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Table des matières
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
Financement de la sécurité sociale pour 2010 (Conclusions de la CMP)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales
Fiscalité des ménages modestes
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales
Présidence du Conseil européen
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports
Projet de loi de finances pour 2010 (Deuxième partie)
Direction de l'action du Gouvernement
Publications officielles et information administrative
Erratum au compte rendu de la séance du mercredi 25 novembre 2009
SÉANCE
du jeudi 26 novembre 2009
36e séance de la session ordinaire 2009-2010
présidence de M. Roland du Luart,vice-président
Secrétaires : Mme Christiane Demontès, M. Alain Dufaut.
La séance est ouverte à 10 h 5.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
M. le président. - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein du Comité des usagers du réseau routier national et d'un sénateur appelé à siéger au sein du Comité d'évaluation de l'impact du revenu de solidarité. Conformément à l'article 9 du Règlement, j'invite la commission de l'économie, d'une part, et la commission des affaires sociales, d'autre part, à présenter des candidatures. Les nominations au sein de ces organismes extraparlementaires auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l'article 9 du Règlement.
Financement de la sécurité sociale pour 2010 (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.
Discussion générale
M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. - Le projet de loi initial, qui comprenait 54 articles, en compte aujourd'hui 97 : nous avons été productifs ! Son examen a donné lieu à des débats d'une grande richesse. Le Sénat a contribué à en améliorer le texte en adoptant 92 amendements, dont 43 à l'initiative de notre commission des affaires sociales. Sur de nombreux sujets, nos points de vue ont été en parfaite adéquation avec ceux de Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances. Plusieurs amendements du Gouvernement ont permis d'ajuster à la marge les équilibres du financement de la sécurité sociale. Le déficit prévisionnel du régime général pour 2010, de 30,6 milliards d'euros, n'est pas modifié. Les perspectives pluriannuelles le maintiennent à ce niveau jusqu'en 2013, ce qui justifie notre inquiétude.
L'organisation de nos travaux a été difficile. Nous avons siégé un week-end entier et terminé l'examen de ce texte dans la nuit de dimanche à lundi. Ce n'est pas satisfaisant. La commission des affaires sociales souhaite, à l'unanimité, que l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale en séance publique se déroule pendant une semaine entière et d'un seul bloc. Lors de la Conférence des Présidents qui s'est tenue hier, le Président du Sénat nous a indiqué que cette observation serait prise en compte dans le cadre de l'évaluation du fonctionnement de notre assemblée. Nous regrettons notamment de ne pas avoir pu mener le débat thématique sur la réforme des retraites. Nous essaierons de le tenir lors d'une prochaine semaine de contrôle -peut-être en janvier, bien que l'emploi du temps semble déjà chargé.
La CMP est parvenue à un accord sur les 56 articles qui restaient en discussion à l'issue de l'examen de ce projet de loi par le Sénat. Elle a maintenu la suppression de cinq articles, en a adopté trente dans le texte du Sénat, un dans celui de l'Assemblée nationale, supprimé quatre articles introduits par le Sénat et élaboré un nouveau texte pour seize articles. Parmi les dispositions revues par la CMP figure l'article 14, relatif aux retraites chapeau. Le principe d'une taxation plus forte des rentes les plus élevées, adopté par le Sénat à l'initiative conjointe des commissions des affaires sociales et des finances, a été maintenu ; l'assujettissement à des cotisations a été transformé en une contribution additionnelle de 30 %.
La CMP a précisé les modalités de mise en oeuvre de la contribution sociale sur les appels surtaxés dans le cadre des jeux télévisés, prévue à l'article 17 bis A, dont l'initiative revient à Nicolas About. Elle est parvenue à une rédaction commune sur l'article 29, relatif à la prise en charge du suivi médical des assurés après la sortie du régime des affections de longue durée (ALD). Je regrette un peu qu'elle n'ait pas retenu la disposition que nous avions adoptée pour donner une base législative au dispositif réglementaire : la loi devrait non seulement prévoir la fixation par décret de la durée du régime de suivi, mais aussi autoriser la fixation réglementaire de la durée d'admission en ALD. Le Gouvernement s'est engagé à publier un décret destiné à maîtriser l'entrée, la sortie et la durée du régime, ainsi que la prise en charge à 100 % par la suite.
Pour ce qui concerne l'article 30 quater, relatif à la responsabilité civile des gynécologues...
M. Guy Fischer. - On cède !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - La CMP a étendu le dispositif voté sur proposition de notre commission.
A l'article 32, la CMP est revenue à la date initiale de 2018 prévue par le Gouvernement pour l'achèvement du processus de convergence, alors que nous souhaitions que celui-ci soit terminé en 2014. Nous ne comprenons pas pourquoi six années sont nécessaires pour tirer les conséquences des études sur les écarts de coûts, qui seront achevées en 2012, ni pourquoi aucun échéancier n'est fixé pour atteindre cet objectif. Quel signal le Gouvernement veut-il ainsi donner ? Où est la volonté d'améliorer l'efficience des dépenses hospitalières ? Il aurait été souhaitable de fixer quelques rendez-vous afin de savoir si la convergence avance à petits ou à grands pas. Nous reprendrons l'initiative lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale car nous ne pouvons nous contenter d'une date aussi lointaine. Il faut avancer vers la convergence.
Pour la majoration des durées d'assurance, prévue à l'article 38, la CMP a ramené à trois ans au lieu de quatre le nombre d'années prévues avant que les parents se prononcent sur l'attribution de la deuxième partie de la majoration.
Enfin, la CMP a supprimé l'article 46 bis A, introduit à l'initiative de notre commission et de Jean Arthuis, Joseph Kerguéris et Alain Lambert, et qui consolidait juridiquement le regroupement des assistantes maternelles. Il s'agit, je l'espère, d'une incompréhension de la part de nos collègues députés car l'excellent rapport de Jean-Marc Juilhard et les expérimentations menées en Mayenne ont démontré la pertinence de notre proposition. Le dossier n'est pas clos et nous y reviendrons prochainement.
Nous regrettons que le Gouvernement souhaite revenir sur certains points de cet accord. Au cours des débats, un désaccord nous a opposés à Mme la ministre sur les dispositions relatives à la grippe A. Après avoir prévu d'affecter à l'assurance maladie la contribution financière à la campagne de vaccination des organismes complémentaires, le Gouvernement a fait volte-face et demandé son affectation à l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus), ce qui aurait eu pour effet de diminuer les sommes versées à ce dernier par l'État.
Nous ne partageons pas cette vision. L'assurance maladie est un tout : la participation des complémentaires doit s'imputer exclusivement sur la part de l'assurance maladie dans le financement de l'Eprus. Le Gouvernement entendait en outre faire financer par l'assurance maladie l'indemnisation des professionnels requis pour assurer la vaccination -qui, s'agissant d'une menace sanitaire, relève en totalité de l'État. Le projet de loi prévoyait enfin que les dépenses liées à la grippe A seraient neutralisées pour le déclenchement du seuil de dépassement de l'Ondam en 2010, ce qui nous a paru contestable. Outre que ces dépenses seront très difficiles à isoler, la grippe A ne pourra jamais expliquer à elle seule le dépassement d'un seuil d'alerte fixé en 2010 à 1,2 milliard d'euros. De plus, même liées à la grippe A, ces dépenses devront être financées : si l'alerte n'est pas déclenchée, nous fabriquerons du déficit supplémentaire. Nous ferons le point en 2011.
La CMP a validé l'ensemble de la position du Sénat sur la grippe. Mais le Gouvernement nous présente un amendement qui exclut à nouveau les dépenses liées à la grippe du seuil d'alerte de l'Ondam. Nous n'avons pas d'autre choix que de l'accepter, sauf à rejeter l'ensemble du texte. Mais nous persistons à penser que le Gouvernement prend ainsi une lourde responsabilité. Il donne le sentiment que l'Ondam 2010 est fixé à un niveau trop ambitieux et qu'on peut s'en affranchir lorsqu'il devient trop contraignant.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. - Mais non !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Nous suivrons donc attentivement son évolution au cours de l'année qui vient.
Je me félicite en revanche que le Gouvernement ait renoncé à revenir sur les décisions de la CMP relatives à la répartition des financements des dépenses liées à la grippe entre l'État et l'assurance maladie ; je souhaite que cette position ne soit pas modifiée lors de l'examen en loi de finances de la mission « Santé ». Je sais que MM. Jégou et Milon ont déposé des amendements à cette occasion...
J'en viens à la responsabilité des gynécologues-obstétriciens. Nous avons dû ici même nous prononcer dans l'urgence sur une question particulièrement délicate, à la suite d'amendements déposés l'un par M. Dominique Leclerc et l'autre par le Gouvernement. Le premier aurait fait disparaître toute responsabilité civile de ces médecins, puisque la solidarité nationale aurait assuré le paiement des dommages et intérêts, dès lors que le montant d'assurance du professionnel aurait été dépassé ; le second proposait la mise en place d'une action subrogatoire de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam) après la condamnation judiciaire d'un professionnel. Mais on ne voyait pas bien comment un juge pouvait être saisi pour statuer de nouveau ; et le Gouvernement envisageait que l'Oniam n'exerce son action que dans certains cas... Ce qui aurait fait naître un soupçon d'arbitraire et suscité de lourdes incertitudes juridiques.
Nous avions donc prévu, en accord avec le Gouvernement, que l'Oniam ne se substituerait au professionnel condamné à verser des dommages et intérêts que dans le cas où il ne serait plus couvert du fait de l'expiration du délai de validité de son assurance. Dans le même temps, le Gouvernement s'était engagé à relever les planchers d'assurance obligatoire des professionnels de santé de 3 à 6 millions d'euros par sinistre et de 10 à 12 millions d'euros par an. Il avait aussi précisé qu'il envisagerait de réévaluer l'aide au paiement des primes d'assurance. La position du Sénat a été entérinée en CMP, à ceci près que le dispositif de substitution a été étendu à l'ensemble des médecins libéraux.
M. Guy Fischer. - Voilà !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Le Gouvernement nous soumet aujourd'hui un amendement qui revient sur plusieurs de ces points. Il ne s'applique d'abord qu'aux médecins libéraux exerçant une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d'anesthésie réanimation, condamnés pour des dommages subis à l'occasion d'un acte lié à la naissance -ce qui conduit à traiter différemment les victimes et les professionnels. Il s'applique d'autre part aux condamnations à des sommes supérieures au niveau d'assurance du professionnel lorsqu'il y a « impossibilité pour la victime d'obtenir l'exécution intégrale de la décision de justice auprès du professionnel ». Quel est le sens de cette expression ? Suffira-t-il que le professionnel ne donne pas suite à une demande ? Faudra-t-il une action judiciaire en exécution conduisant à constater l'insolvabilité du professionnel ?
L'amendement prévoit que l'Oniam interviendra pour payer les sommes qui restent dues à la victime et qu'il aura la possibilité de se faire rembourser par le professionnel sauf si « le juge compétent a constaté l'incompatibilité du règlement de la créance avec la solvabilité du professionnel ». Cette expression est là encore imprécise : cela vise-t-il le cas où le professionnel, après dispersion de ses biens, n'est toujours pas en mesure de régler l'intégralité de la créance ? Ou celui où payer la créance risquerait de lui poser des difficultés ?
On peut ensuite se demander si le nouveau mécanisme n'est pas plus favorable à la procédure contentieuse qu'à la procédure amiable. Il semble enfin, dans la mesure où l'Oniam réglera les sommes dues au-delà du niveau du contrat d'assurance, qu'il incitera les professionnels à ne s'assurer qu'au niveau du plancher, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
M. Guy Fischer. - Mais oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Cet amendement est lourd d'incertitudes. Présenter, en lecture des conclusions de la CMP, une disposition qui modifie aussi substantiellement les conditions de recours à la solidarité nationale est en outre contestable. Nous aurons l'obligation d'y revenir. Les professionnels estiment que c'est un pas dans la bonne direction, mais un pas seulement.
Troisième sujet, la suppression du coefficient correcteur en faveur de certains établissements de santé. La commission était peu enthousiaste mais l'avait jugée légitime dès lors que l'horizon de la convergence était reporté à 2018. De nombreuses études ont été menées sur le sujet, qui toutes montrent un écart de charges entre les différentes catégories d'établissements au titre de leurs obligations légales et réglementaires. Doit-on vraiment attendre 2018 pour que les choses évoluent ? Dans la situation actuelle, on préserve l'hôpital public au nom de ses particularités mais on pénalise d'autres établissements en niant leur spécificité. Cette logique nous échappe.
Je conclurai par une remarque d'ordre général. Lors de l'examen de ce texte, nous entendions prendre nos responsabilités sur la question des déficits sociaux. L'effet dévastateur de la crise économique sur les recettes est une évidence ; mais voir la sécurité sociale s'installer dans une situation de déficit structurel est extrêmement inquiétant. M. Woerth ne l'a pas nié. En l'absence de mesures complémentaires, le retour de la croissance ne limitera pas l'ampleur du déficit. La dette cumulée, qui s'élève déjà à 92 milliards, pourrait augmenter encore de 170 milliards d'ici 2013. On ne peut la laisser à la charge des générations futures. C'est pourquoi nous souhaitions une hausse très modérée de la CRDS, dont le Gouvernement n'a pas voulu ; mais il a pris l'engagement que la question serait traitée dans le prochain projet de loi de financement, sur la base des propositions de la commission de la dette sociale qui sera bientôt créée autour de cinq sénateurs et de cinq députés. Je sais que lorsque M. Woerth prend des engagements, il les tient. Il faudra aussi se préoccuper des recettes.
Je me félicite de l'excellent climat qui a régné pendant les débats et de la qualité du dialogue avec le Gouvernement. Je remercie tous les rapporteurs et tous ceux qui ont participé à nos discussions. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale a pris beaucoup d'ampleur. Il répond très largement à nos souhaits passés. Je demande au Sénat d'adopter les conclusions de la CMP, même si elles ne sont pas totalement conformes à ce que nous voulions. L'essentiel est que nos concitoyens continuent de bénéficier de notre système de protection sociale dans des conditions globalement satisfaisantes. (Applaudissements à droite)
M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État. - Le texte initial de ce projet de loi de financement était plus resserré que celui de ces deux dernières années. La discussion parlementaire a permis de l'enrichir dans de nombreux domaines ; 43 articles ont été ajoutés et 174 amendements adoptés. Il était indispensable de faire le point de la capacité de la sécurité sociale à affronter la situation de crise exceptionnelle à laquelle elle est confrontée.
La première orientation, c'est la sortie de crise. C'est pourquoi nous avons refusé d'augmenter la CRDS, tout en nous engageant à mettre en place un groupe de travail qui proposera des solutions pour le prochain PLFSS. De même, nous n'avons pas voulu toucher aux allègements de charges ; il faudra aborder la question l'année prochaine.
La deuxième orientation, c'est la poursuite des réformes pour assurer la pérennité de notre système. L'Ondam a quasiment été respecté en 2009. L'objectif est de contenir l'augmentation des dépenses d'assurance maladie tout en préservant les principes fondamentaux de notre système.
La troisième orientation, c'est la préservation des recettes de la sécurité sociale avec la réduction des niches sociales. Nous avons souhaité élargir le financement de la sécurité sociale pour qu'il pèse moins sur le travail. Vous avez su résister aux nombreux courriers, et supprimé des niches sur certains revenus du capital comme les plus-values mobilières et les intérêts des contrats d'assurance vie multi-supports, objets d'une campagne de désinformation.
Enfin, la dernière orientation, c'est la lutte contre les fraudes. Vous avez validé les grandes orientations de ce texte. Vous l'avez aussi fait évoluer à travers vos amendements. Je remercie tout particulièrement vos rapporteurs mais aussi la présidente Dini ainsi que le président About.
En matière de recettes, vous avez supprimé le droit à l'image collective des sportifs ; là aussi, il fallait résister aux pressions ! Vous avez également complété l'article doublant le taux des contributions de l'employeur pour les retraites chapeau afin de rendre ce dispositif socialement plus acceptable. Enfin, à l'initiative de M. About, vous avez créé une contribution sur les appels téléphoniques surtaxés dans le cadre des jeux à la télévision ou à la radio.
M. Nicolas About. - Vous aurez peut-être de bonnes surprises : il y a des sous là-dedans !
M. Eric Woerth, ministre. - Je l'espère !
Dans le domaine de l'assurance maladie, vous avez amélioré le cadre législatif de maîtrise des dépenses. Roselyne Bachelot y reviendra dans la discussion des amendements.
S'agissant des retraites, vos amendements ont sécurisé le dispositif proposé en vue de la réforme des majorations de durée d'assurance, tout en traitant de façon humaine et équilibrée certaines situations difficiles.
Dans le domaine des accidents du travail et des maladies professionnelles, vous avez précisé les conditions d'application du bonus-malus.
Le Gouvernement s'est fixé comme objectif 200 000 nouvelles offres de garde d'ici 2012. Le regroupement d'assistantes maternelles peut constituer un formidable outil, à condition d'éviter une excessive complexité administrative. Le Gouvernement est prêt à faire évoluer, dans les meilleurs délais, les dispositions législatives dans le sens attendu par le président Arthuis. Si cette évolution prenait la forme d'une initiative parlementaire, elle aurait notre entier soutien !
Enfin, en matière de fraude, vous avez voté l'expérimentation du contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires par les CPAM, afin que tous les Français soient logés à la même enseigne, quel que soit leur statut.
M. Guy Fischer. - Il faudrait faire pareil pour les patrons !
M. Eric Woerth, ministre. - Ce texte est donc le résultat d'une parfaite collaboration entre Gouvernement et Parlement.
Le déficit de la sécurité sociale va rester pour plusieurs années à un niveau élevé, autour de 30 milliards, après le décrochage de 2009 et 2010. Ce n'est pas soutenable et, une fois la crise passée, nous devrons approfondir les réformes pour revenir à un niveau de déficit plus maîtrisé.
Le débat sur les solutions de l'après-crise va commencer dès l'année prochaine. La commission de la dette sociale, composée de cinq députés et cinq sénateurs, se réunira au printemps 2010 ; sur la base d'un rapport du Gouvernement, elle remettra ses conclusions en juin pour préparer le prochain PLFSS. Il ne s'agit pas de gagner du temps, mais de travailler main dans la main pour trouver des solutions.
Nous nous reverrons donc très vite pour garantir ensemble la pérennité de notre système de protection sociale. Aujourd'hui, j'espère que vous confirmerez votre soutien à notre politique en votant le texte de la CMP, ainsi que les six amendements présentés par le Gouvernement. (Applaudissements à droite)
M. Guy Fischer. - Avant tout, je salue le travail des rapporteurs, qui nous a permis d'avoir un échange de qualité : nos débats auront été riches en confrontations, au sens noble du terme.
Je regrette que Gouvernement et majorité aient pris le parti du « laisser filer ». Les déficits astronomiques vous invitaient pourtant à agir, non seulement sur les dépenses, mais aussi sur les ressources ! Nous vous avons proposé de taxer les parachutes dorés, les stock-options et autres retraites chapeaux, bref, d'assujettir tous les revenus du travail aux cotisations sociales. De même, nous avons plaidé, en vain, pour la suppression du bouclier fiscal, grâce auquel les plus riches échappent à leurs obligations de solidarité.
En 2007, 10 000 foyers fiscaux ont déclaré pour un milliard de stock-options ; 2 500 grands patrons ont cumulé 2,5 milliards en parachutes dorés ! Il est inadmissible que de telles sommes échappent aux cotisations sociales. Le doublement du forfait social est une avancée, mais il faut aller plus loin, au nom de la justice sociale et pour garantir la pérennité de notre système. L'amendement adopté en CMP sur les retraites chapeau nous laisse sceptiques ; la taxation dès le premier euro aurait été plus équitable.
Vous poursuivez cette année encore votre politique d'exonération de cotisations sociales à l'égard des entreprises. Ces parts de salaires socialisées sont pourtant la propriété des salariés : vous ne pouvez les utiliser à votre guise ! D'autant que ces exonérations sont de véritables trappes à bas salaires, accentuant la paupérisation des salariés et asphyxiant la sécurité sociale.
A l'heure actuelle, nous assistons à un écrasement des salaires et des retraites : nos concitoyens y sont très sensibles.
Concernant le financement de la branche maladie, nous regrettons que vous n'ayez pas mis l'industrie pharmaceutique un peu plus à contribution. Pourtant, les laboratoires se portent bien : le premier groupe pharmaceutique français, numéro quatre mondial, affiche une hausse de 6,4 % de son bénéfice net consolidé, qui s'élève à 1,4 milliard, et le laboratoire Ipsen annonce une hausse de son chiffre d'affaires de 5,4 %, soit moins que le laboratoire lyonnais Boiron qui a vu son chiffre d'affaires croître de 7,5 %. Or, vous préférez recourir au mécanisme théoriquement exceptionnel de l'année dernière, à savoir l'instauration d'une taxe sur les organismes d'assurance complémentaire, au nom, cette année, de la lutte contre la pandémie de grippe A. Cette explication n'est pas crédible : votre ministère a acheté 94 millions de doses de vaccins, soit un coût de 712 millions. Or, la contribution des organismes d'assurance maladie complémentaire, qui correspond à leur prise en charge habituelle de 35 %, se montera à 870 millions. Au mieux, les mutuelles contribueront plus que ce qu'elles devraient ; au pire, il ne s'agit que d'un prétexte pour les contraindre à participer encore un peu plus au financement de notre système. D'ailleurs, ces sommes seront versées à la Caisse nationale d'assurance maladie et non à l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus).
De plus, nous dénonçons le mouvement assurantiel actuel. Qu'il s'agisse du déremboursement de plusieurs centaines de médicaments ou de la création du secteur optionnel, nous assistons à une substitution progressive de la sécurité sociale par les organismes complémentaires, ce qui fragilise notre pacte social et le principe selon lequel chacun contribue selon ses capacités et perçoit selon ses besoins.
Le modèle vers lequel vous nous menez, inspiré du système américain, est injuste car il repose sur la seule capacité contributive des assurés : seuls les contrats les plus chers prendront en charge le secteur optionnel. Ce secteur étant appelé à s'étendre, notamment parce qu'il siphonnera le secteur 1, les inégalités vont s'accroître et les patients les plus démunis seront fragilisés.
Nous nous étonnons aussi de l'amendement déposé en commission mixte paritaire par notre rapporteur général concernant la couverture d'assurance des médecins libéraux par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). Initialement prévue pour les seuls obstétriciens, cette mesure a été étendue à tous les généralistes. Notre rapporteur général aurait été mieux inspiré de présenter cet amendement en séance publique, car attendre la commission mixte paritaire pour proposer ce dispositif s'apparente à un dévoiement de procédure. (M. Alain Vasselle proteste)
Sur le fond, il fallait agir car ce ne sont pas aux enfants de médecins d'assumer financièrement les erreurs médicales de leurs parents. Mais il aurait fallu prévoir des règles plus strictes à l'égard des assureurs, afin d'éviter qu'ils n'en profitent pour réduire leurs protections.
Enfin, nous sommes totalement opposés à l'article 29 de ce projet de loi de financement concernant les affections de longue durée (ALD). Nous voulions la suppression de cet article qui va réduire la prise en charge à 100 % des patients en ALD. On assiste là à la première attaque frontale contre le remboursement de ces affections. Bien sûr, les enjeux sont très importants : M. Vasselle estime qu'il est encore possible de trouver de l'argent dans les budgets hospitaliers et sur les ALD. On est d'accord ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Ce n'est pas ainsi qu'il faut interpréter mes propos !
M. Guy Fischer. - C'est pourtant bien ce que vous faites ! Chacun se souvient de vos propos discourtois tenus à l'encontre de notre groupe lors de l'examen de cet article. Je ne les ai pas encore digérés ! Nous ne sommes pas du tout convaincus. Vous avez tenté de nous faire croire que cette disposition ne changeait rien au fond...
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Vous comprenez ce que vous voulez bien comprendre !
M. Guy Fischer. - ...et que les patients seraient toujours indemnisés de la même manière.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Vous êtes enfermés dans votre idéologie !
M. Guy Fischer. - Pourquoi changer les règles si cela n'emporte aucune conséquence ? Nous sommes encore plus inquiets après le passage en commission mixte paritaire, car les propos y étaient quelque peu différents de ce qui s'est dit ici. M. Jean-Pierre Door, rapporteur à l'Assemblée nationale, a estimé qu'il fallait réformer un système « très généreux ». C'est lâché ! Les personnes âgées et les personnes qui souffrent de maladie chronique doivent savoir à quoi s'en tenir ! On va les faire payer !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Les patients en ALD ne sont pas que des personnes âgées...
M. Guy Fischer. - C'est ce que je viens de dire !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Ils continueront à être pris en charge à 100 % ! Ce que vous dites est complètement faux !
M. Guy Fischer. - S'il est vrai que nous avons un des systèmes qui accompagnent le mieux les malades chroniques, il n'est pas généreux, mais solidaire ! Au-delà d'une simple querelle sémantique, c'est bien d'une différence de conception dont il s'agit, et il est bien plus facile de s'attaquer à une mesure généreuse que solidaire ! Nos craintes étaient donc fondées. Certes, il ne s'agit pas de la première, ni de la seule attaque à l'encontre de mesures solidaires.
Concernant la branche retraite, nous n'acceptons pas la suppression de la majoration des durées d'assurance dont bénéficiaient les femmes depuis 1976. (Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre, s'exclame) Cette majoration permettait de compenser les inégalités salariales dont elles étaient victimes et qui persistent encore aujourd'hui : le salaire des femmes équivaut à 73 % de celui des hommes et les retraites des femmes ne représentent que 62 % de celles des hommes : ainsi, 50 % des femmes à la retraite touchent moins de 900 euros par mois. En décidant de ne garantir aux femmes que quatre trimestres supplémentaires, vous risquez de les priver totalement ou partiellement des quatre trimestres restant ce qui réduira d'autant leurs pensions. Ce mauvais coup s'ajoute malheureusement à la suppression de l'allocation équivalent retraite et à la réintégration d'une condition d'âge pour bénéficier de la pension de réversion. En deux ans, ces trois mesures vont réduire les retraites des femmes, frappant leur pouvoir d'achat et leur qualité de vie. Ces décisions augurent mal du débat sur les retraites en 2010. La voie est déjà tracée : allongement pour tous de la durée de cotisations. Nous serons très vigilants et mobilisés, notamment sur la question de la reconnaissance de la pénibilité.
Pour ce qui est de la branche accidents du travail, maladie professionnelle, (ATMP) d'importants efforts restent à faire. Par respect pour les victimes, et parce que vous refusez l'instauration d'une réparation intégrale, il faudrait fixer le montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) à 100 % du Smic, et il conviendrait de permettre aux couples pacsés de bénéficier de la rente viagère que touchent les couples mariés. Il aurait d'ailleurs fallu rétablir la contribution au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) que vous avez supprimée l'année dernière. Cette contribution ne doit en effet pas être supportée par toutes les entreprises, mais par celles qui ont exposé leurs salariés à l'amiante.
J'en viens à la branche famille. Vous avez refusé l'extension de la pension de réversion aux couples pacsés et la modulation de l'allocation de rentrée scolaire en fonction du niveau d'études et de la nature de l'enseignement poursuivi. Pourtant, une rentrée dans l'enseignement professionnel coûte entre deux et trois fois plus cher que dans l'enseignement général. Les seules mesures nouvelles ont trait à l'extension du prêt pour l'amélioration de l'habitat aux assistants maternels et au regroupement des assistantes maternelles. Ce mode de garde, s'il peut constituer un complément aux crèches, ne doit pas les remplacer, d'autant que les familles, monoparentales y sont très attachées : 65 % des familles réclament plus de crèches, loin devant l'augmentation du nombre d'assistants maternels. Aujourd'hui, 350 000 places supplémentaires seraient nécessaires. En raison de ce déficit grave, seul un bébé sur dix peut être accueilli en crèche ou en halte-garderie. Pour changer la donne, il faut modifier radicalement le cours des politiques familiales.
Comme de très nombreux acteurs de la politique familiale, nous demandons l'octroi des allocations familiales dès le premier enfant, car c'est dès sa naissance que les frais augmentent.
A l'heure où, sous l'impulsion du Gouvernement, s'ouvre un débat sur l'identité nationale, je vous rappelle combien nos concitoyens sont attachés aux services publics. Selon un sondage réalisé par le CSA et Le Parisien, 60 % des Français considèrent comme aussi importants que la Marseillaise ou le drapeau tricolore, les services publics.
M. Nicolas About. - Après la langue française et les droits de l'homme, quand même !
M. Guy Fischer. - A n'en pas douter, ils sont au moins aussi nombreux, si ce n'est plus encore, à considérer notre protection sociale comme faisant partie de leur patrimoine. C'est pourquoi nous voterons contre ce projet de loi de financement pour 2010 car il porte en germe la disparition de ce système spécifique, issu du Conseil national de la Résistance, et qui fait la fierté de notre pays.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Ce fut un discours idéologique !
M. Nicolas About. - Compte tenu de la situation économique, il s'agit d'un projet de loi de financement d'attente qui présente trois caractéristiques : une relative maîtrise des dépenses d'assurance maladie, et c'est son seul aspect véritablement positif ; des recettes très lourdement marquées par la conjoncture qui nous conduisent à un déficit historique ; enfin, un nombre extrêmement réduit de mesures nouvelles. Cette dernière caractéristique est directement liée à la précédente et nous comprenons bien la stratégie gouvernementale consistant à accompagner la sortie de crise en ne pressurant pas le système au creux de la vague.
Dans le même temps, il est insupportable de laisser filer les déficits sans rien faire. MM. les rapporteurs l'ont déjà dit. Pour clarifier la situation, nous avons proposé que l'État reprenne à sa charge la partie conjoncturelle du déficit assumée par l'Acoss. Nous nous réjouissons que le Gouvernement n'ait pas fermé la porte à cette solution. Nous attendons beaucoup de la commission de la dette sociale que vous vous êtes engagés, madame, monsieur les ministres à réunir dans les plus brefs délais afin que des décisions énergiques soient prises dès le printemps prochain.
Si la question du déficit a été abordée dans un esprit d'ouverture, nous regrettons que la commission mixte paritaire soit revenue sur deux points importants du texte adopté par le Sénat.
Nous regrettons que la CMP soit revenue sur la date de 2014 pour l'achèvement de la convergence tarifaire car notre groupe, attaché à la convergence intrasectorielle, soutient également le volontarisme politique en matière de convergence globale.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Très bien !
M. Nicolas About. - Même regret concernant l'article sécurisant les regroupements d'assistants maternels, adopté à l'unanimité par le Sénat, moins une abstention. Le dispositif proposé, qui autorisait notamment la délégation d'accueil, prenait acte de l'expérience fructueuse menée par M. Arthuis en Mayenne en corrigeant la rigidité de la convention imposée par la Cnaf. Sa suppression par la CMP sonnait comme une remise en question de la libre administration des départements, difficilement acceptable au Sénat. Aussi nous réjouissons-nous que le Gouvernement ait trouvé un accord avec M. Arthuis selon lequel il présentera sa proposition de loi au nom de notre groupe dès le 14 janvier.
Hélas !, la remise en cause des acquis du Sénat se poursuit aujourd'hui avec certains des amendements présentés par le Gouvernement. Si l'amendement rétablissant l'article 28 dans sa rédaction initiale pour neutraliser le surcoût des dépenses liées à la grippe A au regard de l'Ondam peut encore se comprendre, l'amendement supprimant l'article 32 bis A l'est moins. Pour nous, les établissements sociaux, parce qu'ils supportent de lourdes obligations légales et réglementaires, doivent bénéficier d'un coefficient correcteur dans la convergence tarifaire.
Cela dit, il n'est pas question de noircir le tableau. La CMP a conforté le texte du Sénat, notamment sur les retraites chapeau et le droit à l'image collective des sportifs, de même que nos amendements tendant à préciser le contenu du tarif d'hébergement en maisons de retraite et visant à créer, à ma modeste initiative, une contribution sur les jeux télévisés ou audio diffusés. Il ne nous semble pas anormal que la protection de l'Oniam, en cas de condamnation judiciaire d'un professionnel de santé couvert par son assurance, soit restreinte aux professions de la périnatalité. Un tel dispositif est indispensable, faute de quoi nous n'aurions bientôt plus d'obstétriciens. En revanche, nous devrons peut-être revenir sur la question de la protection par l'Oniam des médecins insolvables qui pourrait inciter certains professionnels à organiser leur insolvabilité. Pour ce qui concerne l'amendement relatif au délai de choix pour l'attribution de la majoration parentale d'assurance vieillesse, je me réjouis que l'on ait retenu la position du Sénat.
En conclusion, même si la CMP est décevante sur des points ponctuels, elle est globalement positive. Dans la perspective du rendez-vous du début de l'année sur la dette sociale, l'immense majorité du groupe votera ce texte d'attente. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Yves Daudigny. - Texte décevant.
M. Bernard Cazeau. - Cette CMP ne manquait pas d'intérêt... Quelques points ont été clarifiés et améliorés, le rapporteur général l'a dit. Mais, que le Gouvernement présente après la CMP des amendements -comment dire ?- polémiques montre combien il fait peu de cas de sa majorité et du Parlement ! De toute façon, c'est devenu l'habitude...
Nos débats, de bonne tenue, n'ont pas abouti : le tabou financier n'a pas été levé ; l'omerta gouvernementale, qui interdit de poser les questions qui fâchent, a mis au pas les orateurs les plus intrépides de la majorité. N'est-ce pas, monsieur Vasselle ? (M. Guy Fischer renchérit ; M. Nicolas About s'exclame)
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Ne me provoquez pas !
M. Bernard Cazeau. - Monsieur About, vous-même, fort vindicatif à l'ouverture des débats, vous avez sombré dans un mutisme de bon aloi... Au fil des jours, la combativité constructive a cédé la place à une passivité complice.
Pourtant, la situation est dramatique : nous serons trois fois plus déficitaires au sortir de la crise et le dérapage conjoncturel s'est transformé en déficit structurel. La stabilisation promise repose sur des prévisions béatement aventureuses. Une croissance annuelle de 5 % de la masse salariale à partir de 2011 ? Mais au plus fort de l'expansion à la fin des années 1990, celle-ci ne progressait que de 4 % par an ! Il me souvient que, fin 2008, vous promettiez le retour à l'équilibre pour 2012... Même en reprenant vos hypothèses hypervolontaristes, comme le disait poliment l'un de nos collègues, nous accumulerons au moins 135 milliards de déficit entre 2009 et 2013 qui s'ajouteront à la dette sociale. Pour autant, il faudrait patienter pour ne pas hypothéquer la sortie de crise. Est-ce une raison pour hypothéquer la sécurité sociale ? Vous préférez, de manière caricaturale, dire aux Français : « Dormez tranquilles, braves gens ! » Mais les Français savent et leur inquiétude, précisément, retarde la reprise. Comment voulez-vous que les Français consomment quand ils craignent une hausse de leur complémentaire, des soins moins remboursés et une retraite détériorée ? Monsieur Woerth, la compétitivité de l'économie n'est pas seulement fonction du taux de prélèvements obligatoires, mais aussi de la confiance de la société dans ses institutions de prévoyance sociale. D'où la nécessité de stopper l'hémorragie. Mais ce texte ne comporte aucune mesure en faveur du rétablissement des comptes : pas de reprise de dette ou un peu...
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Non ! Rien du tout !
M. Bernard Cazeau. - ...aucune action efficace sur les recettes, un relèvement historique du plafond de l'Acoss à 65 milliards, aucune décision sur le taux de la CRDS, malgré les interventions de MM. Arthuis et Jégou. Bref, c'est la fuite en avant !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Attendez la commission sur la dette sociale !
