Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Briquet, sur l’article.
Mme Isabelle Briquet. Cet article repose sur une base inadéquate, qui se limite à la valeur faciale des actions, bien éloignée de leur véritable valeur sur le marché. Autant dire que son efficacité sera minime.
Pour être réellement à la hauteur des enjeux financiers actuels, il serait nécessaire de concevoir une taxation des rachats d’actions basée sur leur valeur d’acquisition, comme c’est le cas aux États-Unis où une taxe de 1 % a été mise en place. À titre d’exemple, appliquer un taux de 8 % sur un rachat d’actions effectué à sa valeur comptable revient à bien moins taxer qu’avec un taux de 1 % appliqué à la valeur boursière réelle.
Une telle situation illustre l’inefficacité flagrante de la mesure actuelle, qui réduit drastiquement la portée financière d’une telle taxe. Les rachats d’actions, plébiscités par certaines des plus grandes entreprises, sont bien plus qu’un simple outil de gestion financière. Ils entraînent des bénéfices immédiats pour les actionnaires ayant vendu leurs parts, mais profitent aussi aux détenteurs restants grâce à l’augmentation artificielle du bénéfice par actions induite par la réduction du nombre total d’actions. Ce mécanisme particulièrement recherché par les acteurs boursiers contribue à une inflation durable du cours des actions.
Et que dire des avantages qu’en tirent les dirigeants d’entreprise ? Grâce à l’interaction avec les stock-options, les rachats d’actions deviennent un levier puissant pour amplifier les richesses personnelles, bien souvent au détriment des investissements productifs et de la juste redistribution des bénéfices.
Il est donc impératif de revoir cette politique en instaurant une fiscalité plus juste et ambitieuse. C’est à cette condition seulement que nous pourrons espérer répondre aux défis posés par le niveau de notre déficit public et rétablir une véritable équité fiscale.
Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, sur l’article.
M. Grégory Blanc. Enfin ! Enfin, on va mettre en place des dispositifs pour fiscaliser ces pratiques.
Un certain nombre d’amendements à l’article 26 vont dans le même sens, avec des taux et des modalités différents. Nous aurons l’occasion d’en débattre lors de leur discussion.
Des liquidités ont été injectées de manière massive sur les marchés. Des facilités de crédit ont été mises en place, des facilités budgétaires ont été consenties aussi à l’occasion de la crise de la covid-19, mais aussi de la crise inflationniste.
Tout cela fait que certaines entreprises se retrouvent avec des coffres plus que pleins. Au lieu d’investir pour essayer de préparer l’avenir – ainsi, TotalEnergies pourrait intensifier ses investissements en faveur de la transition écologique –, elles réalisent des opérations patrimoniales.
Ces rachats d’actions ne sont pas décidés pour être redistribués aux salariés ni pour accompagner des opérations de restructuration qui seraient consécutives à des opérations d’investissement ou à des difficultés. Non, non, tout cela est possible par suppression du capital.
Il faut mettre en place des outils – c’est une question de morale –, même si c’est sans doute un peu trop tard, dans la mesure où ces opérations ont déjà créé des effets d’aubaine.
Pour ma part, je regrette l’ordre dans lequel seront examinés ces amendements, puisque l’on débutera par les propositions les moins-disantes pour aller vers les plus ambitieuses. Tout cela ne manquera pas de compliquer nos votes.
M. Pascal Savoldelli. C’est vite dit ! Ce n’est pas si sûr.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic, sur l’article.
M. Thierry Cozic. Pour paraphraser mon collègue, je dirai moi aussi : enfin !
Enfin, on cherche à instaurer une taxation sur les rachats d’actions. Je rappelle qu’il s’agit d’un dispositif qui est en fait une mesure de gratification des actionnaires permettant de faire mécaniquement monter le cours de l’action. C’est un instrument spéculatif qui n’a absolument aucun intérêt macroéconomique. Il est donc grand temps de taxer ce genre de pratiques.
Certaines entreprises se sont fait une spécialité de ce genre d’opération. Ainsi, Apple s’y adonne régulièrement depuis 2013 et a diminué presque de moitié le stock de ses actions en circulation ; ainsi, sa cotation en bourse est environ deux fois plus élevée que si l’entreprise avait distribué les mêmes sommes en dividendes. Cette situation a poussé Joe Biden à instaurer une taxe de 1 % sur la valeur des actions rachetées au mois de janvier 2023.
Le groupe socialiste demande depuis très longtemps de taxer les rachats d’actions. Lors de son allocution télévisée du mois de mars 2023, Emmanuel Macron l’a également demandé, dénonçant pour la première fois de telles pratiques. Même le PDG de TotalEnergies s’est montré favorable à une telle mesure.
