M. Mickaël Vallet. Ce sont toujours les travailleurs qui casquent !
M. Olivier Henno. Mes chers collègues, l’altruisme par le travail est une belle valeur, et je m’étonne que la gauche en soit si éloignée. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. Mickaël Vallet. Elle s’est éloignée des rentiers !
M. Olivier Henno. Cette valeur s’inscrit tout à fait dans la logique du Conseil national de la Résistance (CNR).
M. Mickaël Vallet. Quel courage ! Faire bosser les autres !
M. Olivier Henno. Nous avons parfaitement conscience que la loi de financement de la sécurité sociale et la loi de finances pour 2025 seront le fruit d’un compromis. Et comme l’a dit le Premier ministre, le compromis n’est pas un mot honteux ; c’est un beau mot, tout à fait respectable.
Pour notre part, nous sommes fiers d’appartenir à une majorité sénatoriale qui veut à tout prix éviter le shutdown et qui souhaite faire en sorte que celles et ceux qui sont attachés à la solidarité puissent avoir de l’espoir.
M. Rachid Temal. Démagogie !
M. Mickaël Vallet. Dites-le en français !
M. Olivier Henno. Ni la dette ni l’augmentation des impôts et des charges ne peuvent être la variable d’ajustement de nos budgets, qu’il s’agisse du PLFSS ou du PLF.
Il est totalement irresponsable de transférer le coût de nos dépenses courantes sur les épaules de nos enfants et petits-enfants. Notre pays doit sortir de son addiction à la dépense publique.
En conclusion, je vous offre cette citation de Charles Péguy, qui nous est chère : « Le triomphe des démagogues est passager, mais les ruines de la démagogie sont éternelles. » (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Bravo !
M. Mickaël Vallet. Il n’aurait pas voté ça !
M. Olivier Henno. Nous voterons donc ce PLFSS avec la conscience du devoir accompli, mais avec une ardente lucidité : ce texte n’est qu’une étape avant les réformes structurelles indispensables. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. le président. Il va être procédé, dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement, au scrutin public solennel sur l’ensemble du projet de loi, modifié, de financement de la sécurité sociale pour 2025.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 84 :
Nombre de votants | 336 |
Nombre de suffrages exprimés | 311 |
Pour l’adoption | 202 |
Contre | 109 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Les débats sont mieux tenus au Sénat qu’à l’Assemblée !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l’accès aux soins. Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier pour la richesse de nos débats et pour le calme dans lequel ils se sont déroulés.
Compte tenu de l’enjeu, ce contexte était important. Nous devions garder un cap : vous vous y étiez engagés et vous avez tenu promesse. Il n’était pas simple de trouver un chemin au sein de ce texte quelque peu aride et paramétrique, mais qui, au bout du compte, touche à l’humain et traite de situations sociétales diverses. (M. Rachid Temal s’exclame.)
Je vous remercie donc pour votre contribution à son élaboration, ainsi que, bien évidemment, pour votre vote.
Je veux aussi remercier M. le président de la commission, Mme la rapporteure générale et l’ensemble des rapporteurs de branche.
Plusieurs orateurs ont fait part de leurs souhaits d’évolution. Certes, nous continuons de partager les objectifs du grand projet social de 1945, mais notre société a évolué. (Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Quel aveu !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Dans un contexte de vieillissement de la population et de croissance des besoins en santé, il nous faut travailler au déploiement d’un solide pilier consacré à la prévention, mais aussi à la transformation de notre système de santé, voire à l’évolution de son financement.
Ce sujet dépasse, vous le savez, le simple cadre du PLFSS. Il faudra accorder du temps à la discussion et à la concertation, mais aussi construire une vision pluriannuelle.
M. Mickaël Vallet. Vous ne serez plus là l’an prochain !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. La situation de notre société nous oblige à mener ces réflexions et je sais pouvoir compter sur vous pour y contribuer.
Je conclurai en signalant que c’est aujourd’hui la Journée internationale des aides-soignants. Derrière les bilans budgétaires parfois arides se cachent aussi des hommes et des femmes qui travaillent, au sein du secteur médico-social, au service de nos concitoyens et de notre système de santé. Nous les honorons aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais saluer à mon tour l’esprit de responsabilité qui a été celui de la Chambre Haute lors de l’examen de ce PLFSS.