M. Bernard Cazeau. - Quant aux perspectives d'économies, elles reposent sur de telles affirmations qu'on peine à les commenter sans sourire : un hôpital qui coûterait moins cher parce qu'on changerait son mode de tarification, des soins de villes qui n'augmenteraient presque pas alors que des négociations tarifaires sont en cours, des prescriptions de médicaments spontanément économes... Monsieur Woerth, j'ai lu vos propositions dans Le Monde. Mais nous ne sommes ni dans les années 1960 où les gens ne se soignaient pas ni dans les années 1980 où les gens avaient peur d'aller à l'hôpital ; aujourd'hui, les gens demandent des soins, ils vont à l'hôpital car ils savent qu'ils y trouveront une infirmière, une aide-soignante. Et encore, pas toujours, et peut-être de moins en moins... Mme Bachelot le sait, mais elle préfère négocier avec les syndicats médicaux chapeautés par d'anciens rétrogrades tenant de cette liberté tarifaire si destructrice pour la sécurité sociale. Il faut tenir compte de l'évolution de notre société, inventer un nouveau mode de gouvernance avec les professions de santé, la médecine de ville. Certes, c'est difficile ! Mais, depuis des années, vous ne faites rien en ce sens !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Nous avons bien commencé !
M. Bernard Cazeau. - Seules décisions notables de ce texte, celles consistant à taper sur les assurés sociaux ! Nous refusons cette politique de déremboursement, de franchise et de redevance, au nom de la justice sociale.
Les contributions doivent varier selon les revenus de la personne et non selon son état de santé. Avec les mécanismes d'individualisation de la dépense que vous multipliez, plus les années passent et plus les malades paient pour eux-mêmes. Entre 2001 et 2009, les coûts directs de santé dans le budget des ménages, hors cotisations sociales, ont augmenté de 40 à 50 %. Les chiffres sont pires encore pour les personnes âgées.
Vous dénaturez ainsi la philosophie de l'assurance maladie. Le désengagement de la sécurité sociale, dont le fonctionnement est de plus en plus calqué sur celui des assurances individuelles, ne saurait plus durer. C'est avant tout à ceux qui bénéficient de revenus importants qu'il incombe de participer à la solidarité collective. La Cour des comptes a tracé des pistes en 2008, estimant à 2 ou 3 milliards annuels les recettes qui résulteraient d'un assujettissement des revenus non salariaux à une fiscalité normale. Qu'attendez-vous pour en finir avec les niches sociales ? Quand donc vous rendrez-vous à l'évidence dont la grande majorité des sénateurs, toutes travées confondues, a depuis longtemps pris conscience : la sécurité sociale a besoin de nouvelles recettes pérennes et dynamiques ? Temporiser comme vous le faites, c'est approuver la privatisation rampante de la prise en charge des soins (M. Guy Fischer et Mme Raymonde Le Texier approuvent) et le développement des inégalités dans l'accès à la santé. Nous ne pouvons le cautionner. C'est la raison pour laquelle nous voterons contre votre projet. (Applaudissements à gauche)
M. Yvon Collin. - Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 est marqué par un triste record : 30 milliards de déficit. Et la fuite en avant se poursuit. Tout le monde en convient : la situation de notre système de protection sociale est alarmante. Certes, la crise, qui pèse sur les recettes, aggrave la situation. Mais la reprise de la croissance, même dans les hypothèses les plus favorables, ne suffira pas à rétablir l'équilibre de nos comptes sociaux, l'ampleur des besoins ne faisant que s'accentuer sous l'effet des évolutions démographiques.
Face à ces difficultés structurelles, votre texte, madame la ministre, reste frileux. Nous ne pouvons laisser nos enfants ou nos petits-enfants devant un tel abîme. Des réformes de fond s'imposent, dans lesquelles vous ne vous engagez pas.
Certes, vous faites de la chasse à certaines niches sociales l'une des mesures phare de votre texte ; vous doublez la contribution employeur sur les retraites chapeau et le taux du forfait social sur un certain nombre d'assiettes exonérées : on ne peut que s'en féliciter. Mais il fallait aller plus loin, notamment sur des niches dont la justification reste très contestable.
Avec plusieurs de mes collègues du RDSE menés par M. Barbier, nous avions déposé des amendements qui, dans un souci d'équité sociale et d'efficacité, proposaient d'exclure l'augmentation de la CSG et de la CRDS des impositions directes prises en compte pour l'application du bouclier fiscal. Je regrette vivement que ces amendements n'aient pas eu le soutien de notre assemblée alors qu'il s'agit d'une étape incontournable (M. Guy Fischer approuve) à laquelle nous n'échapperons pas. On ne peut plus demander aux seuls Français qui ont des revenus modestes de supporter le règlement de la dette.
Je regrette également la suppression par la CMP d'un amendement défendu par M. Barbier et adopté par le Sénat, qui imposait aux sages-femmes de communiquer au médecin traitant les informations qu'elles recueillent lors des consultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention, dans le souci d'un meilleur suivi de la patiente. Nous ne comprenons pas en quoi cette mesure pose problème.
Je regrette, enfin, la méthode employée par le Gouvernement qui a, à l'issue de la CMP, présenté des amendements modifiant substantiellement la rédaction. Après la deuxième délibération, hier soir, sur la première partie du projet de loi de finances, en voici en somme une autre, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Vous insistez pour écarter les dépenses exceptionnelles liées à la grippe A de la procédure d'alerte, disposition pourtant supprimée par le Sénat, suivi en cela par la CMP. Il s'agirait, dites-vous, d'éviter le déclenchement d'une alerte sur un risque de dépassement lié à une situation exceptionnelle. La vérité est que vous faites tout pour éviter d'avoir à prendre les mesures nécessaires à un redressement.
C'est par le même procédé que vous réservez la couverture assurance aux chirurgiens, anesthésistes et gynécologues-obstétriciens alors que la représentation nationale en a prévu l'extension à tous les médecins libéraux. (M. Alain Vasselle, rapporteur, le confirme) La plupart des initiatives raisonnées et responsables que nous avions adoptées pour fournir de nouvelles recettes aux comptes de la sécurité sociale ont été retirées à la dernière minute du texte définitif. (M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis, le confirme)
Comme lors de l'examen du projet de loi Hôpital, nous étions unanimes, sur ces bancs, pour vous reconnaître une réelle qualité d'écoute. Mais ce que vous faites aujourd'hui, en revenant sur les conclusions de la CMP, n'est pas de nature à faciliter le dialogue (Mme Raymonde Le Texier le confirme), d'autant que le Sénat se prononçant après l'Assemblée nationale, nous sommes requis de le faire en un seul vote.
Vous comprendrez que les motifs de satisfaction n'étant pas suffisants, quinze membres de mon groupe ne pourront pas se prononcer en faveur de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements à gauche)
M. Yves Daudigny. - A quoi sert la représentation nationale ? Les conditions d'examen de ce texte témoignent du mépris dans lequel ce Gouvernement tient le Parlement, et peut-être du peu de considération qu'il accorde à la loi de financement.
Un débat qui après cinq jours s'achève dans la nuit du dimanche 15 novembre à trois heures du matin, sur les comptes de la branche famille, qui méritaient mieux... L'obstination de l'Élysée à faire passer, coûte que coûte, le projet de loi relatif à la privatisation de La Poste ayant repoussé l'examen de ce texte, le débat thématique sur les conséquences de la pénibilité au travail a été purement et simplement supprimé.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - La faute à qui ?...
M. Yves Daudigny. - Alors que nous nous étions félicités l'an dernier d'avoir lancé ce type de débat, nous n'avons plus eu cette année qu'à nous plier aux desiderata du Gouvernement sur l'ordre du jour.
Le vote du Parlement est si formel qu'au-delà d'une application, très stricte, de l'article 40, qui anéantit une grande partie de nos propositions, vous trouvez encore moyen de marchander le retrait d'amendements contre la promesse de textes réglementaires. Ainsi de la question des sanctions prévues en cas de dépassement de la date limite fixée pour l'agrément d'accords salariés pour l'agrément du montant de la contribution financière des régimes d'assurance maladie à la mise en place des agences régionales de santé ou des conditions de sortie d'une affection de longue durée.
M. Guy Fischer. - Et le forfait hospitalier !
M. Yves Daudigny. - Comptez sur notre vigilance, madame la ministre, pour vérifier que ces engagements seront tenus. Car vous n'avez pas tenu parole pour l'ordonnance prévue par l'article 115 de la loi Hôpital. Je veillerai personnellement à l'engagement que vous avez pris concernant la prestation de compensation du handicap en contrepartie de l'abandon de l'amendement de péréquation soutenu par notre collègue Paul Blanc.
Le vote du Parlement est si formel que le relèvement du plafond de trésorerie de l'Acoss ou la création de franchises à charge des assurés sociaux sont décidés hors de cet hémicycle, par le Gouvernement. Nous verrons ce que dira le Conseil d'État de la nouvelle hausse du forfait hospitalier...
M. Guy Fischer. - 13,5 %, c'est scandaleux !
M. Yves Daudigny. - ...qui, ajoutée au nouveau déremboursement des médicaments, pourrait bien constituer un reste à charge tel pour les assurés qu'il entrave leur accès aux soins et porte atteinte au droit fondamental à la santé.
Mme Raymonde Le Texier. - Évidemment !
M. Yves Daudigny. - Le vote du Parlement est si formel qu'après accord en commission mixte paritaire, le Gouvernement s'autorise à déposer de nouveaux amendements et nous demande de revenir, à peu de chose près, au projet initial. (Mme Roselyne Bachelot-Narquin proteste)
Le Sénat avait supprimé l'article 28 qui excluait les dépenses liées à la pandémie grippale de l'évaluation du risque de dépassement de l'Ondam par le comité d'alerte. Or, avec l'article 6 rectifiant le montant de la contribution des régimes obligatoires d'assurance maladie au financement de I'Eprus et l'article 10, qui prévoit une contribution des assurances complémentaires, vous vous déchargez sur l'assurance maladie et les mutuelles des dépenses liées à une pandémie qui relève pourtant bien de la santé publique, donc de la responsabilité de l'État. Comment prétendre, sans contradiction, intégrer ces dépenses à l'assurance maladie, et pas à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie lorsqu'il est soumis à l'appréciation du comité d'alerte ? En nous demandant de revenir sur un vote confirmé en CMP, vous voulez nous faire manger notre chapeau.
Toutes nos propositions ont été rejetées. Les raisons qui nous ont convaincu de voter contre ce texte subsistent entièrement.
Ce budget est fondé sur des hypothèses de croissance hypocrites, irréalistes insincères et irresponsables. Le Gouvernement table sur une augmentation de la masse salariale de 5 % par an alors qu'entre 1998 et 2000, les comptes de la sécurité sociale étant équilibrés, elle ne dépassait pas 3,7 % par an. Il prévoit également une hausse annuelle du PIB de 2,5 %, mais n'ignore pas que ces chiffres devront être revus à la baisse.
C'est un projet irresponsable, qui ne comporte aucune mesure structurelle propre à réformer un système menacé d'asphyxie : le déficit écrasant menace aujourd'hui l'avenir de l'organisation solidaire de notre protection sociale, mais le Gouvernement regarde couler la barque. Quel est son objectif ? A court terme la victoire aux régionales, à long terme une France privatisée : tous nos services publics -justice, police, éducation nationale, poste, hôpital- font aujourd'hui les frais de cette politique. (Applaudissements à gauche) Les agences régionales de santé vont coûter fort cher aux régimes sociaux, mais le ministère demande au Parlement un chèque en blanc ! Son inertie s'explique par son dogmatisme : il était possible d'agir sur les niches fiscales qui nous font perdre 70 milliards d'euros de recettes.
M. Guy Fischer. - Il ne le veut pas !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - C'est fait en partie.
M. Yves Daudigny. - Ce sont donc les assurés qui devront supporter la charge du déficit.
Les inégalités face à la santé s'aggravent, et ce ne sont pas les nouvelles conditions de sortie du régime des affections de longue durée, la division par deux de la majoration de durée d'assurance des femmes ayant élevé un enfant, la hausse du forfait hospitalier, les déremboursements de médicaments ou la fiscalisation des indemnités journalières des accidentés du travail qui les résorberont.
« Vous n'avez pas le droit, madame la ministre de la santé, de ne pas dire la vérité aux Français » : ainsi s'exprimait la majorité en 2002, alors que les comptes sociaux étaient à l'équilibre. (Applaudissements à gauche) Que ne la dites-vous aujourd'hui, madame la ministre ? Que n'annoncez-vous un déficit de 170 milliards d'euros et la fin de la protection sociale solidaire en France ?
M. Nicolas About. - Qu'avez-vous fait de la croissance ?
M. Yves Daudigny. - « Nos divergences dans ce débat, ce ne sont pas seulement nos approches respectives des comptes sociaux. Je crois plus globalement que ce sont bien des divergences fondamentales qui nous opposent sur les orientations que nous devons donner à nos politiques sociales et sur les droits sociaux dont doivent pouvoir bénéficier nos concitoyens. » Nous n'avons rien à changer à ce constat porté il y a sept ans : c'est pourquoi nous ne voterons pas ce projet de loi. (Applaudissements à gauche et sur les bancs du RDSE)
Mme Raymonde Le Texier. - Je voudrais revenir sur une des principales injustices comprises dans ce texte : la révision de la majoration de durée d'assurance (MDA), ces huit trimestres de retraite jusqu'ici perçus par les femmes au titre de l'éducation des enfants. Cette compensation est divisée par deux au nom de la lutte contre les discriminations et les inégalités. C'est fort intéressant, car c'est justement pour tenter de réduire les inégalités économiques entre les hommes et les femmes, en particulier devant la retraite, que la MDA a été instituée au début des années 1970.
M. Guy Fischer. - Par la loi Boulin, en effet.
Mme Raymonde Le Texier. - Nous sommes tous d'accord pour dire que cette compensation doit être accordée à un homme ayant élevé seul ses enfants. La MDA est d'ailleurs parfaitement compatible avec le droit européen : les prestations du régime général n'entrent pas dans le champ des dispositions communautaires qui imposent un traitement identique des hommes et des femmes. Quant à savoir si le délai d'option ouvert aux parents pour le partage de la MDA doit être de trois ou quatre ans, ce débat est puéril. En revanche, étant donné que vous avez décidé de partager la MDA entre les hommes et les femmes sans augmenter le budget afférent, de jouer les pères contre les mères, la question est de savoir si les inégalités entre les hommes et les femmes ont suffisamment reculé pour justifier cette perte de revenus pour ces dernières.
Neuf femmes retraitées sur dix bénéficient actuellement de la MDA, qui représente 20 % de leurs pensions : la réforme n'est donc pas anodine ! Ne me dites pas qu'elle ne concerne que la deuxième année de majoration : cela ne change rien à l'affaire.
Les salaires des femmes sont en moyenne de 27 % inférieurs à ceux des hommes ; 87 % des smicards sont des smicardes ! Si l'écart de rémunération s'est réduit entre les années 1970 et le milieu des années 1990, il s'est maintenu depuis. A cela s'ajoute le travail partiel, généralement subi, qui touche à 80 % des femmes : près d'une femme sur trois travaille à temps partiel contre un homme sur vingt. Pas moins de 78 % des emplois non qualifiés sont occupés par des femmes : outre les immigrés, ce sont bien les femmes qui constituent la principale réserve de main-d'oeuvre bon marché et corvéable à merci.
Ces inégalités se répercutent sur les retraites. Selon le Conseil d'orientation sur les retraites, les pensions des hommes sont actuellement deux fois plus élevées que celles des femmes. Au sein de la génération de 1965-1974 qui partira prochainement à la retraite, cet écart devrait se réduire à 40 %. Mais un tiers des femmes vivant avec moins de 600 euros par mois sont des retraitées. Tout démontre une féminisation de la pauvreté dans notre pays.
Un dernier chiffre enfin, qui prouve une nouvelle fois la discrimination dont les femmes sont l'objet : elles consacrent trois fois plus de temps que les hommes à l'éducation de leurs enfants. Quand la parité aura été atteinte sur ce point, et quand les femmes recevront le même salaire que les hommes pour une tâche équivalente, alors on pourra réformer la MDA. Hélas, ce n'est pas pour demain. L'autisme du Gouvernement sur ce sujet nous fournit une nouvelle raison de ne nous opposer à ce projet de loi. (Applaudissements à gauche)
M. le président. - Le Gouvernement souhaite-t-il répondre ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Nous avons répondu par avance.
La discussion générale est close.
Discussion du texte de la CMP
M. le président. - En application de l'article 42, alinéa 12 du Règlement, le Sénat examinant le texte de la CMP après l'Assemblée nationale, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements acceptés par le Gouvernement.
Article 4 (pour coordination)
M. le président. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 3, tableau
Rédiger ainsi le tableau :
(en milliards d'euros)
|
Prévisions de recettes |
Objectifs de dépenses |
Solde |
Maladie |
162,3 |
173,8 |
-11,5 |
Vieillesse |
178,4 |
187,9 |
-9,5 |
Famille |
56,6 |
59,7 |
-3,1 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
12,1 |
12,6 |
-0,5 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
403,8 |
428,4 |
-24,6 |
II. - Alinéa 5, tableau
Rédiger ainsi le tableau :
(en milliards d'euros)
|
Prévisions de recettes |
Objectifs de dépenses |
Solde |
Maladie |
139,3 |
150,8 |
-11,5 |
Vieillesse |
90,7 |
98,9 |
-8,2 |
Famille |
56,1 |
59,2 |
-3,1 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
10,5 |
11,2 |
-0,6 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
291,2 |
314,6 |
-23,4 |
M. Eric Woerth, ministre. - Cet amendement de coordination tient compte de la modification de la dotation de l'assurance maladie à l'Eprus en 2009. L'argument vaut aussi pour l'amendement n°2 à l'article 7.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - La commission n'y voit pas d'objection.
M. Bernard Cazeau. - Le groupe socialiste ne participera pas au vote sur les amendements du Gouvernement, parce qu'il ne souhaite pas cautionner cette mascarade ni s'immiscer dans les affaires internes de la majorité.
M. le président. - Encore une fois, nous ne voterons que sur l'ensemble du texte.
Le vote de l'amendement n°1 et de l'article 4 est réservé.
Le vote de l'article 6 est réservé.
Article 7
M. le président. - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 2, tableau
Rédiger ainsi le tableau :
(en milliards d'euros)
|
Objectifs de dépenses |
Maladie |
173,8 |
Vieillesse |
187,9 |
Famille |
59,7 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
12,6 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
428,4 |
Le vote de l'amendement n°2 et de l'article 6 est réservé.
Le vote des articles 9, 11, 12, 14, 17 bis A, 17 ter, 17 quater, 18 bis, 21, 22 et 23 est réservé.
Article 28 (supprimé)
M. le président. - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
« En 2010, le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale n'est pas pris en compte par le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie pour l'évaluation, en application de l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale, d'un risque de dépassement de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. »
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Ayant un très grand respect pour les travaux de la CMP, le Gouvernement n'a présenté à ses conclusions que six amendements, dont deux relèvent de la simple coordination.
Les autres prolongent la réflexion des deux assemblées, par exemple sur l'assurance responsabilité civile des médecins. Sur ce sujet, M. le rapporteur général a d'ailleurs raison d'estimer que le débat n'est pas encore arrivé à son terme. Pour le reste, le Gouvernement a traité un certain nombre de points dignes d'intérêt, dont l'adjonction n'a rien d'insultant pour le travail parlementaire. A ce propos, j'attire l'attention du rapporteur général sur le fait que le Gouvernement n'a souhaité rétablir que le premier paragraphe de l'article 28. (M. le rapporteur général en convient) Pour tout le reste, le Gouvernement a respecté les travaux de la CMP, bien qu'il n'approuve pas le sort fait à cet article.
J'en viens au comité d'alerte.
Lorsque l'Ondam a été conçu en septembre, il ne pouvait évidemment intégrer le coût de la pandémie à venir. D'ailleurs, nul ne propose aujourd'hui de réévaluation chiffrée en lien avec la grippe A. S'exprimant ce matin à l'antenne d'une radio périphérique, un éminent épidémiologiste estimait impossible de prévoir l'évolution de cette maladie, même à court terme.
Par nature, les dépenses induites par la pandémie échappent à toute régulation. Or, la procédure d'alerte débouche sur des mesures de redressement destinées à compenser les dépenses par des économies ultérieures, comme le blocage des revalorisations tarifaires alors même que des discussions seraient en cours.
M. Guy Fischer. - On ne va quand même pas mettre les médecins à contribution !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - C'est à éviter dans les situations où ni les praticiens, ni les patients n'auraient la moindre responsabilité. Le comité d'alerte doit assurer une maîtrise des dépenses, non imposer des restrictions compensant une pandémie exceptionnelle.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Je me limiterai à un simple commentaire, les dispositions ayant été adoptées par l'Assemblée nationale avec l'appui de son rapporteur, M. Bur.
Mme le ministre n'a formulé aucun argument nouveau, tout en mentionnant le risque pesant sur la revalorisation tarifaire lorsque le comité d'alerte intervient. Je suis surpris que ce comité ne puisse faire preuve de discernement dans la prise en compte des dépenses induites par la grippe A.
Au demeurant, celles-ci ne devraient pas excéder 400 millions d'euros au maximum, alors que l'alerte suppose un dépassement supérieur à 1 200 millions. La pandémie grippale ne saurait donc représenter autre chose qu'un « petit plus ».
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - L'argument est réversible.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - En tout état de cause, l'assurance maladie sera mise à contribution.
Le Gouvernement veut revenir à la rédaction initiale du premier paragraphe de l'article 28. J'en prends acte, tout en me félicitant qu'il se soit rallié à la position du Sénat pour le reste de l'article.
M. Jean-Jacques Jégou. - Merci de laisser l'ancien rapporteur pour avis de la commission des finances s'immiscer dans cette discussion !
Je m'associe aux réflexions du rapporteur général.
Néanmoins, je regrette que le PLFSS omette les réflexions de la commission des finances, que ce soit à propos de la Caisse d'amortissement de l'aide sociale (Cades), des amendements examinés aujourd'hui ou de la fameuse convergence. Sur ce dernier thème, notre commission avait convaincu la Haute assemblée. Hier, M. le ministre du budget avait spécifiquement évoqué le dérapage des embauches hospitalières, ce dont le compte rendu analytique fait foi.
M. Eric Woerth, ministre. - Je n'ai pas mentionné de « dérapage ».
M. Jean-Jacques Jégou. - La différence entre la Haute assemblée et le Gouvernement tient à l'aspect statique du PLFSS. L'année prochaine montrera que nous avions raison, car il faudra prendre les mesures écartées aujourd'hui.
M. Guy Fischer. - Il y aura la reprise !
M. Eric Woerth, ministre. - J'ai parlé de dérapage exclusivement au sujet de la fonction publique territoriale, avec 40 000 créations annuelles de postes, alors que l'État en supprime 34 000.
Parlant de la fonction publique hospitalière, je me suis élevé contre l'idée d'une baisse des effectifs, alors que leur nombre s'est accru de plus de 10 % entre 2000 et 2007. Il peut y avoir des difficultés locales, mais globalement on recrute dans les hôpitaux. (M. Bernard Cazeau manifeste son désaccord)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Plus de 100 000 postes ont été créés ! La vérité vous dérange.
Le vote de l'amendement n°3 est réservé.
Le vote des articles 29, 29 bis, 29 ter et 29 quater, 29 septies, 30 bis A et 30 bis est réservé.
Article 30 quater
M. le président. - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 1142-21-1. - Lorsqu'un médecin régi, au moment des faits, par la convention nationale mentionnée à l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale ou le règlement arbitral mentionné à l'article L. 162-14-2 du même code et exerçant, dans un établissement de santé, une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d'anesthésie réanimation, est condamné par une juridiction à réparer les dommages subis par la victime à l'occasion d'un acte lié à la naissance, que la couverture d'assurance prévue à l'article L. 1142-2 est épuisée, et que la victime ne peut obtenir l'exécution intégrale de la décision de justice auprès du professionnel concerné, cette victime peut saisir l'office national d'indemnisation des accidents médicaux institué à l'article L. 1142-22 en vue d'obtenir le règlement de la part d'indemnisation non versée par le professionnel au-delà des indemnités prises en charge par l'assureur dans le cadre des contrats souscrits en application de l'article L. 1142-2. Le professionnel doit alors à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux remboursement de la créance correspondante, sauf dans le cas où le délai de validité de la couverture d'assurance garantie par les dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 251-2 du code des assurances est expiré ou que le juge compétent a constaté l'incompatibilité du règlement de la créance avec la solvabilité du professionnel. »
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Il s'agit de la responsabilité médicale, notamment des gynécologues-obstétriciens. Bien que nous ayons beaucoup insisté sur les divers aspects de cette question, tout n'est pas encore réglé. Le Gouvernement veut agir dans trois directions.
Tout d'abord, le plafond de la garantie sera porté à 6 millions d'euros par voie réglementaire, le cumul annuel atteignant 12 millions d'euros.
Ensuite, l'assurance maladie apportera une aide accrue à la souscription de l'assurance responsabilité civile des médecins, avec un soutien plus conséquent aux praticiens du secteur 1.
Enfin, nous vous proposons ici d'organiser l'intervention de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). L'origine de cette disposition remonte à la condamnation au civil d'un gynécologue-obstétricien, intervenue après l'expiration de la couverture assurancielle. La CMP a très largement étendu le mécanisme. A l'issue de la concertation engagée, il apparaît judicieux de l'appliquer aux professionnels de la naissance, aux chirurgiens et aux réanimateurs.
L'amendement sécurise également la situation des médecins ou chirurgiens condamnés à verser une indemnité excédant le plafond de la garantie mentionnée au contrat d'assurance. L'Oniam pourra indemniser la victime, puis se faire rembourser par le praticien, sauf si son insolvabilité est constatée par une décision de justice.
Le dispositif que je vous propose garantit à la victime l'indemnisation complète, encadre l'intervention de l'Oniam et limite les risques financiers des professionnels. L'État demandera à cet office, par une instruction signée par trois ministres, de renoncer au recours subrogatoire contre le professionnel de santé en cas d'infirmité évolutive consolidée à la majorité de l'enfant. Un décret donnera compétence pour cette action au conseil d'administration, et non plus au directeur.
Nous ne remettons pas en cause le travail accompli, mais le poursuivons. Il pourra encore être amélioré.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Un pas en avant est accompli sur ce sujet délicat car ce texte garantit le droit des victimes même en cas d'insolvabilité du spécialiste. Les professionnels de santé peuvent être rassurés : lorsqu'ils auront cessé leur activité, l'Oniam prendra les indemnités en charge. Mme la ministre s'est engagée à relever les planchers d'assurance et à davantage aider les médecins du secteur 1 à régler les primes. Nous avions proposé en CMP de couvrir l'ensemble du secteur conventionné, mais vous avez préféré limiter le champ du dispositif aux professionnels les plus exposés.
Reste que, pour couvrir les professionnels, les compagnies d'assurance considèrent davantage les montants planchers que les plafonds. (Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre, approuve) Une lettre signée par trois ministres et un décret ne suffiront pas à changer les choses. Dans les semaines qui viennent, les ministères de l'économie et du budget devront dialoguer avec les compagnies d'assurance et les syndicats afin que les montants couverts soient plus élevés. Dans cette attente, je prends acte du progrès accompli par ce texte et je ne doute pas de la volonté du Gouvernement de continuer à avancer, avec le Parlement et les professionnels.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Merci.
M. Dominique Leclerc. - Je suis opposé à cet amendement.
M. Nicolas About. - Vous pourriez remercier la ministre !
M. Guy Fischer. - Vous en voulez toujours plus.
M. Dominique Leclerc. - Lors de nos discussions, il a toujours été question des professions les plus exposées, c'est-à-dire les chirurgiens, les anesthésistes-réanimateurs et les gynécologues-obstétriciens. Cet amendement sera pour eux un mauvais signe. Ces filières, autrefois choisies en priorité par les étudiants en médecine après le concours de l'internat, sont aujourd'hui des options par défaut. Je ne veux pas être complice de l'organisation d'une désaffection de ces filières. En outre, vous donnez également un mauvais signe à la médecine libérale.
Enfin, on nous dit souvent que nous nous tourmentons pour la responsabilité civile avec des problèmes qui n'ont pas lieu d'être. Or un article publié aujourd'hui dans Le Quotidien du médecin a pour titre : « La responsabilité civile des établissements de santé : les sinistres graves coûtent toujours plus cher ».
M. Nicolas About. - Un texte de loi est en cours d'élaboration.
M. Dominique Leclerc. - 56 % des cas relèvent de la chirurgie, 18 % de l'obstétrique. Nous ne pouvons laisser les assurances agir seules en matière de responsabilité civile médicale ; Jean-Pierre Fourcade a fait une proposition en ce sens. Nous ne pouvons pas non plus ne prendre en compte que l'obstétrique car toutes ces filières seront concernées demain.
Le vote sur l'article 30 quater, modifié par l'amendement n°4, ainsi que sur les articles 31 bis A et 32 est réservé.
Article 32 bis A
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je souhaite revenir sur l'instauration d'un coefficient correcteur tarifaire dont bénéficieraient les établissements de santé connaissant des charges supplémentaires en matière sociale et fiscale. Je reconnais l'apport du secteur privé non lucratif à notre système de santé, tant par ses missions que par le maillage social, mais ce mécanisme est potentiellement injuste et inéquitable. Au lieu de neutraliser les différences entre les secteurs de l'hospitalisation, il les accentuera. Il augmentera notamment les différences de rémunération entre les établissements privés à but non lucratif, qui bénéficient de l'échelle tarifaire du secteur public, et les établissements commerciaux. Les établissements publics de santé sont eux aussi soumis à des contraintes, notamment pour le droit du travail ou les achats, qui ne sont pas compensées. N'ouvrez pas la boîte de Pandore, de nouvelles demandes pourraient en surgir.
En outre, ce mécanisme devrait prendre en compte une multitude de particularismes en matière de rémunérations et de fiscalité locale. Comment instaurer un coefficient correcteur dans ces conditions ? Les modalités de financement deviendraient illisibles et contraires à l'harmonisation liée à la tarification à l'activité ainsi qu'à la démarche de convergence tarifaire.
Enfin, les transferts de ressources correspondants seraient d'au moins 180 millions d'euros, et la ponction sur le secteur public serait beaucoup plus importante, d'autant que le champ d'application de cette disposition est particulièrement imprécis. Ces financements seraient mieux utilisés pour la revalorisation de la profession d'infirmier ou les grands plans de santé publique.
Ce différentiel de charges sera pris en compte par le dispositif de convergence, sur lequel vous souhaitez être éclairé. Je m'engage à ce que le prochain rapport sur cette démarche, avancé au 15 septembre, contienne un développement approfondi sur ce sujet. Dans cette attente, il est préférable de supprimer cette disposition particulièrement dommageable à l'équilibre entre les secteurs, surtout vis-à-vis du secteur public.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Cet article illustre bien les incompréhensions actuelles entre le Gouvernement et le Parlement -tout au moins le Sénat et la commission des affaires sociales.
Je comprends certains des arguments qui viennent d'être développés. Mais le Gouvernement nous dit qu'il n'est pas prêt. Ce n'est pas cependant la première fois que cette proposition est déposée, je l'avais faite il y a deux ou trois ans puis l'avais retirée, le Gouvernement m'ayant fait valoir que des études étaient en cours. Que s'est-il passé depuis ? Rien ! (Mme Raymonde Le Texier approuve) Et que fait le Gouvernement aujourd'hui ? Il souhaite des études complémentaires. Mais deux études au moins ont été menées à leur terme, sur la précarité et sur la permanence des soins, dont on a tenu compte pour le financement des établissements publics et les Migac.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Et celui des établissements privés !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Pourquoi la même démarche n'est-elle pas possible pour le différentiel de charges ? Je sais bien que se pose le problème de la rémunération des médecins, ici salariés et libéraux là ; nous n'aurons de solution que lorsqu'on aura évolué sur le secteur optionnel...
On ne peut pas toujours reporter les décisions. Peut-on espérer la prise en compte des études avant 2018 ? Quant aux 180 millions d'euros, il n'est pas question de les faire supporter par l'assurance maladie, il faudrait redéployer. Je crois qu'il y a à l'hôpital public des marges d'efficience. (M. Guy Fisher s'exclame) Voyez le rapport de la Cour des comptes, qui nous dit que le nombre de médecins varie de un à dix dans les services de pneumologie...
Il faut que nous tirions de tout cela des enseignements pour le prochain projet de loi de financement. Les échéances sont tellement lointaines qu'on est en droit de s'interroger sur la volonté du Gouvernement de vraiment avancer. En attendant, je prends acte de l'amendement.
Le vote de l'article 32 bis A, modifié par l'amendement n°5, est réservé.
Article 38
M. le président. - Amendement n°6, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéas 3 et 14
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
quatre
II. - Alinéa 5, première phrase, alinéa 8 et alinéa 11, deuxième phrase
Remplacer le mot :
troisième
par le mot :
quatrième
III. - Alinéa 16
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« V bis. - L'assuré ne peut bénéficier, au titre de la majoration prévue au II, d'un nombre de trimestres supérieur au nombre d'années durant lesquelles il a résidé avec l'enfant au cours de la période mentionnée au premier alinéa du même II. ».
M. Eric Woerth, ministre. - Il s'agit de consolider juridiquement un dispositif menacé par un arrêt de la Cour de cassation. Le Gouvernement entend rétablir à quatre ans la durée de référence pour l'attribution de la majoration de durée d'assurance (MDA) pour éducation d'un enfant. La CMP avait retenu trois ans, en établissant un lien non dépourvu de logique entre cette durée et l'âge d'entrée dans la scolarité. Mais la distinction entre la majoration liée à l'accouchement et à la maternité d'une part, et celle liée à l'éducation de l'enfant n'a de sens que si la durée de référence n'est pas trop brève et permet de mesurer l'implication de chaque parent dans l'éducation.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Je relève, parlant sous le contrôle de MM. Lardeux et Juilhard, que cet amendement va dans le sens souhaité par le Sénat comme par sa délégation aux droits des femmes. Avis favorable.
Le vote de l'article 38, modifié par l'amendement n°6, est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. Guy Fischer. - Je confirme notre vive opposition à ce texte, qui est une attaque frontale contre l'hôpital public et les personnes atteintes d'affections de longue durée. M. Woerth ne s'en cache pas, qui déclare dans un entretien aux Échos qu'il faut améliorer la performance de l'hôpital public. Pour un manager comme lui, on sait ce que cela veut dire : une saignée dans les effectifs. M. Soubie, conseiller social du Président de la République, relevant de son côté que les années 2008 à 2015 verront 220 000 départs à la retraite, estime qu'il est temps, tout en préservant la qualité des soins, de mener les actions d'optimisation qui s'imposent. C'est dire que le Gouvernement, pour réduire le déficit cumulé de l'hôpital public -300 millions selon lui, sans doute plutôt 600- entend supprimer massivement des emplois. On en envisage 1 200 à l'APHP, d'autres nombreux aux Hospices civils de Lyon avant de généraliser le processus. Quoi qu'en dise le Gouvernement, l'hôpital public va perdre entre 10 000 et 15 000 emplois. Il va se retrouver pris entre le marteau et l'enclume...
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - C'est mieux qu'entre la faucille et le marteau...
M. Guy Fischer. - Vous faites comme à l'ordinaire dans la provocation, madame la ministre, votre sourire n'y change rien... Je pourrais aussi parler de l'Ondam ou de la MDA. Il s'agit d'une des attaques les plus violentes qu'ait jamais eu à subir notre système de protection sociale. C'est très grave. Ce sont les plus démunis de nos compatriotes qui en subiront les conséquences. Nous voterons résolument contre ce texte.
M. Jean-Marc Juilhard. - Je souhaite revenir sur un sujet dont nous serons inévitablement amenés à reparler dans les mois qui viennent : les regroupements d'assistantes maternelles. Le ministre lui-même a considéré que c'était une véritable innovation à condition de ne pas les fragiliser par une complexité administrative excessive. Je prends acte des engagements qu'il a pris. La commission des affaires sociales, sa présidente Mme Muguette Dini, le rapporteur M. André Lardeux et moi-même avons travaillé depuis six mois avec les associations d'assistantes maternelles pour tenter de donner un cadre sécurisé et opérationnel à ces regroupements. Nous n'étions pas loin du but, puisque l'amendement que la commission a soumis au Sénat a été repris par trois présidents de conseil général, MM. Jean Arthuis, Alain Lambert et Joseph Kergueris. Adopté au Sénat, il a cependant été supprimé par la CMP sous la pression du Gouvernement.
