M. le président. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Bruno Retailleau, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice Micheline Jacques, je l’ai souvent dit, les drogues les plus dures sont désormais disponibles partout, tout le temps. Cela vaut évidemment pour nos territoires d’outre-mer.
Comme vous l’avez indiqué, les Caraïbes sont une zone de transit intermédiaire entre les pays producteurs, je pense en particulier à l’Amérique du Sud, et les pays consommateurs, situés plutôt en Europe ou en Amérique du Nord.
Vous pointez la situation d’Haïti, qui est absolument chaotique. Vous le savez parfaitement, plusieurs crises s’y emboîtent et se potentialisent : sécuritaire, politique, humanitaire. Les vulnérabilités du pays sont autant de chances pour les narcotrafiquants et pour des gangs lourdement armés et ultraviolents.
Depuis longtemps, la France se tient aux côtés d’Haïti. Nous aidons autant que nous le pouvons la force de police, qui est la seule à pouvoir résister à ces gangs. Nous le faisons à la fois par du conseil, par de la formation et par la livraison de matériel.
Pour répondre à votre question précise, nous allons accroître cette aide. C’est le sens de la rencontre entre le Président de la République et le président du Conseil présidentiel de transition haïtien le 29 janvier. Nous apporterons notre expertise et je vous informe que des éléments du Raid (recherche, assistance, intervention, dissuasion) sont actifs et conseillent les forces de police haïtienne.
Nous livrerons également du matériel, notamment des drones, et même des véhicules blindés. Nous essayons de reproduire ce qui peut ressembler à notre modèle de l’Office anti-stupéfiants (Ofast) avec l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) haïtienne.
Ce que je peux vous dire, c’est que la situation à Haïti est tellement mauvaise que la plupart des pays se sont retirés. Un seul pays, le nôtre, se tient debout aux côtés d’Haïti pour aider ses habitants dans le chaos auquel ils sont confrontés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour la réplique.
Mme Micheline Jacques. Je vous remercie, monsieur le ministre. Aider Haïti, c’est aussi aider les outre-mer caribéens et je sais que je peux compter sur votre détermination et sur celle de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Vincent Capo-Canellas. Ma question s’adresse à Mme la ministre chargée des comptes publics.
Madame la ministre, M. le Premier ministre a estimé ce week-end à 0,5 point de PIB les potentielles répercussions sur notre économie de l’augmentation des droits de douane annoncée par le président Trump. C’est considérable ! Sans doute est-ce une fourchette haute ; du moins pouvons-nous l’espérer…
Tout d’abord, mon groupe s’interroge, comme viennent de le faire plusieurs de nos collègues, sur l’accompagnement de nos entreprises et en particulier de la filière du vin et des spiritueux et de la filière aéronautique. Je sais que le ministre de l’économie s’apprête à recevoir les représentants de ces secteurs exportateurs dans quelques minutes.
Ensuite se pose la question de l’impact pour nos finances publiques. Comment comptez-vous faire face au choc supplémentaire que ces droits de douane induiront pour nos finances publiques, dont la situation est déjà difficile ? Se profile sans doute une croissance moindre, et même un risque de stagnation, voire, pour les plus pessimistes, de récession.
Vous avez annoncé ce matin avoir saisi le Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Quelle est, à ce stade, votre nouvelle prévision de croissance pour cette année ? Comment conserverez-vous la crédibilité nécessaire vis-à-vis des marchés financiers pour financer notre dette alors que les taux d’intérêt remontent ?
Notre objectif de revenir à un déficit de 3 % du PIB en 2029 est-il compromis ? Comptez-vous le maintenir ? Le pouvez-vous ?
Une voie est sans doute possible, voire nécessaire : stabiliser notre niveau de dépense primaire et maintenir notre effort structurel, c’est-à-dire la maîtrise de nos dépenses hors dégradation nouvelle de la conjoncture.
