Sommaire

Présidence de M. Didier Mandelli

Secrétaires :

Mme Nicole Bonnefoy, M. Philippe Tabarot.

1. Procès-verbal

2. Loi de finances pour 2025. – Discussion d’un projet de loi

Discussion générale

M. Antoine Armand, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie

M. Laurent Saint-Martin, ministre chargé du budget et des comptes publics

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances

M. Claude Raynal, président de la commission des finances

Question préalable

Motion n° I-1541 de M. Pascal Savoldelli. – M. Pierre Barros ; M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances ; M. Laurent Saint-Martin, ministre ; M. Pascal Savoldelli ; M. Emmanuel Capus ; M. Laurent Saint-Martin, ministre. – Rejet par scrutin public n° 77.

Discussion générale (suite)

M. Raphaël Daubet

M. Michel Canévet

M. Pascal Savoldelli

Mme Ghislaine Senée

M. Thierry Cozic

M. Aymeric Durox

M. Emmanuel Capus

Mme Christine Lavarde

M. Georges Patient

M. Bernard Delcros

Mme Frédérique Espagnac

M. Stéphane Sautarel

M. Vincent Capo-Canellas

Mme Florence Blatrix Contat

M. Olivier Rietmann

M. Jean-Baptiste Olivier

M. Antoine Armand, ministre

Clôture de la discussion générale.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert

3. Loi de finances de fin de gestion pour 2024. – Adoption d’un projet de loi modifié

Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

Discussion générale

M. Laurent Saint-Martin, ministre chargé du budget et des comptes publics

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances

M. Jean-Marie Mizzon

M. Pascal Savoldelli

Mme Ghislaine Senée

Mme Isabelle Briquet

M. Joshua Hochart

Mme Vanina Paoli-Gagin

M. Stéphane Sautarel

M. Georges Patient

M. Raphaël Daubet

M. Vincent Delahaye

M. Jean-Baptiste Olivier

Clôture de la discussion générale.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances

Article liminaire

M. Vincent Delahaye

Adoption de l’article.

Première partie

Article 1er

Amendement n° 11 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 2

Amendement n° 12 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 2

Amendement n° 2 rectifié de M. Simon Uzenat. – Rejet.

Amendement n° 5 rectifié de M. Arnaud Bazin. – Retrait.

Amendements identiques nos 6 rectifié de M. Arnaud Bazin, 8 de M. Thierry Cozic et 14 de Mme Ghislaine Senée. – Retrait de l’amendement n° 6 rectifié ; rejet des amendements nos 8 et 14.

Amendements identiques nos 9 de M. Thierry Cozic et 13 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet des deux amendements.

Suspension et reprise de la séance

Article 3 et état A.

Amendement n° 28 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’ensemble de l’article et de l’état annexé, modifié.

Vote sur l’ensemble de la première partie

Adoption de l’ensemble de la première partie, modifié.

Seconde partie

Article 4 et état B

Amendement n° 15 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet.

Amendement n° 19 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet.

Amendement n° 17 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet.

Amendement n° 18 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet.

Amendement n° 22 de M. Vincent Capo-Canellas. – Retrait.

Amendements identiques nos 20 rectifié quater de M. Patrick Chaize et 24 rectifié ter de Mme Denise Saint-Pé. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 27 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 23 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendement n° 26 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 1 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 21 de M. Arnaud Bazin. – Retrait.

Amendement n° 25 de M. Bernard Delcros. – Adoption.

Amendement n° 16 de Mme Ghislaine Senée. – Rejet.

Adoption de l’ensemble de l’article et de l’état annexé, modifié.

Article 5 et état C – Adoption.

Article 6 et état D – Adoption.

Demande de coordination

Demande de coordination de l’article liminaire ainsi que de l’article 3 et de l’état A. – M. Laurent Saint-Martin, ministre ; M. Claude Raynal, président de la commission des finances. – Adoption.

Suspension et reprise de la séance

Article liminaire (pour coordination)

Amendement n° COORD-1 du Gouvernement. – Adoption.

Article 3 (pour coordination)

Amendement n° COORD-2 du Gouvernement. – Adoption.

Vote sur l’ensemble

Adoption, par scrutin public n° 78, du projet de loi, modifié.

4. Loi de finances pour 2025. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Article liminaire

Amendement n° I-358 rectifié de M. Vincent Capo-Canellas, repris par M. Grégory Blanc sous le n° I-358 rectifié bis. – Rejet.

Amendement n° I-882 rectifié quater de M. Vincent Louault. – Retrait.

M. Vincent Delahaye

Adoption de l’article.

Première partie

Article 40 et participation de la France au budget de lUnion européenne

M. Jean-Marie Mizzon, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes

M. Olivier Henno

M. Pierre Barros

M. Jacques Fernique

Mme Florence Blatrix Contat

Mme Vanina Paoli-Gagin

M. Alain Cadec

M. Georges Patient

M. Michel Masset

M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe

Article 40

Amendement n° I-566 de M. Joshua Hochart. – Rejet.

Amendement n° I-172 de Mme Nathalie Goulet. – Rejet.

Adoption, par scrutin public n° 79, de l’article.

Article 1er – Adoption.

Après l’article 1er

Amendement n° I-1930 rectifié bis de M. Stéphane Sautarel. – Retrait.

Article 2

Amendement n° I-1666 de M. Grégory Blanc. – Rejet.

Amendement n° I-652 rectifié de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° I-902 de M. Thierry Cozic. – Rejet.

Amendement n° I-653 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendements identiques nos I-913 rectifié de M. Thierry Cozic, I-1095 rectifié de Mme Guylène Pantel et I-1433 rectifié de M. Frédéric Buval. – Rejet des trois amendements.

Adoption de l’article.

5. Modification de l’ordre du jour

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Dominique Théophile

6. Mise au point au sujet d’un vote

7. Loi de finances pour 2025. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Après l’article 2

Amendement n° I-654 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° I-892 rectifié ter de M. Xavier Iacovelli. – Rejet.

Amendement n° I-451 rectifié ter de M. Xavier Iacovelli. – Rejet.

Amendement n° I-655 de M. Pascal Savoldelli et sous-amendement n° I-2222 de M. Xavier Iacovelli. – Rejet du sous-amendement et de l’amendement.

Amendement n° I-1523 rectifié bis de M. Pierre Jean Rochette. – Retrait.

Amendement n° I-616 rectifié de M. Aymeric Durox. – Rejet.

Amendement n° I-676 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° I-62 rectifié bis de Mme Nathalie Goulet. – Rejet.

Amendements identiques nos I-136 rectifié bis de Mme Nathalie Goulet et I-1867 rectifié bis de M. Michel Canévet. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° I-556 rectifié de M. Joshua Hochart. – Rejet.

Amendement n° I-615 rectifié de M. Aymeric Durox. – Rejet.

Amendement n° I-1846 rectifié de M. Michel Canévet. – Retrait.

Amendement n° I-98 rectifié de Mme Nathalie Goulet. – Retrait.

Amendement n° I-1983 rectifié bis de Mme Frédérique Puissat. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° I-1845 rectifié de M. Michel Canévet. – Retrait.

Amendement n° I-1615 de M. Vincent Delahaye. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° I-494 rectifié bis de M. Victorin Lurel. – Rejet.

Amendement n° I-495 rectifié bis de M. Victorin Lurel. – Rejet.

Amendement n° I-565 rectifié de M. Joshua Hochart. – Rejet.

Amendement n° I-619 rectifié de M. Aymeric Durox. – Rejet.

Amendement n° I-657 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° I-1847 rectifié de M. Michel Canévet. – Retrait.

Amendement n° I-773 rectifié ter de M. Franck Dhersin. – Retrait.

Amendement n° I-173 rectifié de Mme Christine Lavarde. – Retrait.

Amendements identiques nos I-86 rectifié bis de M. Antoine Lefèvre, I-635 rectifié bis de Mme Christine Lavarde et I-774 rectifié quater de M. Franck Dhersin. – Rejet, par scrutin public n° 80, des trois amendements.

Amendement n° I-1487 rectifié de Mme Solanges Nadille. – Retrait.

Amendement n° I-1388 rectifié bis de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Rejet.

Amendement n° I-618 rectifié de M. Aymeric Durox. – Rejet.

Amendement n° I-1111 rectifié de M. Yan Chantrel. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° I-1113 rectifié de M. Yan Chantrel. – Rejet.

Amendement n° I-1518 rectifié bis de M. Bernard Delcros. – Rejet.

Amendement n° I-1093 rectifié de Mme Guylène Pantel. – Retrait.

Amendement n° I-1432 rectifié de M. Frédéric Buval. – Rejet.

Amendements identiques nos I-397 rectifié de M. Éric Gold, I-918 rectifié de M. Thierry Cozic et I-1670 rectifié de M. Grégory Blanc. – Rejet, par scrutin public n° 81, des trois amendements.

Amendement n° I-685 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° I-89 rectifié de M. Antoine Lefèvre. – Rejet.

Amendement n° I-914 rectifié de Mme Viviane Artigalas. – Rejet.

Amendement n° I-1180 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendement n° I-1379 rectifié de Mme Annick Billon. – Retrait.

Amendements identiques nos I-695 rectifié de M. Pascal Savoldelli et I-906 de M. Thierry Cozic. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° I-1838 rectifié de M. Michel Canévet. – Rejet.

Amendement n° I-1112 rectifié de M. Yan Chantrel. – Rejet.

Amendement n° I-1596 rectifié de Mme Sylvie Vermeillet. – Rejet.

Amendement n° I-1598 rectifié de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.

Amendement n° I-1907 rectifié bis de Mme Agnès Evren. – Retrait.

Amendement n° I-458 de M. Christopher Szczurek. – Rejet.

Amendement n° I-558 de M. Joshua Hochart. – Rejet.

Amendement n° I-1990 de Mme Monique de Marco. – Retrait.

Amendement n° I-1096 rectifié bis de Mme Guylène Pantel. – Rejet.

Amendements identiques nos I-755 rectifié de M. Jean-Jacques Michau, I-819 rectifié bis de M. Christian Redon-Sarrazy et I-1181 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet des trois amendements.

Suspension et reprise de la séance

M. Claude Raynal, président de la commission des finances

Amendement n° I-696 rectifié de M. Pascal Savoldelli. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° I-915 rectifié bis de Mme Isabelle Briquet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendements identiques nos I-132 de Mme Mélanie Vogel et I-1110 rectifié de M. Yan Chantrel. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° I-1989 de Mme Monique de Marco. – Rejet.

Amendements identiques nos I-477 rectifié ter de M. Guislain Cambier et I-1856 rectifié ter de M. Michel Canévet. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° I-1637 rectifié de M. Guillaume Gontard. – Rejet.

Amendement n° I-656 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° I-2020 de Mme Marie-Do Aeschlimann. – Non soutenu.

Amendement n° I-1247 rectifié de Mme Marion Canalès. – Rejet.

Amendement n° I-1246 rectifié de Mme Marion Canalès. – Rejet.

Amendement n° I-1245 rectifié bis de Mme Marion Canalès. – Rejet.

Amendement n° I-1179 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendements identiques nos I-115 rectifié bis de Mme Christine Lavarde, I-121 rectifié quinquies de M. Vincent Louault, I-253 rectifié quinquies de M. Yves Bleunven et I-285 rectifié quinquies de M. Gilbert Favreau. – Retrait de l’amendement n° I-115 rectifié bis ; rejet, par scrutin public n° 82, des amendements nos I-121 rectifié quinquies, I-253 rectifié quinquies et I-285 rectifié quinquies.

Amendement n° I-1009 de Mme Laurence Rossignol. – Rejet par scrutin public n° 83.

Amendement n° I-830 rectifié ter de Mme Annick Billon. – Rejet.

Amendements identiques nos I-1133 rectifié bis de Mme Laure Darcos, I-1325 rectifié bis de M. Raphaël Daubet et I-1647 rectifié bis de Mme Patricia Schillinger. – Rejet des trois amendements.

Amendements identiques nos I-849 rectifié ter de M. Emmanuel Capus, I-1163 rectifié ter de Mme Martine Berthet et I-1250 rectifié sexies de M. Olivier Rietmann. – Adoption des trois amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° I-850 rectifié ter de M. Emmanuel Capus. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° I-399 rectifié quater de M. Christian Bilhac. – Rejet.

Amendement n° I-155 rectifié quater de Mme Sabine Drexler. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° I-1333 rectifié de M. Claude Raynal. – Rejet.

Renvoi de la suite de la discussion.

8. Ordre du jour

Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire

compte rendu intégral

Présidence de M. Didier Mandelli

vice-président

Secrétaires :

Mme Nicole Bonnefoy,

M. Philippe Tabarot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

 
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Discussion générale (interruption de la discussion)

Loi de finances pour 2025

Discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale (projet n° 143, rapport n° 144, avis nos 145 à 150).

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Antoine Armand, ministre de léconomie, des finances et de lindustrie. Monsieur le président, monsieur le ministre chargé du budget et des comptes publics, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général du budget, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, j’ai l’honneur de vous présenter, avec mon collègue Laurent Saint-Martin, le projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2025. Vous connaissez le contexte politique exceptionnel dans lequel ce projet de budget a été préparé et vous est présenté.

Vous connaissez également le contexte économique international : l’activité mondiale se redresse après la succession de chocs économiques qu’elle a subis, de l’apparition du covid-19 à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. La croissance mondiale devrait ainsi se situer autour de 3 % en 2024 et en 2025.

Disons-le clairement, dans cette conjoncture, l’Union européenne court un risque de décrochage, notamment en termes de productivité et de compétitivité, comme l’a montré Mario Draghi dans le rapport qu’il a remis à la Commission européenne. La compétition mondiale fait peser un risque existentiel sur l’industrie et sur le tissu économique de notre continent.

Les récents résultats électoraux aux États-Unis risquent d’accroître encore les tensions, notamment commerciales. Ils nous appellent à suivre un agenda européen centré sur l’investissement et la compétitivité et à cesser de faire preuve de naïveté face à nos partenaires commerciaux, qui sont également nos concurrents. Nous devons exiger la réciprocité dans nos accords et, parfois, assumer une préférence européenne.

M. Antoine Armand, ministre. C’est tout le sens de l’agenda que le Premier ministre a défini pour ce gouvernement.

La France, quant à elle, a de solides arguments à faire valoir.

L’activité se maintient : le taux de croissance pour 2024 devrait s’élever à 1,1 %, soit plus que la moyenne de la zone euro, qui est de 0,8 % ; l’inflation est en cours de stabilisation sous les 2 % ; le taux de chômage est proche de son niveau le plus bas depuis quarante ans.

Dans le secteur industriel, 130 000 emplois nets ont été créés entre 2017 et la fin de 2023 et les dirigeants d’entreprises ont continué ces dernières années d’avoir confiance en notre pays, malgré l’incertitude à laquelle nous sommes toujours exposés.

Sur le plan financier, notre situation est préoccupante, comme nous en avons déjà fait le constat ensemble lors du débat sur le plan budgétaire et structurel national à moyen terme et sur l’orientation des finances publiques. En 2024, la dette publique devrait s’établir à 3 300 milliards d’euros, soit 113 % du PIB. Cette situation résulte des déficits successifs : notre pays n’a pas adopté un budget à l’équilibre depuis 1974. Depuis cette date, la dette française a augmenté de près de 100 points de PIB.

Ce niveau de dette affecte notre souveraineté, notre crédibilité et notre capacité à aborder l’avenir de manière concrète : nous paierons bientôt plus de 50 milliards d’euros d’intérêts par an. Je m’arrête un instant sur ce chiffre : il signifie que sur 8 euros dépensés par l’État, 1 euro sera bientôt consacré au seul remboursement des intérêts de la dette. Est-ce réellement ce que nous voulons ?

En outre, le coût de la dette continue d’augmenter. Notre taux d’emprunt, qui était supérieur de 0,5 point environ à celui de l’Allemagne en début d’année, a augmenté depuis de 0,3 point, ce qui représentera environ 10 milliards d’euros supplémentaires de charge de la dette à une échéance de dix ans. Ce sont 10 milliards d’euros que nous ne consacrerons pas à nos dépenses prioritaires : à nos services publics, à l’amélioration de notre système éducatif et de santé, à la lutte contre le dérèglement climatique ou encore à la protection de notre emploi et de notre industrie.

Mesdames, messieurs les sénateurs, on trouve toujours des justifications pour augmenter les dépenses. Ce n’est jamais le bon moment pour faire des économies… Il est toujours tentant de laisser le problème à ses successeurs.

Aujourd’hui, nous sommes à la croisée des chemins. Soit nous décidons, collectivement et au-delà des clivages partisans, de réduire nos déficits. Il s’agit d’un processus long et difficile, exigeant des efforts structurants et structurels pour le pays, sur les dépenses publiques, sur le train de vie de l’État et sa gestion, …

M. Albéric de Montgolfier. Nous avons déjà entendu cela…

M. Antoine Armand, ministre. … soit nous décidons de remettre à plus tard cet effort nécessaire, en prétextant, une fois de plus et non sans une certaine légitimité, l’urgence de réaliser telle ou telle dépense. Alors, ce sera depuis l’extérieur, de façon beaucoup plus radicale et sévère, que l’austérité nous sera imposée.

Le texte que nous vous soumettons aujourd’hui est perfectible, comme le rappelle le Premier ministre devant cette assemblée dès qu’il en a l’occasion. Aussi comptons-nous sur les discussions qui auront lieu dans cet hémicycle plus que sur toutes autres pour en améliorer le contenu. Néanmoins, nous pouvons et nous devons partager l’objectif de ramener le déficit public à 5 % du PIB à l’horizon 2025.

Nous devons à notre pays de respecter la trajectoire que nous avons soumise à l’Union européenne, laquelle prévoit que nous repassions en 2029 sous la barre des 3 % de déficit public. Ce taux est l’horizon de désendettement de notre pays et donc de renforcement de notre souveraineté financière nationale.

J’insiste sur le fait que cet objectif doit être atteint en priorité par des baisses de dépenses. Notre dépense publique étant devenue la plus importante de l’Union européenne, sa réduction constitue l’essentiel de l’effort qui vous est aujourd’hui proposé. Il nous faut maîtriser la dépense et l’emploi public, simplifier le fonctionnement de l’État, réduire son train de vie et supprimer les doublons inutiles.

Bien sûr, nous ne pourrons pas tout faire cette année et nous lancerons, mon collègue Laurent Saint-Martin et moi-même, des revues de dépenses régulières afin d’améliorer l’efficacité de nos dépenses publiques d’au moins 8 milliards d’euros – je dis bien : « au moins », car je compte sur votre engagement – d’ici à 2027. Toutes les administrations seront mobilisées et mises à contribution. Les niches fiscales et sociales seront évidemment visées par ces revues de dépenses.

Laurent Saint-Martin y reviendra, mais cette amélioration de l’efficacité de la dépense publique devra s’accompagner d’un renforcement de la lutte contre les fraudes aux finances publiques, qu’il s’agisse de fraude fiscale, sociale, ou douanière. Nul effort n’est supportable dès lors qu’il est perdu au profit de ceux qui ne respectent pas les règles et le pacte républicain.

Comme l’a annoncé le Premier ministre dans son discours de politique générale, les prélèvements obligatoires doivent rester exceptionnels, temporaires et ciblés. Ces prélèvements, dont vous avez eu l’occasion de débattre en commission des finances, ont été conçus pour affecter le moins possible la croissance et pour poursuivre la décarbonation de notre économie.

Ainsi, nous demandons un effort particulier aux quatre cents groupes qui ont la plus forte capacité contributive, c’est-à-dire ceux qui sont bénéficiaires et dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros. Je tiens de nouveau à saluer les représentants des entreprises qui consentent à faire cet effort, dans un esprit de responsabilité, à condition – ai-je besoin de le répéter ? – que ces prélèvements soient exceptionnels, temporaires et ciblés.

Nous proposons également de décaler la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui était initialement prévue. Je le redis avec force, le Gouvernement souhaite cette suppression, car les impôts de production, même s’ils ont déjà baissé de 15 milliards d’euros depuis 2017, affectent encore beaucoup trop l’emploi et l’investissement. Leur niveau est sans équivalent à l’échelle européenne. Néanmoins, nous devons rester responsables et, dans le contexte que nous connaissons, force est de constater que nous ne pouvons pas nous permettre de supprimer cette taxe pour le moment.

Mesdames, messieurs les sénateurs, chacun devra contribuer – l’État, les collectivités locales, la sphère sociale –, non pas parce qu’il existerait de bons et de mauvais gestionnaires, certains qui dépensent bien et les autres, mais parce que l’effort à fournir nécessite l’engagement de tous.

Ainsi, la réduction du train de vie de l’État est une condition indispensable pour justifier des prélèvements supplémentaires, même si elle est parfois symbolique, nos compatriotes étant attentifs aux efforts que nous sommes capables de faire.

Elle est aussi une condition indispensable pour justifier des prélèvements supplémentaires afin de ramener le déficit à 5 % d’ici à 2025, dans un pays qui se distingue, malheureusement, en étant le champion des prélèvements obligatoires.

Si nous ne réalisons pas tous un effort de réduction des dépenses publiques, il serait inconcevable de demander une contribution à certains de nos concitoyens et aux grandes entreprises. Pour ma part, je réduis cette année les crédits de mon ministère de plus de 22 %.

Si notre objectif est exigeant, nous ne présentons pas un budget d’austérité. Avant que votre assemblée s’en saisisse pleinement, le texte du Gouvernement a fait progresser la dépense publique de 0,4 % en volume. J’irai même plus loin : ce budget est précisément conçu pour éviter d’avoir à recourir à des mesures d’austérité, comme certains pays ont dû le faire en réduisant de 25 % les salaires des fonctionnaires et en diminuant drastiquement les pensions de retraite. Nous avons, à l’inverse, revalorisé les retraites tout en soutenant l’activité et l’emploi. Nous poursuivrons sur cette lancée en revalorisant les petites retraites, à la demande de certains parlementaires.

Ces dernières semaines, mesdames, messieurs les sénateurs, de nombreuses propositions ont été formulées à l’Assemblée nationale, la plupart visant à augmenter les impôts et les dépenses, au point que le texte final, qui a été heureusement rejeté, prévoyait 34 milliards d’euros de prélèvements obligatoires ! Or il faut faire tout l’inverse, car la France taxe et dépense déjà trop.

En outre, notre pays travaille moins que ses voisins. Il s’agit d’un constat : le taux d’emploi et la durée de travail y sont singulièrement plus faibles. Ce n’est qu’en travaillant plus que nous pourrons continuer de financer notre modèle social, tout en baissant les prélèvements obligatoires.

Je sais que le Sénat a partagé ce constat et l’urgence de remédier à ce problème au cours de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). À cet égard, je salue les propositions constructives qui ont d’ores et déjà émergé des débats. Dans le contexte politique que nous connaissons, et après le rejet du projet de budget par l’Assemblée nationale, le Sénat a plus que jamais une responsabilité majeure ; je ne doute pas que chacun d’entre vous en ait conscience.

Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi à présent de dire un mot sur le soutien à l’emploi et à notre croissance. Notre stratégie de politique économique reste une politique de l’offre. Elle doit tout à la fois nous permettre de réduire notre double dette budgétaire et écologique et de rendre notre modèle économique et social résilient face aux chocs. Mais nous ne casserons pas la croissance et l’emploi ; nous ne renoncerons pas à financer notre modèle social, auquel nous tenons tant ; nous ne ferons pas des entreprises la variable d’ajustement de notre incapacité à réduire les déficits. Diminuons les déficits en commençant par réduire les dépenses !

Nos priorités économiques sont claires : réindustrialiser le pays et atteindre le plein emploi. Vous connaissez les réformes qui ont été menées à cet effet. Je pense à la baisse de la fiscalité pesant sur les entreprises, à la baisse des impôts de production, ou encore à la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).

Continuons de protéger les secteurs d’importance critique ; continuons de réindustrialiser notre économie ; continuons de soutenir au premier chef les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), dont il est trop peu question dans le débat public. Ces dernières représentent pourtant la majorité de l’emploi et sont soumises à un appareil normatif contraignant, ainsi qu’à un important déficit de soutien à l’innovation. C’est d’ailleurs pour cela que le soutien à l’innovation ne change pas d’ordre de grandeur : le crédit d’impôt recherche (CIR) et le crédit d’impôt innovation (C2I) sont maintenus, de même que le seront les exonérations pour les jeunes entreprises innovantes si l’amendement du Gouvernement est adopté.

Notre stratégie consiste toujours à poursuivre la décarbonation de notre outil industriel, car il s’agit de la seule solution pour maintenir des emplois et des sites industriels pérennes dans notre pays. Nous le faisons notamment au travers du plan France 2030 et du crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte (C3IV). Au 15 octobre 2024, soixante-quatre demandes avaient été déposées, pour un montant total de près de 13 milliards d’euros d’investissement.

À cet égard, je salue le travail engagé à l’Assemblée nationale, et qui se poursuivra sans aucun doute au Sénat, ayant permis l’ouverture de 1,55 milliard d’euros de crédits supplémentaires pour décarboner notre industrie et favoriser l’ouverture de nouveaux sites.

Par ailleurs, afin de libérer la croissance et de gagner en compétitivité, dans un monde où les contraintes financières sont extrêmement fortes, la simplification sera la boussole de ce gouvernement ; le Premier ministre l’a d’ailleurs rappelé.

En premier lieu, cette simplification doit intervenir à l’échelle européenne, la production normative étant essentiellement le fait de l’Union européenne. Ces normes doivent être appliquées avec davantage de parcimonie et tenir compte de la capacité des entreprises, en particulier les plus petites d’entre elles, à supporter les chocs normatifs successifs. Les répercussions de ces chocs sont souvent mal évaluées, alors qu’ils pèsent chaque année davantage sur l’activité des entreprises et donc sur l’emploi.

En second lieu, une telle simplification doit être menée à l’échelle nationale. À cet égard, je salue le travail du Sénat sur le projet de loi de simplification de la vie économique, qui doit désormais être examiné par l’Assemblée nationale. Ce texte comporte des propositions concrètes pour que l’appareil français tienne davantage compte des effets de nos normes sur les TPE et PME.