Comme tous les dispositifs innovants, notre proposition a suscité de vives oppositions. La Fédération des particuliers employeurs s'est employée à faire peur aux parlementaires, en les abreuvant d'informations inexactes et insidieuses ; la Cnaf, qui ne veut pas perdre le contrôle de la garde collective dans les départements, a activement milité contre notre amendement, de même, me dit-on, que certaines directions de ministères. Bien sûr, ces opposants n'ont pas eu la franchise de s'afficher comme tels.
Nous nous attendions à ce que cette innovation se heurte aux corporatismes, mais pas à ce que le Gouvernement sacrifie l'intérêt général aux exigences des lobbies et des conservatismes !
Notre proposition répondait à deux objectifs : permettre aux femmes qui travaillent tôt le matin ou tard le soir de conserver leur emploi, et lutter contre la désertification des communes rurales. De cette innovation si nécessaire et attendue, le Gouvernement n'a pas voulu. Tout en saluant les efforts de réforme du Gouvernement, je me vois donc contraint de m'abstenir pour manifester mon mécontentement sur ce point. (MM. Alain Vasselle et André Lardeux applaudissent)
M. Marc Laménie. - En ces temps troublés, il faut maintenir et renforcer notre modèle social, fondé sur la solidarité nationale, tout particulièrement entre les générations. Nos débats ont été riches et sans tabou. La discussion sur une éventuelle augmentation de la CRDS a permis d'identifier la dérive des déficits sociaux. Nous comptons sur la commission de la dette sociale annoncée par M. Woerth pour trouver des solutions pérennes.
Nos votes ont répondu à un double principe de responsabilité et de justice sociale. Nous avons ainsi approuvé l'élargissement du financement de la protection sociale pour qu'il pèse moins sur le travail, poursuivant l'effort entrepris depuis 2008 pour réduire les niches sociales. A l'initiative de notre rapporteur général, nous avons transféré le contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires, à titre expérimental, aux CPAM : c'est une question d'équité.
La CMP a maintenu la position du Sénat sur le droit à l'image collective, que nous avons prolongé jusqu'à la fin de la saison sportive. En revanche, elle a supprimé l'article 33 sexies, voté à l'initiative de M. Paul Blanc, sur l'emploi des seniors dans les établissements médico-sociaux. Une telle mesure ne relevait sans doute pas de la loi. Nous espérons que le Gouvernement transmettra rapidement la circulaire aux Urssaf afin de ne pas pénaliser ces établissements.
Le groupe UMP votera les conclusions de la commission mixte paritaire sur le PLFSS pour 2010. (Applaudissements à droite)
M. Eric Woerth, ministre. - Le Gouvernement est ouvert aux propositions du président Arthuis sur les regroupements d'assistants maternels. J'ai dit être ouvert à une initiative parlementaire : c'est pourtant bien téléphoné ! Nous n'avons pu avancer dans ce texte-ci pour des raisons juridiques, mais l'engagement est clair. (M. Nicolas About approuve)
M. Jean-Marc Juilhard. - J'ai bien entendu le ministre. Je voulais indiquer mon mécontentement.
M. Nicolas About. - C'est fait !
M. Guy Fischer. - Vous avez raison de vous abstenir : les autres se couchent tous !
M. Jean-Marc Juilhard. - Je vais me coucher aussi : j'ai dit ce que j'avais à dire, et je voterai l'ensemble du texte, par solidarité majoritaire, mais aussi compte tenu des efforts accomplis. (Exclamations sarcastiques à gauche)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Merci.
M. Yves Daudigny. - Tout ça pour ça !
En application de l'article 59, les conclusions de la commission mixte paritaire sont mises aux voix par scrutin public
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 172 |
Contre | 157 |
Le Sénat a adopté.
La séance est suspendue à midi quarante.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 15 heures.
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement aux questions d'actualité.
Fourniture d'électricité
M. Gérard César . - (Applaudissements sur les bancs UMP) Nous avons récemment dû importer 458 gigawatts d'électricité auprès de nos voisins : une situation inédite depuis l'hiver 1982-1983. La France possède pourtant le plus grand parc nucléaire, après celui des États-Unis et sa capacité de production électrique excède les besoins de l'industrie et des ménages. Mais nombre de réacteurs sont à l'arrêt, à cause d'incidents ou de grèves qui ont désorganisé le planning de maintenance. Début novembre, un réacteur sur trois n'était pas en marche. En outre, les faibles précipitations ont limité la production hydraulique. Le 19 octobre dernier, 7,7 gigawatts ont été importés et le gestionnaire du réseau estime qu'en cas de froid intense et durable, les importations devraient atteindre le maximum supportable par les infrastructures françaises. RTE pourrait imposer des coupures. A-t-on les moyens d'éviter que pareille situation se produise pendant l'hiver ? Le nouveau PDG d'EDF indique ce matin dans la presse que sa feuille de route inclut une amélioration sensible du taux de disponibilité des centrales... (Applaudissements à droite)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie . - Le taux de disponibilité est actuellement de 79 % contre 81 % normalement ; l'objectif est de parvenir à 85 % en 2012. Le parc a connu des problèmes de maintenance, notamment durant l'été. La première mission assignée au nouveau président d'EDF, nommé hier en conseil des ministres, est d'investir dans l'entretien des centrales. Les importations permettent de faire face à la demande ; le système est aujourd'hui équilibré et si des coupures devaient intervenir, elles seraient exceptionnelles ; mais nous n'en sommes pas là.
Notre politique énergétique privilégie les économies d'énergie, dans les logements en particulier, ainsi que le « mix énergétique » afin que nous parvenions à 23 % pour les énergies renouvelables en 2020. La part de celles-ci a augmenté de 20 % cette année. Les pointes de consommation sont liées surtout au chauffage électrique dans les logements. Un groupe de travail avec les parlementaires remettra ses propositions dans quelques jours. M. Proglio a toute la confiance du Gouvernement.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Bien sûr...
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le nouveau président d'EDF est aujourd'hui à Flamanville en compagnie du Premier ministre, qui le lui rappellera. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Viticulteurs languedociens
M. Robert Tropeano . - Le monde viticole est en colère. La forte mobilisation d'hier à Montpellier a réuni les viticulteurs de six départements : ils veulent vivre dignement de leur métier et ils ont exprimé collectivement leur désarroi. La profession, meurtrie, se considère comme une espèce en voie de disparition.
M. Roland Courteau. - Exact...
M. Robert Tropeano. - Ce rassemblement, par son ampleur, dit toute la détresse des vignerons et des viticulteurs. Ils ont été très déçus par les dernières mesures annoncées. M. Courteau vous a déjà alerté sur ces problèmes. (L'intéressé le confirme) La crise viticole s'aggrave encore : le revenu annuel de 85 % des exploitants se situait en 2008 sous le seuil de pauvreté. Combien d'entre eux n'ont d'autre choix que de solliciter le RMI ou le RSA ! Le 27 octobre dernier, le Président de la République, dans son discours sur l'avenir de l'agriculture, a présenté un plan d'urgence. « La crise s'attaque à un secteur stratégique qui constitue un élément incontournable de notre identité nationale », a-t-il dit. Mais, comme toujours, les mesures prises ne règlent rien.
M. Roland Courteau. - Hélas !
M. Robert Tropeano. - Il faut des prix rémunérateurs, une harmonisation des règlements européens, une régulation des marchés. Dernièrement, en déplacement dans le Pas-de-Calais, le ministre a déclaré : « L'agriculture est un chef-d'oeuvre en péril et il faut tout faire pour lui redonner un élan, car c'est une activité stratégique ». Belle formule qui n'attend que les décisions politiques : les viticulteurs ne comprennent pas que le Gouvernement ait pu trouver tous les moyens pour aider les banques...
M. le président. - Posez votre question.
M. Robert Tropeano. - ...et ne parvienne pas à sauver notre filière viticole. Le malaise est tel qu'il engendre des actions violentes. Monsieur le ministre, vous étiez très jeune en 1976, mais vous avez sans doute entendu parler du drame de Montredon...
M. le président. - La question !
M. Robert Tropeano. - Il s'est traduit par la mort d'un viticulteur et d'un CRS, parce que le Gouvernement de l'époque n'avait pas été attentif au désespoir et à la colère des vignerons. (Approbations à gauche)
Sinon, c'est la mort économique et écologique. (On s'impatiente à droite ; on rétorque, à gauche, que la question est grave)
Allez-vous mettre en place rapidement des dispositions génératrices d'espoir pour notre agriculture et notre viticulture ? (Applaudissements à gauche)
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche . - Cela fait des années que les viticulteurs languedociens souffrent. (Protestations à gauche)
M. Simon Sutour. - Ça s'aggrave !
M. Bruno Le Maire, ministre. - Nous avons apporté une réponse d'urgence avec des dispositifs ciblés : allègement de la taxe sur le foncier non bâti, exonération des cotisations sociales. Mais pour que la viticulture retrouve un élan, il lui faut regagner des parts de marché à l'étranger.
M. Gérard César. - Bien sûr !
M. Roland Courteau. - Les viticulteurs doivent être aidés !
M. Bruno Le Maire, ministre. - La filière doit être réorganisée pour mieux se battre à l'exportation. Le Languedoc compte quatre organisations interprofessionnelles alors qu'il n'y en a qu'une dans chaque pays du nouveau monde. (Applaudissements sur certains bancs UMP)
Il faut aussi mieux valoriser et commercialiser les vins du Languedoc. Je recevrai bientôt les négociants pour voir comment mieux utiliser les 227 millions des fonds européens.
Il faut enfin que soit mieux répartie la valeur ajoutée de la filière.
Bref, je crois en l'avenir de la viticulture languedocienne si elle parvient à mieux valoriser sa production et à mieux exporter. Les viticulteurs du Languedoc y trouveront un avenir. (Applaudissements à droite)
Avoués
Mme Nathalie Goulet . - A la veille du vote d'un projet de loi supprimant la profession d'avoué -outre la question du licenciement des 1 800 salariés des études dont une vingtaine seront reclassés dans les greffes- des interrogations demeurent sur la mise en place de cette réforme prescrite dans le rapport Attali.
En supprimant la postulation devant la Cour, on va augmenter de façon exponentielle les interlocuteurs des cours d'appel. C'est ainsi qu'à Caen le nombre d'interlocuteurs va passer de 15 à 457 et, à Versailles -vous ne devriez pas y être insensible, monsieur le Président du Sénat- de 31 à 22 000.
Le ministère a-t-il fait une étude d'impact de cette réforme ? Quels moyens humains et matériels sont-ils prévus pour éviter une désorganisation complète des cours d'appel et donc les risques d'erreurs, notamment en matière de procédures à prescription courte -je pense aux affaires de diffamation ou de droit des transports- ou dans les dossiers de procédures collectives hélas nombreuses en cette période de crise ?
La justice est souvent critiquée pour sa lenteur. Il importe donc que cette réforme -dont il ne m'appartient pas ici d'apprécier le bien-fondé- soit accompagnée des moyens adéquats. Qu'en est-il ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés . - (Applaudissements sur les bancs UMP) Le projet de loi de fusion des professions d'avocat et d'avoué est naturellement accompagné d'une étude d'impact. Cette fusion continue un mouvement engagé il y a quarante ans avec la suppression des 1 500 avoués des cours d'instance. Il s'agit de rendre les procédures pénales plus rapides, plus efficaces et moins coûteuses. Cette réforme est rendue possible par la dématérialisation des actes, qui apporte sécurité et rapidité à la satisfaction de tous les professionnels.
Le travail des avocats près les cours d'appel sera modifié. Le projet de loi prévoit la désignation d'un bâtonnier référent qui sera informé de tous les dysfonctionnements. Ce n'est pas une vingtaine mais 380 postes de greffiers qui sont offerts. Les avoués seront indemnisés à 100 % et les salariés partant à la retraite bénéficieront de mesures supérieures à toutes les mesures de droit commun.
Cette réforme est dans l'intérêt des justiciables, pour une meilleure administration de la justice. (Applaudissements au centre et à droite)
Contrôles d'identité
M. Louis Mermaz . - (Applaudissements sur les bancs socialistes) Ma question s'adresse au ministre de l'intérieur mais vise en fait le Gouvernement dans son entier.
Un étudiant français de Sciences-Po issu de l'immigration marocaine a déclaré qu'il avait été témoin et victime de violences policières et de propos racistes le soir du 18 novembre, après la qualification de l'Algérie pour la phase finale de la Coupe du monde de football. Des exactions avaient été commises sur les Champs-Élysées par des bandes de casseurs, qui avaient provoqué l'intervention des forces de l'ordre. Mais ce que j'évoque ici c'est autre chose. Ce sont les violences policières graves auxquelles des éléments d'une CRS se seraient livrés le même soir aux abords de la porte Maillot.
M. Anyss Arbib m'a demandé de saisir la Commission nationale de déontologie de la sécurité, cette commission à l'autorité morale incontestée que vous voulez remplacer par un Défenseur des droits dont l'indépendance et les pouvoirs d'investigation seraient réduits. (Protestations à droite)
M. Laurent Béteille. - Accrus !
M. Louis Mermaz. - Mais nous voudrions savoir pourquoi avoir tant tardé pour déclencher une enquête sur les éléments rapportés depuis par les médias.
M. Michel Houel. - Tout ce qu'écrit la presse est vrai, naturellement !
M. Louis Mermaz. - Une enquête est semble-t-il en cours : à l'initiative de qui ? Je veux aussi m'élever contre la responsabilité du Gouvernement dont la politique du tout sécuritaire et du chiffre, à l'instigation frénétique du Président de la République, provoque les dérives de certains policiers qui se croient tout permis. Ces dérives suscitent un malaise grandissant chez leurs collègues, qui, dans leur majorité, se veulent au service de la République dans le respect des droits de l'homme. Ne serait-il pas bienvenu de mettre fin aux contrôles au faciès systématiques (protestations à droite), au demeurant interdits par la loi, qui engendrent l'humiliation et la révolte en créant des suspects permanents et des citoyens à part ?
M. Dominique Braye. - C'est scandaleux !
M. Louis Mermaz. - Ne croyez-vous pas qu'il est temps d'encadrer les contrôles d'identité comme le réclament de nombreuses associations pour faire cesser ces abus ? Allez-vous renoncer à une utilisation militarisée des forces de police dans des banlieues privées le reste du temps de toute présence policière ?
M. le président. - Veuillez conclure.
M. Louis Mermaz. - Ne comprenez-vous pas que cette politique sécuritaire engendre de plus en plus l'insécurité, porte atteinte à l'unité du pays et fait peser de graves menaces pour l'avenir ? (Protestations vigoureuses à droite ; vifs applaudissements à gauche)
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales . - (Applaudissements sur les bancs UMP) Je vous prie d'excuser M. Hortefeux, en déplacement en Corse. Votre intervention est outrancière et, peut-être, imprudente. (Vives protestations à gauche) Les policiers comme les gendarmes sont soumis à des obligations statutaires et déontologiques. Leur métier, difficile et dangereux, est aussi l'un des plus contrôlés, par leur hiérarchie, mais aussi par la commission de déontologie de la sécurité à laquelle succèdera le Défenseur des droits. J'ai lu les déclarations sur ce qui se serait passé.
Mme Catherine Tasca. - Il y a des témoins !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - J'observe qu'aucune plainte n'a été déposée (« Ha ! Ha ! » à droite), ni devant l'autorité judiciaire, ni devant la commission de déontologie de la sécurité. Le préfet de police a demandé à ses services de rassembler des informations sur ce qui s'est ou non produit et, dès qu'elles auront été rassemblées...
M Robert Hue. - Ils vont le renvoyer au Maroc ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - ...toutes les conséquences en seront tirées. S'il y a eu dysfonctionnement, des mesures correctrices seront prises et éventuellement des sanctions ; si ces allégations sont infondées, nous assurerons la protection juridique de nos fonctionnaires. (« Très bien ! » et applaudissements à droite)
Au-delà de cette interrogation, le ministre de l'intérieur a souhaité promouvoir le dialogue entre la police et la jeunesse ; des groupes de réflexion ont été mis en place ; leurs résultats seront bientôt communiqués au Parlement. (Applaudissements à droite)
Fiscalité des ménages modestes
Mme Évelyne Didier . - L'évolution de notre fiscalité touche d'abord les plus modestes. On nous dit que les cadeaux fiscaux aux riches sont indispensables à la bonne marche de l'économie mais on voit avec effarement de nouveaux impôts toucher les plus défavorisés. Les revenus de l'épargne seront pris en compte dans le calcul du RSA : soit une personne licenciée et éligible au RSA ; si elle reçoit une indemnité de licenciement, le RSA est diminué de 3 % -4 % si elle la place sur un livret A. Tous les comptes sont concernés, y compris les livrets d'épargne des enfants.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Scandaleux !
Mme Évelyne Didier. - On taxe les ménages qui auront épargné sur leurs maigres ressources pour les études des enfants !
S'y ajoutent l'imposition des indemnités journalières au titre des accidents du travail et le projet de suppression de la demi-part des parents isolés. On met en place, et avec quelle diligence !, une véritable panoplie à l'encontre des plus modestes mais, lorsque nous proposons de taxer jetons de présence, stock-options ou retraites chapeau, on nous répond qu'une commission sera créée pour étudier la question. Vous êtes d'excellents comptables de l'argent des pauvres -il est vrai qu'ils n'ont pas de compte off-shore et ignorent la titrisation.
M. Dominique Braye. - Tout ce qui est excessif est dérisoire.
Mme Évelyne Didier. - Près de 10 % des salariés ont des revenus inférieurs au seuil de pauvreté. Quelles mesures comptez-vous prendre pour rétablir l'égalité républicaine devant l'impôt et préserver le pouvoir d'achat de nos concitoyens les plus affectés par la crise économique ? (Applaudissements à gauche)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi . - (Applaudissements sur plusieurs bancs UMP) Je vous prie d'excuser Mme Lagarde qui ne peut être là aujourd'hui. La demi-part fiscale a fait l'objet d'une initiative parlementaire. Il y avait une injustice fiscale : la demi-part bénéficiait, sans condition de durée, à des parents isolés qui avaient des enfants, mais aussi à des personnes qui n'avaient plus d'enfants. L'Assemblée nationale a cherché un équilibre dans le respect de la justice fiscale : la demi-part demeure sous condition de durée lorsqu'il y a des enfants à charge. (Approbations à droite)
Le RSA est un sujet très intéressant : il y avait une injustice dans notre système de solidarité parce que le RMI reposait sur un statut sans prendre en compte les revenus. (M. Dominique Braye approuve l'orateur) Le titulaire du RMI était exonéré de taxe d'habitation, mais pas le titulaire de l'API, même s'il avait le même revenu. Vous le savez bien, on n'était pas incité à reprendre le travail. (Protestations à gauche où l'on rappelle la question) On est donc passé d'une logique de statut à une logique de revenu. La vraie justice fiscale en ces temps de crise c'est, surtout pour les classes moyennes, de ne pas augmenter les impôts ; la vraie injustice fiscale, c'est l'augmentation ahurissante de certains impôts locaux, notamment régionaux. (Applaudissements à droite ; huées à gauche)
Violences faites aux femmes
Mme Jacqueline Panis . - Nous avons célébré hier la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Soixante ans se sont écoulés depuis la proclamation de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, soixante ans durant lesquels les femmes ont acquis des droits économiques, sociaux et politiques.
Pourtant, l'actualité nous rappelle régulièrement que les femmes demeurent les victimes privilégiées de la maltraitance sous toutes ses formes, qui vont des violences conjugales aux pratiques parfois définies comme « culturelles ». Les chiffres dont nous disposons sont probablement sous-estimés puisque toutes les femmes ne portent pas plainte. Elles le font surtout lorsque leur vie est en danger ou lorsqu'il y a des enfants.
En France, une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint. Pour 2008, nous déplorons 156 décès. Face à cette terrible réalité, trois lois importantes ont rappelé, depuis 2005, l'urgence qu'il y avait à réagir. Ces textes ont aggravé la qualification des infractions et les peines encourues, et brisé un peu plus le mur du silence.
Des propositions fortes sont aujourd'hui faites, comme le bracelet électronique ou le téléphone portable d'urgence. Dans le prolongement du premier plan global 2005-2007, un deuxième plan 2008-2010 a été lancé. Pouvez-vous nous indiquer où en est ce plan et nous préciser les orientations retenues afin de poursuivre la lutte contre les violences conjugales en 2010 ? (Applaudissements à droite)
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité . - Vice-présidente de la Délégation aux droits des femmes du Sénat, madame Panis, vous venez de rappeler qu'hier était célébrée la journée internationale de la lutte contre les violences faites aux femmes. Ce dixième anniversaire est attristant à plus d'un titre : 157 femmes ont perdu la vie l'année dernière, ce qui représente 20 % des crimes commis dans notre pays. Ces chiffres sont intolérables. La République ne peut accepter cela. D'ailleurs les députés de tous bords ont cosigné une proposition de loi sur le sujet.
C'est pourquoi nous allons renforcer notre arsenal législatif déjà dense. Avec Xavier Darcos, nous estimons que la mesure d'éviction du conjoint violent doit être étendue aux personnes pacsées et aux concubins. En outre, il faudra créer une mesure de référé protection pour protéger les femmes. Il sera introduit dans le code pénal un délit des violences psychologiques faites aux femmes.
Au-delà de cet arsenal législatif, nous renforcerons nos moyens technologiques en expérimentant le bracelet électronique que je suis allé voir fonctionner en Espagne et qui a donné de bons résultats...
M. Didier Boulaud. - Il faudra en parler à Polanski !
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - ...puisque la criminalité y a baissé de 40 %.
Avec Mme Alliot-Marie, nous allons développer le téléphone d'urgence.
Nous renforçons ainsi à la fois notre arsenal législatif, nos moyens technologiques et nos dispositifs de prévention car il faut que les hommes se rendent compte, grâce au clip vidéo diffusé sur les chaînes télévisées, que ces violences touchent d'abord les enfants : ces derniers risquent en effet de reproduire les gestes qu'ils ont vu dans leur foyer comme s'il s'agissait d'un modèle.
M. le président. - Il est temps de conclure !
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Le Premier ministre a déclaré l'année 2010 grande cause internationale contre les violences faites aux femmes et nous serons intraitables afin d'endiguer ce fléau. (Applaudissements à droite)
Mme Michèle André . - (Applaudissements sur les bancs socialistes) Ma question s'adresse à M. Hortefeux. (Plusieurs voix à gauche : « Il est absent ! »)
L'article 3 de la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 indique que « La loi favorise l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et aux fonctions électives ». L'article 4 précise que « les partis et groupements politiques contribuent à la mise en oeuvre de ce principe ». Nous observons, depuis ce vote, une progression de la présence des femmes dans les assemblées électives, même si elle reste très insuffisante, en particulier dans les conseils généraux. Au Sénat, où nous sommes 23 % de femmes, il reste des marges de progrès. En revanche, nous nous réjouissons de compter 47,6 % de femmes conseillères régionales. Les listes que nous sommes en train de constituer respectent ce principe de parité.
Et voilà que vous nous proposez d'élire, avec un mode de scrutin pour le moins original, à un tour, avec 80 % au scrutin majoritaire et 20 % à la proportionnelle, les futurs conseillers territoriaux qui siégeront à la fois dans les conseils généraux et régionaux ! Le groupe socialiste n'approuve pas la création du conseiller territorial qui deviendra inévitablement, et malgré lui, un professionnel de la politique auquel il faudra forcément accorder une rémunération convenable, ce qui ne correspond pas à vos souhaits d'économie. Mais si, par malheur, le principe en était adopté, je veux rappeler, en tant que présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, l'hostilité totale des membres de notre Délégation et de bien des sénateurs quant aux effets désastreux sur la présence, ou plutôt l'absence, des femmes dans les futurs conseils généraux et régionaux. Selon toute probabilité, elles ne seraient pas plus de 20 % Vous nous dites qu'il s'agit d'un progrès par rapport aux 12,3 % de femmes siégeant actuellement dans les conseils généraux. Diable, que de femmes !
M. le président. - Votre question !
Mme Michèle André. - Nous voulons aller au-delà des 47,6 % de conseillères régionales.
Avez-vous conscience de l'hostilité des Français qui voient, devant ce recul démocratique, d'un côté des parlementaires qui veulent favoriser l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et, de l'autre, un projet qui détricote les dispositifs qui amélioraient la parité en politique ?
Auvergnate et pragmatique, je vous demande, monsieur le ministre, d'envisager un autre mode de scrutin pour ces conseillers territoriaux afin de respecter simplement notre Constitution. (Vifs applaudissements à gauche)
M. le président. - Je donne la parole à M. Marleix, secrétaire d'État et Auvergnat, lui aussi !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales . - Merci pour cette précision, monsieur le Président. Je veux d'abord excuser l'absence de M. Hortefeux qui est en déplacement officiel en Corse.
M. Didier Boulaud. - Et un charter pour l'Auvergnat, un !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Le projet de loi proposé dans le cadre de la réforme des collectivités territoriales va faire progresser la parité dans nos assemblées à partir de 2014. (L'indignation le dispute à l'hilarité à gauche) Je vais vous en administrer la preuve. Même si l'on peut toujours réclamer plus, la progression sera importante. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs) Avec ce projet, il y aura automatiquement 50 % de femmes de plus dans les conseils municipaux des 13 000 communes de 500 à 3 500 habitants. (On se récrie bruyamment à gauche)
M. Jean-Pierre Godefroy. - Ce n'est pas la question !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Répondez à la question !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Leurs membres seront élus sur des listes bloquées comprenant obligatoirement la moitié de femmes, soit 40 000 conseillères municipales de plus. (Le brouhaha indigné couvre en partie la voix de l'orateur)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Là n'est pas la question !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - C'est pourtant la vérité ! En application de la loi du 31 janvier 2007, les maires-adjoints seront répartis à égalité entre les hommes et les femmes ce qui se traduira par environ 35 000 adjointes de plus dans ces communes, ce qui n'est pas le cas actuellement. (Nombreuses interruptions impatientes à gauche)
Mme Raymonde Le Texier. - La question, la question !
M. Yannick Bodin. - Cela vous arrive-t-il de répondre ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Parmi les maires, leur proportion, actuellement de 12 %, va augmenter considérablement. (Exclamations à gauche)
M. Didier Boulaud. - Il s'est trompé de fiche ! Il nous sort les chiffres de Bachelot sur la grippe A !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Grâce au projet du Gouvernement, elles vont faire leur entrée dans les intercommunalités (nouvelles exclamations sur les mêmes bancs), où aucune disposition n'impose encore leur présence. (Mêmes mouvements)
M. Yannick Bodin. - Et les conseillers territoriaux ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. - Elles seront systématiquement présentes dans les conseils généraux, où elles restent encore très minoritaires, en particulier dans les fonctions de présidente (sarcasmes à gauche), où elles ne sont que trois -je peux vous en fournir la liste, vous n'auriez pas de quoi être fiers ! (Huées à gauche, où l'on demande à l'orateur de revenir à la question) Le texte que proposera le Gouvernement règle en partie le problème. (On le conteste vivement à gauche) Nous avons d'ailleurs une rencontre le 1er décembre avec la présidente André. (Applaudissements sur plusieurs bancs UMP)
Présidence du Conseil européen
M. Pierre Bernard-Reymond . - Ma question s'adresse à M. Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. (Lazzi sur les bancs socialistes)
Dix ans après l'avoir souhaité, l'Europe s'est enfin dotée d'institutions plus efficaces, l'une des mesure phare tenant dans la désignation d'un président du Conseil européen, différent des chefs d'État et de gouvernement, doté d'une véritable assise et d'une légitimité et qui incarnera, aux yeux des citoyens européens et du monde la voix et le visage de l'Europe.
La désignation de M. Van Rompuy, Premier ministre du royaume de Belgique, non qu'il s'agisse de mettre en doute ses qualités, mais parce qu'il n'était pas même candidat à ce poste éminent, a suscité sarcasmes et critiques. On peut de fait s'interroger sur les véritables intentions des chefs d'État et de gouvernement, et sur l'idée qu'ils se font de sa fonction.
S'agit-il là d'une phase de transition en attendant une personnalité plus charismatique ? (On s'amuse à gauche) Les chefs d'État souhaitent-ils pour l'heure un président de type IVe République, davantage porté au compromis qu'aux tâches messianiques et véritablement exécutives ? Ou assiste-t-on à une tendance de fond qui doit voir refluer l'idée d'intégration et les États revenir dans la gouvernance européenne ? Au-delà de tout langage diplomatique, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous livrer votre analyse ? (Applaudissements sur plusieurs bancs à droite. M. Jean-Pierre Sueur applaudit également)
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes . - Vous faites bien d'ajouter cette précision de langage, monsieur le sénateur, car ce que vous avez dit là n'est pas très gentil pour les Belges.
M. Christian Poncelet. - Très bien !
M. Bernard Kouchner, ministre. - Vous avez raison, l'Europe s'est dotée de pouvoirs plus solides, après un débat institutionnel qui fut, en effet, long, mais dont il faut rappeler que les Français furent, avec les Hollandais, parmi les actifs protagonistes avec leurs « non » référendaires... Dès après la dernière ratification, cependant, celle des Tchèques, le Conseil a non pas élu mais proposé à l'unanimité M. Van Rompuy, qui n'était pas candidat...
M. Simon Sutour. - Qui ne gêne personne...
M. Bernard Kouchner, ministre. - ...au poste éminent de président du Conseil.
Ce ne serait pas, dites-vous, une personnalité charismatique ? Je me garderai de trancher pour vous répondre simplement que telle n'est peut-être pas l'une des qualités principales qu'il faut pour diriger l'Europe. C'est la science délicate du compromis qui a fait l'Europe et qu'a su exercer, pour le plus grand bonheur de nos amis les Belges, leur Premier ministre, entre Flamands et Wallons qui se déchiraient, pour apporter la stabilité au pays.
M. Christian Poncelet. - Très bien !
M. Bernard Kouchner, ministre. - Pour la première fois, une institution stable siègera à Bruxelles, avec à sa tête, pour deux ans et demi, un ex-Premier ministre Belge, même s'il faudra trouver une conjugaison avec la présidence tournante, qui demeure -ce qui ne sera pas facile...
Pour la première fois aussi, nous aurons une représentante de la politique étrangère et de sécurité européenne, Mme Catherine Ashton, en qui je salue la marque d'une avancée de la parité ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
Grogne des élus locaux
M. Yves Krattinger . - Le Président de la République, recevant vendredi à l'Élysée des maires soigneusement sélectionnés, a poursuivi sans surprise sa rhétorique contre les collectivités. Les fonctionnaires publics territoriaux ont été une nouvelle fois attaqués, et à travers eux le service public de proximité, au service de tous nos concitoyens.
Comment ce Gouvernement, qui a créé pas moins de onze taxes depuis 2007 quand les collectivités n'en créaient pas une seule, peut-il accuser celles-ci de « folie fiscale » ? (« Très bien ! » à gauche) Après la suppression de la taxe professionnelle, qui signe la fin de leur autonomie financière, toucherez-vous demain à leur liberté d'administration en vous ingérant dans les affaires locales ?
Vous annoncez la création d'une « Conférence nationale pour parler du déficit de la France », oubliant que cet organisme existe déjà ! (Rires à gauche) C'est la Conférence nationale des finances publiques, qui ne s'est pas réunie depuis plus d'an et demi, malgré les demandes répétées des collectivités, qui veulent ce débat afin que les Français connaissent votre responsabilité dans la dégradation des comptes de notre pays.
En 2009, pour équilibrer votre budget, vous empruntez 140 milliards, soit la moitié des 280 que vous dépensez : vous empruntez pour payer vos fonctionnaires et pour vous chauffer.
La dette totale de l'État dépasse 1 500 milliards, quand l'encours des collectivités est onze fois moindre, et alors qu'elles autofinancent 60 % du montant de leurs investissements pour n'emprunter que 15 %.
En 2009, elles ont investi, à votre demande, pour soutenir l'économie, malgré les transferts mal compensés, malgré les accusations inadmissibles, malgré les propos méprisants.
Et cela pendant que vous priviez l'État de recettes, en créant le bouclier fiscal ; en fixant, sans contrepartie, la TVA à 5,5 % dans la restauration ; en diminuant massivement la contribution locale payée par les entreprises, au détriment du budget de l'État et de ceux des collectivités
M. le président. - Concluez je vous prie.
M. Yves Krattinger. - Les élus locaux sont les fantassins de la République, ils méritent le respect. Quand donc cesserez-vous de les accuser ? (Vifs applaudissements à gauche)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi . - Comme tous les élus de la République, les maires ont l'estime du Gouvernement. (On en doute à gauche, où l'on conteste la qualité du secrétaire d'État pour répondre)
Le débat sur la taxe professionnelle a montré l'apport notable du Sénat pour qu'une mesure favorable aux entreprises et à l'emploi soit adoptée dans le respect des élus locaux que nous sommes tous. La taxe professionnelle pèse sur la compétitivité des entreprises et détruit les emplois sur notre territoire. (Vives protestations à gauche)
M. Jean-Pierre Godefroy. - Vous ne le croyez pas !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. - La part de l'industrie française sur le marché intérieur a reculé de quinze points en dix ans, alors qu'elle s'est maintenue en Allemagne.
Nous avons tous critiqué les ravages dus à la taxe professionnelle, de Pierre Mauroy à Dominique Strauss-Kahn en passant par François Fillon. Nous pouvons donc tous approuver la réforme.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Non !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. - Assumons au moins nos positions, selon que nous sommes ou non favorables à l'industrie et à l'emploi.
M. Didier Boulaud. - Vous êtes aux ordres de Mme Parisot !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. - Les collectivités territoriales ont besoin de visibilité sur leurs ressources. Votre assemblée a perfectionné le dispositif pour l'an prochain. (On estime à gauche que tel n'est pas le cas) La seconde partie de la loi de finances leur apportera cette visibilité pour les années ultérieures.
La réforme aura-t-elle une conséquence pour les ménages ? Non ! Le dispositif de compensation garantit qu'il n'y aura pas d'augmentation de l'imposition des ménages...
M. Guy Fischer. - Elle va exploser !
M. Didier Boulaud. - Sauf pour Proglio !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. - ...mais je comprends votre inquiétude, car le seul matraquage fiscal des ménages observé au cours de ces dernières années provient des exécutifs régionaux, qui devront assumer l'usage fait de leur autonomie en accroissant leurs impôts de 50 % à 80 % ! (Vifs applaudissements à droite ; bruyantes marques d'indignation à gauche)
M. Jean-Pierre Godefroy. - Scandaleux !
M. Jean-Claude Etienne . - Ma question s'adresse à Mme Bachelot-Narquin.
La grippe A H1N1 inquiète nos concitoyens. En quatre jours, le nombre de consultations qu'elle motive s'est accru de 50 % auprès des généralistes. L'affluence augmente de façon exponentielle dans les centres de vaccination que vous avez fort heureusement mis en place. Ainsi, les douze centres parisiens ont accueilli 3 000 personnes chaque jour depuis vendredi, contre 1 000 auparavant. Il est légitime d'envisager leur encombrement dans les deux semaines si l'afflux de candidats à la vaccination continue d'augmenter. Le personnel administratif et soignant risque d'être débordé ; nous allons manquer de médecins. (Marques d'ironie à gauche)
Les internes et les externes de Champagne-Ardenne relayent religieusement votre message : « Lavez-vous les mains souvent », qu'ils complètent, en facétieux carabins qu'ils sont, par « Embrassez-vous seulement si vous ne pouvez pas faire autrement ». (Rires) A l'incitation du conseil de gestion de la faculté, ils sont tous volontaires pour étoffer les équipes vaccinales, qui peuvent ainsi recevoir le renfort de 496 nouveaux soignants. Hélas, le personnel administratif n'a pas été renforcé.