La conférence sur les finances publiques qui doit se tenir mardi prochain aura-t-elle pour objet de revenir sur l’objectif programmé, ou au contraire de déterminer les moyens de le respecter et de maîtriser notre trajectoire financière dans ces moments si difficiles ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Michel Savin applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur, vous avez tout à fait raison : plus elle durera, plus la guerre commerciale que nous livrent les États-Unis aura un impact important sur l’économie européenne et française.
Elle devrait a priori nous coûter quelques points de croissance. Je dis « a priori » parce que de nombreuses incertitudes demeurent sur l’effet de ces mesures sur l’inflation, sur le prix du baril et sur les enjeux croisés en Europe. Cela dépendra également des mesures de rétorsion que nous prendrons pour résister, mais surtout pour faire annuler ces droits de douane qui sont irrationnels, infondés et n’entraînent de la croissance ou de la prospérité nulle part dans le monde, y compris aux États-Unis.
En ce qui concerne les perspectives de nos finances publiques, le Premier ministre a fixé un cap très clair.
Tout d’abord, le désendettement ne peut souffrir aucun prétexte de renoncement. Nous tenons notre ligne et, comme vous le dites, la clé réside dans les dépenses publiques. C’est pourquoi j’ai annoncé ce matin, sous l’autorité du Premier ministre, que, compte tenu du ralentissement de la croissance – les chiffres seront communiqués dans la journée – et des aléas, nous devons ajuster notre dépense.
Nous prévoyons ainsi de réduire de 5 milliards d’euros nos dépenses publiques pour respecter notre objectif de déficit en 2025, mais également pour continuer de viser un déficit de 3 % ou moins en 2029. Pourquoi 3 % ? Parce que c’est le seuil de déficit qui nous permet de stabiliser, puis de réduire la dette.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous veillons à travailler avec vous en pleine transparence. Quoi qu’il arrive, nous devons pouvoir faire face aux risques en temps réel. Quels que soient les aléas, nous devons avoir, avec la représentation nationale comme avec les Français, une copie partagée.
Pour que les contraintes soient connues, pour que les décisions soient comprises, nous devons garantir une transparence totale. C’est tout le sens de la réunion que M. le Premier ministre a annoncée pour la semaine prochaine. Elle permettra de préciser où nous en sommes, où sont les risques, où nous allons et ce que nous faisons, en totale transparence. En effet, le Gouvernement n’est pas seul en responsabilité : c’est tout le pays qui fait face à une multiplicité de crises, auxquelles nous devons répondre. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’éducation nationale, et pour cause, elle porte sur l’école.
Madame la ministre, tout le monde observe depuis bien longtemps les effets délétères des écrans, et notamment des téléphones portables, en particulier sur les enfants et les adolescents. L’usage excessif du numérique, qui altère leur sommeil, leur attention et leur concentration, est source de décrochages multiples.
Parmi nos jeunes, personne n’est épargné. Le déluge numérique auquel ces derniers sont soumis est désormais permanent. Il est devenu un phénomène social majeur, qui contribue en grande partie à la dégradation des apprentissages et, plus largement, de la réussite scolaire.
À la rentrée de septembre 2024, une expérimentation de l’interdiction effective du téléphone portable au collège a été lancée. Mais, par définition, elle ne concerne qu’un nombre réduit d’élèves : comptez-vous généraliser cette mesure à la prochaine rentrée scolaire ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Mickaël Vallet et Alexandre Basquin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Élisabeth Borne, ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur François Bonhomme, je vous le confirme : je souhaite que la pause numérique soit étendue à tous les collèges à la prochaine rentrée.
M. Mickaël Vallet. Bravo !
Mme Élisabeth Borne, ministre d’État. Vous avez évoqué de nombreux effets néfastes du téléphone portable. À ce titre, le Centre national du livre (CNL) dresse le constat suivant dans une récente enquête : quand un jeune passe en moyenne cinq heures par jour devant un écran, il ne passe que trois heures par semaine sur un livre.
En parallèle – le CNL le souligne également –, non seulement la pratique de la lecture baisse, mais la moitié des jeunes qui lisent font autre chose, en même temps, avec leur téléphone.