En troisième lieu, la responsabilité budgétaire collective à laquelle nous appelons implique un plus grand souci de transparence et d’exactitude. La situation actuelle exige un renforcement du pilotage de nos finances publiques et une plus grande association de la représentation nationale. Depuis notre prise de poste, Laurent Saint-Martin et moi-même avons donné la priorité à des mesures concrètes en la matière. Nous préparons notamment un plan d’action pour améliorer les capacités de prévision et de suivi de la dépense publique.

Nous avons ainsi installé un comité scientifique, qui rendra des préconisations techniques pour améliorer nos prévisions dans ce nouveau contexte économique. Nous veillerons à ce quoi soit assuré, en lien avec le Parlement, un suivi plus régulier de l’évolution des comptes de l’ensemble des administrations publiques, qu’il s’agisse de l’État, des collectivités territoriales ou de la sécurité sociale. De plus, nous instaurerons un mécanisme d’alerte précoce en cas de dérapage inattendu dans l’année.

En conclusion, mesdames, messieurs les sénateurs, le redressement de nos équilibres budgétaires est l’occasion non seulement d’accroître l’efficacité de notre dépense, mais également de lancer un grand chantier d’amélioration de l’action publique : simplification, réduction du nombre de missions de l’État, soutien aux entreprises qui créent de l’emploi sur tout le territoire national… Il s’agit, en un mot, de nous faire confiance et de faire confiance aux entreprises ! (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je me réjouis d’entamer avec vous aujourd’hui l’examen du projet de loi de finances pour 2025.

Comme vous le savez, conformément à notre Constitution, le rejet de la première partie du texte par l’Assemblée nationale a automatiquement entraîné la transmission au Sénat de la version initiale du projet de loi présenté par le Gouvernement.

En toute franchise, je regrette d’avoir à m’en féliciter. En effet, force est de constater que le socle commun a agi en responsabilité en rejetant une copie qui n’avait plus grand-chose à voir avec le texte initial du Gouvernement.

M. Pascal Savoldelli. Avec le Rassemblement national !

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le fait d’alourdir jusqu’à l’overdose les impôts pesant sur les entreprises et les ménages, de supprimer la contribution de la France au budget de l’Union européenne et de voter en connaissance de cause des centaines d’amendements manifestement contraires à notre Constitution ne constituent pas un projet politique. C’est tout simplement inacceptable et irresponsable !

Le texte du Gouvernement n’est pas parfait, comme l’a reconnu Antoine Armand et comme le Premier ministre l’a répété à plusieurs reprises. Ces derniers jours, à la suite des débats qui ont eu lieu dans et hors de l’hémicycle, des propositions ont été faites pour trouver le chemin d’une juste participation de l’ensemble des agents économiques de notre pays – les entreprises, les collectivités territoriales, les ménages et bien sûr l’État – au redressement des comptes publics.

Je souhaite que nous travaillions ensemble au cours des prochains jours sur la part que doivent prendre les collectivités territoriales à cet effort de redressement. Sachant que ce sujet est particulièrement cher à votre chambre, je souhaite que nous le fassions de façon constructive et dans un esprit de responsabilité au cours des prochains jours.

Par ailleurs, le Gouvernement ne fera pas table rase des débats qui ont eu lieu à l’Assemblée nationale, dont ont émergé des avancées sur plusieurs points importants, que nous reprendrons par voie d’amendements.

Nous devons donc améliorer ce projet de budget, tout en préservant le pouvoir d’achat des Français. C’est la raison pour laquelle nous indexons le barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation. C’est aussi le sens de l’engagement que nous avons pris de faire baisser les factures d’électricité des Français.

De même, nous refusons de renchérir le coût du logement. À cet égard, plusieurs propositions intéressantes émanent de vos travées, dont certaines rejoignent des initiatives dont nous avons débattu à l’Assemblée nationale ; les échanges que nous avons eus en commission l’ont bien démontré.

Enfin, nous améliorerons ce texte en veillant à protéger l’activité économique et la compétitivité. Comme l’a expliqué Antoine Armand, la politique de l’offre est non pas un totem politique, mais la politique du travail et de la création d’emplois. C’est grâce à elle que le taux de chômage a baissé ces dernières années et qu’il est passé sous la barre des 8 %. C’est également grâce à elle que notre croissance est supérieure à celle de nos voisins et devrait atteindre 1,1 % l’année prochaine selon les estimations. Enfin, c’est grâce à elle que des usines rouvrent partout en France et que nous attirons des entreprises étrangères, lesquelles revitalisent nos territoires. Il nous faut poursuivre en ce sens.

Nous pourrons améliorer ce projet de budget pourvu que le cadre de responsabilité fixé par le Gouvernement soit respecté.

Vous le savez, le texte initial du Gouvernement suit une ligne de crête entre, d’un côté, l’exigence de protéger le pouvoir d’achat des Français et les fondamentaux de notre économie et, de l’autre, la nécessité de renouer avec une trajectoire des finances publiques soutenable.

Concrètement, il s’agit d’engager immédiatement un effort de redressement inédit de nos finances publiques. Notre niveau d’endettement et le poids croissant de la charge de la dette exigent que nous agissions de façon urgente.

Aussi proposons-nous un effort de 60 milliards d’euros pour atteindre l’objectif de contenir le déficit public à 5 % du PIB en 2025, ce qui sera une première marche pour le ramener en deçà de 3 % à l’horizon 2029. Il s’agit de la condition sine qua non pour continuer de financer nos services publics, d’investir dans l’avenir et pour retrouver des marges de manœuvre afin de protéger notre Nation face aux crises futures.

On oublie trop souvent que l’État actuel de nos finances publiques résulte directement d’une période de protection de l’ensemble des agents de notre pays, que ce soit l’État, nos entreprises, nos concitoyens ou les collectivités. Aujourd’hui, il nous faut redresser nos comptes publics pour être prêts, demain, à les protéger de nouveau en cas de nouvelle crise.

Voilà l’effort que nous devons réaliser, entre économies budgétaires et contributions fiscales. Il aurait été excessif et déraisonnable de le faire porter de façon démesurée sur l’un ou l’autre pan, car cela aurait emporté des effets récessifs dans les deux cas.

Aussi, j’assume le recours à la fiscalité, mais à trois conditions.

Première condition : la fiscalité doit représenter une part minoritaire de l’effort de redressement des comptes publics. C’est précisément pour cette raison que le ministre de l’économie et moi-même nous sommes fixés une règle d’or pour bâtir ce budget : pour 1 euro de recettes supplémentaires, nous devons réaliser 2 euros d’économies. Il s’agit selon nous de l’équilibre nécessaire pour redresser les comptes sans engendrer d’effet récessif.

Concrètement, nous proposons 40 milliards d’euros de baisses de dépenses, soit les deux tiers de l’effort, contre 20 milliards d’euros de recettes supplémentaires. Si cet équilibre doit évoluer au cours de l’examen du texte par le Sénat, je souhaite que ce soit dans le sens de plus d’économies, quitte à réduire les recettes. Nous ne le répéterons jamais assez : nous refusons le matraquage fiscal, dans un pays où le taux d’imposition est l’un des plus élevés d’Europe.

Deuxième condition : le recours à la fiscalité doit être ciblé et limité aux contribuables à qui nous estimons pouvoir demander un effort de solidarité. Ainsi, il est juste de le demander aux ménages les plus fortunés, comme nous le proposons à l’article 3, qui prévoit une contribution minimale sur les hauts revenus. De même, il est juste de demander un effort fiscal à certaines très grandes entreprises profitables, celles-ci ayant profité de la protection de l’État ces dernières années.

En outre, une fiscalité ciblée doit contribuer à réduire notre dette écologique autant que notre dette financière. C’est pourquoi nous proposons de consolider le malus auto. Cela ne doit pas être perçu comme un gros mot. De même, nous proposons de faire contribuer les personnes qui se déplacent en avion en ciblant bien davantage ceux qui voyagent en classe affaires sur des vols long-courriers que ceux qui prennent l’avion en classe économique par nécessité, comme nos compatriotes ultramarins. Nous en débattrons dans les prochains jours.

J’ajoute que, du côté des dépenses, jamais un budget n’a été aussi vert que celui que nous proposons pour 2025 : les dépenses en faveur de l’environnement s’élèvent à 47 milliards d’euros, soit plus de 3 milliards d’euros de plus qu’en 2024. Par ailleurs, je précise que les recettes de la fiscalité à visée environnementale sont nettement inférieures aux dépenses que nous consacrons à la protection de l’environnement.

Troisième condition : le recours à la fiscalité doit être temporaire. Notre horizon doit rester celui de la prévisibilité fiscale. C’est la condition d’une politique économique efficace. Nous l’avons inscrit clairement dans le texte, qu’il s’agisse des contributions exceptionnelles sur les ménages ou sur les entreprises.

Dans un pays où le taux de prélèvements obligatoires est le plus élevé, notre cap doit d’abord être celui de la réduction de la dépense, puis celui de la réforme structurelle ensuite. C’est pourquoi l’effort demandé doit être exceptionnel et temporaire. Dans un pays qui est aussi champion d’Europe de la dépense publique, nous devons agir sur la baisse de la dépense en faisant des économies ; ce n’est pas un tabou.

En effet, la dégradation de nos finances publiques s’explique par le choix d’augmenter la dépense publique pour protéger nos concitoyens et notre économie. Il s’agissait d’un choix collectif. Celui de dépenser moins doit l’être également.

Nous pouvons être fiers d’avoir maintenu le niveau d’activité et d’avoir évité une importante récession durant la crise du covid, puis d’avoir permis une relance plus efficace que nos voisins. Il nous appartient désormais de nous montrer collectivement responsables en répartissant l’effort entre toutes les administrations publiques.

Tout d’abord, nous demandons des économies aux administrations de sécurité sociale, dont le déficit risque de déraper plus encore. Nous proposons donc dans le PLFSS pour 2025 un coup de frein réel, mais selon nous nécessaire, à la dépense sociale.

Ensuite, nous demandons aux collectivités locales de contribuer à l’effort. Il ne s’agit en aucun cas de les punir, de les montrer du doigt ou de leur faire porter une quelconque responsabilité. Simplement, dès lors que toutes les administrations publiques sont parties prenantes de la dépense publique, toutes doivent prendre part à l’effort, de manière juste et proportionnée.

Les marchés qui financent notre dette ne s’intéressent pas à l’origine de l’endettement ; ils ne regardent que le solde public. Il est donc dans l’intérêt de toutes les administrations publiques et de la Nation dans son ensemble que chacun contribue à l’effort de refinancement.

Au sujet des collectivités, nous avons entendu les alertes des élus locaux et le Premier ministre a d’ores et déjà annoncé qu’il était prêt à modifier l’effort que nous attendons d’elles. Ainsi, nous réduirons significativement la contribution prévue au fonds de précaution et nous nous assurerons que les fonds prélevés seront reversés aux collectivités contributrices.

Par ailleurs, je vous confirme que les mesures relatives au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) n’auront pas d’effet rétroactif. De même, comme cela a été annoncé, nous viendrons en soutien aux départements, sachant pertinemment que beaucoup d’entre eux se trouvent dans une situation financière difficile, en relevant le plafond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

Enfin, nous proposons que l’État et ses opérateurs prennent à leur charge la moitié des économies nécessaires, soit plus de 21,5 milliards d’euros. Comme je l’avais annoncé devant votre commission des finances, nous avons, faute de temps, procédé en deux étapes : nous avons repris les 15 milliards d’euros prévus par les lettres-plafonds du précédent gouvernement, auxquels nous ajoutons, par voie d’amendements, 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur les missions de l’État et de ses opérateurs.

Nous ferons cet effort parce qu’il est nécessaire, ce qui ne nous empêchera pas d’augmenter les budgets de postes que nous considérons comme prioritaires, notamment ceux qui font l’objet d’une loi de programmation. Je pense notamment aux armées, à l’intérieur, à la justice, ou encore à la recherche. Il n’est pas question de transiger sur ces priorités gouvernementales, sur lesquelles le Premier ministre s’est engagé, même si la répartition des crédits est lissée dans le temps pour certaines d’entre elles.

Nous ferons aussi cet effort parce que nous le pouvons. Oui, il est possible de proposer un meilleur service public, pour moins cher. Oui, il est possible de faire mieux avec moins d’effectifs et moins de moyens, à condition de savoir réformer les administrations de l’intérieur de sorte à mieux employer les effectifs et les moyens dont nous disposons.

Dans cette période budgétaire, nous devons aussi assumer, par simple souci de bonne gestion, de mettre fin aux boucliers tarifaires sur l’inflation et sur l’électricité.

Après avoir mis en place des outils de relance efficaces – je pense évidemment, parmi d’autres grandes politiques publiques qui ont fait leurs preuves, au bouclier énergétique, mais il faut aussi citer les aides à l’apprentissage et à l’acquisition de véhicules propres –, à nous d’être responsables et de savoir freiner la dépense publique. Dès lors que ces mesures ont produit leur plein effet, il est temps d’allouer des moyens à de nouvelles priorités. Voilà ce que c’est que la bonne gestion !

Il convient à cet égard de ne pas considérer qu’un bon ministère ou une bonne politique publique ne peuvent être qualifiés comme tels que si et seulement si leur budget est en croissance. C’est faux ! Il faut que nous soyons capables de décélérer le rythme de la dépense pour la réaffecter à d’autres urgences.

De la même manière, ayons le courage de dire qu’il faut adapter le nombre d’emplois publics aux besoins réels. J’ai suivi de près le débat sur le nombre d’enseignants dont notre pays aurait besoin : notre idée n’est évidemment pas de réduire leur capacité à exercer leur métier – au contraire, nous augmentons le taux d’encadrement des élèves. Mais, dès lors qu’il y aura 97 000 élèves de moins à la rentrée 2025, diminuer de 4 000 le nombre de postes est tout simplement une mesure de bonne gestion.

Il est temps que nous fassions preuve de transparence et que nous ayons le courage de dire que les moyens publics, que ce soit en euros ou en équivalents temps plein (ETP), doivent être calibrés pour faire face aux besoins réels de notre pays. Tout cela est, me semble-t-il, de bonne politique.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, il ne me reste plus que trente secondes pour vous dire que ce budget est probablement, dans notre histoire récente, celui qui soulève les enjeux les plus importants.

En effet, si notre pays ne parvient pas à démontrer, comme ses voisins européens l’ont fait, qu’il est capable, après des années de protection inédite et de dépense publique extrêmement importante,…

M. Albéric de Montgolfier. Le « quoi qu’il en coûte », c’était un peu trop !

M. Laurent Saint-Martin, ministre. … de redresser ses finances publiques et de mettre à contribution de façon exceptionnelle, temporaire et ciblée les contribuables qui le peuvent, je crois profondément qu’il continuera à voir la charge de sa dette augmenter sans discontinuer, ce qui viendra grever ses priorités politiques, et qu’il ne sera plus en mesure de protéger ses concitoyens, ses entreprises, ses collectivités, comme il l’a fait ces quatre dernières années.

C’est donc une question de souveraineté et de volonté collective : souhaite-t-on continuer à vivre dans un pays qui protège, qui sait cumuler politique de l’offre et État providence, qui est capable d’accepter l’existence de cycles politiques, au temps de la très haute protection succédant celui du redressement ? Un certain nombre de groupes politiques, ici même, ont eu à assumer cette réalité en leur temps – je pense notamment au groupe socialiste entre 2012 et 2017.

Il est temps de démontrer que nous pouvons continuer à faire le pari de l’emploi, de l’activité, de l’attractivité, tout en redressant nos comptes publics. (MM. Louis Vogel, Raphaël Daubet et Jean-Baptiste Olivier applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Michel Canévet et Louis Vogel applaudissent également.)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, rarement les débats budgétaires auront suscité autant d’attention et de prises de position, souvent très divergentes, dans ce pays. Jamais un tel degré d’incertitude ne les aura entourés.

Évidemment, les contingences de notre vie politique l’expliquent largement. Mais le contexte économique et budgétaire dans lequel nous sommes amenés à nous prononcer l’explique tout autant, car il est à l’origine du contenu même du projet de loi de finances pour 2025.

Pour bien apprécier la situation dans laquelle nous sommes, je nous invite, j’invite les Français, à prendre, dans toute la mesure du possible, un peu de hauteur et de recul. Faute de comprendre la situation économique et budgétaire de notre pays, on ne peut pas comprendre ce budget, on ne peut pas le juger, on ne peut pas le voter.

La France vit certes à crédit depuis cinquante ans, puisqu’elle est en déficit depuis 1975, mais le déficit annuel et la dette, qui s’accumule, ne sont pas en soi un problème, loin de là. Ils nous permettent en effet de préparer l’avenir et de gouverner la France dans le temps long, celui de notre horizon commun.

Cela reste vrai tant que deux limites ne sont pas franchies : celle qui établit, chaque année, que le remboursement de cette dette reste soutenable, et celle qui traduit le fait que les investisseurs veulent bien nous prêter, et dans de bonnes conditions. La règle des 3 % de déficit est certes conventionnelle, mais force est de constater qu’elle est très protectrice, car elle permet, peu ou prou, d’éviter ces deux écueils.

Or que s’est-il passé depuis 2022 ?

En 2022, le déficit public de notre pays était déjà très élevé, puisqu’il s’élevait à 4,8 % du PIB. En 2023, alors que tous nos partenaires européens, soumis au même contexte économique, réduisaient fortement leur déficit, la France, elle, laissait ses comptes se dégrader sérieusement : de 4,8 % de déficit, nous passions à 5,5 %, et ce sans récession, sans choc, sans raison particulière.

Malheureusement, ce déficit n’est resté historique qu’un an : dès cette année, il est prévu qu’il atteigne 6,1 % du PIB, toujours sans récession, sans choc, sans raison particulière.

Et ce qui devait arriver arriva.

D’une part, la charge de la dette, mot convenu pour désigner en réalité ce que les Français doivent rembourser chaque année, explose dangereusement : elle était de 30 milliards d’euros par an en 2020 ; elle atteindra près de 100 milliards d’euros par an en 2029. Il n’y a pas d’argent magique : ces 70 milliards d’euros supplémentaires sont soit de l’impôt en plus, soit des dépenses en moins ailleurs.

D’autre part, les conditions d’emprunt se dégradent : la France emprunte désormais plus cher que l’Espagne, le Portugal ou la Grèce, pays dont je rappelle qu’il frôlait la cessation de paiement il y a dix ans. Nous sommes donc actuellement dans un état d’urgence budgétaire.

Je ne vais pas m’étendre sur les raisons qui nous ont conduits à cette situation. Le président Claude Raynal et moi-même y avons travaillé, avec sérieux et méthode, dans le cadre de notre mission d’information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023. Je vous renvoie à nos travaux.

Je rappelle juste un fait : le déficit prévisionnel s’établirait à 6,1 % en 2024, contre un chiffre de 4,4 % inscrit voilà moins d’un an dans la loi de finances issue du texte considéré comme adopté en application de l’article 49.3 de la Constitution.

J’exprime aussi un regret : de ces 50 milliards d’euros d’écart, personne n’endosse la responsabilité. Tous les responsables politiques que nous avons auditionnés ont répondu d’une même voix qu’ils n’étaient responsables de rien, ou de si peu, et qu’ils avaient tous bien fait. Ces 50 milliards d’euros, c’est pourtant la moitié de l’impôt sur le revenu payé par nos concitoyens, ou deux fois le budget de notre police et de notre gendarmerie.

« C’est pas moi », « c’est pas ma faute », « pas de bol ! » : comment lutter contre la crise démocratique quand les responsables politiques n’assument même pas la trajectoire des finances publiques du pays qu’ils dirigent ? Plus prosaïquement, comment faire comprendre ce projet de budget pour 2025 aux Français – comment pouvons-nous nous-mêmes, parlementaires, le comprendre ? – si tout le monde nous explique que tout va bien et que c’est la faute d’un gouvernement constitué le 21 septembre dernier, il y a donc un peu plus de deux mois, si nous en sommes là ?

Mettons fin à cette mystification : il est temps de dire la vérité aux Français. J’approuve ce budget pour ce qu’il est : un budget de vérité, un budget d’effort collectif inédit !

D’abord, les sous-jacents macroéconomiques du projet de loi de finances pour 2025 me paraissent crédibles. L’année dernière, à l’occasion de mon intervention en discussion générale sur le projet de loi de finances pour 2024, je vous indiquais que la prévision de croissance du Gouvernement était plus élevée que toutes les autres prévisions institutionnelles.

Tel n’est pas le cas cette année : la prévision retenue pour 2025 est de 1,1 % du PIB. Certes, la croissance pourrait être affectée par l’effet nécessairement récessif d’un budget de redressement, mais le consensus des économistes, dont les prévisions, actualisées au 11 novembre dernier, intègrent donc l’essentiel des effets du texte qui nous est soumis, l’évalue à environ 0,9 %, chiffre très proche, donc, de celui du Gouvernement.

Ensuite, c’est un budget de vérité, parce qu’enfin le Gouvernement fait autre chose que parler. Messieurs les ministres, l’an passé, je regrettais que les belles paroles de vos prédécesseurs sur le nécessaire sérieux budgétaire ne soient suivies ni d’effets ni d’actes. L’année dernière, les dépenses de l’État continuaient d’augmenter, encore et encore, de près de 6 milliards d’euros, hors mesures de crise, par rapport à 2023. Au total, retraitées de l’inflation, les dépenses de l’État ont ainsi progressé de 14 % depuis 2017, soit une hausse historique.

Je me réjouis que ce projet de loi de finances signe, enfin, la fin du « quoi qu’il en coûte ».

Il aura fallu quatre ans pour nous désintoxiquer de la dépense publique. Pour 2025, le Gouvernement prévoit « enfin », oserais-je dire, que les dépenses de l’État baissent de 3,2 %. L’effort, qui n’est pas lié au retrait des mesures de crise, est réel, parce qu’il est nécessaire et parce que nous sommes – j’y insiste – dans un état d’urgence budgétaire. Nous ne pouvons ni demander à nos concitoyens de toutes conditions de payer davantage d’impôts ni continuer de vivre à ce point à crédit.

La voie est donc claire : il nous faut réduire la dépense publique.

La commission des finances proposera d’aller plus loin en ce sens, non pas par dogmatisme, mais pour nous permettre de sortir du marasme budgétaire, tout en évitant au maximum des hausses d’impôts qui pèseraient sur les Français.

Notre commission a ainsi voté plus de 3 milliards d’euros d’économies supplémentaires par rapport à celles que propose le Gouvernement : baisse des dépenses en matière d’apprentissage ; réduction des crédits alloués aux opérateurs de l’État ; suppression ou réforme de dispositifs tels que le service national universel, le pass Culture ou l’aide médicale de l’État ; effort financier portant sur l’immobilier de l’État ; mise à contribution de l’audiovisuel public, etc.

J’entends bien sûr les remarques, qui émanent de certaines travées, sur la nécessité de réformes structurelles pour faire baisser la dépense. Autant vous le dire, je les partage, nous les partageons !

Mais, je le rappelle, le Gouvernement a été nommé le 21 septembre 2024 ! Qui peut sérieusement lui demander, en si peu de temps, de mettre en œuvre des réformes structurelles à effet immédiat ? Je tends la main aux ministres en vue de travailler dès maintenant à des réformes d’ampleur, pour une action publique plus économe et plus efficace.

À court terme, notre priorité est et doit être de préserver le pouvoir d’achat des Français, et non de préserver telle ou telle enveloppe budgétaire ou tel ou tel opérateur. Pour ce faire, il faut faire des économies et éviter les hausses de fiscalité. C’est cet objectif qui a guidé notre commission des finances dans son refus de la proposition gouvernementale d’augmentation de la fiscalité sur l’électricité au-delà de son niveau d’avant-crise. Oui, le prix de l’électricité va baisser, messieurs les ministres ! Oui, c’est une bonne nouvelle pour les Français ! Et, ne vous en déplaise, cela ne doit pas être l’occasion pour l’État d’augmenter subrepticement les impôts !

La commission des finances du Sénat propose 3,4 milliards d’euros d’impôts en moins et, donc, de pouvoir d’achat en plus pour les Français.

Messieurs les ministres, vous êtes ici dans la maison des collectivités territoriales. Le rôle constitutionnel du Sénat est bien sûr de les représenter. Cela fait de nombreuses années qu’elles sont montrées du doigt, alors que les faits sont là : c’est bien l’État, et non les collectivités, qui est responsable de l’explosion des déficits depuis 2017. C’est l’État qui emprunte pour payer ses dépenses de fonctionnement courant. C’est donc l’État qui doit faire l’essentiel de l’effort de redressement de nos comptes publics.

Aussi, je me réjouis de constater qu’enfin nous convergeons sur ce point – j’en ai du moins le sentiment. Nous allons peut-être, grâce à votre gouvernement, sortir à la fois de la caricature et de l’impasse dans laquelle les relations entre l’État et les collectivités se trouvaient depuis plusieurs années.

En effet, à la différence notable de vos prédécesseurs, vous ne faites pas semblant de croire que la dégradation des finances publiques vient de la mauvaise gestion des collectivités territoriales. Merci à vous d’avoir reconnu très clairement à plusieurs reprises que tel n’était pas le cas. Cela fait du bien de l’entendre, ici en particulier : c’est salutaire.

Par ailleurs, comme je l’ai déjà indiqué à de nombreuses reprises, y compris à cette tribune, je suis favorable à un effort des collectivités locales pour redresser nos comptes publics. Je rappelle que nous sommes dans une situation d’urgence budgétaire et qu’il serait irresponsable de les préserver de tout effort, alors qu’elles représentent près de 20 % de la dépense publique et qu’elles bénéficient de plus de 50 milliards d’euros de concours financiers de l’État.

Oui, nous convergeons sur le constat, mais – oui – nous divergeons sur l’ampleur de l’effort à réaliser. Nous proposons que celui-ci soit ramené à 2 milliards d’euros, en lieu et place des 5 milliards d’euros que vous proposez : nous finançons cette réduction par des efforts supplémentaires que nous faisons porter sur l’État – cela ne vous surprendra pas…

Aussi, messieurs les ministres, nous proposerons de rejeter votre réforme du FCTVA, qui pénalise injustement l’investissement local. La commission des finances, grâce notamment au travail de notre collègue Stéphane Sautarel, a élaboré un dispositif de lissage conjoncturel, qui remplacera le fonds de réserve de 3 milliards d’euros prévu par le texte du Gouvernement. Tel est l’équilibre auquel nous sommes parvenus et que je souhaite préserver au cours de nos débats.