M. le président. - Veuillez poser votre question.
M. Jean-Claude Etienne. - En pratique, que comptez-vous faire pour éviter l'engorgement des centres de vaccination ?
Pouvez-vous en outre confirmer qu'une mutation virale n'aggrave pas nécessairement les symptômes, mais qu'elle peut donner à l'adjuvant une place singulière justifiant votre soin de laisser les médecins choisir entre deux vaccins, l'un avec adjuvant, l'autre sans ? (Applaudissements à droite)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports . - Vous avez noté comme moi l'adhésion croissante de nos concitoyens à la vaccination contre cette grippe. C'est la meilleure politique de prévention. Je me rappelle avec amusement les commentaires faits au début de la campagne annonçant un « flop », voire un « bide ». Alors que les premières files d'attente apparaissaient, certains journaux titraient sur le prétendu « vide » dans les centres de vaccination.
Au demeurant, des dysfonctionnements ont été constatés. Il est inadmissible d'attendre trois heures pour être vacciné ; il est inadmissible qu'un centre soit fermé alors que son ouverture est annoncée ; idem lorsque des professionnels de santé ne viennent pas malgré l'engagement pris.
C'est pourquoi M. Hortefeux et moi-même (marques d'ironie à gauche) avons élargi les horaires d'ouverture des centres de vaccination, notamment le mercredi et le samedi.
M. Christian Poncelet. - Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Nous en appelons à la responsabilité des médecins qui ont pris des engagements afin d'étoffer les équipes de vaccination.
La livraison de vaccins s'étalant jusqu'en février, un ordre de priorité a été établi. Il ne faut donc se présenter dans les centres qu'avec le bon reçu à cette fin. J'invite chacun à vérifier leurs horaires d'ouverture sur internet, dans une pharmacie ou en appelant le 0825 302 302.
La vaccination assure la meilleure prévention. Elle est nécessaire pour nous et pour les autres. (Applaudissements à droite)
La séance, suspendue à 16 heures, reprend à 16 heures 15.
présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente
Projet de loi de finances pour 2010 (Deuxième partie)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l'Assemblée nationale.
Outre-mer
Mme la présidente. - Nous abordons l'examen des crédits de la mission « Outre-mer ».
Interventions des rapporteurs
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances. - Il y a cinq mois a été promulguée la loi pour le développement économique des outre-mer (Lodeom), dont le coût global peut être évalué à 300 millions d'euros. Toutefois, l'impact financier de ce texte sur le budget de la mission est assez limité car 23 mesures d'application, soit la quasi-totalité, ne sont pas encore parues. Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer quand elles seront prises ? Elles sont attendues impatiemment en outre-mer et il n'est pas souhaitable de laisser les acteurs économiques trop longtemps dans l'incertitude. En outre, plus des deux tiers du coût de la Lodeom correspondent à des dépenses fiscales.
La mission « Outre-mer » représente 2,17 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,02 milliards d'euros en crédits de paiement dans le projet de budget adopté par l'Assemblée nationale. Les dépenses fiscales s'élèvent à 3,46 milliards d'euros, soit 6,6 % de plus qu'en 2009 du fait des dispositifs votés dans la Lodeom, mais cette hausse est moins forte que l'année précédente, où elle était de 17,4 %.
La plupart des crédits budgétaires en faveur de l'outre-mer ne se trouvent pas dans cette mission : le document de politique transversale fait apparaître pour 2010 13,56 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 13,37 milliards en crédits de paiement. La mission en représente donc moins de 15 %. Le document de politique transversale n'est d'ailleurs toujours pas exhaustif : deux programmes manquent encore pour appréhender l'effort global de l'État en faveur de l'outre-mer. Nous attendons, madame la ministre, que vous vous rapprochiez des autres ministères afin d'obtenir un document complet dès l'année prochaine.
Le premier conseil interministériel de l'outre-mer, présidé par le chef de l'État, a été l'occasion d'annoncer un plan de modernisation après le vaste débat qui a eu lieu dans le cadre des états généraux de l'outre-mer. Avec 137 mesures, ce plan est destiné à favoriser la concurrence pour faire baisser les prix, faciliter le développement économique endogène, rénover les relations avec la métropole, développer les responsabilités locales et renforcer l'égalité des chances. Je me réjouis de voir que les propositions formulées par la mission commune d'information du Sénat sur la situation des départements d'outre-mer ont été très largement reprises car nous souhaitons qu'elles ne restent pas lettre morte. Madame la ministre, quel est le calendrier de réalisation de ce plan ? Certaines de ces mesures feront-elles l'objet d'un projet de loi ?
Parmi les propositions formulées par la mission commune d'information, présidée par notre collègue Serge Larcher et dont Éric Doligé était le rapporteur, je retiens la transformation du ministère de l'outre-mer en une structure interministérielle, éventuellement rattachée au Premier ministre. Non seulement les crédits de la mission sont très limités au regard de la politique en faveur de l'outre-mer, mais la tutelle du ministère de l'intérieur ne nous semble pas adaptée à la diversité des statuts de l'outre-mer. En outre, la collaboration avec les autres ministères est très difficile car ces derniers n'accordent que peu d'importance aux problématiques ultramarines. Il est nécessaire que vous puissiez, madame la ministre, avoir un droit de regard et assurer le suivi des crédits qui ne dépendent pas de votre ministère.
Dans ce contexte, le projet de budget 2010 de la mission « Outre-mer » apparaît comme un budget de transition. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Éric Doligé, rapporteur spécial de la commission des finances. - Je forme les même voeux pour votre sort, madame le ministre, pour que vous soyez, à la tête d'un département à part entière, rattachée au Premier ministre. A force de le dire, cela peut se faire ! Les crédits de la mission « Outre-mer » augmentent sensiblement pour la deuxième année consécutive. La hausse initiale était de 6,4 % en autorisations d'engagement et de 6,3 % en crédits de paiement. L'Assemblée nationale a majoré les premières de 83 millions d'euros et les seconds de 33 millions en vue de l'application des 137 mesures décidées par le conseil interministériel de l'outre-mer.
La hausse prévue dans le projet initial porte principalement sur le programme « Emploi outre-mer », dont les crédits augmentent de près de 10 % afin de mieux rembourser aux organismes de sécurité sociale les exonérations spécifiques à certains territoires. Ces compensations représentent 1,1 milliard d'euros et plus de la moitié des crédits de la mission. Cette hausse est bienvenue, mais elle ne suffira pas à compenser à l'euro près les pertes subies par les organismes de sécurité sociale, auprès desquels la dette accumulée s'élèvera à plus de 600 millions d'euros à la fin de l'année.
Les crédits destinés au service militaire adapté (SMA), dispositif dont notre collègue François Trucy a montré l'efficacité dans un rapport récent, sont également en hausse. Le Président de la République a annoncé que les effectifs qui en bénéficient devraient passer progressivement d'environ 3 000 à 6 000. Toutefois, selon nos informations, l'augmentation des crédits et des personnels ne suivrait pas et nous craignons que la qualité de la formation n'en pâtisse. Ce serait regrettable car 80 % des jeunes issus du SMA trouvent ensuite un emploi ou une formation qualifiante. Madame la ministre, pouvez-vous lever nos inquiétudes sur ce sujet ?
« Conditions de vie outre-mer », le second programme de cette mission très hétérogène, comporte notamment les crédits de la ligne budgétaire unique (LBU) dédiée au logement en outre-mer. La Lodeom prévoit un recentrage sur le logement social du dispositif de défiscalisation, qui pourra en outre s'articuler avec des crédits de la LBU. Ce nouveau mécanisme devra entrer en application très progressivement, après concertation avec les bailleurs sociaux. Les crédits de la LBU ne diminuent pas : espérons que les craintes de nos collègues ultramarins seront apaisées. Il faut par ailleurs se réjouir de la hausse de 6 % des crédits consacrés à la résorption de l'habitat insalubre, mais regretter le report à 2011 de la création du groupement d'intérêt public censé régler les problèmes d'indivision dans les DOM. Madame la ministre, de nombreuses voix s'étaient élevées lors du vote de la Lodeom pour demander qu'il y soit procédé rapidement.
Est-il possible d'accélérer les choses ?
C'est également une année de transition pour les mesures en faveur de la continuité territoriale : le fonds de continuité territoriale créé dans la Lodeom regroupera et rationalisera les aides existantes -désormais sous condition de ressources.
Des crédits supplémentaires ont été votés à l'Assemblée nationale pour tirer les conséquences des décisions du conseil interministériel. Le logement social bénéficie d'une rallonge, pour la résorption de l'habitat insalubre et la construction de nouveaux logements. Un fonds de garantie pour l'agriculture et la pêche est créé, pour favoriser l'accès des entrepreneurs de l'agriculture, de la filière du bois et du secteur de la pêche aux financements bancaires, ce qui soutiendra l'emploi. L'Agence française pour le développement (AFD) dans l'outre-mer disposera de crédits supplémentaires pour conforter les politiques publiques locales par des prêts à taux bonifiés aux PME et aux collectivités. Enfin, une dotation spéciale d'équipement scolaire est prévue, pour financer en Guyane la construction et l'extension d'établissements scolaires, afin de prendre en compte les évolutions démographiques.
Les indemnités temporaires de retraites (ITR) en outre-mer ont été réformées à l'initiative de notre commission des finances dans le collectif budgétaire de décembre dernier. Les économies budgétaires mettront toutefois du temps à apparaître, la fin des entrées dans le dispositif se situant en 2028.
Les majorations de traitement des fonctionnaires coûtent plus de 1,3 milliard d'euros à l'État -aucun chiffrage n'existe en ce qui concerne les collectivités territoriales. Or, ces majorations ne suivent pas les réels écarts de prix entre l'outre-mer et la métropole. Elles ont des effets pervers sur le niveau des prix et la situation financière des collectivités territoriales. L'Insee doit rendre une étude comparative des prix exhaustive en 2010 et nous serons attentifs aux préconisations de la mission commune. Je regrette que le conseil interministériel n'ait pas traité de cette question.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Hélas...
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. - Il y aura d'autres réunions !
M. Éric Doligé. - La commission des finances vous propose d'adopter les crédits de la mission. (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - A la fin d'une année très difficile sur le plan social et économique outre-mer, c'est avec satisfaction que la commission des affaires sociales a constaté la progression des crédits. Dans ce budget, certains points sont très positifs : nouvelle aide au fret pour réduire les prix des importations, dispositions en faveur de l'agriculture, prêts à taux bonifiés. D'autres peuvent encore être améliorés, service militaire adapté par exemple, car le nombre de stagiaires n'augmentera guère en 2010 et le Gouvernement a décidé de réduire de douze à dix mois la durée de la formation ; je vous le rappelle, il s'agit de jeunes particulièrement marginalisés dont la réinsertion prendra du temps ! La commission des affaires sociales souhaite que le Gouvernement revienne sur ses intentions. De même la politique du logement exige un véritable plan Marshall, il serait pleinement justifié par l'ampleur de la crise. C'est que 26 % des logements sont insalubres outre-mer ! Et les prix du secteur libre y sont aussi élevés qu'en Ile-de-France. J'ajoute que 80 % de la population est éligible à un logement social en Guyane ou à La Réunion.
La santé me paraît insuffisamment dotée. Le Gouvernement a bien annoncé, en juillet dernier, un plan santé outre-mer, mais on n'en voit aucune traduction budgétaire. Pourtant, l'espérance de vie est nettement plus faible outre-mer qu'en métropole, les phénomènes d'addiction beaucoup plus répandus, au tabac, à l'alcool ou aux drogues. La commission des affaires sociales demande la mise en oeuvre rapide du plan santé, conformément aux conclusions de la mission d'information.
Pour que le RSA soit en place outre-mer au 1er janvier 2011, le Gouvernement doit prendre une ordonnance avant fin juin prochain. (M. Jean-Paul Virapoullé renchérit) Où en est « l'expertise complémentaire » qui justifiait ce décalage avec la métropole ? Je souhaite qu'une attention particulière soit accordée à Mayotte, qui deviendra l'an prochain le 101e département français. Un amendement du Gouvernement prévoit, c'est heureux, de ne pas minorer la prime pour l'emploi des sommes versées au titre du RSTA et d'exonérer le RSTA de l'impôt sur le revenu.
Le niveau très élevé des prix outre-mer persiste et le Président de la République a pris un certain nombre d'engagements lors du conseil interministériel du 6 novembre. Fixons un calendrier et des procédures précis, car les attentes de nos concitoyens sont bien légitimes. De nombreuses questions restent posées mais la commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l'adoption des crédits 2010. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Claude Lise, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - L'année 2009 a été exceptionnelle, marquée par une crise historique dans les deux départements antillais, l'adoption de la Lodeom et le lancement d'une grande réflexion sur l'avenir de l'outre-mer -la population a été associée aux états généraux. Le conseil interministériel s'est appuyé sur leurs travaux pour présenter 137 mesures. Notre Haute assemblée a créé une mission commune d'information qui a formulé 100 propositions très pertinentes, dont plusieurs reprises par le conseil interministériel.
Le budget 2010 pour l'outre-mer était donc très attendu : hélas il n'est pas à la hauteur de l'enjeu. Après le vote en seconde délibération à l'Assemblée nationale, les crédits de la mission augmentent de plus de 10 % en autorisations d'engagement et de plus de 8 % en crédits de paiement. Mais la hausse est liée au remboursement des exonérations de charges patronales aux organismes de sécurité sociale -sans que la dette de l'État à l'égard de ceux-ci ne soit réduite... Le logement reste une priorité budgétaire et les députés ont abondé la LBU, mais le compte n'y est toujours pas. Je regrette le manque de moyens destinés à l'insertion dans l'environnement régional, sujet qui me tient particulièrement à coeur. Enfin, j'ai souligné dans mon rapport le rôle central des collectivités d'outre-mer dans le soutien à l'activité économique. Les collectivités départementales des DOM y consacrent plus de crédits que les départements de l'Hexagone. Ce budget n'est pas à la hauteur des attentes exprimées en 2009 par les populations d'outre-mer, ni des annonces faites par le Président de la République. La commission de l'économie a émis cependant un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Christian Cointat, rapporteur pour avis de la commission des lois. - C'est une gageure d'exposer le problème de l'outre-mer en cinq minutes d'autant que mon appréciation diverge de celle de M. Lise. Le périmètre de ce budget s'est enfin stabilisé : nous le demandions depuis longtemps ! Les crédits de l'outre-mer sont en augmentation, dans une période pourtant difficile où la crise fait encore sentir ses effets. Mais l'élément le plus notable est dans la nouvelle approche retenue. Il se produit une réelle prise de conscience de la nécessité de rénover en profondeur les politiques destinées à l'outre-mer.
La loi d'orientation et de développement économique de l'outre-mer a été adoptée. Les états généraux de l'outre-mer ont été mis en place ainsi qu'un conseil interministériel de l'outre-mer dont les décisions, annoncées par le Président de la République lui-même, sont audacieuses et prometteuses. Nous pouvons tous nous féliciter de la volonté affirmée de transparence, de concurrence, de vérité des prix, de proximité et de responsabilité. Cela va donner un coup de fouet salutaire au développement économique et social de l'outre-mer. Faire baisser des prix anormalement élevés, améliorer les circuits de distribution, favoriser la production locale à qualité et à coût compétitifs, développer de grands projets structurants, rénover le dialogue social, mieux insérer les collectivités ultramarines dans leur environnement régional -tout cela va créer des emplois et améliorer le niveau de vie.
On passe d'une logique de rattrapage à une logique de valorisation des atouts de l'outre-mer. C'est reconnaître explicitement la richesse que représente l'outre-mer pour la République. Une richesse, pour perdurer, doit être entretenue et valorisée. Aussi importe-t-il de lever toutes les entraves qui bloquent encore cette marche en avant. Il est grand temps de publier les décrets nécessaires à l'application de la loi d'orientation. II serait utile de donner une dimension plus large à la continuité territoriale : elle doit couvrir tous les aspects de la vie quotidienne pour prendre tout son sens. Pourquoi faut-il encore dix jours pour qu'une lettre arrive dans des territoires pourtant desservis tous les jours par des avions en provenance de Paris ?
L'organisation institutionnelle des collectivités et départements mérite toute l'attention de l'État. La prochaine consultation populaire en Martinique et en Guyane va dans ce sens. Restent toutefois de nombreuses questions pendantes comme l'état civil de Mayotte, les ressources financières des communes de Polynésie ou l'organisation institutionnelle de Wallis-et-Futuna, sans parler de l'immense source de connaissances sur notre planète que sont nos Terres australes et antarctiques.
Les orientations fixées par le conseil interministériel de l'outre-mer à la suite des états généraux vont dans la bonne direction. Elles reprennent d'ailleurs les mesures préconisées par la mission d'information du Sénat présidée par Serge Larcher et dont le rapporteur est Éric Doligé. Nous pouvons ainsi nous féliciter de voir reconnues la qualité des travaux de notre Haute assemblée ainsi que sa clairvoyance ; Catherine Nay a écrit que « dans toute vie, il existe un moment où une porte s'ouvre pour laisser entrer l'avenir ». Pour l'outre-mer, cette porte vient de s'ouvrir ! C'est pourquoi la commission vous recommande d'adopter ces crédits.
Mme la présidente. - Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote. Aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes. Le Gouvernement dispose au total de 40 minutes.
Orateurs inscrits
Mme Odette Terrade. - Depuis l'an dernier, l'outre-mer français a connu un certain nombre d'évolutions significatives.
Le référendum mahorais ouvre le champ des espoirs, celui des illusions et sans doute celui des déceptions à venir pour les habitants de la Grande île et de la Petite île.
Autre évolution institutionnelle, dans le cadre de textes discutés en procédure accélérée, la séparation des deux îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy de la collectivité guadeloupéenne. Contre l'avis majoritaire des Guadeloupéens, nous venons de faire apparaître, au sein de la collectivité nationale, une collectivité qui, installée dans le moins-disant social et fiscal, fait de l'inégalité sociale un des éléments de son développement économique, et d'autre part, une collectivité qui n'est que le domaine privé réservé à quelques personnes fortunées.
L'évolution institutionnelle est encore à l'ordre du jour, puisque la Martinique et la Guyane vont se poser la question de la mono-départementalisation et donc celle de savoir s'il ne convient pas de fusionner conseil régional et conseil général dans une seule collectivité. La différence des modes d'élection de ces institutions constitue un point qu'il conviendra de résoudre au mieux des intérêts de la population, mais aussi du pluralisme des opinions.
Tout ce débat institutionnel pèse d'assez peu de poids devant le mouvement social d'importance que l'outre-mer a connu au début de l'année et qui a conduit le Gouvernement à manoeuvrer en recul, concédant notamment les termes de l'accord Bino, du nom de ce syndicaliste de la CGT Impôts de Guadeloupe assassiné dans des conditions encore inexpliquées. Cet accord prévoyait l'attribution d'une prime aux salariés les plus mal rémunérés, le RSTA. On avait passé sous silence que les sommes perçues au titre du RSTA seraient imputables sur la prime pour l'emploi, et, modifiant le revenu fiscal de référence, réduiraient les allégements de taxe d'habitation. Sachant que les trois quarts des contribuables d'outre-mer sont non imposables, cela revenait à donner 3 millions aux salariés en exonération sur le revenu et à leur en reprendre 108 sur la prime pour l'emploi ! Je vous donne quelque chose de la main droite, mais ma main gauche en reprend bien plus dans votre poche.
Nous avons déposé, en première partie de la loi de finances, un amendement corrigeant cela et nous apprécions que le Gouvernement se soit senti obligé de supprimer l'imputation du RSTA sur la prime pour l'emploi. Il faut dire que, depuis, le mouvement contre la « profitation » reprend du côté de Pointe-à-Pitre.
La loi d'orientation peine à entrer en application puisque aucun décret n'a encore été pris. Sur le plan budgétaire, pas de bouleversement sensible. Les crédits de l'outre-mer se fixent à moins de 2 milliards en crédits de paiement, avec une hausse de 113 millions dont la plus grande part est consacrée à la progression de la prise en charge d'exonérations de cotisations sociales pour les entreprises. Face à ces 113 millions, on crée 252 millions supplémentaires de dépenses fiscales. Les choix restent les mêmes : avant de répondre aux besoins sociaux des habitants de l'outre-mer, on privilégie l'aide fiscale qui ne s'adresse qu'à quelques ménages fortunés qui ne résident pas toujours outre-mer.
Une politique volontaire permettrait à l'outre-mer français d'atteindre une indépendance énergétique qui rendrait les coûts de production locaux moins dépendants des produits pétroliers.
Vous ne prenez pas en compte la situation dramatique des collectivités territoriales ultramarines, qui vont subir de plein fouet les effets de la suppression de la taxe professionnelle. L'état du cadastre va rendre difficile une juste appréciation de la matière imposable au titre de la future cotisation locale d'activité et plus encore des retombées de Ia contribution complémentaire, dont il faudra sans doute prévoir qu'elle intègre une forme de quote-part outre-mer.
Nous ne voterons évidemment pas ce budget. (Applaudissements à gauche)
M. Daniel Marsin. - Outre-mer, 2009 aura été une année de crise et de rupture ; 2010 devrait être l'année de la relance, celle de la refondation ou encore celle de la réconciliation des citoyens ultramarins avec les décideurs, locaux et nationaux. La crise domienne semble avoir surpris tout le monde alors que nous n'avions cessé d'attirer l'attention sur les signes avant-coureurs. Cette crise a nécessité des mesures d'urgence pour accroître les revenus des personnes disposant de bas salaires, combattre la vie chère et arrêter ce que d'aucuns appellent la « profitation ». Notre Assemblée a contribué au règlement du conflit en votant des dispositions permettant la maîtrise des prix et la mise en place du RSTA.
La mise en oeuvre de ces mesures décidées dans l'urgence pose problème. Je me réjouis de la disposition votée par notre Assemblée, mardi dernier, visant selon le ministre du budget lui-même, à lever un malentendu en supprimant l'imputation du RSTA sur la prime pour l'emploi et en exonérant de l'impôt sur le revenu les primes complémentaires versées par les collectivités territoriales.
Sur le suivi et la maîtrise des prix ainsi que le coût du carburant, pouvez-vous nous dire où nous en sommes, au lendemain de deux jours de mobilisation en Guadeloupe ?
Au-delà de ces mesures d'urgence, une démarche plus profonde a été engagée au travers des états généraux lancés par le Président de la République et de la mission d'information sénatoriale, dont le rapport constitue une mine de propositions et d'informations exceptionnelles. Ces travaux de grande qualité ont alimenté les décisions du conseil interministériel de l'outre-mer, qui s'est tenu le 6 novembre, soit bien après l'élaboration de ce budget.
Dès lors, le budget ne peut retracer l'ensemble des crédits conséquents et, malgré sa hausse de 6 %, il a donc un caractère provisoire -il ne comprend pas non plus les crédits de la Lodeom, faute de décrets d'application.
L'emploi est un sujet délicat : le chômage bat des records, qui varie de 22 à 30 %. L'exonération de charges prévue par la Lodeom doit permettre le développement de l'emploi mais le compte n'y est pas ; 92,4 millions de plus ne suffiront pas pour couvrir les besoins : il manque 54 millions et la dette de l'État envers la sécurité sociale va s'accroître. Comment faire si les crédits ne sont pas au rendez-vous ?
La formation et l'insertion sont des enjeux cruciaux quand les jeunes sont dans la détresse et que 55 % d'entre eux connaissent le chômage. Le SMA sert de modèle, mais comment doubler le nombre de ses bénéficiaires sans une augmentation parallèle des crédits ? Enfin, allez-vous adapter à l'outre-mer le plan jeunes annoncé en septembre dernier par le Président de la République qui veut qu'aucun jeune en difficulté ne soit plus laissé seul ?
Les besoins en logement sont énormes. En 2008, il y a eu 14 500 demandes en Guadeloupe mais seulement 1 367 logements construits. A ce rythme, il faudrait onze ans pour répondre à la demande. Vous avez dit qu'il s'agit d'abord de capacité à construire des logements mais celle-ci est entravée par toute une série de points de blocage : coût moyen des prêts consentis aux opérateurs sociaux, impossibilité pour les communes d'attribuer des subventions pour surcharge foncière... Je compte sur vous pour les lever rapidement.
Si j'ai noté que les crédits de la LBU sont stables, quelle est l'opérationnalité de la défiscalisation des opérations de logements sociaux en l'absence des textes d'application de l'article 35 de la Lodeom ?
Je veux insister sur la nécessité de recapitaliser nos communes, afin qu'elles puissent agir. Où en est le plan de relance outre-mer et ne faut-il pas réaffecter les crédits qui n'auraient pas été mobilisés pour leur destination initiale ?
J'insiste à chaque fois sur la continuité territoriale. J'avais souhaité un rapport du Gouvernement mais l'Assemblée nationale a préféré graver dans le marbre de l'article 49 de la Lodeom l'égalité des droits, la solidarité nationale et l'unité de la République. Le message est fort. Encore faut-il ouvrir rapidement le chantier. Il faut envisager un tarif résident et assurer la vérité et la transparence dans le transport des biens.
Après la prise de conscience suscitée par la situation tendue, il y a eu le temps de la réflexion. Celui de l'action est maintenant venu. A défaut, nous irions au-devant d'autres crises alors que nos concitoyens aspirent à l'apaisement. D'autres conseils interministériels seront nécessaires et le budget devra être ajusté : attendre serait une erreur ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. Adrien Giraud. - Je suis heureux de vous saluer, madame, à l'occasion de ce premier budget. Nous avons été d'autant plus sensibles à vos visites à Mayotte que vous connaissez la situation des femmes et leur combat pour Mayotte française. L'année qui s'achève aura en effet été celle de l'aboutissement d'une ancienne revendication et de la consultation sur le statut de notre territoire dans la République. La loi organique du 3 août dernier a prévu l'accession de notre collectivité au statut de département français d'outre-mer à compter de 2011. Le résultat de la consultation est éloquent : 95,2 % de votes positifs. Cela crée des devoirs, dont celui de mettre en oeuvre une politique active de rattrapage afin de réaliser les promesses de la départementalisation si longtemps souhaitée. La feuille de route du Gouvernement, le pacte pour la départementalisation de Mayotte publié en décembre 2008, énumère les étapes. Nous attendons la loi ordinaire qui précisera les modalités et les moyens.
L'éducation est le principal fondement de nos progrès. Nous manquons de classes dans le premier degré en raison d'une progression démographique malheureusement aggravée par une immigration massive. On ne parvient pas aujourd'hui à scolariser tous les enfants vivant sur le sol de Mayotte et les bâtiments existants sont vétustes, d'où la surcharge des classes et de mauvaises conditions d'enseignement. Il convient de renforcer la dotation spéciale d'équipement scolaire. C'est d'ailleurs la suggestion du Président Sarkozy : le 6 novembre, à l'Élysée, il a recommandé l'octroi de crédits supplémentaires pour remédier à une situation très pénalisante.
Le manque d'établissements dans la filière technique et l'absence d'université induisent une charge de bourses de plus en plus importante. La collectivité départementale ne peut plus faire face, aussi faut-il considérer sérieusement et de manière urgente la création d'un pôle universitaire. Les conclusions du dernier conseil interministériel n'ont pas, sur ce point, répondu à nos attentes.
Tous les rapports ont identifié la question foncière comme un des principaux points de blocage. On a besoin d'une nouvelle politique foncière avec les moyens de constituer des réserves foncières et d'aménager les terrains et les villages. Des mesures fortes sont donc attendues. La création d'un établissement foncier représente à cet égard une véritable avancée. En revanche, la rigidité des règles de gestion des pas géométriques énoncées dans le décret paru au Journal officier du 11 septembre n'est pas de nature à répondre au problème du logement social pour les plus modestes et il est urgent de le réviser.
On a besoin de 2 750 logements chaque année, 2 200 neufs et 550 en réhabilitation. Nous n'en construisons pas assez ; la nouvelle politique de l'habitat aidé rencontre de nombreux obstacles. Les programmes n'apparaissent pas adaptés aux besoins. L'accession très sociale butte sur la disponibilité des terrains. Si le cadastre vient d'être réalisé, 20 000 dossiers sont en cours de régularisation et le problème de la zone des pas géométriques reste entier pour la plupart des villages. Les opérations d'aménagement à engager supposent la mise à disposition de terrains. Le pacte pour la départementalisation prévoit un fonds de développement économique et social, en remplacement de l'actuel fonds mahorais de développement.
Or la création de ce nouveau fonds, qui permettra de mettre en oeuvre de la départementalisation, a été renvoyée au plus tôt à 2013. Dans ces conditions, quel sens donner aux paroles prononcées par le Premier ministre, lors de sa récente visite à Mayotte : « développement d'abord, égalité sociale ensuite » ?
Si la population de Mayotte a bien compris que la question sociale ne serait posée qu'après 2012, elle a également bien noté l'engagement de « revalorisation significative » pour les personnes handicapées et pour les personnes âgées dès cette année. Que prévoyez-vous, madame la ministre, pour améliorer le sort de ces allocataires particulièrement défavorisés ?
Enfin, alors que nous allons débattre de la réforme des collectivités territoriales, nous devrons nous pencher sur les finances communales à Mayotte. Le code des impôts devait être étendu à Mayotte le 31 décembre 2007, mais l'échéance a été repoussée fin 2013. Si rien n'est fait dès maintenant pour lancer cette réforme, cette échéance ne sera pas tenue. Or, la situation difficile des finances des collectivités locales de Mayotte ne permet plus d'éluder un tel chantier.
En revanche, je me félicite que le conseil interministériel de l'outre-mer ait prévu que la représentation permanente de la France à Bruxelles se doterait d'un pôle en charge de l'outre-mer. Nous espérons que ce nouveau service instruira nos dossiers, notamment dans le domaine des fonds structurels, et permettra à Mayotte de devenir une région ultrapériphérique de l'Europe : les aides financières et techniques de la Communauté nous sont indispensables.
Mais en contrepartie de ces concours européens, l'outre-mer n'arrive pas les mains vides : nos espaces maritimes et nos ressources halieutiques tropicales contribuent à l'équilibre de nos échanges. Surtout, nous portons aujourd'hui, au nom de la France, un message de liberté et de fraternité plus que jamais nécessaire au monde d'aujourd'hui et de demain. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jacques Gillot. - Il y quelques semaines, l'allocution du Président de la République laissait espérer l'avènement d'une nouvelle ambition pour l'outre-mer, nouvelle ambition nourrie par la reconnaissance des apports séculaires de nos territoires et de nos populations à la Nation, nouvelle ambition porteuse d'espérance pour ces centaines de milliers d'ultramarins qui aspirent tout simplement à vivre un nouvel avenir au sein d'une République ouverte à leur différence ; nouvelle ambition empreinte d'audace et de la volonté de renouveler le pacte qui nous unit à la France.
Je suis parmi ceux qui ont accueilli ce discours avec circonspection, en attendant sa traduction dans les actes et dans les chiffres. A la lecture de votre budget, madame la ministre, la déception est à la mesure de l'espoir suscité. En effet, ce budget ne connaît pas de modifications sensibles par rapport aux années précédentes. La hausse d'un peu plus de 6 % ne correspond qu'à la compensation des mesures de défiscalisation. Et même si l'ensemble des dotations budgétaires en faveur de l'outre-mer ne figure pas dans ce budget, l'augmentation des crédits véritablement disponibles ne tient compte que de l'inflation. En effet, 80 % des 118 millions d'augmentation sont consacrés à la compensation des exonérations de charges sociales.
En définitive, nous avons la détestable sensation que, contrairement à ce qu'affirment les campagnes de communication, les populations des outre-mers n'ont pas été suffisamment entendues. Le Gouvernement n'a pas entendu la demande de transparence des consommateurs sur la question cruciale du prix des carburants. Les outre-mers, et la Guadeloupe en particulier, attendent la mise en place d'une véritable réforme qui leur garantisse un prix juste, établi sur des bases transparentes, équitables et respectueuses de l'emploi local. Nous appelons de nos voeux cette réforme de la transparence depuis plus d'un an et elle n'est toujours pas mise en oeuvre, alors qu'on nous annonce déjà une prochaine hausse des tarifs. Pire encore, la nouvelle scélérate d'un décret octroyant 50 millions de compensation aux compagnies pétrolières a provoqué des ravages dans nos opinions publiques, poussant nombre de Guadeloupéens à scander leur mécontentement dans les rues.
Le Gouvernement n'a pas davantage entendu l'aspiration criante de l'outre-mer pour l'emploi. Certes, vous apportez un début de réponse en augmentant les crédits dévolus au service militaire adapté (SMA). Mais je regrette que pour atteindre le doublement des effectifs, le Gouvernement ait prévu de réduire la durée du SMA de douze à dix, voire six mois, au détriment de la qualité de la formation. Quoi qu'il en soit, le dispositif du SMA ne peut répondre, à lui seul, aux attentes des jeunes de l'outre-mer. La Guadeloupe a l'impression que le Gouvernement n'entend pas la détresse de ces 56 % de jeunes de 15 à 24 ans frappés par l'échec scolaire, la désocialisation et le chômage à laquelle il conviendrait de répondre avec un vrai plan d'urgence pour la formation et l'emploi.
De même, vous ne semblez pas entendre cette demande lancinante de centaines de milliers de foyers ultramarins qui aspirent à bénéficier du revenu de solidarité active (RSA) avant janvier 2011. Comble de l'injustice, déjà privés de l'application du RSA par une comparaison intellectuellement peu honnête avec le RSTA, vous avez refusé l'expérimentation du RSA des jeunes à l'outre-mer !
Ce budget ne traduit pas non plus d'ambition en faveur du logement. Dans le droit fil de la loi d'orientation pour le développement économique de l'outre-mer (Lodeom), vous donnez la priorité à la défiscalisation du logement social en y affectant 110 millions. Pour autant, la création de ce dispositif ne modifie pas significativement les crédits de la ligne budgétaire unique (LBU) et il y a fort à craindre que la complexité de ce dispositif en réduise l'efficacité.
Non, madame la ministre, ce projet de budget ne traduit pas la volonté du Président de la République de mettre enfin de côté une perception quelque peu passéiste et jacobine de l'outre-mer. Il ne prévoit aucune rupture fondamentale avec la logique éculée du replâtrage systématique et il ne prend pas la mesure des enjeux de nos territoires et des aspirations profondes de nos populations.
Madame la ministre, nous aurions souhaité être entendus ! Nous aurions souhaité être entendus sur la question de la continuité territoriale pour qu'il soit enfin tenu compte des spécificités d'un archipel confronté à la double insularité. Nous aurions souhaité être entendus sur les difficultés auxquelles sont confrontées nos collectivités et dont l'autonomie d'action est menacée par la suppression de la taxe professionnelle. Nous aurions souhaité être entendus sur la relance de l'activité touristique, priorité affichée par votre ministère, et qui se traduit paradoxalement par une diminution de plus de 10 % des crédits consacrés au plan de relance. Nous aurions souhaité être entendus sur l'abondement plus important du fonds exceptionnel d'investissement destiné au rattrapage des équipements structurants. Nous aurions souhaité un véritable plan de développement des secteurs porteurs comme l'agro-nutrition, les énergies renouvelables et la biodiversité.
Nous aurions tout simplement souhaité que ce budget traduise l'ambition et l'audace nécessaires à une réforme en profondeur des relations qui unissent l'outre-mer à la République. Mais, une fois encore, l'action n'est pas au rendez-vous de l'incantation, et c'est pourquoi je n'approuverai pas en l'état ce budget. (Applaudissements à gauche)
M. Michel Bécot. - En premier lieu, je me réjouis, au nom de mes collègues du groupe UMP, de votre promotion au rang de ministre.
En second lieu, je salue les propos que vous avez tenus, madame le ministre, le 24 septembre au salon du tourisme Top Résa. Vous avez, en effet, appelé à un « électrochoc » pour que « le tourisme puisse enfin se développer outre-mer », affirmant que vous comptiez vous impliquer aux côtés des collectivités. Vous avez assurément pris la mesure du problème actuel des Antilles françaises. Je crains, en effet, que dans un futur proche, Cuba ne devienne une destination privilégiée.