Toutefois, monsieur le ministre, dès qu’il s’agit de s’en prendre au capital, le diable se niche dans les détails.
La taxe sur les rachats d’actions, telle que vous la proposez, s’élève à 8 %, ce qui paraît beaucoup plus élevé que la taxe Biden, dont le taux s’établissait à 1 %. Il faut toutefois s’intéresser davantage à l’assiette qu’au taux pour comprendre la subtilité de ce dispositif. Toute l’astuce réside en effet dans le fait que la taxe prévue par cet article porte non pas sur la valeur boursière de l’action à la date de son rachat, mais sur sa valeur nominale, c’est-à-dire sa valeur comptable inscrite dans les statuts de la société. Une telle valeur est bien souvent complètement déconnectée de la valeur boursière de l’action. J’en veux pour preuve L’Oréal dont le cours boursier est de 394,60 euros, tandis que la valeur comptable du titre est de 20 centimes d’euro, soit 1 973 fois moins.
Ce mode de calcul vide de sa substance le dispositif proposé, ce qui explique le rendement particulièrement faible attendu de la taxe prévue par cet article : 200 millions d’euros. Cela représente 0,6 % des 33 milliards d’euros de rachats d’actions opérés en France en 2023. C’est ridicule !
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Dominique Théophile.)
PRÉSIDENCE DE M. Dominique Théophile
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale.
Dans la suite de la discussion des articles de la première partie, nous entamons l’examen des amendements à l’article 26.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-672 est présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° I-1681 est présenté par MM. G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
Après la section XX bis du chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts, est insérée une section ainsi rédigée :
« Section…
« Taxe sur les programmes de rachats d’actions
« Art. 235 ter ZD… – I. – Une taxe s’applique à toute opération d’achat par la société émettrice de ses propres actions au sens du II de l’article L. 225-206 du code de commerce.
« II. – La taxe est assise sur la valeur d’acquisition des actions.
« III. – Le taux de la taxe est fixé à 2 %.
« IV. – La taxe est due par la société émettrice procédant au rachat de ses propres titres.
« V. – La taxe s’applique aux sociétés dont le siège social est situé en France, dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation selon le chapitre X du code de commerce et qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 500 000 000 €.
« VI. – La taxe est exigible le premier jour du mois suivant celui au cours duquel s’est produite l’opération d’achat de ses propres actions par la société émettrice.
« VII. – La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que les taxes sur le chiffre d’affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° I-672.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement vise à renforcer la portée de l’article 26 et à réaffirmer la volonté du groupe communiste-Kanaky de taxer les rachats d’actions par le biais du dispositif qui avait été adopté, au Sénat, lors de l’examen du dernier projet de loi de finances pour 2024. Mes chers collègues, puisqu’il a été adopté au Sénat la dernière fois, normalement, cela devrait passer aujourd’hui !
À la même époque, l’année dernière – mais je ne doute pas qu’aujourd’hui ce sera le contraire –, notre proposition avait été méprisée par le Gouvernement, avant de devenir l’un des axes de campagne du candidat Gabriel Attal, arrivé un mois plus tard à Matignon.
Depuis, cette idée a circulé, elle a convaincu, au-delà de notre groupe, ce dont nous nous réjouissons. Aussi, nous avons l’occasion de faire adopter ici une véritable taxation des comportements strictement spéculatifs pour, sinon les dissuader, du moins en retirer une manne financière, estimée au minimum à 1,5 milliard d’euros.
À peu de chose près, voter en faveur de cet amendement justifierait de ne pas augmenter les taxes sur l’électricité ou de ne pas sous-valoriser les pensions de retraite, ou encore de ne pas faire travailler gratuitement les salariés et fonctionnaires de ce pays : sur ce dernier point, il y a eu un rétropédalage, c’est le moins qu’on puisse dire !
En somme, il s’agit de prendre sur les spéculateurs plutôt que sur les travailleurs, les retraités ou les ménages. Le plus grand nombre ne doit pas payer la facture de quelques-uns. Le CAC 40 s’en est donné à cœur joie depuis trois ans, avec un montant de rachats d’actions record de 30,1 milliards d’euros, atteint en 2023. Alors que les dividendes sont taxés par la flat tax, au taux de 30 %, les rachats d’actions ne sont pas imposés.
Je me souviens de ce beau mot du Président de la République, dénonçant le « cynisme » des rachats d’actions.
