin de nous pour faire triompher les valeurs d'échange, de dialogue et d'équité. La Tunisie vous salue et vous invite.
Vive la Tunisie, vive la France, vive l'amitié franco-tunisienne !
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci, Madame la ministre, pour votre très chaleureux message qui nous touche infiniment.
Nous allons entendre à présent M. Olivier Poivre d'Arvor, ambassadeur de France en Tunisie.
S.E. M. Olivier POIVRE D'ARVOR,
Ambassadeur de
France en Tunisie
Monsieur le président du groupe d'amitié,
Madame la ministre,
Messieurs et Mesdames les députés,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Monsieur l'ambassadeur,
Merci à vous tous d'être présents aussi nombreux dans un lieu qui s'engage en faveur de la Tunisie.
Les paroles de Jean-Pierre Sueur ne sont pas vaines : vous connaissez son attachement très singulier pour votre pays, notre pays, celui dont nous parlons aujourd'hui.
Même à Tunis, on s'inquiète de savoir ce qu'il se passera après les élections présidentielles françaises. Le Sénat représente la France politique, la France des élus, et sera à vos côtés, madame la ministre, dans les semaines et les mois à venir. La démocratie remplira son oeuvre, et le Sénat, en la personne de Jean-Pierre Sueur et du président Gérard Larcher, nous apporte un précieux concours.
Je ne souhaite pas à Madame la ministre de vivre ce qui est arrivé à M. Fekl. Cela signifierait que le ministre de l'Intérieur tunisien quitte ses fonctions. Or, il n'y a aucune raison à cela.
Par ailleurs, vous faites déjà un travail difficile. Jack Lang, en 1981, disait dans sa première intervention à l'Assemblée nationale que chaque ministre du Gouvernement devait être ministre de la Culture.
Je pense pour ma part que chaque ministre, en Tunisie comme en France, doit être un ministre du Tourisme. D'une certaine manière, en tant que ministre du Tourisme, vous êtes aussi ministre de la Culture, de l'Intérieur - car vous rassurez - ministre du Commerce extérieur et de la Communication.
Votre fonction, votre engagement quotidien, en Tunisie comme en France, ainsi que dans tous les pays où vous portez les bonnes nouvelles, sont extrêmement importants.
Je voudrais également saluer les responsables associatifs, les grands groupes, comme ACCOR, Orange ou Transavia, le syndicat des tour operators , ainsi que les Franco-Tunisiens résidant en France, qui sont les mieux placés pour porter les bonnes nouvelles et les répercuter auprès de mes compatriotes.
Nous avons besoin, dans ce combat pour le tourisme, pour l'économie, au-delà du combat politique, de l'énergie de tous pour que les plages tunisiennes de Bizerte, Tabarka, El Haouaria, Djerba et Zarzis soient à nouveau pleines de monde, et qu'il y ait la queue devant le musée du Bardo.
Il ne faut retenir que les bonnes nouvelles : on comptait 15 000 visiteurs au Bardo en 2015. On en dénombre à présent 60 000. Faisons en sorte qu'il y en ait 100 000 en 2017.
Il faut que les médinas de Sousse, de Sfax, qui font partie du patrimoine mondial de l'humanité, soient de nouveau animées par la présence de touristes, que les gens se pressent pour découvrir les merveilles que vous connaissez, comme El Jem, Dougga, Carthage, Bulla Regia, etc. Il reste aussi de la place pour de nombreux touristes dans les palmeraies et dans le désert du sud du pays. La matière ne manque pas.
Je voudrais saluer la résilience de la Tunisie, qui a vécu ces dernières années des moments historiques, euphoriques, tragiques, mais qui les a traversés, qui se présente aujourd'hui à nous comme une très grande et belle démocratie, au sein d'un ensemble régional plus contrasté dans ce domaine, et qui donne l'exemple. Les premiers effets se font sentir.
Vous dites souvent, Madame la ministre, que cela peut constituer un frémissement, parfois plus. L'année 2016 a déjà été une année de redémarrage pour le secteur touristique. Ceci a été rendu possible parce que votre Gouvernement a pris des mesures drastiques et d'une grande efficacité dans le domaine de la sécurité et de la défense. Il faut saluer le travail des forces de sécurité et de défense, qui ont rendu la Tunisie sûre et paisible.
L'année 2016 a été celle du redémarrage. Je n'ai pas la prétention de croire que la Tunisie a besoin de la France, mais je pense qu'elle a besoin des Français.
En 2010, ils étaient 1,4 million à avoir passé leurs vacances en Tunisie, plus que les Anglais, les Allemands et les Italiens réunis, soit 20 % de l'ensemble des touristes de votre pays. En 2016, ils étaient à peine 400 000 Français, mais cela augmente chaque mois un peu plus.
Ce n'est pas une question de quantité, car les touristes français sont des touristes de qualité, qui sortent de leur hôtel, vont au contact des gens, sont curieux, veulent voir les sites classés au patrimoine mondial de l'UNESCO. Ceci amène un échange, car le tourisme, ce n'est pas uniquement des visites ou du PIB et des devises. À ce titre, le touriste français fait du bien à l'économie.
Par ailleurs, la France a besoin que l'économie tunisienne se porte bien car, malgré ce qu'on entend, la Tunisie n'a jamais été complètement remplacée par d'autres destinations, loin de là. Nos agences de voyage, nos tour operators et nos investisseurs en Tunisie - et ils sont nombreux - en souffrent également.
La France se tient aux côtés de votre pays pour affronter tous ces défis. Le Gouvernement français s'est engagé sur le chemin que vous avez choisi, celui de la réforme du secteur et de la diversification de son offre. Je pense à l'Agence française de développement (AFD), qui a financé des rénovations d'hôtel, à Atout France, aux collectivités territoriales, comme la région Île-de-France, ou bientôt aux régions Normandie et Bretagne. Je crois que le soutien des collectivités locales sera très important dans la relance du tourisme. Croire que tout se fait d'État à État ou à travers des échanges dans le cadre du secteur privé est sûrement illusoire.
Les gestes politiques sont importants. Le Président de la République française est venu trois fois dans votre pays. Manuel Valls était là il y a quelques semaines, et le Premier ministre Bernard Cazeneuve y fera sa dernière visite à l'étranger les 6 et 7 avril prochains.
Je suis conscient que les défis qui se présentent aujourd'hui dans le secteur du tourisme sont nombreux en termes d'offres d'hébergement, d'amélioration de la qualité, de renforcement de la formation, autant de thématiques sur lesquelles la France, qui dispose d'une expertise reconnue en la matière, est à votre disposition.
Qu'allons-nous faire concrètement dans les semaines qui viennent ? Tout d'abord, le Premier ministre sera porteur, en compagnie de Youssef Chahed, le chef du Gouvernement tunisien, les 6 et 7 avril, d'un message en faveur de la relance du tourisme culturel. Nous souhaitions qu'il puisse dire à quel point, au-delà de l'image classique de la Tunisie, il existe des sites qui méritent d'être visités.
Île de Djerba (Crédits : Discover Tunisia)
Nous allons, à partir de la mi-mai, avec votre soutien, Madame la ministre, nous lancer dans une opération intitulée « Djerba invite la France », qui procède d'une idée très simple, que j'ai pu expérimenter quand j'étais ambassadeur chargé de l'attractivité culturelle et touristique auprès de Laurent Fabius. Il ne s'agissait pas à l'époque tant de vendre la France en soi que la Bretagne ou la Côte d'Azur, des « signatures ». Il ne s'agit pas ici de vendre la Tunisie dans son ensemble, mais Djerba, le Sahel, le désert. Cette marque « Djerba », par exemple, est stratégique, puisqu'une grande part des touristes français allait ou ira à Djerba.
« Djerba invite la France », c'est faire appel aux artistes - et je voudrais saluer ceux présents ici, illustres pour beaucoup d'entre eux -, au-delà du travail que réalisent tous les professionnels du tourisme, pour attirer les Français grâce à un certain nombre de festivals, l'Alliance française, l'école française. Toute une série de manifestations, de mai à septembre, vont inscrire Djerba sur la carte culturelle des Français. Nous mènerons la même opération au printemps 2018 concernant Sousse.
Je l'ai dit, la presse, mais aussi la diaspora, ont un rôle essentiel à jouer. Atout France, les collectivités, les agences de voyages, les tour operators , et tous les groupes ici présents peuvent apporter leur aide.
Je terminerai en disant qu'il faut se situer dans une perspective lointaine. L'année 2020 sera un grand rendez-vous pour la Tunisie. Le gouvernement tunisien a décidé que la Tunisie serait le premier pays du Maghreb - et le premier pays arabe depuis Beyrouth, en 2002 - à être l'hôte d'une grande conférence qui réunira 50 chefs d'État et de Gouvernement à Tunis, à l'occasion du sommet de la francophonie.
Au-delà du symbole et de la langue que nous partageons, ce sommet est aussi une occasion formidable de toucher un grand nombre de touristes. On le voit bien depuis que ce sommet a été annoncé. Vingt mille professeurs de français vont se réunir durant une semaine à Tunis et dans les différentes régions. Au-delà, nous devons travailler les marchés francophones qui se sentent à l'aise en Tunisie, car vous parlez notre langue parfois mieux que nous-mêmes. Il faut travailler les marchés canadiens, suisses et belges, et évidemment le marché français.
Nous allons, avec un certain nombre de partenaires privés, créer une Biennale de la photographie entre septembre et octobre 2018, qui constituera un grand rendez-vous culturel. Elle se déroulera à Tunis ainsi que dans deux autres villes de l'intérieur. Cette biennale permettra de présenter la photographie de création du monde entier, mais aussi documentaire, pour aider la Tunisie à construire un événement d'importance internationale.
En 1945, le maire de Nice s'était vu proposé d'organiser un festival consacré au cinéma. Il avait trouvé l'idée quelque peu vulgaire. La proposition avait été faite au maire de Cannes, qui l'avait acceptée. Le Festival de Cannes est aujourd'hui l'événement le plus couvert au monde par les médias, avant les Jeux olympiques !
Pourquoi la France occupe-t-elle aujourd'hui la première place du tourisme, avec 80 millions de touristes et une prévision de 100 millions en 2020 ? Ce n'est pas parce que les Français sont particulièrement sympathiques, mais parce qu'il existe un investissement dans la culture, ces paysages, les musées, les monuments, la gastronomie et tout un art de vivre. Les touristes viennent parce que nous avons travaillé cette matière culturelle depuis deux siècles.
Vous avez tout : peu de pays sont dans ce cas. L'Allemagne n'a pas tout cela. Son image est formidable, mais on ne peut pas dire que c'est le pays de la gastronomie, des plages les plus ensoleillées du monde ni des monuments les plus remarquables.
La Tunisie dispose d'un patrimoine, de créations, de paysages, et d'une histoire. Elle a de l'avenir parce qu'elle a inventé, dans ce monde arabo-musulman, une chose merveilleuse qu'on appelle la démocratie, c'est-à-dire l'égalité entre tous les citoyens.
Bilbao a connu le phénomène du musée Guggenheim, qui a sauvé la ville et transformé son économie. La tour Eiffel, de son côté, est un symbole formidable qui attire des millions de touristes. L'opéra de Sidney reçoit, chaque année, dix à quinze millions de touristes qui arrivent du bout du monde. Le fait que Tunis se tourne vers l'architecture contemporaine pourrait donc constituer une bonne idée.
La Tunisie d'aujourd'hui mérite d'être visitée, parce qu'au-delà des vicissitudes, des changements et de la politique, elle est éternelle et a pour elle une histoire que peu de pays peuvent présenter de manière aussi vivante et objective.
Le Bardo est un grand musée syncrétique qui montre les grandes civilisations que l'on retrouve en Tunisie. La Tunisie est extrêmement vivante et, comme le disait Homère à propos de Djerba, paisible.
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci pour ces propos qui ouvrent de multiples pistes.
Je me permets de rappeler que le Festival de Cannes a été créé par Jean Zay, grand ministre du Front populaire, qui a eu l'idée de ce festival pour faire pendant à La Mostra de Venise, à une époque où le régime fasciste ne diffusait que des films soigneusement sélectionnés.
Il a donc cherché une ville pour accueillir ce festival. Certaines n'y ont pas vu d'intérêt, mais Cannes s'est montrée réceptive à cette idée. J'en profite pour saluer le cinéma tunisien, dont la qualité est reconnue, tout particulièrement en France.
Merci pour tout ce que vous avez apporté en vous engageant dans nombre de projets. Madame la ministre désire d'ailleurs revenir sur ceux-ci - preuve qu'il existe une saine complémentarité...
Mme Selma ELLOUMI REKIK - Je voudrais tout d'abord remercier Olivier Poivre d'Arvor pour tout le travail qu'il est en train de réaliser, et pour la grande amitié qu'il porte à la Tunisie. Ses efforts sont en train de donner des résultats.
J'aimerais citer quelques chiffres, car je n'ai parlé que de la relation franco-tunisienne et de l'avenir de la Tunisie.
L'année 2016 a effectivement été une année de reprise pour le tourisme. La Tunisie est connue pour ses plages, mais il n'y a pas qu'elles. Nous avons des dizaines de milliers de sites historiques méconnus sur tout notre territoire, du Sud au Nord.
Certaines villes puniques, romaines, byzantines, comme Gafsa ou Kasserine, sont totalement oubliées par les touristes. La gastronomie tunisienne est également exceptionnelle et chaque région a ses spécificités.
Notre artisanat est extrêmement riche et emploie plus de 350 000 personnes, dont 80 % de femmes, qui travaillent dans les montagnes ou dans les villages et apportent beaucoup à leur famille. En Tunisie, la femme est le pilier de la famille.
Beaucoup de Tunisiens qui avaient trouvé un emploi en Libye se sont retrouvés au chômage après la révolution. Ce sont les femmes qui ont travaillé, essentiellement dans l'artisanat, pour nourrir leurs enfants et leur permettre de continuer à aller à l'école. En Tunisie, l'école est très importante. C'est un ascenseur social. Il est primordial pour une mère de famille que ses enfants réussissent et puissent occuper ensuite une position sociale de choix.
La Tunisie est au centre de la Méditerranée. Elle jouit d'une situation stratégique. Nous sommes à quelques heures des principales capitales européennes, à une heure de Rome, à deux heures de Paris. Certains connaissent l'ouverture du peuple tunisien, même si nous sommes passés par des périodes difficiles. Le terrorisme n'existait pas auparavant en Tunisie.
Notre pays ne connaît pas la culture de la violence. Ce sont des choses qui se sont installées récemment en Tunisie comme dans toute la région et l'on voit ce qui se passe ailleurs.
En outre, la Tunisie est située aux portes de l'Afrique, qui constitue un marché en pleine ouverture. Les mesures que nous avons prises ou que nous sommes en train de mettre en place dans le cadre de la restructuration du tourisme et de l'économie, avec l'ouverture du ciel, vont permettre de faire de la Tunisie un hub . L'Afrique est un marché vierge, qui va s'équiper, où toute l'infrastructure est à réaliser. Pour notre pays, être bien placé sur les plans économique et industriel est donc crucial. Le tourisme d'affaires est également important.
Olivier Poivre d'Arvor a déjà fait état des chiffres concernant l'arrivée des touristes français en Tunisie avant et après la révolution. L'année 2000 a en effet connue une relance, mais les chiffres jusqu'au 20 mars 2017 affichent une croissance de l'ordre de 32 %.
La reprise des échanges avec la France est importante en pourcentage, même si les chiffres sont peu élevés, et nous avons enregistré un certain surbooking avec la Belgique dès que celle-ci a levé l'interdiction de voyager en Tunisie.
Les réservations sont revenues. La sécurité est rétablie. Nous n'avons pas eu de problème en 2016. La reprise est donc réelle. Bien entendu, le risque zéro n'existe pas. On a vu ce qui est arrivé dans des pays où la sécurité est pourtant très stricte. Nous condamnons vivement ce qui s'est passé hier à Londres. Nous pensons aux familles des victimes et aux enfants français présents à ce moment-là.
Je voulais appuyer ce qu'a dit notre ami Olivier Poivre d'Arvor. La reprise est bien là en matière touristique en Tunisie. Nous travaillons sur la diversification des produits - balnéaire, culturelle, médicale - ainsi que sur la thalassothérapie. La Tunisie est la deuxième destination au monde dans ce domaine, après la France.
M. Jean-Pierre SUEUR - Ce que vous dites est vrai. Je suis retourné récemment à El Jem. L'ensemble de mosaïques que vous avez mis à jour et qui est présenté là-bas est extraordinaire. Ces mosaïques sont d'une beauté extrême. Il faut visiter ces endroits !
La parole est à M. Houcine Jaziri, député de la première circonscription de France à l'Assemblée des représentants du peuple.
M. Houcine JAZIRI,
Député des
Tunisiens de France,
Président du groupe d'amitié
Tunisie-France de l'Assemblée des Représentants du
Peuple
Monsieur le président du groupe d'amitié,
Madame la ministre,
Messieurs et Mesdames les députés,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Messieurs les ambassadeurs,
Je suis né à Zarzis, dans le Sud de la Tunisie, une ville située à côté de Djerba. On y a conservé un tourisme « traditionnel ». La ville ne compte qu'une dizaine d'hôtels. Deux ou trois ont été refaits à neuf après la révolution.
C'est un endroit qui n'est pas pollué. La mer y est très belle. J'ai voyagé à travers des dizaines de pays, mais la luminosité que l'on trouve à Zarzis et à Djerba est exceptionnelle. Cela donne envie d'y vivre. Je vous conseille vivement de visiter cette petite ville.
Un quart de ses natifs vivent en Île-de-France. Ce sont de grands voyageurs. Je suis resté en exil en France durant vingt ans. Mon retour a constitué le moment le plus important de ma vie.
Des villes comme Sfax ou Gabès ont souffert d'une industrialisation insupportable, qui a engendré une grande pollution. Aujourd'hui, on est en train d'y remédier, mais cela demande beaucoup d'argent.
Zarzis et Djerba sont à 2 heures 30 de Paris, et tout le monde y parle le français.
Le retour du tourisme marque la réussite de la révolution et de la démocratie en Tunisie.
Pourquoi tient-on tant au tourisme ? C'est une approche culturelle plus que commerciale. À Djerba, on vit avec 300 euros par semaine.
Il existe à côté de Djerba une île appelée el Bibane. Ce sont les Romains qui l'ont découverte. Allez-y, vous adorerez !
Politiquement, on s'améliore aussi. Depuis l'arrivée du gouvernement dirigé par Youssef Chahed, il n'y a pratiquement plus d'actes terroristes ni, grâce au dialogue social, de grèves sauvages. Avec la démocratie et l'instauration de la République, la Tunisie réussira, Inch'Allah !
M. Olivier POIVRE D'ARVOR - On mange également très bien à Zarzis. Il existe aussi à Paris un très bon restaurant tenu par Nordine Labiadh, natif de Zarzis, dont le nom est « À mi-chemin ».
J'en profite pour dire que votre député est un bon communicant. Ma secrétaire prétend que c'est le Clark Gable de l'assemblée nationale ! Il est vrai qu'il existe une petite ressemblance.
M. Jean-Pierre SUEUR - En France, on constate que les maires sont amoureux de leur ville. L'élu de la ville la moins ensoleillée ou celui de la ville la plus triste, quand ils parlent de leur commune, la dépeignent avec les yeux de l'amour. Après vous avoir entendu, Monsieur le député, on se sent coupable de ne pas connaître Zarzis !
La parole est à M. Ghazi Gherairi, ambassadeur délégué permanent de la Tunisie auprès de l'UNESCO, qui va nous dire quelques mots en « hors-d'oeuvre ». Les hors-d'oeuvre tunisiens ne se limitent pas aux bricks à l'oeuf ! Certains ont une conception très réduite d'une gastronomie qui, comme l'a dit Monsieur l'ambassadeur, compte une très large palette de plats de même nature.
S.E. M. Ghazi GHERAIRI,
Ambassadeur
délégué permanent de la Tunisie auprès de
l'UNESCO,
Monsieur le président,
Messieurs les sénateurs,
Messieurs les députés,
Monsieur l'ambassadeur,
Madame la ministre,
Chers invités,
Je suis très heureux d'être ici présent, mais je ne vous infligerai pas de double discours. Nous sommes en effet dans une des deux maisons qui, à Paris, produisent le droit en France. Non bis in idem !
Je m'inscris dans la tendance générale qui s'est dégagée de l'ensemble des présentations de ceux qui m'ont précédé.
La Tunisie et la France ont forgé, à travers les siècles, une histoire complexe et enchevêtrée. Le souhait qui se dégage de l'ensemble des discours est de partager un moment d'intelligence dans nos rapports communs. Je crois que les ingrédients de cette intelligence se présentent de manière fort complète ces dernières années.
Nous sommes réunis pour parler du tourisme tunisien, et de la crise - ou de la sortie de crise - du tourisme tunisien. C'est certainement un vecteur important pour l'équilibre économique, pour la perception du pays, pour le « label Tunisie », ainsi qu'on l'appelle désormais.