J’aurai un dernier mot sur la fraude fiscale, un sujet essentiel, tant il fait écho à une forme d’exaspération de nos concitoyens. Comment envisager un redressement de nos comptes publics de 60 milliards d’euros sans engager une action forte contre la fraude, notamment contre la pratique dite des « CumCum » ?

Je suis sûr, messieurs les ministres, que vous n’êtes pas dupes : vous savez que sous le joli mot d’« arbitrage de dividendes » se dissimulent des pratiques organisées de démarchage de clients dans le but exclusif de frauder l’impôt. À vrai dire, on entend tout et n’importe quoi à ce sujet : ainsi, certains affirment que ces pratiques n’existent pas ou qu’y mettre un terme aurait des conséquences catastrophiques pour l’attractivité de la place de Paris.

J’en appelle à la raison de chacun : une telle fraude existe bel et bien ; elle se chiffre même à plusieurs centaines de millions d’euros chaque année. Ce montant est considérable, certes, sans que l’on puisse le moins du monde en déduire que mettre un terme à ces pratiques pourrait signifier mettre à bas les banques françaises.

Il faut assurément faire cesser ces montages financiers, car la priorité de tous – je dis bien de « tous » – doit être l’application de la loi, y compris de la loi fiscale. Certains pays européens ont du reste décidé de réagir en changeant la loi, ce qui a mis fin, comme par enchantement, à ces pratiques frauduleuses.

C’est ce que proposera la commission des finances, au terme d’un travail de fond, qui remonte à loin, puisque cela fait maintenant de nombreuses années que nous travaillons sur le sujet – je pense notamment au précieux concours de nos collègues Albéric de Montgolfier et Vincent Éblé. Nous nous inscrivons ce faisant dans une démarche collégiale, puisque cette initiative est très largement – et sans doute unanimement – partagée sur les travées de cet hémicycle.

Voilà, mes chers collègues, les orientations qui sont celles de la commission des finances.

Voilà, messieurs les ministres, l’esprit dans lequel nous abordons ce débat au Sénat et les objectifs que nous nous fixons pour l’examen de ce texte.

Certes, dans un monde idéal, le gouvernement de Michel Barnier ne serait pas arrivé au pouvoir dans un contexte où le déficit public risquait d’atteindre 7 % du PIB.

Mais, à défaut d’une réaction plus précoce, convenons que le budget qui nous est proposé aujourd’hui est un budget de vérité et de raison. C’est en prenant la mesure, toute la mesure, de l’effort collectif auquel ce projet de loi de finances nous invite que je proposerai, sous réserve de l’adoption des amendements de la commission des finances, de l’adopter. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – M. Raphaël Daubet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, en ma qualité de président de la commission des finances, et alors que s’engage l’examen du projet de loi de finances pour 2025, je débuterai mon intervention en rappelant que cela fait plus d’un mois déjà que le rapporteur général et l’ensemble des rapporteurs spéciaux procèdent à l’analyse de ce nouveau budget, tant de son volet recettes que de son volet dépenses.

Je remercie l’ensemble des membres de la commission, ainsi que les rapporteurs pour avis, de la qualité de leurs travaux et des échanges qui ont nourri nos réunions.

Alors que l’examen des deux derniers projets de loi de finances avait été marqué par le recours du Gouvernement à l’article 49.3 de la Constitution, et que nous avions l’habitude de récupérer un texte enrichi de nombreux articles et dispositifs additionnels, nous connaissons cette année une situation inédite : le Sénat est saisi du texte initial du Gouvernement, soit de soixante-cinq articles seulement.

Si cette occurrence offre à notre assemblée l’occasion de jouer un rôle inédit, celui de proposer un texte qui pourrait être la base des discussions lors d’une future commission mixte paritaire, nous ne pouvons que collectivement regretter que le texte initial du Gouvernement n’ait pas été complété par les propositions de l’assemblée la plus représentative de l’état le plus actuel de l’opinion, et que le volet dépenses n’ait même pas été examiné.

Ce débat budgétaire s’ouvre donc alors même qu’aux termes du projet de loi de fin de gestion pour 2024, dont nous discuterons en début d’après-midi, le déficit de nos finances publiques s’établit à 6,1 % du PIB, soit 180 milliards d’euros environ, le pire déficit depuis la guerre, hors périodes de crise.

Sans revenir à ce stade de la discussion sur les raisons tant techniques que politiques qui ont conduit notre pays à connaître, en un an, une aussi soudaine et inquiétante aggravation de son déficit public – la hausse s’élève à plus de 50 milliards d’euros, soit 1,7 point de PIB, le déficit atteignant désormais 6,1 % du PIB au lieu des 4,4 % annoncés jusqu’au mois de février dernier par le gouvernement sortant –, le constat est clair et sans appel : il nous faut, dès cette année, redresser nos finances publiques, réduire significativement notre niveau de déficit pour diminuer notre appel à l’emprunt, et tout cela sans peser ni sur la qualité de nos services publics ni trop fortement sur une croissance que l’état de notre économie, comme celui de l’environnement international, ne nous permet guère d’imaginer très élevée.

Notre débat portera donc sur les voies et moyens d’y parvenir. Or, comme toujours, le diable se cache dans les détails des mesures proposées. Au moins n’entendons-nous plus dire que l’augmentation des impôts serait une ligne rouge par ceux-là mêmes qui, pourtant, sont responsables de la situation actuelle.

Quelles qu’aient pu être les motivations des baisses d’impôts décidées depuis 2018 et qu’elles aient été partagées ou non, lesdites baisses auraient dû être stoppées dès le début de la crise du covid.

La France, comme tous ses voisins européens, a fait face à deux crises majeures, l’une sanitaire, l’autre énergétique et inflationniste, qui ont rendu nécessaire un ensemble de mesures financières de soutien aux Français et à l’activité économique.

Mais la France seule s’est privée, annuellement et avec constance, de produits fiscaux très élevés, les plus discutables de ces mesures étant la généralisation aux 20 % des Français les plus aisés de l’exonération de taxe d’habitation,…

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. … pour 9 milliards d’euros au total, et la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), pour plus de 5 milliards d’euros à ce jour et 8 milliards d’euros au total programmés d’ici à 2029, selon votre texte, messieurs les ministres.

Nonobstant les crises violentes et la nécessité de mesures de soutien exceptionnelles, mises en œuvre à très juste titre, les gouvernements successifs, imperturbables, ont méthodiquement poursuivi leur politique de l’offre, creusant inexorablement une dette et des déficits qu’il nous faut aujourd’hui collectivement combler.

En la matière, soyons précis. Chaque année et depuis 2018, ces baisses de recettes fiscales coûtent 62 milliards d’euros au budget. À elles seules, en cumulé, elles sont à l’origine d’une augmentation de la dette de 10 points de PIB, soit 300 milliards d’euros.

Aujourd’hui, quelles solutions envisager ? Il n’y a pas de miracle : des coupes budgétaires sévères, pour une large part, et quelques recettes nouvelles, l’effort demandé étant souvent temporaire pour le monde économique,…

M. Albéric de Montgolfier. Je demande à voir !

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. … bien plus permanent pour les ménages et les collectivités locales.

Avant d’aller plus loin et de débattre des articles de ce projet de loi de finances, il ne serait peut-être pas inutile de porter un jugement sur cette politique de baisse des recettes fiscales.

Pour ce qui est de la taxe d’habitation, la mesure initiale de suppression de l’impôt pour 80 % des ménages a coûté 9 milliards d’euros. Son extension aux 20 % des Français les plus aisés, décidée à la suite de l’avis sans surprise rendu par le Conseil Constitutionnel, a, quant à elle, coûté également 9 milliards d’euros.

Je le rappelle, cette disposition devait se traduire par une augmentation de la consommation. Résultat : pour les ménages aisés, la suppression de la taxe d’habitation a surtout été perçue comme un bonus inattendu, qui leur a permis d’accroître leur épargne plutôt que de consommer davantage. Le taux d’épargne des ménages, qui s’était stabilisé à 12,9 % au premier trimestre 2018, a grimpé à 17,6 % au deuxième trimestre 2024, l’un des taux d’épargne les plus élevés d’Europe.

Avant d’augmenter les taxes sur l’électricité ou – dans une version plus sénatoriale – sur le gaz et avant de sous-indexer les retraites, je propose que nous reprenions, par une surtaxe temporaire d’impôt sur le revenu, un tiers du gain engrangé par les Français les plus aisés, soit 3 milliards d’euros prélevés sur ceux de nos concitoyens dont les revenus sont imposés au taux de 30 % et au-delà, selon une progression croissante. Si nous ne le faisons pas, l’État aura rendu aux plus aisés ce qu’il propose maintenant de prélever sur tous : une sorte de « Robin des bois », mais à l’envers !

Le même raisonnement vaut pour les impôts de production : il a été impossible à France Stratégie, organe placé auprès du Premier ministre, d’évaluer l’impact de la suppression, pour 15 milliards d’euros à ce jour, de différents impôts de production. Cette année encore, 1 milliard d’euros ont été rendus aux entreprises concernées, alors même qu’une telle baisse n’a aucun effet, puisqu’à en croire le président du Mouvement des entreprises de France (Medef) elle ne produirait pas « d’effet de choc ».

Je propose par conséquent que la CVAE soit restituée aux intercommunalités et aux départements en trois ans et que l’État récupère la TVA correspondante. Cette mesure aura trois effets positifs : renouer le lien entre l’économie et le territoire ; rehausser les recettes de TVA au bénéfice de l’État ; et, enfin, permettre à celui-ci de participer financièrement, si nécessaire, et dans le cadre d’un accord à trouver avec les collectivités locales, au rétablissement d’une contribution résidentielle.

Le Gouvernement lui-même a ouvert la voie à une remise en cause des baisses d’impôts non gagées par ses prédécesseurs. Avec une surtaxe sur deux ans des très grandes entreprises, il revient de fait, certes temporairement, sur la baisse de 33 % à 25 % du taux de l’impôt sur les sociétés.

Je propose au fond de faire la même chose pour récupérer une partie du produit fiscal perdu de la taxe d’habitation ou de la CVAE. Il ne s’agit pas, vous l’aurez compris, d’augmenter les impôts, mais bien plutôt de revenir sur des baisses d’impôts inconsidérées. Le Gouvernement considère d’ailleurs, comme vous le savez, que la suppression d’exonérations de cotisations patronales est une baisse de la dépense et non une augmentation des recettes. Aussi ma proposition consiste-t-elle simplement à traiter de façon analogue l’impôt sur le revenu, la taxe d’habitation et la CVAE.

Dans son rapport sur la libre administration des collectivités locales, adopté l’an passé, le groupe de travail du Sénat sur la décentralisation proposait de faire bénéficier la fiscalité locale d’une protection constitutionnelle et d’inscrire le principe d’autonomie fiscale des communes dans la Constitution.

Mes chers collègues, la crise des finances publiques que nous connaissons doit nous permettre de revenir sur nos erreurs. Ne laissons pas passer cette chance unique, pour le Sénat, de donner une issue constructive à son travail. Je ne suis pas sûr qu’une telle occasion se représente de sitôt.

Comme le disent les Anglo-Saxons, « si quelqu’un a quelque raison que ce soit de s’opposer à ce mariage, qu’il parle maintenant ou se taise à jamais ! » (Mme Marie-Arlette Carlotti et M. Thierry Cozic applaudissent.)

M. Albéric de Montgolfier. On va se taire, alors ! (Sourires.)

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Si vous êtes favorables, mes chers collègues, au rétablissement d’un pouvoir fiscal pour les collectivités locales, dites-le aujourd’hui en votant mes amendements, ou alors n’en parlez plus jamais ! (Rires. – Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – M. Raphaël Daubet applaudit également.)

M. Laurent Saint-Martin, ministre. On va le faire en anglais ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. Nous passons à la discussion de la motion n° I-1541 tendant à opposer la question préalable.

Question préalable

M. le président. Je suis saisi, par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, d’une motion n° I-1541.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2025 (n° 143, 2024-2025).

Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l’article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant pour dix minutes maximum, un orateur d’opinion contraire pour dix minutes maximum, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond, et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. Pierre Barros, pour la motion.

M. Pierre Barros. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, tout d’abord, que les choses soient claires : il n’est pas question ici de refuser le débat.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ah !

M. Pierre Barros. Notre groupe n’a jamais refusé de débattre, bien au contraire. La question n’est donc pas celle du débat en lui-même, mais de ce sur quoi il nous est demandé de débattre aujourd’hui.

Ce projet de loi de finances pour 2025 est annoncé comme celui du partage de l’effort en vue du redressement des finances publiques, lesquelles ont été mises en péril par la gestion calamiteuse des précédents gouvernements.

Face au projet de loi initial du Gouvernement, marqué du sceau de la récession sociale en lieu et place du progrès social, les députés ont légitimement remanié, en première lecture, et à l’issue de trois semaines de débats, le volet du texte consacré aux recettes, en adoptant 472 amendements.

La gauche a ainsi démontré qu’un autre budget pour la France était possible : un budget du partage des richesses, qui met en évidence que l’austérité pour tous est un choix politique et non une fatalité, ce qui n’a rien, messieurs les ministres, d’irresponsable ni d’inacceptable.

La taxe Zucman, prélèvement de 2 % sur les patrimoines supérieurs à 1 milliard d’euros, a ainsi été adoptée. L’exit tax, impôt créé en 2011 pour freiner l’évasion fiscale, a quant à elle été renforcée, et la soumission des dividendes à cotisations sociales a été gravée dans le marbre des comptes rendus parlementaires.

Le travail de nos collègues députés fut aussi riche d’enseignements politiques. Il a mis en lumière des alliances d’opportunité entre le Gouvernement, les groupes de la droite républicaine et ceux de l’extrême droite, nouées afin d’empêcher davantage de justice fiscale dans notre pays. Le résultat du vote en témoigne : 192 voix pour et 362 voix contre le texte remanié.

Inquiet de voir son projet de loi de finances transformé, M. le Premier ministre agite depuis quelques jours le spectre du 49.3. Formidable idée ! Cet expédient aggraverait encore un peu plus la crise démocratique dans laquelle nous sommes plongés.

Pourquoi M. Barnier refuse-t-il de prendre à bras-le-corps le sujet de la justice fiscale ? Pourquoi ne pas reconnaître l’échec absolu de la politique de l’offre menée depuis sept ans et ses conséquences désastreuses pour notre pays ? Le chômage repart à la hausse ; nombre de licenciements et de fermetures d’usines se profilent ; la charge de la dette publique s’envole, soumise au caprice des marchés.

Non, nous ne sommes pas ici pour faire semblant de débattre. Nous n’entendons pas être relégués au rôle de figurants, saisis d’un budget écrit d’avance.

Messieurs les ministres, nous refusons de participer à une comédie politique qui renforce le ressentiment de la population à l’égard de tous les élus. Mais rassurez-vous : dans l’hypothèse où cette motion ne serait pas adoptée, nous sommes prêts, avec les forces de gauche présentes ici au Sénat, à démontrer, article après article, que votre projet est particulièrement inadapté et injuste. Nous serons évidemment force de proposition.

Parlons plus en détail de ce projet de loi de finances. En sept ans, nous sommes passés de la politique du « quoi qu’il en coûte » à celle du « quoi qu’il advienne ».

Quittant Bercy, M. Bruno Le Maire, ex-ministre des finances, s’est targué dans son discours d’adieu d’avoir réalisé 55 milliards d’euros de baisses d’impôts. Or, en juillet 2024, la Cour des comptes analysait la situation de façon tout à fait différente : selon elle, les baisses d’impôts et de cotisations décidées depuis six ans « ont contribué à la dégradation du déficit public et modifié la structure des recettes des différentes administrations publiques », pour un impact estimé à 62 milliards d’euros en 2023.

Depuis, la France a certes changé de gouvernement, mais elle n’a pas pour autant changé de cap. Vous poursuivez le « quoi qu’il advienne » en vous attaquant désormais aux services publics locaux. Partant du postulat mensonger qu’ils seraient responsables du déficit abyssal que l’État a lui-même creusé, vous tentez par tous les moyens de les supprimer.

Dans cette situation politique tout à fait lunaire, nous tenons à saluer votre habileté sémantique. Les mots que vous employez ont bel et bien un sens, mais non forcément celui auquel on s’attend.

Ainsi avons-nous été choqués tant par le sort réservé aux collectivités territoriales que par les termes employés à leur propos dans votre projet de loi de finances pour 2025.

Par exemple, pour résorber une partie du déficit public, vous avez décidé de créer un « fonds de résilience des finances locales » en ponctionnant une partie des budgets locaux à hauteur de 3 milliards d’euros. Personne n’a bien compris en quoi consistait ce mécanisme de prélèvement nommé tour à tour fonds de précaution, fonds d’auto-assurance et fonds de réserve. Il faudra nous expliquer plus précisément ce dont il retourne…

Comment les élus doivent-ils interpréter le terme de « résilience » ? Doivent-ils considérer qu’il faut être résilient face au choc traumatique que vous leur faites subir, ou bien que ce fonds a vocation à prévenir l’effet de coups plus massifs à venir sur les finances publiques locales ?

Le discours prononcé par M. le Premier ministre lors des Assises des départements de France, le 15 novembre dernier, était lui aussi des plus habiles. En préambule, M. Barnier déclarait renoncer aux efforts demandés aux collectivités territoriales ; et, quelques minutes plus tard, il concluait son propos en évoquant le lissage éventuel des mesures initiales sans indiquer de réelles perspectives… À l’issue du Congrès des maires de France, nombre d’élus locaux restaient de même dans l’expectative.

Au-delà des mots, les actes ont un sens. Or, qu’il s’agisse des élus ou des agents des collectivités locales, les intentions concrètes du Gouvernement restent des plus obscures.

Pour envisager d’imposer de telles coupes budgétaires au service public local, il faut bel et bien que vous soyez déconnectés des réalités quotidiennes des villes et villages de notre pays.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 contient des mesures d’austérité sans précédent, aux dépens de la santé et des prestations de sécurité sociale – je pense notamment à la hausse du ticket modérateur. De même, tout en culpabilisant à son tour les malades et les retraités, le projet de loi de finances pour 2025 inflige à nos territoires des mesures d’austérité d’une ampleur inédite. Non seulement les recettes des collectivités territoriales sont amputées de 10 milliards d’euros, mais les agents comme les élus, rendus responsables de la situation, sont culpabilisés à leur tour.

Messieurs les ministres, les élus locaux sont épuisés d’assumer des politiques avec lesquelles ils sont en désaccord.

Depuis plusieurs années, les communes subissent des pertes de recettes réelles, alors que les dépenses, elles, sont en constante progression.

L’effet ciseaux n’est pas un simple concept économique : c’est une réalité, et une réalité à très court terme, pour nos collectivités territoriales. À ces contraintes s’ajoutent des phénomènes inattendus, comme les émeutes ou les catastrophes climatiques, qui laissent les élus isolés face à des dépenses massives qu’ils ne peuvent pas engager.

Sachez que, depuis maintenant quatre ans, être maire et plus largement élu local, c’est assumer une perpétuelle gestion de crise.

C’est se demander si, le 31 décembre de l’année en cours, un assureur aura daigné répondre au marché lancé au nom de la collectivité.

C’est accompagner les familles qui cherchent un médecin pour constater un décès.

C’est se trouver face à des collègues élus, ou des directeurs généraux de collectivités territoriales, qui se demandent si le service public a encore un sens, s’ils rempileront dans leurs fonctions ou dans leur mandat, tant les responsabilités sont lourdes.

C’est être face à des habitants dont le pouvoir d’achat s’est réduit à rien et qui n’ont plus, pour tout viatique, que leur colère.

C’est faire face à l’impossibilité de déployer les moyens qu’exigent les écoles, les routes, les équipements sportifs et culturels, les services de pompiers, la police municipale, les travailleurs sociaux, ou encore les nombreux chantiers qu’implique la bifurcation écologique.

Les élus locaux sont déjà frappés de plein fouet par les effets récessifs de votre politique, et vous souhaitez encore en rajouter.

Dans sa version transmise au Sénat, le projet de loi de finances pour 2025 fixe la contribution des collectivités territoriales à 5 milliards d’euros via une réduction des concours financiers de l’État. Vous espérez ainsi réduire leurs dépenses de fonctionnement ; mais, messieurs les ministres, exception faite de la masse salariale, nombreux sont les élus qui ne peuvent plus rogner aucun budget : en êtes-vous conscients ?

Quels services publics devront-ils fermer ? Quels postes devront-ils supprimer ? Des postes d’agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) ? de policiers municipaux ? d’agents de l’état civil ? Je vous le redis : en vous en prenant aux collectivités, vous vous trompez de cible.

La fortune cumulée des 500 plus grandes fortunes de France dépasse aujourd’hui 1 200 milliards d’euros, en hausse de 5 % par rapport à 2023. Ce constat ne vous semble-t-il pas assez clair ?

Les collectivités territoriales et les services publics ne sauraient être la variable d’ajustement de libéraux qui profitent de la crise.

J’ajoute que l’effort budgétaire demandé aux collectivités aura deux lourds impacts déjà prévisibles : un recul massif de l’investissement local, de l’ordre de 12 milliards d’euros, et une hausse inévitable de l’endettement public. Nous sommes face à un véritable non-sens économique, social et écologique.

Tout comme votre projet de loi de financement de la sécurité sociale, votre projet de loi de finances, sous un habillage faussement technique, distille l’idée que les Français ne travaillent pas assez et que notre modèle engendre trop de dépenses sociales. On l’a encore entendu ce matin.

Avez-vous mesuré l’impact d’une telle politique sur la vie des Français ? Avez-vous mesuré ce qu’ils vont perdre en matière d’accès aux soins et de pouvoir d’achat ? Avez-vous mesuré l’altération de leurs conditions de travail et les conséquences de vos choix sur les entreprises locales, sur ceux qui produisent et, plus largement, sur notre économie ?

C’est un autre budget que la gauche sénatoriale veut proposer : un budget qui soit au service de la solidarité nationale et non au profit de quelques-uns.

Nous refusons de renoncer à la justice sociale et à la justice fiscale.

Mes chers collègues, nous vous invitons à voter cette motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER.)

M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?…

Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mon cher collègue, je vous remercie de votre intervention. Vous venez en effet de rappeler l’importance de ce débat. Or, comme vous, nous avons envie de débattre, car cette discussion est nécessaire à plusieurs titres.

Je le répète, dans les circonstances difficiles que traverse notre pays, le Sénat a une responsabilité particulière, et même éminente. Nous devons notamment démontrer que la chambre haute, celle des territoires, est à même de confronter les différents avis, les différentes sensibilités qui parfois s’opposent en son sein, pour tracer des perspectives et trouver des solutions. C’est ce que nos concitoyens attendent de nous.

À la suite de la dissolution, les élections législatives anticipées nous ont placés face à une espèce de mikado politique. Dans ce contexte, les Français nous demandent de faire preuve de responsabilité.

Le travail qui nous attend est difficile – MM. les ministres l’ont dit eux-mêmes –, mais il faut absolument s’atteler à la tâche : nous devons tout faire pour apaiser les inquiétudes.

Nous sommes sur une ligne de crête : la voie est étroite, mais elle mérite d’être empruntée durant la quinzaine de jours dont nous disposons au Sénat.

Mes chers collègues, je vous invite à voter contre la motion qui vient d’être défendue. L’adopter serait se priver d’un débat extrêmement utile pour l’avenir de notre pays.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis en ligne avec les propos de M. le rapporteur général.

Monsieur le sénateur Barros, peut-être puis-je vous interroger en retour : auriez-vous déposé une telle motion si l’Assemblée nationale avait adopté son propre texte ? C’est une vraie question.

En effet, votre position ne tient pas tant à la forme : c’est avant tout sur le fond que vous vous opposez au texte gouvernemental. Dès lors, vous-même avez tout intérêt à laisser débattre la chambre haute : c’est à cette seule condition que vous pourrez défendre les options qui sont les vôtres, sur la base d’un constat que, me semble-t-il, nous partageons.

Nous avons au moins ceci en partage, en effet : si j’ai bien entendu votre propos, nous sommes d’accord pour dire – vous ne le niez pas – qu’il est nécessaire de redresser les finances publiques. Simplement, vos propositions diffèrent de celles du Gouvernement et, probablement, de celles de la majorité sénatoriale. C’est évidemment votre droit le plus strict. Mais, sur cette base, débattons, comme nous avons débattu à l’Assemblée nationale.

M. le président de la commission a insisté sur ce point : nous vivons un moment inédit. Dans un tel contexte, il serait profondément dommage que nous nous privions des contre-propositions émanant du Sénat. Du reste, jamais un gouvernement n’a été si ouvert à l’évolution du projet de loi de finances initial : ce texte est perfectible, nous le reconnaissons d’autant plus volontiers que nous avons dû le préparer dans des délais extrêmement contraints.

Bref, on ne saurait refuser le débat en tant que tel. Le fuir serait contraire à ce que requiert la séquence vécue par notre pays.

Chacun, dans cette assemblée, a tout intérêt à faire vivre la discussion, non seulement pour des raisons de positionnement politique, mais en vue de l’évolution du texte lui-même. Quant au Gouvernement, il est évidemment à la disposition du Sénat et le restera autant qu’il le faudra pour que, précisément, vive ce débat.

J’en viens, brièvement, au fond.

Vous avez, et c’est tout à fait normal, assez longuement évoqué le cas des collectivités territoriales. Je le redis, il serait contradictoire de rejeter le présent texte avant même que le débat n’ait lieu. Vous souhaitez faire évoluer la participation des collectivités territoriales : je l’ai dit à la tribune, nous y sommes d’ores et déjà ouverts, et, me semble-t-il, dans le sens qui sied à la majorité des membres de cette assemblée.

Nous sommes prêts en effet à revoir la définition du fonds de précaution, qui – je vous l’accorde – gagnerait à ce que l’on fixe son intitulé une bonne fois pour toutes. Qui doit y contribuer ? À quel titre ? Comment rétribuer les collectivités territoriales participantes ?

J’ai, de même, évoqué la non-rétroactivité du FCTVA, ainsi que le cas particulier des départements financièrement les plus fragiles. Si le débat n’avait pas lieu, le Sénat ne pourrait pas adapter ce fonds – je pense notamment à la participation des collectivités territoriales. Et la commission mixte paritaire ne pourrait pas en délibérer. C’est de tout ce travail que nous serions privés.