M. Albéric de Montgolfier. C’est beau !
M. Pascal Savoldelli. Gabriel Attal, lui, y voyait un effet d’éviction au détriment des investissements et de la rémunération des salariés.
M. le Premier ministre Barnier souhaite faire évoluer le dispositif à la marge. Nous lui faisons une proposition, qui, je le redis ici, sera notre fil conducteur, de bout en bout.
Voilà, encore une fois, un amendement responsable et acceptable.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour présenter l’amendement n° I-1681.
M. Grégory Blanc. Au travers de ces amendements identiques, mon collègue Pascal Savoldelli et moi-même défendons la création d’une taxe. C’est d’ailleurs ce qui justifie qu’ils soient disjoints des suivants, qui eux feront l’objet d’une discussion commune.
Le Gouvernement a posé les termes du débat. Il y a un sujet à la fois sur la forme et sur le fond : un problème rédactionnel, d’une part, qui touche tant la mesure que nous proposons que, d’ailleurs, le dispositif du Gouvernement, et un problème de viabilité juridique, d’autre part. Pourtant, le processus est engagé.
Nous avons décidé de procéder ainsi, car c’est pour nous une question de principe que de dire les choses très clairement et de réaffirmer notre position politiquement.
Au-delà du volet juridique, plus globalement, il y a un sujet sur le taux. Nous examinerons par la suite un certain nombre d’amendements qui tendent à proposer des taux différents.
Avec 1 % de taxation, on nous annonce des recettes à hauteur de 200 millions d’euros, ce qui me paraît quelque peu présomptueux. Je l’évoquais au moment de ma prise de parole sur ce même article, les opportunités ou, en tout cas, les flux d’argent qui ont résulté des facilités de crédit et des facilités budgétaires qui ont été accordées ont fait gonfler les réserves d’un certain nombre d’entreprises. Alors que les opérations de rachats d’actions représentaient un volume de 40 milliards d’euros en 2022 et de plus de 30 milliards en 2023, ce sera sans doute moins en 2024 et plus encore en 2025, puisque, à force de multiplier ces opérations, lesdites réserves baissent.
Voilà pourquoi, dès lors que nous décidons de créer une taxe, ne jouons pas petit bras, d’où le taux de 2 % que nous proposons. Contrairement à ce qu’on entend ici ou là, qui peut croire franchement que, même à 3 % ou 4 %, l’impact de cette taxe sera tel qu’il empêchera les sociétés de procéder à des rachats d’actions ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de ces deux amendements, qui, s’ils venaient à être adoptés, nous empêcheraient de poursuivre la discussion de l’article 26.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Messieurs Savoldelli et Blanc, le dispositif de vos amendements pose plusieurs difficultés.
Vous touchez à l’actionnariat salarié. Je ne suis pas sûr que ce soit la cible à privilégier au travers de la fiscalité des rachats d’actions.
Vous modifiez le seuil de déclenchement : vous proposez de taxer à partir d’un chiffre d’affaires de 500 millions d’euros, quand nous prévoyons un seuil à un milliard. À la rigueur, même si nous avons ce désaccord, ce point peut être débattu.
Mais c’est surtout la mise en application qui est problématique. Les dispositions contenues dans vos amendements, mais aussi dans un certain nombre d’autres, sont en réalité contraires à la directive européenne du 30 novembre 2011, dite « mère-filles », concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents.
La difficulté, je le reconnais volontiers, est réelle. Pour le calcul de l’assiette, le droit communautaire nous impose de partir des deux éléments que sont la valeur nominale et la prime d’émission, quand vous, vous partez de la valeur de rachat d’actions et, donc, de la valeur d’acquisition. Cette contrainte juridique crée un vrai différentiel de rendement, mais nous ne pouvons rien faire d’autre que de la prendre en compte.
Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Monsieur le ministre, si je ne suis pas surpris par votre réponse, car j’y m’attendais en rédigeant l’amendement de cette façon, il importe de réaffirmer auprès de l’Europe la nécessité de faire bouger la réglementation européenne sur une telle question. Voilà l’enjeu fondamental s’agissant des rachats d’actions.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Notre collègue Grégory Blanc a œuvré pour le bien commun, puisqu’il a défendu à la fois son amendement et ceux qui vont suivre. Si l’initiative est sympathique, mieux vaut, mon cher collègue, s’en tenir à ses propres amendements. (M. Grégory Blanc sourit.)