Il existe une dépendance économique de beaucoup de secteurs vis-à-vis du tourisme en Tunisie, c'est un fait. La crise que nous avons connue n'a pas été totalement prévue, en tout cas dans son ampleur, notamment ces deux dernières années, mais l'intelligence nous impose de ne pas chercher à revenir au statu quo . Faisons au moins en sorte que d'une crise naisse un nouveau regard sur le tourisme, qu'un nouveau tourisme découle de cette crise, un tourisme tourné vers d'autres secteurs et d'autres vecteurs.
La Tunisie est porteuse de beaucoup de valeurs d'une extrême richesse. On a parlé de la richesse culinaire, archéologique, etc., mais il y en a d'autres. Il nous revient de faire en sorte que le nouveau tourisme tunisien soit moins dépendant des aléas, moins fragile et améliore la situation économique et l'image de la Tunisie, qui a fourni au reste du monde les preuves qu'un pays arabo-musulman est capable de s'autodéterminer en matière de principes démocratiques, de respect de la valeur humaine et d'égalité entre les hommes et les femmes.
Le musée du Bardo comporte, dans une de ses salles, une mosaïque d'El Jem, où l'on peut lire : « Omnia tibi felicia ». Ceux qui possèdent quelques rudiments de latin auront compris que la Tunisie vous ouvre ses bras depuis des millénaires. Elle a vocation à continuer à le faire.
M. Jean-Pierre SUEUR - Nous allons maintenant, en ouverture de la première table ronde, vous présenter une vidéo qui recense les sites de Tunisie inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO 4 ( * ) . ( Projection de la vidéo )
La parole est à M. Mohamed Ghannem, député des Tunisiens de France et président de la Fédération des associations franco-tunisiennes.
M. Mohamed GHANNEM - Je voudrais rendre ici hommage à tous ceux qui ont beaucoup travaillé sur ce colloque, comme M. Youssef Meniar, secrétaire exécutif du groupe d'amitié France-Tunisie, et de nombreux membres du conseil d'administration de la Fédération des associations franco-tunisiennes, comme M. Maher Ben Azzouz.
Je remercie également le Sénat de nous accueillir dans le temple de la République française.
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci pour les actions de coopération médicale que vous menez, et que nous essayons de soutenir.
Comme le rappelle le docteur Mohamed Ghannem, je répète que nous avons organisé ce colloque avec la Fédération des associations franco-tunisiennes, qu'il préside, et Maher Ben Azzouz, son secrétaire général.
Il est très important que ce colloque rassemble un certain nombre de représentants des institutions et réunisse le tissu vivant des Tunisiens de France, représentés par des dizaines d'associations, qui ont de grands projets, notamment celui d'un centre culturel destiné à faire vivre le coeur battant de la Tunisie dans chacune de nos villes - et même à Châlette-sur-Loing !
Mosquée de Kairouan (Crédits : Discover Tunisia)
TABLE RONDE 1 : LA TUNISIE, UNE PERLE EN MÉDITERRANÉE
Table ronde animée par M. Jean-Pierre SUEUR,
Président du groupe interparlementaire d'amitié
France-Tunisie du Sénat
Ont participé à cette table ronde :
M. Jürgen BACHMANN, Secrétaire général du Syndicat des entreprises du tour operating (SETO)
Mme Charlotte DUMESNIL, Directrice commerciale de Transavia
M. Richard SOUBIELLE, Vice-président du Syndicat national des agences de voyages
M. René TRABELSI, Président de Royal First Travel
M. Ghazi GHERAIRI, Ambassadeur délégué permanent de la Tunisie auprès de l'UNESCO
M. Jean-Pierre SUEUR - Nous allons à présent ouvrir la première table ronde, « La Tunisie, une perle en Méditerranée ». Monsieur Bachmann, quelle est votre réaction par rapport à ce que vous avez entendu ? Où en est votre activité ? Quels sont vos projets et comment voyez-vous la coopération touristique entre la Tunisie et la France ?
M. Jürgen BACHMANN - Merci de me donner l'occasion de répéter que le tourisme en Tunisie est un élément essentiel et incontournable de l'activité des tour operators en France.
Les voyagistes qui organisent les déplacements des Français et ressortissants d'autres pays sont regroupés au sein du SETO. On essaye de développer chez nos clients le goût du voyage en véhiculant certaines valeurs.
Pour pouvoir se déplacer, trois éléments sont nécessaires : il faut le vouloir, le pouvoir et disposer du savoir.
Vouloir voyager, c'est désirer se rendre dans un endroit dont on imagine la beauté. L'image est donc l'élément déclencheur de cette envie.
Par ailleurs, pour pouvoir voyager, il faut avoir de l'argent et disposer d'un accès géographique proche de chez soi.
Enfin, une fois sur place, il faut savourer l'expérience que l'on vit, apprécier ce que l'on découvre, apprendre de nouvelles choses. On voyage pour se détendre, mais on en tire aussi des expériences.
C'est un concept très basique, mais il y a tout ce qu'il faut pour cela en Tunisie en termes d'image et d'intérêt. Il existe des valeurs fortes depuis des décennies dans les têtes et dans les coeurs.
Aller en Tunisie est facile. On a la chance de bénéficier d'un dispositif aérien conséquent - Transavia, Tunisair, Nouvelair Tunisie, etc. - qui permet de s'y rendre de Paris ou de province chaque jour, week-end compris. Les tarifs sont accessibles.
Enfin, je pense que les Français sont à même de savourer la lumière, les mets, et la culture tunisienne.
Je ne peux que confirmer ce que disait Madame la ministre : les choses vont nettement mieux pour les tour operators français. Certes, on est loin du niveau d'activité que l'on aurait besoin de rétablir, mais on sent poindre une tendance positive, et cela me réjouit profondément.
Que font les tour operators pour revenir à la situation d'avant ?
Tout d'abord, nous veillons que les clients vivent les expériences qu'ils sont venus chercher, comme à Zarzis. Grâce à la langue, je n'ai aucun souci quant à l'accueil que les Tunisiens réservent à la clientèle française.
On sait qu'on trouve en Tunisie les produits que les clients français qui voyagent sur les moyens courriers apprécient beaucoup, comme les clubs de vacances, etc. On a dans la salle quelques spécialistes dans ce domaine.
On sait aussi que les niveaux tarifaires doivent rester accessibles - et ils le sont.
Nos partenaires hôteliers ont compris que la Tunisie offrait la capacité nécessaire à l'accueil du tourisme. Cette capacité se retrouve ailleurs dans le bassin méditerranéen, mais certaines autres destinations, comme l'Espagne, le Portugal, etc., souffrent d'une pénurie de places en très haute saison. Tout le monde ne peut donc trouver chaussure à son pied.
La Tunisie, qui dispose d'une offre bien calée et d'une image bien ancrée dans la culture française, va donc pouvoir exercer son attraction en haute saison.
Une chose est sûre : la qualité est nécessaire. Il ne faut en aucun cas que le client rentre déçu. On discute beaucoup de ce sujet avec les hôteliers partenaires, qui en sont parfaitement conscients et qui y travaillent. On a bon espoir que cela se passe bien cette année. Il le faut.
Doit-on parler de sécurité ? Je ne le souhaite pas. Selon moi, c'est un prérequis pour tout le monde, pour les Américains comme pour les Japonais qui viennent à Paris, pour les élèves français qui se trouvaient hier à Londres, ou pour les Britanniques qui ont séjourné un temps en Tunisie.
Malheureusement, le monde est ainsi fait : la sécurité totale n'existe nulle part, pas plus à Paris qu'à Londres ou en Tunisie.
Tous les professionnels ont cependant l'obligation de rétablir les standards, mettre en place les processus et former les gens à les respecter afin que la sécurité soit balisée - et nous travaillons dur pour y parvenir.
On ne parle pas de sécurité, on l'assure. On en a eu de très beaux exemples lors de la grand-messe de l'ITB, le salon international du tourisme qui a dernièrement eu lieu à Berlin 5 ( * ) . La présentation par la Tunisie des mesures de sécurité mises en place depuis plus de dix-huit mois a été très appréciée. C'est un travail de longue haleine.
Il faut également faire en sorte que tous les professionnels veillent à trouver les bons leviers au bon moment en matière d'offres. C'est une question de timing . Cela va de ce que font les agences de voyages, qui offrent une réservation longtemps à l'avance, à des achats plus impulsifs sur Internet, en passant par les achats des comités d'entreprise. Il faut être capable de maîtriser ces canaux en répondant aux besoins de remplissage de nos partenaires tunisiens.
Il faut également prendre soin de la communication, cela va de soi. On vient de visionner une vidéo. Il convient de communiquer sur la Tunisie de façon moderne, en utilisant les moyens actuels. Il existe des messages différents, suivant les images auxquelles on fait appel.
Il faut par ailleurs s'adresser aux clients, mais également à nos partenaires tunisiens. Depuis quatre à cinq ans, la Tunisie était moins présente dans l'esprit des vendeurs. Il faut faire en sorte qu'elle redevienne la première proposition des agences de voyages. Il faut donc organiser une communication « B2B » auprès des professionnels.
Ce sont quelques mesures concrètes sur lesquelles on travaille avec les opérateurs, les partenaires de la distribution, mais aussi sur place. Si on agit sur tous les leviers, je pense qu'on est bien parti pour 2017.
Reste l'enjeu stratégique. Comment faire en sorte que la Tunisie se repositionne ? C'est Richard Trabelsi qui traitera de ce sujet.
M. Jean-Pierre SUEUR - La parole est à Mme Dumesnil, qui a signé l'appel. « Cet été, je vais en Tunisie » 6 ( * ) .
Mme Charlotte DUMESNIL - Merci pour votre invitation. C'est un honneur pour Transavia de participer à cette table ronde. La Tunisie est un partenaire très fidèle de Transavia depuis sa création. Nous fêtons cette année nos dix ans d'existence. Depuis, nous n'avons jamais cessé de desservir la Tunisie.
Même pendant les périodes plus creuses de crise que nous avons évoquées précédemment, il était essentiel pour nous de continuer à maintenir le lien entre la France et la Tunisie.
Quelques mots à propos de 2016 pour valider et reprendre ce qui a été dit auparavant. Nous avons opéré 3 200 vols entre la France et la Tunisie l'an dernier, avec un taux de remplissage d'environ 87 %, ce qui constitue un chiffre très honorable. On a ainsi constaté une reprise de l'activité et des voyages entre la France et la Tunisie.
En 2016, nous avons conservé une offre stable. Nous opérons sur six routes entre la France et la Tunisie. Au départ de Paris, nous desservons Djerba, Tunis, Monastir. Nous avons également des vols au départ de Lyon vers Tunis et Monastir, ainsi qu'une route au départ de Nantes qui dessert Monastir.
Nous maintiendrons bien évidemment ces six routes en 2017, avec une offre stable. Notre stratégie concernant la Tunisie pour cette année consiste à renforcer l'offre durant les périodes de forte activité due aux vacances scolaires, à ajuster les périodes plus creuses et à faire un effort sur les prix. Il est en effet essentiel, comme le disait Jürgen Bachmann, de rétablir l'attractivité de la Tunisie. Le prix est un élément déterminant dans le choix des voyageurs. C'est la raison pour laquelle nous avons réalisé cet effort, afin de participer au rebond.
D'après les ventes des premiers mois de 2017, qui préparent la période printemps-été, les résultats sont très encourageants. Nous avons d'ores et déjà constaté une hausse du remplissage des avions pour la période d'avril à août. Je pense que de meilleurs résultats sont à attendre, puisque nous constatons que les réservations se font relativement tardivement, en principe par le canal d'Internet. On s'attend donc à des résultats encore meilleurs sur la Tunisie.
On constate également un retour des demandes de réservations de groupes de la part des agences de voyages. L'an dernier, nous n'avions pas reçu de demande de groupes pour la Tunisie. Or, celles-ci redémarrent en 2017.
La reprise est donc là chez les organisateurs de voyage en groupe, les agences de voyages, et chez certains tour operators , qui se repositionnent. Les performances et les résultats sont très encourageants.
Nous communiquons également énormément avec les agences de voyages et les tour operators partenaires pour redonner de la visibilité à la Tunisie qui, il y a encore quelques mois, faisait partie du top trois de nos propositions. Notre volonté est de lui redonner cette place.
Je suis totalement d'accord avec l'idée qu'il est essentiel de communiquer à nouveau à propos de la Tunisie. La vidéo qui a été diffusée est parfaite. Je serai ravie de pouvoir la reprendre dans nos médias, ainsi que sur notre site. Elle est en effet symbolique de la Tunisie, dynamique, et propose une ouverture sur le patrimoine de ce pays. Ceci permet de présenter la Tunisie sous un autre angle. Il est important que les partenaires du tourisme - institutionnels, associations - travaillent ensemble, communiquent et fassent en sorte que les Français se tournent à nouveau vers la Tunisie.
La communication entre nous doit permettre d'accélérer le rebond que l'on constate dans les résultats pour 2017.
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci de nous avoir présenté une vision des choses très encourageante.
La parole est à M. Soubielle.
M. Richard SOUBIELLE - Je voudrais essayer d'apporter une vision des choses plus globale. Nous nous réjouissons en effet déjà d'enregistrer, sur l'ensemble des outils de mesure du marché, une progression d'environ 30 % de plus chaque mois depuis novembre, qui a déjà été signalée.
Je suis désolé si j'empiète sur les propos qui vont être tenus par mon ami René Trabelsi, mais je voulais vous apporter ma vision de professionnel du tourisme et de vieil ami de la Tunisie, pays m'a tant apporté dans ma vie de tour operator .
Je commencerai par deux vers du grand poète tunisien Kacem Chebbi, que l'on retrouve dans l'hymne national de la Tunisie : « Lorsqu'un jour le peuple veut vivre, force est pour le destin de répondre » . C'est ce que l'on constate aujourd'hui, et l'on peut s'en féliciter !
Cette volonté de continuer prend ses sources dans l'indéfectible amitié qui existe entre nos peuples. Bien sûr, le politique a fait son travail, l'histoire aussi mais, avant tout, ce sont des centaines de milliers de nos concitoyens, des deux côtés, qui se sont rencontrés, qui se sont parlé, qui se sont découverts et qui se sont appréciés.
Aujourd'hui, on ressent un frémissement, un bouillonnement. À présent, il faut conclure. Comme on dit chez nous : Yallah !
Il faut être pragmatique en la matière. Je tiens à souligner l'excellent travail qui a été conduit en sous-main, pendant cette période difficile où nous étions meurtris, par nos amis de la Fédération tunisienne des agences de voyages et la Fédération tunisienne de l'hôtellerie.
Le dialogue entre professionnels n'a jamais été rompu. Il a même été amplifié, et la qualité était au rendez-vous. Nous avons même signé des protocoles qui lient en particulier la France et la Tunisie de façon définitive s'agissant des problématiques du tourisme.
Il existe trois prérequis en matière touristique. Le premier, comme l'a dit Jürgen Bachmann, est celui de la sécurité. Elle est en train de se mettre en place. On souhaite simplement un peu plus de fluidité aux arrivées. Tout comme en France, on peste quand on arrive et quand la queue est interminable, ou quand on n'a pas le nombre de personnes suffisant à l'accueil. Le tourisme est une chaîne, qui commence par les contrôles à l'arrivée. Dehors, l'autocar du tour operator attend. L'hôtelier est un peu nerveux, ne sachant pas si ses clients vont arriver à la bonne heure, et le chef de cuisine se demande si le repas va pouvoir être servi au bon moment, etc. Il faut donc prendre en compte à la fois la fluidité, la facilité et les résultats.
L'environnement constitue le deuxième prérequis. J'encourage à ce que l'on aille au-delà des zones touristiques et qu'on ne crée pas de rupture. Je relève qu'au cours des derniers mois, on a enfin convenablement nettoyé les abords des hôtels. Mais qu'en est-il de la campagne ? Je connais la Tunisie depuis 40 ans. J'ai vu la dégradation qui s'est produite au cours des dix dernières années. Il faut se reprendre. Aujourd'hui, l'Européen - même si Paris n'est pas un bon exemple, je le concède - a besoin d'un environnement propre et soigné.
Le troisième pilier est celui du service. On a eu suffisamment de temps pour se reposer. Maintenant que tout le monde revient, il faut travailler. Je ne parle pas de jeter l'opprobre sur une catégorie : à bon chat, bon rat ! Ce sont d'abord les professionnels et les propriétaires des hôtels qui sont concernés. C'est à eux de mettre le service en perspective. Il faut que les touristes qui ont eu le courage de rouvrir la voie en Tunisie rentrent chez eux « avec la banane », comme on dit dans le milieu du tourisme, heureux d'avoir passé quelques jours, déçus de ne pas être restés plus longtemps et impatients de revenir.
Tout ceci va se mettre en route rapidement, et l'on va connaître le succès, mais voyons un peu plus loin.
Deux ou trois autres points sont importants et, en premier lieu, l'arrivée du low cost , de l' open sky et de la densification de la desserte aérienne par les compagnies usant de nouvelles méthodes. Il faut s'y préparer. Je ne porte pas ici de jugement : on s'adapte au monde moderne, et on essaye de faire du mieux que l'on peut.
En tant que professionnel du tourisme, je sais que cela va changer considérablement les rythmes. Il ne s'agit plus, comme on l'a connu durant des décennies, de séjours de sept nuits avec des touristes qui se succèdent en provenance des Pays-Bas, d'Allemagne ou de France.
On arrive désormais tous les jours, on part tous les jours. On reste 48 heures, 72 heures, quatre jours. On ne peut plus miser sur le même style d'hôtellerie, avoir la même restauration, le même système de traitement à la réception des hôtels. Cela s'anticipe, car la sanction est au bout.
On reçoit des opérations de team building , de petits séminaires, de grands séminaires, de grosses opérations. Il faut que, sur une période très courte, la satisfaction soit générale, et ne surtout pas entendre, comme c'est parfois le cas dans des destinations que l'on dit touristiques : « C'est la basse saison », ou : « On n'a pas de formation ».
Anticiper, prévoir, c'est gouverner, et se positionner dans un régime concurrentiel de proximité, qui est certainement le plus difficile au monde. La compétitivité touristique existe partout autour de la Méditerranée. Ce n'est pas une action Nord-Sud, mais une question de volonté des pays d'organiser ou non le tourisme, et de faire ensuite en sorte que ceux qui y participent soient récompensés.
Un message au passage : le partage est essentiel !
Face au concept difficile d'identité nationale qui a surgi il y a quelques années, il convient peut-être de rappeler au public que, si la Tunisie, c'est la Méditerranée du coeur et le coeur de la Méditerranée, c'est aussi notre histoire - Carthage, le grenier de Rome et, jusqu'au XIV e siècle, un creuset exceptionnel de civilisations dont nous sommes tous issus.
Nombre de sites gagneraient à être réaménagés, scénarisés, avec le concours de spécialistes, dont la France, afin de faire jeu égal avec la proche concurrence. J'ai vu que ce que l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a fait en Jordanie sur le site de Jerash : c'est extraordinaire ! Cela surprendra tout le monde, et on ira dans le bon sens.
Site archéologique de Siliana (Crédits : Discover Tunisia)
On doit aussi expliquer ce qu'est le tourisme au peuple tunisien, et d'abord à ses enfants. Il faut que l'Éducation nationale dégage du temps pour expliquer aux jeunes tunisiens qu'un touriste n'est pas une « vache à lait » ni un étranger, mais quelqu'un qui va leur permettre de s'ouvrir l'esprit et d'en faire des citoyens du monde.
Tout cela se met en musique. Il y a des spécialistes pour cela, mais je pense qu'une volonté politique est nécessaire pour y parvenir.
Il faut aussi reconnaître que le niveau des langues étrangères, qu'il s'agisse du français, de l'anglais ou de l'allemand, a diminué. Je le mesure moi-même, connaissant la Tunisie depuis 40 ans. Je pense qu'on parle moins bien aujourd'hui qu'il y a quelques années. C'est dommage, car la compréhension et l'échange font partie du produit touristique. C'est une priorité qu'on devrait, selon moi, mettre en avant.
Grâce à tous ces ingrédients et à d'autres, où la synergie et le dialogue sont importants, nous pourrons connaître des jours meilleurs sans craindre la concurrence.
Je dis toujours que la Tunisie n'est pas un bateau dont les amarres vont se rompre et qui va partir à la dérive ! Il y aura toujours des milliers de kilomètres de plages, un soleil exceptionnel, et un peuple qui fait toute la valeur ajoutée du séjour en Tunisie.
Les professionnels tunisiens ici présents peuvent compter sur notre engagement et sur notre loyauté, qui sont importants. Je pense qu'ils le ressentent au travers de mes propos. Je comprends combien ils ont pu être déçus de constater, à l'occasion de cette crise difficile, que certains de leurs meilleurs amis leur ont tourné le dos quelque temps. C'est un problème de communication internationale. Nous ferons tout ce que nous pourrons pour accompagner ce mouvement et aller plus loin.
Les entreprises du voyage ont été parmi les premières à proposer leurs services. Nous disposons d'une masse impressionnante de seniors, d'anciens patrons de grandes sociétés, qui se feraient un plaisir de venir enseigner, dialoguer, échanger en Tunisie avec quiconque, pour peu que cela rapporte directement au tourisme. Le tourisme, même s'il représente une activité économique, est en effet avant tout une activité humaine.
