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Mise au point au sujet de votes

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure Darcos.

Mme Laure Darcos. Lors du scrutin n° 142 de ce jour, sur les amendements identiques nos II-37 et II-250 portant sur les crédits de la mission « Santé », mes collègues Jean-Luc Brault, Louis Vogel, Alain Marc, Jean-Pierre Grand, Marc Laménie, Pierre Médevielle et Claude Malhuret souhaitaient s’abstenir.

Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)

PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Après l’article 64 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Après l’article 64 (début)

Loi de finances pour 2025

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale.

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Sécurités

Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurités » (et article additionnel après l’article 64) et du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Belin, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux d’ouvrir cette discussion sur la mission « Sécurités ». Avant tout, monsieur le ministre, je veux adresser un message de reconnaissance à l’ensemble de nos forces de l’ordre placées sous votre autorité – gendarmes, policiers, sapeurs-pompiers – pour le travail extraordinaire qu’elles réalisent au quotidien et, en particulier, celui qu’elles ont accompli en 2024.

Nous avons en effet connu une année quelque peu exceptionnelle, marquée par plusieurs événements dont la réussite a exigé un engagement intense des forces de sécurité. D’un anniversaire de débarquement à un autre, en passant bien évidemment par les jeux Olympiques et Paralympiques, celles-ci ont été diablement sollicitées !

Bien évidemment, le succès hors du commun d’un événement comme les Jeux a reposé sur la bonne organisation des épreuves sportives et sur le cadre patrimonial exceptionnel – tous les monuments de Paris – dans lequel cet événement s’est inscrit. Mais il est dû, aussi, à la sécurité sans faille qui a été assurée tout au long des épreuves. Cela, monsieur le ministre, nous le devons aux gendarmes et policiers mobilisés.

Bien sûr, ce succès de la sécurité des Jeux a eu un coût. En commission des finances, nous l’avons estimé à 1,1 milliard d’euros, ce qui a eu, évidemment, des conséquences sur le budget 2024 de cette mission.

S’y sont ajoutés tous les événements survenus outre-mer – en Nouvelle-Calédonie, à la Martinique et à Mayotte –, qui ont imposé de mobiliser de nombreux moyens humains. Les auditions que nous avons eues avec la gendarmerie nationale et la police nationale nous ont permis d’en évaluer le coût à un peu plus de 150 millions d’euros.

On comprend donc bien pourquoi, à enveloppe constante, on a peiné à finir l’année, ce qui explique notamment certaines problématiques qu’il a fallu clarifier. Je pense notamment aux impayés de loyers de la gendarmerie, pour environ 90 millions d’euros, qui suscitent des interrogations. Un rattrapage est prévu dans le projet de loi de finances de fin de gestion.

Les crédits pour 2025 de la mission « Sécurités » s’inscrivent dans la continuité de la loi du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, la Lopmi. En progression, ils dépassent légèrement 24 milliards d’euros en crédits de paiement.

On ne peut que se satisfaire de cette évolution. Les besoins sont en effet immenses, comme on le voit partout sur le terrain, en particulier pour ce qui concerne la lutte contre les narcotrafics, dont vous avez fait une priorité, monsieur le ministre. Aucun territoire n’est épargné par le phénomène : vous savez à quel point, avec tous les élus de mon département de la Vienne, nous avons été marqués par les règlements de comptes qui se sont déroulés dans une ville paisible comme Poitiers, avec des conséquences des plus regrettables.

Il nous faut donc des moyens, notamment humains ; ces moyens figurent dans la copie qui nous est présentée ce soir.

Il y en a pour la police nationale, un peu moins pour la gendarmerie, et il me semble intéressant d’entrer dans le détail de cette répartition. En effet, en zone police, la police nationale a pu bénéficier du concours, de l’aide, du renfort des polices municipales – c’est une chance ! En revanche, en zone gendarmerie, les gendarmes sont les seuls à intervenir ; ils n’ont aucun recours possible. C’est pourquoi il sera essentiel de poursuivre, tout au long de l’année, les discussions sur les moyens humains : il faut que nous soyons en capacité de répondre aux besoins humains en zone gendarmerie.