Je remercie Mme la rapporteure, M. le président de la commission, les rapporteurs de branche, ainsi que l’ensemble des sénateurs, à commencer par les commissaires aux affaires sociales.
Ce texte était exigeant. Il nous plaçait face à une grande responsabilité, celle de répondre à cette question : voulons-nous, pouvons-nous financer durablement notre modèle social compte tenu du déficit social qui se présente à nous ?
Je retiens de nos débats que nous souhaitons collectivement maintenir un niveau élevé de protection sociale, en dépit des besoins qui vont croissant.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez non seulement fait preuve d’esprit de responsabilité par rapport à la proposition initiale du Gouvernement, mais vous avez même fait des propositions complémentaires.
Vous nous avez alertés sur certains points, vous en avez corrigé d’autres. Je pense notamment aux modifications que vous avez apportées, dans le souci de ne pas freiner la dynamique actuelle de l’emploi, à la réforme des allègements généraux de cotisations patronales pour les entreprises voulue par le Gouvernement.
M. Bernard Jomier. Ben voyons !
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Vous avez aussi placé un certain nombre de sujets sur la table ; plus encore, vous en avez délibéré. Je pense, par exemple, à l’augmentation du nombre d’heures de travail, lequel travail est au fondement du financement de notre sécurité sociale.
Ce texte fera-t-il l’objet d’un compromis avec les députés ? Je ne peux que le souhaiter. (Pas nous ! sur les travées du groupe SER.)
La commission mixte paritaire se réunira demain. Le Gouvernement dans son ensemble sera évidemment très attentif à ses conclusions.
Au moment de poursuivre la discussion du projet de loi de finances pour 2025, nous nous tenons à votre disposition pour faire de l’enjeu global du redressement de nos comptes la priorité de cet automne. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures quarante, est reprise à quinze heures cinquante.)
M. le président. La séance est reprise.
3
Candidature à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 a été publiée.
Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
4
Loi de finances pour 2025
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale (projet n° 143, rapport général n° 144, avis nos 145 à 150).
Dans la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier, à l’examen de l’article 3.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE IER (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS (suite)
B. – Mesures fiscales (suite)
Article 3
I. – Le chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une section 0I bis ainsi rédigée :
« Section 0I bis
« Contribution différentielle applicable à certains contribuables titulaires de hauts revenus
« Art. 224. – I. – Il est institué une contribution à la charge des contribuables domiciliés fiscalement en France au sens de l’article 4 B dont le revenu du foyer fiscal tel que défini au II est supérieur à 250 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et à 500 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune.
« II. – Le revenu mentionné au I s’entend du revenu fiscal de référence défini au 1° du IV de l’article 1417, diminué du montant des abattements mentionnés au a bis du même 1°, autres que ceux mentionnés aux 1 ter ou 1 quater de l’article 150-0 D, des bénéfices exonérés mentionnés au b du même 1° du IV de l’article 1417, et des plus-values mentionnées au I de l’article 150-0 B ter pour lesquelles le report d’imposition expire.
« Pour la détermination du revenu mentionné au présent II, les revenus qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d’être recueillis annuellement et dont le montant dépasse la moyenne des revenus nets d’après lesquels le contribuable a été soumis à l’impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, sont retenus pour le quart de leur montant. Pour l’appréciation de la condition relative au montant, et en cas de modification de la situation de famille du contribuable au cours de l’année d’imposition ou des deux années précédentes, les règles prévues au 2 du II de l’article 223 sexies sont applicables en retenant, pour chaque année, le revenu mentionné au présent II.
« III. – La contribution mentionnée au I est égale à la différence, lorsqu’elle est positive, entre :
« 1° le montant résultant de l’application d’un taux de 20 % au revenu défini au II ;
« 2° et le montant résultant de la somme de l’impôt sur le revenu et de la contribution prévue à l’article 223 sexies tels que définis au IV, ainsi que des prélèvements libératoires de l’impôt sur le revenu mentionnés au c du 1° du IV de l’article 1417, majoré de 1 500 € par personne à charge au sens des articles 196 à 196 B et de 12 500 € pour les contribuables soumis à imposition commune.