Je terminerai en citant Antoine de Saint-Exupéry dans Terre des hommes : « La grandeur d'un métier est peut-être avant tout d'unir les hommes, et il n'est qu'un luxe véritable, c'est celui des relations humaines ».
M. Jean-Pierre SUEUR - J'ai remarqué que vous n'étiez pas adepte de la langue de bois. Il faut en effet s'en méfier. Elle sert quelquefois dans la diplomatie - ou parfois, aussi, au Sénat... Vous avez exprimé quelques idées qui vont nourrir nos discussions.
La parole est à M. René Trabelsi, président de Royal First Travel, la plus tunisienne des entreprises touristiques françaises.
M. René TRABELSI - Chacun ayant dit un peu ce que tout le monde pense, il va me falloir improviser.
Certains s'attendent à ce que je parle de Djerba. Comment ne pas parler de ma ville natale, en effet ? Vous avez dit que les maires parlent de leur commune avec amour. C'est aussi mon cas. Djerba, c'est mon amour, ma douce, ma fidèle. J'appelle même parfois ma femme Djerba ! Elle sait que tout est contenu là-dedans.
Djerba la magnifique... Quand on arrive à Djerba, tout change. Parfois, j'y fais un voyage éclair avec des amis. On arrive le soir à 20 heures avec un vol de la Tunisair, on dîne en bord de mer et on prend le vol du lendemain à 7 heures du matin pour rentrer travailler, mais on a l'impression qu'on a été durant des jours en vacances.
Je suis très optimiste pour la Tunisie. Le fait que nous soyons réunis ici prouve que la Tunisie a déjà gagné. La chaîne Public Sénat nous suit et on parle positivement de ce pays. Lorsque les événements que l'on sait sont survenus en Tunisie, je suis allé voir un ami économiste. Certains ont consulté des psychiatres. Mon ami m'a dit qu'on allait attendre dix à quinze ans avant que le tourisme ne revienne. Aujourd'hui, le tourisme est en train de revenir en Tunisie, et il y a plusieurs raisons à cela.
En premier lieu, certains tour operators n'ont pas trouvé de produit pour remplacer la Tunisie. Le tour operator est là pour gagner de l'argent. Ce n'est pas mon cas. Si les agents d'origine tunisienne « galèrent » actuellement avec cette destination, il faut bien dire qu'on a gagné de l'argent auparavant avec la Tunisie et d'autres pays.
À Berlin, lors du dernier salon international du tourisme, les tour operators nous ont dit avoir essayé d'autres destinations, mais ne pas avoir trouvé ailleurs de produit équivalent à la Tunisie.
Bien sûr, on tient compte de la sécurité, mais la Tunisie est un pays sécurisé, on le sait depuis longtemps. Aujourd'hui, les aéroports de ce pays sont les seuls où l'on doit vérifier les bagages avant de les enregistrer. Cela ne se fait nulle part ailleurs, pas même en Europe. Comme l'a dit le Président Sueur, on ne peut toutefois pas mettre un policier derrière chaque voyageur.
L'état des hôtels s'améliore énormément, et beaucoup tiennent à satisfaire la clientèle en termes de qualité de service ou d'accueil. Les hôtels sont sécurisés grâce à des caméras. C'est une exigence du ministère du tourisme. Des agents de surveillance sont postés à l'entrée des établissements. On surveille les coffres de voiture, et on utilise des détecteurs de métaux. Il est très important de le dire, car la clientèle veut être rassurée en matière de sécurité.
Par ailleurs, aujourd'hui, aucune autre destination que la Tunisie n'offre un prix comparable pour une famille de quatre personnes avec deux enfants.
Le vacancier français calcule ses vacances comme tout le monde. Il sait qu'il dispose de 2 000 euros et cherche à dépenser son argent. Parfois, il choisit une autre destination que la Tunisie, mais il sait que ce pays lui offre la qualité, le service et le soleil. On est à moins d'une heure d'avion de Nice, un trajet plus court qu'un Paris-Nice, et l'on peut rentrer dans la journée.
En 2008, au moment de la crise française, les tour operators et les hôteliers ont été amenés à offrir pratiquement le séjour aux enfants. On a aidé le touriste français à venir passer ses vacances en Tunisie.
Les Français aiment beaucoup la Tunisie, à cause de la langue. Ailleurs, ils peuvent moins échanger. Tout le monde a des amis tunisiens. À Paris, chacun connaît un épicier ou un marchand de fruits et légumes qui parlent de la Tunisie.
Je suis très optimiste, car on a gagné beaucoup de temps. En 2017, on sent que la Tunisie revient en force. Notre agence est pratiquement la seule à affréter des charters vers la Tunisie. J'ai toujours prétendu qu'on ne peut faire de tourisme sans charter . On ne peut amener des touristes dans un pays si on ne s'engage pas sur des sièges d'avion et des chambres d'hôtel. Cela oblige le tour operator à consommer ces sièges.
Certaines voix s'élèvent pour critiquer les charters mais, sur Tunisair, les avions sont ceux que l'on retrouve sur les vols réguliers. Les règles sont les mêmes, et l'indemnité de retard identique. La loi est pareille pour tout le monde, et le service est équivalent à celui que l'on trouve sur un vol régulier.
D'autres compagnies offrent également de très bons services vers la Tunisie, comme Transavia, Nouvelair, Air France. Je pense toutefois que l'on manque de capacités. Au mois d'avril, ce sera le cas. D'aucuns déplorent que les prix sont élevés, mais c'est précisément parce qu'on n'a pas assez de capacités sur cette destination. En Europe, aujourd'hui, on n'a pas assez d'avions, les vieux appareils n'ayant pas encore été remplacés.
Nous sommes en train de renforcer la capacité des charters destinés au tourisme. Je pense que l'on doit aussi toucher certains endroits considérés comme des « niches » pendant la crise. On a parlé de Tabarka. À partir de la fin du mois de juin, nous allons commercer à desservir Tabarka par charter .
Tabarka est une destination exceptionnelle. J'ai eu la chance d'y aller : c'est vraiment superbe ! On y trouve en même temps la montagne et la mer.
Je vous invite à aller sur Google pour visionner la vidéo consacrée à l'hôtel La Cigale. C'est un hôtel exceptionnel. Il y en a d'autres. On peut faire du vélo, de la marche, ou profiter des environs. On y trouve également un golf magnifique.
La Tunisie, ce n'est pas seulement Djerba, Hammamet, Sousse, Monastir. Il existe d'autres endroits.
M. Sueur a décrit des endroits superbes : il est dommage que les compagnies tunisiennes n'aient pas eu l'idée de prévoir des vols réguliers vers ces destinations. Si je prends ce risque, c'est que je sais que l'on va les vendre. Les gens ont envie de voir d'autres produits.
Je profite de la présence des députés pour évoquer le fait que l'on souhaite souvent éviter le tourisme de masse. Cependant, la Tunisie en a besoin.
On compte aujourd'hui 240 000 lits en Tunisie. Ce n'est pas avec les vols réguliers de Transavia, Air France, Tunisair ou Nouvelair que l'on va remplir les chambres. Le seul pays qui ait réussi dans le tourisme de masse, c'est la Tunisie - et on manque d'offres aujourd'hui.
Le tourisme n'est pas réservé aux seuls mois de juillet ou d'août. Un hôtelier ne pourra jamais gagner sa vie ni amortir ses investissements en deux mois, même si tout le monde y vient. L'année dernière, on a accueilli des touristes russes en Tunisie, mais il faut également compter sur les Algériens, les Tunisiens, etc.
Je pense donc que le tourisme de masse doit revenir, mais il ne peut le faire qu'avec l'engagement des tour operators en faveur de vols charters . J'espère que l'arrivée de l' open sky ne conduira pas les Tunisiens souhaitant rentrer chez eux à prendre les charters d'assaut. L' open sky est fait pour ramener des touristes qui vont passer deux ou trois jours sur place, sans quoi Tunisair, Nouvelair et Transavia vont souffrir ! Il faut s'adapter. Peut-être Transavia va-t-il baisser ses prix pour faire face à la concurrence...
Je voudrais à ce sujet adresser au législateur français une demande que j'ai déjà formulée en 2011 à propos de la taxe sur les passagers, qui est la plus chère de Méditerranée. Aujourd'hui, un passager à destination de la Tunisie paye 75 euros de taxe 7 ( * ) pour un aller de 200 euros, soit près de 45 % de la part du billet. Je trouve cela vraiment très cher. Comment cette taxe se justifie-t-elle alors qu'elle est de 35 euros pour la Grèce ou l'Espagne ? Ceci constitue un handicap.
Mme Charlotte DUMESNIL - Sur Transavia, le prix d'appel pour un Paris-Tunis est de 69 euros. Pour le retour vers Paris, il est de 39 euros !
M. René TRABELSI - Vous ne prenez donc que 5 euros de marge...
Mme Charlotte DUMESNIL - On a la possibilité de proposer des tarifs plus attractifs au retour, les taxes étant inférieures dans ce sens.
M. René TRABELSI - J'ai participé cette année, comme tous les ans, au Salon du thermalisme. On enregistre cette année un record de réservations pour la thalassothérapie en Tunisie, qui occupe la seconde place dans ce domaine après la France.
Les Français raffolent de la thalassothérapie. Dans certains grands hôtels, les curistes payent jusqu'à 2 000 euros par personne et par semaine. La clientèle qui connaît la qualité de ce service est prête à dépenser cette somme par semaine en Tunisie.
Les groupes commencent également à revenir en Tunisie, comme l'a dit Mme Dumesnil. Nous avons ainsi un groupe de golfeurs qui part au mois de mai à Djerba. Généralement, les femmes des golfeurs suivent une thalassothérapie. Cela permet de faire travailler tout le monde.
Le marché senior commence également à réinvestir la Tunisie, qui offre presque onze mois de soleil sur douze. En ce moment, il fait 26 degrés à Djerba et 24 degrés à Tunis. Pour un mois de mars, la température est exceptionnelle.
Les seniors viennent également en long séjour. Nous travaillons avec le comité Super Mamie France, très attaché à la Tunisie. Il va y revenir cette année du 3 au 10 septembre. Ces personnes sont des bénévoles d'associations qui parlent beaucoup et adorent la Tunisie. Le marché senior est très intéressant et va grossir peu à peu.
Enfin, cette rencontre est très bénéfique pour la Tunisie. Merci beaucoup pour ce que vous faites pour ce pays, Monsieur le président.
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci d'avoir été aussi concret.
Les villages que j'ai cités tout à l'heure ne sont pas les seuls qui m'intéressent. Je suis aussi un amoureux de Chenini, Douiret, Guermessa, Ghomrassen, où les avions n'arrivent pas - et il ne le faut pas. On doit s'y rendre à pied ou en voiture.
Ces villages pitons berbères sont incroyables. On voit que l'histoire a poussé les populations à se réfugier tout là-haut avant que les choses n'évoluent, comme à Matmata, où il n'était plus autant nécessaire de se protéger contre les agresseurs. Ces endroits sont sublimes.
Vous avez par ailleurs évoqué un sujet important, celui de la taxe. Vous nous donnez là une idée. Nous allons voir avec nos amis de Bercy ce que l'on peut faire, mais ce n'est pas gagné. Diminuer la taxe pourrait pourtant non seulement aider la Tunisie, mais aussi tous les pays du Maghreb. Ce serait quelque chose de très concret. Merci d'avoir mis l'accent sur ce point. Il faut absolument qu'on s'en occupe.
Je donne à nouveau la parole à Monsieur l'ambassadeur pour conclure cette première table ronde.
M. Ghazi GHERAIRI - Je ne sais si j'ai la possibilité de synthétiser quatre présentations aussi bien structurées, documentées et techniquement élaborées. Je vais essayer de vous en transmettre les idées-forces.
Les quatre intervenants, même s'ils partent de positions techniques et professionnelles différentes, bien que complémentaires, partagent un certain enthousiasme en matière de tourisme, qu'il s'agisse de transport, de réservations ou de retour à des positions antérieures à la crise.
Tout cela est de bon augure, et si nous avons tous consenti à donner de notre temps aujourd'hui, c'est que nous nous en réjouissons.
On retire de tout ceci le sentiment qu'on est proche de retrouver le tourisme d'avant la crise.
Je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure des réponses que l'on puisse apporter. En effet, la Tunisie doit remettre sur pied un secteur stratégique, névralgique, duquel dépendent des pans entiers de l'économie, d'activités sociales diverses, mais elle doit aussi faire évoluer son tourisme. On peut ne pas avoir choisi cette crise mais, du moment que nous l'avons vécue, il nous revient de la transformer en un moment de réflexion, pour rebondir sur un tourisme plus performant, plus diversifié et plus respectueux de la nouvelle Tunisie.
Je ne veux offenser personne, mais ceci s'impose à tout observateur des circuits, des sites et des villes qui émergent aujourd'hui comme des lieux touristiques majeurs : historiquement, il existe un tourisme paresseux. L'essentiel colle à une Tunisie utile, qui remonte à quelques décennies - si ce n'est à quelques siècles.
Il nous revient d'aller vers les régions qui ont fait en sorte qu'on se voit aujourd'hui pour parler de la Tunisie démocratique, de la Tunisie de la dignité retrouvée. Il nous revient d'innerver toute la Tunisie de cette nouvelle donne touristique.
Nous parlons là d'un tourisme du XXI e siècle, qui ne peut pas ne pas respecter l'environnement. Jusqu'à quel point nos infrastructures et notre tourisme actuel sont-ils respectueux de l'environnement ? Je ne sais si la question a été posée, mais elle doit l'être.
Jusqu'à quel point le système économique touristique tunisien sert-il l'ensemble du tissu économique national ? Le tourisme profite-t-il à toute la Tunisie de manière comparable ?
Si nous nous targuons d'être aujourd'hui un pays qui regarde la réalité en face et estime que la démocratie est une vertu, la question doit être posée. La réponse à cette question relève de la responsabilité de chacun.
On veut l'éluder pour mieux retrouver quelques chiffres confortables pour ceux qui sont déjà en place, mais la question doit être posée.
Le film qui a été présenté est un très bel outil, mais très peu représentatif. La Tunisie a déjà huit sites classés au patrimoine mondial de l'UNESCO et douze autres 8 ( * ) sont soumis à l'organisation. L'ambition est d'en élargir le nombre. C'est de cette Tunisie-là qu'il faudra aussi parler et qu'il faudra mettre dans la boucle touristique.
La boucle touristique ne suppose pas de bétonner encore plus de régions, ou de construire davantage d'hôtels. Que faisons-nous du tourisme des villes presque oubliées, des circuits ? Qui parle de Chemtou, un site très important sur le plan archéologique et sur le plan des potentialités qu'il peut offrir aux circuits qui peuvent couvrir toute cette région ? Qui parle de Ouenza, alors que la proximité de cette ville si riche avec les grands pôles touristiques rendrait sa visite facile et changerait le contenu des programmes ?
Site archéologique de Dougga (Crédits : Discover Tunisia)
Il faut étonner, que la Tunisie parle plus, parle différemment et apporte un contenu diversifié. Il faut que la Tunisie enrichisse sa carte de visite internationale d'éléments nouveaux sur le plan touristique.
Aujourd'hui, il existe en Tunisie une extrême diversité et une certaine ébullition culturelle. La jeunesse tunisienne n'a jamais été aussi libre ni ingénieuse. Un autre système ne peut-il lui profiter ? Il nous faut réfléchir sereinement et sérieusement pour mettre en place un tourisme qui tienne compte de la donne de la nouvelle Tunisie.
D'autres pistes existent bien évidemment. Je parle en présence de connaisseurs, mais beaucoup de pays comptent des circuits de petits musées. En disposons-nous ? Le musée d'El Jam est très peu visité ! Or, tous les petits musées méritent, avec leur diversité et leur extrême richesse, d'être intégrés dans les circuits touristiques.
Ces circuits peuvent ne pas être destinés aux masses, mais il convient de créer ces niches. La diversité de la production oenologique en Tunisie, par exemple, pourrait certainement entraîner la création d'un circuit des vins.
On ne peut plus résoudre les problèmes comme par le passé, et on ne peut plus faire fi des valeurs de la nouvelle Tunisie, où tout le monde a droit à la parole, à la dignité et au respect de ses droits. Le tourisme ne peut échapper à cette nouvelle réalité tunisienne, dont je me félicite pour ma part.
La délégation de Tunisie auprès de l'UNESCO vous donne rendez-vous le 12 mai prochain, lors de l'inauguration de l'exposition consacrée au vingtième anniversaire de l'inscription du site de Dougga sur la liste du patrimoine de l'humanité. Vous y êtes les bienvenus.
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci, chers amis. Vous nous avez comblés.
Y a-t-il des demandes de prise de parole dans la salle ?
De la salle - M. Maher BEN AZZOUZ (Fédération des associations franco-tunisiennes) - Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les membres du groupe interparlementaire d'amitié France-Tunisie, chers collègues de la Fédération des associations franco-tunisiennes, Mesdames et Messieurs, permettez-moi de remercier M. Jean-Pierre Sueur pour la parfaite organisation de ce colloque, en partenariat avec notre fédération.
Permettez-moi également de vous remercier toutes et tous d'avoir répondu présents à notre invitation pour témoigner votre amour et votre attachement à notre chère Tunisie.
J'aimerais, dans le cadre de la thématique de ce colloque, vous présenter brièvement l'un des objectifs de la Fédération des associations franco-tunisienne, dont je suis secrétaire général.
Je salue tout d'abord la présence de maître Mounir Slama, qui nous fait le grand plaisir d'être parmi nous, de M. Hervé Chevreau, maire d'Epinay-sur-Seine, et de tous celles et ceux que nous avons invités et qui ont répondu présents.
Le tourisme tunisien doit avant tout retrouver un avenir. Pour ce faire, il faut, entre autres, que le tissu associatif franco-tunisien oeuvre pour réinstaurer un climat de confiance mutuelle entre nos deux peuples, notamment à travers le futur centre culturel de Paris, qui reste notre premier objectif, en espérant que ce climat de confiance transformera les barbelés qui entourent l'ambassade de France à Tunis en fleurs de jasmin très parfumées.
De la salle - Je suis un shamagale , c'est-à-dire un vieux sage appartenant à un groupe de familles éthiopiennes d'Addis-Abeba chargé de certaines décisions. J'ai passé quatre ans là-bas comme correspondant de Radio France Internationale (RFI).
Je suis Tunisien et Français, né à Sousse, mais originaire de Zéramdine, à côté de Jemmel.
Issu de l'Institut français de presse, où j'ai fait mon doctorat, je suis également l'un des premiers guides touristiques de la Société hôtelière et touristique de Tunisie (SHTT), au sein de laquelle le professeur Fantar enseignait l'archéologie afin d'aider les touristes.
Nous avions à Sousse, perle du Sahel, une maison de jeunes où l'on recevait des touristes avec qui l'on pouvait parler. Nous étions du même âge.
J'aimerais faire une recommandation à Madame la ministre et aux responsables du tourisme ici présents : les jeunes doivent venir en Tunisie rencontrer d'autres jeunes. La diaspora - M. Soubielle et l'ambassadeur de France en Tunisie l'ont évoquée - est fondamentale. Je l'ai rappelé aux Nations unies, à Addis-Abeba. Si on ne fait pas participer les cadres et les personnes compétentes de la diaspora à tous les projets, on aura alors failli.
À Sousse, j'étais considéré comme un « business ». Les « business » étaient les « dragueurs de touristes ». Je suis toutefois un « business » particulier car, pour déjouer l'attention des autorités et éviter que la police ne nous comprenne, nous ne nous adressions qu'à celles qui parlaient anglais et fréquentaient l'université. Nous les interrogions sur la démocratie, la représentation nationale, et leur demandions des conseils à propos de ce que pouvait faire la jeunesse. Les gens étaient persuadés qu'on était en train de « draguer » !
J'aimerais également que les responsables du tourisme insistent sur le fait que les clubs sportifs français peuvent effectuer des stages de formation en Tunisie. Nos stades sont souvent vides. Or, on peut par ce biais favoriser le développement de l'athlétisme en Tunisie.
M. Jean-Pierre SUEUR - Vous avez présenté des pistes intéressantes en matière de sport et de jeunesse. Il est important que les jeunes se rencontrent.
Vous avez aussi évoqué une piste pour parler anglais avec les dames : maintenant que la révolution a eu lieu, on peut parler français, tunisien, ou n'importe quelle autre langue !
De la salle - M. Neji BEN OTHANNE - Je suis directeur général adjoint de l'ONTT. Je souhaite apporter quelques précisions après l'intervention de M. Bachmann.
Mon propos portera sur trois points et, en premier lieu, sur la qualité. Les autorités tunisiennes accordent un intérêt particulier à l'amélioration de la qualité des services. Nous bénéficions à ce titre d'un jumelage avec la France et l'Autriche afin de mettre en place un programme de label qualité du tourisme tunisien, qui va toucher toutes les filières de ce domaine.
En second lieu, concernant la sécurité, nous avons introduit celle-ci dans les nouvelles normes de classement des hôtels.