L’usage excessif des écrans est effectivement préjudiciable à la réussite des élèves.
La pause numérique fait suite au rapport que la commission chargée d’évaluer les enjeux de l’exposition des enfants aux écrans a remis à la fin du mois d’avril 2024 au Président de la République. Comme vous l’avez dit, elle est expérimentée dans une centaine de collèges depuis la rentrée de 2024, et tous les retours sont très positifs. On observe notamment une amélioration du climat scolaire et le large soutien dont cette mesure bénéficie de la part des parents et des professeurs.
Évidemment, ce choix n’exclut pas tout usage du numérique : ce dernier peut être employé à des fins pédagogiques, mais il doit être encadré.
Pour la rentrée prochaine, je souhaite que les modalités de mise en œuvre de cette généralisation soient laissées à l’appréciation des chefs d’établissement, en lien avec les conseils départementaux. On pourra opter, par exemple, pour des casiers ou pour des pochettes. Le coût de cette mesure pourra être nul pour l’établissement. Au maximum, il atteindra quelques milliers d’euros.
Vous le soulignez avec raison, à l’heure où l’usage des écrans inspire de plus en plus d’interrogations, du fait de ses nombreuses conséquences néfastes, cette mesure est essentielle à la fois au bien-être et à la réussite de nos élèves. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, RDSE et UC.)
M. Mickaël Vallet. C’est plus urgent que les uniformes !
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.
M. François Bonhomme. Madame la ministre, j’ai bien entendu votre réponse et j’y souscris assez largement. Simplement, nous sommes en 2025 ! Cela fait quinze ans que ce phénomène provoque des dégâts considérables à l’école. On ne le découvre pas ; on le répète, étude après étude.
Dans une récente enquête, le CNL souligne une fois de plus que le temps de lecture ne cesse de diminuer au profit du temps passé sur les écrans.
L’usage excessif du numérique participe de l’effondrement du niveau des élèves, régulièrement confirmé par les études tant nationales qu’internationales. Vous connaissez comme moi ses effets terribles sur la santé des élèves. Il nuit à leur sommeil comme à leur concentration, et je ne parle pas du cyberharcèlement. Je le répète, nous sommes loin de découvrir ce phénomène.
Je salue évidemment la généralisation de la pause numérique. Mais, en la matière, il va falloir faire preuve d’une grande fermeté et d’un grand courage. En outre, vous n’avez parlé que du collège : pourquoi le lycée ne bénéficierait-il pas lui aussi de cette protection ?
Toutes les salles de classe doivent être protégées des intrusions multiples auxquelles donne lieu ce flux permanent. Les phénomènes que l’on déplore au collège sont également à l’œuvre au lycée. Face à ce fléau, je vous encourage à faire preuve de volonté et de détermination : c’est le seul moyen d’obtenir des succès effectifs ! (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et SER. – M. Alexandre Basquin applaudit également.)
mortalité infantile et services de maternité
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. Patrice Joly. Depuis plusieurs années, la mortalité infantile ne cesse d’augmenter en France, atteignant désormais des taux tout à fait alarmants. Notre pays est passé de 3,6 décès pour 1 000 naissances en 2021 à 3,9 pour 1 000 en 2023, puis à 4,1 pour 1 000 en 2024. Quel niveau faudra-t-il atteindre pour que l’on réagisse enfin ?
En 2024, 2 800 enfants ont perdu la vie avant leur premier anniversaire. Cette dégradation catastrophique frappe particulièrement les départements les plus pauvres et les départements ruraux, où en moyenne 20 % des femmes en âge d’être mères vivent à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité.
Cette dégradation a été mise en lumière par l’Institut national d’études démographiques (Ined), qui, dans un rapport publié en décembre dernier, place désormais la France loin derrière ses voisins européens, à la vingt-troisième place sur vingt-sept.