« IV. – L’impôt sur le revenu mentionné au 2° du III est majoré de l’avantage en impôt procuré par les réductions d’impôt prévues à l’article 199 quater B, à l’article 199 undecies B, à l’exception des vingt-sixième à dernier alinéas du I, à l’article 238 bis et à l’article 107 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, ainsi que de l’avantage en impôt procuré par les crédits d’impôt prévus à l’article 200 undecies, aux articles 244 quater B à 244 quater W et aux articles 27 et 151 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 et par les crédits d’impôt prévus par les conventions fiscales internationales, dans la limite de l’impôt dû.
« La contribution mentionnée au 2° du III est déterminée sans qu’il soit fait application du 1 du II de l’article 223 sexies.
« V. – Toutefois, lorsque le revenu mentionné au II est inférieur ou égal à 330 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et à 660 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune, le montant résultant de l’application du 1° du III est diminué de la différence, lorsqu’elle est positive, entre ce montant et 82,5 % de la différence entre ce revenu et 250 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés ou 500 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune.
« VI. – La contribution est déclarée, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes garanties et sanctions qu’en matière d’impôt sur le revenu. »
II. – Le montant de l’impôt sur le revenu mentionné au 2° du III de l’article 224 du code général des impôts est également majoré de l’avantage en impôt procuré par les réductions d’impôt et, dans la limite de l’impôt dû, des crédits d’impôt prévus par :
1° les articles 199 decies E, 199 decies EA, 199 decies F, 199 decies G, 199 decies I, 199 terdecies-0 B, 199 sexvicies et 199 septvicies du même code ;
2° les articles 199 terdecies-0 A, 199 terdecies-0 A bis, 199 terdecies-0 A ter, 199 terdecies-0 AA, 199 terdecies-0 AB et 199 terdecies-0 C du même code, à raison des versements effectués au titre de souscriptions réalisées jusqu’au 31 décembre 2024 ;
3° les articles 199 undecies A, les vingt-sixième à dernier alinéas du I de l’article 199 undecies B, les articles 199 undecies C et 199 novovicies du même code, à raison des investissements réalisés jusqu’au 31 décembre 2024 ;
4° les articles 199 duovicies, 200 quater A et 200 quater C du même code, à raison des dépenses payées jusqu’au 31 décembre 2024 ;
5° l’article 199 tervicies du même code, à raison des dépenses payées et des souscriptions réalisées jusqu’au 31 décembre 2024 ;
6° l’article 199 tricies du même code, à raison des logements donnés en location dans le cadre d’une des conventions mentionnées aux articles L. 321-4 ou L. 321-8 du code de la construction et de l’habitation dont la date d’enregistrement de la demande de conventionnement par l’Agence nationale de l’habitat est intervenue au plus tard le 31 décembre 2024 ;
7° l’article 200 quindecies du même code à raison des opérations forestières réalisées jusqu’au 31 décembre 2024.
III. – A. – Les I et II sont applicables à compter de l’imposition des revenus de l’année 2024 et jusqu’à l’imposition des revenus de l’année 2026.
B. – Pour l’imposition des revenus de l’année 2024, les revenus soumis aux prélèvements libératoires mentionnés au c du 1° du IV de l’article 1417 du code général des impôts ne sont pas pris en compte pour la détermination du revenu défini au II de l’article 224 du même code et ces prélèvements libératoires ne sont pas retenus pour déterminer le montant défini au 2° du III de l’article 224 du même code.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 3 du projet de loi de finances pour 2025 introduit la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR).
Comme vous le savez, la commission des finances a recommandé l’adoption de cette contribution, qui prendra la forme d’un filet de rattrapage fiscal.
La situation de nos finances publiques impose en effet de trouver de nouvelles recettes, pourvu qu’elles soient ciblées, temporaires et exceptionnelles.
Pour autant, je voudrais souligner deux points d’attention qui expliqueront les avis de la commission sur les amendements portant sur cet article.