Si la police nationale voit ses ressources humaines progresser, elle manque en revanche de moyens matériels, l’enveloppe budgétaire contrainte de l’année 2024 n’ayant pas permis de procéder à certains achats de matériel. On y remédie sur l’exercice 2025.

Inversement, la gendarmerie dispose de moins de moyens humains, mais un effort est fait sur l’immobilier. La commission des finances a travaillé sur ce sujet – il nous semble en effet important d’avoir, sur le terrain, des casernes de gendarmerie qui concourent à l’attractivité de la profession et offrent les conditions d’une bonne exécution des missions de gendarmerie. Nous nous sommes notamment déplacés à Dijon et sur le plateau de Satory, mais je pécherais si je n’évoquais pas également les projets de reconstruction de gendarmeries à Loudun et Civray, dans mon département. Je sais aussi qu’il en existe dans la Nièvre, car nous avons été interrogés sur la possibilité, en tenant compte des décrets du 28 janvier 1993 et du 26 décembre 2016, de trouver de nouveaux plans pour répondre aux besoins avec les financeurs, les bailleurs sociaux et les collectivités.

Cette question des nouvelles casernes, monsieur le ministre, nous renvoie à la question des moyens humains. Il faudra en effet, pour garantir le bon fonctionnement de ces structures, pouvoir armer les 80 nouvelles brigades de gendarmerie créées en 2024 et les 57 nouvelles qui sont prévues en 2025. C’est là un point essentiel.

Au titre des autres moyens nécessaires, je vous ai bien entendu, monsieur le ministre, pendant l’examen de la mission « Immigration, asile et intégration », évoquer la question des centres de rétention administrative. Il est question d’en ouvrir un certain nombre, cela a même été programmé ; il faudra aussi trouver les moyens humains pour les faire fonctionner.

Il en va de même pour la police aux frontières, qui doit faire face à tous les enjeux liés aux traversées de la mer Méditerranée et de la Manche. Vous le savez mieux que quiconque ici, tant que nous aurons un semblant d’Europe heureuse et une Afrique malheureuse, nous ferons face à de nombreuses difficultés dans nos politiques migratoires. Il faudra donc, là encore, trouver les moyens de renforcer la police aux frontières.

Je ne m’appesantirai pas sur le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », couramment appelé « CAS Radars ». Je profiterai des interventions, des éventuels questionnements et de l’examen des amendements pour l’évoquer, ainsi que, plus largement, le sujet de la sécurité routière. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en premier lieu, je souhaite, à l’instar de mon collègue rapporteur spécial, avoir un mot à l’égard des forces de sécurité civile – sapeurs-pompiers, personnels navigants, formateurs militaires, démineurs et associations agréées de la sécurité civile –, qui ont été particulièrement mobilisées en cette année 2024.

La sécurisation et la réussite des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 n’auraient pu être possibles sans l’engagement exceptionnel des professionnels, des volontaires et des bénévoles qui font la force et assurent la résilience de notre modèle de sécurité civile.

En outre, l’année 2024 a été marquée par des inondations sans précédent en France. Ces épisodes climatiques soulignent un impératif : celui, pour la sécurité civile, de disposer de moyens humains et matériels adaptés face à la multiplication des catastrophes naturelles.

En ce sens, le PLF pour 2025 prévoit une dotation de 861 millions d’euros en autorisation d’engagement (AE) et de 831 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

Dans un contexte de contrainte budgétaire, et dans l’attente des conclusions des travaux du Beauvau de la sécurité civile, le Gouvernement propose donc pour le programme 161 un budget qui, pris dans sa globalité, apparaît relativement stable par rapport à l’année précédente.

Passée cette observation générale, deux éléments sont à retenir concernant l’analyse des crédits.

Premièrement, les crédits d’investissement connaissent une baisse par rapport à 2024.

Cette diminution est à nuancer pour deux raisons. D’une part, le niveau d’investissement est extrêmement variable d’une année sur l’autre en fonction des commandes d’aéronefs. Or le renouvellement de la flotte d’avions bombardiers d’eau est reporté à l’horizon 2030. D’autre part, la loi de finances initiale pour 2024 avait prévu d’importants crédits d’investissement pour la création d’une nouvelle unité terrestre, ainsi que pour la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques.