Inscrire le secteur touristique comme l'un des axes prioritaires de l'outre-mer était indispensable alors que le chômage reste très élevé, en particulier chez les jeunes. L'adhésion la plus large possible de la population, des acteurs économiques et des élus est indispensable à la réalisation de cet objectif. L'État devra, quant à lui, accompagner ce développement.
Sous d'apparentes similitudes, l'outre-mer constitue un ensemble hétérogène du fait des disparités géographique, historique et culturelle, de la multiplicité des cadres institutionnels et de la diversité des situations. Ainsi, la Guadeloupe, la Martinique et la Polynésie française ont réussi à se forger une notoriété touristique. Cela est moins vrai pour La Réunion et la Guyane. De même, si le tourisme occupe une place croissante dans l'activité économique de la Nouvelle-Calédonie, il demeure encore marginal à Mayotte, Wallis-et-Futuna et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Une opération promotionnelle de grande ampleur a été lancée. Des mesures immédiates ont été prises, avec le soutien aux professionnels du tourisme. Des mesures de relance des destinations ultramarines ont été prises dans le cadre de la loi pour le développement économique de l'outre-mer du 27 mai 2009. D'autres dispositions ont suivi, notamment dans le cadre de la loi de développement et de modernisation des activités touristiques du 24 juillet. Ces deux lois récentes ont consacré le secteur du tourisme comme une priorité pour l'outre-mer, ce qui permettra à de nombreuses entreprises de bénéficier d'aides importantes qui devront être complétées par des plans de formation du personnel. En outre, des partenariats restent à trouver pour réhabiliter les parcs hôteliers existants.
Une grave crise sociale a frappé les départements d'outre-mer en 2009. Ce mouvement a eu diverses conséquences dont le coût est encore mal évalué. C'est pourquoi le secteur du tourisme doit y être soutenu.
Mes collègues du groupe UMP soutiennent l'action que vous menez avec le ministre du tourisme, Hervé Novelli : c'est pourquoi nous voterons vos crédits pour 2010. (Applaudissements à droite)
Mme Gélita Hoarau. - Nous examinons ce budget vingt jours après que le comité interministériel pour l'outre-mer, qui devait tirer les conclusions des états généraux organisés à la suite des graves évènements qui ont secoué les départements ultramarins, révélant la gravité de la situation économique et sociale outre-mer, a défini des mesures pour les DOM.
A La Réunion, le taux de chômage, déjà très élevé, a augmenté de 21 % en un an ; la crise du logement est telle que plus de 30 000 demandes restent sans réponse, l'île compte plus de 120 000 illettrés, et plus de 52 % de sa population vit sous le seuil de pauvreté tel que défini en métropole.
Les déclarations du Président de la République rejoignent un constat unanime : les solutions jusqu'ici retenues ont montré leurs limites ; il faut ouvrir un nouveau cycle historique marqué par une « relation renouvelée avec la métropole ».
Le comité interministériel a défini 137 mesures pour sortir l'outre-mer d'une relation d'assistanat et l'aider à entrer dans un développement endogène. Mais il est une condition préalable, madame la ministre, c'est de répondre aux exigences sociales immédiates de la population. On ne peut pas demander à une population qui compte autant d'illettrés, 30 % de chômeurs et des milliers de familles que le défaut de logement marginalise, de s'engager dans un effort de développement durable. Il faut d'abord des solutions concrètes. Il en existe.
L'Unesco relève qu'un pays comme les Seychelles a su éradiquer l'illettrisme. C'est une question de volonté politique et de moyens. Même chose pour le logement social. Si la proposition faite par le Président de la République de céder aux collectivités des terrains de l'État pour en construire est de bon sens, l'adoption, en revanche, de la proposition de loi visant à réformer le droit de préemption serait lourde de menaces pour la maîtrise du foncier par les collectivités. C'est un vrai plan Marshall qu'il nous faut, élaboré à partir des préconisations des acteurs.
Sur l'emploi, les participants aux états généraux ont fait des propositions pour pérenniser les activités d'aide à la personne et celles liées à l'environnement, qui constituent un gisement de milliers d'emplois. Pourquoi ne pas s'engager dans cette voie alors que le Président de la République préconise lui-même la mise en place d'un Gerri social ?
Pour développer le nombre d'emplois occupés par des ultramarins, les dispositions statutaires de la fonction publique, a-t-il déclaré, pourraient être assouplies. C'est une attente non seulement des catégories délaissées mais des diplômés, qui peinent à trouver un emploi. Il serait malheureux que doive se répéter tous les ans le constat que faisait l'an dernier M. Doligé, qui relevait que sur 1 000 personnes recrutées par l'éducation nationale, 900 étaient métropolitaines alors que l'île compte assez d'étudiants à bac+5 qui veulent devenir enseignants.
Alors que certains ont joué le jeu du dialogue, alors que le Président de la République a ouvert des voies, le temps est venu des décisions concrètes sur tous ces problèmes, car d'autres dangers nous attendent, parmi lesquels les incertitudes sur le marché sucrier de l'après 2013, à quoi s'ajoutent les menaces sur les grands travaux déjà programmés, comme celui du « tram-train », qui résoudrait les problèmes de circulation dans l'île, apporterait une bouffée d'oxygène aux entreprises et de l'emploi à des milliers de travailleurs. La Réunion ne demande pas plus que ce que l'État fait déjà pour d'autres régions. Un accord de principe serait de nature à ranimer la confiance...
La Réunion doit aussi se tourner vers son avenir, pour répondre aux défis liés à la démographie, à la mondialisation, au changement climatique, aux nouvelles technologies. Elle propose des solutions crédibles comme l'autonomie énergétique portée à la fois par la région, l'État et La Réunion économique ; l'autosuffisance alimentaire ; la coopération régionale renforcée ; l'économie de la connaissance. Ces solutions, qui doivent être mises en oeuvre sans tarder, impliquent un engagement sans faille de tous et une volonté politique partagée.
Le comité interministériel a ouvert des voies. Il faut maintenant arrêter un programme concret, fixer les étapes et les moyens mais aussi répondre à l'urgence sociale.
C'est cela le sens que je donne aux relations rénovées de l'outre-mer avec la métropole. Est-ce bien dans cette voie, madame la ministre que le Gouvernement compte s'engager ? (Applaudissements à gauche.)
M. Claude Lise. - Pour examiner ce budget, il faut avoir bien conscience de la situation des collectivités ultramarines. Pour la Martinique, le tableau que je brossais le 20 octobre dernier n'a fait que s'assombrir. Au 1er novembre, 315 entreprises sont en redressement ou en liquidation, le chômage touche 40 000 personnes, soit 24 % de la population active, et les projections font craindre un taux de 27 % en fin d'année et de 30 % à la fin du premier trimestre 2010, niveau inconnu depuis plus de vingt ans et dont on ne peut que craindre les conséquences, notamment pour les jeunes.
Parmi les secteurs les plus sinistrés, celui du BTP ; mais aussi celui du tourisme. A cela s'ajoutent les difficultés croissantes des collectivités territoriales, victimes d'un terrible effet ciseau entre la diminution de leurs ressources et la croissance des besoins, notamment en matière sociale et en équipements publics. Alors que depuis de nombreuses années, elles portaient 85 % de l'investissement public, elles ne peuvent plus aujourd'hui jouer leur rôle à la fois de moteur dans l'économie locale et d'amortisseur de la crise sociale. Croyez, madame la ministre, que j'aurais préféré vous tenir un autre discours, car je ne sous-estime nullement la force de votre engagement en faveur des outre-mer et suis de ceux qui se sont réjouis de la nomination d'une ultramarine rue Oudinot. Mais au regard d'une telle situation, ce budget est décevant. Il ressemble étrangement aux précédents, jusque dans l'artifice utilisé pour le présenter en augmentation. Que pèsent les crédits de la ligne budgétaire unique, même abondés en seconde lecture par l'Assemblée nationale ? Que sont 6 millions d'euros en crédits de paiement pour l'ensemble de l'outre-mer, quand pour la seule réhabilitation de 1 500 logements vétustes de propriétaires occupants en Martinique, il manque, pour 2010, 11 millions ? Plus de 400 entreprises sont concernées. Les crédits actuels ne leur permettent de mobiliser que la moitié de leur capacité de réhabilitation. On objecte souvent que les opérateurs ne pourraient pas consommer davantage de crédits, faute de foncier. L'argument ne tient pas : les besoins, tant en matière de réhabilitation qu'en matière de financement des surcharges foncières imposées par le relief et les risques sismiques, sont énormes.
Les crédits de l'insertion régionale, déjà très insuffisants, sont en réduction de 3,5 %. Où sont les signes que l'on était en droit d'attendre et auraient témoigné d'une réelle prise de conscience de la gravité de certaines situations ? Où sont les signes du changement de politique annoncé par le Président de la République ? Le temps presse. Si l'on ne prend pas d'urgence les mesures nécessaires, on va vers une catastrophe économique et sociale. Je vous demande d'user de votre position au sein du Gouvernement pour obtenir la mise en oeuvre d'un vrai plan de sauvetage, élaboré en étroite concertation avec les acteurs économiques et sociaux et les élus. Il devra rendre aux collectivités territoriales leur capacité de jouer leur rôle.
Il faut aussi que sortent très vite les décrets de la Lodeom : défiscalisation dans le domaine du logement social, aide à la rénovation hôtelière, aide aux intrants et aux extrants... sans oublier celui de l'article 32, qui doit sauver un grand nombre de petites entreprises.
Je vous demande enfin, madame la ministre, d'intervenir auprès du ministère du travail pour qu'avant la mise en oeuvre du contrat unique d'insertion dans les DOM des dispositions soient prises pour éviter l'aggravation des difficultés budgétaires des conseils généraux.
Nous sommes à la veille d'importantes consultations qui vont permettre aux citoyens de Guyane et de Martinique de se prononcer sur le degré de responsabilité qu'ils entendent assumer localement. Le Gouvernement doit donner des signes de sa volonté d'assumer ses propres responsabilités à leur égard, ceci en veillant à préserver l'objectivité des campagnes électorales, tout en donnant des preuves de sa volonté de voir les atouts de leurs territoires transformés en véritable levier de développement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Anne-Marie Escoffier. - La discussion de ce soir traduit l'attachement de la Nation pour les territoires d'outre-mer, géographiquement lointains mais proches par plusieurs siècles d'histoire commune.
Ce débat intervient après une année exceptionnelle, ne serait-ce que par l'ampleur de la crise sociale aux Antilles, que nos rapporteurs ont analysée avec talent et compétence. Ce projet de budget est le premier depuis la loi pour le développement économique des outre-mer (Lodeom). Il intervient après que le conseil interministériel de l'outre-mer a tiré les conséquences des états généraux qui viennent de s'achever. Enfin, la mission sénatoriale sur les DOM, envoyée à l'initiative du Président Larcher, a formulé une centaine de suggestions qu'il faut maintenant traduire en actes. Un suivi particulier est donc de mise, notamment en matière fiscale.
Est-ce tout cela qui donne un aspect de transition à ce budget ? Sans doute. Est-ce la traduction d'une nouvelle approche de l'outre-mer, plus conforme à l'intérêt des DOM-TOM et à celui de la métropole ? Peut-être. Est-ce enfin parce que la majorité des crédits budgétaires en faveur de l'outre-mer n'apparaissent pas dans la mission éponyme ? Assurément !
Pourtant, malgré la très utile politique d'exonération des charges sociales, ce projet ne semble pas à la hauteur des enjeux et des annonces du Gouvernement, puisque les masses budgétaires n'augmentent que de 6,4 % en autorisations d'engagement et de 6,3 % en crédits de paiement. Ce sera sans doute insuffisant pour appliquer la Lodeom. Le Gouvernement semble apprécier correctement la situation outre-mer, mais j'aurais préféré une ambition plus affirmée notamment en matière de chômage, de formation professionnelle, de logement et d'infrastructures de transport.
Les DOM-TOM sont encore fragiles et les ultramarins sont légitimement inquiets à l'heure où la crise mondiale les frappe plus durement que leurs concitoyens de métropole. Rappelons que le taux de chômage s'établit en moyenne à 25 % outre-mer, où il concerne un jeune sur deux. Le taux d'illettrisme est encore trop élevé, alors que les infrastructures publiques sont insuffisantes. Et le coût de la vie est prohibitif.
M. Marsin a rappelé que les ultramarins attendaient beaucoup. Veillons à ne pas les décevoir à l'heure où la représentation nationale examine cette importante partie de la loi de finances et affirme son attachement à l'outre-mer. (Applaudissements au centre et sur les bancs socialistes)
M. Jean-Paul Virapoullé. - Le contexte de cette discussion est marqué par le souvenir des mouvements sociaux qui se sont déroulés dans les quatre départements d'outre-mer. Il y eut ensuite les états généraux, puis la feuille de route tracée par le Président de la République après la mission de Serge Larcher et d'Éric Doligé.
Malgré la crise, le budget de l'outre-mer augmentera de 6,4 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Cette évolution traduit un engagement soutenu de l'État, dans le cadre de la feuille de route fixée pour les années qui viennent par le titulaire de la légitimité suprême, qui s'est prononcé après une concertation avec les élus, coordonnée par le préfet Samuel à qui je rends hommage. Les décisions prises sont au coeur de nos préoccupations.
J'aborderai trois thèmes : la décolonisation économique, l'application de la Lodeom, l'égalité des chances.
Tout d'abord, la décolonisation économique.
On peut formuler des reproches envers le Gouvernement, mais il a eu le courage de solliciter la Haute autorité de la concurrence en vue d'une radioscopie de la formation des prix outre-mer. Des excès ont ainsi été mis en évidence, puisque vivre à La Réunion coûte 56 % plus cher qu'en métropole, sans aucune justification, surtout pas liée au transport !
Mais cette tare coloniale est une chance : si nous en avons le courage, la volonté partagée des élus et du Président de la République nous permettra d'augmenter le pouvoir d'achat de nos concitoyens simplement grâce à la baisse des prix. Le Président de la République nous invite à renforcer la concurrence, à combattre les ententes illicites et à donner un pouvoir véritable à l'Observatoire des prix, à créer des centres uniques d'approvisionnement...
Au-delà des 16 milliards d'euros issus de la solidarité nationale, il y a les milliards issus de l'égalité sociale. Grâce à la décentralisation, nous sommes au pied du mur après le travail du Gouvernement sur la formation des prix et la feuille de route fixée par le Président de la République afin que des prix acceptables améliorent le niveau de vie.
A nous d'avoir le courage, dès les prochains mois, de supprimer les excès constatés. C'est ce que j'appelle la décolonisation économique, qui doit nous faire passer d'une économie de rente fermée sur elle-même à une économie en expansion.
J'en viens au logement social.
Nous avons voté ici l'amendement -que j'ai eu l'honneur de présenter- qui adapte à l'outre-mer le dispositif Scellier. Sur place, les socioprofessionnels ont demandé que le plafond soit porté au niveau du Borloo populaire, que les surfaces prises en compte dans la défiscalisation soient augmentées, enfin que l'État cède gratuitement des terrains qu'il possède. Pour préserver l'aménagement du territoire, ne touchez pas au droit de préemption des collectivités territoriales ! Si vous entrez cette année dans un jeu gagnant-gagnant, nous ne présenterons pas les mêmes revendications l'année prochaine parce que le logement social aura été relancé.
Le tourisme est le deuxième secteur qui pleure en raison de décisions prises sur la défiscalisation et l'exonération de charges sociales dans les agences. Je vous ai écrit en espérant que le décret corrige cette erreur.
Les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) sont l'avenir de l'outre-mer, car elles permettent de rompre l'isolement, de combattre l'illettrisme et de valoriser l'atout jeunesse. Je souhaite que le décret sur la défiscalisation allonge la liste des activités couvertes par ce dispositif au titre des NTIC.
Je remercie le Président de la République pour avoir brisé le tabou de la régionalisation des emplois de cadres B et C dans la fonction publique, ce qui correspond à une demande très répandue dans l'opinion et ouvrirait des perspectives sur place pour de nombreux jeunes. Je propose qu'un groupe de travail se constitue afin que tous les ministères concernés publient les décrets, arrêtés et circulaires -et prennent peut-être des initiatives législatives- permettant de concrétiser les prescriptions du chef de l'État, conformes aux souhaits des élus de tous bords dans les quatre DOM.
L'article 349 du traité de Lisbonne est entré en application. Le Président de la République a annoncé qu'une cellule serait chargée d'adapter les directives européennes et de piloter le développement des DOM depuis Bruxelles. N'y mettez pas un fonctionnaire, mais une véritable structure en relation avec les élus, afin que l'indispensable adaptation des directives transforme l'outre-mer en chance pour l'Europe !
La lutte contre la fracture numérique porte aujourd'hui la tare de l'économie coloniale, avec monopoles, oligopoles et ententes illicites qui nous asphyxient. Le triple play coûte 29 euros en métropole ; le Président de la République veut l'étendre aux familles modestes d'outre-mer. Moi aussi. Que fait-on ?
Il y aura un commissaire par département pour y appuyer le développement endogène. Je suggère de créer auprès de vous une cellule de coordination à laquelle les parlementaires pourront s'adresser pour transformer leurs souhaits en réalité.
Les fonds d'investissement de proximité sont défiscalisés à 50 %. Ce serait chouette que vous déposiez un amendement à la loi de finances rectificative que nous examinerons dans quelques jours afin que ces structures puissent booster l'économie ultramarine !
Cet engagement a été pris à l'Élysée : les secteurs innovants ont besoin d'argent frais pour se développer.
Enfin, n'avons-nous pas eu la main un peu lourde en votant l'amendement de Mme Payet qui ferme les débits de tabac dans les galeries marchandes et les supermarchés ? On va détruire des emplois sans pour autant réduire la consommation de tabac !
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. - Ils sont vraiment peu nombreux !
M. Jean-Paul Virapoullé. - Mieux vaudrait se contenter d'interdire l'installation de nouveaux commerces de ce type.
Quand nous voyons les bassins de misère qui nous entourent, nous mesurons notre chance de bénéficier de la solidarité nationale et européenne. A nous de travailler main dans la main avec l'État pour un développement endogène de l'outre-mer. (Applaudissements à droite)
M. Georges Patient. - Depuis les événements de Guyane de novembre 2008, le Gouvernement n'a pu rester indifférent à la crise des outre-mer. Il a tenté de répondre aux revendications légitimes des ultramarins, avec la Lodeom ; en annonçant la consultation des électeurs de Martinique et de Guyane sur la transformation de ces deux DOM en collectivités d'outre-mer ; ou avec les annonces du chef de l'État à la suite du conseil interministériel de l'outre-mer du 6 novembre dernier. Pour l'heure, on en demeure au stade des bonnes intentions. Hormis la fixation de la date des consultations populaires, peu de dispositions sont appliquées, voire applicables. On est loin des plans de relance à l'intention de la métropole, immédiatement mis en oeuvre. De nombreux décrets d'application de la Lodeom n'ont toujours pas été publiés...
J'attendais beaucoup de la loi de finances pour 2010, mais les crédits pour les outre-mer ne font que suivre l'inflation. Même si ce budget ne représente que 12 % des crédits consacrés aux outre-mer, il se devait de répondre aux inquiétudes de nos concitoyens. Certes, les crédits augmentent de 6,4 % en autorisations d'engagement et de 6,3 % en crédits de paiement, au profit principalement du programme n°138 « Emploi outre-mer », mais cette hausse ne traduit qu'un meilleur remboursement aux organismes de sécurité sociale des exonérations de cotisations -sachant qu'il manquera 55 millions ! Ces exonérations sont pourtant le principal dispositif de soutien à l'emploi, et ont été confortées par la Lodeom.
De même méritent d'être consolidées les actions en faveur des moins de 30 ans, qui représentent 34 % de la population et sont touchés à 50 % par le chômage. Les crédits en faveur des contrats aidés relèvent désormais de la mission « Travail et emploi », qui subit une baisse de plus de 748 millions. Pouvez-vous nous assurer que ces emplois seront maintenus ?
Il faudra amplifier les efforts budgétaires en faveur du SMA, essentiel en termes d'insertion et de qualification professionnelle. Ses résultats sont bons mais la hausse des crédits et des effectifs d'encadrement ne sera pas proportionnelle à celle du nombre de bénéficiaires. Enfin, l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer voit sa subvention stagner à 7,9 millions, alors qu'elle se voit confier de nouvelles missions.
Comment endiguer le phénomène de l'habitat insalubre avec des crédits en baisse quand on sait que les logements insalubres représentent 7 à 10 % du bâti dans les DOM, contre 2,5 % en métropole ? La Guyane est la plus touchée. Plus de 30 000 personnes vivent dans ce type d'habitat. Le taux de construction illicite est estimé à 30 %, mais à près de 50 % des constructions nouvelles. Pourquoi si peu de constructions de logements en accession très sociale ? Le dispositif rencontrait pourtant un grand succès, notamment en Guyane. Comment répondre aux 62 000 demandes de logements d'une population domienne éligible à 80 % au logement social quand la production annuelle n'excède pas 4 000 unités ? Pour 2010, le Gouvernement s'est fixé un objectif de 5 443 logements mais le nouveau dispositif de défiscalisation ne fait pas l'unanimité. N'aurait-il pas mieux valu accroitre la LBU plutôt que d'instaurer une nouvelle dépense fiscale à l'efficacité contestable ?
Le fonds exceptionnel d'investissement, créé par la Lodeom, a bénéficié en 2009 de 165 millions d'engagements ; en 2010, de 40 millions seulement. Les collectivités locales assurent pourtant 72 % des investissements publics. Le conseil interministériel s'est montré discret sur la question des finances des collectivités. Est-ce un signe de la raréfaction des crédits de l'État ? Aurons-nous de mauvaises surprises quand il faudra chiffrer les mesures annoncées par le chef de l'État ? Sur les crédits votés in extremis, en seconde délibération, à l'Assemblée Nationale, on ne compte que 33 millions de crédits de paiement, dont 15 millions pour une dotation d'équipement scolaire pour la Guyane. Quid de sa permanence et de ses critères d'attribution ?
Je regrette que l'on ne revienne pas sur le plafonnement de la dotation superficiaire des communes de Guyane ; vous n'y étiez pas défavorable, me semble-t-il. J'espère que mon amendement à la mission « Relations avec les collectivités territoriales » sera reçu favorablement. En l'état, il m'est difficile de voter ce budget. Je préfère attendre le collectif budgétaire qui nous apportera, je l'espère, des moyens à la hauteur des enjeux. (Applaudissements à gauche)
M. Michel Magras. - Ce débat m'offre l'occasion de vous exposer les problématiques propres à Saint-Barthélemy. Je me félicite de l'augmentation des crédits de la mission, tant les attentes de l'outre-mer sont fortes. II convenait de renforcer l'existant pour répondre au surcroît de la demande. Je suis convaincu que, dans le contexte actuel, l'État fait de son mieux pour l'outre-mer. Encore faut-il le faire bien : seule l'optimisation des ressources permet de faire de la dépense publique un levier de création de richesses et de bien-être. La réduction des écarts entre autorisations d'engagements et crédits de paiements favorise la lisibilité de l'action de l'État en évitant l'accumulation des retards de paiements. Certes les crédits sont importants, mais les résultats ne pourront être atteints que si les actions sont ciblées.
Si Saint-Barthélemy n'est pas concernée par la mission « Outre-mer », il demeure que l'action, pour être efficace, doit être conduite dans un cadre institutionnel. La mise en place d'une nouvelle collectivité impose de nombreux ajustements et une collaboration étroite avec l'État. Nous attendons toujours le décret permettant de mettre en place le centre de formalités des entreprises, guichet unique pour les acteurs économiques. De même, les décrets de ratification des sanctions pénales prévues par les codes des contributions et de l'urbanisme ne sont toujours pas parus. Les sanctions pénales en vigueur dans les codes nationaux restent donc applicables à Saint-Barthélemy.
La collectivité a usé de son droit d'édicter des sanctions pénales pour les adapter aux dispositions prévues par les codes locaux. Ainsi, lorsque la vignette automobile a été supprimée en métropole, elle a été maintenue par le code des contributions de Saint-Barthélemy. J'ai déposé une proposition de loi visant à ratifier les sanctions pénales directement par la voie parlementaire. Madame la ministre, la voie parlementaire est-elle suffisante ? Il semble que la procédure prévue par la loi organique n'exclue pas une intervention directe du législateur. Le cas échéant, soyez assurée que je ne contournerai l'étape gouvernementale que pour réduire les délais.
Il est une disposition qui me tient particulièrement à coeur et pour laquelle j'avais présenté des amendements lors de l'examen de la Lodeom. Il s'agit d'étendre le dispositif de continuité territoriale aux déplacements des sportifs, dans le cadre régional et vers la métropole, par symétrie avec le dispositif destiné aux étudiants. Du fait de l'exiguïté du territoire de Saint-Barthélemy, il est impossible de disposer de tous les services sur l'île. La collectivité mène une politique volontariste pour développer la pratique sportive chez les jeunes, mais avec une population de 8 450 habitants, il est mathématiquement impossible de diversifier les compétiteurs. De fréquents déplacements sont donc nécessaires. Cet impératif pourrait être financé par le Fonds d'échange à buts éducatif, culturel et sportif (Febecs).
Enfin, la collectivité de Saint-Barthélemy a demandé au Gouvernement d'enclencher un processus de changement de statut européen. Il s'agit tout d'abord d'harmoniser le régime de spécialité législative en droit français avec celui du droit européen. Ensuite, Saint-Barthélemy souhaite conserver son statut de territoire extra-douanier. En outre, le niveau de son PIB par habitant ne lui permet pas d'attendre de l'Europe le même niveau de financement que les régions ultrapériphériques (RUP). Enfin, les contraintes imposées par l'Europe sont souvent exorbitantes pour un très petit territoire et elles freinent les relations commerciales avec les pays voisins.
La collectivité a donc estimé que le statut d'association était le plus adapté. Je ne doute pas de l'appui du Gouvernement pour nous accompagner dans notre démarche afin que ce processus aboutisse dans les meilleurs délais. II va sans dire que j'adopterai les crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements à droite)
M. Serge Larcher. - Tout d'abord, madame la ministre, permettez-moi de vous féliciter pour votre promotion. Vous serez plus à même de peser sur les arbitrages budgétaires ! Nous aurions préféré un rattachement au Premier ministre, mais c'est déjà quelque chose de très intéressant pour l'outre-mer.
Au début de cette année, de nombreux compatriotes d'outre-mer défilaient en criant leur mécontentement, et parfois leur désespoir. Par la puissance et la durée de leur mobilisation, dans un climat parfois quasi-insurrectionnel, ils ont réussi à forcer l'écoute du Gouvernement. Des protocoles d'accords ont été signés et le débat sur la Lodeom a été avancé. Nous avons voté ce texte dans l'urgence, et pourtant nous attendons toujours l'application de mesures présentées comme des leviers du développement pour l'outre-mer. Qu'en est-il de la défiscalisation dans le logement social, des zones franches d'activités, de l'aide au fret et du fonds exceptionnel d'investissement ?
Pour répondre aux accords sur les salaires signés avec les collectifs, le Gouvernement a instauré un complément de revenu, le RSTA. Nous nous sommes inquiétés du fait que cette loi de finances prévoyait d'imputer le RSTA sur le montant de la prime pour l'emploi. Je suis heureux que vous ayez satisfait mon amendement de suppression de cette disposition.
Plusieurs rapports ont été initiés sur les questions de la vie chère et du prix des carburants. Dans un esprit constructif et consensuel, le Sénat a adopté un rapport sur la situation des DOM qui dresse un état des lieux sans concession et formule 100 propositions. Dans le même temps, le Président de la République a convoqué les états généraux de l'outre-mer. Après le tumulte est né un immense sentiment d'espoir, mais les difficultés n'ont fait que s'aggraver du fait de l'arrêt pendant plusieurs semaines d'une économie déjà fragile. C'est dire avec quelle attention nous attendions les décisions du premier conseil interministériel de l'outre-mer, et avec quel intérêt nous avons étudié le budget de la mission. C'est dire aussi combien nous sommes aujourd'hui étonnés et déçus par le caractère pusillanime de ce texte.
Le premier conseil interministériel a présenté un nombre important de mesures, qui recoupent largement les 100 propositions du rapport sénatorial. Toutefois, ses conclusions relèvent plutôt de la synthèse programmatique. Les modalités de réalisation des mesures préconisées sont rarement précisées, les évaluations des coûts sont très rares et aucun échéancier n'est prévu. Quant aux crédits de la mission, ils ne traduisent nullement les annonces et ne peuvent répondre à la gravité de la crise économique et sociale des collectivités d'outre-mer.
Il aurait pu en être autrement puisque ce budget augmente de 6,4 % et continue à afficher comme priorités l'emploi et le logement. Quatre-vingts pour cent de cette hausse sont réservés à l'action « Abaissement du coût du travail », destinée à compenser des exonérations de charges patronales et à couvrir les impayés de l'État auprès des organismes de sécurité sociale -sans pour autant enrayer l'accroissement de la dette, qui devrait atteindre 609 millions d'euros à la fin de l'année. Les crédits consacrés au SMA augmentent également, mais insuffisamment pour répondre à l'engagement présidentiel de doubler en trois ans le nombre de jeunes bénéficiant de ce dispositif. Pour des raisons budgétaires, la durée de ce service passera de douze à huit, puis six mois, au risque de nuire à la qualité de la formation. Nous resterons donc vigilants quant à l'évolution de ce dispositif qui demeure la mesure phare du Gouvernement pour l'emploi des jeunes outre-mer, d'autant que la situation de l'emploi s'est encore dégradée au deuxième trimestre et que les crédits en faveur des contrats aidés, gérés par la mission « Travail et emploi », subissent une nouvelle baisse de 748 millions d'euros.
Les crédits consacrés au logement social sont, pour le moins, décevants. A première vue, les crédits de paiement de la LBU augmentent de 2 %, mais ils diminuent en réalité de 1,7 million d'euros. Ils ne permettront pas de faire face aux besoins considérables de nos collectivités. En outre, j'émets de grandes réserves sur l'efficacité du dispositif très complexe de défiscalisation locative vers le logement social issu de la Lodeom. Non seulement les textes réglementaires le concernant ne sont toujours pas publiés, mais cette usine à gaz génère une forte évaporation fiscale. Enfin, les organismes de logements sociaux, déjà en difficulté, devront absorber en 2010 la dette de 17 millions d'euros contractée par l'État.
Madame la ministre, comment comptez-vous, dans ces conditions, relancer le logement social outre-mer et encourager la résorption de l'habitat insalubre ? Seule une augmentation conséquente de la LBU permettrait de répondre à moindre coût aux enjeux du logement social. Des crédits supplémentaires en faveur du logement social, de 20 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 6 millions en crédits de paiement, ont bien été votés à l'Assemblée nationale, mais cela ne comblera pas l'énorme retard de nos collectivités en la matière.
Enfin, je voudrais vous interroger, madame la ministre, sur un sujet à mes yeux très urgent. La crise économique et sociale qui touche nos territoires ne peut se résoudre sans le vecteur essentiel de croissance que sont les collectivités locales. Or celles-ci traversent une crise sans précédent. Les communes, en particulier, très affectées par l'effondrement des recettes d'octroi de mer, ne pourront supporter de nouvelles restructurations budgétaires. La commande publique est en panne et les plans de relance sont hypothéqués. Cette situation appelle des réponses urgentes et d'exception, mais je n'ai entendu aucune annonce qui pourrait leur apporter un peu d'oxygène. Le ministre du budget a repoussé mon amendement qui reprenait une proposition offrant d'annuler les dettes sociales des communes. Enfin, estimez-vous normal de verser aux communes d'outre-mer la même DGF qu'à celles de l'Hexagone ? Pourquoi ne pas rajouter une part d'ultra-périphéricité ?
Sur ce point comme sur les autres, je veux croire, madame la ministre, que vous répondrez à nos appels. Nous avons beaucoup attendu de ce projet de budget mais, telle la soeur Anne des contes, nous n'avons rien vu venir ! (Applaudissements à gauche)
M. Soibahadine Ibrahim Ramadani. - La crise va perdurer sans doute jusqu'en 2011, mais l'effort budgétaire et financier de l'État pour l'outre-mer augmente de 4 %. Les crédits spécifiques de la mission, en hausse de 6,2 %, ne représentent que 12 % de l'enveloppe globale, mais c'est tout de même la deuxième mission budgétaire en faveur de l'outre-mer. Pour Mayotte, 2010 sera un exercice budgétaire de transition entre deux statuts. Nous avons quatre préoccupations : mener à terme le processus institutionnel en cours, améliorer la situation budgétaire et financière des collectivités territoriales, renforcer le rattrapage économique, social et culturel amorcé en 2008 et renforcer le statut européen de Mayotte.
La loi organique du 3 août 2009 a créé le département de Mayotte, qui deviendra effectif en avril 2011, à l'issue du renouvellement de son organe délibérant. En 2010, des lois ordinaires devront être adoptées, loi électorale sur la composition et le mode d'élection de la future assemblée du département, loi institutionnelle qui définira l'organisation administrative et les modalités du transfert des compétences. Le Parlement sera saisi du projet de loi électoral avant mars 2010. Qu'en est-il des autres textes ?
La chambre territoriale des comptes de Mayotte juge la situation financière et budgétaire locale « très dégradée ». Le déficit du budget du conseil général a été réévalué à 92,4 millions d'euros. Le plan drastique de redressement préconisé sur trois ans ne pourra que détériorer le climat social. L'image du nouveau département en pâtira. Les 75,3 millions d'euros de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » constituent une bouffée d'air, mais ne résorberont pas les déficits... Une subvention exceptionnelle, éventuellement complétée par un recours à l'emprunt, serait souhaitable.
Les travaux préparatoires à la mise en place de la fiscalité locale en 2014 sont urgents : l'adressage, le numérotage et la dénomination des rues progressent, tout comme la constitution de l'état civil, mais il n'en va pas de même pour les travaux d'évaluation des bases locatives. Nous sommes dans le flou concernant les crédits mobilisés et le calendrier.
Au titre du soutien au rattrapage économique, social et culturel, le Pacte prévoit, pour 2009, la revalorisation de l'allocation spéciale vieillesse et de l'allocation pour adultes handicapés à hauteur de 25 % de leur montant national sur cinq ans. Or, les crédits correspondants ne sont inscrits nulle part dans le projet de budget. Qu'en est-il ?
Je me réjouis que 40 % du budget de Mayotte soit consacré à l'enseignement scolaire avec la perspective d'accueillir en 2010-2011 tous les enfants de 3 ans en maternelle. Mais les crédits affectés aux constructions scolaires du premier degré permettront à peine d'absorber la poussée démographique. Les classes élémentaires et maternelles continueront d'alterner, matin et après-midi. Le fonds d'aide à l'équipement communal, annoncé par le Président de la République, doté de 123 millions d'euros en 2010, interviendra à Mayotte et en Guyane. Chez nous, il faut à la fois achever les chantiers en cours pour la prochaine rentrée 2010-2011 et préparer l'avenir avec un plan de construction étalé et financé sur plusieurs années. C'est la condition pour que chaque maître accueille ses élèves dans sa propre classe.
En 2009, l'exécution du contrat de projets 2008-2014 s'est améliorée, après un démarrage laborieux en 2008 -le taux d'exécution n'était que de 11,3 %. Les 82 millions d'euros seront affectés à la pose de câbles sous-marins pour l'accès au haut débit et la TNT et aux travaux à l'aéroport de Pamandzi : le choix des candidatures pour la concession est arrêté, on peut donc espérer une livraison de l'aérogare en 2012 et de la piste longue en 2015, comme prévu initialement.