Dans leur dernière enquête, parue en mars dernier, intitulée Le Scandale des accouchements en France, les journalistes Anthony Cortes et Sébastien Leurquin se sont attachés à identifier les causes de cette régression inacceptable pour un pays qui était encore, il y a peu, un des meilleurs d’Europe en la matière.
Les causes sont connues et dénoncées par les professionnels : d’une part, les fermetures massives de maternités, mesures à l’évidence purement budgétaires, puisque le service se dégrade ; de l’autre, la pénurie de soignants, qui persiste faute du courage politique nécessaire pour assurer une bonne répartition territoriale.
En cinquante ans, 75 % de nos maternités ont disparu : nous sommes passés de 1 369 maternités publiques en 1975 à 457 en 2024. Or ces fermetures – chacun le sait – augmentent le risque de morbidité et de complications pour la mère comme pour l’enfant.
Madame la ministre, pouvons-nous continuer à sacrifier l’accès aux soins des femmes et des enfants sous prétexte de rationalisation ? Devons-nous poursuivre la fermeture des maternités réalisant moins de 1 000 naissances par an et laisser tant de femmes accoucher sur les routes ? (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
Mme Marie-Pierre Monier. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles. Monsieur le sénateur Patrice Joly, le sujet que vous abordez a fait l’objet d’un travail particulièrement approfondi de la part du Sénat. À ce titre, je tiens à saluer vos collègues Annick Jacquemet et Véronique Guillotin, dont le rapport m’a été remis lundi dernier. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jean-François Husson. Très bien !
Mme Catherine Vautrin, ministre. Ce rapport détaille les différentes difficultés que nous rencontrons en la matière.
Vous avez évoqué la mortalité néonatale en citant un certain nombre de chiffres. J’insiste sur le fait qu’il s’agit des nouveau-nés décédés entre leur naissance et leur vingt-septième jour.
Nous avons encore besoin, dans notre pays, d’une évaluation extrêmement précise des multiples facteurs expliquant ces morts. (M. Patrice Joly le concède.) C’est la raison pour laquelle j’ai décidé la création d’un registre national, grâce auquel nous pourrons analyser la cause de chacun des décès.
Nous le savons, les causes sont plurielles. Dans certains cas, l’équipement néonatal est probablement en cause. La précarité est à l’évidence un facteur aggravant. Peut-être l’éloignement de certaines maternités est-il également un sujet,…
M. Mickaël Vallet. Ah !
Mme Catherine Vautrin, ministre. … y compris pour l’accompagnement des mères.
L’augmentation de l’âge de la mère à la naissance du premier enfant explique peut-être aussi en partie la hausse de mortalité constatée. (Mme Émilienne Poumirol s’exclame.) Tous ces facteurs méritent d’être renseignés. C’est ainsi que nous pourrons apporter les bonnes solutions.
En outre – tous les gouvernements qui se sont succédé ont une part de responsabilité en la matière et il s’agit là d’un sujet éminemment transpartisan –, en matière de néonatalité, les derniers décrets datent de 1998 : ils ont grand besoin d’être actualisés. Nous allons mener ce travail. C’est l’engagement que je prends devant vous, à la demande de M. le Premier ministre. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour la réplique.
M. Patrice Joly. Madame la ministre, je vous remercie de ces éléments de réponse.
Néanmoins, de manière plus générale, je m’interroge : devons-nous continuer, dans nos territoires, à être maltraités à la naissance, ignorés une fois devenus adultes, puis abandonnés lorsque nous devenons seniors et approchons de la fin de notre vie ?
Doit-on continuer à fermer les yeux sur la tiers-mondisation de notre système de santé ? (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christophe-André Frassa. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Cela fait aujourd’hui près de quatre ans que notre compatriote Paul Maillot, condamné à vingt ans de travaux forcés, purge sa peine dans des conditions innommables à Madagascar.
Ancien officier de la gendarmerie française, Paul Maillot est détenu par les autorités malgaches à la suite de l’affaire dite Apollo 21.