Deuxièmement, cette baisse modérée des crédits ne remet pas en cause les capacités opérationnelles de la sécurité civile, du moins à court terme.

Le PLF pour 2025 prévoit ainsi des crédits élevés pour la location d’aéronefs, pour le financement des pactes capacitaires, ou encore pour le renforcement des colonnes de renfort : autant de moyens indispensables à la mise en œuvre d’une solidarité nationale face à la double extension, temporelle et géographique, des risques de catastrophes naturelles.

J’en viens aux enjeux thématiques du programme.

La question des capacités opérationnelles m’amène d’abord à évoquer la situation de la flotte d’aéronefs de la sécurité civile.

Si la saison de feux de forêt a été sous contrôle en 2024, je tiens à souligner le caractère heureux de cette réussite. En effet, l’extrême mobilisation des agents pour les Jeux, doublée d’un taux de disponibilité anormalement bas des appareils bombardiers d’eau, aurait pu mener à des scénarios plus malheureux, avec un risque de rupture capacitaire.

Dans ce contexte, mes chers collègues, j’attire votre attention sur trois points concernant les moyens aériens.

Tout d’abord, le renouvellement de la flotte d’hélicoptères se poursuit au rythme prévu, avec la livraison des trois premiers modèles H145 d’ici à la fin de cette année.

Ensuite, le budget pour 2025 consacre la pérennisation de crédits dédiés à la location d’aéronefs : 30 millions d’euros sont ainsi prévus pour permettre la location de 10 hélicoptères et de 6 avions.

Enfin, je ne vous cache pas mon inquiétude quant à l’entretien et au renouvellement de la flotte des 12 avions Canadair français. Ce renouvellement continue d’être repoussé dans le temps et les deux premiers appareils commandés par la France via la Commission européenne ne devraient être livrés qu’en 2030, pour des raisons techniques. Il faudra donc composer avec la flotte existante encore au moins cinq ans, si ce n’est dix ans. Or cette flotte est vieillissante, ce qui contraint à ménager les appareils et risque de nous forcer à faire évoluer la doctrine française de lutte contre les incendies.

Mais les moyens de la sécurité civile ne se résument pas aux aéronefs. J’en viens donc à un deuxième sujet, celui des pactes capacitaires destinés à renforcer les moyens opérationnels des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) par l’acquisition de matériels, notamment de véhicules, cofinancés par l’État.

À la suite des incendies de 2022, pour faire face aux feux de forêt, une enveloppe additionnelle de 150 millions d’euros en AE avait été inscrite dans le PLF pour 2023. La promesse semble aujourd’hui tenue : 37 millions d’euros de CP ont été consommés en 2023 ; 29 millions d’euros devraient l’être en 2024 ; 45 millions d’euros sont prévus pour 2025.

Malgré quelques retards, ces pactes sont source de satisfaction. Dans un contexte de contrainte budgétaire, la mutualisation des commandes au niveau national a permis de baisser le prix d’achat des équipements d’environ 30 %.

Néanmoins, il est important de souligner que les pactes capacitaires, aujourd’hui essentiellement dédiés à la lutte contre les feux de forêt, constituent un dispositif de financement exceptionnel dont les crédits devraient être consommés dans leur entièreté d’ici à 2027.

Or d’autres défis s’imposent à nous.

Les conclusions de la récente mission de contrôle relative aux inondations survenues en 2023 et au début de l’année 2024, menée par nos collègues Jean-François Rapin et Jean-Yves Roux, ont ainsi mis en évidence les limites capacitaires auxquelles ont pu être confrontés nos services de secours.

Il paraît donc légitime de réfléchir à la mise en place, à moyen terme, de dispositifs de financement dédiés au renforcement des moyens de prévention et de lutte contre les risques d’inondation.

Le sujet des inondations m’amène vers celui de la modernisation des systèmes d’information, de communication et d’alerte de la sécurité civile.

De fait, les inondations qui ont touché l’Espagne le mois dernier mettent en lumière l’impératif de disposer d’outils de communication et d’alerte à la population pleinement fonctionnels. Je reste donc attentif à l’évolution des projets de modernisation comme NexSIS et FR-Alert, ou encore à la possible mise en place d’un numéro unique d’urgence. Ces projets sont sur la bonne voie, mais ils nécessitent des financements publics, une mise à l’épreuve du réel et une volonté politique.