Nous proposons un taux de 2 % avec un abattement au-dessous d’un montant de chiffre d’affaires de 500 millions d’euros, contre un milliard dans la version du Gouvernement. Monsieur le ministre, pour justifier notre désaccord, vous nous dites que c’est le droit communautaire qui prévaut ; dans ce cas, expliquez-nous pourquoi un milliard serait autorisé, mais pas 500 millions…
M. Pascal Savoldelli. Par ailleurs, la déduction permise par le régime mère-filles est un vrai sujet : tout un écheveau de dispositions a été préparé et est prêt à l’emploi pour éviter la taxation, et cela n’a pas grand-chose à voir avec le droit communautaire.
J’y insiste, puisque c’est sur ce point que vous motivez notre désaccord, nous voulons savoir pourquoi votre seuil d’un milliard serait conforme au droit communautaire, mais pas nos 500 millions d’euros.
À ce sujet, l’exemple donné tout à l’heure par Thierry Cozic sur L’Oréal est explicite. Toutes nos concitoyennes et tous nos concitoyens devraient être au courant. Quelle astuce formidable et quelle promesse de rendement de pouvoir acheter 2 000 actions, plutôt que 1 000, à une valeur nominale de 50 centimes ! Il existe de nombreuses astuces de ce genre.
À un moment donné, il faut bien que nous rendions le dispositif contraignant. Je ne vois pas en quoi ce qui était vertueux l’année dernière, lors de l’examen du projet de loi de finances dans cet hémicycle, où ces mêmes amendements avaient dégagé une large majorité, deviendrait caduc aujourd’hui.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-672 et I-1681.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-466 n’est pas soutenu.
L’amendement n° I-1330 rectifié bis, présenté par MM. Delcros et Laugier, Mme N. Goulet, MM. Courtial et Henno, Mme Sollogoub, M. Menonville, Mmes Billon et Housseau, MM. Duffourg et Canévet, Mmes Vermeillet et Antoine, M. Longeot et Mme Saint-Pé, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
somme constituée par le montant de la réduction de capital et une fraction des sommes qui revêtent sur le plan comptable le caractère de primes liées au capital
par les mots :
valeur de rachat des titres annulés.
II. – Alinéas 14 à 18
Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :
« Les produits nets des participations touchés au cours d’un exercice par une société mère ou une société qui en remplit les conditions peuvent être retranchés de la valeur de rachat des titres annulés, défalcation faite de la quote-part de frais et charges définie au deuxième alinéa de l’article 216, s’ils ne l’ont pas déjà été pour déterminer le bénéfice imposable au titre de l’impôt sur les sociétés.
« Ces produits s’entendent de :
« a) Ceux mentionnés au premier alinéa de l’article 216 ;
« b) Ceux versés par des sociétés membres d’un groupe à leur société mère, lesquelles remplissent soit les conditions fixées au premier, deuxième, quatrième ou avant-dernier alinéa et au dernier alinéa du I de l’article 223 A, soit les conditions fixées au I de l’article 223 A bis pour être membres d’un même groupe ;
« c) Ceux versés par des sociétés soumises à un impôt équivalent à l’impôt sur les sociétés dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales qui, si elles étaient établies en France, rempliraient avec la société pratiquant une réduction de capital consécutive à une opération de rachat d’actions les conditions mentionnées au b, le cas échéant par l’intermédiaire de sociétés qui, si elles étaient établies en France, rempliraient ces conditions.
« Les produits nets des participations ne peuvent être retranchés deux fois au titre de la détermination du bénéfice imposable au titre de l’impôt sur les sociétés et au titre de la détermination de la valeur de rachat des titres annulés imposable au titre de la taxe sur les réductions de capital résultant de certaines opérations de rachat de leurs propres actions. Il revient à la société mère de déterminer dans quelles proportions respectives ces produits nets sont retranchés du bénéfice net total pour la détermination de son bénéfice imposable au titre de l’impôt sur les sociétés et de la valeur de rachat des titres annulés retenue pour la détermination de l’assiette de la taxe prévue au présent article.
III. – Alinéa 19
Remplacer le chiffre :
8
par le chiffre :
4
IV. – Alinéa 25
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Voilà tout juste un an, dans cet hémicycle, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2024, le groupe Union Centriste avait précisément déposé un amendement tendant à instaurer une taxe sur les rachats d’actions, et ce pour une double raison.
D’une part, la contrainte financière était telle qu’il nous fallait trouver des recettes supplémentaires.
D’autre part, il y a eu une explosion du montant des rachats d’actions au cours des dernières années, passé, en trois ans, de 7 milliards à 30 milliards d’euros. Il convenait donc à la fois de prendre une mesure de justice fiscale et de mettre un frein à cette fuite en avant des rachats d’actions, car ces sommes ne bénéficient pas à l’économie réelle.