Cette affaire connaît depuis plusieurs semaines, si ce n’est plusieurs mois, un véritable retentissement médiatique. Ce dernier devient même de plus en plus fort, tant le caractère arbitraire de la détention de M. Maillot est devenu une évidence. Les Nations unies l’ont confirmé dans un récent avis en demandant sa libération immédiate.
Paul Maillot représente aujourd’hui un moyen de pression dans les relations bilatérales entre la France et Madagascar. Il ne doit pas en être l’otage. Sa double nationalité, souvent invoquée par les Malgaches pour justifier l’absence de réponse favorable à son sujet, n’est qu’un argument de façade – convenons-en.
M. Paul Maillot mérite toute l’assistance de son pays, la France, laquelle ne saurait se limiter à une simple mobilisation de principe.
Monsieur le ministre, le 24 avril prochain se tiendra à Madagascar le sommet des chefs d’État et de gouvernement de la Commission de l’océan Indien (COI). La France doit saisir cette occasion. Elle doit apporter son concours à l’application de l’avis de l’ONU en demandant la libération de Paul Maillot.
Sa fille aînée, que j’ai eu l’occasion de rencontrer à de nombreuses reprises et qui se trouve cet après-midi en tribune, est éreintée par cette situation, en particulier par la responsabilité de la survie de son père, depuis la France.
Les Malgaches souhaitent rééquilibrer nos relations bilatérales : soit. Cela doit passer par le retour en France de Paul Maillot dans les plus brefs délais. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, la situation de Paul Maillot est suivie de très près par les services de mon ministère et par le Gouvernement tout entier, sous l’autorité du Premier ministre.
Les agents du consulat général de France à Madagascar ont rencontré Paul Maillot à plusieurs reprises. Le dernier de ces entretiens a eu lieu le 25 mars dernier, et le prochain devrait se tenir cette semaine.
Par ailleurs, nous entretenons un dialogue soutenu avec les autorités malgaches, dans le cadre de la coopération judiciaire qui lie nos deux pays. Les conditions de détention de Paul Maillot sont pour nous source de vives inquiétudes, et nous plaidons pour leur amélioration.
Enfin, nous restons aux côtés de la famille de Paul Maillot. Sa fille a été reçue par mon cabinet le 24 février dernier et nous veillerons à maintenir le dialogue avec les différents membres de sa famille.
C’est la mission, c’est même l’honneur du ministère des affaires étrangères de rester en soutien et à l’écoute de Paul Maillot comme de l’ensemble de nos compatriotes détenus à l’étranger, en tentant d’obtenir l’amélioration de leurs conditions de détention et leur libération. Nous sommes également aux côtés de leur famille, en leur apportant tout le soutien moral que nous pouvons leur donner. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour la réplique.
M. Christophe-André Frassa. Monsieur le ministre, il est temps de faire un peu plus que du soutien moral…
M. Laurent Burgoa. Oui !
M. Christophe-André Frassa. Les autorités malgaches utilisent Paul Maillot comme un otage dans leurs relations bilatérales avec la France. Or nous avons aujourd’hui une occasion de venir au secours de notre compatriote.
M. le Président de la République et vous-même vous rendrez prochainement au sommet de la Commission de l’océan Indien. Je le répète, c’est là qu’il va falloir peser.
Il faut agir de manière tout à fait concrète : nous comptons sur vous pour que la libération de Paul Maillot soit l’un des enjeux de la rencontre entre le Président de la République et son homologue malgache. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)
sort des brigades de gendarmerie créées par la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur
M. le président. La parole est à M. Franck Dhersin, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. Franck Dhersin. Ma question, à laquelle j’associe mes collègues sénateurs de la Marne et de la Haute-Loire, s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le ministre, en 2022, le Président de la République annonçait, au titre du renforcement de la sécurité intérieure et de la présence de l’État, la création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie. Il s’agissait de répondre à de fortes attentes en luttant contre les déserts sécuritaires, en faisant revenir durablement la force publique dans les territoires, notamment les territoires ruraux.