De la question de la volonté politique, mes chers collègues, j’en viens, en guise de conclusion, à la reprise, voilà quelques jours, du Beauvau de la sécurité civile.

Ce cycle de concertation nationale devrait s’achever au printemps 2025 par la présentation d’un projet de loi portant l’ambition de « poser les bases d’un modèle de sécurité civile renouvelé », trente ans après la loi de départementalisation des services d’incendie.

Par ses travaux de contrôle sur la flotte d’aéronefs bombardiers d’eau ou sur le projet NexSIS, par l’adoption de résolutions comme celle visant à reconnaître la spécificité de l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires, ou encore par les débats de samedi dernier sur la taxe spéciale sur les conventions d’assurances (TSCA) et les modalités de financement des Sdis, le Sénat a déjà eu l’occasion de faire valoir ses positions.

Dans l’attente des résultats du Beauvau, dont les propositions devront être à la hauteur des attentes, je vous propose donc, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Sécurités », qui assurent des moyens stables pour l’année 2025. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en conformité avec la trajectoire prévue par la Lopmi, le budget de la gendarmerie nationale, avec 11,4 milliards d’euros en AE et 10,9 milliards d’euros en CP, présente cette année une hausse globale de 500 millions d’euros.

Le maintien de cette trajectoire dans un contexte budgétaire difficile est un vrai motif de satisfaction. Toutefois, le tableau est très contrasté, avec un effort sur l’investissement et un coup d’arrêt en matière d’effectifs – je développerai le premier point, tandis que Jérôme Darras évoquera le second.

Alors que, l’année dernière, l’augmentation des crédits avait été largement absorbée par les dépenses de personnel, c’est cette année l’investissement immobilier, grand oublié des deux derniers exercices, qui bénéficie, enfin, de l’essentiel de la hausse. Les crédits sont ainsi portés à 295,2 millions d’euros en AE et 175,5 millions d’euros en CP.

C’est le signe d’une véritable volonté de réamorcer la pompe, avec un budget de taille pour des opérations de maintenance, de réhabilitation et de construction. Pourtant, nous sommes encore loin des 400 millions d’euros nécessaires et de l’inscription d’une programmation immobilière dans la durée, seule susceptible d’éviter une dégradation irrémédiable du parc et un glissement vers le locatif, qui coûtera plus cher et privera le gestionnaire de ses marges de manœuvre. Le nouveau directeur général de la gendarmerie nationale a dessiné, lors de son audition devant notre commission, les contours d’une telle programmation ; espérons que celle-ci sera adossée à des moyens à la hauteur.

À court terme, il est également impératif de faciliter la vie aux collectivités qui souhaitent accueillir, en locatif, des brigades de gendarmerie. Les obstacles financiers et réglementaires restent trop nombreux et la suspension du paiement des loyers de 5 000 casernes aux collectivités, annoncée en octobre en raison des coûts non budgétés liés à la crise en Nouvelle-Calédonie et aux jeux Olympiques et Paralympiques, n’aura pas contribué à renforcer la confiance.

Au fond, la trajectoire budgétaire de la gendarmerie ressemble à un mouvement de balancier : soit on finance les augmentations d’effectifs en sacrifiant l’investissement immobilier, soit – comme cette année – on fait porter l’effort sur l’investissement en gelant les augmentations prévues par la Lopmi. Ce n’est pas satisfaisant, mais il n’y a pas de solution miracle.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donc, sur la recommandation de ses deux rapporteurs pour avis, préconisé l’adoption des crédits de cette mission, avec les réserves mentionnées. Nous attendons également les explications du Gouvernement sur l’amendement n° II-498 portant annulation de crédits, à hauteur de près de 19 millions d’euros, au profit de la police nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Darras, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le titre 2 du projet de budget de la gendarmerie apparaît correctement doté, avec une hausse de 83 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.

Mais, en réalité, cette augmentation couvre la seule mise en œuvre de primes et mesures indiciaires, aucun recrutement net n’étant programmé en 2025. L’absence des 500 emplois supplémentaires prévus dans la Lopmi va singulièrement compliquer le déploiement des 57 brigades annoncées pour 2025, dans le cadre du plan de création de 239 nouvelles brigades.