L'absence de décrets bloque l'entrée en vigueur des mesures de la Lodeom, l'aide au fret, le projet initiative-jeune et l'extension du champ de compétence de l'Anah. En revanche je salue la décision de compléter par une circulaire le décret en Conseil d'État portant réglementation des prix des produits de première nécessité. Où en sont les ordonnances relatives à l'action sociale et à la constitution de droits réels sur le domaine public de l'État ? Je suggère, pour examiner les modalités d'application des décrets relatifs à la zone des 50 pas géométriques, que l'on nous envoie une mission de l'inspection générale d'administration, comme ce fut le cas aux Antilles pour la loi de 1996.
Il est urgent de remplacer l'actuel atlas du BRGM par les plans de prévention des risques naturels et d'inscrire les crédits correspondants sur la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Quant au renforcement du statut européen de Mayotte, madame la ministre, les Mahorais vous sont reconnaissants pour votre forte mobilisation, notamment lors de la XVe conférence des présidents des régions ultrapériphériques. La transformation en RUP semble acquise, sous réserve de l'évolution du droit interne de notre île. L'ordonnance supprimant la justice cadiale et la tutelle matrimoniale, relevant l'âge du mariage des filles et plaçant l'homme et la femme à égalité devant la succession doit être publiée avant la réunion de mai 2010. Ainsi, Mayotte participera au débat sur l'octroi de mer et aux négociations sur la prochaine programmation des fonds structurels européens, au sein de la représentation française -et son nouveau « pôle outre-mer »- à Bruxelles. Le Pacte propose aux Mahorais de construire la première étape de la départementalisation de Mayotte sur 25 ans : égalisation progressive des droits sociaux, rattrapage en matière d'infrastructures et d'équipements collectifs, amélioration des conditions de vie, de santé, d'éducation. Ce n'est donc pas uniquement la mission « Outre-mer » qui doit être mobilisée pour préparer la départementalisation, mais tous les instruments financiers existants ou en cours de création, le fonds exceptionnel d'investissement, le fonds de développement économique, social et culturel, la dotation spéciale de construction scolaire prochainement renforcée par le fonds d'aide à l'équipement communal, une part peut-être du grand emprunt national et enfin, les fonds européens. Pour accompagner les collectivités d'outre-mer dans la voie que chacune d'elles a choisie au sein de la France, madame la ministre, je sais pouvoir compter sur vous. C'est pourquoi je voterai votre budget. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean-Etienne Antoinette. - De ce budget, on a tout dit cet après-midi. Ceux qui votent pour saluent les avancées, la création du RSTA par exemple, et excusent la faiblesse de certaines lignes budgétaires en invoquant la crise économique mondiale, la fragilité des finances de l'État ou des décisions encore toutes récentes au conseil interministériel... Ceux qui votent contre dénoncent un budget en trompe-l'oeil, où les prétendues augmentations servent à combler des retards de paiement de l'État à la sécurité sociale -sans pour autant annuler la dette... En matière de formation, de logement, ou de coopération économique régionale, les efforts ne sont toujours pas à la mesure des défis.
Comment comprendre que les crédits de l'action « Insertion économique et coopération régionales » diminuent de 3,5 % alors que le Président de la République l'a présentée comme un axe de travail privilégié ? Les dix mesures annoncées de ce chapitre seraient-elles purement symboliques ?
L'écart est frappant, entre l'acuité des besoins, la vigueur des promesses -et les traductions budgétaires. Il faut sortir de la dialectique du verre à moitié vide et du verre à moitié plein. Nous n'en sommes plus là. Nous n'en sommes même plus à devoir souligner ce que l'outre-mer coûte à la République en transferts sociaux et en dépenses fiscales, ou ce qu'il lui rapporte en biodiversité, en richesse marine, en puits de carbone. Ces guerres de positionnement relèvent d'un autre temps, celui d'avant la crise sociale de cet hiver, qui a levé le voile sur des réalités scandaleuses, parfois inconcevables, et pourtant désormais indiscutables.
Il y a eu le vote de la loi d'orientation pour agir en pompier disait le ministre de l'époque en engageant les sénateurs à travailler jour et nuit dans l'urgence : on attend toujours les décrets d'application. Il y a eu la mission sénatoriale d'information, les états généraux, le conseil interministériel du 6 novembre, qui devait apporter un renouvellement radical dans la manière d'aborder le développement des outre-mer. Comme disent les enfants chez nous : « Tout ça pour ça ! »
Le premier acte fort du Gouvernement après tous ces bouleversements, le dernier de l'année 2009, le plus symbolique de sa politique, se résume à ajouter quelques milliers d'euros par ci et à en retrancher quelques autres par là. Il a même voulu reprendre d'une main ce qu'il avait donné de l'autre en imputant le RSTA sur la prime pour l'emploi ; il a fallu la ténacité des sénateurs pour qu'il recule, par peur, sans doute, de nouveaux soulèvements. Dans ces conditions, quelle est la crédibilité des engagements énoncés par le Gouvernement ?
Ce budget pose la question de la sincérité des démarches engagées -et elles ont été nombreuses en 2009- pour que de « nouvelles relations » s'établissent avec l'État, qu'une « nouvelle page » s'ouvre dans notre histoire commune. Et ce document budgétaire garde l'esprit du précédent, celui de l'ancien régime, pourrait-on dire.
Quelle est la fiabilité des promesses sur une question aussi sensible que la continuité territoriale, si le ministère change de discours aussi souvent que de ministre ?
Quelle est l'opérationnalité des décisions annoncées après un an de travaux, d'inspections, de missions, d'études, de rapports, de débats, sans que les moyens nécessaires soient budgétisés ? L'État, quand il veut, peut ! Les postes des trois « commissaires au développement endogène » sont-ils créés et budgétisés ? Et celui du conseiller du pôle outre-mer à Bruxelles ? Et ceux des cinq hauts fonctionnaires en charge de la cohésion sociale et de la jeunesse ? Va-t-on déshabiller Pierre pour habiller Paul ? Comment seront financés les dispositifs annoncés pour lutter contre l'illettrisme, créer les internats d'excellence, développer les Erasmus régionaux ou l'assistance technique aux collectivités locales ?
Où sont les moyens dégagés pour la cour d'appel de plein exercice de Cayenne et le tribunal de grande instance de Saint-Laurent-du-Maroni, pour lesquels les avocats se sont à nouveau mis en grève ? Preuve de nos retards infrastructurels, la Guyane est paralysée depuis ce matin par la fermeture de deux ponts qui rattachent l'île de Cayenne au continent.
La réponse à ces questions ne se trouve pas dans ce budget, déjà obsolète au regard des objectifs affichés par le Président de la République, à moins de convenir que tout cela ne démarrera qu'en 2011, voire 2012, voire après les prochaines crises sociales.
Je ne conteste pas le chemin parcouru en 2009 en termes de prise de conscience de nos problèmes Mais sans traduction concrète, sans moyens effectifs, sans renouvellement des organisations, les bases du changement seront vite sapées. Un système de santé conforme aux standards des pays développés, des logements décents pour tous, des résultats scolaires normalisés, un taux d'activité équivalent à celui de la métropole, des économies locales compétitives, voilà les défis. Quand va-t-on vraiment commencer à les relever ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Denis Detcheverry. - On aura beaucoup parlé de l'outre-mer cette année. D'abord avec le cri de désespoir lancé par les Antilles, suivi en Guyane et à La Réunion, mais aussi dans les COM, même si on les entendait moins. Le Président de la République n'a pas été sourd à cet appel. Il a eu le courage de lancer les états généraux de l'outre-mer, du jamais vu ! On pouvait juger qu'en étant le décideur final, l'État se comporte comme un parent qui voudrait imposer l'orientation de son enfant au prétexte qu'il paie ses études. Mais j'ai été satisfait du discours de Nicolas Sarkozy et des mesures annoncées à l'issue de ce premier Ciom. L'excellent rapport Larcher-Doligé abonde dans le même sens, avec des propositions judicieuses et ambitieuses.
Je ne peux qu'approuver la volonté de moderniser l'outre-mer et de redéfinir ses relations avec la métropole, tout comme ce qui favorisera une meilleure insertion régionale. J'approuve aussi la possibilité de changer de statut au regard de l'Union européenne et la mise en place d'un pôle outre-mer à la représentation française à Bruxelles. Je ne peux qu'approuver les mesures en matière de gouvernance. Ainsi éviterons-nous peut-être des inepties comme le feuilleton cauchemardesque du transport maritime de fret à Saint-Pierre-et-Miquelon.
J'ai apprécié que le Président de la République insiste sur la nécessaire reconnaissance des syndicats locaux majoritaires lors des élections professionnelles, mieux à même que les syndicats nationaux d'apprécier la situation locale. Qu'en est-il, d'ailleurs, du rapport que j'avais demandé et que votre prédécesseur s'était engagé à déposer dans l'année, à propos de la retraite complémentaire pour les fonctionnaires servant outre-mer ?
J'en arrive au budget. Un petit regret : l'aide aux entreprises pour le fret est limitée à l'Union européenne alors qu'on dit vouloir faciliter l'insertion des départements d'outre-mer, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon dans leur environnement régional. J'ai voulu déposer un amendement qui étende cette aide pour les produits à destination des pays voisins ; on m'a opposé l'article 40 alors que cela ne constituerait pas une augmentation de dépenses de l'État mais une baisse.
Comme j'approuve la politique du Gouvernement, je voterai ce budget 2010. Je ne vais pas comparer au centime près les colonnes de chaque action ; ce n'est pas de plus d'argent que nous avons besoin. Nous sommes trop tournés vers la métropole, pas assez maîtres de notre destin. Des décisions nous sont imposées par Paris, qui sont parfois totalement inadaptées, et on ne nous envoie pas les hauts fonctionnaires qu'il faudrait. Ce n'est pas parce que Saint-Pierre-et-Miquelon est le plus petit territoire de France que la situation à gérer serait simple, entre le Canada et l'Europe. Il nous faut des personnes expérimentées, de même qu'il est plus judicieux d'envoyer en ZEP des enseignants expérimentés que des jeunes sortant d'IUFM. Mais j'arrête là cette comparaison, de crainte qu'on ne me dise encore que les Saint-Pierrais et Miquelonnais seraient des enfants terribles, ingérables. Je suis las d'entendre cela dans les ministères. Nous manquons d'outils pour fixer un cap et une stratégie. Quand je demande de l'aide à l'État, on me répond ; « Débrouillez-vous, c'est votre compétence ». Nous avons les compétences, mais pas les moyens. Les fonctionnaires sont sous les ordres de l'État et mis « à disposition de la collectivité autant que de besoin ». Inutile de dire que quand le préfet et le président du conseil territorial ne sont pas en harmonie, les choses n'avancent pas.
Il est grand temps de clarifier les compétences et les moyens alloués à chacun. J'ai demandé qu'une mission parlementaire soit menée par le Sénat : qui mieux que notre Haute assemblée, représentante des collectivités, saura faire de justes propositions en ce domaine ?
Je me tourne maintenant vers mes collègues d'outre-mer. Les états généraux et la mission menée ici ont mis en évidence de nombreux points communs entre tous nos territoires.
Malgré nos différences, nous devons nous regrouper pour avoir plus de poids et être plus crédibles auprès des instances nationales et européennes. Certains ont rencontré des Canadiens francophones dont les communautés étaient perdues dans l'immensité anglophone comme nous sommes perdus dans l'immensité de trois océans. Nous serons de meilleurs interlocuteurs pour la ministre que je félicite à nouveau de sa promotion. (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. - Le Sénat est particulièrement attentif à la situation des collectivités d'outre-mer. J'ai personnellement apprécié la qualité de nos échanges du 20 octobre sur le rapport de votre mission commune d'information. Depuis lors, le Président de la République a présidé le 6 novembre le premier conseil interministériel et annoncé des mesures importantes dont un bon nombre figurait dans votre rapport d'information. Il a donné la feuille de route pour l'outre-mer. C'est l'aboutissement d'un parcours riche et dense ouvert par les états généraux. Pour la première fois, les ultramarins ont pu prendre la parole et ils ont été entendus. Les 137 mesures concrètes et détaillées marquent la volonté du chef de l'État de rénover la relation qui unit l'État et l'outre-mer. Les deux tiers de vos propositions trouvent ici leur traduction, qu'il s'agisse de la lutte contre la cherté de la vie, du développement de la filière agricole, du soutien au tourisme ou encore du dialogue social car on ne doit plus arriver aux excès de l'hiver dernier. Je suis très attentive à leur suivi au niveau national et local et j'ai annoncé à La Réunion qu'un adjoint au délégué général à l'outre-mer en serait chargé.
Le Gouvernement a traduit cela dans le budget. Dès le 13 novembre, il a inscrit en faveur de l'outre-mer 123 millions en autorisations d'engagement et 53 millions en crédits de paiement afin d'abonder les moyens du logement social (20 millions), de l'équipement scolaire de la Guyane et de Mayotte (15 millions), du soutien aux collectivités et aux PME (38 millions) et du fonds de garantie pour les agriculteurs et les pêcheurs (10 millions).
Notre volonté de mettre rapidement en oeuvre ces décisions est claire ! Certaines ont une incidence budgétaire, d'autres une incidence fiscale, d'autres encore appellent une intervention législative. Je l'ai dit devant la commission des lois, plutôt que de déposer une loi pour l'outre-mer, le Gouvernement envisage des dispositions ponctuelles dans des projets sectoriels, ainsi de la modernisation de l'agriculture ou encore du Grenelle II. Nous verrons alors si un texte reste nécessaire.
Mon ministère consent un très important effort budgétaire pour les exonérations de charges sociales patronales car c'est indispensable pour soutenir l'emploi outre-mer. MM. Doligé, Lise et Marsin m'ont interrogée sur ce point. Le PLF prévoit déjà 1,1 milliard, soit une augmentation de 92 millions et 520 millions sont inscrits au collectif 2009 au titre du remboursement des organismes de sécurité sociale. Ces deux chiffres conjugués permettront d'éteindre la dette pour 2009 et de ne pas en générer une nouvelle en 2010.
Le Président de la République a annoncé le doublement du SMA en trois ans. Je veux vous rassurer, il n'y aura pas de SMA au rabais. Pour accueillir 6 000 volontaires, nous élargirons les critères aux jeunes diplômés d'un CAP ou d'un BEP éloignés de l'emploi et adapterons la durée de formation mais, pour les jeunes non diplômés, nous conservons les douze mois de formation : le coeur de métier est maintenu, de même que la qualité de la formation. Si l'on constatait une baisse du taux d'insertion, qui est aujourd'hui de 79 %, nous procèderions à des modifications. L'année 2010 ne marque qu'une étape et les crédits préparent la montée en puissance du dispositif.
Vous savez ma conviction sur le logement social : l'offre est largement insuffisante et la qualité de l'habitat existant est dégradée, voire indigne. Nous devons donc nous mobiliser. Ce ne sont pas les moyens qui manquent, monsieur Lise, et vous ne pouvez pas dire que le compte n'y est pas quand le taux d'engagement des crédits n'est que de 20 % à La Réunion, 72 % en Guadeloupe et de 60 % en Guyane. Non, ce n'est pas un problème de crédit. La LBU sera d'ailleurs abondée de 20 millions en autorisations d'engagement et la dépense fiscale pour le logement social se montera à 110 millions. La somme LBU-défiscalisation, ça fonctionne ! S'agissant de leur articulation, j'ai obtenu de Matignon un arbitrage pour une harmonisation de leurs bases respectives. Nous voulons appuyer le dispositif : c'est aussi l'objet de la déconcentration de l'agrément en deçà de 10 millions, qui interviendra début 2010. Le plafond de ressources pour la loi Scellier outre-mer passera à 49 600 euros pour un couple avec deux enfants et les varangues seront prises en compte, comme l'a souhaité M. Virapoullé. Le conseil interministériel pour l'outre-mer a levé d'autres freins, notamment à la prise en charge de la surcharge foncière.
Vous attendez les décrets d'application sur le logement social, M. Massion y a insisté. Quarante mesures d'application font l'objet d'une vingtaine de décrets. Il avait fallu attendre dix mois pour la loi Girardin. Le décret sur la bagasse a été signé La semaine dernière, celui sur l'article 32 et dix autres décrets sont partis vers les collectivités. Nous avons attendu car compte tenu de certaines de leurs remarques, il nous a paru pertinent de les amender : c'était pour la bonne cause. Nous avons obtenu aujourd'hui les bases communes de la LBU et de la défiscalisation ; c'est aussi la révision de l'aide à la rénovation de l'habitat et l'intégration des agences de voyage dans les zones franches. Restent les décrets sur le fret et sur la continuité territoriale, qui interviendront avant la fin de l'année. Les engagements pris sont tenus.
Vous m'avez interrogé sur le GIP pour le foncier. Nous avons mis en place les crédits de préfiguration : il faut un peu de concertation.
Lors de la discussion de l'article 11 du projet de loi de finances, le Gouvernement a pris l'engagement de ne pas imputer le RSTA sur la prime pour l'emploi.
Madame Payet, le Gouvernement a toujours dit qu'il ne voulait pas affaiblir le RSTA et qu'il tiendrait parole. Le RSTA est nécessaire et il ne faut pas faire de la récupération politique sur ce sujet. Pour éviter toute ambigüité, le RSTA reste une prestation sociale et lorsque le RSA sera mis en place, il suivra les règles de droit commun : se posera alors la question de l'imputation de la prime pour l'emploi.
Conformément aux préconisations du rapport du député René-Paul Victoria, nous souhaitons, M. Hirsch et moi-même, procéder à une évaluation du RSTA et du RSA en 2010. Nous examinerons également les modalités d'application du contrat unique d'insertion (CUI) outre-mer.
M. Cointat m'a posé des questions précises : je sais toute l'importance qu'il tient à la tenue d'un état civil à Mayotte. Des moyens supplémentaires ont été apportés : deux magistrats ont été nommés, deux assistants de justice ont été recrutés et les équipes dans les communes ont été renforcées. Nous traiterons 1 400 dossiers par mois ce qui permettra de résorber le stock de dossiers en attente d'instruction ou d'audience en moins d'une année. Concernant la situation financière des communes de Polynésie, j'accorde une grande importance à leur autonomie financière. C'est pourquoi dans les instruments financiers qui prendront la suite de la dotation globale d'équipement (DGE), je demanderai au gouvernement polynésien que des engagements soient pris pour transférer vers les communes une véritable fiscalité communale.
Plusieurs sénateurs sont intervenus sur l'état des finances des collectivités locales. La conjoncture n'est certes pas bonne et le Sénat a apporté un éclairage utile sur la nature et l'étendue de ces difficultés. Mais tous les ennuis ne datent pas de la crise. Depuis plusieurs années, un tiers des communes de la Guadeloupe est sous le contrôle de la chambre régionale des comptes. L'annulation généralisée des dettes sociales proposée dans le rapport n'est pas une excellente idée : elle pénaliserait les bons gestionnaires et elle enverrait un mauvais message aux élus qui ne se sentiraient plus tenus par leurs obligations sociales. Seul le protocole de restructuration financière proposé par l'État permettra de répondre à ces difficultés. En contrepartie, les créanciers annuleront au cas par cas les majorations et pénalités de retard qui s'élèvent souvent à plusieurs milliers d'euros. Ce redressement contractualisé est la seule démarche vertueuse pour parvenir à un apurement budgétaire, dans le respect de la libre administration des collectivités.
Lors du conseil interministériel de l'outre-mer du 6 novembre, le Gouvernement a répondu aux difficultés financières croissantes des communes. Le plan quinquennal de recensement des bases fiscales permettra d'augmenter de façon significative le produit de la fiscalité. Il est également prévu d'accroître le produit de la taxe sur les tabacs qui alimentera un fonds d'aide à l'équipement communal qui sera lui-même réparti entre les communes du département au prorata de la population scolarisée. La Guyane et Mayotte percevront une dotation d'équipement scolaire de 15 millions dès 2010. Le conseil interministériel a également décidé de renforcer l'appui technique offert aux communes en permettant à l'État de participer à la création d'agences régionales d'assistance technique. Les capacités de maîtrise d'ouvrage des communes seront ainsi renforcées. Le conseil interministériel a aussi rappelé que l'Agence française de développement devait accompagner les communes en difficulté. Enfin, l'Assemblée nationale a prévu un rapport sur l'état des finances des communes dans la perspective du projet de loi de finances pour 2011.
M. Bécot a rappelé l'importance du secteur touristique pour le développement des outre-mers. Comme je l'ai dit lors de mon déplacement aux Antilles avec Hervé Novelli, il s'agit d'une priorité gouvernementale. Pour la prochaine saison touristique, nous avons prévu un plan de communication doté d'un million et nous délivrerons des bonifications qui permettront à plus de trois millions des bénéficiaires des chèques vacances d'aller aux Antilles. De plus, le moratoire des dettes sociales et des garanties de prêts prévu dans le plan Corail a été repoussé.
M. Virapoullé m'a interrogée sur les agences de voyages et sur les technologies de l'information et de la communication. Ces secteurs qui étaient déjà éligibles au titre de la loi Girardin en matière d'exonérations de charges le resteront. Nous avons obtenu ce matin l'intégration des agences de voyage dans les secteurs prioritaires qui donnent le droit à un régime bonifié.
M. Jean-Paul Virapoullé. - Très bien !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. - Les prix d'accès à internet doivent baisser de façon significative. La situation actuelle n'est pas satisfaisante, compte tenu de l'argent public investi dans les infrastructures. Ce sera une de mes priorités pour l'année prochaine. Les observatoires de prix auront d'ailleurs un rôle important à jouer dans ce domaine.
Concernant la fonction publique, il faudra être attentif à respecter les principes généraux du droit et ceux à valeur constitutionnelle. C'est pourquoi les juristes de la délégation générale à l'outre-mer et à la direction générale de la fonction publique travaillent en étroite relation pour produire les textes juridiques inattaquables.
Plusieurs d'entre vous m'ont interrogée sur le futur fonds d'investissement de proximité dans les départements d'outre-mer. Il figurera sans doute dans une loi de finances rectificative, à moins qu'il ne soit encore temps de le prévoir dans le collectif de fin d'année.
M. Jean-Paul Virapoullé. - Très bien ! Il faut le créer !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. - J'en viens à la mesure sur les débitants de tabac voulue par Mme Payet : il nous faut maintenant travailler sur le décret d'application. Nous procèderons sans doute outre-mer comme en métropole.
Mme Hoarau a évoqué le projet de tram-train. Je vous renvoie aux déclarations que je viens de faire à La Réunion. L'État a toujours accompagné ce projet très coûteux, mais il n'est pas responsable de la situation actuelle qui est due à la collectivité régionale qui doit faire des choix, au regard de ses capacités financières.
M. Marsin m'a interrogée sur la mise en oeuvre du plan jeune outre-mer. Il s'agit effectivement d'un défit à relever. Ce plan sera décliné dans les DOM en insistant sur deux aspects : l'orientation des jeunes et la création d'internats d'excellence. Prochainement, un sous-préfet en charge de la cohésion sociale et de la jeunesse sera nommé dans ces départements. Il mettra en place le plan illettrisme élaboré par Luc Chatel.
Sur la continuité territoriale, vous souhaitez mettre en place un tarif résident. Pour l'heure, le Gouvernement a choisi de créer un fonds de continuité territoriale afin de concentrer les ressources jusqu'alors dispersées entre des opérateurs d'État et des collectivités territoriales. L'agence de la mobilité au service de nos outre-mers suivra la mise en place de ce dispositif. Ce fonds doit bénéficier d'abord et avant tout à nos compatriotes de l'outre-mer dont les ressources sont les plus faibles.
Je souhaite revenir sur les propos du sénateur Gillot qui estime que les paroles ne se sont pas suivies par des actes. Je viens de lui faire la démonstration du contraire. Le budget a été abondé moins d'une semaine après la réunion du conseil interministériel. L'assouplissement des visas interviendra dès le 1er décembre. Je ne peux laisser dire que les ultramarins n'ont pas été entendus. Sur la question des carburants, le Gouvernement a engagé une réforme. Je proposerai très prochainement aux collectivités de la Martinique et de la Guadeloupe une commission mixte car il faudra au niveau local faire des choix sur le modèle de distribution. Il faut maintenir le pouvoir d'achat tout en sauvegardant l'emploi. Le Gouvernement a prévu que les observatoires saisiront directement l'autorité de la concurrence pour agir sur les prix.
Le plan jeunesse va s'appliquer mais il faudra avoir le courage de faire le bilan des formations mises en place et qui ne relèvent pas de l'État. Il y aurait sans doute beaucoup à dire... Nous ne sommes pas tournés vers le passé : nous voulons une nouvelle relation où chacun s'assume et exerce ses responsabilités. Nous aurions aimé, à l'issue de la crise, que les collectivités fassent des propositions. Je n'ai rien vu venir. L'État fonde sa relation avec l'outre-mer sur trois grands principes : la reconnaissance, le respect et la responsabilité. L'État n'a donc pas de leçons à recevoir.
Je sais que les élus d'outre-mer mesurent l'engagement de l'État à leur côté. (M Christian Cointat applaudit)
J'ai noté, madame Terrade, vos préoccupations, qui me semblent être le prolongement des préoccupations des collectifs... Le Gouvernement est mobilisé pour le respect des engagements qui ont été pris dans les protocoles de sortie de crise. Mais il ne peut le faire que dans le cadre de notre loi républicaine, quand les collectifs sont engagés dans une démarche qui ne répond pas au modèle de société qui est le nôtre. Gardons-nous, monsieur Gillot, monsieur Antoinette, de polémiquer sur les carburants. Gardons-nous d'allumer, comme le font les collectifs, de nouveaux foyers de tension qui seraient préjudiciables à l'économie et à la sauvegarde de l'emploi.
L'action de l'État, monsieur Patient, monsieur Antoinette, ne se mesure pas seulement à l'importance de l'enveloppe budgétaire. Tout le monde sait que certaines collectivités ne sont de toute façon pas en mesure d'engager un effort pour l'équipement public. Au point que nous avons permis que les opérateurs sociaux se substituent aux communes pour des opérations foncières liées à la construction de logements. Il faut aller plus loin, je vous l'accorde, mais il serait bon, pour ce faire, d'éviter de perdre du temps dans des problèmes de gouvernance, comme cela a été le cas avec la SHM de Guyane.
Le Gouvernement s'est engagé, monsieur Giraud, aux côtés des élus mahorais, vers la départementalisation. Vos soucis vont à l'éducation, au foncier, au logement. Je vous rappelle que l'effort du plan de relance pour la dotation d'équipement scolaire s'est élevé à 6 millions, qui s'ajoutent aux 15 millions du Ciom, dont profitera aussi Mayotte. Je partage votre souci d'avancer sur la création d'un établissement public foncier, clé du règlement de bien des problèmes économiques et sociaux. Le décret sur la zone des 50 pas géométriques vient d'être adopté. Peut-être pouvons-nous le revisiter, mais il répond à la demande des élus mahorais. La nouvelle politique du logement peine, il est vrai, à démarrer. Les critères sont, dites-vous, mal définis. Soit, mais se pose aussi la question de la mobilisation des acteurs. Les évolutions, en tout état de cause, sont inéluctables, eu égard à la pression démographique et à la situation du foncier. Le Gouvernement s'est engagé à créer un fonds de développement économique et social. Cet engagement sera tenu et le représentant de l'État engagera dès 2010 une concertation. Le Gouvernement est pleinement conscient des enjeux du passage au système de droit commun : il prépare l'échéance du 1er janvier 2014.
La feuille de route prévoit, monsieur Ibrahim, une procédure cadre. Le mode de scrutin pour les élus sera prévu dans un texte que vous examinerez avant la fin du premier trimestre 2010, la nouvelle assemblée devant se mettre en place en 2011. Nous respecterons le pacte de départementalisation. Je suis attentive à la situation financière du conseil général. Nous travaillons en lien avec l'AFD pour l'aider à mettre en place un plan de redressement, et j'ai dit au président Douchina qu'une mission conjointe AFD-DGOM se rendra sur place. Vous m'interrogez sur la date de réévaluation des prestations : leur augmentation, significative, est prévue à l'échéance 2011, et les crédits correspondants seront inscrits en loi de finances. Pour 2010, le taux de revalorisation sera identique à celui de la métropole.
Le Gouvernement souhaite comme vous la transformation de Mayotte en région ultrapériphérique de l'Union européenne. J'ai obtenu des autorités de Bruxelles que le dossier soit inscrit dès 2011.
M. Magras m'a interrogée sur le décret relatif au centre de formation de Saint-Barthélémy. Il est vrai que les délais sont longs, car il doit être validé par le Conseil d'État, qui a demandé la signature d'une convention donnant compétence à l'établissement public. En ce qui concerne les décrets de ratification des sanctions pénales prévues par les codes des contributions et de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, fruits d'une délibération du conseil territorial de Saint-Barthélemy qui date de février 2009, la procédure de contreseing du décret sur l'urbanisme est en cours. En revanche, sur la question des sanctions pénales, l'avis est défavorable, le Gouvernement travaillant à l'heure actuelle sur cette question pour l'ensemble de l'outre-mer. Quant aux conditions d'intervention du Conseil national du sport, je relaierai votre demande auprès de Mme Yade.
Merci à M. Detcheverry d'avoir rappelé les avancées du conseil interministériel. Que le Sénat s'empare de la question du statut de Saint-Pierre-et-Miquelon en y mandatant une mission d'information me paraît une très bonne idée. Quant à l'engagement du Gouvernement sur la présentation d'un rapport relatif aux retraites complémentaires, je le réitère. Il sera publié d'ici à la fin de l'année. Sur l'aide au fret, j'ai entendu vos remarques. Je pense que dans sa forme actuelle, elle soutient l'activité économique via, en particulier, les exportations vers l'Union européenne. Sachez enfin que je suis, avec mes services, très attentive au dialogue qui nous a permis d'avancer sur la question de la desserte maritime internationale.
C'est sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations que je vous demande d'adopter le budget de la mission « Outre-mer » pour 2010. (Applaudissements à droite, au centre et au banc des commissions)
Examen des crédits
Article 35 (État B)
Il est ouvert aux ministres, pour 2010, au titre du budget général, des autorisations d'engagement et des crédits de paiement s'élevant respectivement aux montants de 381 203 968 005 € et de 379 741 845 043 €, conformément à la répartition par mission donnée à l'état B annexé à la présente loi.
M. Serge Larcher. - Je renonce à l'intervention que j'avais préparée pour vous répondre avec humeur. Nous sommes au Sénat, chambre qui représente les collectivités. Je comprends mal la charge permanente menée contre les élus que nous sommes tous. Les maires et les présidents de conseils généraux ultramarins ne sont pas des inconscients ni des irresponsables. Ils gèrent au mieux leurs collectivités, dans l'intérêt bien compris de la population. Mais quand tiendra-t-on compte de la situation spécifique outre-mer ? Les dotations de l'État ne tiennent pas compte de la réalité. Savez-vous qu'il y a neuf fois plus de personnes âgées en Martinique que dans l'Hexagone, que le nombre d'attributaires de minima sociaux y est bien plus élevé ? Or, la DGF globale des communes est la même que dans l'Hexagone. Oublie-t-on le niveau de nos prix ? Et l'on vient nous reprocher, ensuite, de tenter de répondre aux demandes des syndicats ?
N'oublions pas le rôle de « buvard social » joué par les communes : dans un contexte marqué par l'ampleur du chômage, elles ont compromis leur situation financière pour distribuer du pouvoir d'achat aux familles. Elles l'on fait non par fantaisie, mais par obligation. Traditionnelles locomotives du développement via la commande publique, les communes sont aujourd'hui en panne. Le plan Cocarde ne suffira pas à rétablir leur situation. C'est ce qui est écrit dans le rapport, dont il ne suffit pas de reconnaître l'excellence !
Les dettes sociales des communes ne sont pas payées, cependant que l'État ne joue pas son rôle. Les préfets auraient dû intervenir auprès des maires. Que fait-on ? Nous verrons si, grâce au plan Cocarde, les communes peuvent sortir de l'ornière dans vingt ou trente ans. La situation est dramatique.
J'en viens aux décrets d'application de la Lodeom. Vous raisonnez comme à l'époque de Mme Girardin, alors que la crise n'autorise pas à attendre. Interpellés par nos populations, nous vous appelons à faire vite. Si la Lodeom est la solution, il faut publier les décrets d'application sans plus attendre.
Le logement social est un problème. Vous êtes venue en Martinique et en Guyane. L'État fournit un effort, mais il en faudrait dix fois plus ! Vous dites que les autorités locales ne doivent pas se reposer exclusivement sur l'État. Or, elles font ce qu'elles peuvent pour l'accompagner. Nous sommes là non pour nous opposer, mais pour travailler ensemble.
Quand les jeunes représentent la moitié des chômeurs, le SMA ne peut suffire à rendre l'espoir : c'est bien, mais cela reste insuffisant, car la situation urge outre-mer !
Les états généraux et le Sénat ont élaboré des solutions réalistes. Vous dites que l'on ne peut tout faire. Nous le comprenons, mais il faut au moins donner des signes forts montrant que l'on va dans la bonne direction. Or, vous présentez un budget provisoire, une mesure pour rien comme on dit en musique. Le groupe socialiste votera contre ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Les crédits de la mission sont adoptés.
Article 54 quater
Le Gouvernement présente, lors de la discussion du budget 2011, un rapport indiquant les mesures qu'il entend prendre ou proposer pour répondre à la situation financière préoccupante des communes d'outre-mer, dont les villes capitales, pour leur permettre d'assumer pleinement les charges et responsabilités qui leur incombent.
Dans le cas des villes capitales de l'outre-mer, ce rapport vise plus particulièrement à identifier les mesures de nature à compenser les conséquences financières des charges dites de centralité dont la réalité est aujourd'hui établie comme le montrent les rapports transmis aux autorités de l'État.
Mme la présidente. - Amendement n°II-50, présenté par M. Lise, au nom de la commission de l'économie.
Rédiger comme suit cet article :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2010, un rapport indiquant les mesures qu'il entend prendre ou proposer pour répondre à la situation financière préoccupante des collectivités territoriales d'outre-mer, dont les villes capitales, et leur permettre d'assumer pleinement les charges et responsabilités qui leur incombent, notamment en matière sociale.
Dans le cas des villes capitales, ce rapport vise plus particulièrement à identifier les mesures de nature à compenser les conséquences financières des charges dites de centralité dont la réalité est aujourd'hui établie par les rapports transmis aux autorités de l'État.
M. Claude Lise, au nom de la commission de l'économie. - L'Assemblée nationale a introduit l'article 54 quater pour que le Gouvernement présente à l'appui du projet de finances pour 2011 un rapport consacré aux communes d'outre-mer, notamment aux « villes capitales », qui supportent des « charges de centralité ».
La commission de l'économie souhaite étendre le champ du rapport à l'ensemble des collectivités territoriales d'outre-mer, car leur situation est alarmante. La rédaction actuelle de l'article ne vise pas les conseils généraux, malgré les graves difficultés qu'ils rencontrent.
Rappelons que les dépenses sociales sont particulièrement lourdes, avec proportionnellement quatre à cinq fois plus d'allocataires du RMI qu'en métropole et sept fois plus d'allocataires du minimum vieillesse.
Il serait utile que le rapport examine la situation financière de toutes les collectivités territoriales ultramarines, afin d'élaborer des mesures complétant celles du comité interministériel.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. - Je vous rappelle que, pour la première fois, nous avons mis en place un comité de suivi à l'issue d'une mission sénatoriale. Il y a là un signal très important adressé à l'outre-mer.
Madame le ministre, vous avez rappelé que le comité interministériel avait pris 137 décisions. Nous en avions suggéré une centaine, que le Président de la République aurait pu mentionner puisqu'il en a repris les deux tiers. Je vous le dis pour que vous puissiez le lui rapporter directement. Le Sénat peut être fier de son travail. Nous suivrons avec beaucoup d'attention le sort des 137 mesures décidées.