Sur la forme comme sur le fond, pour le groupe politique dont vous êtes l’élu comme pour le Sénat tout entier, j’estime sincèrement qu’il serait contre-productif d’adopter cette motion. Je le répète, mesdames, messieurs les sénateurs, vous seriez vous-mêmes privés de ce débat et empêchés de délibérer.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. L’examen de cette motion donne le ton pour les prochains jours.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré : « je suis en ligne avec le rapporteur général ». Cette phrase – on le devine d’entrée de jeu – va revenir comme un refrain tout au long des travaux du Sénat.

Notre collègue Pierre Barros l’a rappelé, aucun amendement de l’Assemblée nationale n’a été retenu.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Si !

M. Pascal Savoldelli. J’ignore si ce constat vous attriste ou vous réjouit… Toujours est-il que, si nous défendons cette motion, c’est aussi par respect pour le travail de nos collègues députés.

En outre, c’est avec les voix du Rassemblement national que l’Assemblée nationale a rejeté la première partie du projet de loi de finances. Il faut le dire : c’est une question de clarté politique.

Vous nous dites qu’il faut de la transparence, de l’exactitude, etc. Eh bien, soyons précis : c’est tout le rôle de cette motion. Entre le rejet orchestré en première lecture, le 49.3 qui se profile et la CMP, le travail de l’Assemblée nationale va être rayé d’un trait de plume.

De votre côté, vous restez largement imperméables à ce qui se qui est en train de se passer : 7 500 ouvriers qui perdent leur travail, les agriculteurs et les éleveurs qui tirent la sonnette d’alarme – et je passe sur les nombreux autres mouvements qui traversent notre société.

Pour reprendre une expression que j’ai entendue ce matin, la discussion de cette motion nous offre donc, d’emblée, un petit moment de clarification…

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour explication de vote.

M. Emmanuel Capus. Les élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires s’opposeront évidemment à cette motion.

Étant par nature favorables au débat, nous nous opposons par principe à toute motion de rejet préalable. Pour le Sénat, refuser d’examiner les textes présentés par le Gouvernement ou transmis par l’Assemblée nationale, c’est tout simplement se tirer une balle dans le pied. Et il serait particulièrement aberrant cette année que nous renoncions à l’exercice de notre pouvoir, puisque le projet de loi de finances est encore vierge.

Cas de figure exceptionnel sous la Ve République, l’Assemblée nationale a rejeté la première partie : nous avons donc la responsabilité historique de modifier, d’amender, d’améliorer la version du Gouvernement, qui n’a pas été retouchée par nos collègues députés.

Si, par principe, refuser le débat est toujours une erreur, en l’espèce, cette année, le rejet préalable du projet de loi de finances serait une faute plus grave encore qu’en temps normal. À tout le moins, il faut débattre pour tenter d’améliorer ce texte, conformément aux pouvoirs que la Constitution nous confère. (M. Vincent Louault applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Monsieur Savoldelli, on ne peut pas dire que nous n’avons pas respecté la volonté de l’Assemblée nationale : c’est elle-même qui a rejeté le présent texte ; le Gouvernement n’en est pas responsable.

Vous ne pouvez pas, pour motiver le dépôt de cette motion, arguer d’un prétendu déni de démocratie à l’Assemblée nationale…

M. Pascal Savoldelli. Il y a eu alliance avec le RN !

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Si alliance il y a eu avec le Rassemblement national, c’est surtout pour faire adopter les amendements de fiscalité du Nouveau Front populaire… (Applaudissements sur des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)

En outre, je vous invite à lire en détail le résultat du scrutin sur la première partie du projet de loi de finances. Le socle commun et le groupe Liberté, indépendants, outre-mer et territoires (Liot) se sont prononcés de concert contre la version du texte qui a été soumise à l’Assemblée nationale : à eux seuls, ils disposaient d’une majorité de rejet sans avoir besoin des voix du Rassemblement national.

Croyez-moi : l’« alliance » avec le Rassemblement national, que vous dénoncez, n’est pas le fait du bloc central. Vous avez suivi les débats de l’Assemblée nationale : sur ce point, ils ont été très clairs.

M. Pascal Savoldelli. Eh bien, on va avoir des débats difficiles…

M. le président. Je mets aux voix la motion n° I-1541, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de finances pour 2025.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 77 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 260
Pour l’adoption 18
Contre 242

Le Sénat n’a pas adopté.

M. Albéric de Montgolfier. En effet, c’est un peu juste…

Discussion générale (suite)

M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Raphaël Daubet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Raphaël Daubet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous n’ignorons bien sûr pas la gravité de la situation ; ce que nous peinons à croire, néanmoins, c’est qu’il ait fallu attendre le début de l’automne pour découvrir l’ampleur du déficit. Une telle situation est carrément ubuesque. Bercy serait donc un organe malade de la République et le mal en serait au stade terminal…

Monsieur le ministre de l’économie, le directeur de cabinet du Premier ministre n’est autre que celui qui fut directeur de cabinet de votre prédécesseur, Bruno Le Maire, après avoir été directeur général des finances publiques et directeur de cabinet du ministre des comptes publics. Bref, il s’agit de l’homme qui a préparé tous les budgets depuis 2017.

Un tel constat n’enlève rien à la responsabilité politique, car la haute fonction publique est là pour exécuter les ordres des élus et non l’inverse. Mais avouez que l’on est en droit de s’interroger.

Je mesure l’inquiétude de nos concitoyens face au dérapage budgétaire, face à la situation économique préoccupante que nous connaissons et face à la crise politique qui nous menace. L’Assemblée nationale a échoué à trouver un compromis. Le Sénat se trouve donc, comme jamais, face à ses responsabilités.

Messieurs les ministres, je comprends pleinement l’urgence d’agir. Ce que je ne comprends pas, c’est l’exercice que vous nous demandez.

Je parle d’abord des objectifs : franchement, est-ce bien raisonnable de vouloir imposer 60 milliards d’euros d’économies dès cette année ? La récession de 1993, puis la crise de 2008 avaient plongé le solde public dans des profondeurs proches de celles que nous connaissons aujourd’hui. Chaque fois, le retour du déficit sous la barre des 3 % a pris sept à neuf ans. Ne pouvons-nous pas échelonner davantage l’effort prévu ?

Nous sommes face à un risque majeur : celui de plonger le pays dans une récession aux conséquences potentiellement dramatiques pour les Français.

Anciens maires ou anciens présidents d’exécutifs locaux, nombreux sont ceux qui, dans cette assemblée, ont géré des budgets pendant des années. Nous avons le sens de la responsabilité budgétaire, mais nous savons aussi ce qu’est l’action publique. Nous savons à quel point elle est indispensable à nos villes, à nos territoires et à notre économie tout entière.

La technocratie se penche sur des graphiques, des courbes et des tableaux. Elle s’attache à des critères, comme celui des 3 %. Mais elle ne regarde pas le gigantesque défi industriel qui se dresse devant nous.

J’étais vendredi dernier à Souillac, dans mon département, pour l’inauguration d’une chaîne de l’entreprise familiale Pivaudran. Ce nouvel équipement représente 7,5 millions d’euros d’investissements. Non seulement l’usine va doubler ses capacités de production, mais elle va réduire d’un tiers sa consommation d’eau et d’énergie tout en créant cinquante emplois.

Voici le paradoxe qui traverse l’industrie française : notre pays connaît nombre de plans sociaux et de fermetures d’usines ; mais, dans le même temps, il peut se prévaloir d’incroyables réussites, là où les mutations se font. Ces réussites, il faut les soutenir, si l’on veut amplifier cette métamorphose dont dépendent directement notre compétitivité, notre modèle social et notre souveraineté. C’est vrai pour l’industrie ; c’est vrai aussi pour l’agriculture – je ne vous apprends rien.

Messieurs les ministres, je ne comprends pas davantage la nature de l’exercice auquel vous vous livrez. S’agit-il d’un coup de frein ou d’un coup de volant ? S’agit-il d’endiguer l’hémorragie de nos dépenses ou de remettre en question nos politiques publiques, ce qui, en quinze jours de travail, serait – avouons-le – irréaliste, voire dangereux ? S’agit-il d’un exercice comptable ou bien d’un budget politique ? il faut le dire.

On a le sentiment que derrière l’invocation de l’urgence budgétaire se cachent en fait des choix politiques qui ne disent pas leur nom.

Être gestionnaire, en « bon père de famille », ne signifie pas être réactionnaire. Le coup porté aux collectivités locales, la brutalité des coupes budgétaires infligées aux solidarités internationales comme l’affaiblissement des ambitions en matière de recherche et d’innovation trahissent des politiques de recul, de repli et de renoncement. De telles mesures sont bien davantage que de simples ajustements budgétaires. Dès lors, je me réjouis d’autant plus que vous soyez disposés à prendre en compte certains amendements du Sénat.

Ce serait en effet une erreur funeste que de casser la croissance, dont on le sait qu’elle est tirée par la commande publique, et de renoncer à ce que nous sommes collectivement, à ce qui nous a permis jusqu’à présent de faire Nation.

Notre boussole, selon nous, doit être l’efficacité de la dépense publique. Les économies doivent être prises dans les dépenses de fonctionnement de l’État ; dans la simplification des normes et des opérateurs ; dans la lutte contre la suradministration, qui nous étouffe depuis si longtemps. Attaquons-nous à la prolifération des autorités administratives indépendantes, des observatoires et autres comités Théodule dépendant de Matignon.

Les Français attendent un budget de justice sociale et fiscale où l’effort sera partagé ; un budget dans lequel la redistribution des richesses financera non seulement la dépense sociale individuelle, mais aussi le redressement de nos services publics, à commencer par l’école et l’hôpital.

Patrimoine de ceux qui n’en ont pas, selon l’expression consacrée, le service public demeure le seul outil capable de lutter durablement, par-delà les générations, contre les inégalités sociales – ce constat ne dispense toutefois pas d’exiger une gestion plus rigoureuse à tous les échelons.

Le budget que nous attendons, c’est aussi un budget d’équité territoriale et d’aménagement du territoire : un budget qui répare les fractures et accompagne toutes les communes.

Notre pays a besoin d’un choc d’investissement public et d’un choc de déconcentration. C’est là le seul moyen de faire aboutir les projets en souffrance. Toutes les grandes nations qui se sont relevées des crises ont procédé ainsi, en conjuguant responsabilité budgétaire et audace dans l’investissement. Nous serons donc particulièrement attentifs à l’effort demandé aux collectivités locales.

Le budget que nous attendons, c’est encore un budget de progrès : de progrès techniques, scientifiques et écologiques ; de progrès humain, tout simplement, ce progrès auquel les radicaux croient encore.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous aussi !

M. Raphaël Daubet. Une nation comme la nôtre se sauvera par la recherche et le développement, par l’innovation, par l’université ; mais encore faut-il le vouloir !

Le budget que nous attendons, c’est enfin celui qui n’abîmera pas la politique étrangère de la France : un budget prenant en compte la double dimension du défi géopolitique qui est devant nous, alliant nos ambitions de défense et de sécurité à des politiques d’aide au développement susceptibles de faire entendre la voix d’une France crédible et sans arrogance.

Mes chers collègues, dans leur majorité, les élus du groupe RDSE ne sauraient soutenir ce budget en l’état. Mais, fidèles à notre tradition, nous aborderons les débats animés d’un esprit constructif,…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

M. Raphaël Daubet. … non par compromission, mais par conviction ; non par facilité, mais par responsabilité.

La France mérite selon nous une autre copie : celle qui préfère l’audace à la peur, la confiance à la défiance et l’action au conservatisme. Nous allons y travailler ensemble. La grandeur de notre pays se mesure non pas à l’aune de ses économies, mais à celle de ses ambitions. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP et sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Canévet. Messieurs les ministres, les membres du groupe Union Centriste tiennent à vous souhaiter la bienvenue au Sénat pour votre premier projet de loi de finances.

Le présent texte a toute son importance, car – je le souligne à mon tour – la situation de nos finances publiques est particulièrement préoccupante : un sursaut est aujourd’hui nécessaire et, à cet égard, nous comptons sur vous pour accompagner le travail du Sénat.

D’ailleurs, si l’on avait un peu plus écouté le Sénat ces dernières années, la situation actuelle serait sans doute moins dégradée qu’elle ne l’est… J’y insiste, les élus du groupe Union Centriste vous invitent à tenir compte des propositions qui seront formulées pendant ces journées d’examen du projet de loi de finances.

Hier, dans le premier quotidien du pays, le gouverneur de la Banque de France déclarait : « La France vit au-dessus de ses moyens depuis trop longtemps ». Nous sommes très nombreux à partager ce constat et à le déplorer ; nous voyons bien que c’est la crédibilité même de la France qui est en jeu.

Notre santé économique devrait être prospère. Hélas ! elle est à la peine, étant donné la lourdeur des charges et des déficits que nous avons à supporter. Par ailleurs, notre parole au sein de l’Union européenne est quelque peu décrédibilisée par la situation financière de notre pays.

Il faut le dire, la France a toujours été un moteur de l’Europe, et elle doit continuer à l’être. Toutefois, nous ne serons crédibles que si nous sommes capables d’être exemplaires. Or, en matière de finances publiques, nous ne le sommes pas. À l’évidence, une telle situation appelle des redressements.

Le groupe Union Centriste défendra un certain nombre de principes à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de finances. Ainsi plaidons-nous pour une véritable stabilité fiscale, de façon à renforcer l’attractivité de notre pays – c’est un point sur lequel je ne saurais trop insister.

En outre, il faut que des économies sur les dépenses soient véritablement effectuées. Bien entendu, les mesures qui s’imposent doivent être prises dans un esprit de justice et d’équité fiscales, pour l’ensemble de nos concitoyens.

Soyons clairs, la stabilité fiscale est essentielle. Nous avons mis beaucoup de temps à revenir dans les standards internationaux, par exemple en ce qui concerne l’impôt sur les sociétés. Veillons à ce que les efforts accomplis en ce domaine ne soient pas battus en brèche par des mesures fiscales prises en sens contraire.

Monsieur le ministre de l’économie et des finances, je vous ai bien écouté tout à l’heure. Je partage votre propos sur la nécessité d’assurer l’attractivité de notre pays. Toutefois, j’appelle votre attention sur le fait que les mesures fiscales applicables aux entreprises risquent d’avoir un effet déstabilisateur.

Le baromètre Ernst & Young (EY) de l’attractivité de la France, publié lundi dernier, le montre bien : la moitié des investisseurs étrangers souhaitent reporter leurs investissements en France, vu la situation actuelle.

Les changements survenus après la dissolution de l’Assemblée nationale sont en cause, de toute évidence, mais il faut y ajouter l’ensemble des mesures fiscales annoncées, qui contribuent à obérer la lisibilité de la situation.

Soyons-y attentifs, d’autant que le taux de chômage dans notre pays reste supérieur, de presque 1 point, à la moyenne de la zone euro : c’est dire l’effort qu’il nous reste à réaliser pour que les entreprises puissent continuer à recruter.

Or nous sommes nombreux ici à nous accorder autour d’un principe : l’émancipation de nos compatriotes se fera par le travail et par les revenus qu’ils peuvent en tirer.

Au chapitre des économies, il est certain que l’État doit être exemplaire, de façon à pouvoir justifier l’effort qui sera demandé à l’ensemble de nos concitoyens.

Nous devons par exemple œuvrer très activement à la réalisation d’économies sur les dépenses de personnel. Ainsi proposons-nous de ne pas remplacer un départ à la retraite sur quatre pour les fonctions supports, c’est-à-dire celles qui ne nécessitent pas qu’un agent se tienne physiquement devant les usagers – voilà une mesure essentielle.

Nous souhaitons que les économies soient portées aux deux tiers par des réductions de dépenses et au tiers par des recettes fiscales supplémentaires. Aussi formulerons-nous un certain nombre de propositions pour moduler l’effort en ce sens, sachant que le Haut Conseil des finances publiques n’a pas tout à fait la même lecture que le Gouvernement quant à la manière dont l’effort est distribué dans le projet de loi initial.

Nous le disons clairement, ledit effort doit être collectif. C’est la raison pour laquelle nous avons proposé, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), d’accroître la durée du temps de travail. (Marques de désapprobation sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.)

Le ministre des comptes publics l’a rappelé, en France, le temps de travail annuel est inférieur de 132 heures à la moyenne des pays de l’OCDE. Nous partageons ce diagnostic ; le temps de travail doit donc être accru si nous voulons produire davantage et de façon plus efficiente.

L’augmentation de la TVA compte au nombre des propositions qui tranchent dans ce projet de loi de finances ; elle est formulée par le groupe Union Centriste. Nous préférons que l’effort soit assumé par tous…

M. Thierry Cozic. Par les salariés, surtout !

M. Michel Canévet. … plutôt qu’il ne repose sur les seules entreprises, sans quoi s’ensuivra un effet récessif que nous déplorerons à coup sûr. (MM. Patrick Kanner et Pascal Savoldelli sexclament.)

Il faut selon nous augmenter le taux normal de TVA, qui s’élève aujourd’hui à 20 %, mais conserver le taux réduit de 5,5 % sur les produits de première nécessité et de 10 % sur les travaux de rénovation énergétique. Cette mesure nous paraît logique, vu l’ampleur de l’effort qui nous est demandé.

Les modèles économétriques le révèlent clairement : la TVA est l’impôt dont l’augmentation aurait le moins d’effets récessifs à court et moyen terme – à un an et à cinq ans –, non seulement par rapport à l’impôt sur le revenu ou à la contribution sociale généralisée (CSG), mais aussi par rapport aux transferts sociaux et surtout à l’impôt sur les sociétés. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

Le groupe Union Centriste sera aussi particulièrement mobilisé sur le sujet de la lutte contre les fraudes sociale et fiscale, comme il le fut la semaine dernière, lors de l’examen du PLFSS. Il importe que nous puissions avancer en ce domaine.

Tout à l’heure, le rapporteur général a évoqué l’arbitrage de dividendes. Notre groupe défend depuis très longtemps une proposition à ce sujet ; nous souhaitons qu’elle aboutisse enfin, car l’exemplarité est l’affaire de tous.

J’en ai terminé, monsieur le président ; mes collègues compléteront mon propos. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP. – M. Raphaël Daubet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, c’est avec sincérité et gravité que je m’exprime devant vous. (Ah ! sur les travées du groupe UC.)

En effet, les mots que je prononce s’adressent d’abord à toutes celles et à tous ceux qui subissent dans leur vie les conséquences d’une doctrine qui considère le capitalisme comme indispensable et comme la fin de l’histoire.

C’est aux côtés des victimes de ce système que les sénateurs et les sénatrices du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky ont été mobilisés ces dernières semaines.

Permettez-moi de penser aux 7 500 ouvriers qui sont aujourd’hui sur la sellette : ceux de Michelin, de Sanofi, de Vencorex, d’ArcelorMittal. Le nombre de fermetures d’usines atteint en effet un seuil inédit depuis la crise de 2008. Or, à nos yeux, 7 500 ouvriers valent mieux que 70 milliards de dividendes.

Nous pensons également aux conducteurs de bus de la RATP, aux cheminots et aux travailleurs du fret, à qui on impose une privatisation à marche forcée au nom de la concurrence illibérale et faussée.

Nous pensons aux Ultramarins et à la dignité de leur combat face à l’invivable vie chère.

Nous pensons aux petits exploitants, éleveurs et agriculteurs, qui ont compris la trahison des traités de libre-échange, de l’Accord économique et commercial global (Ceta, Comprehensive Economic and Trade Agreement) jusqu’au Mercosur.

Partout dans le pays, jusqu’à la Kanaky, cette multitude de travailleurs, d’agents publics et de familles touchées par la crise du logement a en partage le rejet du libéralisme autoritaire et un intérêt commun au progrès social et écologique.

C’est au cœur de cette froide avalanche de plans sociaux et de fermetures annoncées de services publics locaux que nous débattons d’une situation budgétaire totalement inédite.

En réponse à cet état que je qualifierais de « désharmonie sociale », l’Assemblée nationale a voté 471 amendements.

Ceux-ci, dans leur globalité, visaient à rétablir la justice fiscale et à réduire les inégalités sociales via une majoration des recettes fiscales de 34,4 milliards d’euros, soit une hausse de 10 % des recettes en faveur de l’action publique.

C’était responsable et c’était tout à fait acceptable, messieurs les ministres !

Seulement, comme l’expliquait mon collègue et camarade Pierre Barros, le choix a été fait par les députés d’annihiler ces avancées, à 362 voix contre et 192 voix pour. Nous discutons donc directement du projet de loi dans la version du Gouvernement.

Mais nous ne sommes pas dupes, et les citoyens qui nous écoutent doivent avoir conscience de la stratégie de ce gouvernement : laisser le Sénat débattre et arbitrer ensuite les décisions au moyen du 49.3 et de la commission mixte paritaire, cette dernière se substituant au débat de l’Assemblée nationale.

Par le biais de cet artefact institutionnel, le Gouvernement minoritaire rendra son budget majoritaire, un scénario déjà utilisé lors de l’examen de la réforme des retraites et du projet de loi pour contrôler l’immigration, soit les textes les plus antisociaux et réactionnaires que notre pays ait connus de longue date.

Le Gouvernement porte la responsabilité de ce coup de force institutionnel.

Ce projet de budget s’en prendra aux services publics, aux travailleurs et aux plus vulnérables. Il sous-tend de futures réformes structurelles. Malgré quelques évolutions actées côté recettes, le cap reste le même : c’est celui du piège de la dette, qui nous enferme dans une politique fortement récessive et pèsera sur la consommation populaire et les entreprises.

J’en viens à la partie recettes. Devant le trouble, le désarroi et la colère sociale, vous mettez à contribution les plus riches, les hauts revenus et les grandes entreprises, mais bien sûr de manière temporaire – et avec quelle timidité !

Citons notamment la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR), dont les recettes escomptées seraient de 2 milliards d’euros en 2025, en 2026 et en 2027, ainsi que la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, soit une surtaxe à l’imposition sur les bénéfices, qui ne concerne que les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard d’euros – excusez du peu.

Pour rappel, en raison d’un abaissement de 8 points du taux d’imposition sur les bénéfices, nous avons perdu 11 milliards d’euros de recettes fiscales. Or il s’agit précisément de la somme que vous demandez aux collectivités territoriales.

Les bénéfices – écoutez-moi bien – demeureront ainsi moins imposés qu’en 2017, alors qu’ils ont atteint un record de 153 milliards d’euros ! De surcroît, la contribution demandée n’est que temporaire !

Citons enfin la contribution sur les entreprises du secteur maritime…

M. Pascal Savoldelli. … dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard d’euros – pour rappel, ces entreprises bénéficient du régime fiscal de la taxe au tonnage –, ou encore la taxe sur les rachats d’actions. Au total, les entreprises ont racheté pour plus de 30 milliards d’euros d’actions l’année dernière, quand le rendement de la taxe prévue est estimé à 200 millions d’euros seulement, soit 0,6 % du montant des rachats. C’est à la limite de l’insolence !

Je vous ai bien entendu, messieurs les ministres, appeler à ce que les collectivités territoriales et l’action publique fassent mieux en ayant moins. Mettez plutôt à contribution tous ces riches, tous ces dividendes, tous ces bénéfices : demandez-leur de faire mieux en leur prenant un peu plus !

En tant que rapporteur spécial de la mission « Remboursements et dégrèvements », je sais qu’elle reste la plus importante du budget. Elle augmente même de 7 milliards d’euros, pour atteindre un montant total de 147 milliards d’euros.

J’en viens aux dépenses. La recherche d’économies se fait au prix d’un nouvel affaiblissement de la puissance publique, à hauteur de 40 milliards d’euros. Que vous le vouliez ou non, cette « super-austérité » est symbolisée par la suppression de 4 000 postes de professeurs et de 500 postes dans la politique de l’emploi, mais aussi par la fin du chèque énergie automatique.

Que dire par ailleurs des coups portés à l’investissement public local, qui est pourtant le premier levier de développement des petites et moyennes entreprises (PME) et des très petites entreprises (TPE) ?

Les ponctions demandées aux collectivités seront intenables ; nous assistons à une décentralisation de la dette de l’État. Pourtant, entre 2019 et 2023, l’exécutif a demandé de la transparence et de l’exactitude. Les collectivités ont dégagé un solde cumulé positif de 1,9 milliard d’euros, tandis que l’État affichait un solde négatif de 690,7 milliards d’euros !

Dans ces conditions, comment justifier une telle ponction ?

Vous le savez très bien, messieurs les ministres, la dette des collectivités territoriales est une dette saine, car elle repose uniquement, elle, sur l’investissement.

Bien sûr, face à l’incompréhension des acteurs de la démocratie locale, la majorité sénatoriale a d’ores et déjà annoncé quelques modifications substantielles, notamment une réduction de l’effort demandé.

Toutefois, au-delà des exercices comptables, il est faux d’affirmer qu’assécher les moyens des collectivités permettrait de réduire la dette de l’État, car celles-ci ne participent en rien à cet endettement.

Il y a un loup, forcément.

La vérité est plus profonde : il y va de l’effacement de l’action publique, nationale comme locale, sujet qui reste, excusez-moi de le dire, une ligne de partage au sein d’un attelage bicéphale, c’est-à-dire entre la majorité sénatoriale et le gouvernement minoritaire. Cet effacement va entraîner mécaniquement un transfert des moyens de l’action publique vers le privé.

C’est dans cette logique que l’on privatise les crèches municipales, que l’on privatise les lignes de bus, que l’on privatise les trains express régionaux (TER) et que l’on s’en prend aux agences.

L’objectif n’est donc pas de rétablir les comptes : derrière des discours alarmistes, le capital est non seulement préservé, comme je l’ai établi, mais il a même besoin de la dette !

C’est bien la raison pour laquelle vous validez le programme d’emprunts de la France sur les marchés financiers, qui atteindra près de 300 milliards d’euros de titres et d’obligations.

Je l’affirme, avec Emmanuel Macron, ce sont bien les créanciers de la dette qui ont pris le pouvoir depuis 2017, et le présent budget consacre la poursuite de cette politique.

Monsieur le ministre Armand, vous avez parlé, encore, de transparence et d’exactitude, mais pourquoi ne pas dire que le Haut Conseil des finances publiques estime une nouvelle fois que les prévisions du Gouvernement sont trop optimistes et que la dette augmentera encore ?

Et que dire de la dette privée, qui demeure un tabou ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Absolument pas !