Monsieur le ministre, vous avez exprimé, en audition devant la commission des lois, votre volonté de faire évoluer ce schéma d’emplois. Ce serait une bonne chose pour maintenir le nécessaire lien de confiance avec les collectivités, à un moment où celles-ci sont confrontées à des contraintes financières sans précédent.

Le second sujet de préoccupation sur les effectifs est la baisse marquée du budget de la réserve, là aussi en contradiction avec l’objectif, fixé par la loi de programmation, de 50 000 réservistes en 2027. Avec des crédits en baisse de près de 15 millions d’euros, il apparaît désormais difficile d’atteindre cet objectif, que la Cour des comptes jugeait déjà irréaliste dans son analyse de l’exécution budgétaire 2023, sauf à diminuer le nombre de jours annuels effectués, au risque d’un effet délétère sur la motivation des réservistes.

La réserve assume pourtant un rôle de plus en plus important au sein de la gendarmerie, assurant la quasi-totalité du spectre des missions.

Elle est particulièrement impliquée, par exemple, dans la lutte contre l’immigration illégale et clandestine sur les côtes de la Manche et de la mer du Nord. Les 441 réservistes mobilisés chaque jour, financés par le Royaume-Uni dans le cadre du traité de Sandhurst, constituent en effet la grande majorité des effectifs déployés. Ils interviennent dans des conditions particulièrement difficiles, avec une organisation de passeurs qui se professionnalise, n’hésitant pas à user de violence ou à se servir d’enfants comme boucliers contre l’intervention des gendarmes.

Je forme le vœu, à la suite de votre déplacement sur le littoral du Pas-de-Calais, que la position du Royaume-Uni évolue, en particulier par le rétablissement d’une voie légale d’immigration dans ce pays.

La réserve apparaît donc bien comme une composante indispensable à la gendarmerie, y compris dans les conditions d’emploi les plus dures.

En conclusion, un point général sur l’exécution de la Lopmi pour la gendarmerie serait bienvenu, alors que nous approchons de la mi-parcours, afin d’évaluer si les à-coups dus aux contraintes budgétaires dans la trajectoire des effectifs ou dans la gestion immobilière nécessitent d’ajuster la mise en œuvre de la vision stratégique initiale.

Dans l’attente de cette évaluation, notre commission a préconisé l’adoption des crédits relevant du programme 152 de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de nous prononcer sur les crédits prévus pour 2025 au titre de la police et de la gendarmerie nationales, il me semble que plusieurs leçons doivent être tirées de l’exercice 2024. J’en citerai trois.

D’abord, le défi de la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques a été relevé. Son coût, évalué à 1,1 milliard d’euros, a certes été important, mais cela montre une chose simple : il est possible de sécuriser efficacement l’espace public dès lors que l’on s’en donne les moyens.

Ensuite, les forces ont dû faire face à une succession de crises qui a culminé avec les émeutes en Nouvelle-Calédonie. Nous devons prendre conscience de la récurrence de ce type de crises et du fait qu’elles représentent toujours un surcoût. À cet égard, il me semble que nous pourrions réfléchir, monsieur le ministre, à la mise en place d’un système de provisions, comme cela se fait déjà dans le budget de la défense au titre des surcoûts engendrés par les opérations extérieures (Opex).

Enfin et surtout, nos finances publiques se trouvent désormais dans un état critique.

Le fait est connu, mais nous devons le garder à l’esprit alors que nous examinons les crédits de la mission « Sécurités ». Dans le contexte du PLF 2025, celle-ci fait figure de mission préservée. Au vu des enjeux de sécurité auxquels notre pays fait face, c’était indispensable.

Ainsi, les crédits prévus au titre de la police et de la gendarmerie nationales progresseraient de près de 1 milliard d’euros par rapport à l’an passé, soit une hausse de 4,2 %, ce qui n’a rien de négligeable.

Assurément, ce budget s’inscrit dans la dynamique que nous avons souhaité impulser en votant la Lopmi, dont les objectifs sont globalement respectés. Ce constat peut toutefois être nuancé à deux titres.