La commission des finances accepte l'amendement. Il est certes nécessaire de connaître précisément et à brève échéance les nombreuses difficultés rencontrées par les communes, mais l'élargissement souhaité par les auteurs de l'amendement ne devrait pas induire de charge excessive, puisqu'il y a outre-mer moins de collectivités territoriales que dans un département moyen de métropole.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. - Le comité interministériel a pris en compte la situation préoccupante de l'outre-mer. Il a en particulier décidé un grand effort d'aide à l'investissement des collectivités territoriales, qui doivent faire face à la poussée démographique.
Il est utile d'examiner la situation des communes, mais il serait peut-être préférable que les autres collectivités territoriales fassent l'objet d'un rapport distinct en raison des aspects statutaires et fiscaux... Sagesse.
L'amendement n°II-50 est adopté et devient l'article 54 quater.
La séance est suspendue à 20 heures.
présidence de M. Bernard Frimat,vice-président
La séance reprend à 22 heures.
Conseil et contrôle de l'Etat
M. le président. - Nous abordons l'examen des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances. - Cette mission, dont l'architecture est inchangée, s'appuie sur une enveloppe de 569,9 millions répartie entre trois programmes.
Le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » comporte 322 millions de crédits de paiement, en progression de 5,7 %, preuve de l'importance attachée aux moyens de la justice administrative. Les tribunaux administratifs voient leurs crédits croître de 8,7 % ; 53 emplois équivalent temps plein travaillé (ETPT) sont créés en 2010, dont vingt postes de magistrats et trente de greffiers.
L'un des enjeux est de réduire les délais de jugement. En 2008, les tribunaux administratifs de la région parisienne ont enregistré, à eux seuls, 32 % des nouvelles affaires introduites en première instance. Outre le renforcement des effectifs permis par la loi d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ), un nouveau tribunal administratif est installé à Montreuil-sous-Bois depuis septembre 2009, afin de désengorger les juridictions parisiennes.
Intégrée au programme depuis le 1er janvier 2009, la Cour nationale du droit d'asile s'est, elle aussi, attachée à diminuer ses délais de jugement, en réorganisant son fonctionnement, en améliorant ses procédures d'instruction et de déroulement des audiences, et en renforçant ses effectifs. Les efforts budgétaires imposent, en retour, une amélioration des délais de traitement des contentieux. L'objectif fixé par la LOPJ de les ramener à un an n'est pas encore atteint, sauf devant le Conseil d'État, mais ne paraît pas hors de portée.
Le programme « Conseil économique, social et environnemental » disposera en 2010 d'un budget de 37,5 millions, en progression de 1,63 %. Le Cese est aujourd'hui à la croisée des chemins. La révision constitutionnelle a étendu ses compétences au domaine environnemental, permis sa saisine par pétition et sa consultation sur les projets de loi de programmation. Le Parlement pourra le consulter sur tout problème économique, social ou environnemental. Son évolution devra se faire à budget presque constant -cela fait consensus. Reste le problème du financement de la caisse de retraite du Conseil, dont l'équilibre fragile pourrait être remis en cause par l'inévitable rajeunissement et la féminisation qui résulteront de la réforme.
Le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » est doté de 210,7 millions en crédits de paiement, en progression de 1,5 %. En réalité, les dépenses de fonctionnement augmentent de 9,6 %, du fait notamment de dépenses de loyers, tandis que l'enveloppe consacrée à l'investissement fond, avec la fin des travaux de rénovation de la tour des Archives rue Cambon.
Si les effectifs restent stables à 1 841 ETPT, la Cour des comptes emploie 45 experts, recrutés par contrat pour trois ans, qui contribuent aux missions de certification des comptes de l'État et de la sécurité sociale. Ils contribuent à la diffusion au sein de la Cour des techniques les plus modernes de l'audit.
S'il est difficile d'évaluer l'impact financier de la réforme des juridictions financières qui se profile, on peut penser que son coût sera compensé, sur une dizaine d'années, par une réduction des effectifs d'une centaine d'ETPT. Enfin, saluons la reconnaissance à l'international de l'expertise de nos juridictions financières, commissaires aux comptes d'organismes internationaux tels que l'Onu, l'Otan, l'Unesco, Interpol ou l'OMC. La commission des finances propose au Sénat d'adopter ces crédits. (Applaudissements)
M. Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois. - En cette période de dégradation des finances publiques, le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » voit son budget augmenter de 11,9 % en autorisations d'engagement et de 7,71 % en crédits de paiement. Cet effort correspond à un réel besoin, non seulement pour assurer le service public de la justice, mais aussi pour faire face aux contentieux qu'entraîneront de nouvelles dispositions dont les conséquences sont mal évaluées : RSA, droit au logement opposable (Dalo) ou permis à point.
Les crédits de personnel augmentent de 6,1 %, avec la création de vingt postes de magistrats. La LOPJ prévoyait la création de 210 emplois pour la période 2002-2007 ; nous avons du retard... Le projet de budget triennal 2009-2011 prévoit également le recrutement de 80 agents de greffe.
La création récente de tribunaux administratifs à Nîmes, Toulon et Montreuil-sous-Bois doit réorganiser la géographie de la justice administrative pour conjuguer efficacité et délais d'attente raisonnables. Il faut poursuivre les efforts sur la région parisienne. L'ouverture du tribunal administratif de Montreuil-sous-Bois en septembre dernier vise à faire face à la progression du contentieux de la Seine-Saint-Denis et à rééquilibrer l'activité entre les tribunaux d'Ile-de-France. Dès 2010, le tribunal administratif de Cergy traitera des affaires des Hauts-de-Seine et du Val-d'Oise, celui de Versailles des affaires de l'Essonne et des Yvelines et celui de Montreuil-sous-Bois, de la Seine-Saint-Denis.
En région parisienne, les délais ne sont plus supportables et dépassent parfois cinq ans. La situation déjà critique du tribunal administratif de Paris devrait encore se dégrader avec le développement du contentieux relatif au droit au logement opposable.
Je souhaite que les moyens alloués au tribunal administratif de Paris soient renforcés.
Les effectifs des cours administratives d'appel, notamment de Paris et de Versailles, devraient être augmentés. Si la création d'une nouvelle chambre est décidée pour celle de Versailles, je souhaite qu'un projet similaire soit confirmé pour Paris. Dans le sud, la création des tribunaux administratifs de Nîmes et de Toulon a soulagé ceux de Montpellier et de Marseille, mais la cour d'appel de Marseille est au bord de la saturation. Il faut absolument y créer une nouvelle chambre.
Les indicateurs de performance font apparaître des délais de jugement beaucoup trop longs, même si les valeurs cibles sont atteintes chaque année. Entre 2000 et 2008, le nombre d'affaires enregistrées devant les tribunaux administratifs a progressé de 55 %, et de 64 % devant les cours administratives d'appel. Les contentieux les plus inflationnistes sont ceux des étrangers et de la police. Depuis 2004, ce dernier a augmenté de plus de 131 % devant les cours administratives d'appel, du fait notamment du permis à points. Monsieur le ministre, l'outil statistique relatif aux affaires de police administrative doit être complété afin de comptabiliser précisément ce contentieux.
Un contentieux qui explose, des moyens renforcés, une productivité accrue et une amélioration des délais de jugement : cette situation vertueuse pourrait vite se dégrader avec de nouveaux contentieux. De septembre 2008 à août 2009, 3 155 requêtes ont été déposées devant les tribunaux administratifs concernant le droit au logement opposable. Ce contentieux devrait à terme représenter 5 000 à 7 000 affaires par an, essentiellement devant les quatre juridictions d'lle-de-France. A la différence de celui du RMI et de l'allocation parent isolé, le contentieux du RSA relève en première instance des tribunaux administratifs et pourrait s'élever à 12 000 affaires par an. Ce nombre pourrait être réduit de moitié si la procédure de recours administratif préalable obligatoire auprès du président du conseil général se révèle efficace.
L'organisation interne de la justice administrative connaît des réformes depuis plusieurs années. Un décret du 7 janvier 2009 a remplacé le « commissaire du Gouvernement » par le « rapporteur public », mais le Parlement, et plus particulièrement le Sénat, a refusé que cette modification du code de justice administrative se fasse par ordonnance. Les dispositions relatives au statut des magistrats devront donc faire l'objet d'un projet de loi. Il en sera de même pour le projet de dispenses de conclusions du rapporteur public, envisagé par le Conseil d'État afin d'accélérer le traitement de certains contentieux répétitifs. Un tel dispositif suscite de vives inquiétudes. Il doit faire l'objet d'une réflexion approfondie afin d'éviter toute rupture d'égalité dans le traitement des affaires.
Je souhaite que l'effort pour donner à la justice administrative les moyens d'exercer correctement et prioritairement sa mission juridictionnelle soit maintenu et amplifié. La commission des lois approuve ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes et au centre)
Mme Anne-Marie Escoffier. - La mission « Conseil et contrôle de l'État » permet d'imposer une logique de performance conforme à l'esprit de la Lolf, au bénéfice des citoyens comme à celui des agents de l'État.
Le premier de ses programmes concerne le Conseil d'État et les autres juridictions administratives dont le budget, qui correspond à 56,4 % des crédits de la mission, augmente de 5,7 %, soit 569,9 millions d'euros. L'ordre administratif doit parvenir au délai de jugement d'un an fixé par la Lopj de 2002, qui n'est toujours pas atteint. Nous notons le souci que l'État attache aux moyens de la justice administrative et espérons que cette augmentation budgétaire, légèrement majorée par l'Assemblée nationale, aidera à répondre à cette exigence. Il serait ainsi démontré que les administrations respectent le droit tout en maîtrisant leurs dépenses. Pour la première fois, la Cour nationale du droit d'asile est rattachée à ce programme. Elle doit elle aussi raccourcir ses délais de jugement tout en garantissant les droits de l'homme les plus élémentaires dans un État de droit.
Le deuxième programme concerne le Conseil économique, social et environnemental, qui a encore quelques progrès à faire pour satisfaire les impératifs fixés par la Lolf, d'autant que la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 lui a confié de nouvelles missions. Il dispose d'un budget en progression de 1,6 million d'euros, soit une enveloppe globale de 37 millions. Une loi organique doit achever la définition de ses missions : 2010 sera bien une année de transition pour cette institution à laquelle le Parlement, et plus particulièrement le Sénat, est très attaché. La représentation des activités économiques et sociales représente 68,5 % des crédits du programme, le fonctionnement en absorbe 26 %, et la communication et l'international en utilisent 5,5 %. Si une trop grande maîtrise budgétaire était imposée au Conseil économique, social et environnemental, elle pourrait l'empêcher d'assurer toutes ses missions et l'équilibre fragile de sa caisse de retraite serait menacé.
La Cour des comptes et les autres juridictions financières, qui constituent le troisième programme, sont engagées dans un processus de modernisation dont la prochaine étape sera la réforme des chambres régionales et territoriales des comptes. Ses crédits, d'un montant de 210,7 millions d'euros, progressent légèrement, de 1,5 %. J'ai bien noté que les juridictions financières poursuivront la rationalisation de leurs moyens et que le Gouvernement souhaite faire de la Cour des comptes « le grand organisme d'audit et d'évaluation des politiques publiques » dont la France a besoin. Faute de connaître les détails de la réforme envisagée, il est difficile de se prononcer sur le budget de ce programme.
On ne peut que se féliciter, presque dix ans après la mise en oeuvre de la Lolf, des effets bénéfiques du contrôle de gestion imposé à ces institutions, surtout dans la situation budgétaire tendue que nous connaissons. Le groupe RDSE votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes et au centre)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Le budget du programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » augmente de 5,7 % pour représenter 322 millions de crédits de paiement. Les tribunaux administratifs en bénéficient de plus 8,7 %. La création de 50 emplois confirme la mise en oeuvre du plan triennal et l'ouverture récente du tribunal administratif de Montreuil est positive. Toutefois, cette année encore, cela ne suffit pas pour faire face à l'engorgement de la juridiction administrative.
Le nombre des jugements par magistrat et par an est passé de 240 à 275 entre 2004 et 2008, avec des records en Ile-de-France. Le tribunal de Montreuil, créé pour drainer l'afflux du contentieux en Seine-Saint-Denis et rééquilibrer l'activité des tribunaux de Cergy-Pontoise et Versailles, ne soulagera pas ceux de Melun et de Paris. Nul doute qu'il sera lui aussi vite saturé. Une personne a même été informée récemment par le tribunal de Cergy-Pontoise que l'on traitait actuellement les recours de 2006 !
Comment en serait-il autrement pour le contentieux relatif aux étrangers avec une politique migratoire de plus en plus répressive ? Avec un objectif de 26 000 reconduites à la frontière, les atteintes aux droits augmentent inévitablement, ainsi que les recours contre les refus de titre de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire et ceux des déboutés du droit d'asile. Quant au contentieux relatif à la mise en oeuvre du droit opposable au logement, il connaît une progression constante, surtout à Paris où la politique du logement donne la priorité à l'investissement locatif privé. La montée en puissance du contentieux du RSA sera liée au nombre des bénéficiaires et à la complexité du dispositif. Quant au contentieux du permis à points, lui aussi en forte progression, il se résume bien souvent au constat du non-respect par l'administration de certaines formalités, qui débouche sur une annulation. Ne faudrait-il pas mettre en place un recours administratif préalable obligatoire ?
Dans ces conditions, les délais pour les autres affaires s'allongent eux aussi. Cette situation s'oppose à l'obligation de résultats que vous faites peser sur les juges administratifs, sauf à prendre des risques pour la qualité des jugements prononcés. Il n'est pas de bonne justice si elle est trop rapide, trop souvent organisée par des ordonnances et sans la garantie de la collégialité.
La justice ne peut être abordée sous le seul angle de la RGPP, ni de la « productivité » des magistrats. Réduire les délais de jugement exige un accroissement considérable des effectifs. Sur le plan immobilier, les programmes de travaux se poursuivent, mais de nombreux locaux sont trop petits, comme à Paris, inadaptés ou en mauvais état, comme à Fort-de-France. Enfin, l'accessibilité des locaux aux personnes handicapées est sans cesse repoussée à plus tard. Pour toutes ces raisons, notre groupe votera contre ces crédits. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. - Merci aux rapporteurs, merci aux oratrices ! Avec plus de 20 000 nouveaux dossiers en 2008, le tribunal administratif de Paris concentre 36 % des nouvelles procédures en Ile-de-France et son contentieux, notamment en droit des étrangers, est en forte croissance. La situation de cette juridiction s'est cependant beaucoup améliorée depuis 2002, le délai prévisible moyen de jugement ayant été réduit de 23 à 12 mois en 2008 ; le nombre d'affaires en stock a diminué de près de 32 %. Une action résolue a permis de résorber le retard pris sur le contentieux fiscal ou les marchés publics. La cour administrative d'appel de Paris, en dépit d'une progression de 50 % du volume de contentieux, a divisé par deux son délai moyen de jugement. Celle de Versailles, créée en 2004, a également été confrontée à une très vive croissance du contentieux : 75 % entre 2005 et 2008. Son délai prévisible de jugement est pourtant proche de la moyenne nationale. La cour administrative d'appel de Marseille, quant à elle, est parvenue à ramener son délai de jugement de trois ans et sept mois à un an et neuf mois, en dépit d'un doublement du contentieux ! Les moyens humains ont été accrus et tout le personnel s'est mobilisé -je lui rends hommage ici.
Le tribunal administratif de Paris demeure une juridiction fragile. En 2009, nous avons renforcé l'aide à la décision par la création d'emplois d'assistants et de postes de magistrats. En 2010, six nouveaux magistrats seront affectés à ce tribunal. La situation des deux cours franciliennes reste également préoccupante. La croissance du contentieux y demeure nettement plus élevée qu'ailleurs. La cour administrative d'appel de Paris pourrait bénéficier de magistrats supplémentaires et celle de Versailles sera dotée en 2010 d'une 6e chambre, avec quatre magistrats et trois agents de greffe. La croissance du nombre de requêtes devant la cour de Marseille se ralentit, mais le délai de jugement y reste supérieur à la moyenne nationale. Il n'est donc pas exclu de la renforcer en créant une chambre supplémentaire. J'indique qu'une nouvelle rubrique concernant les permis à points figurera dans l'application informatique du suivi des procédures.
Madame Borvo, la juridiction administrative est confrontée à une demande massive et croissante, qui exige, outre les moyens supplémentaires alloués dans le budget de l'État, l'investissement des magistrats, assistants et agents de greffe. Je salue leur engagement qui s'est traduit par une réduction tangible des délais de jugement malgré une vive progression du contentieux. La loi de programmation pour les finances publiques 2009-2011 prévoit la création de 150 emplois sur trois ans. A cela s'ajoute une réflexion plus globale sur l'évolution des méthodes et des procédures. Un décret, début 2010, réformera le partage des compétences entre le Conseil d'État et les tribunaux administratifs et poursuivra la rénovation des procédures.
Monsieur le rapporteur Frécon, il est bien difficile de mesurer l'impact de la réforme du Conseil économique, social et environnemental tant que les détails n'en sont pas arrêtés. L'impact des saisines parlementaires sur la charge de travail du Conseil et sur son budget dépendra du nombre de saisines annuelles -c'est d'une logique infaillible !- et il appartiendra au Conseil renouvelé et recomposé d'évaluer les conséquences budgétaires et pratiques. Mais il est probable que la variable d'ajustement sera le nombre d'auto-saisines, priorité étant donnée aux saisines gouvernementales et parlementaires. Par ailleurs, l'exercice du droit de pétition pose un certain nombre de problèmes de gestion. (MM. les rapporteurs renchérissent) La négociation triennale qui se tiendra au printemps 2011 avec la direction du budget sera l'occasion d'évaluer le montant des crédits nécessaires.
Au 31 décembre 2008, la caisse de retraite du Conseil comptait 798 ayants droit et 233 cotisants. Elle est donc en déséquilibre et le financement des pensions est très majoritairement assuré par les crédits budgétaires. Il existe un fonds de réserve, mais il sera totalement consommé à l'horizon 2013. La Cour des comptes a formulé des propositions : changer l'âge de la retraite, le montant des cotisations et des prestations ; transformer le régime actuel en régime de retraite en points ; ou en faire un régime de retraite complémentaire. Ces différentes solutions nécessitent une expertise approfondie. Le Conseil économique a déjà pris des mesures en 2009 : suppression de la retraite proportionnelle et diminution du taux de réversion de 66 à 50 %.
Les contours exacts de la réforme des juridictions n'étaient pas arrêtés lors la préparation du budget. Le projet de loi sera examiné par le Parlement au cours de l'année 2010. Dès lors, la première traduction budgétaire de la réforme devrait intervenir en loi de finances pour 2011 et dans la prochaine loi de programmation des finances publiques 2011-2013. L'étude d'impact montre que les surcoûts des missions nouvelles sont compensés par les gains de productivité et la rationalisation immobilière.
Madame Escoffier, vous avez soulevé la question des délais de jugement de la Cour nationale du droit d'asile. Le Conseil d'État et la Cour nationale se sont accordés sur des objectifs ambitieux pour 2009-2011 : ramener le délai de jugement des affaires en stock à six mois, contre plus de dix mois il y a un an. Le Conseil d'État a engagé la modernisation de cette juridiction : dix magistrats y siégeront à titre permanent et la réforme des audiences diminuera le nombre, élevé, des renvois d'affaires d'une séance à l'autre, facteur d'alourdissement et d'allongement des délais. Le Conseil d'État a prévu un renforcement des moyens de la Cour et quinze emplois équivalents temps plein sont créés. Les premiers résultats ont conduit à revoir certains objectifs intermédiaires, sans remettre en cause les objectifs pour 2011. Cette réduction moindre que prévu s'explique notamment par l'augmentation du nombre des recours. (Applaudissements à droite)
Les crédits de la mission sont adoptés.
Direction de l'action du Gouvernement
M. le président. - Nous allons examiner les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Orateurs inscrits
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial de la commission des finances. - Les crédits, en augmentation de 15 % environ, s'élèvent à 559,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 553,9 millions en crédits de paiement. Ils sont répartis entre deux programmes, l'un rassemblant des services rattachés au Premier ministre, l'autre composé de onze autorités administratives indépendantes participant à la protection des droits et libertés. Une action « Administration territoriale » est créée dans le programme « Coordination du travail gouvernemental ». Elle regroupe la rémunération des secrétaires généraux pour les affaires régionales et celle de leurs chargés de mission. La réforme de l'administration territoriale déconcentrée explique en partie la hausse d'environ 20 % des crédits de ce programme.
A périmètre constant, l'évolution des crédits du programme traduit une diminution des emplois, conforme à la révision générale des politiques publiques. Je souhaite d'ailleurs que le Gouvernement poursuive sa réflexion sur la pertinence du maintien de certaines entités rattachées aux services du Premier ministre, réflexion pouvant conduire à des suppressions, en cas de redondance ou de caducité des missions.
J'insiste sur la diligence dont le contrôleur général des lieux de privation de liberté a fait preuve afin de rendre opérationnels ses services dans les plus brefs délais, en dépit de conditions d'installation tardives et difficiles. Je me félicite de l'augmentation des crédits de paiement du programme « Protection des droits et libertés ». Comme l'an dernier, l'Assemblée nationale a réduit de 648 545 euros les crédits de la Halde ; nos collègues Dominati et Milon ont, quant à eux, déposé un amendement tendant à limiter la progression des dépenses de fonctionnement de l'ensemble des autorités administratives indépendantes. Or, à l'exception du CSA dont les crédits de fonctionnement augmentent afin de poursuivre le développement de la télévision numérique, les augmentations de crédits prévues en 2010 sont destinées à renforcer les effectifs de ces autorités, y compris ceux de la Halde.
C'est que le nombre des saisines augmente considérablement. De 1 534 % en cinq ans pour l'activité de contrôle de la Cnil ! Dans le cas du Médiateur de la République, la progression considérable du nombre de saisines est due à l'arrivée des demandes supplémentaires émanant du Pôle santé et sécurité des soins. Quant aux réclamations enregistrées par la Halde, elles ont augmenté de 25 % par rapport à 2007.
Je comprends le souhait de nos collègues d'associer les autorités administratives indépendantes à la maîtrise des dépenses de l'État. La commission des finances y souscrit et n'est pas revenue sur l'amendement adopté par l'Assemblée nationale. Je souscris également au souhait de voir ces autorités adopter une gestion vertueuse. C'est pourquoi j'ai demandé que la commission des finances contrôle les crédits de la Halde en 2010. Cependant, dans l'attente des conclusions de ce contrôle, je me garderai de réduire hâtivement les crédits de cette institution ou de toute autre. C'est pourquoi je présenterai à titre personnel un amendement rétablissant les crédits de la Halde.
Je reste vigilant sur les dépenses de fonctionnement de ces autorités, en particulier leurs loyers. Le problème a été analysé de manière exhaustive dans le rapport d'information de Mme Bricq sur l'État locataire. Depuis lors quelques progrès ont eu lieu. C'est ainsi que la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, une des institutions les plus dépensières en termes de loyer, a rejoint des locaux appartenant aux services du Premier ministre. Grâce à quoi son budget diminue de 4 %. Le Médiateur a renégocié son loyer, dont le coût passe de 700 euros le m2 à moins de 450. Il m'a été indiqué que la Halde renégociait son bail afin d'en réduire le coût. Il semble qu'une réflexion globale sur le parc immobilier de l'État soit en cours. Pouvez-vous me dire où elle en est ?
La commission a proposé l'adoption sans modification des crédits de la mission.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Cinq minutes pour évoquer le dramatique problème de la drogue...
Avec un budget de 29,8 millions, la Mildt ne s'occupe directement que d'une infime partie de la lutte contre la toxicomanie ; elle est cependant au coeur de cette politique car elle pilote le plan gouvernemental 2008-2011. Dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2008, la commission des affaires sociales a demandé qu'un document de politique transversale soit élaboré. Celui-ci nous est présenté pour la première fois cette année et il nous donne une vision globale des sommes consacrées par l'État à la lutte contre les drogues. Le total atteindrait 931 millions en 2010, à quoi il faut ajouter les 267 millions attribués à la prise en charge sanitaire et sociale au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cette somme ne me paraît pas excessive face à ce qui cause 20 % des décès en France chaque année. Une part importante de financement relève du budget de l'éducation nationale ; de fait, la priorité doit être de lutter contre la première consommation de substances addictives qui s'effectue désormais dès l'âge de dix ou onze ans.
La vraie question est de savoir si ces sommes sont bien utilisées et c'est là que j'émettrai quelques réserves. Il y a une grande marge de progrès dans le monde de l'éducation. Les infirmières scolaires et la visite épisodique d'un gendarme ou d'un policier en uniforme ne suffisent pas à faire prendre conscience aux jeunes des dangers encourus, à détecter les problèmes et à orienter vers une prise en charge adaptée. La politique de répression paraît également inadaptée : on oscille entre de simples rappels à la loi et des peines de prison qui n'empêchent pas la récidive. Une contraventionnalisation serait une meilleure réponse.
Le plan gouvernemental de lutte contre les drogues est un engagement important mais nous devons rester modestes dans nos attentes. Trois ans ne peuvent suffire à inverser une tendance inquiétante. Il faut donc une évaluation de fond, inscrite dans la durée, afin de saisir les tendances sociales en matière de consommation de drogues et, surtout, leurs déterminants. L'Observatoire français des drogues et des toxicomanies devrait être chargé de la détermination des indicateurs propres à mesurer l'efficacité de la politique publique. Ces indicateurs pourraient faire l'objet d'une publication annuelle.
Nombre de parlementaires estiment que la police et la justice ne répriment pas suffisamment les réseaux de commercialisation de drogue, voire les conservent pour maintenir la paix sociale dans certains quartiers. Pouvez-vous vous faire l'écho de ces préoccupations auprès de vos collègues en charge de l'intérieur et de la justice ?
Nous commençons à y voir plus clair sur la politique de lutte contre les drogues et les toxicomanies, dont nous pensons qu'elle pourrait être déclarée grande cause nationale. Dans cette attente la commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de l'action Mildt.
M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis de la commission des lois. - Le programme « Protection des droits et Libertés » est né de la volonté conjuguée de Mme Gourault et de M. Gélard, de sanctuariser les crédits des autorités administratives indépendantes, en charge de la protection des droits et libertés. L'objectif était de neutraliser le principe de fongibilité asymétrique des crédits qui pouvait fragiliser ces autorités.
Je vous présente donc, pour la deuxième année consécutive, le programme « Protection des droits et libertés ». Il serait d'ailleurs plus cohérent que le Défenseur des enfants soit intégré à ce programme, avec la Cnil et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Nous pouvons nous réjouir du caractère raisonnable du budget alloué à celui-ci. Cette progression donnera à cette autorité les moyens de poursuivre sa montée puissance tant en termes de moyens humains que d'amélioration des visites sur site ou de traitement des courriers.
C'est assurément sans dommage pour le bon accomplissement de leurs missions que les autorités administratives indépendantes peuvent envisager une baisse de leurs loyers prohibitifs. J'espère que le Défenseur des droits qui va être institué donnera le bon exemple d'une utilisation intelligente de la géographie et qu'il s'installera ailleurs que dans les beaux quartiers, dans des locaux spacieux, fonctionnels, moins coûteux et évolutifs.
Le président Warsmann a fait adopter par l'Assemblée nationale un amendement sur lequel notre commission des lois s'est prononcée.
Après cette limitation de la hausse des crédits de la Halde, elle a donc souhaité revenir aux propositions initiales du Gouvernement.
Les autorités indépendantes s'inquiètent : la création du Défenseur des droits ne se traduira-t-elle pas par une perte d'indépendance, par une dégradation de leur visibilité, par un alourdissement des procédures et par une dilution des compétences ? Il y a en effet peu de chances qu'une mutualisation permette une diminution des coûts car la plupart de ces budgets étant peu élevés, on ne pourra pas gagner beaucoup.
Un mot enfin du Défenseur des enfants. Le projet prévoit une solution mais un collège de trois membres n'est pas de nature à rassurer : il y aurait intérêt à élargir cette composition afin de mieux individualiser les institutions intégrées.
La commission recommande l'adoption de ces crédits. (Applaudissements)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Je me concentrerai sur les onze autorités indépendantes en y ajoutant le Défenseur des enfants, dont je regrette moi aussi qu'il n'y soit pas associé. Je salue le travail du Contrôleur des lieux privatifs de liberté. Bien évidemment, son activité est appelée à se développer compte tenu de l'état de nos prisons.
Les loyers sont souvent très élevés, dit-on, mais il faut considérer la gestion par l'État de son patrimoine, elle n'est pas toujours des plus compréhensibles.
Nous discutions dans un contexte particulier. Les contours du futur défenseur des droits sont connus. Mon groupe n'avait pas voté sa création car nous redoutions qu'il n'absorbe plusieurs autres autorités et n'ait un budget et une compétence restreints. Nos craintes sont aujourd'hui confirmées. Il réunit les fonctions du Médiateur de la République, de la Commission nationale de déontologie de la sécurité et du Défenseur des enfants, sans que ces deux autorités aient été consultées. Il pourrait aussi intégrer la Halde et la Cada. On assiste à une reprise en main d'organismes dont le sérieux et l'indépendance ne convenaient pas. Déjà le Défenseur des enfants en 2004 et la Commission nationale de déontologie de la sécurité en 2005 avaient échappé de peu à une réduction de leur budget.
Les droits sont réduits au fil des lois. Votre politique de plus en plus répressive multiplie les fichiers au point que le commissaire européen aux droits de l'homme nous montre du doigt. Ces autorités ont vocation à vérifier le respect du droit comme des conventions internationales -ainsi de la convention internationale des droits des enfants dont nous venons de fêter le vingtième anniversaire- mais aussi à réfléchir à de nouveaux droits et à les promouvoir, à faire des propositions.
Le Défenseur des droits, lui, n'interviendra que sur saisine et sauf dans les domaines de l'enfance et de la sécurité, uniquement en regard des services publics. Où est l'effectivité des droits pour tous ? Où est le pluralisme ? Que devient la spécificité du champ d'intervention des autorités indépendantes regroupées ? Tout cela participe de la régression des droits. Le président de la commission des lois affirme que le Défenseur des droits sera plus efficace parce qu'il sera doté d'un pouvoir d'injonction. Mais il n'aura pas les moyens d'investigation ! Mieux vaut donner le pouvoir d'investigation aux autorités actuelles en leur assurant les moyens de travailler. Le nombre de saisines de la CNDS a augmenté de 50 % et la Cnil est confrontée à la multiplication des fichiers : à chaque fait-divers, une loi et à chaque loi, un fichier -et encore avec le texte sur la récidive !
Nous soutenons l'amendement de la commission des lois mais voterons contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Cette mission n'est assurément pas la plus simple : elle regroupe des institutions très différentes. Complexe à appréhender, difficile à cerner, elle tend moins selon la formule du rapporteur, à concourir à une politique publique qu'à une fonction d'état-major ou à des actions interministérielles à caractère transversal. Ses autorisations d'engagement, 559 millions, progressent de 15 % et ses crédits de paiement, 553 millions, de 19 %. Le premier de ses deux programmes correspond à sa fonction d'état-major, de stratégie, de prospective et de coordination autour du Premier ministre -autant de fonctions essentielles. Son périmètre a été sensiblement modifié pour tenir compte des raisons affectant l'administration territoriale.
Le deuxième programme regroupe onze autorités administratives indépendantes, dont la Cnil. Je souligne la particulière fragilité de celle-ci au cas où ses crédits ne seraient pas revalorisés. A l'occasion de notre proposition de loi, M. Détraigne et moi avons souligné l'impérieuse nécessité de revoir ses moyens financiers à la hausse pour assurer une compétence dont le champ s'amplifie.
Il y aurait trop d'organismes, des regroupements permettraient des économies substantielles. Je ne puis qu'être favorable à des clarifications de compétences. Certains organismes, créés pour répondre à un problème, n'ont pas disparu quand il a été réglé : le mille-feuille n'est pas seulement dans les collectivités territoriales...
Consciente des efforts de cette mission, je donnerai avec mon groupe un avis favorable à ces crédits. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. - Je remercie les rapporteurs d'avoir présenté le travail effectué et les orateurs de leurs interventions. Je voudrais d'abord répondre sur la situation des autorités administratives indépendantes. Le Gouvernement, très sensible à la maîtrise des coûts, considère que leur fonctionnement doit se conformer à la discipline qu'il s'impose à lui-même. Nous essayons de réduire les loyers et renégocions systématiquement les baux les plus chers. M. Woerth a détaillé ce chantier dans une lettre aux présidents des commissions des finances des deux assemblées et au président du conseil de l'immobilier de l'État. L'installation du Défenseur des droits dans le XIXe montre qu'il est possible de trouver des loyers raisonnables dans Paris (500 euros le mètre carré).
Les relais territoriaux sont question d'efficacité. Ils n'ont pas le même intérêt pour toutes les autorités ni ne doivent prendre systématiquement la même forme. Ce qu'il est possible de concevoir pour le Médiateur de la République, au contact direct des citoyens, ne l'est pas forcément pour toutes les autorités.
S'il s'agit de conforter un réseau de correspondants locaux au service des citoyens, avec pour objectif d'améliorer la qualité de service au moindre coût, la démarche ne peut être qu'encouragée. S'il s'agit en revanche de multiplier les centres locaux de décision et de gestion, avec une augmentation des coûts de structures et de fonctionnement, le Gouvernement sera très réservé. En outre, ce qui compte, c'est la rapidité de traitement des dossiers plus que la proximité géographique : c'est tout l'enjeu du traitement à distance des demandes et des nouvelles technologies.
La mise en place d'un Défenseur des droits sera l'occasion d'évaluer la pertinence de l'organisation territoriale des autorités qui la composent. L'examen du projet de loi organique permettra d'en débattre.
Concernant la politique immobilière de l'État évoquée par M. Krattinger, le Sénat a mis cette question sur le devant de la scène avec le remarquable rapport de Mme Bricq de juillet dernier. Le Gouvernement considère également que l'État ne peut pas continuer à payer 188 millions par an de loyers en Ile-de-France. En mai, Éric Woerth, ministre en charge de la politique immobilière de l'État, a commencé à réduire ces charges. C'est un des axes majeurs de la politique immobilière du Gouvernement, au même titre qu'un meilleur entretien, que la réduction des surfaces et que la mobilisation des opérateurs de l'État. La réduction du coût locatif a d'abord été obtenue pour le loyer du ministère des sports, dans le XIIIe arrondissement, qui était le plus coûteux : le Gouvernement a obtenu qu'il passe de 14,5 à 8 millions par an. Le ministère du travail est concerné par une procédure identique : une renégociation est en cours pour ses locaux de la tour Mirabeau, dans le XVe arrondissement. Plus généralement, le Gouvernement souhaite intensifier ces renégociations pour profiter de la conjoncture actuelle en matière de loyers de bureaux à Paris. Là où le travail a été fait, la baisse moyenne a été de 45 % ! Éric Woerth a mis sur pied une task force associant le service France domaine de la direction générale des finances publiques et une équipe de négociateurs immobiliers privés. Pour 25 baux représentant 74 millions de loyer annuel, la renégociation devrait aboutir dans les prochains mois.
M. Krattinger m'a interrogé sur la rationalisation des commissions et des comités. La circulaire du Premier ministre du 8 décembre 2008 relative à la modernisation de la consultation a permis de recenser et de supprimer des instances consultatives inutiles. Le décret du 4 juin 2009 modifiant le décret du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif a permis de réduire le nombre des commissions consultatives créées auprès d'autorités de l'État, conformément à l'orientation donnée par le conseil de modernisation des politiques publiques. Ainsi, sur les 545 commissions créées par voie réglementaire, 211 ont déjà été supprimées. Pour poursuivre cet effort, Éric Woerth a demandé aux membres du Gouvernement de rechercher les commissions qui pourraient faire l'objet d'une nouvelle vague de suppression.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Très bien !
M. Henri de Raincourt, ministre. - Ce travail de recensement est en cours et devrait permettre de supprimer encore une cinquantaine de commissions d'ici la fin de l'année. Il reste beaucoup à faire, mais le Gouvernement souhaite continuer à supprimer les organismes qui doivent l'être et éviter la création de nouvelles structures inutiles, inadaptées, coûteuses, voire même redondantes. Dans ce contexte, les propositions du Parlement sont extrêmement utiles.