M. Pascal Savoldelli. Ministres ou majorité sénatoriale, personne n’en parle, je ne sais pourquoi : il semble que nous n’ayons pas le droit d’en parler. Il arrive certes au rapporteur général de se lâcher sur le sujet – il connaît donc les chiffres.

J’insiste, cette dette est taboue. Savez-vous pourquoi ? Parce qu’elle frôle les 162 % du PIB ! Il faudrait que nous puissions en parler, car c’est nous qui la payons en partie.

Force est de constater que la majorité sénatoriale partage la philosophie de ce budget. En effet, nos collègues de droite ont en commun cet adage classique, tout à fait respectable : socialisation des profits et privatisation des pertes – c’est cela, votre ADN.

M. Olivier Paccaud. Petite caricature !

M. Pascal Savoldelli. Il existe donc des divergences profondes entre notre groupe et la majorité sénatoriale devenue gouvernementale, sur la dette, sur la conception des collectivités territoriales, sur la place du salariat, sur l’impôt.

Alors, que fait-on ? Les Français vont-ils pouvoir rester des citoyens, ou leur seul destin est-il de devenir des clients consommateurs ?

Enfin, je dirai quelques mots du capital et du travail. Ce débat est d’actualité, le Gouvernement ayant eu l’indécence, lors de l’examen du PLFSS, de demander sept heures de travail gratuit aux salariés.

La maximisation des profits, grâce à la mondialisation, le marché mondial du travail, le dogme de la concurrence libre et non faussée et l’individualisme libéral sont si profondément ancrés dans les choix politiques qu’un changement de paradigme reviendrait à une véritable révolution fiscale.

C’est précisément ce que nous proposons, via le rétablissement du taux d’imposition sur les sociétés à 33 %, assorti d’une progressivité, l’abrogation du pacte Dutreil et l’instauration de dix tranches au barème de l’impôt sur le revenu.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Pascal Savoldelli. Nous voulons aussi rétablir un service public capable de protéger les Français face aux crises, au travers d’un plan majeur en soutien aux services publics, au pouvoir d’achat, au logement pour tous et à une énergie décarbonée. Voilà notre conception de la nouvelle décentralisation ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. le président. La parole est à Mme Ghislaine Senée. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Ghislaine Senée. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous ouvrons le débat sur le projet de loi de finances pour 2025 dans un contexte politique des plus singuliers, et alors que l’avenir du gouvernement en place est des plus incertains.

Messieurs les ministres, vous qui êtes des soutiens de la première heure du Président de la République, vous avez accepté la responsabilité de vos charges respectives. Ainsi, vous consentez à assumer le bilan de sept ans de gestion des finances publiques par Bruno Le Maire.

C’est téméraire, tant les décisions du président Macron et de ses gouvernements successifs lors des deux précédents budgets, adoptés au forceps par 49.3, auront été lourdes de conséquences.

Leur refus de présenter un projet de loi de finances rectificative (PLFR) en 2024, malgré les alertes appuyées des parlementaires des deux chambres, et leur manque d’anticipation auront abouti à de mauvaises prévisions et à des surestimations de recettes qui ont mené la France dans cette situation critique de déficit abyssal.

Résultat : les recettes fiscales ont fondu, la dynamique économique n’est pas au rendez-vous, la croissance est inévitablement atone et le chômage repart à la hausse.

Le constat est sans appel : 900 milliards d’euros de dettes supplémentaires et un déficit public qui atteint 6,1 % du PIB pour 2024, sans contexte de crise ni justification d’investissements pour l’avenir. C’est un comble pour des partisans de l’orthodoxie budgétaire et du strict respect des contraintes du pacte de stabilité et de croissance.

Le contexte étant posé, le projet de loi de finances pour 2025 dans sa version initiale, celle qui est examinée au Sénat, est un budget de restriction qui se trompe de cible. En effet, vous persistez à prendre au plus grand nombre pour préserver les plus riches et refusez inlassablement le principe d’activation du levier des recettes – il semble parfois, selon le ministre qui nous répond, qu’il soit envisagé de l’accepter à titre temporaire : ce n’est pas très clair.

Vous êtes d’accord, en revanche, pour couper violemment dans les dépenses, en tapant fort et très vite, sans même vous soucier de l’effet récessif qu’une telle austérité va entraîner.

Dans cette perspective, vous voulez imposer 60 milliards d’euros d’efforts, là où la trajectoire de la Commission européenne, au travers de son pacte de stabilité et de croissance, n’en imposerait que 30 milliards. Pourtant, le Premier ministre ne ménage pas ses efforts et mobilise l’ensemble de son gouvernement pour lutter contre la surtransposition des directives européennes, coupable de susciter trop de normes et trop de contraintes – avouez que cela ne manque pas de piquant.

Aux yeux des écologistes, la réalité est que ce budget va achever de faire les poches des collectivités territoriales et de l’écosystème des institutions publiques et parapubliques, lesquelles jouent pourtant un rôle central dans l’investissement public et l’accompagnement des forces vives.

Par son refus purement dogmatique de lever de nouvelles recettes sur les hauts patrimoines, le présent texte, qui amplifie les injustices et les inégalités, va hypothéquer notre avenir et les conditions d’habitabilité de notre pays.

Commençons par les collectivités territoriales. Pensiez-vous qu’elles accepteraient volontiers de payer une partie des baisses d’impôts et cadeaux fiscaux non compensés depuis sept ans, et mis en œuvre sans concertation, après que vos prédécesseurs les ont accusées d’être responsables de la flambée du déficit ?

Pensiez-vous réussir à les mobiliser en n’affichant que 5 milliards d’euros de coupes dans leurs budgets, alors que c’est du double, ou presque, qu’il va falloir qu’elles se privent ?

Lors du Congrès des maires, c’est par le port d’une écharpe noire que les élus locaux vous ont répondu.

Gel de la dotation globale de fonctionnement (DGF) ; amputation du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée ; gel des recettes de la TVA ; fonds de précaution ; hausse du taux de cotisation patronale à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) ; réduction de 60 % du fonds vert ; suppression du plan Vélo ; réduction des crédits alloués aux acteurs tels que les missions locales : n’en jetons plus !

Tous les exécutifs locaux s’arrachent d’ores et déjà les cheveux pour savoir quel service public ou quelle mission ils vont devoir sabrer ; ils ne le font pas, je peux vous le dire, par gaieté de cœur !

Les annonces du Premier ministre aux départements ne seront pas suffisantes, tout le monde le sait. Celles qui ont été faites lors du salon des maires et des collectivités locales ne sont pas plus rassurantes.

Ainsi, le rabot de 2 milliards d’euros sur les efforts annoncés, négocié par la droite, est largement insuffisant.

Alors que les représentants des communes, des intercommunalités, des départements et des régions donnent l’alerte et dénoncent cette situation, le Sénat, pour la première fois de son histoire, sacrifie les collectivités sur l’autel de la doxa libérale !

Messieurs les ministres, l’érosion du lien de confiance entre l’État et les élus locaux ne cesse de s’amplifier. Administrer une collectivité, aujourd’hui, c’est jongler avec des dispositifs qui se créent et se défont, dont les règles sont modifiées ou qui ne répondent pas aux promesses initiales.

Ces incertitudes, qui rendent l’exercice de planification budgétaire laborieux, voire périlleux, ne sont pas acceptables.

En clair, les collectivités territoriales doivent retrouver leur capacité d’agir. Cela passe par un regain d’autonomie fiscale, condition essentielle pour restaurer le lien démocratique et fiscal entre les communes et leurs habitants, ainsi qu’avec les entreprises.

S’attaquer aux collectivités, c’est s’attaquer aux gens qui y vivent et qui y travaillent. Tout est question de priorités et de choix !

Les trajectoires budgétaires de la loi de programmation militaire (LPM), de la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice (LOPJ) et de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi) sont respectées. Tel n’est pas le cas pour la loi de programmation sur l’énergie et le climat (LPEC) ni pour la loi de programmation de la recherche (LPR), cette dernière étant amputée de deux tiers de ses crédits.

Pour répondre à la crise climatique, l’État dispose pourtant de nombreux outils : une stratégie nationale bas-carbone (SNBC), un secrétariat général à la planification écologique (SGPE) et un troisième plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc).

Tout cela ne s’assortit néanmoins d’aucun financement ni d’aucun calendrier ; vous ne tenez pas les objectifs fixés, alors même que l’urgence est là.

Depuis un an, dès qu’il faut faire une économie, c’est sur le climat que l’État décide de taper. Ainsi, le décret d’annulation de crédits du mois de février puis le gel et le surgel de l’été nous ont fait respectivement perdre 2,1 milliards et 1,6 milliard d’euros.

Quant au projet de loi de finances pour 2025, il acte une baisse de 17 % des crédits sur un an, aggravée par un amendement du Gouvernement visant une nouvelle diminution de 745 millions d’euros.

Pourtant, investir dans la décarbonation et l’agroécologie est économiquement rentable et socialement juste. Ce n’est pas l’écologiste que je suis qui le dit : ce sont Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz,…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Encore eux ?

Mme Ghislaine Senée. … dans leur rapport sur Les incidences économiques de laction pour le climat. Quant au rapport Draghi, il dit exactement la même chose.

L’inaction politique, qui consiste à attendre et à reporter, engendrera au contraire, dans le futur, des coûts bien plus importants, tout en produisant des effets catastrophiques dès maintenant.

Votre budget, messieurs les ministres, va à l’encontre de la nécessaire anticipation. Il ponctionne les crédits alloués aux politiques écologiques : rénovation thermique des bâtiments, déploiement des énergies renouvelables, sortie progressive des pesticides, protection de la nature et des terres agricoles contre l’artificialisation des sols, lutte contre la déforestation et développement des transports décarbonés.

En outre, il n’apporte aucun soutien supplémentaire aux secteurs de la santé et de l’éducation – je rappelle qu’il est prévu de supprimer 4 000 postes d’enseignants –, pas plus qu’au secteur social. Il y a là, pourtant, autant de facteurs de développement sociétal et d’avenir.

Rien n’est épargné, alors que les politiques en ce domaine ont vocation à améliorer la vie de nos concitoyens ; il faut maintenant changer de braquet.

Vous héritez de sept ans de politiques fiscales qui ont produit de la mauvaise dette et un accroissement de la concentration des richesses et des inégalités. Mais vous gardez le cap, enfermés dans votre dogme !

Si d’autres solutions existent, elles sont à chercher du côté des recettes de l’État et de la justice fiscale. Dans cette perspective, avec nos collègues des groupes de gauche du Sénat, nous avons déposé une liasse d’amendements identiques, qui a fait l’objet d’un travail commun, afin de défendre une autre vision de la fiscalité et de la justice.

Pour nous, écologistes, la justice fiscale relève du bon sens ; elle est un enjeu de maintien de la cohésion sociale.

Compte tenu de l’explosion des richesses et du patrimoine des plus riches pendant la crise sanitaire, nous proposons de mettre en œuvre la taxe conçue par l’économiste Gabriel Zucman, visant à taxer à hauteur de 2 % la fraction du patrimoine supérieur à 1 milliard – 1 milliard ! – d’euros.

Cette taxe qui toucherait 147 personnes seulement, nous l’assumons, car c’est grâce à notre pays si ces « premiers de cordée » ont pu accumuler de telles richesses. Alors que la France est en difficulté, c’est à eux de montrer l’exemple. Que l’État leur trace un chemin d’engagement et d’efforts !

Cette taxe pourrait générer 16 milliards d’euros de recettes fiscales, de quoi financer une partie des coupes budgétaires des collectivités et participer au remboursement de la dette.

Nous pensons également que le rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), assorti d’un volet climatique, et l’élargissement de la surtaxe Barnier sur les bénéfices des grandes entreprises sont de justes solutions.

Pour financer nos priorités – l’éducation, l’enseignement supérieur et la recherche, la santé, les politiques de l’emploi, la solidarité, le pouvoir de vivre dignement pour les plus précaires, les services publics de proximité et la transition écologique –, nous proposons des réaffectations de crédits dans les dépenses.

Ainsi, la rationalisation des primes à l’embauche d’apprentis peut permettre d’économiser près de 1 milliard d’euros par an.

Il faut également reconnecter l’économie aux territoires en rétablissant durablement la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), en augmentant le taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et en déplafonnant le taux du versement mobilité, dans un contexte de lourds investissements des collectivités pour l’amélioration des transports du quotidien.

De meilleures infrastructures engendrent des gains de productivité, monsieur le ministre Armand !

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires porte un regard à la fois très critique et très inquiet sur ce projet de loi de finances, qui est déconnecté des défis à venir, une décennie après l’accord de Paris.

Pour notre part, nous estimons qu’il est temps de rebâtir l’action publique, plutôt que de l’affaiblir : c’est tout l’enjeu du débat qui s’ouvre. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Thierry Cozic. Monsieur le ministre Armand, lors de votre passation de pouvoir, vous annonciez, un brin flagorneur, devant un Bruno Le Maire visiblement très satisfait de lui : « Je mesure la chance d’hériter d’un tel bilan économique ». Un total de 1 300 milliards d’euros de dette supplémentaire en sept ans et une commission d’enquête plus tard, force est de constater qu’il vous en faut peu pour être fier ! (Sourires.)

Il faut dire que, après sept années de macronisme, le bilan a de quoi faire rêver : 11 millions de pauvres, un taux de chômage qui culminera à plus de 7 % en fin d’année, un record de défaillances d’entreprises, des plans sociaux annoncés partout sur le territoire et une procédure de redressement pour déficit excessif engagée par la Commission européenne.

Vous êtes bien le seul à vous estimer chanceux, monsieur le ministre…

C’est donc tout naturellement que de cette faillite économique découle le discrédit politique. Celui-ci s’est matérialisé à l’occasion des dernières élections législatives, qui ont mis en déroute l’ancienne majorité présidentielle.

Il importe en effet de rappeler que votre présence face à nous aujourd’hui tient de l’anomalie démocratique, tant vous êtes illégitime à présenter un projet de loi de finances devant les Français.

Ce PLF est en définitive celui de l’Internationale de la lose : il permet aux deux forces politiques arrivées en dernier aux élections législatives de nous resservir leur vieille recette libérale datée. Elles osent nous donner des leçons de sérieux budgétaire, alors que l’état des finances publiques n’a jamais été aussi grave, hors temps de guerre.

Je le répète, messieurs les ministres, vous êtes illégitimes, car le seul véritable gagnant de ces élections, c’est le front républicain, sur lequel vous vous êtes assis en plaçant votre minorité gouvernementale dans la main de l’extrême droite.

Et que dire des Républicains, qui ne doivent leur groupe à l’Assemblée nationale qu’aux désistements de l’entre-deux-tours et au front républicain, auquel ils n’ont jamais appelé ?

Les débats à l’Assemblée nationale l’ont montré : votre attelage bringuebalant a été battu un nombre de fois considérable, y compris par vos propres alliés en carton du « socle commun ». Lesdits alliés ont concentré à eux seuls plus de la moitié des amendements de séance, avec une mention spéciale pour les députés du groupe Droite Républicaine qui, encore marqués par douze années d’expérience dans les rangs de l’opposition, se sont comportés comme des opposants à leur propre budget.

Lorsque j’entends nos collègues du groupe Les Républicains du Sénat expliquer qu’ils seront l’organe de la raison, je m’interroge, vu leur mémoire sélective et leurs alliances à géométrie variable.

Dois-je rappeler que l’augmentation de la dette est également leur faute, puisqu’ils avaient conditionné leur vote du budget en 2023 à la mise en place du chèque carburant ?

Messieurs les ministres, votre gouvernement, en raison de son équation politique, se retrouve dans une situation politique insoluble. Il manquait déjà 5 milliards d’euros dans votre budget quand vous l’avez déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, mais, à mesure que le Premier ministre entend satisfaire vos alliés de circonstance, les mesures d’économie fondent comme neige au soleil.

C’est ainsi que le groupe Les Républicains du Sénat ne veut pas entendre parler d’une augmentation des taxes sur l’électricité au-delà de leur niveau d’avant-crise : cela représente un manque à gagner de 3,4 milliards d’euros. Il entend également ramener l’effort demandé aux collectivités locales à 2 milliards d’euros, en supprimant notamment le fonds de compensation imposé aux grandes collectivités, privant ainsi votre gouvernement de 3 milliards d’euros d’économies supplémentaires.

Quant au groupe Ensemble pour la République de l’Assemblée nationale, il refuse le coup de rabot à 4 milliards d’euros sur les allègements de cotisations patronales.

Au total, les exigences des parlementaires du socle commun entraîneraient un manque à gagner de 10,5 milliards d’euros.

Votre budget s’apparente à un grand jeu de bricolage : on y déshabille Paul pour habiller Jacques, en fonction de la météo politique du moment. Il est ainsi édifiant de constater que vous avez laissé le député Wauquiez, qui s’est pris pour un vice-premier ministre l’espace d’un journal télévisé, annoncer en grande pompe la division de votre mesure sur les retraités.

Maintenant que le décor politique est planté, abordons le présent texte.

Tout d’abord, comme à l’accoutumée, les hypothèses macroéconomiques qui y figurent ne sont absolument pas crédibles : votre gouvernement évalue la croissance économique pour 2025 à 1,1 %, une prévision lacunaire, car il y manque l’essentiel, c’est-à-dire la prise en compte de l’effet récessif des mesures annoncées, que l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) évalue à 0,8 point : une paille !

La réduction du déficit ainsi opérée est trop rapide ; elle va grever la croissance et l’investissement, alors même que nombre de plans sociaux sont prévus. Selon l’OFCE, toujours, votre budget détruira directement 130 000 emplois.

Le Président de la République a lui-même déclaré, à propos du dérapage du déficit, que le problème n’avait pas trait aux dépenses, mais à de moindres recettes. Par conséquent, nous vous apporterons des solutions afin de faire contribuer plus équitablement tous les Français à l’effort collectif. Nos propositions visent à faire pencher la balance du côté de la justice fiscale, quand votre budget nous promet une véritable régression sociale.

J’ai entendu dire, çà et là, que nous exagérions en qualifiant ce PLF de budget d’austérité ; mais comment ne pas avancer ce mot quand 4 000 postes de professeurs sont supprimés, quand 500 postes dédiés à la politique de l’emploi sont supprimés, quand 100 millions d’euros sont supprimés pour l’insertion des personnes en situation de handicap – un comble, alors que le décret relatif à la composition du Gouvernement avait purement et simplement fait l’impasse sur la nomination d’un ministre chargé du handicap ?

Comment ne pas parler d’austérité quand vous faites 4 milliards d’euros d’économies sur la santé, alors que les déserts médicaux n’ont jamais été aussi nombreux et que même les zones urbaines désormais sont touchées ? Comment ne pas parler d’austérité quand l’écologie sert encore de variable d’ajustement de vos errements budgétaires – je pense aux budgets de MaPrimeRénov’ et au fonds vert pour les collectivités locales ?

De toute évidence, vous faites plus grand cas de la dette budgétaire que vous avez vous-même creusée que de la dette écologique que vous laisserez à nos enfants.

Face à ce budget inique, nous prenons acte des déclarations du Président de la République : le problème réside dans le manque de recettes et non dans les dépenses. Nos propositions visent donc à combler le déficit que vous avez laissé béant.

Afin de rétablir un peu de justice fiscale, après sept années d’iniquité sociale, nous proposerons d’augmenter le prélèvement forfaitaire unique (PFU) de seulement 3 points, soit 1 milliard d’euros supplémentaires, alors que les revenus du patrimoine ont crû de 59 milliards d’euros en 2023.

Nous proposerons de taxer significativement les superprofits, à hauteur de 15 milliards d’euros, au moment même où le CAC 40 accumule plus de 146 milliards d’euros de bénéfices, dont 36 milliards d’euros de superprofits.

Toujours animés par la volonté de trouver de nouvelles recettes, nous proposerons de mettre fin à la pratique de l’arbitrage de dividendes, alors que le CAC 40 en a versé plus de 68 milliards d’euros en 2023, soit une progression de 44 % par rapport à 2017.

Par ailleurs, par souci de ne pas agir uniquement sur les recettes, nous vous proposerons d’intervenir sur les dépenses et, plus précisément, sur les divers et dispendieux crédits d’impôt qui minent nos budgets depuis des années.

Enfin, messieurs les ministres, nous vous demandons très solennellement de ne pas faire des collectivités locales le bouc émissaire facile de sept ans de gestion erratique. Nous refusons d’emblée toutes les ponctions que vous souhaitez leur faire subir. Rappelons que l’État, qui accuse un déficit de plus de 3 300 milliards d’euros, entend faire la leçon aux élus locaux qui, astreints à la règle d’or, doivent présenter chaque année un budget à l’équilibre.

Durant nos débats, nous aurons à cœur d’avancer des propositions dont l’adoption garantirait des marges de manœuvre solides à nos élus locaux, notamment l’indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l’inflation ou l’augmentation significative du taux des DMTO pour les départements, qui traversent une crise financière inégalée.

Vous l’aurez compris, nous ne sommes pas fatalistes, nous sommes responsables pour deux, et nous ne souhaitons pas nous inscrire dans une opposition stérile qui n’aurait pour issue que le blocage.

Nous jugerons donc sur pièce, messieurs les ministres, votre capacité à nouer des compromis et c’est à l’aune de l’acceptation de nos propositions que nous nous déterminerons.

En l’état, nous voterons contre ce projet de budget pour 2025. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Grégory Blanc applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Aymeric Durox.

M. Aymeric Durox. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous entamons le débat le plus important de l’année dans un contexte inédit : absence de majorité à l’Assemblée nationale, absence de consensus dans le pays, absence, en réalité, d’un gouvernement responsable, celui dont nous disposons étant ballotté dans une coalition des contraires et des ambitieux, incapable de se donner une direction – sa longévité même paraît incertaine, oscillant entre quelques semaines et plusieurs mois.

La situation budgétaire est dramatique et tous les constats sont déjà connus : des prévisions de croissance surévaluées, une faillite dans l’évaluation des recettes, un cycle économique qui se retourne, une situation internationale plus que dangereuse.

Face à cette réalité, la réponse semble évidente : réaliser des économies. Le Gouvernement prétendait fournir un effort immédiat de 60 milliards d’euros ; le Premier ministre affirmait même une fameuse règle des deux tiers : deux tiers d’efforts sur les dépenses publiques, un tiers de recettes nouvelles concentrées sur les grandes entreprises et la revue à la baisse des multiples exemptions de cotisations sociales.

Néanmoins, la Cour des comptes a bien montré que ce principe affirmé ne correspondait pas à la réalité du budget, ce qu’ont confirmé les débats parlementaires.

Voilà encore, en effet, un budget d’augmentation des dépenses publiques – un comble ! Les efforts portent principalement sur les collectivités et sur les droits sociaux des Français ; des impôts nouveaux apparaissent, certes, sur les grandes entreprises, mais également sur les plus petites, remettant en cause la politique d’allègement du coût du travail défendue durant les sept dernières années, et une dizaine de taxes supplémentaires sur les particuliers viennent encore accentuer la pression fiscale qui pèse sur les Français, qui sont déjà les contribuables les plus taxés au monde.

En complément de la nécessaire baisse des dépenses, sur laquelle je reviendrai, nous devons aussi miser sur la croissance. Seule une économie productive, créant des emplois et générant de l’activité, peut alléger le poids des efforts budgétaires. À cette obligation, par quoi répondez-vous ? Par un budget flou et récessif…

Alors même que la récession commence et que les plans sociaux s’égrènent, avec leur cortège de drames et de dépenses publiques nouvelles, vous désintégrez la confiance des ménages et des entreprises. Les investissements des entreprises privées sont pourtant déjà en baisse depuis plusieurs trimestres et il en va de même des investissements immobiliers des ménages.

Les collectivités portent 70 % de l’investissement public et nous arrivons en fin de cycle des investissements engagés par les élus, particulièrement municipaux ; pourtant, vous cassez la dynamique en leur imposant des coupes insensées de 5 milliards d’euros, alors même que leurs dépenses sont de plus en plus contraintes, sans possibilité d’agir via l’arme des impôts locaux, que les gouvernements précédents ont impitoyablement supprimés.

Cela étant, nous reconnaissons évidemment qu’il faut faire des économies. Le Rassemblement national a rendu sa copie en la matière : nous considérons qu’il faut procéder à des baisses de dépenses claires pour adresser aux acteurs économiques un message de confiance et de sérieux.

Vous ne touchez pas au coûteux maquis des opérateurs de l’État, lesquels se partagent, dans la plus grande opacité de gestion comme d’action, un pactole de 80 milliards d’euros.

Vous ne touchez pas à la gabegie structurelle de l’aide au développement. Ainsi, nos compatriotes seront heureux de savoir que nous continuons de distribuer des centaines de millions d’euros au Mexique ou à la Chine, qui en ont sans doute grand besoin !

Vous ne touchez pas au scandale entourant le développement inefficace de l’éolien, qui donne lieu, via des contrats léonins, à des milliards d’euros de dépenses nouvelles.

Vous n’opérez aucune remise en cause non plus du dogme immigrationniste : vous maintenez les 750 millions d’euros de subventions publiques à 1 350 associations pro-migrants, soit, sur dix ans, des subventions multipliées par trois pour un nombre de reconduites à la frontière divisé, lui, par trois.

Quant à nous, nous avons pris nos responsabilités en proposant 25 milliards d’euros d’économies réelles, gagées sur la rationalisation des dépenses publiques, la suppression des comités Théodule coûteux et inefficaces, la fin de délires budgétaires comme le plan Vélo de l’État ou les trop nombreuses aides à la presse.

Pour ce qui est des finances sociales, dont la chambre haute vient de finir de débattre, au lieu de toucher au tonneau des Danaïdes des aides sociales, dont le produit s’échappe par des frontières ouvertes à tous les vents, le Sénat a voté sept heures de travail gratuit pour financer nos retraites.

Mes chers collègues, le maintien de notre système social ne peut passer que par la croissance ; nous voulons une France qui travaille, une France des producteurs, non une France des subventions et des profiteurs. Las ! au lieu d’organiser, comme le propose Marine Le Pen depuis deux ans, un dispositif d’augmentation des salaires par le gel des cotisations sociales, vous augmentez ces dernières, au moment même où la consommation des ménages et la confiance des entreprises sont au plus bas.