Le troisième point concerne le numérique. Nous consacrons un budget important à ce secteur, auquel nous portons un intérêt particulier. La Tunisie et l'ONTT disposent actuellement d'un nouveau site appelé discovertunisia.com , actuellement accessible en six langues et bientôt en neuf, dont le chinois.
En ce qui concerne les opérations B2B, nous sommes disposés à soutenir et à assister tous les tour operators désireux d'organiser des opérations pour permettre aux agents de voyages de se rendre compte de visu de ce qui se passe en Tunisie.
Par ailleurs, nous recourons beaucoup au numérique en matière de communication institutionnelle et utilisons énormément Internet, ainsi que les réseaux sociaux. Nous avons pour ce faire lancé un appel international et avons retenu pour chacun des marchés des agences, qui donneront lieu à un traitement spécifique.
Notre communication sera plus adaptée pour cibler la clientèle et les leaders d'opinion.
M. Karim HELALI - Je vous remercie, Monsieur le président, ainsi que le Docteur Ghannem et la Fédération des associations franco-tunisiennes, pour l'organisation de cet événement. Votre amour de la Tunisie se dégage de vos paroles, Monsieur le sénateur...
M. Jean-Pierre SUEUR - Ma fille Véronique est née à Tunis...
M. Karim HELALI - Vous entendre ainsi parler de notre pays réchauffe le coeur !
Je voulais, en tant que député de l'Ariana, aborder le sujet de la sécurité. Ce qui s'est passé à Sousse et, deux mois avant, au Bardo, a constitué un vrai déclic, passé le choc qu'ont suscité ces événements en France, en Grande-Bretagne et en Tunisie.
J'étais à quelques mètres des coups de feu. Le pays a depuis changé radicalement de stratégie et de vision en matière de sécurité. La Tunisie, depuis Bourguiba, avait peu investi dans ce domaine. C'est un pays qui a plutôt misé sur l'éducation et la santé. Les deux tiers du budget de la nation étaient destinés à ces deux secteurs.
En 2016, le budget de la sécurité et de la défense, pour la première fois de l'histoire de la Tunisie indépendante, a dépassé celui de l'éducation et de la santé. Cela nous fait un pincement au coeur, mais c'est une question de realpolitik, et la situation s'est largement améliorée.
Bien sûr, il n'existe pas de risque zéro, pas plus à Paris, à Londres, que dans n'importe quel endroit du monde, mais on peut dire aujourd'hui que la Tunisie est sécurisée à très haut niveau. Tous les touristes peuvent donc venir tranquillement dans notre pays.
Les professionnels ont fait beaucoup d'efforts en la matière. Aujourd'hui, personne n'entre dans un hôtel sans ouvrir son coffre de voiture, même un député ou un ministre. On doit aussi passer sous les détecteurs de métaux, et c'est très bien. C'est la première condition pour faire revenir les vacanciers dans notre pays.
Les hôteliers doivent aussi se préoccuper d'améliorer la qualité de leurs services. C'est ce qu'ils sont en train de faire. Il est également indispensable qu'ils se diversifient.
On a évoqué le tourisme sportif : celui-ci peut être un très bon créneau. J'étais président de la Fédération tunisienne de handball il y a trois ans, et je me suis battu pour que le trophée des champions, qui regroupe les quatre meilleures équipes de France, se déroule à Sousse. Malheureusement, après mon départ, nos amis français n'ont pas continué l'expérience. Il faut la renouveler.
Pourquoi ne pas réfléchir à délocaliser une finale de coupe de France de football en Tunisie ? Il y a quelque temps, un match de la Juventus contre un club italien s'est déroulé au Qatar. Pourquoi pas un PSG-OM au stade de Radès ?
M. Jean-Pierre SUEUR - On pouvait aussi faire passer une étape du tour de France par Zaghouan...
M. Karim HELALI - Pourquoi pas ?
Il faut aussi renforcer les échanges culturels avec la Tunisie. Quelqu'un a parlé du Festival de Cannes, qui est devenu un label mondial. Pourquoi ne pas réfléchir à une cérémonie d'ouverture ou de clôture à Sidi Bou Saïd ?
Les Tunisiens attendent beaucoup de la France. La France n'est pas un simple partenaire ou seulement un pays proche. C'est pour cela que les Tunisiens exigent beaucoup plus de la France. On attend donc de nos amis parlementaires et de tous les leaders d'opinion français qu'ils se prononcent en faveur de la Tunisie.
La Tunisie a réalisé un miracle en matière de démocratie. La guerre en Libye et tout ce qui se passe autour de nous nous handicapent. Nous attendons de nos amis français qu'ils nous aident et fassent tout pour que la démocratie réussisse. Le tourisme est, à ce titre, un créneau majeur.
Merci encore une fois pour cet événement et pour votre accueil.
De la salle - Je représente la société civile démocratique et progressiste de la Tunisie. Je suis ravie d'entendre autant de témoignages d'amour en faveur de la Tunisie.
Monsieur Trabelsi, serait-il possible de faire en sorte de développer des circuits touristiques, de Nabeul à Djerba, consacrés aux artisans de la terre, des circuits berbères, des circuits musulmans ? Kairouan est l'une des capitales saintes du monde, personne ne le sait !
Comme le disait l'ambassadeur délégué auprès de l'UNESCO, il serait bon d'être à l'écoute de ce que fait la Tunisie pour offrir une alternative.
Je fais partie d'un mouvement qui pousse petit à petit les Tunisiens à consommer tunisien. Nous sommes submergés par la « camelote » chinoise et turque, et avons décidé de travailler avec les artisans en distribuer les produits tunisiens.
J'en reviens à la question de M. Trabelsi concernant la taxe aéroportuaire. Il a été question, à un certain moment, que vos clients paient une taxe au départ de Tunisie. Notre troupe théâtrale tourne à travers le monde et dans les pays arabes. Nous payons une taxe avant de partir. Les citoyennes et les citoyens tunisiens doivent acquitter ce qu'on appelle le « timbre de voyage », qui représente 60 dinars, soit 20 euros.
Nous avons essayé de soutenir cette demande, mais les tour operators ont refusé que les voyageurs que vous prenez en charge règlent 20 euros à l'aéroport de Tunis, ce qui n'est pourtant rien. Imaginez le budget que cela peut représenter. Or, vous l'avez refusé !
M. Naoufel ZIADI - Merci pour votre initiative.
Je considère qu'on a besoin de mobiliser toutes les forces institutionnelles, celles de la société civile, des intellectuels, de la diaspora.
Pour information, on a créé l'année dernière à Paris, avec le consulat général de Tunisie et l'ambassade, un comité d'appui au tourisme social, solidaire et culturel durable.
L'année dernière, avec des comités d'entreprise et des services sociaux départementaux, nous avons mis sur pied un voyage réunissant les représentants de la CGT, de Force ouvrière, de la CFDT et de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), à l'issue duquel nous avons fait une déclaration.
Cette année, un congrès de dix jours est organisé à Bordeaux pour les retraités. Notre ami Hakim Tounsi est l'une des chevilles ouvrières de cette initiative.
Pourquoi ne pas créer ensemble un comité d'appui au tourisme social, solidaire et diversifié pour explorer toutes les pistes et mobiliser le maximum de Tunisiens ?
De la salle - Mme Wided CARPENTIER - J'ai créé sur mesure deux associations pour les utiliser soit en Tunisie, soit en France.
Avant la révolution, il faut bien reconnaître que l'État subventionnait beaucoup les hôtels et les tour operators pour qu'ils viennent en Tunisie.
Il faut à présent choisir notre combat. Je suis une fille de Tunisie, et je connais fort bien les sites de Douga, Bulla Regia, etc. Chacun comprend bien qu'il est impossible d'y accueillir des familles avec des enfants sans sanitaires.
Le Kef tunisien (Crédits : Discover Tunisia)
Je suis par ailleurs favorable au tourisme de masse, dont la Tunisie a besoin. Toutefois, les Russes, par exemple, ne respectent rien ! Je ne suis pas en train de dénigrer qui que ce soit, mais il faut leur rappeler qu'ils sont dans un pays musulman, avec certaines valeurs. Même si la Tunisie est ouverte, il y a des limites !
De la salle - Je suis correspondante de la radio publique tunisienne.
Je veux intervenir à propos d'une initiative menée par un Franco-Tunisien dans le cadre associatif, Mehdi Ben Cheikh, qui a amené à Djerba plus d'une centaine d'artistes de street art qui ont créé là-bas un musée à ciel ouvert, le Djerbahood.
Cet événement a eu des retombées médiatiques énormes, mais le ministère du Tourisme ne veut pas s'en occuper. On trouve des articles sur cet événement dans le New York Times , le Guardian , La Repubblica , mais également en Chine, à Singapour, et jusqu'en Inde.
Je demande aux institutions publiques et aux professionnels du tourisme de se pencher sur de telles initiatives, qui ont des suites très positives pour la Tunisie, même si certains ministères ne veulent pas en convenir.
De la salle - M. Mouldi MILADI - Je suis Parisien et Tunisien et très actif dans la société civile en général.
Je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui, et je remercie M. Jean-Pierre Sueur de nous avoir invités.
J'ai entendu MM. Bachmann et Soubielle dire des choses très intéressantes à propos du savoir et du partage.
Votre métier étant de faire revenir les grandes entreprises de tourisme en Tunisie, je vous conseille de signer un partenariat avec les maires en matière de propreté, ainsi que dans le domaine culturel.
M. Jean-Pierre SUEUR - La parole est aux intervenants.
Mme Charlotte DUMESNIL - On est tous d'accord pour travailler ensemble, faire connaître et développer le tourisme en Tunisie.
Bien entendu, le sujet de la taxe aéroportuaire nous intéresse. Cela permettra de proposer des tarifs encore plus bas et de faire venir davantage de voyageurs en Tunisie.
M. Jürgen BACHMANN - Les petits segments, le tourisme de niche et les produits associatifs sont des éléments importants qui méritent d'être pris en compte, mais où en est le marché français ? Avant la révolution, nous avions envoyé 900 000 clients en Tunisie. L'année dernière, ce chiffre est tombé à 90 000. Le chemin pour rétablir ces volumes est donc difficile. Les produits de niche ne peuvent combler une perte de plus de 800 000 clients.
Chaque chose doit se faire en temps voulu. On a cette année besoin de générer de la croissance et de faire en sorte que des milliers de touristes rentrent de Tunisie, ainsi que je l'ai dit, « avec la banane » et parlent de ce pays avec enthousiasme. Il nous faut donc compter sur eux, créer de l'emploi et du revenu. C'est l'objectif pour 2017.
Chacun travaille sur la question. Il faut gérer l'immédiat, anticiper les événements et les planifier.
M. Ghazi GHERAIRI - Les questions ont porté sur des points techniques.
Je réitère mon souhait que l'objectif de tous ceux qui s'intéressent au tourisme tunisien ne soit pas de restaurer ce que l'on a connu juste avant la crise !
M. René TRABELSI - Il existe en Tunisie, en matière de tourisme sportif, des problèmes d'infrastructures. Il faut des salles adaptées aux grandes équipes, et surtout un terrain agréé par la FIFA. Or, il n'en existe actuellement que deux en Tunisie, l'un à Sousse, l'autre à Gammarth. Ils ne sont pas toujours disponibles, car ils sont parfois attribués aux autres équipes - mais la volonté existe.
S'agissant des taxes aéroportuaires, je suis parmi les rares personnes qui ont appelé la ministre pour les conserver. Nous n'avons enregistré aucune plainte de touristes à ce sujet.
Ce problème était politique. Les timbres étaient vendus par nos représentants dans les hôtels. Cela constituait d'ailleurs une difficulté, car il fallait avancer au Trésor 2 000 ou 3 000 dinars de timbres, et nos représentants sur place, au lieu de s'occuper des touristes, devaient s'occuper de vendre les timbres.
Le problème de cette taxe relève du ministère des finances.
M. Richard SOUBIELLE - Nous avions anticipé cette décision en informant l'ensemble des agences de voyages, qui en avaient elles-mêmes informé les clients. Ceux-ci ont toutefois été très surpris de constater que la taxe de sortie n'existait plus. On nous a même reproché une mauvaise information.
M. René TRABELSI - On a demandé à Madame la ministre que cette taxe, prévue pour la promotion et l'environnement, soit réellement versée à ces deux secteurs.
Pour ce qui est de Djerbahood, je suis ravi que Singapour Airlines, l'une des meilleures compagnies au monde, ait fait figurer dans sa brochure des photos de l'opération.
Medhi Ben Cheikh a choisi mon village pour son projet. Je lui ai fait visiter énormément d'endroits avant de le convaincre de le monter dans mon village, Erriadh, où se trouve la Ghriba, l'une des plus anciennes synagogues du monde. Un grand pèlerinage va d'ailleurs y avoir lieu cette année. Il comportera énormément de Français. On y attend 2 000 personnes.
Il existe nombre de tour operators d'origine tunisienne en France. Depuis 2011, nous avons « mis le paquet » sur cette destination. Même si nous avons une entreprise à gérer, ce pays est cher à notre coeur. Parfois, nous avons peu de monde. Le ministère de l'Intérieur tunisien annule parfois la visite de certains sites. Nous sommes en effet soumis à une autorisation dans ce domaine. Certains de nos guides sont au chômage, mais je pense que ce genre de produit va à nouveau connaître le succès.
M. Richard SOUBIELLE - Quatre mots me viennent à l'esprit.
Le premier m'est inspiré de conversations que j'ai eues avec l'Agence foncière touristique, dans le cadre de Tunisia 2020 : dans les vingt ans qui viennent, l'espace sera une denrée rare et monnayable. Ne bétonnez donc pas la Tunisie. Faites comme les Espagnols, à Palma de Majorque, à une certaine époque. Ils ne reconstruisaient pas ce qu'ils détruisaient. Ils ont ainsi réorganisé l'espace.
J'avais suggéré que l'on crée en Tunisie un conservatoire du littoral pour protéger certaines zones - mais ceci a été peu apprécié.
En deuxième lieu, l'initiative privée doit prendre la tête des opérations. Je suis à l'origine de la construction de plusieurs complexes en Tunisie. Il existait autrefois un « guichet unique » auprès duquel il fallait effectuer une démarche administrative pour obtenir un verre ou une ampoule. Aujourd'hui, les frontières sont tombées et les choses doivent continuer en ce sens. Le secteur public n'a qu'un rôle, celui de favoriser, d'entretenir et de dynamiser l'initiative publique.
Pour ce qui est du tourisme social, certains de ceux qui se sont exprimés tout à l'heure ont fait du bon travail avec les syndicats français - si tant est qu'ils aient pu ramener beaucoup de tourisme pendant la période de crise.
Toutefois, il existe aussi un tourisme social en Tunisie. Le Tunisien est-il le pompier de service ? Doit-on l'appeler à chaque fois que le pays rencontre un problème pour occuper les hôtels qui sont vides ? Lui fermera-t-on la porte quand l'activité repartira ?
Certains hôtels sont en fin de vie. Pour d'autres, le plan de financement ne peut aboutir. Il faut reconvertir ces établissements pour les affecter au tourisme social tunisien. C'est facile à faire. Il suffit que les entreprises réalisent une ponction sur les salaires pour dégager des budgets qui permettront au travailleur tunisien, en aménageant la tarification, de venir dans son pays au même titre que les étrangers. C'est l'avenir du tourisme.
C'est ce qu'a fait l'Espagne : si elle n'avait pas agi ainsi, il y aurait eu une révolution et un rejet des étrangers. Les Espagnols ont été spoliés. Ils n'avaient plus accès à leur littoral. C'est grâce au gouvernement espagnol que les équilibres ont pu se faire.
Quoi de plus agréable que de partager ? Cela a en même temps une vertu éducative pour les Tunisiens, qui ne se jetteront pas sur les buffets, comme les Russes le faisaient lorsque rideau de fer est tombé.
Le partage est fondamental : si vous ne partagez pas, vous n'obtiendrez jamais que le travailleur de base s'engage. Il faut servir sans avoir le sentiment de s'asservir. C'est une disposition humaine très difficile.
Il y a quelques années, les Américains avaient compris comment fonctionnait le service : on l'apprenait, puis on l'appliquait.
Le tourisme, c'est l'indépendance-association. Aujourd'hui, dans le monde global dans lequel nous vivons, il faut être associé, mais surtout travailler en toute indépendance.
Grâce aux nouvelles technologies, l'organisation de la programmation touristique peut se faire dans les pays que fréquentent les vacanciers. Avant les télex et les mails, on disposait de pigeons voyageurs. Les jeunes des pays de la rive sud de la Méditerranée sont dotés d'une formidable énergie. Or, ils n'ont souvent rien à faire, et cherchent à s'expatrier. Internet est un moyen de les faire travailler en réseau dans de grandes centrales touristiques, qui aideront les grands tour operators et le consommateur européen.
M. Jean-Pierre SUEUR - Nous allons diffuser une vidéo intitulée « Tunisie passion », réalisée par Orange Tunisie pour le ministère du tourisme tunisien.
Y ont notamment participé de jeunes ingénieurs tunisiens et des professionnels du tourisme culturel.
Application Tunisie Passion (Crédits : Orange Tunisie)
Nous accueillons à présent les participants de la seconde table ronde.
TABLE RONDE 2 : LA TUNISIE AUTREMENT
Table ronde animée par M. Jean-Pierre SUEUR, Président du groupe d'amitié France-Tunisie du Sénat
Ont participé à cette table ronde :
M. Mohamed Raja FARHAT, écrivain, acteur, metteur en scène et réalisateur tunisien
Mme Asma ENNAÏFER, Directrice de l'innovation d'Orange Tunisie
M. Hakim TOUNSI, Président d'Authentique International
M. Mohamed GHANNEM, Député des Tunisiens de France, Chef de service de cardiologie à la Fondation Léopold-Belland
M. Gilles BÉVILLE, Président de l'Association pour le tourisme équitable et solidaire (ATES)
M. François NAVARRO, Directeur général du Comité régional du tourisme Paris-Île-de-France
M. Jean-Pierre SUEUR - Je veux tout d'abord citer :
M. Mohamed Raja Farhat, écrivain, homme d'art et de culture, de théâtre, de télévision, de cinéma, réalisateur et producteur. Il est surtout un grand intellectuel tunisien. Permettez-moi, cher Mohamed, de vous dire que vous nous faites un grand honneur en acceptant de participer à cette table ronde.
Je vous présente également Mme Asma Ennaïfer, directrice de l'innovation d'Orange Tunisie, M. Hakim Tounsi, président d'Authentique International, tour operator spécialisé dans la diversification de l'offre touristique tunisienne et sa montée en gamme, M. Mohamed Ghannem, député des Tunisiens de France, chef de service de cardiologie, qui préside la Fédération des associations franco-tunisiennes et représente toute la Tunisie et le peuple tunisien. J'ajoute que nous devons tous être unis en faveur du développement du nouveau tourisme en Tunisie, car nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres.
Nous accueillons également MM. Gilles Béville, président de l'Association pour le tourisme équitable et solidaire (ATES) et François Navarro, directeur général du Comité régional du tourisme Paris-Île-de-France. La parole est à M. Raja Farhat.
M. Mohamed RAJA FARHAT - Monsieur le président, c'est un plaisir que d'assister à ces échanges.
Nous avons appris beaucoup des aventures, des entreprises et des actions des uns et des autres dans ce domaine complexe et si vital pour la Tunisie qu'est le domaine du tourisme.
Le tourisme signifie le dialogue, la découverte de l'autre.
Nous ne ferons pas faire découvrir la Tunisie au président Sueur. Il sait, comme tous les amoureux, les infimes détails de sa longue histoire. Ce petit bout de terre qu'est le belvédère de l'Afrique constitue une aventure humaine bien méditerranéenne qui ne connaît pas les frontières.
Nous sommes aux confluences de Carthage et de Rome, mais également de Kairouan et de la Sicile, qui fut - le sait-on assez ? - kairouanaise durant deux siècles et demi.
Le cimetière musulman de Kairouan compte, dans sa partie ancienne, autant de tombes de chrétiens siciliens décédés à Kairouan pour leurs affaires et leur commerce que de tombes de musulmans de Kairouan.
Voici une ville ex nihilo . En effet, Kairouan n'existait pas : c'est le conquérant arabe Oqba Ibn Nafaa qui, en 670, a fondé la ville qui s'est ensuite développée de façon très étrange.
Elle ne s'est en effet pas singularisée par l'empreinte unique de l'islam. L'école de médecine était juive. Isaac ben Salomon Haisraeli en était le maître. Son élève, le Kairouanais Ibn Jazzar, a quant à lui prospecté de nouveaux horizons dans le domaine de la médecine. Ses oeuvres ont été traduites en latin en l'an 1000. Elles ont nourri cette école de médecine fondatrice de toute la civilisation de la Renaissance qu'était l'école de Salerne, au sud de Naples.
C'est alors que les intellectuels de la Renaissance ont adopté les grands esprits de la culture arabe, comme Averroès l'Andalou, maître du rationalisme, traducteur d'Averroès, qui est mort vilipendé et dont les livres ont été brûlés à Marrakech par le grand théologien rétrograde de cette ville. Dante Alighieri a décrit le paradis des Antiques selon Averroès, qui, après sa mort, a été convoyé à dos de mulet jusqu'à Cordoue pour y être enterré auprès des siens, veillé par Ibn Arabi, tous les grands esprits rationalistes et les grands poètes mystiques de l'époque. C'est notre aventure commune.