Nous avons salué l’ampleur de l’engagement pris : 239 créations de brigades ont finalement été actées, nombre supérieur à celui qui avait été annoncé initialement.
Comme tous les membres de cette assemblée, vous avez – je le sais – la conviction que la sécurité ne peut être à géométrie variable selon les territoires. Pourtant, plusieurs signaux d’alerte remontent du terrain.
Dans de nombreuses communes, les élus ont fait leur part du chemin : délibérations votées, crédits mobilisés, bâtiments rénovés ou du moins identifiés. Mais les effectifs attendus ne sont pas là.
Je citerai deux exemples, dans le département du Nord : la commune de Caudry, dont le maire a déjà investi 90 000 euros ; et celle de Renescure, dont le maire a quant à lui investi 40 000 euros, sans avoir pour l’instant aucune nouvelle au sujet des gendarmes promis.
Certains élus s’interrogent : les 2 000 équivalents temps plein (ETP) annoncés pour ces brigades ont-ils bien été budgétés ? Les projets sont-ils aujourd’hui gelés, voire compromis, en raison de blocages budgétaires ?
Il y a quand même un endroit où tout se passe bien : la caserne de Zuydcoote. Dès que vous le pourrez, je vous invite d’ailleurs à passer un week-end à Zuydcoote… (Sourires et exclamations.)
Pourquoi cela se passe-t-il bien là-bas ? Parce que c’est le seul endroit de France où les gendarmes sont payés par le gouvernement de Sa Gracieuse Majesté,…
M. Mickaël Vallet. Sa Gracieuse Majesté…
M. Franck Dhersin. … dans le cadre des politiques engagées face à la problématique migratoire.
Monsieur le ministre, nous avons besoin de clarté. Nos concitoyens, les élus locaux ou encore les forces de l’ordre, tous attendent que la promesse présidentielle soit tenue. Pouvez-vous nous indiquer où en est concrètement la programmation, quand les effectifs seront déployés et si tous les engagements seront honorés dans les délais annoncés ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Vincent Louault applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Franck Dhersin, vous avez raison d’insister sur ces sujets. J’ai d’ailleurs récemment négocié une rallonge budgétaire avec mon homologue britannique Yvette Cooper, notamment pour déployer de nouvelles forces de lutte contre l’immigration illégale.
De même, vous avez raison de rappeler l’engagement présidentiel dont a fait l’objet le déploiement de ces 239 brigades de gendarmerie. S’y ajoute un engagement législatif : je me souviens très bien que le Sénat a voté, entre autres textes traitant de ces questions, le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi).
L’an dernier, nous avons déployé en tout et pour tout 80 brigades. Cette année, l’objectif est de 57. La priorité est accordée aux départements qui n’ont pas encore bénéficié de renforts. Nous privilégions en particulier les communes et, plus largement, les collectivités territoriales qui ont déjà investi en la matière.
La question n’est pas d’ordre strictement budgétaire, puisque nous disposons de la masse salariale. Il faudra néanmoins obtenir les autorisations de création des postes. Au total, ces 57 brigades de gendarmerie représentent 464 gendarmes.
Comme vous, je suis un enfant de la ruralité et je connais bien la gendarmerie nationale, à laquelle les Français sont attachés, à l’instar de tous les élus.
Notre gendarmerie nationale a une particularité : c’est son statut, très complémentaire de celui de la police nationale. Les gendarmes français restent des militaires, et je tiens tout particulièrement à cette spécificité.
Leur enracinement dans tous les territoires est une autre de leurs singularités. Le gendarme n’est pas seulement le soldat de la loi ; il est aussi le soldat du lieu. On ne protège bien que ce que l’on connaît bien et, comme vous, je suis très attaché à la présence de la gendarmerie dans l’ensemble des territoires. On le sait bien dans cette assemblée, plus la distance s’accroît, plus la confiance se réduit…
J’ai entendu votre question : il faut répondre aux engagements à la fois présidentiels et législatifs. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)