Je pourrais poursuivre cette visite dans le musée des horreurs de vos propositions budgétaires : attachés comme le serf à la glèbe, vous ne remettez pas en cause le marché de l’énergie européen et vous proposez une énième réforme du dispositif de l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique), qui a condamné notre fleuron national EDF, en augmentant, au passage, les taxes sur l’électricité et les chaudières au gaz.

Par ailleurs, la contribution de la France à l’Union européenne progresse encore, comme si nous pouvions nous le permettre, alors que notre groupe à l’Assemblée nationale l’avait légitimement supprimée.

Une fois de plus, ce budget respire le conformisme des solutions éculées, la douceur endormante du déclin, l’irresponsabilité d’un système qui se refuse à être comptable, si ce n’est coupable, de la situation.

M. le président. Il faut conclure.

M. Aymeric Durox. En ces termes, nous ne pouvons l’approuver et nous attendons la rupture, d’abord gouvernementale, ensuite politique, qui nous permettra de remettre la France en ordre et au travail.

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. le rapporteur général et M. Claude Nougein applaudissent également.)

M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, messieurs les ministres – les deux ministres sont présents au banc, ce qui n’est pas si fréquent au début de l’examen du PLF ! –, mes chers collègues, « L’État, c’est moi. » : ainsi parlait Louis XIV devant le Parlement de Paris. Aujourd’hui, en République, l’État, c’est nous – nous tous. Mais qu’attendons-nous de l’État ? Quelle doit être sa place dans notre société ? L’État, mes chers collègues, est ce que nous décidons collectivement qu’il soit.

Et l’État, c’est avant tout ses missions premières, dites régaliennes, qu’il n’est pas inutile de rappeler dans cet hémicycle : la sécurité, la justice, l’armée, la diplomatie et la monnaie.

M. Olivier Paccaud. Et l’école !

M. Emmanuel Capus. Des missiles traversaient le ciel européen la semaine dernière, mais certains parlent encore de décaler la loi de programmation militaire qui porte nos dépenses à seulement 2 % du PIB.

Nous dépensons 38 milliards d’euros par an dans la politique du logement ; c’est trois fois plus que le budget de la justice. Pour quels résultats, mes chers collègues ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous sommes d’accord.

M. Emmanuel Capus. Alors qu’il a neigé jeudi dernier dans nos villes et dans nos campagnes, des gens continuent de dormir dans la rue et une crise immobilière nous menace.

Nous dépensons deux fois plus en paiement des intérêts de la dette cette année que ce que nous allouons à nos forces de l’ordre pour nous protéger.

Le groupe Les Indépendants considère que l’État doit d’abord se consacrer à ses missions premières, mais aussi à la santé et à l’éducation – vous avez raison sur ce point, mon cher collègue Paccaud. Il doit aussi penser aux générations futures, en investissant dans la lutte contre le changement climatique et dans la recherche et l’innovation, qui nous permettront de nous maintenir dans la compétition mondiale.

Pour y parvenir, l’État a besoin d’un budget, et d’un budget équilibré.

Abordons pour commencer les recettes. Je cite Karl Marx : « Il n’y a qu’une seule façon de tuer le capitalisme : des impôts, des impôts et toujours plus d’impôts ». Je dois dire que cette recette se révèle assez juste et efficace. Malgré les très importants efforts consentis en la matière depuis 2017, nous demeurons, cette année encore, le pays de l’OCDE dont le taux de prélèvements obligatoires est le plus élevé. Ce record n’est pas une gloire : ainsi que le prédisait Karl Marx, il contraint nos concitoyens dans leur liberté et nos entreprises dans leur capacité d’innovation.

Aussi n’avons-nous presque plus de marge de manœuvre fiscale pour faire face à la crise budgétaire qui nous menace. Notre groupe a défendu pendant des années des baisses de la fiscalité qui ont produit des résultats sensibles : diminution du chômage, hausse des investissements étrangers, amélioration de notre compétitivité.

Toutefois, face à la chute imprévue et rapide de nos recettes et pour éviter une crise financière grave, le Gouvernement fait le choix d’une augmentation « exceptionnelle, temporaire et ciblée » – je vous plagie, monsieur le ministre – de la fiscalité sur les ménages les plus aisés et sur les plus grandes entreprises de ce pays.

Nous nous y résignons, à contrecœur, mais nous nous assurerons, dans le cadre de ce débat, qu’une fois la crise budgétaire évitée cette hausse des impôts s’éteindra – nous savons qu’en la matière la mémoire se montre parfois défaillante.

Venons-en maintenant aux dépenses. Comme je l’ai indiqué, les sénateurs du groupe Les Indépendants sont attachés aux dépenses régaliennes ; nous soutiendrons donc l’application complète des lois de programmation des ministères de la défense, de la justice et de l’intérieur.

Nous vous proposerons, ou nous soutiendrons, une série d’amendements tendant à diminuer les dépenses des missions non régaliennes, à l’exception de la santé, de l’éducation, de la lutte contre le réchauffement climatique, de la recherche et de l’innovation, que nous souhaitons sanctuariser.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Que reste-t-il ?

M. Emmanuel Capus. Lorsqu’on évoque les finances de l’État, il importe de prendre la mesure des choses. Chaque automne, dans cet hémicycle, il est question de milliards, voire de dizaines de milliards d’euros pour certaines missions.

Cependant, nous-mêmes, comme nos concitoyens, avons parfois perdu le sens de la dépense publique. Qu’est-ce que 1 milliard d’euros, mes chers collègues ? Que représentent 10 milliards d’euros ?

Permettez-moi de comparer nos dépenses publiques avec deux exemples palpables que chacun ici comprendra aisément.

Une enveloppe de 1 milliard d’euros, c’est précisément ce que l’État a décidé d’allouer en 2025 au fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, le fonds vert, créé par Christophe Béchu. Cette somme irriguera tout au long de l’année l’ensemble de nos territoires afin de financer les projets des collectivités locales dans les domaines de la performance environnementale, de l’adaptation au changement climatique et de l’amélioration du cadre de vie. Voilà ce que représente 1 milliard d’euros d’action publique : un an d’initiatives écologiques concrètes.

Passons à plus concret encore : 10 milliards d’euros, c’est le coût d’un porte-avions de nouvelle génération, celui dont la mise à l’eau est prévue d’ici dix à quinze ans. Nous ne construisons un tel navire que tous les trente ou quarante ans, et la France ne pourra s’en offrir qu’un seul.

Comparons maintenant ces montants avec les dépenses de l’État : en 2024, la charge de la dette de l’État s’élève à plus de 50 milliards d’euros. Chaque année, nous sabordons donc l’équivalent d’une flotte entière en nous acquittant des intérêts de la dette, fruit de cinquante années de mauvaise gestion, sans même rembourser le capital, comme vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur général.

Sans ce fardeau, nous aurions pu, en l’espace de trois ans à peine, financer ce qui aurait probablement été la marine la plus puissante du monde. Tel est l’état de nos dépenses, mes chers collègues !

Le Gouvernement nous propose de réduire nos dépenses afin d’éviter une crise budgétaire ; il a bien raison. Néanmoins, au-delà de cette menace immédiate, il nous faut nous interroger sur le plus long terme, sur ce à quoi nos deniers publics sont réellement employés.

La baisse des dépenses publiques sur le long terme est une absolue nécessité ; cette politique avait été amorcée avec succès, il faut le dire, par Édouard Philippe lorsqu’il était Premier ministre.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Ah bon ?

M. Emmanuel Capus. La France avait alors su montrer sa capacité à respecter la règle des 3 %. Pour retrouver trace d’un tel sérieux économique, il faut remonter à 2006 !

Une fois la crise budgétaire évitée, il faudra que nous nous attelions sans délai à réduire durablement nos dépenses. Il s’agit non pas de sacrifier tel ou tel service public, mais de nous redonner des marges de manœuvre budgétaires afin de pouvoir décider, le moment venu, de renforcer tel ou tel service public. La diminution doit se concentrer sur les dépenses de fonctionnement des ministères et des agences, et non sur les dépenses d’investissement.

Il en va de même pour nos collectivités, cœur battant de notre République : elles sont prêtes à participer elles aussi à l’effort budgétaire de la Nation. Mais cet effort doit être soutenable, juste et équitablement réparti entre toutes les collectivités qui en ont les moyens. C’est pourquoi, aux côtés du rapporteur général et de la commission des finances, nous nous opposerons à une révision du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée ; c’est pourquoi aussi nous apporterons notre soutien au rapporteur spécial et à la commission des finances en ce qui concerne la substantielle révision du fonds de réserve demandée aux collectivités territoriales.

Telle est, mes chers collègues, la position du groupe Les Indépendants. Vous l’aurez compris, nous nous attacherons à soutenir loyalement le Gouvernement, en faisant porter l’effort majoritairement sur la diminution des dépenses publiques et, pour une part qui doit être la plus réduite possible, sur une hausse exceptionnelle, temporaire et ciblée de la fiscalité de ceux qui en ont les moyens. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – M. Vincent Louault applaudit également.)

Mme Christine Lavarde. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, avez-vous déjà joué à un jeu de société ? Ces jeux nous enseignent quelques impératifs auxquels ce projet de loi de finances mériterait de se conformer.

La stabilité, tout d’abord : si vous jouez aux jeux de société, vous savez d’expérience que, sans règles claires et précises, il n’y a pas de jeu. Vous savez aussi qu’une fois définies les règles ne sauraient être modifiées en cours de partie : pareil changement risquerait évidemment de susciter l’ire des participants. En matière d’économie, c’est exactement la même chose : la règle doit être connue de tous et ne doit pas être modifiée.

C’est la raison pour laquelle il n’est pas possible d’accepter la remise en cause a posteriori des règles régissant le FCTVA ou encore la modification de la trajectoire du malus auto, alors que les industriels ont adapté leur chaîne de production.

M. Olivier Paccaud. Très bien !

Mme Christine Lavarde. C’est la raison pour laquelle il n’est pas possible de reporter l’inscription dans la loi du mécanisme de partage de la production nucléaire qui doit venir remplacer le mécanisme de l’Arenh au 1er janvier 2026.

Français, acteurs économiques, collectivités locales, tous ont besoin de sécurité juridique.

La lisibilité, ensuite : si vous jouez aux jeux de société, vous savez également qu’il est important que la règle soit simple et intelligible ; la complexifier inutilement conduit à perdre les joueurs.

Après la crise de 1958, le général de Gaulle, revenu au pouvoir, forme un gouvernement d’union nationale et se consacre à une tâche de stabilisation aux effets durables – toute ressemblance avec la situation politique et économique actuelle n’est pas fortuite… Après trente-neuf séances de travail, le comité Rueff remet au Général un rapport de vingt-cinq pages – ce serait inimaginable aujourd’hui – contenant quelques mesures essentielles et particulièrement courageuses. Le plan prescrit, en particulier, une cure d’amaigrissement de l’administration.

Il y a un an, à cette tribune, je pointais les 340 aides aux entreprises existant en matière d’accompagnement à la transition écologique. La situation a-t-elle changé depuis lors ? Les chantiers de simplification mis en œuvre depuis plusieurs décennies s’apparentent davantage à des opérations de communication qu’à une réelle ambition transformatrice. À l’illisibilité s’ajoutent la perte de sens et l’absence d’une vision de long terme.

Comment convaincre les Français de poursuivre l’électrification des usages quand l’électricité se trouvera demain la source d’énergie la plus taxée à la tonne de CO2 émise ? Au vu de l’évolution des prix toutes charges comprises de l’électricité, la fiscalité de rendement a du sens à court terme ; malheureusement, cette orientation envoie un mauvais message aux consommateurs pour ce qui est de leurs comportements de long terme. Il aurait été plus compréhensible d’appliquer la même règle à toutes les consommations d’énergie. Dans un contexte de baisse des prix de gros, les consommateurs sont appelés à rembourser partiellement l’aide que l’État leur a octroyée pendant la crise. Rappelons ici qu’il y va tout de même de 50 milliards d’euros…

Entrevoir la victoire sous le prisme du gain budgétaire ou politique, ce n’est pas gouverner : c’est succomber à la tragédie du moment. Savoir ne pas s’y soumettre est ce qui détermine, à mon sens, le sens de l’État.

Après la stabilité et la lisibilité, citons en troisième lieu le souci du nombre : si vous jouez aux jeux de société, vous savez qu’en fonction du nombre de joueurs le jeu sera très différent. Jouer au Cluedo à deux ou à huit ne relève pas tout à fait du même niveau de difficulté…

Année après année, nous votons un budget pour la France sans tenir compte du nombre de Français et de la chute très inquiétante de la démographie. Depuis 2010, le recul de la natalité est de 19,8 %. La branche famille est la seule branche déficitaire de la sécurité sociale ; c’est tout un symbole et, surtout, un mauvais signal.

Nous indexons les retraites sans tenir compte de la chute vertigineuse du nombre d’actifs cotisant pour les financer. Le projet de loi de finances pour 2025 est le premier à intégrer l’effet en année pleine de la réforme paramétrique de 2023 ; cependant, selon les projections publiées par le Conseil d’orientation des retraites (COR) en juin 2024, le système sera déficitaire dès cette année, et le déficit continuera à s’aggraver pour atteindre 0,4 % du PIB en 2030 et 0,8 % en 2070.

Nous votons un PLFSS sans tenir compte du vieillissement de la population et des milliards d’euros nécessaires pour financer la dépendance et le grand âge.

Comment repensons-nous l’organisation de l’enseignement afin d’éviter que n’augmente le coût par élève sans contrepartie quant à l’amélioration du niveau scolaire ?

Aux dames, aux échecs, dans tous les jeux de stratégie, si l’on veut avoir une chance de gagner, il faut anticiper les actions futures au moment de déplacer sa pièce. Comme dans les jeux de société, en économie ouverte, il faut tenir compte du nombre de joueurs et anticiper leurs stratégies.

Dernier impératif : l’égalité entre les joueurs. Si vous avez déjà joué au Monopoly, vous savez que la fiscalité n’est pas absente du jeu : deux cases du plateau prévoient un impôt sur le revenu et une taxe ; des cartes dites « Chance » et « Caisse de communauté » peuvent également imposer une contribution particulière. Or ces taxes sont prévisibles et fixes : il n’existe pas de prélèvement sur bénéfices exceptionnels surgissant au milieu du jeu.

Dans notre histoire récente, que fait l’État quand il manque de trésorerie et que les recettes sont moindres que prévu ? Il lève des impôts supplémentaires, ce qui crée de l’incertitude. Ce faisant, il profite de ses prérogatives pour dévier des règles qui s’appliquent à tous.

La lecture du dernier baromètre d’Ernst & Young sur l’attractivité est sans appel : en quelques mois, la confiance des investisseurs s’est évanouie. Les incertitudes législatives et réglementaires, ou encore la difficulté à bâtir des plans d’affaires fiables, sont la première cause du report des décisions d’investissement.

Pis, les entreprises quittent la France. Tikehau Capital, un fonds d’investissement qui gère plus de 50 milliards d’euros d’actifs, réfléchit à être coté à Wall Street ; le groupe Canal+ va s’introduire en bourse à Londres ; après sept ans d’absence des marchés financiers, Havas sera coté à Amsterdam à partir de décembre.

Les dirigeants interrogés avancent deux conditions au maintien de leur projet en France : la stabilité fiscale, alors que le taux de prélèvements obligatoires atteint des records, et une limitation de l’ampleur des ajustements imposés par le PLF, d’une part ; la réduction de la dépense publique, d’autre part.

La hausse de la fiscalité n’est acceptable que lorsqu’elle permet de corriger ou d’inciter à un comportement plus vertueux. Il y a du sens à punir celui qui ne respecte pas la règle, ou celui qui préfère utiliser un mode de production polluant plutôt que son alternative décarbonée plus onéreuse : c’est une application du principe de liberté et de responsabilité.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

Mme Christine Lavarde. Au Monopoly, la banque ne fait jamais faillite, elle peut mettre en circulation autant d’argent que nécessaire sous forme de reconnaissance de dette écrite sur du papier ordinaire. Cela fait rêver, messieurs les ministres !

Malheureusement, nos règles financières sont un peu plus complexes et l’État ne peut pas mettre en circulation autant d’argent que nécessaire, même si d’aucuns ont cru le contraire pendant la période du « quoi qu’il en coûte » – même si certains, ajouterai-je, le croient encore.

Le taux d’intérêt auquel emprunte la France pour financer sa dette a sensiblement augmenté ces derniers mois ; autrement dit, les investisseurs ont évalué à la hausse le risque français.

Messieurs les ministres, mes chers collègues, durant les deux prochaines semaines, je crains que nous n’ayons pas le temps de jouer aux jeux de société. Cependant, gardons à l’esprit tout au long de nos débats quelques grands principes : disposer d’une ligne de conduite claire et intelligible ; ne pas changer la règle du jeu quand celle-ci a été intégrée par les acteurs économiques ; anticiper les évolutions démographiques et macroéconomiques pour construire une trajectoire soutenable à long terme ; se doter d’une fiscalité prévisible visant à orienter les comportements ; s’interdire toute politique de l’argent magique.

Telles sont, messieurs les ministres, les règles du jeu du groupe Les Républicains.

La France mérite que ce gouvernement réussisse. Pour ce faire, il importe de lier le courage à la responsabilité, la rigueur à la créativité, le souci du temps long à celui du plus grand nombre. Une fois ce budget adapté et voté viendra le temps des réformes structurelles que notre pays attend depuis trop longtemps, et qui devront répondre aux défis des transitions écologique, démographique et numérique.

Gardons tous ici à l’esprit que, comme le disait Jacques Chirac, « mobilité et stabilité ne sont pas antinomiques : un cycliste n’est stable sur sa bicyclette qu’en avançant. » (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Georges Patient.

M. Georges Patient. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la situation financière de notre pays est très préoccupante. Pour y répondre, il nous faut collectivement faire preuve de responsabilité et trouver la voie des compromis qui nous permettront de sortir de cette crise par le haut.

L’objectif premier de ce projet de loi de finances pour 2025 est naturellement le redressement des comptes de la Nation.

Face à la baisse des recettes, le précédent gouvernement avait amorcé ce mouvement en annulant 10 milliards d’euros de crédits dès le début de l’année 2024 puis en doublant le montant de la réserve de précaution, pour la porter à 16 milliards d’euros.

Il nous faut continuer dans ce sens et amplifier fortement le mouvement. Il y va de l’avenir de notre pays, c’est-à-dire de notre capacité à continuer d’investir pour transformer notre économie, adapter notre société aux changements climatiques et démographiques et faire face aux nouvelles menaces.

Si nous voulons ne pas être acculés par le poids de la dette, qui sera bientôt le premier budget de l’État, si nous voulons garder des marges de manœuvre budgétaires pour faire face aux prochaines crises, si nous voulons continuer à peser en Europe et dans le monde et conserver notre crédibilité, il nous faut, j’y insiste, redresser nos comptes.

La Guyane, mon territoire, nous donne d’ores et déjà une illustration des risques auxquels nous nous exposons. Notre souveraineté y est en effet bafouée par des garimpeiros venus par milliers piller notre ressource aurifère ou par des tapouilles venues par dizaines pêcher illégalement dans nos eaux.

L’effort sera très important, et même inédit, puisqu’il est chiffré à 60 milliards d’euros. La répartition choisie est de deux tiers pour les dépenses et d’un tiers pour les recettes, l’effort de modération des dépenses étant réparti entre l’État et ses opérateurs, les collectivités locales et les administrations de sécurité sociale.

Permettez-moi de revenir un instant sur l’effort demandé aux collectivités locales, mes chers collègues.

Le groupe RDPI salue le choix du Premier ministre d’un discours de vérité sur la situation particulièrement difficile des collectivités. Alors que leurs dépenses incompressibles augmentent, on exige d’elles une participation importante au redressement de nos finances publiques.

La semaine dernière, à l’occasion du Congrès des maires, nous avons accueilli près de 8 000 élus locaux venus de toute la France ; ils nous ont fait part de leur inquiétude et, pour certains, de leur colère.

Nous nous félicitons donc que le Gouvernement ait choisi de réduire le taux du prélèvement prévu au titre du fonds de réserve créé à l’article 64 du projet de loi de finances ; nous resterons attentifs aux modalités qui seront proposées pour cette mise en réserve.

De même nous paraît salutaire l’ouverture d’un dialogue sur la pertinence de la réforme, à l’article 30, du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.

L’objectif du Gouvernement est de ramener le déficit à 5 % du PIB, au lieu des 7 % qu’il pourrait atteindre si rien n’est fait. En dépit de ces efforts, nous ne renouerons pas avec la trajectoire fixée par la loi de programmation des finances publiques. Il convient en effet de nous prémunir contre le risque de casser la croissance et de provoquer une récession.

La prévision de croissance pour 2025 sur laquelle le Gouvernement a bâti son budget est prudente. Elle s’établit à 1,1 %, soit en dessous des prévisions de l’OCDE et du Fonds monétaire international (FMI). La baisse des taux d’intérêt, conjuguée à la baisse de l’inflation, passée sous les 2 %, permettrait de contrebalancer l’effet récessif du choc budgétaire.

Près de la moitié des rentrées fiscales supplémentaires de 2025 seraient liées à de nouvelles mesures. Selon les calculs de la commission des finances, celles-ci rapporteraient près de 15 milliards d’euros.

Il s’agit principalement de la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, pour 8 milliards d’euros, de la contribution différentielle temporaire sur les très hauts revenus, pour 2 milliards d’euros, de la modulation des accises sur l’énergie et du retour à un taux normal de TVA sur les abonnements à l’électricité et au gaz, pour 2,8 milliards d’euros, de la suspension de la baisse de CVAE, pour 1,1 milliard d’euros et de la taxe exceptionnelle sur les entreprises du fret maritime, pour 0,5 milliard d’euros.

En règle générale, le groupe RDPI se positionne contre toute disposition visant à augmenter les impôts des Français, d’autant que, malgré les fortes baisses appliquées ces dernières années, le niveau de nos prélèvements obligatoires est déjà l’un des plus hauts de l’Union européenne. En 2023, le taux de prélèvements obligatoires a été abaissé de près de deux points en un an, pour s’établir à 43,2 % du PIB, soit le plus bas niveau depuis 2012. Du jamais vu ! Si de tels résultats n’étaient sans doute pas tout à fait anticipés, ils nous donnent un peu de souplesse pour les années à venir.

Nous soutiendrons la grande majorité de ces nouvelles mesures fiscales, pour la plupart temporaires, et auxquelles la volonté de faire contribuer plus fortement les hauts revenus et les grandes entreprises a très nettement présidé. Dans un contexte de redressement impératif des finances publiques, de telles mesures nous paraissent équilibrées.

Certaines de ces dispositions s’appliqueront toutefois à l’ensemble de nos concitoyens, quel que soit leur niveau de revenus. Je pense notamment aux taxes sur l’énergie, et notamment à l’augmentation de la TVA et à la hausse du tarif de l’accise sur la consommation d’électricité. Le groupe RDPI défendra le plafonnement dudit tarif à 32 euros le mégawattheure, afin qu’il ne dépasse pas le niveau qui était en vigueur avant la crise de l’énergie et la mise en place du bouclier énergétique qui s’en est suivie.

Nous pensons également que l’une des manières les plus efficaces de trouver des recettes est de lutter mieux et plus efficacement contre la fraude et les fraudeurs.

Nous présenterons à cet égard une mesure simple de lutte contre la fraude à la TVA : l’interdiction des logiciels de comptabilité dits permissifs autocertifiés.

Nous défendrons également un amendement tendant à doter l’administration fiscale de moyens supplémentaires pour lutter contre la fraude s’appuyant sur l’utilisation de comptes d’actifs numériques, ou cryptoactifs. De tels comptes, dont le nombre est en expansion constante, sont en effet de plus en plus fréquemment utilisés à des fins frauduleuses ou par des réseaux mafieux pour le blanchiment d’argent sale.

Nous avons par ailleurs déposé deux amendements visant à protéger les ressources des chambres consulaires, des chambres de commerce et des chambres d’amitié en leur assurant le respect de leur trajectoire pluriannuelle d’économies. Ces instances constituent en effet un maillon essentiel du soutien aux entreprises et partant, du développement économique des territoires.

En ce qui concerne les dépenses, les objectifs seront certainement plus difficiles à atteindre. En volume, elles devraient légèrement diminuer, pour s’établir à 56,4 % du PIB, soit une baisse de 0,4 point.

Les lettres plafond, qui ont donné le ton de ce PLF, ont pu susciter quelques inquiétudes. Nous estimons qu’il est nécessaire de faire des économies tout en veillant à ne pas casser les dynamiques de rattrapage engagées dans bon nombre de domaines.

Je pense par exemple à la justice qui, après de longues années de paupérisation, a vu son budget passer de 6,9 milliards d’euros en 2017 à plus de 10 milliards en 2024. Dans le projet de loi de finances initial, au regard de ce que prévoit la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice, 500 millions d’euros manquaient à ce budget pourtant hautement prioritaire. Le Gouvernement s’est toutefois montré à l’écoute sur ce sujet et le Premier ministre a annoncé que les crédits de la mission « Justice » seraient complétés par voie d’amendement ; nous y serons attentifs.

Si les lois de programmation ne sont pas contraignantes, elles présentent l’intérêt de prévenir la tentation de faire porter les économies budgétaires sur des domaines que la Nation a jugés comme étant prioritaires et pour lesquels une continuité dans les investissements est indispensable.

L’équipement de nos armées répond à de tels critères et le contexte international tendu a certainement joué en faveur du budget de la mission « Défense », qui augmente de 3,3 milliards d’euros, conformément à la loi de programmation militaire.

Tout en se félicitant de cette évolution, le groupe RDPI déplore qu’il n’en aille pas de même des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Autre sujet de préoccupation : les paramètres de la baisse de 1,2 milliard d’euros des moyens alloués à l’apprentissage. Les politiques publiques menées en la matière par les précédents gouvernements ont pourtant été couronnées d’un formidable succès. En 2023, 850 000 jeunes sont en effet entrés en apprentissage. Si le coût de cette politique est élevé, le coût pour la société de jeunes non formés et sans emploi l’est certainement bien davantage. Il est assurément possible de rationaliser ces aides à l’embauche sans perdre en efficacité, mais de manière à limiter les effets d’aubaine, en en concentrant le bénéfice sur les très petites entreprises et les apprentis dont le niveau de formation est inférieur à bac+3.