Si je parle de Kairouan et de l'Andalousie, c'est parce qu'on retrouve là tous les peuples de l'ouest méditerranéen. Lorsque nous parlons de l'Andalousie, nous parlons d'une terre qui est nôtre spirituellement. Tout l'esprit rationaliste dont nous avons hérité avec Ibn Khaldoun, notre grand historien, vient de l'Andalousie et de cet héritage monumental, tout comme il vient de grands maîtres de la culture chrétienne : Tertullien, Saint Augustin.
Il me vient l'envie de vous narrer à nouveau le récit des figues. Caton l'ancien, le terrible sénateur romain, un des personnages les plus influents du Sénat de Rome, s'est rendu en mission d'études à Carthage, après la défaite d'Hannibal et son départ. Il voulait savoir si Carthage avait plié et, par le poids des impôts que Rome lui avait imposés, était enfin prêt à admettre sa défaite.
Il a trouvé une ville prospère. Le commerce était de nouveau profitable, la bourgeoisie carthaginoise s'était installée dans de nouveaux quartiers, les remparts étaient de plus en plus imposants : 32 kilomètres d'une grande muraille, avec des réserves d'eau dessous, avec des ruelles et des rues pavés, et même le tout-à-l'égout !
Nous sommes au deuxième siècle avant Jésus Christ, et cette puissance, ce génie de Carthage va effrayer Caton, au point que le vénérable sénateur va acheter quelques bonnes figues chez un marchand du port punique de Carthage...
Une fois revenu au Sénat, Caton, qui avait conservé quelques figues dans sa toge, en offrit au plus jeune et au plus vieux des sénateurs :
- Goûtez ces figues, et dites-moi ce que vous en pensez...
- Mais elles sont exquises, sénateur !
- Avez-vous dégusté le miel de ces figues de Carthage ?
- Oui, sénateur, nous vous en remercions.
- Ce miel, c'est le venin de Carthage, c'est le poison de Carthage ! Ces figues sont encore fraîches. Cela signifie que le danger est proche. Détruisez Carthage, sinon Carthage détruira Rome !
Plus tard, une histoire bien plus pacifique verra le jour...
Ce fut la première apocalypse de l'Antiquité. La guerre de Troie fut moins spectaculaire et tragique que la destruction de Carthage.
Quelques siècles plus tard, de jeunes étudiants carthaginois, qui aimaient bien boire, la nuit, après leurs études, dont un certain Augustin, natif de Thagaste - Souk Ahras, dans l'actuelle Algérie - couraient dans les ruelles de Carthage, dans ces escaliers très bariolés et très fleuris.
Sur la devanture d'une maison de Carthage se trouvait un panier de figues très appétissantes. Quand on a bu, on aime bien déguster quelque chose de sucré. Saint Augustin et ses camarades se saisissent du couffin, le volent et se mettent à courir comme des fous dans les ruelles.
Plus tard, quand il ira à Milan, sa mère Sainte Monique lui ayant toujours parlé d'une possible conversion au christianisme, il se rappellera de ce larcin comme d'un péché inoubliable.
Les grands spécialistes de l'histoire augustinienne, qui étudient et réexposent les oeuvres de ce fondateur de l'église catholique universelle parlent toujours d'un « magnifique larcin ». C'est la première fois que j'entends de bons chrétiens louer un vol !
J'ai toujours aimé le goût des figues tunisiennes.
Si j'évoque tout ceci, ce n'est pas pour exposer ma science - tout à fait limitée - mais parce que tout à l'heure, en écoutant les débats, je me demandais ce qu'il manque au tourisme tunisien : il lui manque une dimension culturelle essentielle, une culture générale, un métier, celui de médiateur.
Je ne parle pas du guide qui vend ses tapis dans les souks et qui prélève sa dîme, mais d'un médiateur qui met en confiance le couple de retraités de Limoges qui arrive à Sufetula, et à qui personne n'explique ce qu'est Sufetula.
Nous nous trouvions à Sufetula il y a quelques années, avec un groupe d'historiens, autour de Fathi Béjaoui, un archéologue de grand talent qui a restauré Sufetula, la refondant pratiquement.
Arrivent deux bus de touristes venus de Grenoble :
- Que faites-vous ici ?
- Nous sommes venus pour suivre un séminaire consacré aux steppes de l'ouest tunisien.
- D'où venez-vous ?
- De Rhône-Alpes.
- Savez-vous que le consul romain de Rhône-Alpes venait de Sufetula et qu'il a gouverné la région durant vingt ans ? Il était Tunisien et Berbère, naturellement de culture latine.
Rome avait en effet le génie de convertir les colonisés en citoyens romains, notamment grâce à la culture latine...
Où sont les médiateurs du tourisme tunisiens qui vont expliquer ceci aux centaines de milliers de touristes français, italiens ou espagnols qui vont affluer avec la reprise - Inch'Allah ?
J'ai fait le tour de tous les hôtels de Tunisie. J'ai écouté ce que racontent les guides et les animateurs : c'est absolument désastreux ! Il y a un manque de culture et une cécité des tour operators , qui ne sélectionnent pas assez les intervenants.
À Istanbul, ce sont les étudiants des facultés de lettres et des sections linguistiques qui sont chargés, après apprentissage, de conduire les différents groupes de touristes.
Je me rappelle d'une jeune fille qui nous faisait visiter Dolmabahçe, le fameux palais du Bosphore, pour nous montrer la plus grande salle de bal d'Europe, que les femmes ne pouvaient admirer que depuis les alcôves. C'est elle qui nous l'a expliqué, avant d'éclater en sanglots en nous présentant le lit où était mort Mustapha Kemal Atatürk, père de la nation !
De grâce, exigeons des médiateurs, ainsi qu'une nouvelle formation, rapide, accélérée. Nous ne manquons pas d'historiens, agréables, sympathiques, synthétiques, qui pourront leur communiquer cet esprit sain, ces détails qui permettront aux touristes de mieux comprendre la terre qu'ils visitent et d'assimiler Saint Augustin, Kairouan et Carthage.
Beja (Crédits : Discover Tunisia)
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci sincèrement de nous avoir apporté cet éclairage, qui restera en nos coeurs.
Il existe en Tunisie treize universités, sans compter les écoles d'ingénieurs, etc. La Tunisie a réalisé un effort énorme en matière d'éducation.
Il est dommage de se priver des étudiants qui ont fait des études d'histoire ou de lettres et qui ne trouvent pas d'emploi pour présenter les merveilles de la Tunisie et son histoire aux touristes.
Vous ouvrez là une piste. Pour résumer : ce qui doit être un plus grand atout encore pour développer le tourisme en Tunisie, ce doit être sa dimension culturelle.
La parole est à Mme Asma Ennaïfer, directrice de l'innovation et des relations extérieures d'Orange Tunisie.
Mme Asma ENNAÏFER - Mesdames et Messieurs, chers compatriotes, je suis très honorée d'être ici aujourd'hui, et je remercie Monsieur le président de son invitation.
Orange Tunisie est un opérateur téléphonique. Pourquoi un opérateur téléphonique travaille-t-il sur le tourisme ? Nous avons créé un centre de développement en 2010. Il est gratuit et ouvert à tous. On y forme de jeunes étudiants en recherche d'emploi aux techniques de l'innovation et aux nouvelles technologies. On fait travailler ces jeunes sur des projets citoyens, dont « Tunisie Passion », application mobile destinée à promouvoir le tourisme culturel en Tunisie.
Ces étudiants ont été encadrés par nos experts pendant plus d'un an - et pas seulement sur le plan technologique. On a fait travailler plusieurs personnes passionnées par la Tunisie sur tout le territoire pour promouvoir le tourisme culturel, d'où le nom de « Tunisie Passion ».
La Tunisie est connue en tant que destination balnéaire. Elle est cependant avant tout culturelle. Nous disposons de beaucoup d'atouts dont nombre d'autres pays ne bénéficient pas. Nous avons tout intérêt à promouvoir le tourisme culturel si l'on veut toucher la catégorie de touristes que l'on souhaite. La participation d'Orange est donc responsable, solidaire et humaine.
« Tunisie Passion » peut être téléchargée partout dans le monde sur Android ou iOS, en sept langues - chinois, russe, français, anglais, arabe, espagnol et italien. Elle est totalement gratuite. C'est la participation d'Orange à la promotion de la Tunisie.
Cette application recense tous les sites archéologiques et culturels de Tunisie, mais pas seulement. On peut également y acheter son billet d'avion, réserver son hôtel, connaître le nom de toutes les boutiques de souvenirs tunisiennes, commander un hammam ou un spa. Cette application présente une offre touristique de qualité. C'est aujourd'hui la meilleure image de la Tunisie parmi les applications mobiles.
Nous avons également travaillé sur une autre application appelée « Artisans d'Art », qui doit sortir en avril prochain - Inch'Allah ! Celle-ci est destinée à promouvoir tous les artisans du territoire tunisien.
Nous avons associé à cette tâche la société civile ainsi que des étudiants. Ce projet a duré plus d'un an. Cette application sera lancée en avril prochain, sur Android et iOS. Elle est également totalement gratuite.
Nous assurons la promotion de l'artisanat tunisien dans les domaines de la gastronomie, des produits de terroir, des tapis, des couffins... La qualité des produits figurant sur l'application est certifiée par Orange. Il est possible de contacter directement les artisans, pour qui cette application constitue une aide pour vendre leurs produits et se faire connaître.
M. Jean-Pierre SUEUR - Nous allons à présent regarder la vidéo d'Orange qui présente cette application.
La parole est à M. Mohamed Ghannem, député des Tunisiens de France, cardiologue, président de la Fédération des associations franco-tunisiennes.
M. Mohamed GHANNEM - Le sujet qui est le mien est celui du tourisme médical.
Parmi les pays d'Afrique et du Moyen Orient, la Tunisie est la première destination en matière de tourisme médical.
En 2013, 400 000 étrangers ont choisi de se faire soigner en Tunisie. Ceci a rapporté au pays 190 millions de dinars, alors qu'en 2003, nous n'avions reçu que 40 000 patients pour 20 millions de dinars. La progression est exponentielle. À l'époque, les Libyens représentaient 85 % des étrangers soignés en Tunisie, soit 300 000 personnes.
Le second rang est occupé par les Africains subsahariens, qui sont au nombre de 16 800 et représentent 4,5 % de la population étrangère soignée en Tunisie. Les Algériens les suivent de près, avec 116 700 personnes, soit 4 % de la population étrangère. Enfin, les Mauritaniens sont environ 7 000, soit 1,8 % de la population étrangère. Les Européens représentent quant à eux 11 200 patients soignés en Tunisie, soit 3 % de la population étrangère.
En France et en Europe, le système de santé est généralement performant. Les patients, qui bénéficient de très bons hôpitaux, d'une haute compétence médicale et sont pris en charge à presque 100%, ne vont donc pas chercher ailleurs.
Ils ne viennent chez nous que pour les pathologies pour lesquelles ils ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale - ou très peu - comme la chirurgie esthétique ou les soins dentaires. On commence même à avoir des patients britanniques qui souffrent de problèmes orthopédiques. À Londres, alors qu'on est dans un pays européen, il faut attendre un an avant d'avoir une prothèse de la hanche totale.
Les étrangers qui viennent chez nous sont-ils bien soignés ? La réponse est oui. J'en suis témoin, la formation médicale tunisienne est excellente. Tous mes collègues français le reconnaissent.
Est-on bien organisé pour cela ? Je pense que le système est perfectible. Il faut absolument centraliser les demandes. Il ne faut pas que ce soit le taxi qui décide où emmener le patient étranger ! Il faut également un comité d'affectation qui envoie le patient étranger là où il sera le mieux soigné.
Enfin, il faut un comité d'éthique. Sans éthique, pas de médecine. Il faut absolument que les médecins tunisiens respectent l'éthique médicale pour que les gens reviennent.
Quels sont les axes à améliorer ?
En premier lieu, je pense que l'avenir réside dans les maisons de retraite médicalisées. En Tunisie, leur prix est très peu élevé.
Il faut également s'ouvrir vers l'Afrique. J'ai l'honneur de présider l'Association francophone pour la prévention cardiaque. Je me suis rendu à ce titre dans beaucoup de pays africains. J'ai constaté que les médecins africains ont beaucoup de difficultés administratives et matérielles pour venir se former en France et en Europe en général.
Les patients africains, même quand ils en ont les moyens, ont des problèmes financiers et administratifs pour venir se faire soigner ici. On a donc élaboré un projet tripartite qui inclut la Tunisie, l'Afrique de l'Ouest - soit douze pays - et le monde francophone. À cette fin, il faut que les douze pays africains envoient leurs médecins en formation en Tunisie. Nous, francophones, nous engageons à aller enseigner en Tunisie de façon bénévole.
Il faut que le diplôme délivré le soit à la fois par la France et par la Tunisie. Les programmes, les enseignants, les diplômes sont les mêmes, à ce point près que la formation a lieu en Afrique, et en particulier en Tunisie.
Les médecins africains que l'on va former seront les vecteurs du tourisme médical en Tunisie car, satisfaits de leur enseignement, ils enverront leurs patients en Tunisie, tout comme les médecins formés en France sont reconnaissants envers votre pays et envoient leurs patients dans l'hexagone.
Je ne peux finir sans évoquer deux points, dont celui des Tunisiens résidant en France qui tombent malades en Tunisie et qui ont beaucoup de mal à se faire rembourser en France. Les patients en fin de vie sous chimiothérapie peuvent être soignés chez eux, en Tunisie, entourés des leurs. Pourquoi les garder en France, loin de leur famille ?
Enfin, la Tunisie est un centre culturel qui sert de vitrine au pays. Cela permet aux Tunisiens de se réunir, de s'organiser, et de réaliser des manifestations pour mieux aider leur pays.
M. Jean-Pierre SUEUR - Vous avez traité d'un sujet très important et je vous en remercie.
La parole est à M. Hakim Tounsi, président d'Authentique International. Les voyages que vous proposez seraient-ils plus authentiques que ceux de vos concurrents ? La question n'est pas facile ! Vous allez sûrement nous convaincre...
M. Hakim TOUNSI - J'aurais aimé avoir plus de temps pour vous parler du tourisme tunisien. Je vais donc tenter de vous transmettre un témoignage. Tout ce que je vais dire, je ne l'ai pas lu, on ne me l'a pas raconté, je ne l'ai pas deviné, je l'ai vécu.
On m'a demandé de parler de la Tunisie authentique, du tourisme alternatif et du tourisme social. Je vais m'y essayer - et j'espère vous convaincre.
Authentique International a travaillé une vingtaine d'années avec le Sud tunisien. Je ne peux pas aujourd'hui, dans cette institution chargée d'histoire, de symboles et de noblesse, ne pas penser à mes amis du Sud tunisien ni leur rendre hommage.
Je vais à présent revêtir le chèche du Sud tunisien, pour honorer sans démagogie tous ceux avec qui j'ai travaillé durant vingt ans dans la Tunisie authentique - l'autre Tunisie. Voici donc comment on se transforme en Mérazigue de Douz, d'Es Sabria, d'El Faouar, ou de Kébili, tout ce Sud tunisien que j'adore et auquel je rends hommage...
Tamaghza (Crédits : Discover Tunisia)
La révolution a constitué un acquis extraordinaire. Nos amis du Sud tunisien l'ont peut-être payé plus que d'autres. En effet, le tourisme saharien, dans lequel Authentique international était spécialisé a subi beaucoup de dégâts. Il est actuellement à l'arrêt. Les vols internationaux sur Tozeur ont cependant repris depuis huit mois, et nous espérons revoir des vols internationaux sur l'aéroport de Tozeur-Nefta pour redonner une dynamique au tourisme tunisien.
Je vais essayer d'expliquer à M. Sueur ce qu'est cette Tunisie authentique. Personnellement, j'ai eu la chance de suivre des études de troisième cycle en économie et en macroéconomie en France, avant de retourner en Tunisie pour travailler à la Banque nationale de développement touristique. J'ai donc trempé dans le tourisme dès l'âge de 21 ans. J'ai contribué pendant cinq ans au financement du tourisme tunisien, dont je connais l'histoire.
J'entends aujourd'hui beaucoup de personnes - que je remercie - émettre des suggestions, mais je constate - et c'est tout à fait normal - qu'elles ignorent beaucoup de choses.
Le tourisme tunisien n'est pas ce que l'on pense. Le tourisme tunisien ne va pas si mal qu'on le dit. Il passe par une période conjoncturelle compréhensible. La révolution a provoqué un affaiblissement de l'État après le départ des dirigeants en place. Ceci a créé un vide, mais la démocratie s'organise. Les choses ne peuvent se faire du jour au lendemain.
L'État est affaibli et ses programmes ne connaissent pas de continuité. Je veux toutefois rendre hommage aux équipes de l'Office national du tourisme tunisien. Avant Ben Ali, l'ONTT comportait déjà une cellule sérieuse qui explorait beaucoup de domaines. Peu de Tunisiens le savent, mais j'en ai été le témoin, de 1982 à 1987, époque à laquelle je travaillais à la Banque nationale de développement touristique.
Contrairement à ce que beaucoup pourraient penser, ce travail sur la diversité touristique ne date pas d'hier. Des équipes travaillent depuis longtemps sur le balnéaire, la culture, le Sahara, le thermalisme - bien avant la thalassothérapie et le bien-être - le médical, le golf, la plaisance, les congrès.
Le tourisme tunisien a commencé avec le balnéaire. En tant que professionnel, je ne suis pas d'accord avec le fait que le tourisme balnéaire serait péjoratif. La Tunisie n'exploite même pas 5 % de son potentiel balnéaire. Nous disposons de 1 300 kilomètres de côtes et plus de 600 kilomètres de plages de sable fin qui n'existent nulle part ailleurs. La plage de Kélibia est classée comme la sixième plus belle plage du monde 9 ( * ) - et je ne parle même pas de Mahdia, Rafraf, etc. Toutes les plages tunisiennes sont splendides. Qu'en avons-nous fait ? Beaucoup de choses sont à réaliser pour monter en gamme.
Le développement du tourisme tunisien peut se faire à l'horizontale, mais il peut également se faire à la verticale sur chacun des créneaux que je viens de citer, y compris le balnéaire.
Notre potentiel balnéaire naturel est extraordinaire ! Tous les architectes diplômés par le Gouvernement (DPLG), tous les promoteurs immobiliers disposaient de terrain et de facilités de marché mais n'ont pas fait ce qu'il fallait pour l'aménagement de nos plages. Il n'y a aucune créativité. Ceci reste à mettre en oeuvre.
Je vois la partie vide du verre, mais c'est pour mieux la remplir et dire à notre jeunesse qu'elle peut y contribuer. Nous avons fait ce que nous avons pu, et nous l'avons fait sérieusement.
Sur le plan macroéconomique, le tourisme tunisien a été profitable à la Tunisie, même s'il y a eu un problème de répartition au niveau de l'État, le système lui ayant permis d'intervenir pour favoriser financièrement telle ou telle région.
Des instructions avaient été données après la chute du mur de Berlin. La libéralisation à outrance a interdit à l'État d'intervenir dans les affaires. On a voulu appliquer la transparence. Ce sont des éléments qui ne relèvent pas du sujet que nous traitons, mais qui le touchent.
Quel secteur peut s'enorgueillir d'avoir fait travailler le bâtiment durant 30 ans ? Quand le bâtiment va, tout va ! N'importe quel banquier vous le dira.
Le tourisme a été une aubaine pour la Tunisie. Il a démarré avec le balnéaire. Bourguiba, dix ans à peine après l'indépendance, a chargé l'un de ses collaborateurs d'accompagner feu Gilbert Trigano, après qu'il a réalisé son premier village en Sicile, pour qu'il développe avec Gérard Blitz le tourisme sur la côte tunisienne. Il a créé Djerba la fidèle et Djerba la douce bien avant les années 1970.
La Tunisie a accompagné les mouvements de libération après mai 1968, la libération de la femme, les droits de la jeunesse. Jeunes Sans Frontières a permis à tous les autres tour operators de s'implanter : Nouvelles Frontières, Fram, Jet Tours et les clubs Eldorador. Cette période de croissance a profité aussi bien à la France qu'à la Tunisie.
Le tourisme social et les « vacances pour tous » ont démarré en Tunisie, et ont touché toute la France par le biais des comités d'entreprise, des associations, des conseils généraux. Il a connu de très beaux jours dans notre pays.
En 2010, sur 1,4 million de clients français, plus de 500 000 étaient issus des comités d'entreprise et du monde associatif. Cette clientèle s'est toutefois évaporée en raison de la peur et de l'insécurité.
Quelqu'un a évoqué l'initiative que nous avons eue l'an passé avec les syndicats destinée à constituer un comité d'appui pour le retour du tourisme associatif en Tunisie. C'est une réussite totale. Nous enregistrons à présent des retours de groupes français.