L’année dernière, l’amendement qui avait été adopté au Sénat n’avait évidemment pas résisté à l’épreuve du 49.3. Aujourd’hui, le Gouvernement fait sienne cette idée et propose une taxe sur les rachats d’actions.
Or, en l’état actuel, le dispositif prévu à l’article 26 est rendu presque inopérant par le choix d’une assiette particulièrement limitée par rapport à la valeur de marché des actions.
Sans citer d’entreprise, je prendrai à mon tour un exemple chiffré : la valeur nominale d’une action d’une grande entreprise bien connue est de 30 centimes, alors que sa valeur de marché est de 655 euros !
Toutefois, le rapporteur général et le ministre l’ont rappelé, nous sommes contraints par les dispositions de la directive européenne mère-filles en ce qui concerne l’imposition des rachats d’actions sur la base de leur valeur de marché.
Cet amendement vise donc à apporter une solution technique pour franchir l’obstacle communautaire, en prévoyant un taux d’imposition proche de ce qui existe aujourd’hui aux États-Unis.
M. le président. L’amendement n° I-411 rectifié bis, présenté par MM. Bilhac, Daubet et Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
réduction de capital
par les mots :
valeur de rachat des titres annulés
II. – Alinéa 19
Remplacer le taux :
8 %
par le taux :
10 %
La parole est à M. Christian Bilhac.
M. Christian Bilhac. Cet amendement vise, d’une part, à asseoir la taxe sur les rachats d’actions sur la valeur de rachat des actions rachetées, et non sur leur valeur nominale, c’est-à-dire comptable, et, d’autre part, à relever le taux de 8 % à 10 %.
La réforme proposée a un double intérêt.
Du point de vue économique, elle favorise l’allocation des trésoreries à la réalisation d’investissements productifs en lieu et place de rachats d’actions.
Du point de vue fiscal, elle vise à mieux prendre en compte l’ampleur de ce phénomène. La part des rachats dans le montant total des sommes distribuées par les entreprises du CAC 40 a ainsi presque doublé en sept ans, passant de 8 % en 2017 à 15 % en 2023. Le montant annuel des rachats a par ailleurs été multiplié par 2,5 sur cette période.
Une telle opération, qui gonfle artificiellement le montant des actions, est aujourd’hui favorisée par une absence de traitement particulier au sein de la fiscalité française.
M. le président. L’amendement n° I-952, présenté par Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mme Briquet, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, Lurel et Ouizille, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
de la réduction de capital
par les mots :
de la valeur de rachat des titres annulés
II. – Alinéa 19
Remplacer le taux :
8 %
par le taux :
4 %
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.
Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement vise à taxer les rachats d’actions à hauteur de 4 % de la valeur de rachat des titres annulés, comme le proposent les membres du groupe Union Centriste.
Les rachats d’actions permettent aux entreprises qui ont des liquidités excédentaires de donner du cash aux actionnaires. Ce mécanisme gonfle artificiellement la valeur des actions restantes, ce qui accroît mécaniquement les bénéfices et, en conséquence, les dividendes versés.
Voilà l’illustration parfaite de la financiarisation de notre économie et de ses dérives. Un tel dispositif privilégie exclusivement les actionnaires, sans apporter de bénéfices réels à l’investissement productif ni à l’emploi. Ces pratiques, qui n’ont pas de justification économique, méritent d’être beaucoup plus fortement encadrées, voire dissuadées, par une taxe additionnelle. Rappelons qu’en France, en 2023, ces rachats d’actions ont représenté 33 milliards d’euros.
Le dispositif proposé par le Gouvernement, qui calcule la taxe sur la valeur nominale, est clairement insuffisant et inefficace. Taxer les actions à leur valeur réelle à 4 % permettrait de générer des recettes fiscales importantes sans pour autant pénaliser les investissements productifs ni affaiblir la compétitivité des entreprises.
Certes, j’ai bien entendu l’argument fondé sur le régime mère-filles, selon lequel il faudrait considérer la différence entre la valeur nominale et la valeur boursière comme des bénéfices cumulés. Cette interprétation ne me convainc pas du tout et j’en défends une autre, d’où le dépôt de cet amendement, parfaitement opérant. Il faut absolument décourager de telles pratiques purement spéculatives, qui privilégient la rente, et réorienter les ressources vers l’économie réelle.
M. le président. L’amendement n° I-1682, présenté par MM. G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Remplacer les mots :
de la réduction de capital
par les mots :
de la valeur de rachat des titres annulés
La parole est à M. Grégory Blanc.