Premièrement, les schémas d’emplois nuls qui sont prévus marquent un renoncement par rapport à l’objectif fixé dans la Lopmi, qui prévoyait 856 équivalents temps plein supplémentaires cette année. Cela pourrait créer des difficultés à terme, dans la mesure où les objectifs opérationnels posés en parallèle restent inchangés. Je pense notamment à la création de 238 nouvelles brigades dans la gendarmerie.

Deuxièmement, les dépenses de fonctionnement et d’investissement de la police nationale ne sont pas aux niveaux escomptés. La Lopmi n’a pas permis d’enrayer durablement l’effet de ciseaux observé depuis la fin des années 2010 entre la masse salariale et les moyens matériels des forces.

Au-delà de 2025, des efforts importants et structurels resteront à mener. Je pense en particulier à l’indispensable remise à niveau du parc immobilier de la gendarmerie. Le constat de la dégradation de celui-ci a été précisément établi par notre collègue Bruno Belin pour la commission des finances. Le chantier auquel nous faisons face est colossal – 2,2 milliards d’euros – et il devra être mené sur plusieurs années. Devant la commission des lois, monsieur le ministre, vous vous êtes engagé à porter ce combat ; soyez assuré que la commission des lois vous soutiendra.

Pour l’heure, le fait que ce budget continue d’augmenter malgré la baisse générale qui est imposée aux dépenses de l’État constitue indéniablement un motif de satisfaction. La commission des lois a donc donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 161, relatif aux moyens nationaux de la sécurité civile.

Dans un contexte budgétaire contraint, ce PLF sanctuarise les montants dédiés aux projets structurants du programme et garantit aux forces de sécurité civile les moyens de mener à bien leurs missions.

Cette année encore, malgré des feux de forêt modérés, nous avons pu constater le défi que représente le dérèglement climatique pour les acteurs de la sécurité civile. L’extension de la période des feux, ainsi que l’élargissement des zones à risque sur le territoire métropolitain, va rendre nécessaire des investissements massifs, aux niveaux tant national que départemental.

De la même manière, l’intensification du phénomène d’inondations qui a mobilisé, des semaines durant, les militaires et les sapeurs-pompiers dans les Haut-de-France, puis dans les départements du centre-est et du sud, témoigne de la transformation du risque climatique et du besoin d’adapter notre réponse à celui-ci.

Nous saluons ainsi la hausse notable des montants consacrés aux pactes capacitaires. Ils permettront de soutenir les services d’incendie et de secours, tant pour acquérir des camions-citernes que pour se doter de moyens de pompage permettant de réagir face à des épisodes de crues d’une durée et d’une intensité inédites.

Si ces crédits sont indispensables pour le soutien à l’investissement des Sdis, ils sont néanmoins loin d’être suffisants. Je veux ici rappeler l’urgence à agir en faveur du financement de ces services. Nous l’entendons tous sur le terrain : les Sdis sont à bout de souffle et ils attendent depuis trop longtemps la définition d’un modèle de financement crédible au regard de l’intensification des risques.

Par ailleurs, la commission des lois a salué la hausse des crédits consacrés au renouvellement de la flotte d’hélicoptères. Alors que nous nous apprêtons à recevoir trois premiers hélicoptères H145 au titre de l’année 2024, le montant garanti pour ces acquisitions dans ce PLF permettra l’acquisition de huit autres appareils. La trajectoire d’acquisition définie par la Lopmi sera donc respectée.

Ce constat n’est en revanche pas transposable à la promesse d’acquisition de 16 Canadair avant 2027. La faiblesse des crédits dédiés à cet objectif au sein du budget pour 2025 compromet en effet inévitablement le respect des objectifs annoncés par le Président de la République, avec, au mieux, de premières livraisons à compter de 2028. Le renoncement, au cours de l’année, à la commande de deux Canadair hors programme européen est un autre signal d’alerte concernant le respect de la trajectoire définie.

Devant les difficultés liées à la situation monopolistique du constructeur, nous ne pouvons que souhaiter que la France parvienne à trouver des réponses, notamment à l’échelon européen, pour éviter de compromettre sa capacité opérationnelle dans les années à venir. Dans l’attente, le maintien des montants dédiés à la location d’aéronefs permettra de garantir la réactivité de la flotte durant la haute saison des feux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Motion d’ordre