La Tunisie est un pays divers. C'est un pays ami, ouvert, pluriel, millénaire. Le tourisme n'est pas qu'une locomotive de l'économie. Ce n'est pas un secteur économique majeur : le tourisme en Tunisie est une vocation naturelle, historique, une passion. Le produit est riche et varié. Quand on va en Tunisie, on ne s'ennuie pas.
Je finirai par une anecdote en citant ce groupe de vacanciers parti pour une destination que je ne nommerai pas, où l'équipe d'animation a imaginé une excursion pour aller voir une tortue de mer échouée sur la plage à 4 heures du matin - en fait un animateur pesant 150 kg qui s'était déguisé en tortue marine ! Je ne vous dis pas ce qu'il a pris ! On ne risque pas de voir cela en Tunisie. La Tunisie est plurielle et très riche.
Enfin, je considère le tourisme alternatif comme complémentaire au tourisme classique. Je n'aime pas le mot de « tourisme de masse ». Je ne comprends pas qu'il soit considéré comme péjoratif : la Tunisie a toujours été là pour répondre à la demande. On ne va pas nous reprocher notre réussite alors que la masse a estimé que notre produit était bon !
J'attire votre attention sur le fait que la réussite du tourisme alternatif est fulgurante. Aujourd'hui, 253 unités vivent de l'atout majeur que constituent la beauté, la nature, les saveurs, les produits du terroir, l'artisanat. Il s'agit des gîtes, des maisons d'hôtes, des hôtels de charme, qui fleurissent un peu partout en Tunisie. Attention toutefois à la protection du tissu social et du patrimoine de la Tunisie ! On n'a pas su protéger le littoral, il faut savoir protéger l'intérieur du pays.
J'ai toujours dit que j'aurais préféré que les bus et les 4 x 4 qui viennent du Chott el-Jérid ne passent pas par Souk Lahad et Kébili, mais empruntent une rocade et se garent ensuite pour utiliser des calèches ou d'autres moyens pour visiter le pays. Prenons garde à la protection de l'environnement !
M. Jean-Pierre SUEUR - Vous avez parlé avec force de tout ce qui vous tient à coeur et je vous en remercie.
Nous allons à présent entendre avec intérêt M. Gilles Béville, président de l'Association pour le tourisme équitable et solidaire.
M. Gilles BÉVILLE - J'interviens au nom d'un tourisme dit « alternatif » pour apporter quelques indications sur le Forum international du tourisme solidaire et du développement durable (FITS), qui va se tenir dans quelque temps dans le Sud tunisien 10 ( * ) . Il mérite en effet que l'on s'y attarde et que les Tunisiens y participent très largement...
Je suis président d'une association qui regroupe des voyagistes associatifs français qui promeuvent des formes de tourisme solidaire et équitable.
Ces deux termes sont importants. Ils recouvrent tout ce qui concerne l'appui et l'aide au développement des communautés et se situe non dans une logique de rentabilité maximum, mais de détermination des prix, de façon à ce que chacun y gagne sans que qui que ce soit accapare une partie de la manne au détriment des autres.
Il s'agit d'un tourisme de niches, très loin du tourisme de masse. Seules quelques milliers de personnes en France voyagent sous cette forme, mais elles laissent sur les territoires un impact relativement fort, dont on cherche à étendre les formes.
De petits groupes sont hébergés chez l'habitant, dans des gîtes, ou de petits sites hôteliers tenus par des locaux. On est là hors des sentiers du tourisme international. On tente de maximiser les retombées sur l'économie locale en essayant de valoriser les productions locales artisanales, agroalimentaires, culturelles, les transports locaux, etc.
Ce schéma existe aujourd'hui dans un certain nombre de pays, à des niveaux relativement marginaux, mais ces formes de tourisme vont produire de plus en plus d'effets.
L'Amérique latine est pionnière en ce domaine - Pérou, Équateur, Nicaragua, Mexique. On peut également citer le Sénégal où, dans les années 1970, le tourisme chez l'habitant géré par des communautés locales s'est développé en Casamance. Malgré les vicissitudes politiques, ce modèle fonctionne et se développe.
Ce tourisme solidaire est l'objet du FITS qui aura lieu à partir du 23 mai à Tataouine, dans le Sud tunisien. Ce forum est destiné à faire en sorte que les différents acteurs de cette forme de tourisme se rencontrent - Tunisiens ou autres.
Ce modèle a vu le jour en 2002 au sommet mondial du développement durable de Johannesburg. La France, grâce à l'appui d'un cabinet d'études français, avait pu mettre en place un premier atelier d'études et d'analyses du commerce et du tourisme équitables.
À partir de là, un groupe de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, dont le fondateur et coordinateur est ici présent, a eu l'idée d'essayer de réunir régulièrement toutes ces personnes pour qu'elles échangent au travers de toutes les expériences ayant cours dans le monde.
Ces forums ont lieu régulièrement. Le premier s'est tenu à Marseille en 2003. Un autre a eu lieu au Mexique en 2006 sous l'égide de l'Organisation mondiale du tourisme, de l'UNESCO, et d'un certain nombre d'autres organisations, soutenu par le ministère français des affaires étrangères.
En 2008, il se tenait au Mali. Cet exemple est intéressant, car vous connaissez tous la situation actuelle de ce pays, où il n'y a pas de tourisme. Les opérateurs du tourisme solidaire tiennent cependant le cap, notamment le long du fleuve Bani. Ils se sont reconvertis dans le tourisme de séminaires et le tourisme local, sans l'aide d'accords internationaux mais avec un mode de gestion qui rend cette activité actuellement viable.
Un forum méditerranéen a également eu lieu en 2008 à Marseille. En 2012, il se tenait au Maroc, puis au Nicaragua en 2014.
Le forum de Tataouine est destiné à réunir les opérateurs de la Méditerranée autour d'un certain nombre d'expériences qui se déroulent en Amérique latine et dans des pays du continent africain.
Chose remarquable, le fonds de responsabilité sociétale des entreprises travaillant dans le domaine du pétrole dans le Sud tunisien appuie et finance ce forum.
La mise en avant de ces formes de tourisme est, pour nous, fondamentale. Celles-ci s'appuient sur des structures comme, en France, « Accueil paysan » ou « Bienvenue à la ferme », et ont permis de participer au renforcement d'une économie rurale en déshérence, qui avait du mal à prendre le tournant des années 1970.
Ces formes de tourisme impliquant les partenaires locaux ont permis à ces contrées de se développer et aux populations des différentes zones du pays d'en partager les retombées.
M. Jean-Pierre SUEUR - Nous allons enfin entendre M. Navarro, directeur régional du Comité régional du tourisme Paris-Île-de-France (CRT-Île-de-France).
Monsieur Navarro, vous dirigez une instance très importante. Quelles conclusions tirez-vous de ce colloque ?
M. François NAVARRO - Merci pour votre invitation.
Paradoxalement, il n'existait pas d'accord de partenariat entre l'Île-de-France, première région touristique de France et d'Europe, qui compte 12 millions d'habitants, et la Tunisie.
C'est chose faite depuis mi-février, à l'occasion d'un voyage de la présidente de la région à Tunis. Cet accord a été signé entre l'Île-de-France, le Grand Tunis et les quatre gouvernorats de Tunis, Ariana, Ben Arous et La Manouba. Il porte sur des sujets comme le développement économique, l'innovation, le développement durable et le tourisme, sujet qui nous importe aujourd'hui.
Nous avons pu entamer des discussions dans le cadre d'une rencontre entre Mme Elloumi Rekik et la présidente de la région, puis avec le directeur général de l'époque de l'ONTT, appelé depuis à de nouvelles fonctions 11 ( * ) .
Nous allons poursuivre ces discussions avec Tunis, notamment sur les sujets liés à la formation. Certains d'entre eux nous intéressent, comme celui sur les métiers de l'hôtellerie, la question de la qualité de l'accueil, ou des « petits métiers », extrêmement importants dans l'industrie touristique. Il existe là un enjeu.
Notre hôtellerie est mobilisée pour accueillir des stagiaires. Il serait également souhaitable que l'on ait un échange sur la formation des formateurs.
Le destin d'une destination touristique comme Paris-Île-de-France, dont on dit souvent qu'elle est la première au monde, même si les chiffres varient, est lié à celui de la Tunisie, tout d'abord parce que des événements ont eu lieu sur nos sols respectifs et ont eu un impact important. L'année dernière Paris et l'Île-de-France ont perdu 1,5 million de touristes, soit environ 1,5 milliard d'euros.
Les débats sur le tourisme de masse, par opposition au tourisme de niches, m'a particulièrement intéressé. Je pense qu'il faut y être extrêmement attentif. On avait pris l'habitude de considérer que les touristes venaient naturellement à Paris. C'est aujourd'hui terminé, et la compétition avec les autres destinations françaises est très forte.
On a évidemment besoin du tourisme de masse, et il faut insister sur l'urgence qui existe à venir visiter nos régions. Pour Paris, ce ne peut être pour voir la Tour Eiffel, la Seine, le Louvre et toutes ces richesses, dont on a certes besoin, mais qui seront encore là dans 25 ans. Il faut donc raconter une histoire, à laquelle les visiteurs pourront s'identifier. C'est la même chose pour la Tunisie.
La région, comme le commissariat régional au tourisme (CRT), ont besoin d'une Tunisie forte et d'un retour des touristes en Tunisie. Nous essaierons de vous y aider à notre niveau, en mettant à disposition la collectivité d'Île-de-France et le CRT.
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci à chacun.
Y a-t-il des questions ? On pourra les poser autour du verre de l'amitié...
M. Maher Ben Azzouz désirait adresser une question à Mme Elloumi Rekik. Nous prenons l'engagement de la lui transmettre.
M. Maher BEN AZZOUZ - Lors d'un point de presse récent, à Tunis, Mme la ministre a lancé les assises du tourisme, qui existent déjà en France.
Mme la ministre pourrait-elle nous apporter davantage d'informations à ce sujet ? J'ai en effet appris que des assises allaient bientôt avoir lieu à Paris.
M. Jean-Pierre SUEUR - Les députés tunisiens ici présents lui poseront la question. La parole est à M. Ghannem.
Kerkennah (Crédits : Discover Tunisia)
M. Mohamed GHANNEM - Montesquieu a dit : « Ce que l'auteur ne peut dire en profondeur, il le dit en longueur ». Je serai donc bref...
Je remercie tous ceux qui ont fait le déplacement, particulièrement Jihène Saadi, de Toulouse.
Je remercie également le président du groupe interparlementaire d'amitié Tunisie-France, qui a fait le déplacement.
Je remercie surtout M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président du groupe interparlementaire d'amitié France-Tunisie, de nous avoir reçus aujourd'hui dans un lieu hors du commun, le temple de la République. En tant que républicains, nous apprécions tous son invitation.
M. Jean-Pierre SUEUR - Vous êtes ici chez vous.
Nous allons maintenant entendre l'intervention vidéo de Matthias Fekl, lorsqu'il était encore secrétaire d'État charge du tourisme, avant qu'il ne devienne ministre de l'Intérieur.
CONCLUSION
Message vidéo de M. Matthias FEKL, Ministre de l'Intérieur
Madame la ministre,
Mesdames et Messieurs les parlementaires
Cher Jean-Pierre Sueur,
Mesdames et Messieurs les membres du corps diplomatique et consulaire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Je ne peux malheureusement pas être avec vous pour ce séminaire organisé par Jean-Pierre Sueur autour du tourisme tunisien, mais je tenais à vous adresser ce message et à souligner l'importance des travaux auxquels vous vous livrez.
La Tunisie et la France sont liées de bien des manières, à travers l'histoire, à travers la culture, à travers notre langue, et à travers bien sûr de très nombreux projets de coopération économique, où le tourisme tient une place de choix.
Nous sommes deux grandes nations touristiques, frappées à plusieurs reprises par la barbarie terroriste. Ces attentats ont bien sûr eu un impact sur nos deux pays. Nous savons qu'en Tunisie en particulier, en visant des lieux touristiques, les terroristes se sont attaqués à la liberté, à l'ouverture au monde de la Tunisie, et à un des poumons du développement économique du pays. Les conséquences ont été importantes.
Nos deux pays se battent et avancent ensemble. La Tunisie, comme la France, a mis en oeuvre de grandes stratégies touristiques qui portent leurs fruits. Les chiffres de début 2017 montrent que les Français viennent toujours plus en Tunisie, preuve que les efforts du gouvernement produisent des effets, et je veux saluer, madame la ministre, l'action que vous menez et que mènent avec vous tous les partenaires de la Tunisie dans ce domaine.
Je me suis rendu à trois reprises dans votre pays, compte tenu des enjeux du commerce extérieur, de l'importante communauté française de Tunisie et des enjeux du tourisme. Nous avons travaillé ensemble dans bien des domaines. La France a ouvert des lignes de crédit importantes à travers l'action de la direction générale du Trésor, l'action du Quai d'Orsay, ainsi qu'à travers le travail mené par Atout France et l'Agence française de développement (AFD). Tout cela permet le financement de projets et la construction de nouveaux partenariats.
Nous soutenons pleinement le travail que vous menez autour du label « Qualité Tourisme Tunisie », qui est tout à fait opportun. Les résultats sont là. J'indiquais tout à l'heure les hausses de fréquentation auxquelles nous assistons aujourd'hui.
En France, le Gouvernement, depuis 2012, a fait du tourisme une priorité absolue. Ce secteur magnifique représente 7 % à 8 % de notre richesse nationale, 2 millions d'emplois, et des femmes et des hommes qui, partout en France, dans nos régions, créent de la richesse, innovent et font vivre notre patrimoine, notre culture, notre tradition d'accueil et d'hospitalité.
Le Président de la République, François Hollande, a fait du tourisme une grande cause nationale. Avec Laurent Fabius et Jean-Marc Ayrault, nous avons travaillé pour assurer la promotion de la destination France et avons mobilisé toutes nos ambassades pour rester la première destination touristique au monde.
En 2016, année pourtant compliquée à bien des égards pour le tourisme, nous avons conservé le premier rang, avec près de 83 millions de touristes accueillis, après le record de 85 millions de 2015.
Nous avons pour objectif, en 2020, d'accueillir 100 millions de touristes, et nous nous sommes engagés, avec les professionnels, dans un programme national de grande envergure autour de la formation, de l'investissement, avec un milliard d'euros d'argent public disponible pour accompagner les projets publics et privés qui vont assurer la montée en gamme et la diversification de l'offre touristique française.
Nous travaillons autour des enjeux du numérique, qui sont évidemment un levier de croissance pour demain, mais aussi en fixant des conditions de réciprocité et d'équité entre le secteur traditionnel du tourisme et les nouveaux types de plateformes et d'offres d'hébergement qui peuvent émerger. Il est normal de fixer des règles dans ce domaine aussi. Beaucoup a été fait sur tous ces sujets, et les résultats commencent à se faire sentir sur le terrain.
Par ailleurs, nous sommes engagés dans une politique d'accueil et d'hospitalité : délivrance de visas en 48 heures dans bien des pays du monde, accueil dans les aéroports, forfaits taxi à Paris, plan de relance pour le tourisme. Plus de 10 millions d'euros ont été investis par le Gouvernement, sous la pression de Monsieur Jean-Marc Ayrault, pour assurer la promotion de la destination France partout dans le monde.
Les liens entre la Tunisie et la France restent plus que jamais d'actualité. Nous savons qu'une partie de l'avenir du monde se joue entre les deux rives de la Méditerranée, grâce aux liens que nous saurons maintenir avec la Tunisie et avec les autres pays du pourtour méditerranéen. Votre rencontre et vos travaux y contribuent très largement.
Je veux remercier encore une fois - je n'insisterai jamais assez - le président Jean-Pierre Sueur : fort de son expérience d'élu local, qui a toujours été engagé dans les opérations de développement et de promotion touristique de sa ville et de sa région, il connaît aussi parfaitement, en tant qu'élu national, toutes ces problématiques.
Je salue votre présence, madame la ministre, celle de tous les partenaires, toutes celles et tous ceux qui ont apporté leur expertise, leur savoir-faire, leur richesse en termes d'expériences et de projets, et qui ont fait de ce colloque une réussite. Vive le tourisme, vive la Tunisie, vive la France, et vive l'amitié franco-tunisienne !
M. Jean-Pierre SUEUR - Merci, Monsieur le ministre.
Il me reste à remercier tout particulièrement Youssef Meniar, que l'on peut applaudir. Il a en effet été, en sa qualité de secrétaire exécutif du groupe d'amitié du Sénat, très actif pour préparer ce colloque, en lien avec beaucoup d'entre vous.
Un grand merci à la Fédération des associations franco-tunisiennes, représenté par le Docteur Ghannem et Monsieur Maher Ben Azzouz, que l'on peut applaudir également, car ils se sont donnés beaucoup de mal.
Ce fut un plaisir, je le répète, de travailler avec les associations, en espérant que les projets, comme celui du centre culturel, pourront aboutir dans le cadre de la mobilisation de la société civile, des Tunisiens de France et de Tunisie et, bien entendu, des officiels, car je crois que les uns et les autres apportent leur pierre à cet édifice.
Je remercie à nouveau Madame la ministre du tourisme et de l'artisanat de la République tunisienne de sa participation, ainsi que les députés, les intellectuels et artistes, et tous les professionnels du tourisme qui sont intervenus. Nous avons entendu de grands responsables. Je ne connais pas d'autres exemples - en tout cas pas au Sénat - de réunion rassemblant à un aussi haut niveau les responsables du tourisme de Tunisie et de France. Je crois que cela a été utile.
Le compte rendu de ce colloque sera disponible sur le site du Sénat. Merci au sténotypiste d'avoir accepté de l'établir. On peut l'applaudir, car cet après-midi représente beaucoup de travail.
À tous, chokran . C'est un mot que nous aimons, comme le mot « merci » !
ANNEXE
Présentation de la Tunisie
(source : Ministère des Affaires étrangères - ANMO/AFNOR)
La France et la Tunisie sont des partenaires historiques. Depuis la révolution tunisienne de 2011, les relations de confiance entre la France et les nouvelles autorités politiques du pays se sont approfondies, à l'occasion de nombreuses visites bilatérales. La France a parié sur l'exemplarité de la transition tunisienne, comme en atteste le choix du Président de la République de se rendre en Tunisie à trois reprises en un an et demi (visite d'Etat dès juillet 2013, suivie de déplacements en février 2014 et en mars 2015, à la suite de l'attentat du Bardo). Le Président tunisien, Béji Caïd Essebsi, a été reçu en visite d'Etat en France les 7 et 8 avril 2015 et le Chef du gouvernement Youssef Chahed a été reçu par le Président François Hollande et le Premier ministre Manuel Valls lors de sa visite officielle du 9 et 10 novembre 2016. M. Ayrault, ministre des Affaires étrangères et du développement international, a consacré à la Tunisie son premier déplacement dans le Maghreb les 17 et 18 mars 2016. Il a représenté la France lors de la cérémonie d'hommage aux victimes de l'attentat du Bardo. Son prédécesseur a effectué plusieurs visites en Tunisie, dont une visite conjointe avec son homologue allemand en avril 2014. Le Premier ministre Valls s'est rendu en Tunisie en septembre 2014 à l'occasion de la conférence « Investir en Tunisie : start-up démocratie », sous co-présidence franco-tunisienne. Il s'est rendu en Tunisie le 28 novembre 2016 à l'occasion de la conférence économique « Tunisia 2020 ». Enfin, la visite du Premier ministre Bernard Cazeneuve à Tunis le 6 et 7 avril 2017 clôt un chapitre dense des relations franco-tunisiennes en réaffirmant son importance.
Alors que la Tunisie a fait face à une situation sécuritaire, sociale et économique difficile, la communauté internationale, et la France en particulier, sont fortement mobilisées pour soutenir ce pays face à ces défis. Une conférence internationale d'appui à l'économie tunisienne s'est tenue à Tunis les 29 et 30 novembre, où la France, co-parrain de l'événement, a été représentée au plus haut niveau.