D’une part, ce mécanisme, qui ne comprend pas moins de quatre dispositifs de lissage de l’entrée dans l’impôt et qui prend en compte le retraitement de dizaines de dépenses fiscales, est particulièrement complexe, pour ne pas dire illisible, monsieur le ministre.
Dès lors, supprimer des pans entiers de cet article – c’est l’objet de plusieurs amendements – pourrait entraîner des effets de bord difficiles à évaluer.
D’autre part, le rendement espéré de la contribution différentielle, qui est évalué à ce stade à 2 milliards d’euros, me paraît entouré d’incertitudes, car il faut toujours se méfier des effets d’éviction.
Pour ces raisons, je serai défavorable aux amendements visant à ajouter de nouvelles dérogations qui auraient pour but de minorer l’assiette de cette contribution.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, sur l’article.
Mme Isabelle Briquet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les mécanismes d’optimisation fiscale et les possibilités offertes à certains contribuables très aisés de minorer leur base imposable ont parfois pour conséquence de faire supporter aux ménages les moins favorisés une charge fiscale proportionnellement plus importante que certains contribuables aisés.
Dans ce contexte, instaurer une contribution ciblant les revenus les plus élevés apparaît comme un signal fort en faveur d’une fiscalité plus équitable. Néanmoins, cet article 3 soulève plusieurs points de réflexion.
Tout d’abord, ce dispositif est temporaire. Il semble essentiel de réfléchir à la pérennisation d’un mécanisme similaire, qui pourrait, une fois les trois années écoulées, prendre la forme d’un filet fiscal garantissant un taux minimum d’imposition effectif pour les plus fortunés, en fonction des dispositifs d’optimisation auxquels ils pourraient avoir recours.
Ensuite, le choix d’un taux de contribution fixé à 20 % peut légitimement faire naître des doutes. En effet, ce taux semble entériner une forme de régressivité de l’impôt sur les revenus les plus élevés.
Prenons un exemple concret. Une personne seule dont le revenu fiscal de référence s’élève à 250 000 euros par an devrait en théorie, selon le barème de l’impôt sur le revenu, être imposée au taux moyen effectif non pas de 20 %, comme il est ici proposé, mais de 35,86 %.
On le voit bien : si ce dispositif va dans le sens d’une fiscalité plus juste, il paraît clairement perfectible.
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, sur l’article.
M. Thierry Cozic. Le présent article établit pendant trois ans une contribution temporaire sur les Français dont le revenu annuel dépasse 250 000 euros en 2024, 2025 et 2026.
Après un imbroglio sur le plafonnement déclenchant la contribution, cet article s’apparente à une prise en compte salutaire des différentes études, notamment celle de l’Institut des politiques publiques (IPP), qui pointent le fait que les plus riches sont soumis à un taux réel particulièrement faible d’impôt sur le revenu.
Cette mesure, qui pourrait rapporter 2 milliards d’euros par an, pour un total de 6 milliards d’euros sur trois ans, concernerait 24 300 foyers.
Le taux de 20 % suscite une interrogation légitime, tant il revient en quelque sorte à reconnaître et à accepter la régressivité de l’impôt sur le revenu pour les tranches les plus élevées.
Par ailleurs, puisque cette contribution revient à reconnaître les défauts de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), il est particulièrement surprenant qu’elle soit temporaire. Cela revient à admettre et à accepter que les mécanismes d’imposition de droit commun retrouvent leur inefficacité à imposer les plus riches à compter de 2027.
En outre, cet article rate largement sa cible. Il s’agit moins d’un problème de réduction de l’impôt, une fois le calcul du montant brut d’impôt effectué, que d’un problème d’effritement de l’assiette sur laquelle les foyers les plus riches sont imposés.
À cet égard, l’article 3 n’apporte aucune réponse. Pis, le dispositif prévoit que les revenus qui ne peuvent être recueillis annuellement sont retenus pour le quart de leur montant. Cette disposition, qui concerne les revenus irréguliers, et donc exceptionnels, permettra à de nombreuses personnes imposables de largement minorer leur base, et donc leur impôt.
