V. RAPPORT SÉNAT N°107 (2011-2012) TOME II
Commentaire : le présent article vise à corriger les montants de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) ainsi que ceux des prélèvements et des reversements au titre des fonds de garantie individuelle des ressources (FNGIR), jusqu'à 2013, au vu des données définitives relatives à la territorialisation du produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) au titre de l'année 2010.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LE DISPOSITIF DE COMPENSATION À L'EURO PRÈS DE LA RÉFORME DE LA TAXE PROFESSIONNELLE
La réforme de la taxe professionnelle, mise en oeuvre en 2010, a prévu un dispositif de compensation à l'euro près de ses conséquences financières pour les collectivités territoriales. Ce dispositif intervient en deux temps :
- tout d'abord, l'Etat verse à chaque catégorie de collectivités territoriales un montant de dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) qui permet de stabiliser le niveau global des ressources de chaque catégorie de collectivités (bloc communal, départements, régions) avant et après la réforme ;
- puis, au sein de chaque catégorie de collectivités territoriales, les collectivités « gagnantes » à la réforme se voient prélever, au profit d'un fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) , leur gain suite à la réforme, reversé aux communes « perdantes » pour garantir qu'elles bénéficient d'une compensation à l'euro près.
Ce dispositif de compensation fonctionne en égalisant :
- d'une part, les ressources modifiées par la réforme effectivement perçues par une collectivité territoriale en 2010 (panier de ressources « avant réforme ») ;
- d'autre part, les ressources que cette même collectivité aurait perçues en 2010 si la réforme avait été mise en oeuvre , en prenant en compte les modifications apportées par la loi de finances pour 2011 1 ( * ) (panier de ressources « après réforme »).
Au sein des ressources « après réforme » figure donc le produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) que chaque collectivité aurait perçu en 2010 si la réforme avait été mise en oeuvre 2 ( * ) .
B. LE PROBLÈME DE L'ABSENCE DE TERRITORIALISATION D'UNE PARTIE DU PRODUIT DE CVAE 2010
Le 1.4. de l'article 78 de la loi de finances pour 2010 3 ( * ) a prévu que « le montant définitif des dotations, prélèvements et reversements [au titre de la DCRTP et des FNGIR] est calculé à partir des impositions établies, des dégrèvements ordonnancés et des produits perçus jusqu'au 30 juin 2011 ».
Le législateur a ainsi fixé pour objectif que les montants des dispositifs de compensation à l'euro près soient définitivement établis à la date du 30 juin 2011 .
Ce délai limite pose problème s'agissant du produit de la CVAE 2010 . En effet, cet impôt fait l'objet d'une territorialisation en fonction des éléments déclarés par les entreprises imposées. Comme l'indiquent les évaluations préalables du présent article, si la liquidation définitive de la CVAE 2010 par les entreprises s'est effectuée au mois de mai de l'année 2011, la territorialisation de ce produit en fonction des éléments déclarés par les entreprises, et donc la répartition du produit de CVAE 2010, n'intervient que dans un second temps.
Or, il apparaît que l'ensemble du produit de la CVAE 2010 n'a pu être réparti entre les collectivités territoriales au 30 juin 2011 du fait, d'une part, de la modification des règles de territorialisation par la loi de finances pour 2011 et, d'autre part, de la nécessité de prendre le temps d'exploiter les déclarations des entreprises.
Il en résulte que les montants de DCRTP et des prélèvements et reversements au FNGIR calculés au 30 juin 2011 ne prennent pas en compte l'intégralité du produit de CVAE 2010 . En outre, ces montants pourraient évoluer suite aux modifications de territorialisation qui pourraient intervenir postérieurement à la date du 30 juin 2011.
Le présent article vise à résoudre ce problème.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le I du présent article propose ainsi que les montants des versements de DCRTP et des prélèvements et reversements au titre du FNGIR soient ajustés, en 2012 et en 2013, en fonction du produit de CVAE 2010 déclaré par les entreprises. Ainsi, les montants non encore territorialisés au 30 juin 2011 pourront être pris en compte en 2012 et en 2013.
En pratique, cette disposition évite de geler, comme le prévoyait la loi de finances pour 2010, le montant de la DCRTP et des FNGIR à leur niveau de l'année 2011 . Le deuxième alinéa du I du présent article prévoit que ce ne sera qu'à compter de 2014 que les montants de la dotation ainsi que des prélèvements et reversements au titre du FNGIR seront définitivement figés.
En pratique, ce dégel de la DCRTP et des FNGIR pourra conduire, pour les collectivités territoriales, à des modifications à la hausse ou à la baisse des dotations, des reversements et des prélèvements dont elles font l'objet au titre du mécanisme de compensation à l'euro près.
Le II du présent article prévoit ainsi que ces ajustements seront notifiés aux collectivités territoriales « concomitamment aux éléments notifiés au titre des bases prévisionnelles des impôts directs locaux sur rôles et des produits définitifs de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises », c'est-à-dire avant le 31 mars de chaque année , afin que les collectivités territoriales puissent élaborer leurs budgets sur des bases sincères.
Enfin, le III du présent article prévoit les modalités pratiques des ajustements éventuels de DCRTP et de FNGIR qui seront opérés au titre du I en 2012 et en 2013. Les modifications seront opérées par des ajustements à la hausse ou à la baisse des avances de fiscalité qui transitent par le compte d'avance aux collectivités territoriales au profit de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale concerné.
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L'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable du Gouvernement, cinq amendements rédactionnels de notre collègue Gilles Carrez, rapporteur général.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Le présent article est nécessaire pour mettre en oeuvre une compensation à l'euro près des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale fidèle au panier de recettes « après réforme » dont ils bénéficieront effectivement. C'est pourquoi votre commission des finances est favorable à son adoption.
Toutefois, ces ajustements conduiront les montants de la DCRTP et des prélèvements et reversements au titre du FNGIR à continuer à évoluer en 2012 et en 2013 . Il est regrettable que les collectivités soient ainsi maintenues dans un état d'incertitude quant aux montants réels de la compensation dont elles feront l'objet suite à la réforme de la taxe professionnelle .
Les premiers montants des compensations avaient été fournis aux collectivités suite au rapport « Durieux-Subremon » de mai 2010 4 ( * ) . Or, ces montants ont déjà fait l'objet d'ajustements importants lors de la notification, en mars 2011, des montants prévisionnels de DCRTP et de FNGIR à chaque collectivité territoriale. D'après les déclarations de Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, lors de l'examen du présent article à l'Assemblée nationale, ils feront de nouveau l'objet de modifications au mois de novembre 2011, lors de la notification définitive de ces montants pour l'année 2011. Enfin, du fait de l'application du présent article, de nouveaux ajustements seront effectués en 2012 et en 2013.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
* 1 Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2009.
* 2 Il est rappelé qu'à titre transitoire, la CVAE 2010 a été perçue par l'Etat, celui-ci reversant en 2010 aux collectivités territoriales une compensation-relais représentative du produit de TP qu'elles ont perdu.
* 3 Loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2010.
* 4 Rapport sur l'évaluation des effets de la réforme de la taxe professionnelle sur la fiscalité des collectivités territoriales et sur les entreprises, établi sous la supervision de MM. Bruno Durieux, inspecteur général des finances et Patrick Subremon, inspecteur général de l'administration, mai 2010.