Site de l'ambassade de France en Tunisie : http://www.ambassadefrance-tn.org/
I. PRÉSENTATION DU PAYS
I - DONNÉES GÉNÉRALES
Nom officiel : République Tunisienne
Nature du régime : République
Chef de l'État : Béji Caïd Essebsi (depuis le 31 décembre 2014)
Chef de gouvernement : Youssef Chahed (depuis le 3 août 2016)
II - DONNÉES GÉOGRAPHIQUES
Superficie : 162.155 km²
Capitale : Tunis
Villes principales : Tunis, Sfax, Gabès, Sousse, Kairouan, Bizerte
Langue (s) officielle (s) : arabe
Langue (s) courante (s) : arabe dialectal, langues berbères, français
Monnaie : Dinar Tunisien (1 EUR = 2,47 DT le 01/02/2017)
Fête nationale : 20 mars (commémoration de l'indépendance en 1956)
III - DONNÉES DÉMOGRAPHIQUES
Population : 11,1 millions (01/12/2015 source : INS)
Densité : 67,1 hab./km²
Taux d'accroissement naturel : 1,40 % (2015, source : INS)
Espérance de vie : 74,8 années (2015, source : PNUD)
Taux d'alphabétisation : 79,7 % (source : rapport 2015 du PNUD sur le développement humain)
Religion(s) : Islam (98% de la population dont 85 % de rite malékite, minorité ibadite à Djerba), christianisme (1 %), judaïsme et autres (1 %) (2013 source : CIA World Factbook)
Indice de développement humain : 0,721 (96 ème ) (source : rapport 2015 du PNUD sur le développement humain)
IV - DONNÉES ÉCONOMIQUES
PIB : 43,02Mds $ (2015, source : Banque mondiale)
PIB/hab : 3872, 512 $ (2015, source : Banque mondiale)
Taux de croissance : 1 % (2016, source : DG Trésor)
Taux de chômage : 15,4 % de la population active, dont 30 % de diplômés (2016, source : DG Tresor)
Taux d'inflation : 4 % (2016, source: DG Trésor)
Solde budgétaire : - 5,7 % (2016)
Balance commerciale : - 9 % du PIB (2016, source: DG Trésor)
Principaux clients : France (30 %), Italie, Allemagne, Espagne, Suisse (2015)
Principaux fournisseurs : France (17 %), Italie, Russie, Etats-Unis, Turquie, Chine (2015)
Part des principaux secteurs d'activités dans le PIB (2016, source : CIA World Factbook)
- agriculture : 10,1 %
- industrie : 28,3 %
- service : 61,6 %
Exportations de la France vers la Tunisie : 3,2 Mds € (2016)
Importations françaises depuis la Tunisie : 4,2 Mds € (2016)
http://www.tresor.economie.gouv.fr/pays/tunisie
Consulat de France : Tunis
Communauté française en Tunisie : 30 000 dont 66 % de binationaux
Communauté tunisienne en France : 680 000
2. GÉOGRAPHIE
D'une superficie d'environ 162 155 km², la Tunisie, longue de 1200 km et large de 280 km, est baignée au nord et à l'est par la Méditerranée sur 1 250 km et partage une frontière avec la Libye au sud (480 km) et avec l'Algérie à l'ouest (1 050 km).
Partie intégrante du Maghreb, à l'extrémité nord de l'Afrique à laquelle elle a donné son nom, elle occupe une position stratégique en commandant le détroit de Sicile qui sépare le bassin occidental du bassin oriental de la Méditerranée. Le détroit de Sicile entre la péninsule du Cap Bon et l'Italie, large de 200 km, constitue l'une des voies de passage les plus fréquentées du monde.
Trois grandes régions composent le pays :
• au Nord, les plaines de la Medjerda entre les montagnes de Kroumirie et les collines des Mogods d'une part, et la « dorsale tunisienne » d'autre part ; plus à l'est, le golfe de Tunis et la péninsule du cap Bon (cultures maraîchères).
• au Centre, les massifs montagneux séparés par des cuvettes et des vallées fertiles ; plus à l'Est, de vastes plaines couvertes d'oliviers (Sahel et région de Sfax) ;
• au Sud, la grande dépression du Chott Djérid et ses palmeraies riveraines (Tozeur, Kébili, Douz) marquant le seuil du Sahara ; à proximité de la côte, l'île touristique de Djerba ; plus à l'est, les monts de Matmata.
I. LIAISONS AVEC LA France
La distance Paris-Tunis est de 1 500 km. Par bateau, la Société de Navigation Corse Méditerranée (SNCM) et la Compagnie Tunisienne de Navigation (CTN), assurent la liaison entre Tunis et Marseille en 23 heures environ, au minimum trois fois par semaine. De multiples compagnies aériennes assurent des vols réguliers en 2h 20, plusieurs fois par jour entre Paris et Tunis, plusieurs fois par semaine à destination de Marseille et Lyon, au moins deux fois par semaine à destination de Nice, Bordeaux et Toulouse.
II. POPULATION
La population tunisienne a presque doublé en l'espace de trente ans et un quart de la population a entre 15 et 29 ans (la moitié de la population a moins de 30 ans). Le taux de natalité est un des plus faibles des pays d'Afrique du Nord et du Proche-Orient.
III. CLIMAT
Les étés sont chauds et secs, les hivers frais et pluvieux, notamment dans la région côtière. Au Nord, climat méditerranéen. On trouve de la forêt sur les hauteurs, de la polyculture et de l'élevage dans les prairies. Au Nord-Est, se pratiquent cultures maraîchères et fruitières. Au Centre, climat continental, chaud et sec. C'est une région de steppe où l'on cultive l'olivier dans la zone côtière. Au Sud, climat saharien, semi-désertique. Le désert commence à partir du 34 ème parallèle.
Températures moyennes : Tunis : 11° en hiver, 26° en été - Djerba : 12° en hiver, 28° en été. En hiver, la température varie de 5 ou 6 degrés le soir à 17 ou 18 degrés dans la journée.
La pluviométrie annuelle, très irrégulière, varie selon les régions :
- au Nord, entre 400 et 1 534 mm ;
- au Centre, entre 150 et 400 mm ;
- au Sud, 300 mm.
Le degré hygrométrique est élevé toute l'année à Tunis et à Sfax, en raison de la proximité de la mer.
IV. VILLES PRINCIPALES
• Tunis
L'agglomération compte 1,8 million d'habitants. Établie au fond du golfe de Tunis et à 16 km du site archéologique de Carthage, la capitale du pays est également le principal port et le premier centre industriel de Tunisie. La ville ancienne abrite les souks, la médina et la mosquée de l'Olivier (zitouna en arabe) fondée en 732. La ville européenne, bâtie après 1881, s'étend de la médina au lac de Tunis.
• Sfax
231 000 habitants (le Grand Sfax en compte 600.000). Située au nord du golfe de Gabès et à 270 km au sud de Tunis, Sfax est la deuxième ville du pays. C'est à la fois un port important et un centre industriel et commercial.
• Gabès
149 000 habitants. Située sur le golfe du même nom, Gabès se trouve à 406 km de la capitale.
• Sousse
125.000 habitants. Localisée dans le sud du golfe d'Hammamet et à 143 km au sud de Tunis, Sousse est le plus ancien port méditerranéen (IX ème siècle avant J.C.). C'est à la fois un site historique et un centre industriel (agroalimentaire et textile).
• Kairouan
103.000 habitants. Située à 160 km au sud de Tunis et à 60 km de Sousse, Kairouan a été fondée en 670. De très nombreux édifices, dont la Grande mosquée, attestent de son rôle passé de capitale religieuse. C'est aujourd'hui une ville de commerce et d'artisanat (tapis surtout).
• Bizerte
94 000 habitants. Situé à 65 km au Nord-Ouest de Tunis, Bizerte était un important port de guerre sous le protectorat français (1881-1956) en raison de sa position stratégique sur le détroit de Sicile. C'est aujourd'hui un centre industriel important (raffinerie de pétrole, cimenterie, complexe sidérurgique).
HISTOIRE
- 814 : Fondation de Carthage par des colons phéniciens, légende de la reine Didon (Alyssa)
de - 264 à - 146 : Guerres puniques opposant Carthage à Rome ; expédition d'Hannibal à travers les Alpes
- 146 : Destruction de Carthage par les armées romaines, aidées des contingents berbères de Massinissa. La province romaine dénommée Africa (avec pour capitale la Carthage romaine et chrétienne) correspond à la Tunisie actuelle.
439 : Prise de Carthage par les Vandales
533 : Prise de Carthage par les Byzantins
647-698 : Début de la période arabo-musulmane, fondation de Kairouan par Oqba Ibn Nafaa (670) et prise de Carthage par les Arabes (698)
VIIIe et IXe: Extension de l'islam, établissement de la dynastie aghlabide (capitale Kairouan)
Xe : Dynastie fatimide (910-973). La capitale est Mahdia, fondée en 921. Le territoire fatimide, plus étendu que la Tunisie actuelle, comprend notamment l'est algérien.
1048 : Invasion des tribus arabes Bani Hilal et Beni Soleim qui s'installent en Tunisie
1159-1230: Unification du Maghreb et de l'Andalousie sous l'autorité de la dynastie Almohade
1236-1574 : Les Hafsides se séparent des Almohades et fondent une nouvelle dynastie. Retour aux frontières romaines de l'Africa (capitale Tunis)
1535 : Sac de Tunis par les troupes de Charles Quint. Défaite des troupes de Kheireddine Barberousse
1574 : Rattachement de la Tunisie à l'empire ottoman
1705-1957 : Dynastie husseinite
1857 et 1861 : Pacte fondamental puis première Constitution tunisienne
12 mai 1881 : Etablissement du protectorat français (Traité du Bardo)
1920 : Fondation du premier parti tunisien, le Destour
9 avril 1938 : Manifestations populaires à Tunis. De nombreux Tunisiens sont tués ou arrêtés
1942-1943: Campagne de Tunisie, combats entre l'Afrikakorps de Rommel et les forces alliées
31 juillet 1954 : La France reconnaît l'autonomie interne de la Tunisie.
20 mars 1956 : Indépendance de la Tunisie
25 juillet 1957 : Proclamation de la République par M. Habib Bourguiba, premier Président de la République tunisienne. Fin de la dynastie husseinite
1er juin 1959 : Adoption de la Constitution de la République tunisienne
1961 : Coup de Bizerte. Les forces armées tunisiennes tentent de s'emparer de la base militaire française (670 morts et 1 100 blessés du côté tunisien)
15 octobre 1963 : Evacuation par la France de la base militaire de Bizerte
1965 : Bourguiba plaide en faveur de la paix avec Israël
1975 : Le "Combattant suprême" est déclaré Président à vie
10 mai 1977 : Fondation de la Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme (1 e du monde arabe)
Septembre 1977 : Premières manifestations islamistes
Janvier 1978 : Emeutes syndicales et répression (plusieurs centaines de morts)
26 janvier 1980 : Occupation pendant une semaine de Gafsa (sud-ouest) par un "Front de libération" de 50 hommes soutenus par la Libye et l'Algérie
Avril 1980 : Mohamed Mzali, Premier ministre, jusqu'en 1986. Libéralisation économique
1982 - 1994 : Chassée de Beyrouth, l'OLP s'installe à Tunis (bombardement israélien de son quartier général à Hammam Chott en octobre 1985)
Janvier 1984 : Emeutes du pain, suite à l'augmentation des prix des produits alimentaires de base (120 morts)
Septembre 1985 : Rupture des relations diplomatiques avec la Libye qui a expulsé, en août 1984, des milliers de Tunisiens avant de masser ses troupes à la frontière
7 novembre 1987 : Arrivée au pouvoir de M. Zine El Abidine Ben Ali, qui devient président de la République à la faveur d'un article constitutionnel lui permettant de remplacer H. Bourguiba, déclaré sénile
Décembre 1987 : Reprise des relations diplomatiques avec la Libye
1989 : Fondation de l'Union du Maghreb arabe (UMA : Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie, Tunisie)
2 avril 1989 : Election du Président Ben Ali avec 99,27 % des voix
20 mars 1994 : Réélection du Président Ben Ali avec 99,91 % des voix. Entrée de l'opposition à la Chambre des Députés (19 élus sur 163)
17 juillet 1995 : Signature à Bruxelles de l'Accord d'association UE-Tunisie
11 juin 1996 : Ratification de l'Accord d'association par le parlement tunisien
24 octobre 1999 : Réélection du Président Ben Ali avec 99,44 % des suffrages exprimés. L'opposition remporte 34 sièges sur 182 à la Chambre des députés
1er janvier 2000 : Entrée de la Tunisie au Conseil de Sécurité des Nations unies pour une durée de deux ans
6 avril 2000 : Décès du Président Habib Bourguiba
26 mai 2002 : Réforme de la Constitution adoptée par référendum avec 99,52 % des voix
24 octobre 2004 : Réélection du Président Ben Ali avec 94,48 % des suffrages exprimés. L'opposition remporte 37 sièges sur 189 à la Chambre des députés
14 janvier 2011 : « Révolution du Jasmin », fuite du Président déchu Ben Ali
17 janvier 2011 : Formation d'un gouvernement provisoire de transition dirigé par le Premier Ministre, Mohamed Ghannouchi
27 février 2011 : M. Béji Caïd Essebsi est nommé Premier Ministre
24 juin 2011 : la Tunisie adhère au statut de Rome de la Cour pénale internationale
23 octobre 2011 : Election des 217 membres de l'Assemblée nationale constituante, premières élections libres en Tunisie et dans la région
12 décembre 2011 : Election de Moncef Marzouki (CPR) à la présidence de la République
14 décembre 2011 : Hamadi Jebali (Ennahda) est nommé Premier Ministre
13 mars 2013 : Ali Larayedh (Ennahda) est nommé Premier Ministre
26 janvier 2014 : Adoption de la constitution de la deuxième république tunisienne
29 janvier 2014 : Mehdi Jomaa est nommé Premier Ministre et forme gouvernement de technocrates non affiliés
26 octobre 2014 : Elections législatives remportées par Nidaa Tounès
21 décembre 2014 : Election de M. Béji Caïd Essebsi (Nidaa Tounès) à la présidence de la République
6 février 2015 : Entrée en fonction du gouvernement de M. Habib Essid
7 janvier 2016 : Formation du gouvernement Essid II
26 août 2016 : Entrée en fonction du gouvernement de M. Youssef Chahed
COMPOSITION DU GOUVERNEMENT
Chef du gouvernement, M. Youssef CHAHED
Les ministres
Ministre de l'Intérieur M. Hédi Majdoub
Ministre de la Défense nationale : M. Farhat Horchani
Ministre de la Justice : M. Ghazi Jeribi
Ministre des Affaires étrangères : M. Khemaies Jhinaoui
Ministre des Finances : M. Fadhel Abdelkefi (par intérim)
Ministre du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale : M. Fadhel Abdelkefi
Ministre de l'Éducation : M. Slim Khalbous (par intérim)
Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique : M. Slim Khalbous
Ministre des Affaires religieuses : M. Ahmed Ahdoum
Ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle : M. Imed Hammami
Ministre de la Santé publique : Mme Samira Merai
Ministre des Affaires locales et de l'Environnement: M. Riadh Mouakhar
Ministre des Affaires sociales : M. Mohamed Trabelsi
Ministre de la Culture et du Patrimoine : M. Mohamed Zine El Abidine
Ministre de la Femme, de la Famille et de l'Enfance : Mme Néziha LAABIDI
Ministre de l'Industrie et du Commerce : M. Zied Laadhari
Ministre de l'Énergie et des Mines : Mme Héla Cheikhrouhou
Ministre de la Jeunesse et des Sports : Mme Majdouline Charni
Ministre du Transport : M. Anis Ghedira
Ministre de l'Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche : M. Samir Taieb
Ministre de l'Équipement, de l'Habitat et de l'Aménagement du territoire : M. Mohamed Salah Arfaoui
Ministre du Tourisme et de l'Artisanat : Mme Selma Rekik
Ministre des Technologies de l'information et de l'Economie numérique : M. Anouar Maarouf
Ministre chargé des relations avec le Parlement : M. Iyed Dahmani
Les secrétaires d'Etat
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre des Affaires étrangères : M. Sabri Bach Tobji
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre des Affaires étrangères chargé de l'Emigration et des Tunisiens de l'étranger : M. Radhouan Ayari
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre des Affaires locales : M. Chokri Ben Hassen
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre des Finances chargé du Domaine de l'Etat : M. Mabrouk Korchid
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Industrie et du Commerce : M. Abdellatif Hmam
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle chargée de l'initiative privée : Mme Saida Ounissi
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Energie et des Mines : M. Hachemi Hmidi
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre du Transport : M. Hichem Ben Ahmed
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Agriculture chargé des Ressources hydrauliques et de la production agricole : M. Amor Behi
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Agriculture chargé de la Pêche : M. Abdallah Errai
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Enseignement supérieur chargé de la Recherche scientifique : M. Khalil Laamiri
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre des TICS chargé de l'Economie numérique : M. Habib Dabbab
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de la Jeunesse et des Sports : M. Ammar Jabri
Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de la Jeunesse et des Sports : Mme Faten Kallel
POLITIQUE INTÉRIEURE
L'immolation par le feu, à Sidi Bouzid, de Mohamad Tarek Bouazizi, le 17 décembre 2010, a entraîné des manifestations dans tout le pays qui ont conduit au départ du Président Ben Ali, le 14 janvier 2011.
Une troïka alliant le parti islamiste Ennahda, le Congrès pour la République (gauche nationaliste) et Ettakatol (socialiste) a dirigé le pays pendant les trois premières années de la transition, au lendemain du scrutin d'octobre 2011. Mehdi Jomaa (indépendant) a dirigé de janvier 2014 à février 2015 le dernier gouvernement de transition.
Les Tunisiens ont achevé leur transition politique : adoption en janvier 2014 de la nouvelle constitution tunisienne et organisation, dans de bonnes conditions, des élections législatives du 26 octobre 2014, remportées par Nida Tounès, et de l'élection présidentielle des 23 novembre et 21 décembre 2014, dont Beji Caid Essebsi est sorti vainqueur. Le Président Essebsi a d'abord nommé Habib Essid, personnalité indépendante, à la tête d'un gouvernement de coalition avec Ennahda, puis Youssef Chahed, à la tête d'un gouvernement d'union nationale en août 2016.
Le Président de la République , M. Béji Caïd Essebsi, représente l'Etat tunisien et dispose de pouvoirs partagés, soit avec le chef du gouvernement (diriger la politique étrangère, nommer les ambassadeurs), soit avec l'Assemblée des représentants du peuple (déclarer la guerre). Il est le chef des armées.
Le chef du gouvernement , M. Youssef Chahed, a été nommé par BCE le 3 août 2016. Son gouvernement d'union nationale a obtenu la confiance de l'ARP le 26 août 2016.
Le Président de l'Assemblée des représentants du peuple est M. Mohamed Ennaceur (président de Nidaa Tounes, parti majoritaire à la sortie des urnes avec 86 élus, mais devenu 2 e force parlementaire après la démission d'une partie des députés depuis fin 2015. Les blocs parlementaires de Nida et Ennahda sont aujourd'hui respectivement à 67 et 69 députés).
Le Prix Nobel de la Paix 2015 a été décerné à 4 organisations de la société civile tunisienne, pour leur rôle décisif dans la réussite du dialogue national. Les récipiendaires ont été reçus par le Ministre des Affaires étrangères et par le Président de la République, avant de recevoir la Légion d'Honneur le 8 décembre 2015.
Depuis octobre 2015, le parti du Président Essebsi, Nida Tounès, traverse une crise : une trentaine de députés ont quitté le bloc parlementaire de Nida Tounès. Ces tensions n'ont pas remis en cause la coalition gouvernementale, mais le rapport de force au sein de l'Assemblée des Représentants du Peuple a changé avec Ennahda en première position.
Au lendemain du 5 e anniversaire de la révolution tunisienne en janvier 2016, un mouvement de contestation de grande ampleur a gagné tout le pays. Le Premier ministre a écourté sa visite en France, au cours de laquelle il a été reçu à l'Elysée par le Président Hollande et Manuel Valls. À cette occasion, la France a annoncé la mise en oeuvre d'un plan de soutien à la Tunisie d'1 milliard sur 5 ans, dont les deux champs d'action prioritaires sont le développement des régions défavorisées et le soutien à la formation et à l'emploi des jeunes.
La situation sécuritaire est une des principales préoccupations de la Tunisie : en un an, la Tunisie a connu quatre attaques qui illustrent l'intensité de la menace terroriste dirigée contre sa démocratie. Après deux attaques terroristes contre des sites touristiques, coûtant la vie à 59 ressortissants étrangers (21 touristes décédés, dont 4 Français, dans l'attentat du 18 mars 2015 au Bardo ; 38 victimes dont 30 Britanniques, dans l'attaque du 26 juin 2015 à Sousse), la Tunisie a subi un nouvel attentat le 24 novembre 2015 à Tunis, contre un bus de la garde présidentielle. Les trois attentats ont été revendiqués par Daech.
Le 7 mars 2016, près de 60 assaillants (tunisiens) se revendiquant de Daech ont mené une attaque à Ben Guerdane , près de la frontière libyenne. Le bilan est de plus de 50 morts, dont une trentaine de djihadistes. Il s'agissait d'une opération lourde, longuement préparée, qui s'est néanmoins heurtée à une réaction efficace des forces de sécurité tunisiennes.
La sécurité intérieure est une priorité absolue pour les autorités tunisiennes, qui ont renforcé le dispositif sécuritaire à la suite des attentats. Le 24 juillet 2015, le parlement a adopté à la quasi-unanimité une loi polémique de lutte contre le terrorisme. Alors qu'un moratoire de fait est observé en matière d'exécutions depuis 1991, la nouvelle loi prévoit dans certains cas la peine de mort. Elle n'a toutefois pas été appliquée à ce stade. Environ 2000 individus ont été à ce jour déférés à la justice sous des chefs d'inculpation relevant de la loi anti-terroriste. L'état d'urgence, rétabli par le Président BCE après l'attentat du 24 novembre 2015, a été prolongé jusqu'au 15 mai 2017.