Le groupe RDPI présentera par ailleurs un amendement visant à relever le taux de la taxe sur les transactions financières afin de l’aligner sur le taux retenu par nos voisins européens. Les recettes supplémentaires ainsi dégagées, qui s’élèveraient à 1,5 milliard d’euros, pourraient être fléchées vers le budget de la solidarité internationale ou encore abonder le fonds vert afin de le rapprocher de son niveau actuel.

Je ne saurais conclure sans évoquer l’outre-mer, où les crises se succèdent.

En un an, la Nouvelle-Calédonie, en raison d’une crise politique et sociale, et la Martinique, à cause de la vie chère, ont connu troubles et violences qui, bien que de niveaux d’intensité différents, ont à chaque fois entraîné des dégradations et des blocages et emporté de lourdes conséquences économiques et sociales.

Pour la deuxième année consécutive, la Guyane est quant à elle touchée par une terrible sécheresse, si bien que la préfecture a dû mettre en place un pont aérien pour ravitailler les communes qui, non connectées au réseau routier et ravitaillées en temps normal par pirogue via le fleuve Maroni, se retrouvent enclavées. Plusieurs dizaines de milliers de personnes sont concernées.

Les outre-mer craquent de partout, messieurs les ministres. Ce n’est vraiment pas le moment de faire des économies. Alors qu’il faut au contraire investir massivement, la baisse du budget de la mission « Outre-mer » est évidemment un très mauvais signal. Bpifrance, la banque publique d’investissement, verra par exemple son budget dédié à l’action « Financement de l’économie » divisé par quatre ; or elle est la seule à offrir des solutions bancaires aux entreprises qui souhaitent se développer et investir.

J’ai assez entendu le discours vantant les outre-mer, qui seraient « une chance pour la France ». Aujourd’hui, les Ultramarins sont de plus en plus nombreux à se demander si la France est une chance pour les outre-mer.

Au moins ce PLF ne reprend-il pas la réforme de l’octroi de mer. Est-ce le signe que nos alertes ont été entendues, messieurs les ministres ?

En tout état de cause, le groupe RDPI, premier groupe ultramarin du Sénat, a déposé de nombreux amendements relatifs au logement social, à la TVA sur les produits de première nécessité, aux aides fiscales à l’investissement ou encore à la possibilité de déroger à l’exigence de diagnostic énergétique pour bénéficier des aides à la rénovation en outre-mer. J’espère que ces amendements recevront un accueil favorable de la part du Gouvernement et des autres groupes politiques du Sénat.

Il nous faut être responsables, mes chers collègues, davantage que ne l’a été l’Assemblée nationale : les groupes doivent travailler ensemble et avec le Gouvernement.

La situation politique nous incitait à trouver des compromis en amont du débat en séance afin que chaque groupe puisse se retrouver dans le texte final. Il n’est pas trop tard ! J’en appelle donc à votre sens des responsabilités, mes chers collègues. Soyons les acteurs d’un compromis, faisons honneur au Parlement et au bicamérisme ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)

M. Bernard Delcros. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la voie est étroite : il est tout à la fois nécessaire de stopper le dérapage du déficit public – nous partageons votre objectif de limiter celui-ci à 5 % pour 2025, messieurs les ministres ; d’éviter l’effet récessif de mesures de réduction des dépenses qui seraient mal calibrées ; de répondre aux besoins de moyens supplémentaires dans plusieurs secteurs essentiels relevant de l’État.

Pour réussir ce pari, le groupe Union Centriste a toujours jugé nécessaire d’agir simultanément sur les leviers de la dépense publique et des recettes de l’État, en recherchant une plus grande justice fiscale.

L’année dernière, nous avions fait plusieurs propositions pour accroître les recettes de l’État. Si la plupart d’entre elles avaient été adoptées par le Sénat, elles n’avaient pas résisté à l’épreuve du 49.3.

Je me félicite que vous repreniez cette année nos propositions, quoique selon des modalités un peu différentes : le report de la suppression de la CVAE, la création d’une taxe sur les rachats d’actions – je rappelle que leur montant a explosé en trois ans, passant de 7 milliards à 30 milliards d’euros –, ou encore la création d’une contribution différentielle sur les très hauts revenus. Cette dernière initiative rejoint notre proposition de l’an passé visant à faire contribuer davantage les actionnaires qui touchent le plus de dividendes par une plus juste progressivité de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, les dividendes distribués étant passés de 30 milliards à 70 milliards d’euros en quatre ans.

En complément, notre groupe défendra plusieurs amendements relatifs notamment à la réforme de l’exit tax, à la réforme de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), à la rationalisation de plusieurs niches fiscales, au durcissement de la lutte contre la fraude fiscale ou encore à la correction d’une faille dans le plan d’épargne retraite. Nous y reviendrons en détail.

Vous proposez par ailleurs, messieurs les ministres, que les collectivités territoriales participent au redressement des comptes de la Nation par une baisse directe de leurs ressources d’un montant de 5 milliards d’euros et au travers de trois dispositions : la création d’un fonds de réserve pour les collectivités, à hauteur de 3 milliards d’euros, le gel de la fraction de TVA qui leur est versée à son niveau de 2024, soit une perte de 1,2 milliard d’euros, la baisse du taux du fonds de compensation pour la TVA, soit une perte de 800 millions d’euros, auxquelles s’ajoutent plusieurs dispositions affectant indirectement les collectivités.

Si les collectivités doivent prendre leur part au redressement des comptes de notre pays, le groupe Union Centriste estime que cette participation doit reposer avant tout sur un principe intangible de justice territoriale, tant il est vrai que la situation financière moyenne des collectivités cache une grande disparité de situations. Il considère par ailleurs que la participation qui leur est demandée ne saurait en aucun cas atteindre un tel niveau, et proposera donc de la réduire.

Je souhaite enfin insister sur deux dispositions de ce PLF.

La première est la baisse de 2 points, soit 10 %, du taux du fonds de compensation pour la TVA et l’exclusion des dépenses d’entretien de la voirie et des bâtiments communaux de l’assiette éligible.

Il convient d’abandonner non seulement la rétroactivité de cette mesure, comme je l’ai entendu tout à l’heure, mais la mesure elle-même, messieurs les ministres.

D’une part, cette disposition touche indistinctement toutes les collectivités, les grandes et les petites, les pauvres et les autres.

M. Michel Canévet. C’est vrai !

M. Bernard Delcros. D’autre part, elle percute directement les capacités d’investissement des collectivités. Or notre pays a grand besoin d’un tel investissement, qui permet de financer des projets au bénéfice de la population et de soutenir l’activité économique et l’emploi dans tous les territoires de France.

M. Vincent Delahaye. C’est vrai !

M. Bernard Delcros. Nous vous demandons donc, messieurs les ministres, de renoncer à cette mesure injuste et contre-productive.

La seconde disposition me tient particulièrement à cœur, bien qu’on en parle peu, car elle touche tout particulièrement les communes rurales. Vous proposez en effet une exonération partielle supplémentaire de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB), l’exonération étant portée à 30 % pour les terres affectées à l’activité agricole.

Si nous approuvons cette mesure en faveur du monde agricole – le sujet n’est pas là –, nous sommes en désaccord avec les modalités de compensation proposées, qui pénalisent fortement les plus petites communes, dont les recettes de TFPNB représentent parfois 50 %, voire davantage, de l’ensemble de leurs recettes fiscales. Nous proposerons donc que cette exonération soit justement compensée aux collectivités territoriales et justement indexée.

Une nouvelle fois, le groupe Union Centriste sera force de proposition, et nous espérons vivement que ce que nous proposons saura vous convaincre, messieurs les ministres. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Emmanuel Capus et Jean-Yves Roux applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, « Si aujourd’hui notre dette est élevée, c’est parce que j’ai sauvé l’économie française ». Je regrette qu’après ce que l’on pourrait appeler cinq ans de vie commune au sein de cet hémicycle, l’auteur de cette phrase ne soit pas au banc des ministres aujourd’hui. Faut-il en rire ou se morfondre ? Telle est la question.

La dette publique a atteint 3 300 milliards d’euros, soit plus de 113 % de notre PIB, un niveau historique qui fragilise notre souveraineté, notre crédibilité sur la scène internationale, mais surtout notre capacité à investir afin de répondre à la complexité des problèmes contemporains qui nous attendent.

Il est une réalité préoccupante que nous ne pouvons pas ignorer, messieurs les ministres : plus de 50 milliards d’euros par an sont consacrés au paiement des seuls intérêts de la dette. Cela représente un euro sur huit de dépenses publiques, soit 10 milliards d’euros qui échappent chaque année aux services publics, lesquels sont essentiels pour nos concitoyens.

En dépit de ce constat, vous persistez à défendre une politique fiscale qui, depuis 2017, organise méthodiquement l’attrition de nos finances publiques : suppression de l’impôt sur la fortune, suppression drastique de la taxe d’habitation, disparition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, sans oublier la contribution à l’audiovisuel public.

Résultat : plus de 60 milliards d’euros se sont évaporés chaque année depuis 2017. Ce sont précisément ces mêmes 60 milliards d’euros que vous cherchez aujourd’hui désespérément afin de ramener notre déficit sous la barre des 5 % du PIB d’ici à 2027. Nul besoin d’être inspecteur général des finances publiques pour comprendre que le jeu des vases communicants opère ici à plein.

Depuis 2017, le groupe socialiste du Sénat, et en particulier Claude Raynal, président de la commission des finances, n’a cessé d’alerter vos prédécesseurs, messieurs les ministres.

Face à une telle situation, comment prétendre financer la transition écologique ou redresser nos comptes publics ? Vos choix budgétaires traduisent une impuissance coupable, aggravée par une obsession comptable déconnectée des réalités sociales et économiques.

Le projet de loi de finances pour 2025, qui prévoit 60 milliards d’euros d’économies et de nouvelles recettes, s’inscrit dans cette logique dangereuse. Nous ne le répéterons jamais assez : une réduction trop brutale du déficit public risque d’entraver la croissance et l’investissement, rendant nos efforts contre-productifs. Ce que vous pensez gagner en économies, vous le perdrez tout aussi vite en recettes fiscales amoindries.

Je souhaite en effet donner l’alerte, depuis mon point de vue local, sur la récession qui va poindre d’ici à sept ou huit mois. Celle-ci affectera les PME et les TPE et emportera de nombreux licenciements.

La commande publique locale joue un rôle majeur pour notre économie locale. Or les collectivités territoriales, piliers de notre République décentralisée, se voient, une fois encore, sollicitées de manière disproportionnée.

L’effort sans précédent et profondément injuste qui leur est demandé, d’un montant de 7,8 milliards d’euros, équivaut, en un an, à l’effort consenti sur trois ans lors de la baisse de la dotation globale de fonctionnement entre 2014 et 2017. Cette participation est disproportionnée au regard de la responsabilité des collectivités dans le dérapage des finances publiques. Cela a du reste été reconnu par le Premier ministre lui-même lors du congrès de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF).

J’ajoute que, selon André Laignel, vice-président de l’AMF et président du comité des finances locales, l’effort demandé aux collectivités s’élève non pas à 7,8 milliards d’euros, mais à près de 11 milliards d’euros.

Création d’un fonds de réserve de 3 milliards d’euros ; relèvement du taux de cotisation à la CNRACL, soit une dépense supplémentaire de 1,3 milliard d’euros pour les employeurs territoriaux ; réduction des crédits du fond vert de 1,5 milliard d’euros en autorisations d’engagement ; gel de la dynamique de la TVA affectée, soit 1,2 milliard d’euros de ressources en moins pour les collectivités ; réduction du taux du FCTVA, soit un manque à gagner de 800 millions d’euros : un tel choc budgétaire met en péril l’autonomie financière des collectivités, socle de notre décentralisation et nœud gordien de notre démocratie locale. Il affaiblit leur capacité à répondre aux besoins des habitants de nos grandes métropoles comme de nos territoires ruraux ou de montagne.

Ce n’est pas seulement le déséquilibre financier associé à ces coupes que nous dénonçons : il y va d’une remise en cause du pacte républicain qui lie l’État aux collectivités locales, dont je rappelle qu’elles ne sont pas responsables de notre dette publique, leur endettement ne comptant en effet que pour 9 % du total. Pourquoi dès lors leur imposer une telle contrainte budgétaire ?

Le groupe des sénateurs socialistes s’oppose à cette asphyxie financière de nos collectivités. Les économies et les recettes sont à chercher ailleurs ! Un budget de justice fiscale et sociale est la seule voie crédible pour retrouver une trajectoire budgétaire soutenable tout en respectant les priorités sociales et écologiques de notre pays.

En l’état, le texte que vous nous proposez en est très éloigné, messieurs les ministres. Mon groupe vous proposera donc une série d’amendements visant à rétablir la justice fiscale via des recettes trouvées chez les plus hauts revenus.

Les collectivités territoriales de notre pays ont un rôle essentiel à jouer pour la transition écologique, pour nos concitoyens, pour le vivre ensemble. Nous ne vous laisserons pas les affaiblir par ce budget d’austérité.

Entendant au contraire renforcer le soutien qui leur est apporté, nous présenterons des amendements visant à restaurer la CVAE, injustement supprimée par le Gouvernement, afin de garantir des ressources pérennes et adaptées à nos collectivités…

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Frédérique Espagnac. Nous présenterons également des amendements visant à garantir un traitement équitable de nos communes rurales, à protéger le financement du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » (Facé) ou encore à assurer une juste contribution des assurances au financement des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis).

Vous l’aurez compris, messieurs les ministres, nous ferons des propositions !

M. le président. Votre temps de parole est écoulé !

Mme Frédérique Espagnac. Vous aurez l’occasion, lors de nos discussions et en fonction des choix que nous ferons, de prouver votre volonté d’aboutir à des solutions. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Sautarel. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, « Vous ne m’entendrez pas dire que le déficit de la France est la faute des communes et des collectivités territoriales. Je ne le pense pas ». Tels sont les propos tenus jeudi dernier par le Premier ministre Michel Barnier en clôture du Congrès des maires et des présidents d’intercommunalités de France.

Je tiens à saluer le changement d’attitude dont ces propos témoignent. Ils contrastent avec les mots de l’ancien ministre de l’économie et des finances et des membres du gouvernement précédent.

Plus encore, ce changement de vocabulaire traduit un changement de méthode, un changement d’attitude effectif dont je tiens à vous remercier publiquement, messieurs les ministres, car il répond à l’intérêt général et à ce que demandent nos concitoyens.

Ce changement concerne d’ailleurs non seulement les relations avec les collectivités locales, mais toutes les politiques publiques, et donc l’ensemble de ce PLF que nous allons examiner dans sa version initiale après son rejet par l’Assemblée nationale et dans un contexte international et national particulièrement fragile. Simplement, il se trouve que, pour ce qui est de ce domaine essentiel pour le Sénat – celui des collectivités –, à l’égard duquel j’exerce du reste une responsabilité particulière, j’ai observé ce changement de manière plus sensible.

Ce travail, réalisé dans l’urgence du moment, doit désormais se poursuivre sur des questions plus structurelles, afin que nous ne nous retrouvions pas dans la même situation dans un an.

La responsabilité nous commande d’accompagner l’action de redressement de nos comptes publics, de réduction du déficit et de désendettement que vous proposez, messieurs les ministres. Dans le respect de la trajectoire – enfin sincère – de réduction du déficit à 5 % du PIB d’ici à la fin de 2025 qui est en quelque sorte l’ancre de ce budget, nous proposerons des amendements visant à rendre l’effort soutenable et le plus juste possible, en l’adossant à une réduction des dépenses.

L’apaisement, la stabilité, le respect dans les échanges, le courage sont les préalables nécessaires au sursaut dont notre pays a tant besoin. Nous le savons tous, mes chers collègues, nous sommes assis sur un volcan – c’est un élu du plus grand volcan d’Europe, le volcan cantalien, qui vous le dit ! (Sourires.)

Nos débats doivent permettre à notre pays de disposer d’ici à la fin du mois de décembre d’un budget qui sera bien sûr imparfait, mais qui marquera une inflexion au regard de l’addiction de notre pays à la dépense publique et à la fiscalité, et qui ouvrira un nouveau chemin. Ce chemin, certes, est escarpé, mais il est le seul que nous puissions emprunter si nous ne voulons pas désespérer les Français et faire basculer la France dans une tutelle qui imposerait une austérité d’une tout autre ampleur.

Ceux qui ont dirigé notre pays surendetté n’ont jamais remis de l’ordre dans les comptes de l’État ni revu son niveau de dépenses. Il n’est pas question, pour remédier à leurs errements, de mettre inconsidérément à contribution les Français, les entreprises et les collectivités territoriales. Pour autant, il faudra que chacun contribue à un effort socialement et territorialement juste.

Le gouvernement actuel a découvert cette situation insoutenable et a dû proposer, dans l’extrême urgence, et dans un cadre inédit, des solutions qui ne sont pas toujours satisfaisantes, mais qui marquent une inflexion que nous allons encore renforcer tout au long du débat qui s’ouvre, mes chers collègues.

Nous ne pouvons plus faire l’économie d’une réforme du périmètre de l’action de l’État, mais nous ne pouvons pas non plus mettre en péril l’investissement des entreprises comme des collectivités de notre pays.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est juste !

M. Stéphane Sautarel. Les nouveaux responsables ministériels semblent l’avoir compris.

Après ce rappel du contexte et du cadre dans lesquels s’inscrit l’exercice auquel nous sommes confrontés, je centrerai mes propos autour de deux axes qui recouvrent un champ non négligeable de la dépense publique : la dette et les collectivités territoriales.

La dette, tout d’abord : les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », qui constituent le deuxième poste de dépense de l’État, s’élèvent à plus de 63 milliards d’euros en crédits de paiement. Nous n’avons pas pu amender ces crédits en hausse, dont le niveau record nous prive d’une capacité d’agir au service des Français.

L’alourdissement historique de la dette de l’État, qui atteint 3 300 milliards d’euros, est un fléau qui doit concentrer tous nos efforts. Par-delà le stock, c’est la charge de la dette qui inquiète : le flux s’aggrave, en effet, du fait cumulé de son coût et de son volume.

En l’absence de redressement appuyé des finances publiques, la charge de la dette de l’État est appelée à doubler d’ici à 2029, et ainsi à approcher la barre folle des 100 milliards d’euros. Cet élément justifie à lui seul les efforts proposés dans ce PLF, visant à ramener notre déficit public à 5 % du PIB d’ici à la fin de 2025, ce qui reste fort peu, du reste, au regard de ce que font nos voisins européens.

Oui, nous devons réduire notre déficit pour réduire notre dette, qui nous coûte triplement : par son coût budgétaire, bien sûr ; par ses conséquences sur nos services publics coûteux et trop souvent inefficaces ; en ce qu’elle nous rend incapables de préparer l’avenir en investissant dans les inévitables transitions climatique, numérique et démographique, lesquelles exigent de mobiliser des moyens que nous n’avons plus.

En 2025, non seulement nous brûlerons plus de 60 milliards d’euros dont nous aurions tant besoin, mais notre programme d’émissions de titres nettes des rachats devrait de plus atteindre la barre record des 300 milliards d’euros. C’est pure folie !

Pour arrêter cela, et il est temps de le faire, c’est bien d’abord d’une volonté politique que nous avons besoin.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Oui !

M. Stéphane Sautarel. Après la dette, j’en viens aux collectivités territoriales.

La relation entre l’État et les collectivités territoriales n’a jamais été aussi dégradée. La fragilisation de la situation financière des collectivités, déjà engagée en 2023, s’est accélérée en 2024, si bien que le risque est réel de voir le nombre de collectivités dont l’épargne est négative augmenter très significativement en 2025.

Je ne m’attarderai pas davantage sur les constats. Au-delà des procès d’intention, dont nous sommes sortis, il importe de trouver des solutions partagées qui allient contribution à l’effort national et maintien de la capacité des collectivités à investir et à produire des services de proximité, tout en permettant de renouer avec la confiance, le respect et la responsabilité.

Depuis des années, l’État n’a cessé de transférer des charges, d’adresser des injonctions contradictoires et de s’enfermer dans un centralisme mortifère, alors que l’urgence est de redonner du pouvoir d’agir aux élus locaux, de réformer l’État pour le recentrer sur le régalien, de mettre fin à l’enchevêtrement des compétences et de faire valoir le principe de subsidiarité ascendante. Les vraies économies sont celles qui simplifient, débureaucratisent et libèrent l’action.

Oui, la performance est proportionnelle à la liberté et à la responsabilité. Il faut donc en finir avec la mise sous tutelle et avec l’infantilisation. Il faut, dès aujourd’hui, même dans l’urgence, montrer une voie nouvelle et répondre à la promesse du partenariat avec les territoires et de la décentralisation de la France.

Oui, nous avons besoin d’un choc de décentralisation et de simplification, qui passera par une réforme en profondeur de la fiscalité locale et de la DGF. Si nous voulons redonner confiance dans l’engagement municipal, nous devons nous y engager dès maintenant pour rendre ce choc effectif avant le budget pour 2026 et les échéances municipales de mars 2026. Telle est la raison pour laquelle, au Sénat, tout en consentant à l’effort demandé aux collectivités, nous avons fait le choix de le réduire de 5 milliards à 2 milliards d’euros.

Cinq marqueurs majeurs sont notamment proposés pour avancer sur un chemin plus juste socialement et territorialement.

Il s’agit tout d’abord de réduire substantiellement l’effort demandé aux collectivités territoriales et de respecter leur autonomie fiscale, comme je viens de le rappeler.

Nous devons ensuite préserver leur capacité d’épargne, et leur capacité d’investissement qui en est la conséquence directe.

Il nous faut également refuser toute mesure rétroactive, donc supprimer l’ensemble de la disposition relative à la remise en cause du FCTVA.

Il convient aussi de limiter et d’encadrer les mesures qui touchent les départements dont la situation financière est la plus fragile.

Nous proposerons enfin de modifier la logique et les modalités de mise en œuvre du fonds de précaution, qui doivent à la fois être plus limitées, plus justes et progressives – tel est le sens du dispositif de lissage que nous vous soumettrons, mes chers collègues, via un amendement de réécriture totale de l’article 64.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Excellent amendement !

M. Stéphane Sautarel. « Lissage », voilà l’intitulé que je vous propose en fin de compte d’adopter pour désigner l’objet de cette mesure, pour répondre à la question que vous posiez tout à l’heure, monsieur le ministre.

En réalité, c’est un nouveau paradigme que nous devons inventer pour renouer avec la confiance en faisant le pari de la liberté. Nous jugerons d’ici à la fin de nos travaux de la manière dont nous aurons été entendus, mais nous attendons d’ores et déjà des signes forts.

J’en viens à quelques mots de conclusion.

Le pire serait que tout cela ne serve à rien et que notre pays, fin décembre, se retrouve dans le chaos plutôt que de commencer à sortir de l’impasse. Mais je veux rester optimiste et continuer de croire que la raison pourra l’emporter. La copie issue du Sénat doit le permettre avant que l’Assemblée nationale puisse le confirmer. Si tel n’était pas le cas, notre pays plongerait dans le chaos et verrait le coût de sa dette encore augmenter, ce qui nous précipiterait plus certainement encore vers une mise sous tutelle. La conséquence en serait une situation synonyme non plus de rigueur, mais d’austérité, dont les plus fragiles seraient les premières victimes. La voie du sursaut est possible ; commençons à l’emprunter dès aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas. (Applaudissements sur les travées du groupe UC – M. le rapporteur général et M. Emmanuel Capus applaudissent également.)

M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, au fond, le débat est relativement simple et peut se résumer en quelques questions.

D’abord, faut-il parvenir à voter un budget ? Oui, bien sûr. Le scénario d’un rejet du PLF, et celui du vote d’une motion de censure, est pour moi à écarter absolument. Il n’apporterait rien à la situation de nos finances publiques – rien de positif en tout cas – et occasionnerait de graves difficultés pour nos compatriotes. Nous pouvons faire ensemble le pari raisonnable d’un accord en commission mixte paritaire, qui sera une première étape.

Ensuite, la situation financière appelle-t-elle des mesures fortes ? Là encore, la réponse est oui.

Enfin, le Gouvernement engage-t-il ce tournant ? Oui, et c’est heureux.

En revanche, le débat reste ouvert sur l’ampleur de l’ajustement budgétaire à réaliser et sur notre capacité à y pourvoir sans déclencher un effet récessif qui irait à rebours de l’objectif initial. Un ajustement de 45 milliards d’euros, c’est sans équivalent et le contenu fiscal prévu pour le couvrir nous renvoie presque à la période de la présidence Hollande. Certes, l’effort est bien de 45 milliards d’euros, et non de 60 milliards, si l’on prend pour référence la loi de finances pour 2024 et non le « tendanciel » pour 2025, mais cela reste considérable, d’autant que la fiscalité couvrira malheureusement les deux tiers de l’ajustement.

Ce débat sur l’aspect récessif du PLF, ouvert dès le dépôt du texte, s’inscrit dans un contexte d’aggravation de la conjoncture qui se manifeste déjà, hélas ! par des plans sociaux et par l’attentisme des acteurs économiques. S’y ajoute le creusement de l’écart de notre taux d’emprunt à dix ans avec celui de l’Allemagne, qui est désormais de 0,8 point. Nous devons veiller à la crédibilité de nos engagements et les tenir ; à défaut, la prime de risque de la dette française promet d’atteindre des niveaux élevés.

L’OFCE a assez tôt indiqué qu’un déficit de 5,3 % du PIB était une cible plus envisageable ; la Commission européenne souscrit à cette analyse. Les experts de Goldman Sachs privilégient quant à eux une prévision de déficit de 5,4 % du PIB en s’appuyant sur une prévision de croissance de 0,7 % au lieu de 1,1 %.

La situation financière est critique, d’autant que nous souffrons également d’un déficit de notre balance courante. L’économiste Patrick Artus insistait récemment sur le fait que nous sommes dans le cas le plus critique : nous devons « financer une partie de notre déficit par des entrées de capitaux à court terme, ce qui nous expose à une crise de la dette publique ».

Nous avons, comme l’a dit le Premier ministre, un devoir de vérité. L’objectif reste de limiter notre déficit à 3 % du PIB, mais la marche qui consiste à passer en un an de 6,1 % à 5 % est très haute. Il faudra rapidement voter un PLFR et se caler sur des prévisions ajustées.

Pour aller plus loin, en effet, nous devrons enclencher des réformes structurelles qui ne pouvaient trouver place dans un PLF confectionné en si peu de temps.