M. Peyronnet m'a interrogé sur l'impact budgétaire de l'installation du Défenseur des droits. Sa création n'aura pas d'incidence budgétaire immédiate. Pour 2010, le Défenseur des droits bénéficiera des moyens budgétaires votés en loi de finances pour l'ensemble des autorités administratives qui le composeront. II conviendra ensuite de tirer les conséquences financières de la mise en place de la nouvelle autorité, en termes de mutualisation des moyens. Le regroupement sur un lieu unique, respectant les critères d'efficacité de la politique immobilière de l'État, y contribuera.
M. Barbier a souhaité que l'Observatoire français des drogues et toxicomanies puisse élaborer des instruments d'évaluation. Mais cet observatoire recueille, analyse et synthétise en permanence diverses données concernant les drogues et les toxicomanies ! Pour remplir sa mission, l'Observatoire a mis en place des indicateurs et des tableaux de bords qui permettent de suivre l'évolution de la demande et de l'offre de produits. S'agissant de la demande, certains indicateurs suivent le niveau de consommation : tableau de bord mensuel tabac, dispositif de suivi des consultations jeunes consommateurs, enquêtes auprès des jeunes Français et des jeunes Européens, données sur les infractions à la législation sur les stupéfiants fournies par l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants, baromètre santé qui permet de suivre la perception sur la dangerosité et l'accessibilité des produits. D'autres indicateurs concernent l'évolution de l'offre comme les saisies de stupéfiants ou, pour les produits légaux, les volumes vendus. Ces indicateurs sont suivis en permanence : ils permettent de définir des tendances et d'éclairer les choix stratégiques des pouvoirs publics en leur permettant d'anticiper les évolutions. Ce souci de l'évaluation a prévalu dès la phase de préparation du plan gouvernemental 2008-2011. Dans cette perspective, l'Observatoire a défini avec la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) une batterie de 44 indicateurs. En outre, la Mildt a demandé à l'Observatoire d'évaluer à la fin du plan certains dispositifs innovants comme les stages de sensibilisation aux dangers de l'usage de stupéfiants, les programmes cocaïne, les programmes détenus, l'impact de la réglementation alcool sur les consommations.
M. Barbier estime que la répression du trafic de stupéfiants est insuffisante. Soyez assuré que cette lutte est une priorité absolue du Gouvernement. Mais comme vous le souhaitez, je me ferai l'écho de vos propos auprès des ministres de l'intérieur et de la justice. Le trafic et la consommation de drogues favorisent le développement d'une délinquance induite par les usagers, qui cherchent à financer leur consommation, et d'une économie souterraine liée aux importants bénéfices réalisés.
Au plan national, voici les tendances pour 2009 : stabilité du nombre des infractions à la législation sur les stupéfiants qui avoisinent les 117 000 ; saisies de 22,8 tonnes de cannabis et de 2,2 tonnes de cocaïne. Le ministre de l'intérieur a recentré l'activité des 34 groupes d'intervention régionaux sur le trafic des produits stupéfiants. Lors des enquêtes, l'approche patrimoniale est systématique, notamment dans les quartiers sensibles afin d'empêcher qu'y prospère l'économie souterraine. Il a demandé que la lutte contre le « deal de proximité » s'intensifie. Elle sera une priorité d'action des 34 « groupes spécialisés dans la lutte contre la délinquance des cités », créés le 1er octobre. La signature du protocole de coopération avec le ministre du budget le 23 septembre permettra d'affecter 50 contrôleurs des services fiscaux afin de favoriser les échanges d'information dans 43 quartiers sensibles. La création de la police de l'agglomération parisienne a permis depuis début octobre d'étendre le plan drogue de Paris à la petite couronne. Enfin, le ministre de l'intérieur souhaite intensifier la lutte contre le trafic international : la coopération opérationnelle a été renforcée avec les services espagnols et marocains pour lutter contre le trafic de cannabis. Le recours à des équipes communes d'investigations et d'enquêtes sera privilégié.
Mme Escoffier a souligné, à juste titre, l'importance du rôle joué par la Cnil.
M. Robert del Picchia. - C'est vrai !
M. Henri de Raincourt, ministre. - Nous savons que les missions de la Cnil ont été profondément modifiées : extension de sa compétence aux fichiers privés, passage d'un contrôle a priori à un contrôle a posteriori sur place et sur pièces, prononcé de sanctions qui n'existaient pas auparavant et qui supposent une instruction contradictoire. En outre, les progrès technologiques comme les réseaux sociaux ou le développement de la biométrie multiplient les difficultés pour protéger les données personnelles. C'est pourquoi l'augmentation des moyens accordés à la Cnil est pleinement justifiée. (Applaudissements à droite et au centre)
Examen des crédits
Article 35
Il est ouvert aux ministres, pour 2010, au titre du budget général, des autorisations d'engagement et des crédits de paiement s'élevant respectivement aux montants de 381 203 968 005 € et de 379 741 845 043 €, conformément à la répartition par mission donnée à l'état B annexé à la présente loi.
M. le président. - Amendement n°II-47, présenté par MM. P. Dominati et Milon.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Coordination du travail gouvernemental Dont Titre 2 |
||||
Protection des droits et libertés Dont Titre 2 |
2.003.941 |
2.003.941 |
||
TOTAL |
2.003.941 |
2.003.941 |
||
SOLDE |
- 2.003.941 |
- 2.003.941 |
M. Philippe Dominati. - Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, le monde est en crise, la Nation souffre, mais l'État se porte bien : la France est devenue cette année la Nation qui dépense le plus pour la sphère publique de tous les pays du G20. Lorsqu'ils constatent des augmentations de budget de 15 %, les parlementaires ne peuvent que s'émouvoir. Des amendements similaires au mien ont été déposés sur les associations, les syndicats, les partis politiques, car en période de crise, il est tout à fait naturel que le pays en son entier fasse des efforts.
Cet amendement réduit de 2 millions, sur un total de 560, les crédits de ce budget en augmentation de 15 %. Nous avons voulu ce geste symbolique pour dénoncer de si fortes augmentations en cette période difficile pour tous. Les autorités administratives indépendantes doivent pouvoir faire des efforts. Nous ne mettons pas en cause leur bien-fondé -la lutte contre la drogue est une nécessité ; la Cnil fait un travail très utile- mais il faut alors, si l'on se donne des priorités, trouver des économies à faire ailleurs sur le programme.
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial. - Je précise que le programme n'est pas de 500 mais de 86 millions : tel est le montant des crédits qui concernent spécifiquement les droits et libertés. Un amendement de même nature avait déjà été présenté à l'Assemblée nationale l'an dernier, demandant pour 2009 un maintien des crédits au niveau de 2008. Mais n'oublions pas que le nombre de saisines de la Cnil a augmenté de plus de 1 700 % en cinq ans. Le Gouvernement a donc proposé d'aller plus loin qu'une simple progression du nombre des agents qui servent des missions, car l'embouteillage reste important, tant à la Cnil que dans d'autres autorités indépendantes. Il faut faire un effort supplémentaire pour les aider à réagir.
La question s'est en vérité posée des loyers et j'ai proposé de faire un contrôle sur pièces et sur place à la Halde pour tenter de traiter le problème au fond. La réponse du ministre va dans le bon sens.
Nous entendons donc bien votre raisonnement, mais la commission des finances reste réservée sur votre proposition et s'en remettra à l'avis du Gouvernement. J'ajoute qu'à titre personnel, je ne souhaite pas que cet amendement soit retenu, car il ne me semble pas apporter la bonne réponse.
M. Henri de Raincourt, ministre. - J'ai bien compris la philosophie qui sous-tend votre amendement. En cette période de rareté des finances publiques, l'État doit manifester, comme il l'a fait dans les lois de finances successives et avec la révision générale des politiques publiques, sa volonté de maîtrise de la dépense. Vous nous dites que votre amendement est symbolique, mais dans les faits, ces réductions de crédit s'imputeront sur la Cnil, le CSA, la Cada et la CNCIS.
Mon exposé général a, pour la Cnil, largement anticipé ma réponse. L'extension de ses activités et de son champ d'intervention nous conduisent à augmenter ses crédits. Nous ne pouvons donc partager votre proposition dans cette application. Quant aux crédits supplémentaires affectés au CSA, ils doivent permettre le passage à la TNT. Sans eux, les écrans de certains de nos compatriotes resteraient noirs alors même qu'ils continueraient de payer la redevance. Vous savez que la proposition de loi de M. Pintat doit mettre en oeuvre les efforts de la Nation pour que 100 % de nos compatriotes bénéficient de la TNT.
Je suis donc, au nom du Gouvernement, très attentif à votre message et connais tout le sérieux de votre raisonnement, mais c'est aussi mon devoir de vous demander de retirer votre amendement, faute de quoi, à mon grand regret, je devrai émettre un avis défavorable.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Je m'associe à la demande du ministre. La commission des finances ne peut avoir que de la sympathie pour un amendement qui vise la maîtrise des dépenses, mais elle a aussi conscience que nombre d'autorités administratives indépendantes doivent faire face à un afflux considérable de saisines liées à des missions nouvelles que l'État lui-même lui a confiées.
Si les budgets sont importants, c'est notamment du fait des loyers, contractés parfois dans la précipitation, à une époque où France Domaine n'existait pas. La Halde acquitte ainsi un loyer bien supérieur à la moyenne des prix parisiens, qui absorbe 2 millions sur un budget de 5 millions. Mais c'est la volonté franche du Gouvernement que de reprendre les choses en main.
M. Philippe Dominati. - Je vais retirer l'amendement, mais vos explications sont une démonstration du problème. Il serait temps d'avoir une gestion patrimoniale de long terme. Les difficultés sont réelles, y compris au niveau local : quand on voit qu'un office municipal des sports, dans une ville, est obligé de payer un surloyer pour être dans un quartier attractif, on comprend le problème...
Je ne nie pas les efforts des autorités administratives indépendantes, ni de leurs agents, mais je dis que tant que l'on ne réduira pas le périmètre de l'État, on aura beau tenter d'être vertueux, on finira toujours par augmenter d'un côté de plus quinze quand le reste est à moins vingt.
L'amendement n°II-47 est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-42, présenté par M. Peyronnet, au nom de la commission des lois.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Coordination du travail gouvernemental Dont Titre 2 |
0 |
0 |
0 |
0 |
Protection des droits et libertés Dont Titre 2 |
648 545 |
0 |
648 545 |
0 |
TOTAL |
648 545 |
0 |
648 545 |
0 |
SOLDE |
+ 648 545 |
+ 648 545 |
M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis. - L'amendement rétablit les montants initiaux prévus par le Gouvernement. La Halde est visée en raison de son loyer excessif. Mais des négociations sont en cours, et la situation devrait se rétablir. Une réduction des crédits risquerait de déstabiliser l'institution.
M. le président. - Amendement identique n°II-43, présenté par M. Krattinger.
M. Yves Krattinger. - Il est défendu.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Lorsque la commission a examiné l'amendement tendant à rétablir les crédits de la Halde, proposé par son rapporteur spécial, celui-ci n'avait malheureusement pu alors être présent et transmettre toute sa conviction à ses membres. Notre commission, dont les réactions sont parfois un peu rustiques, a alors pris le parti de ne pas suivre son rapporteur spécial.
Le loyer est très élevé, mais le ministre du budget a confirmé que des négociations étaient en cours à fin d'alléger cette charge.
Les paroles du ministre ont également été très bien entendues lorsqu'il a dit que le Gouvernement avait engagé un ménage systématique tendant à faire disparaître les missions devenues inutiles. Je suggère de faire la même chose dans les départements : le président du conseil général de l'Yonne doit être surpris par la pléthore d'organismes divers où il doit nommer des représentants, alors qu'ils ne se réunissent guère et que les rares exceptions laissent aux participants l'impression d'avoir perdu leur temps. Nous avons beaucoup de travail pour faire le ménage dans cet inventaire à la Prévert de commissions et d'organismes divers.
S'agissant de la Halde, l'avis du Gouvernement sera précieux.
M. Henri de Raincourt, ministre. - C'est un combat à front renversé par rapport au débat devant l'Assemblée nationale... (Sourires)
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Heureusement que le Sénat existe !
M. Henri de Raincourt, ministre. - Les députés voulaient adresser à la Halde un signal fort portant sur le montant jugé excessif du loyer. J'avais répondu aux députés que je partageais leur sentiment, mais qu'il était impossible d'anticiper au 1er janvier 2010 l'éventuelle révision du loyer, en effet important. Il faut attendre la clause de revoyure pour bénéficier de ses bienfaits. Après avoir exposé aux députés ce raisonnement simple, je m'en suis remis à leur sagesse.
J'ai abouti ce soir à une conclusion identique... bien qu'elle aille dans l'autre sens.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - J'entends cet appel à la sagesse.
Nous pourrions adopter l'amendement, mais je demande le gel des crédits qui seront devenus inutiles à l'issue de la négociation conduite par M. Woerth.
M. Henri de Raincourt, ministre. - Je ne suis pas certain que la clause de revoyure joue en 2010, le bail arrivant à échéance en 2014.
La remarque formulée par le président de la commission des finances sera prise en considération. En attendant, il faut respecter le bail.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Sous le bénéfice de ces explications de bonne gestion, la commission des finances émet un avis favorable.
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial. - Signé en 2005, le bail court jusqu'en 2014. Une négociation est engagée, sans succès à ce jour. Elle est nécessairement difficile, puisque la signature recueillie par le propriétaire le met dans une situation favorable.
Je souscris à la proposition du président de la commission des finances.
L'amendement n°II-42, identique à l'amendement n°II-43, est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-78, présenté par le Gouvernement.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Coordination du travail GouvernementalDont Titre 2 |
222 500 178 000 |
222 500 178 000 |
||
Protection des droits et libertésDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
222 500 |
222 500 |
||
SOLDE |
- 222 500 |
- 222 500 |
M. Henri de Raincourt, ministre. - Les crédits du Premier ministre doivent être réduits au profit de la culture, qui accueillera désormais la direction des médias, rattachée jusqu'ici à Matignon.
L'amendement n°II-78, accepté par la commission, est adopté.
Les crédits de la mission sont adoptés.
Mission Pouvoirs publics
M. le président. - Nous abordons l'examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur spécial de la commission des finances. - Le montant global des crédits de la mission s'établit à 1 018 millions d'euros, en baisse de 0,5 %.
Représentant plus de 95 % du total, les dotations de la Présidence de la République, de l'Assemblée nationale et du Sénat sont reconduites à l'euro près.
En revanche, les indemnités des représentants français au Parlement européen -soit 4,7 millions d'euros l'an dernier- disparaissent de la mission, puisque les intéressés sont directement pris en charge par l'assemblée de Strasbourg depuis le renouvellement de juin 2009.
J'en viens à la transparence voulue par le Président de la République sur l'utilisation des crédits alloués à l'Élysée. C'est une avancée majeure de notre démocratie. En effet, le Président Sarkozy a souhaité un contrôle permanent de gestion par la Cour des comptes. Publié en juillet, son premier rapport aborde trois thèmes : la consolidation du budget ; la réforme des procédures budgétaires et administratives ; la mise en place d'une comptabilité analytique. La Présidence a répondu à chaque observation de la Cour et s'est engagée à respecter la plupart des préconisations du rapport, y compris sur le principal sujet de controverse : le financement des sondages d'opinion. Sans entrer ici dans un détail comparable à celui du rapport écrit, je précise que la Présidence de la République a décidé de recourir systématiquement à la mise en concurrence des prestataires, mettant un terme à une vieille tradition d'opacité.
Au total, il aura fallu deux siècles après la fin de la monarchie absolue pour que les dépenses liées à la fonction du chef de l'État soient identifiées, contrôlées et publiées plus que pour toute autre administration. Je salue ce constat, éloigné des polémiques apparues ces derniers temps.
Pour la troisième année consécutive, les deux assemblées parlementaires ont demandé la simple reconduction de la dotation antérieure. Il faut saluer la maîtrise de leurs dépenses, notamment en matière de personnel, qui permet de couvrir les dépenses induites par la révision constitutionnelle de 2008.
Je vous renvoie à mon rapport écrit pour les chaînes parlementaires et le Conseil constitutionnel, dont les dotations n'appellent pas de commentaire particulier.
Pour conclure, je voudrais évoquer la Cour de justice de la République, dont les crédits augmentent de 11,4 %, en raison de ses conditions d'hébergement.
En juillet, la commission des finances a publié un rapport sur l'État locataire, où il est clairement dit que le maintien de cette Cour rue de Constantine, sur l'esplanade des Invalides pour 600 euros par mètre carré n'est pas nécessaire, les locaux étant trop exigus pour que la formation de jugement y siège. Les deux derniers procès se sont tenus dans la première chambre civile du tribunal de grande instance de Paris.
Le loyer représentant 56,5 % de la dotation en 2010, il est légitime d'explorer d'autres solutions, comme la commission des finances le demande depuis des années. Courant octobre, le ministre du budget a adressé un courrier au président de la Cour de justice, pour demander une révision du bail ou la recherche d'une autre implantation, avec une référence expresse au rapport d'information de notre commission des finances. Nous resterons très attentifs à ce dossier.
Sous cette seule réserve, la commission des finances vous propose d'adopter les crédits de la mission. (Applaudissements à droite)
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois. - La dotation accordée en 2010 au Conseil constitutionnel s'élèvera à 11,6 millions, en baisse de 6,6 %, ce qui peut surprendre avec la prochaine mise en oeuvre de la question de constitutionnalité prévue par la révision constitutionnelle. En réalité, le Conseil prévoit d'anticiper l'exercice de ces nouvelles missions : espace dédié aux avocats et au public, logiciel de greffe. Il prépare en outre la prochaine élection présidentielle en s'équipant d'un logiciel de traitement des parrainages. Les opérations exceptionnelles, avec 4,5 millions de crédits, portent sur la poursuite des travaux de rénovation des locaux. Les crédits consacrés au Conseil Constitutionnel -dont je souligne la gestion rigoureuse- n'appellent donc pas d'observations particulières.
La dotation allouée à la Cour de justice de la République s'élèvera à 941 000 euros, en hausse de 11,4 %. Outre le loyer, il faut tenir compte de l'activité fluctuante de la Cour : 33 requêtes en 2008 et 26 en 2007, contre 66 en 2006 et 97 en 2005. La formation de jugement siègera à trois reprises cette année, d'où une hausse du budget. Les crédits de la Cour de justice de la République n'appellent donc pas d'observations particulières.
Enfin, comme chaque année, la commission des lois demande que les crédits du Conseil supérieur de la magistrature soient intégrés dans la mission « Pouvoirs publics ». Une telle mesure concrétiserait l'indépendance du CSM, confortée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Il serait temps, alors que la réforme du CSM va bientôt entrer en vigueur, d'en tenir compte dans la maquette budgétaire.
La commission des lois est favorable à l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur le banc des commissions)
M. François Fortassin. - Cette mission revêt un caractère symbolique : il s'agit du train de vie du pouvoir. Je ne m'attarderai pas sur les moyens alloués aux deux assemblées ou au Conseil constitutionnel, mais à ceux de la Présidence de la République.
On a parlé en termes forts -moralisation, modernisation des valeurs républicaines. Tout citoyen exerçant une responsabilité publique, à commencer par le premier d'entre eux, a un devoir de modestie et d'exemplarité. Nous sommes loin du compte.
Fraîchement élu, le Président de la République, après des vacances bien méritées, a promis de faire toute la transparence -ce qui s'est traduit par une hausse sensible du budget de la Présidence, censée intégrer des crédits jusque-là externalisés. Où est la cohérence ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Ce n'est pas le même périmètre.
M. François Fortassin. - En 2008, le budget voté était de 16 millions, or 24 millions ont été consommés. Transparence ? Moralisation ?
Au nom de ces valeurs républicaines revisitées, on lance un grand débat sur l'identité nationale, centré sur la sécurité et l'immigration. Bien loin des valeurs républicaines traditionnelles, au premier rang desquelles je range la laïcité. Quel rapport avec ce budget, allez-vous dire ? Le problème, ce sont ces 3 millions pour des sondages qui n'ont d'autre objet que de mettre en valeur l'action du chef de l'État ! Ce n'est guère convenable. On cherche avant tout à séduire un certain électorat, qui ne fait pas des valeurs républicaines des vertus cardinales...
Les prétendus « modernes » accusent les « anciens » d'être accrochés à des valeurs dépassées. Nous avons traversé des périodes sombres : les 80, que nous allons bientôt honorer, et qui ont refusé d'accorder les pleins pouvoirs à Pétain ont été accusés d'être passéistes, rétifs au modernisme de la « révolution nationale ». On sait la suite... Je ne veux pas jouer les oiseaux de mauvais augure mais évitons les idées trop simplistes qui pourraient nous engager dans une voie regrettable. Je suis pour une identité nationale définie autour des concepts d'humanisme, de laïcité et de tolérance.
On exige beaucoup de nos compatriotes qui souffrent. Les dépenses somptuaires seraient inhérentes à la grandeur de la France, disent certains. Je n'ai jamais été gaulliste, mais à l'époque du Général, la grandeur de la France n'était pas un vain mot, alors que les dépenses du chef de l'État étaient des plus modestes ! A l'heure où l'on exige des sacrifices de nos compatriotes, nous souhaiterions plus de modestie dans l'affichage et dans les chiffres. On ne peut demander à ceux qui exercent des missions de service public de faire des économies si l'exemple ne vient pas d'en haut !
Toutefois, saluons la rigueur du Président de la République en matière de frais de bouche : petit appétit, grand buveur d'eau, il doit être bien moins dépensier en la matière que son prédécesseur ! (Sourires)
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. - Monsieur Alduy, je rejoins votre appréciation sur la bonne gestion de la Présidence de la République.
Le loyer de la Cour de justice de la République s'élève à 532 100 euros. Cette somme tient compte de l'application en cours d'année de l'indice d'augmentation des loyers : la hausse a été de 10,50 % en 2009. Le loyer actuel a été fixé par les services des Domaines lors du renouvellement du bail en 2004. Les locaux ont été aménagés pour recevoir l'institution, qui n'est pas une juridiction comme les autres. Les travaux réalisés se sont élevés à 3,5 millions d'euros.
La localisation de la Cour de justice de la République, proche de l'Assemblée nationale et du Sénat, explique en partie le niveau élevé de ces loyers. Elle est située en dehors d'une enceinte judiciaire dédiée, ce qui témoigne d'une volonté politique d'une grande signification.
Yves Détraigne souhaite que le budget du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), actuellement rattaché à la mission « Justice », appartienne désormais à la mission « Pouvoirs publics ». Il ne me semble pas que cette instance puisse être considérée comme un pouvoir constitutionnel, au même titre que le Conseil constitutionnel ou la Cour de justice de la République. L'autonomie budgétaire du Conseil d'État et de la Cour de cassation est assurée sans que leur budget soit rattaché à la mission « Pouvoirs publics ». Surtout, la révision constitutionnelle intervenue en 2008 ne modifie pas la nature du CSM.
Monsieur Fortassin, je vous rappelle que, pour la première fois, le budget de la Présidence de la République est totalement transparent : il a été soumis à l'appréciation de la Cour des comptes, qui a publié un rapport. Cela n'était pas une obligation. Il est singulier qu'au moment où cette évolution doit être saluée... (M. Robert del Picchia approuve)... elle donne lieu à des reproches. Dois-je vous rappeler comment la Présidence de la République fonctionnait auparavant ? Comment étaient payés les collaborateurs ? Quel était le montant des indemnités perçues par le chef de l'État ? Tout le monde sait qu'il y avait autrefois à l'Élysée, comme dans les grands ministères, des fonds secrets. Il serait plus juste de louer le Président de la République pour cette évolution que de lui en faire le reproche. (M. Robert del Picchia approuve)
Monsieur Fortassin, votre message a été entendu pour ce qui est des dépenses de personnel, qui vont diminuer. Le nombre de conseillers du chef de l'État est passé de 82 à 48. L'effectif de l'Élysée a été ramené de près de 1 100 à 940. Toutes les dépenses effectuées à titre privé par le Président de la République sont assumées par lui, suivant une recommandation de la Cour des Comptes. Il a remboursé 14 000 euros à ce titre, et plus aucune dépense de cette nature n'est traitée par les services de l'Élysée. Il règle lui-même ses billets d'avion pour ses déplacements privés. On peut toujours faire mieux, mais ces efforts de transparence et de bonne gestion des fonds publics sont louables. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Sont présents ce soir trois rapporteurs spéciaux des crédits de la mission « Pouvoirs publics » : je l'ai été jusqu'en 2008, avant Henri de Raincourt, remplacé cette année par Jean-Paul Alduy. Nous savons qu'à une époque les crédits de la Présidence ne traduisaient que partiellement les frais engagés. Les ministères mettaient à sa disposition des personnels dont ils assuraient la rémunération. Une comparaison n'est possible qu'à périmètre constant.
Un immense progrès a été accompli pour rendre ce budget aussi transparent que possible, conformément à l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. » Le Président de la République applique des méthodes comptables plus rigoureuses afin que son budget donne une image fidèle des moyens employés. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Les crédits de la mission sont adoptés.
Publications officielles et information administrative
M. le président. - Nous allons maintenant examiner les crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
M. Bernard Vera, rapporteur spécial de la commission des finances. - Le rapprochement engagé depuis 2005 aboutira, dès le 1er janvier 2010, à la fusion des directions des Journaux officiels et de la Documentation française. Une nouvelle « Direction de l'information légale et administrative » sera créée par décret. Elle conservera un statut de budget annexe. Ses fonctions seront celles des deux directions, étendues au secrétariat du conseil d'orientation de l'édition publique, de l'information administrative et de la diffusion légale, créé également par décret avant la fin de l'année. Cette instance sera chargée de coordonner les actions interministérielles dans ces domaines et d'exercer une fonction d'évaluation, d'expertise et de conseil.
Ce rapprochement s'est effectué en pleine mutation technologique. Des plans sociaux ont été menés à la direction des Journaux officiels (DJO) et à la Saci-JO, en concertation avec les représentants syndicaux afin de trouver un équilibre entre l'intérêt des personnels et la pérennisation des missions de service public. Parallèlement, les centres interministériels de renseignements administratifs (Cira) ont été rattachés à la Documentation française. La nouvelle direction a donc vocation à devenir un grand pôle public d'édition, de diffusion, d'impression et d'information administrative.
Encore faut-il que des investissements soient réalisés. Ce sera fait puisque les crédits au titre des investissements pour 2010 augmentent de plus de 100 %. L'achat d'une rotative permettra à la nouvelle direction de capter une partie du marché des administrations et organismes publics. Il s'agit maintenant de trouver de nouvelles recettes pour le budget annexe, dont les ressources baissent. Ainsi, les recettes des annonces légales seront de 157 millions d'euros en 2010, contre 176 millions en 2008. Les recettes de la Documentation française s'annoncent elles aussi en baisse.
Monsieur le ministre, des actions ont-elles été entreprises pour encourager les administrations et les organismes publics à se tourner vers la nouvelle direction pour leurs prestations d'impression et d'édition ? C'est d'autant plus nécessaire que la mise à disposition de l'information par les sites internet de la Documentation française et des Journaux officiels, dont je souligne encore une fois la qualité, reste gratuite.
Après la fusion des Journaux officiels et de la Documentation française, les réformes devront être poursuivies en étroite concertation avec les personnels, qui ont accepté notamment les plans sociaux, l'évolution de leur métier et le regroupement des services. Les difficultés liées à ces évolutions pourraient entraîner une démobilisation des personnels et même une souffrance au travail. Je les ai rencontrés : l'avenir et la baisse de la production les inquiètent, même s'ils sont portés par l'espoir qu'engendre cette fusion à laquelle ils ont participé.
Les effectifs de la mission ont été réduits de façon drastique. 200 emplois de moins, soit 50 % du personnel à la la Saci-JO ; 90 emplois et 30 % du personnel en moins à la DJO ; 120 emplois et 20 % du personnel en moins à la Documentation française. 83 postes seront supprimés en 2010. La baisse consécutive des dépenses de personnel participe au maintien de l'équilibre du budget. Les ressources et les autorisations d'engagement s'élèveront à 194,4 millions d'euros, en hausse de 4 %, et les crédits de paiement à 192,86 millions. Un excédent d'exploitation de 1,7 million d'euros pourrait ainsi être dégagé.
Quant à la performance du budget annexe, les changements à répétition de la maquette budgétaire interdisent toute analyse. J'espère une stabilisation prochaine de la définition et des indicateurs de performance bien établis qui autorisent une réelle évaluation. Enfin, un assujettissement à la TVA pour les recettes rendrait possible une récupération de celle-ci sur les investissements considérables en cours.
La commission recommande au Sénat d'adopter les crédits sans modification.
Mme Anne-Marie Escoffier. - Si je regarde l'hémicycle, cette mission ne fait pas recette ! (Sourires) Et pourtant elle a un intérêt réel. Si le papier a laissé place à l'informatique, les Journaux officiels n'en demeurent pas moins une tradition républicaine plus que séculaire à laquelle nous sommes tous attachés, car ils sont la mémoire vivante des lois et débats du Parlement. La Documentation française contribue elle aussi à la vie de nos institutions.
Le présent budget a une coloration particulière cette année car la RGPP s'est traduite par l'application d'une préconisation de la Cour des comptes. La fusion déjà mentionnée a donné naissance à la direction de l'information légale et administrative, destinée à optimiser l'offre de services et à réduire les coûts. Les Cira naguère éparpillés sur le territoire sont aujourd'hui réunis. Je souhaite longue vie à la nouvelle direction. J'espère que la réduction des effectifs négociée ne remettra pas en cause l'exercice des missions de service public. Les ressources diminuent et nous veillerons à ce que le personnel, confronté aux dures évolutions des métiers de l'imprimerie, n'en fasse pas les frais. Il ne faudrait pas qu'une gestion purement comptable, marquée par l'absence de considération humaine, provoque des drames comme on en a connus récemment dans d'autres secteurs.
Ce budget, en augmentation de 2,4 % en autorisations d'engagement, mais en baisse de 1,6 % en crédits de paiement, est en grande partie financé par les recettes des annonces légales : 157 millions sont attendus en 2010. Avec l'invasion d'internet, la part du papier se réduit : les coûts aussi. Si la future Dila devient l'organisme de référence, elle devrait capter une grande partie du marché des impressions des administrations et organismes publics. C'est donc un pari sur l'avenir qui se décide ce soir. La réforme du Journal officiel et de la Documentation française vise à plus d'efficacité. Nous ne pouvons qu'y souscrire et le groupe RDSE est favorable à ce budget.
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. - Le rapporteur spécial a présenté avec précision les enjeux de la fusion ainsi que les mutations technologiques en cours. Le métier des Journaux officiels, celui d'un éditeur « papier »,devient celui d'un éditeur multimédia par la modernisation de ses processus de production. Cette évolution conduit à des changements considérables pour les ressources humaines. C'est pourquoi le Gouvernement est très attentif à la permanence du dialogue social. La réussite de la fusion et le changement d'ère technologique ne seront garantis que grâce à une étroite concertation avec le personnel. Le Gouvernement, conscient des inquiétudes des salariés, veille à prévenir les risques psychosociaux. Le recours à un organisme extérieur spécialisé dans la détection de ces risques a eu lieu dès 2008, aux Journaux officiels, à la Société anonyme de composition et d'impression puis à la direction de la Documentation française. Entre le 4 et le 18 novembre derniers, tous les salariés ont été invités à répondre à un questionnaire confidentiel destiné à évaluer les secteurs les plus exposés. Il pourra déboucher sur des entretiens individuels et confidentiels. Un rapport de diagnostic sera établi, les actions nécessaires rapidement mises en oeuvre. La finalisation du projet est prévue pour la mi-février 2010. J'indique à Mme escoffier qu'il n'y aura pas de plan social, seulement des départs volontaires.
M. Véra s'est interrogé sur les marchés potentiels. La création d'une nouvelle direction et d'un conseil d'orientation de l'édition publique placé auprès du Premier ministre apportera cohérence et rationalité économique. La Dila, à travers sa marque Documentation française, sera l'éditeur de référence de l'État, tant pour les publications papier qu'en ligne. Elle sera aussi imprimeur pour le compte des administrations. L'acquisition d'une rotative améliorera la capacité d'impression. Il ne s'agira pas d'organiser une activité concurrente de l'édition privée, mais d'offrir aux ministères un opérateur capable d'accompagner leur politique éditoriale et de réaliser des économies.
Enfin, Monsieur le rapporteur, vous souhaitiez savoir si des actions sont entreprises en vue d'encourager les administrations ou organismes publics à se tourner vers la nouvelle direction. Ce sera le rôle du conseil d'orientation de l'édition publique que d'encourager ce mouvement. Et la direction a déjà entrepris une démarche pour ainsi dire « commerciale » auprès des ministères. (Applaudissements à droite)
Les crédits de la mission sont adoptés.
Prochaine séance aujourd'hui, vendredi 27 novembre 2009, à 9 h 45.
La séance est levée à minuit quarante.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du vendredi 27 novembre 2009
Séance publique
A 9 HEURES 45,
14 HEURES 30 ET LE SOIR
- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l'Assemblée nationale (n° 100, 2009-2010).
Examen des missions :
Justice
M. Roland du Luart, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°16) ;
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Justice - Administration pénitentiaire - avis n°106, tome III) ;
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Justice et accès au droit - avis n°106, tome IV).
M. Nicolas Alfonsi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Justice - Protection judiciaire de la jeunesse - avis n°106, tome V) ;
Immigration, asile et intégration
M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°15) ;
M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Immigration et asile - avis n°102, tome VII) ;
M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (avis n°106, tome XI).
Économie (+ articles 53, 54 et 54 bis)
Compte spécial : gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien
MM. André Ferrand et François Rebsamen, rapporteurs spéciaux (rapport n°101, annexe n°11) ;
MM. Pierre Hérisson, Gérard Cornu et Mme Odette Terrade, rapporteurs pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (avis n°105, tome III).
Culture (+ articles 52 et 52 bis)
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°7) ;
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (avis n°104, tome III, fascicule 1).
M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (avis n°104, tome III, fascicule 2).
Médias
Compte spécial : avances à l'audiovisuel public
M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°17) ;
M. Joseph Kerguéris, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Médias : action audiovisuel extérieure - avis n°102, tome VIII).
M. Michel Thiollière, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (Avances à l'audiovisuel public - avis n°104, tome VI, fascicule 1) ;
M. David Assouline, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (Médias presse - avis n°104, tome VI, fascicule 2) ;
Erratum au compte rendu de la séance du mercredi 25 novembre 2009
Dans le compte rendu du mercredi 25 novembre, page 14, colonne de gauche, en bas, bien lire ainsi l'intervention de M. Michel Charasse :
M. Michel Charasse. - Voilà des raisonnements qui auraient beaucoup amusé à la cour de Louis XIV où l'on prisait les démonstrations par l'absurde.
Si j'ai bien compris, les ressources des chaînes privées évoluent négativement, comme les recettes publiques. Si cet amendement était voté, les dépenses des bénéficiaires, c'est-à-dire le service public, devraient donc baisser dans les mêmes proportions, sauf si l'État compense le manque à gagner afin de maintenir les dépenses du service public.
En effet, tout le monde le sait, il y a des dépenses que l'on ne peut jamais baisser sans commettre un crime impardonnable, comme celles du service public. Lui, il fait partie des intouchables !
Or, si l'État compense, on ne voit pas pourquoi il ne compenserait pas également pour tous les autres organismes publics qui sont dans la même situation. Mais alors, il va creuser un peu plus son déficit, car personne ne compensera, sauf erreur de ma part, la baisse dramatique des recettes de l'État et la montée de ses dépenses.
La conclusion, mes chers collègues, quelle que soit la sympathie que j'ai pour vous, et elle est grande, c'est que, quand vous aurez trouvé quelqu'un pour compenser les pertes de recettes de l'État, je voterai votre amendement !