La crise libyenne attise la menace terroriste en Tunisie . Les autorités tunisiennes peinent à contrôler la frontière tuniso-libyenne, qui constitue actuellement le principal point de transit menant les futurs combattants vers la Syrie (plus de 5 000 Tunisiens auraient rejoint les rangs de daech), ou permettant l'entrée en Tunisie de djihadistes libyens. Les forces de sécurité tunisiennes conduisent des opérations à succès contre les maquis terroristes et harcèlent les groupuscules encore actifs. Par ailleurs, la frontière tuniso-libyenne est de nouveau fermée depuis l'attaque de Ben Guerdane et la Tunisie n'a plus connu d'attaques terroristes sur son sol depuis mars 2016.
SITUATION ÉCONOMIQUE
L'économie tunisienne a été fragilisée par différents facteurs. D'une part, la crise du secteur du tourisme (7 % du PIB tunisien), dont la chute se répercute progressivement sur tous les secteurs productifs, et la fuite des capitaux étrangers, en sont les causes premières. D'autre part, la forte augmentation des dépenses publiques (dont 60 % de masse salariale) qui ont creusé la dette publique (63 % du PIB) désormais difficilement soutenable, ainsi qu'un chômage de l'ordre de 15 % de la population active (dont près d'un tiers sont des jeunes diplômés), accentuent cette fragilité. La dégradation des conditions économiques a engendré en janvier 2016 le plus grand mouvement social depuis 2011. L'instabilité sociale pèse constamment sur les actions du gouvernement et perdure. L'adoption de la loi de finance 2017 (10/12/2016) ne résout pas tous les blocages, notamment avec le FMI dont l'aide un temps gelée à cause de l'augmentation des dépenses publiques et de la lenteur des réformes économiques, s'oriente vers un décaissement imminent de la première tranche de son prêt (308 Mds$).
Le gouvernement Chahed a fait de la relance économique de la Tunisie sa priorité. L'ancien gouvernement Essid avait laborieusement mis en oeuvre les premières réformes économiques structurelles (réforme de la banque centrale, loi bancaire, partenariats publics privés etc...), nécessaires au décaissement de l'intégralité des aides des bailleurs multilatéraux. Le gouvernement Chahed poursuit une politique de réforme économique volontariste, dans le cadre de sa stratégie de développement 2016-2020. Dans une situation que le chef du gouvernement a qualifiée « d'État d'urgence économique », la Tunisie a organisé une conférence internationale d'appui à son économie, « Tunisia 2020 », dans le but d'attirer des investissements étrangers. La conférence a été un succès, avec l'annonce de près de 14 Mds€ d'investissement, dont 6Mds€ sont déjà officialisés et 7,8 Mds€ sous forme de promesse. La France s'est engagée sur le prêt d'1,2 Mds€ d'ici 2020, porté par l'AFD, et sur davantage de conversion de dette en projets de développement dans les régions défavorisées pour un montant de 30 millions d'euros.
POLITIQUE EXTÉRIEURE
La Tunisie mène traditionnellement une politique extérieure marquée par la recherche du consensus, la préservation de bonnes relations avec son voisinage proche, notamment maghrébin, et le renforcement de son ancrage euro-méditerranéen. Le discours d'investiture du Président Caïd Essebsi a tracé les grandes lignes d'une politique étrangère fondée sur « le respect de la légalité nationale, la non-ingérence dans les affaires intérieures des pays, la diffusion des valeurs de droits de l'Homme, la consolidation de l'appartenance maghrébine, africaine, arabe, islamique, et méditerranéenne de la Tunisie ».
I. LA PRIORITÉ EUROPÉENNE
La Tunisie aspire à accéder au statut de « partenaire privilégié » de l'Union européenne, qui est, de très loin, son principal partenaire économique (80 % de ses échanges commerciaux). Elle est le premier partenaire du Sud à avoir conclu en 1995 un accord d'association avec l'UE. La Tunisie est aussi l'un des premiers bénéficiaires de l'assistance macro-financière européenne (300M€ en 2015, 500M€ en 2016), et bénéficie de programmes ambitieux d'accompagnement des grands chantiers de la transition (programmes d'appui à la réforme de la justice, 23M€ pour la réforme du secteur de la sécurité, etc). Par ailleurs, des négociations UE-Tunisie pour un accord de libre échange (ALECA) ont débuté en octobre 2015. Le pays est le troisième bénéficiaire des prêts de la Banque Européenne d'Investissements au Sud de la Méditerranée. Le Premier ministre tunisien était convié, avec le ministre tunisien des Affaires étrangères, au Conseil des Affaires étrangères à Bruxelles du 20 juillet 2015.
II. LA POLITIQUE ARABE
La crise libyenne favorise l'implantation de foyers djihadistes sur le territoire du voisin oriental de la Tunisie et constitue la première source de préoccupation des autorités tunisiennes. Tunis adopte une position de stricte neutralité dans le dossier libyen, tout en apportant son soutien au gouvernement d'entente nationale. La Tunisie plaide pour une solution politique inclusive et rejette toute perspective d'intervention militaire étrangère.
C'est à l' Algérie que le Président BCE a réservé son premier déplacement à l'étranger, le 4 février 2015. Outre leur convergence de vues sur la question libyenne, les deux pays se retrouvent en matière de lutte contre le terrorisme : confrontées depuis plusieurs années à des poches terroristes à sa frontière orientale, les autorités tunisiennes comptent sur une coopération sécuritaire forte de la part de l'Algérie (en matière de renseignements notamment).
La question palestinienne bénéficie traditionnellement d'un fort capital de sympathie en Tunisie et reste prioritaire pour l'opinion publique tunisienne. La Tunisie avait accueilli le siège de l'OLP de 1982 à la signature des accords d'Oslo en septembre 1993. Hamadi Jebali, ex-Premier ministre tunisien, avait invité Ismaïl Haniyeh, chef du gouvernement Hamas de Gaza, à effectuer une visite en Tunisie en janvier 2012. Cette initiative d'Ennahda avait tendu les relations de la diplomatie tunisienne avec l'autorité palestinienne.
La réorientation de la politique étrangère vers les Etats arabes du Golfe n'est pas allée aussi loin que l'espérait Ennahda au lendemain de la révolution. Les aides financières de ces pays se sont avérées avantageuses, mais celles des bailleurs traditionnels de la Tunisie restent indispensables. Toutefois, le co-parrainage de la conférence des bailleurs par le Qatar annonce un réinvestissement de ce pays en Tunisie.
S'agissant de la Syrie , le Conseil national syrien (CNS) s'était réuni à Tunis du 16 au 19 décembre 2011. Cette rencontre avait été rendue possible par le soutien personnel du Président Marzouki à l'opposition syrienne. Le 4 février 2012, M. Marzouki avait annoncé que la Tunisie cessait de reconnaître le régime de Bachar Al Assad comme l'autorité légitime en Syrie et avait expulsé l'ambassadeur syrien à Tunis. L'ancien ministre des affaires étrangères, Othman Jarandi, avait condamné en août 2013 le recours aux armes chimiques contre les civils, mais avait néanmoins souligné le refus de son pays d'une intervention militaire étrangère. La diplomatie tunisienne a à nouveau condamné l'attaque chimique d'avril 2017 et appelé à une enquête internationale.
III. LES AUTRES PARTENAIRES DE LA TUNISIE
Les États membres du G7 se mobilisent pour lutter contre le terrorisme en Tunisie. Ils ont été rejoints par d'autres pays après le sommet d'Elmau, les 7 et 8 juin 2015 (Espagne, Union européenne, Belgique et Pays-Bas). Dans ce format en G7 élargi, les partenaires de la Tunisie coordonnent leur appui dans quatre domaines sécuritaires : la protection des sites sensibles, la lutte contre le terrorisme, la protection des frontières et la sûreté portuaire et aéroportuaire. Une coordination G7 a également été mise en place en juin 2016 sur les questions économiques et sociales.
L'arrivée du gouvernement Jomaa, en 2014, avait permis un retour de la confiance dans les relations de la Tunisie avec les États-Unis , qui s'était traduit par des appuis financiers conséquents (en particulier une garantie d'émissions obligataires de 500 MUSD) et la reprise d'une coopération en matière sécuritaire. Dans le sillage de la visite officielle du Président Essebsi à Washington en mai 2015, le statut d'« allié majeur non-membre de l'Otan », qui donne accès à une coopération militaire renforcée avec les États-Unis, a été accordé en juillet 2015 à la Tunisie.
LA FRANCE ET LA TUNISIE
I. RELATIONS POLITIQUES
La France a parié sur l'exemplarité de la transition tunisienne, comme en atteste le choix du Président de la République François Hollande de se rendre en Tunisie à trois reprises en un an et demi : visite d'État en Tunisie dès juillet 2013, suivie de déplacements en février 2014 à l'occasion de l'adoption de la Constitution tunisienne et en mars 2015, à la suite de l'attentat du Bardo. Alors que son prédécesseur a effectué plusieurs déplacements en Tunisie (dont une visite conjointe avec son homologue allemand en avril 2014), M. Jean-Marc Ayrault a souhaité réserver à la Tunisie son premier déplacement au Maghreb, les 17 et 18 mars, pour assister à la cérémonie d'hommage aux victimes du Bardo.
Le Premier ministre Manuel Valls s'est rendu en Tunisie en septembre 2014 à l'occasion de la conférence « Investir en Tunisie : start-up démocratie », sous co-présidence française. Il a accueilli son homologue à Paris les 9 et 10 novembre 2016 et s'est rendu en Tunisie le 28 novembre 2016 à l'occasion de la conférence économique « Tunisia 2020 ». Enfin, le Premier ministre Bernard Cazeneuve s'est rendu à Tunis les 6 et 7 avril 2017 pour clore un chapitre dense des importantes relations franco-tunisiennes.
Les déplacements ministériels sont très denses dans un sens comme dans l'autre (7 déplacements à Tunis et 3 déplacements en France pour la seule année 2015) et permettent de promouvoir le renforcement de notre coopération dans tous les domaines : sécuritaire, culturel, judiciaire, économique, francophonie.
La multiplication des visites présidentielles et ministérielles, dans les deux sens, a permis d'accompagner la Tunisie et le peuple tunisien dans le processus de transition et d'établir un partenariat d'égal à égal avec la Tunisie, qui reconnaît dans notre pays « une porte naturelle vers l'Europe ».
Depuis l'attentat de Sousse, le 26 juin 2015, la France est mobilisée à tous les niveaux pour la Tunisie et plaide en faveur de son soutien aux plans sécuritaire et économique. C'est dans ce cadre, et grâce à l'impulsion de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni, que la coopération locale en format G7 élargi a pu se mettre en place.
II. RELATIONS ÉCONOMIQUES
La France est historiquement l'un des investisseurs étrangers majeurs en Tunisie. Le flux d'IDE français en 2015 s'est élevé à 1,3Md €. Avec 16% des IDE, la France est le second investisseur, derrière les Émirats Arabes Unis (25 %), mais devant le Qatar (10 %), l'Italie (8 %) et l'Allemagne (15 %). En 2016, la France se place au 1 er rang pour le nombre d'entreprises établies en Tunisie (environ 1 300) et pour le nombre d'emplois directs induits (environ 135 000). Les grands IDE français sont concentrés dans les industries manufacturières, mécaniques et électroniques. La Tunisie détient un stock d'IDE de 83 M€ en France.
La dette tunisienne envers la France s'élève à 1,3 Md € à taux courant. La France représente 50 % des créances bilatérales de la Tunisie (le Japon suit avec 19 %) et 13 % de son endettement extérieur (3 e derrière la BAfD, 16 %, et la BEI, 14 %; devant la Banque mondiale, 12,8 %).
Les échanges franco-tunisiens atteignent 7,4 Md€ en 2016. La France est le 1 er fournisseur de la Tunisie avec 18 % de part de marché. Les exportations françaises vers la Tunisie sont essentiellement composées d'équipements mécaniques et de matériels électriques (1/3 de nos exports), de textile (15 %) et de matériel de transport (13 %). La tendance des exportations est en dents de scie depuis la Révolution (18 % en 2013, 16 % en 2012). Le second fournisseur de la Tunisie est l'Italie, à 14,6 % en 2014 (stable depuis 2010). L'Allemagne et la Chine, après une forte progression, stagnent respectivement à 7 % et 8 %, tandis que l'Algérie progresse à 6 % (2,5 % en 2011).
La France est également le 1er débouché de la Tunisie en accueillant près de 30 % des exportations tunisiennes. Le flux se compose essentiellement de produits textiles, cuir et chaussures (28 %), d'équipements électriques et ménagers (40 %) et de matériels de transport (120 %). L'Italie, qui accueille 19 % des exports tunisiens, est le second marché, devant l'Allemagne (10 %).
En matière de tourisme, la France et la Tunisie ont initié une coopération en 2003 avec la signature d'un accord de coopération et d'un programme de travail. En novembre 2014, la France, en partenariat avec l'Autriche, a remporté le jumelage sur fonds européens « Mise en place d'un dispositif de promotion de la qualité dans le secteur touristique ». Son objectif est de renforcer la compétitivité internationale de la destination Tunisie à travers la mise en place d'un dispositif Qualité Tourisme Tunisie.
La France mobilise des efforts supplémentaires en faveur de la Tunisie depuis les attentats de 2015, aux niveaux bilatéral (annonce de conversion de dette supplémentaire en projets de développement à celle déjà promise de 60 M€ pour la construction d'un hôpital à Gafsa, plan de soutien d'1,2 Mds€ d'ici 2020), ou international (plaidoyers devant l'UE et les bailleurs multilatéraux).
III. COOPÉRATION CULTURELLE, SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE
Notre coopération et notre action culturelle répondent aujourd'hui à trois priorités :
• Appui à la société civile tunisienne et au développement de ses relations avec la société civile française
• Accompagnement de la mise en place de la démocratie et de l'État de droit
• Contribution à la formation initiale ou continue des Tunisiens
La coopération culturelle française oriente en priorité son action en direction de la jeunesse et des nouveaux publics de la société civile. Cette orientation se traduit par des échanges artistiques, le débat d'idées et l'appui aux nouveaux médias. La promotion de notre expertise dans les secteurs des musées et du patrimoine ainsi que le soutien aux jeunes artistes et acteurs culturels sont également des axes importants de cette coopération.
La promotion de la langue française est un enjeu important de notre coopération. Reconnue comme « langue étrangère à statut privilégié » en Tunisie, elle est à ce titre enseignée durant tout le parcours scolaire. Le poste contribue à la promotion du français à travers le centre de langue de l'Institut français de Tunisie et le réseau des établissements scolaires de l'AEFE (qui accueille plus de 3 200 enfants tunisiens sur un total de 7 200 élèves).
Par ailleurs, l'Agence Française de Développement (AFD) joue un rôle central dans la coopération franco-tunisienne depuis 1992, par le volume de ses engagements comme par l'accompagnement de réformes majeures sur le plan économique et social. La Tunisie est le second pays d'intervention de l'AFD en volume et le premier en intervention par habitant. L'engagement exceptionnel de 2014 et 2015 (450 M€ d'engagements en 2 ans) va se poursuivre car l'AFD est le principal opérateur du plan d'1,2 Md€ annoncé en janvier 2016 par le Président Hollande puis concrétisé par le Premier ministre Valls en novembre 2016.
L'UE ET LA TUNISIE
Les relations euro-tunisiennes sont anciennes. La Tunisie et la Commission européenne ont noué des relations contractuelles dès 1976. En 1995, la Tunisie a été le premier pays méditerranéen à signer un Accord d'Association avec l'UE. Le 1 er janvier 2008, la Tunisie devient le premier pays de la rive sud à intégrer la zone de libre-échange pour les produits industriels avec l'Union Européenne. Le principe d'un statut avancé est agréé à l'occasion du Conseil d'association du 11 novembre 2008, sous la présidence française du Conseil de l'Union européenne, et signé en novembre 2012. Ce statut avancé doit aboutir à un Accord de Libre Echange Complet et Approfondi (ALECA), dont les négociations ont débuté en octobre 2015, pour privilégier une intégration économique plus étroite entre l'UE et la Tunisie et permettre d'ancrer davantage la Tunisie à l'Union, qui constitue son principal partenaire commercial (80 % de ses échanges commerciaux). Preuve de ces liens solides entre l'Union et la Tunisie, un partenariat pour la mobilité a été signé le 3 mars 2014.
Aujourd'hui, l'UE est résolue à contribuer à la préservation du modèle tunisien. La Tunisie est l'un des premiers bénéficiaires de l'aide européenne. Outre l'Instrument européen de voisinage (880 M€ pour 2014-2020 dont 240 M en 2014-2015) et l'assistance macro-financière (300 M€ en 2015, 500 M€ en 2016), la Commission européenne a mis en place cinq actions supplémentaires, pour un montant de 117 M : soutiens à la formation professionnelle et à l'emploi, au développement régional, à la reprise des négociations de l'ALECA, à la réforme du secteur de la sécurité, au secteur culturel et à la société civile.
Par ailleurs, des fonds européens supplémentaires ont été attribués en 2015 à la Tunisie, pour un montant de 71,8 M€, afin de soutenir le secteur touristique et la jeunesse.
* ( 1 ) Membres du groupe interparlementaire d'amitié France-Tunisie : M. Jean-Pierre SUEUR , Président, Mme Christiane KAMMERMANN, Vice-présidente, M. Claude KERN, Vice-président, M. Charles REVET, Vice-Président, M. Thierry CARCENAC, Secrétaire, Mme Laurence COHEN, Secrétaire, Mme Leila AÏCHI, Mme Éliane ASSASSI, Mme Esther BENBASSA, Mme Marie-Christine BLANDIN, M. Jean-Marie BOCKEL, Mme Corinne BOUCHOUX, M. Jean-Pierre CAFFET, M. Luc CARVOUNAS, M. Ronan DANTEC, Mme Annie DAVID, M. Vincent DELAHAYE, Mme Michelle DEMESSINE, Mme Josette DURRIEU, Mme Françoise FÉRAT, M. Jean-Jacques FILLEUL, M. Thierry FOUCAUD, M. Christophe-André FRASSA, M. Jean-Marc GABOUTY, M. Jean-Pierre GRAND, M. François GROSDIDIER, M. Charles GUENÉ, M. Loïc HERVÉ, M. Joël LABBÉ, M. Jean-Pierre LELEUX, M. Roger MADEC, Mme Catherine TASCA, M. Yannick VAUGRENARD, M. Jean-Pierre VIAL.
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N° GA 145 - Mai 2017
* 2 La Conférence internationale d'appui au développement économique, social et durable de la Tunisie s'est réunie les 29 et 30 novembre 2016 ; le Gouvernement tunisien a annoncé 15 milliards d'euros d'engagements d'ici 2020, sous la forme d'investissements directs, de dettes reconverties, de prêts bonifiés préférentiels et de dons, dont un milliard d'euros pour la France par l'intermédiaire de l'Agence française de développement.
* 3 Le sommet du G8 2011 s'est tenu à Deauville du 26 au 27 mai 2011 à Deauville a lancé le partenariat de Deauville avec les pays arabes en transition pour les accompagner vers des sociétés libres et démocratiques, à travers une réponse multilatérale mise en oeuvre par les institutions financières internationales ; en plus de mobiliser les institutions européennes, la France s'est directement mobilisée pour la Tunisie en accordant 425 millions d'euros de prêts à conditions avantageuses sur la période 2011-2013, par l'intermédiaire de l'Agence française de développement.
* 4 La Tunisie dispose de huit sites inscrits au patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO : la médina de Tunis, le site archéologique de Carthage, l'amphithéâtre d'El Jem, le parc national de l'Ichkeul, la cité punique de Kerkouane et sa nécropole, la médina de Sousse, Kairouan et le site archéologique de Dougga.
* 5 Il s'est tenu du 8 au 12 mars 2017.
* 6 Cet appel a été lancé en 2014 par le magazine Tunisie Plus à l'attention d'un grand nombre de professionnels du tourisme afin que la relance touristique permette la reprise économique, condition nécessaire de l'ancrage de la démocratie en Tunisie.
* 7 Cette différence est essentiellement due à la redevance par passager, qui diffère selon les aéroports et les destinations. Ainsi, Aéroports de Paris prévoit une redevance de 9,98€ HT par passager à destination de l'UE tandis qu'elle est de 22,95€ par passager pour une destination hors UE.
* 8 Il s'agit d'une liste indicative adressée à l'UNESCO, un état prévisionnel des sites que la Tunisie entend proposer pour inscription ; elle est composée actuellement du parc national d'El Feija, du parc national de Bouhedma, du Chott El Jerid, de l'oasis de Gabès, des mausolées royaux de Numidie, de la Maurétanie et des monuments funéraires préislamiques, du complexe hydraulique romain de Zaghouan-Carthage, de l'île de Djerba, des carrières antiques de marbre numidique de Chimtou, des frontières de l'empire romain (« limes romain »), de la médina de Sfax, du permien marin de Jebel Tegaba et du stratotype de la limite Crétacé-Tertiaire (limite K-T) à El Kef.
* 9 Selon un classement réalisé par le magazine américain Daily News Dig en 2014.
* 10 Il aura lieu du 23 au 26 mai 2017 à Tataouine avec pour thème « le rôle du tourisme alternatif dans le développement durable des territoires fragiles des pays de la Méditerranée ».
* 11 Abdellatif Hmam a été nommé secrétaire d'État au Commerce dans le gouvernement de M. Youssef Chahed à la fin du mois de février 2017.