Vous l’aurez compris, en instaurant un dispositif temporaire portant sur les revenus des années 2024 à 2026, cet article est soumis à la même critique que l’article 11 : les contribuables concernés figurent parmi ceux qui sont le plus en mesure de décider de l’année dans laquelle ils touchent leurs revenus. Dès lors, il leur sera relativement facile de contourner cette contribution, au moins pour partie.
Pour pallier ces nombreuses lacunes, nous vous invitons à envisager sérieusement l’adoption des amendements que nous vous proposerons sur cet article.
M. le président. Je suis saisi de vingt-six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-933 rectifié, présenté par Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
Le revenu du foyer fiscal tel que défini au II est supérieur à 250 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et à 500 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune
par les mots :
la valeur nette taxable du patrimoine est supérieure à 100 000 000 €
II. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La valeur nette taxable du patrimoine est définie comme la valeur des biens, droits et valeurs imposables déterminée suivant les règles en vigueur en matière de droits de mutation par décès.
III. – Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
IV. – Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° le montant résultant de l’application d’un taux de 1 % à la valeur nette taxable du patrimoine tel que définie au I ; »
V. – Alinéa 9
Après les mots :
de l’article 1417
Supprimer la fin de cet alinéa.
VI. – Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
VII. – Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
VIII. – Alinéas 22 et 23
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.
Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement tend à instaurer une contribution minimale de 1 % sur les patrimoines nets supérieurs à 100 millions d’euros.
Regardons les faits. Selon l’économiste Thomas Piketty, les 500 plus grandes fortunes françaises ont vu leur richesse être multipliée par six depuis 2010 : en treize ans seulement, celle-ci est passée de 200 milliards d’euros à 1 200 milliards.
Ces patrimoines, dont Gabriel Zucman évalue le rendement moyen à 8 %, continuent de croître à un rythme impressionnant. Une contribution de 1 % sur leur valeur nette ne ferait que réduire cet enrichissement à 7 % par an. Il s’agit non pas d’appauvrir ces personnes, mais simplement de leur demander une contribution équitable.
Disons-le, mes chers collègues, les ultrariches échappent largement à l’impôt, car ils se versent peu de revenus, préférant accumuler leurs richesses dans des holdings, où celles-ci restent très peu taxées.
Le résultat est clair et scandaleux : selon l’Institut des politiques publiques, même en incluant l’impôt sur les sociétés, les milliardaires français contribuent deux fois moins – vous avez bien entendu ! – que les autres contribuables.
La France est devenue, selon Gabriel Zucman, « un paradis fiscal » pour les milliardaires. Une telle situation est intenable : l’égalité devant l’impôt est rompue, tandis que les finances publiques sont privées de ressources indispensables. Voter cet amendement est une question de justice fiscale.
M. le président. L’amendement n° I-795 rectifié, présenté par Mmes Blatrix Contat et Bélim, M. Bourgi, Mme Briquet, MM. Cardon et Chantrel, Mme Daniel, MM. Fagnen, Féraud et Kerrouche, Mmes Le Houerou et Monier, MM. Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert et MM. Temal et Tissot, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
le revenu du foyer fiscal tel que défini au II est supérieur à 250 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et à 500 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune
par les mots :
la valeur nette taxable du patrimoine est supérieure à 100 000 000 € ».
II. – Après l’alinéa 4
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
La valeur nette taxable du patrimoine est définie comme la valeur des biens, droits et valeurs imposables déterminée suivant les règles en vigueur en matière de droits de mutation par décès. Sont notamment incluses les parts ou les actions d’une société dont l’activité principale est industrielle, commerciale, au sens des articles 34 et 35, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès, entre vifs ou, en pleine propriété, à un fonds de pérennité mentionné à l’article 177 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.
Est considérée comme une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale l’exercice par une société d’une activité de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier. »
III. – Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
IV. – Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° le montant résultant de l’application d’un taux de 0,5 % à la valeur nette taxable du patrimoine tel que définie au I ; »
V. – Alinéa 9
Après les mots :
de l’article 1417
Supprimer la fin de cet alinéa.
VI. – Alinéa 10.
Supprimer cet alinéa.
VII. – Alinéa 12.
Supprimer cet alinéa.
VIII. – Alinéas 22 et 23.
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.