Si ce projet de loi de finances suppose des ajustements – nous discuterons de certains d’entre eux dans les prochains jours et d’autres resteront à effectuer au début de 2025 –, il doit s’inscrire dans la continuité des efforts menés pour faire augmenter le taux d’emploi. Cette politique de l’offre reste une nécessité et souffre sans doute de ne pas avoir été suffisamment financée par des économies équivalentes. Ne l’oublions pas : si notre taux d’emploi rejoint celui de l’Allemagne, alors nos finances seront à l’équilibre.

À cet égard, deux débats compteront, que je veux mentionner : le débat sur les exonérations de charges, ouvert lors de l’examen du PLFSS, et celui à venir concernant l’élasticité des recettes d’impôt sur les sociétés (IS) à la croissance.

Le sujet global qu’il nous faut traiter est celui du bon réglage à adopter pour aller dans la bonne direction, celle des 3 % de déficit, via un phasage réaliste qui doit nous permettre de restaurer notre crédibilité. En cela, les discussions autour du financement des collectivités locales, comme le débat sur l’excès de taxation dans le secteur aérien, seront importantes. Gare à ne pas détruire l’investissement et l’emploi ! Maintenons la vie, les dessertes et les conditions du développement économique dans nos territoires.

Sur le long terme, il est urgent de faire des choix dans les missions de l’État et dans le financement des retraites, afin de viser la préservation du niveau de vie des jeunes générations. (M. Emmanuel Capus applaudit.) Une façon d’y parvenir peut être de financer une part de nos retraites et de notre protection sociale par le biais d’une fraction de TVA ou de CSG. Il y a là une réforme lourde, difficile, qui ne pourra fonctionner que si les cotisations salariales sont abaissées en conséquence.

Nous aurons sans doute à discuter de ce que l’on appelle parfois la stratégie d’« agencisation » de l’État et il nous faudra, surtout, redéfinir les missions de l’État. Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), par exemple, peuvent sans doute utilement travailler ensemble. Dans le secteur aérien, la direction des services de la navigation aérienne peut s’affranchir de son statut actuel.

Pour ce qui concerne nos aînés, nous avons un double devoir. Nous devons non seulement faire preuve de solidarité envers le grand âge, la dépendance et les petites retraites, mais nous devons aussi maintenir le lien entre les générations. De ce point de vue, préserver le niveau de vie des jeunes générations est un objectif qui peut supposer des ajustements sur une partie de l’actualisation des retraites.

Je conclurai en pointant un problème de méthode. Tout comme l’on peut s’interroger sur le niveau d’alerte à prévoir quand l’exécution d’une loi de finances dérape, il faudrait aussi que le Haut Conseil des finances publiques puisse déclencher une alerte dès le stade du dépôt du PLF ou de l’élaboration de la stratégie financière : le Haut Conseil gagnerait parfois à s’extraire d’un langage par trop diplomatique.

Les élus du groupe UC abordent ce débat budgétaire avec responsabilité et engagement : leur volonté est d’être constructifs, mais de ne pas masquer les points de désaccord. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Emmanuel Capus et Jean-Baptiste Olivier applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Florence Blatrix Contat. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, après les records de chaleur de 2022 et 2023, l’année 2024 est en passe de détenir le record de l’année la plus chaude jamais enregistrée. Les températures y dépasseraient pour la première fois un niveau en hausse de 1,5 degré Celsius par rapport à l’ère préindustrielle. Nous avons donc franchi un nouveau seuil : nous avons déjà changé de monde.

En 2023, le rapport Pisani-Ferry-Mahfouz chiffrait à 34 milliards d’euros par an le surcroît d’investissement public nécessaire à la transition écologique.

Aussi avons-nous repris espoir quand Michel Barnier a placé la dette écologique à égalité avec la dette financière lors de son discours de politique générale : le Gouvernement prenait enfin conscience de l’enjeu existentiel de la transition écologique.

Cet espoir a pris fin avec ce budget, qui acte une baisse de près de 10 % des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Si l’on intègre au calcul la baisse des prix de marché de l’électricité, ces crédits sont même amputés de 17 % en une seule année. Une telle baisse ne relève plus de l’austérité : elle signifie le sacrifice pur et simple de toutes nos ambitions en matière de transition écologique. Tous les domaines sont concernés, de la rénovation thermique des bâtiments au soutien aux collectivités territoriales, en passant par la biodiversité.

Cette trajectoire est très inquiétante ; elle va à rebours de toutes les recommandations des experts.

La France a besoin d’un plan d’investissement dans des infrastructures de transport durables. Nous ne pourrons pas remplacer intégralement le parc automobile thermique par un parc électrique équivalent. Il faut donc anticiper et planifier le report vers d’autres moyens de transport. Or que propose le Gouvernement dans ce budget ? Il réduit fortement les financements dédiés aux infrastructures de transport.

Monsieur le ministre, alors que l’électrification du parc automobile est essentielle et que nous prenons déjà du retard dans les investissements, vous réduisez de 500 millions d’euros les aides aux acquisitions de véhicules propres, en supprimant au passage la prime à la conversion.

Des solutions existent pour promouvoir le transport écologique via de nouvelles recettes fiscales qui seraient sans impact sur l’activité ni sur les plus précaires : la taxation des yachts et des jets privés, le durcissement du malus écologique pour les SUV, l’encadrement des niches fiscales polluantes. Sur tous ces sujets, nous vous ferons des propositions.

La France doit également opérer sa transition énergétique en accélérant son soutien aux énergies renouvelables. Or vous amputez le fonds Chaleur, qui accompagne la production de chaleur renouvelable dans les collectivités, de 300 millions d’euros. Et vous taillez à la serpe le dispositif MaPrimeRénov’ d’aide à la rénovation énergétique des bâtiments. Quant au chèque énergie – cela a déjà été dit –, il ne sera plus versé automatiquement.

Alors que l’Insee a établi, dans l’édition 2024 de son ouvrage France, portrait social, publiée jeudi dernier, que la fin du bouclier inflation avait pesé plus fortement sur les plus modestes, vous aggravez le risque de non-recours et de précarité énergétique des ménages.

Par ailleurs, alors que la décarbonation passe par l’électrification, le relèvement de l’accise sur l’électricité prévue dans le PLF aurait une fois encore pesé sur les ménages et envoyé un mauvais signal. Nous avons proposé de rétablir le niveau d’accise d’avant-crise et nous nous réjouissons que la commission des finances abonde dans notre sens.

Pour ce qui concerne la préservation de la biodiversité, elle a été sacrifiée dans ce projet de budget. Alors que la protection de la biodiversité est un objectif essentiel pour l’adaptation au changement climatique, il est prévu que les crédits de la stratégie nationale biodiversité soient divisés par deux.

Quant au plafond des agences de l’eau, il devait être relevé de 175 millions d’euros dès 2025 ; il le sera finalement en 2026. Ce budget manque d’ailleurs cruellement d’ambition pour ce qui est de lutter à la source contre les pollutions persistantes qui mettent en danger la santé des humains et des écosystèmes.

Enfin, vous renoncez à mettre en place le principe pollueur-payeur qui évite de reporter les coûts sur la collectivité. Là encore, nous vous ferons des propositions pour réduire les pollutions à la source.

Votre coalition a plongé le pays dans la crise budgétaire. Avec ce texte, elle choisit de sacrifier les transitions écologique et énergétique. Ce budget est un budget de renoncement écologique. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pascal Savoldelli applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)

M. Olivier Rietmann. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le mot de « responsabilité » ne cesse de résonner ce matin dans l’hémicycle. Il est sur toutes les lèvres, et je m’y rallie pleinement.

Disons-le clairement : nous allons examiner un budget difficile, exigeant et qui ne fait plaisir à personne, car il exige des efforts inédits. Il n’est plus possible de se défausser les uns sur les autres, comme l’ont fait récemment certains responsables politiques. Inutile de revenir sur leur attentisme : les conclusions de la mission d’information sénatoriale sur la dégradation des finances publiques depuis 2023 sont édifiantes.

Le 15 octobre dernier, la délégation aux entreprises du Sénat a reçu les trois organisations patronales représentatives, ainsi que le Mouvement des entreprises de taille intermédiaire (Meti) : tous les patrons, je peux vous le dire, ont bien conscience de cette responsabilité qui est aussi la leur.

Contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, énième report de la suppression de la CVAE, réduction des exonérations de charges dans le cadre du PLFSS, diminution des aides à l’apprentissage, etc. : le coup est dur pour les entreprises, qui sont déjà considérablement fragilisées par une concurrence accrue. À cela s’ajoutent le coût de la surcomplexité normative et l’augmentation des charges incompressibles, telles que le prix de l’énergie ou des assurances. Pourtant, je l’ai dit, le discours des dirigeants d’entreprise est celui de la responsabilité face à la dette abyssale de la France.

En revanche, ils expriment une crainte : celle que ces mesures exceptionnelles ne finissent par devenir permanentes. Je partage pleinement cette inquiétude.

Monsieur le ministre de l’économie, vous avez réaffirmé, ce matin encore, leur caractère provisoire. Nous prenons acte de cet engagement et le Sénat veillera à ce qu’il soit tenu, car le risque pour nos entreprises est immense : nous pourrions entrer dans une récession grave qui serait fatidique pour l’économie française.

Nous sommes sur une ligne de crête. Quelque 49 % des investisseurs étrangers ont décidé de réduire leurs projets d’investissement en France. L’enquête menée auprès des PME par le Centre de recherches pour l’expansion de l’économie et le développement des entreprises (Rexecode) en partenariat avec Bpifrance a montré qu’environ une entreprise sur cinq a annulé des décisions d’embauche et d’investissement du fait de l’incertitude politique qui règne en France.

Cette tendance se renforcera si les baisses des dépenses à destination des entreprises sont reconduites pour les prochaines années. Comme l’ont rappelé les organisations patronales, « le transitoire qui dure, on connaît ! ».

La perspective de faillites devrait tous nous alerter. En effet, si le nombre de procédures collectives continue de s’accroître au même rythme que celui qui a été observé depuis le 1er janvier 2024, on peut s’attendre à dépasser les 65 000 procédures sur l’ensemble de l’année.

Comme l’ont rappelé les représentants du Meti lors de leur audition par la délégation aux entreprises, le nombre d’ETI placées en redressement a doublé dans tous les secteurs, de la vente de détail à la construction, en passant par l’aéronautique ou les cosmétiques. Le président du Medef nous a également alertés en pointant la multiplication des procédures collectives, qui concernent tant les petites et moyennes industries que les ETI industrielles.

L’emploi doit aussi nous préoccuper. On recense en effet 1 219 suppressions d’emplois par semaine pour les entreprises de moins de dix salariés depuis le début de l’année ! En trois semaines à peine, il y a autant de suppressions de postes dans les TPE que chez Michelin et Auchan réunis ; et pourtant, personne n’en parle !

Aussi, j’en reviens au principe de responsabilité pour vous rappeler, messieurs les ministres, que celle qu’assume le Gouvernement doit être à la hauteur de ces efforts et des risques qui pèsent sur notre économie. Cela signifie qu’il est urgent de mener des réformes structurelles pour diminuer la dépense publique.

Monsieur le ministre de l’économie, vous avez évoqué la question du temps de travail. Je souscris à votre analyse : un débat doit s’ouvrir pour aboutir à des décisions fortes.

Avançons également en matière de simplification, ce « mal français » si bien documenté par Alain Peyrefitte.

L’application du « test PME », tel qu’il a été voté au Sénat, est la seule méthode qui permettra à la France de sortir de sa cage d’acier, afin que l’action publique soit au service de nos concitoyens et de nos entreprises, et non l’inverse. Associons les entreprises aux réformes qui les concernent. Ne reproduisons pas les erreurs du passé : je pense par exemple au fiasco du guichet unique, dont les dysfonctionnements graves ont paralysé les entreprises pendant des mois.

Messieurs les ministres, mes chers collègues, il nous reste un an d’ici au prochain budget pour diminuer les dépenses publiques. Une fois encore, il faudra faire preuve de responsabilité ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canévet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Olivier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Olivier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, « un État en situation de faillite » : le Premier ministre pourrait aujourd’hui reprendre les propos de l’un de ses prédécesseurs, François Fillon, qui avait à l’époque déclenché une polémique. Voilà que nous y sommes bel et bien ; les Français en sont conscients, et il n’est plus possible de repousser les sacrifices nécessaires.

Une rapide comparaison européenne permet de mesurer l’état d’urgence budgétaire auquel notre pays est confronté. Notre déficit public – 6,1 % du PIB en 2024 – devrait être le deuxième plus élevé de l’Union européenne, derrière celui de la Roumanie, tandis que notre dette publique, qui atteint 113 % du PIB à la fin de 2024, nous place au vingt-cinquième rang sur vingt-sept en Europe – seules la Grèce et l’Italie font pire que nous. Si rien n’est fait, notre déficit atteindra puis dépassera les 7 %.

Le budget 2025 n’est pas parfait, mais il est historique, car il marque une rupture dans le sens d’une remise en ordre des comptes publics : il y est procédé à un ajustement équilibré de plus de 50 milliards d’euros qui combine des augmentations de prélèvements obligatoires et des baisses de dépenses.

L’heure est enfin venue de nous interroger sur la dépense publique en France, alors qu’elle atteint le niveau le plus élevé de l’OCDE et qu’elle n’a cessé de croître de manière exponentielle ces dernières années. Le Gouvernement propose de la diminuer de près de 20 milliards d’euros, ce qui est un choix audacieux et courageux, parce que chaque dépense se rapporte à un intérêt et que sa réduction suscite une opposition. Tout le monde, dans l’intérêt national, doit donc contribuer à cet effort dans la mesure de sa capacité.

À cet égard, l’ensemble des missions de l’État sera mis à contribution, qu’il s’agisse des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », de ceux de la mission « Transformation et fonction publiques » ou de ceux de la mission « Aide publique au développement », qui vont beaucoup diminuer cette année. En outre, la folle marche en avant de la hausse du nombre d’emplois publics sera enfin achevée, avec une réduction de 2 200 équivalents temps plein (ETP), dont 1 000 chez les opérateurs de l’État.

Pour autant, le financement des missions régaliennes demeure assuré, puisque les trajectoires de financement votées en loi de programmation pour les armées, pour la justice et pour les forces de l’ordre seront respectées.

M. Jean-Baptiste Olivier. Il s’agit donc bel et bien de rompre avec la gabegie d’argent public et de tourner définitivement la page du « quoi qu’il en coûte ».

La charge fiscale, malheureusement indispensable, demeure mesurée et n’affecte pas les catégories populaires ni les classes moyennes. Dans un pays qui est déjà le plus fiscalisé d’Europe, les marges de manœuvre fiscales sont bien sûr limitées. Mais il nous faut prendre en compte l’impératif de l’urgence. Cette hausse de la fiscalité est nécessaire pour réaliser l’ajustement à court terme. D’ailleurs, les mesures fiscales nouvelles sont pour l’essentiel provisoires.

L’effort est lourd, nous en sommes conscients, mais il n’est plus possible de faire le choix de la facilité, ni dans le sens d’une promesse de baisse d’impôts ni dans celui, souhaité par la gauche, d’une hausse de la fiscalité. Évitons la foire à la taxation, dont l’Assemblée nationale a donné le spectacle ! Les populismes, de gauche comme de droite, sont mensongers ou irresponsables.

J’ajoute que ce budget sera celui d’un retour à la transparence des finances publiques. Il est tout d’abord fondé sur les hypothèses macroéconomiques du Haut Conseil des finances publiques, ce qui évitera de mauvaises surprises en exécution. Il constitue surtout le point de départ de la reprise d’une trajectoire financière destinée à réduire le déficit public à 5,2 % du PIB en 2025.

Je le disais, ce projet de budget n’est pas parfait. Il a bien sûr vocation à être amélioré par les amendements du Sénat. Le Gouvernement peut être assuré non seulement de notre plein soutien dans la voie courageuse qu’il emprunte du rétablissement de nos finances publiques, mais aussi de l’inventivité et de l’expertise du groupe Les Républicains (Exclamations amusées sur les travées du groupe SER.) pour corriger ce qui doit l’être. Il est tellement plus facile de promettre le retour de la retraite à 60 ans, de faire des chèques ou de lancer à l’aveuglette des baisses de dépenses…

M. Pascal Savoldelli. Comme le travail gratuit ?

M. Jean-Baptiste Olivier. On est rarement populaire quand on demande de fournir des efforts, mais la survie de notre modèle est à ce prix. Ceux qui prétendent le contraire le mettent en danger. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canévet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Antoine Armand, ministre. Monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général du budget, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je vous remercie de vos interventions.

Je commencerai par établir l’existence entre nous, monsieur le rapporteur général, d’un point d’accord fondamental sur la suite, c’est-à-dire sur ce que le budget que nous vous présentons doit permettre d’engager, à savoir des réformes profondes et structurantes, en matière d’économie, de productivité et d’innovation. Il y va en réalité – vous avez été nombreux à le rappeler – de notre capacité à dépenser moins sans que l’action publique s’en trouve dégradée.

Il me semble qu’il est possible de conjuguer ces deux objectifs. En Allemagne, la masse salariale des agents publics représente 8 % du PIB, contre 12 % en France. On recense dans notre pays 5 millions d’emplois publics, ce qui est un record dans l’Union européenne. Ne peut-on pas faire mieux ? Est-ce forcément choisir l’austérité et la dégradation des services publics que d’essayer de faire mieux avec moins de moyens humains et financiers ? Je ne le crois pas.

Monsieur le président de la commission des finances, vous avez appelé à donner davantage de pouvoir fiscal aux collectivités locales, mais il me semble ne vous avoir entendu parler que de quelques recettes nouvelles issues de la fiscalité des entreprises. Prenons un peu de recul : vous ne trouverez pas grand monde en Europe pour considérer qu’en France on manque de pouvoir fiscal… Bien au contraire, nous ferions mieux dans les prochaines années, dès que nous aurons redressé nos comptes publics, de recourir un peu moins audit pouvoir fiscal.

Monsieur le sénateur Daubet, vous avez plaidé pour que nous aidions les mutations qui fonctionnent ; vous avez absolument raison. Nous l’avons dit dans le cadre d’une récente séance de questions d’actualité au Gouvernement : nous ne devons pas ignorer les mutations qui sont en train d’arriver, mais nous devons, au contraire, les regarder en face et les accompagner, que ce soit dans l’automobile, dans la sidérurgie ou dans d’autres secteurs industriels. Il faudra pour cela mieux former, et surtout construire les emplois de demain. Tel est le but des dispositifs que sont les leviers d’aide à la décarbonation, le crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte (C3IV) ou le crédit d’impôt recherche (CIR), ce dernier soutenant fortement l’attractivité et l’innovation des entreprises en France.

Monsieur le sénateur Canévet, vous avez souhaité attirer mon attention sur l’excès d’impôt qui pourrait peser sur les entreprises ; j’y suis attentif, soyez-en assuré.

Monsieur Savoldelli, madame Senée, je vous en conjure, alors que nous commençons l’examen de ce projet de budget, et malgré tous les désaccords que nous pouvons légitimement avoir, ne tombons pas dans la caricature en disant qu’il s’agit d’un budget d’austérité. Je le répète au risque de radoter, un budget dans lequel l’ensemble des dépenses publiques augmente de 0,4 % en volume n’est pas un budget d’austérité. Si vous considérez que c’en est un, alors comment qualifierez-vous les budgets d’austérité auxquels ont dû se soumettre les pays européens qui n’avaient pas fait, précisément, l’effort de redressement des comptes publics qu’il est – je le crois – de notre responsabilité de fournir aujourd’hui ?

Monsieur le sénateur Cozic, je vous remercie d’avoir dit que vous ne vouliez pas vous placer dans une démarche d’opposition stérile. J’ai noté que vous étiez membre du parti socialiste ; n’hésitez pas à passer le message à d’autres parlementaires du même parti qui, dans une autre assemblée, annoncent leur volonté de voter une motion de censure avant même la déclaration de politique générale du Premier ministre, et ce en s’alliant aux députés de la France Insoumise – ceux-là même qui souhaitent abroger le délit d’apologie du terrorisme (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canévet et Mme Denise Saint-Pé applaudissent également.) et menacent à présent de voter une autre motion de censure avec le Rassemblement national ! N’hésitez pas à passer le message, disais-je : ce sera dans l’intérêt collectif du pays.

Monsieur Durox, monsieur Capus, vous avez mentionné les dépenses de fonctionnement : ce sujet est bel et bien fondamental. Ayons le courage de le dire, nous pouvons faire beaucoup mieux en matière de fonctionnement, avant même de nous attaquer aux dépenses d’investissement. Certains d’entre vous l’ont rappelé, mesdames, messieurs les sénateurs, à propos de la révision du FCTVA notamment : il est difficile de ne pas vous donner raison sur ce point.

Nous pouvons et nous devons faire mieux pour réduire les dépenses de fonctionnement et cela passera par l’instauration de règles communes pour les opérateurs, pour les doublons et pour l’emploi public d’État – il ne devra être question de l’emploi public local que dans un second temps. Nous vous ferons des propositions en ce sens dans les prochaines semaines et dans les prochains mois.

Madame Lavarde, vous avez évoqué le rapport Rueff – par définition, j’y suis sensible. Ses auteurs recommandaient déjà, en 1960, la simplification du corpus normatif qui enserrait les entreprises : nous devrions en tirer les leçons.

Vous avez fait une comparaison très juste avec le jeu du Monopoly. Si vous me le permettez, je la compléterai d’une phrase : contrairement au Monopoly, où vous jetez les dés, ici, tout dépend de nous. Nous avons la capacité de faire plus d’économies et de moins recourir à la fiscalité, si votre assemblée le décide et si nous réussissons à faire prospérer ces mesures dans la suite de la navette. De même, nous avons la capacité de faire en sorte qu’il y ait moins d’emplois publics et davantage de liberté pour les entreprises. Tout cela, nous pouvons le faire, et je ne doute pas que les débats qui s’ouvrent nous le permettront : les dés, nous les avons en main.

Messieurs Patient et Delcros, je vous remercie de vos encouragements, ainsi que de l’attention que vous portez à la question ultramarine et à l’aide qui est apportée à la Guadeloupe, à la Martinique ou à la Nouvelle-Calédonie. J’ai déjà eu l’occasion de recevoir l’ensemble des autorités ultramarines et je continuerai de le faire dans les prochaines semaines, parce que la question n’est pas seulement budgétaire : elle est aussi économique, dès lors que, dans certains territoires, les enjeux sont ceux de la reconstruction et du soutien à la vie économique à court terme.

Madame Espagnac, vous nous reprochez une « obsession comptable ». Mais je vous garantis – et je vous prends tous collectivement à témoin – que l’objectif consistant à ramener notre déficit à 5 % du PIB en 2025 puis à 3 % en 2029 n’est pas la lubie du ministre des finances que je suis ni celle du Premier ministre qui m’a confié cette responsabilité.

Il y a là, tout simplement, l’une des conditions qu’il nous faut remplir pour éviter l’austérité, cette austérité à laquelle nous serons contraints si nous n’empêchons pas le dérapage final des comptes publics et si nous ne parvenons pas à maîtriser l’écart de taux entre la France et l’Allemagne, lequel a déjà commencé à se creuser. Or, quand l’écart se creuse entre les taux d’intérêt, cela représente des milliards d’euros en moins pour les services publics de proximité, ceux de la ruralité notamment, dont la défense motive votre engagement, madame la sénatrice.

Par conséquent, en laissant entendre qu’il y aurait une opposition entre des objectifs comptables et des objectifs politiques, vous niez le danger qu’il y aurait à laisser filer jusqu’au dérapage nos fondamentaux budgétaires.

Monsieur Sautarel, vous avez parlé – j’ai moi-même employé ce terme, car il s’impose quand on considère le développement de nos dépenses – d’« addiction à la dépense publique ». En effet – plusieurs orateurs l’ont dit, pour s’en réclamer ou pour s’y opposer –, en cas de problème, notamment économique, la première solution envisagée dans notre pays consiste à faire appel à la dépense publique. Lorsqu’il y a un problème de productivité ou d’innovation, lorsqu’on se demande comment libérer les entreprises ou soutenir l’investissement, on pense d’abord « public » et non « privé ». La France n’est certes pas les États-Unis – et je ne crois pas que quiconque ici souhaiterait que ce fût le cas –, mais nos partenaires extra-européens sont nombreux à raisonner autrement que nous tout en obtenant pourtant de meilleurs résultats économiques.

Aussi, je soutiens pleinement l’idée formulée tout à l’heure par mon collègue Laurent Saint-Martin selon laquelle nous ne devons pas croire que la solution à tous nos maux serait la dépense publique. Si c’était vrai, nous serions, cela ne fait aucun doute, la première puissance planétaire du point de vue des services publics et de la performance économique. Or tel n’est manifestement pas le cas. C’est donc la conviction qu’a exprimée le ministre du budget qui doit guider nos actions.

Monsieur Capo-Canellas, vous avez mentionné la question, extrêmement importante à mes yeux, de la définition des missions de l’État. Pareil travail au long cours excède les limites de ce que nous pouvons faire dans le cadre de l’examen du PLF, mais il me semble indispensable que, collectivement, avec la représentation nationale, nous réfléchissions aux missions qui, demain, ne pourront plus relever de l’État ou être en totalité financées par la dépense publique, notre pays ayant une dette de 3 300 milliards d’euros et un déficit public de 6 % du PIB hors situation de crise.

Madame Blatrix Contat, vous avez dit, sur la transition écologique, beaucoup de choses avec lesquelles je suis tout à fait d’accord, mais je ne peux pas vous laisser affirmer que notre budget serait un budget de renoncement écologique. Les crédits que nous allouons au financement de la transition écologique sont à un niveau jamais atteint dans l’histoire de notre pays, et ce n’est pas seulement à cause de l’inflation des dernières années ; l’enveloppe affectée au fonds Chaleur va augmenter et nos aides en faveur de la rénovation énergétique sont les plus élevées de l’Union européenne. Vous pouvez estimer que ce n’est pas suffisant, qu’il faudrait faire davantage, mais considérez donc l’énergie qu’a déployée ma collègue Agnès Pannier-Runacher lors de la COP29 pour accélérer la transition au niveau mondial ! Il me semble donc qu’il faut plutôt encourager les efforts qui vont dans le sens du financement de la transition.

Monsieur Rietmann, vous avez indiqué que nous étions sur une ligne de crête et je crois que vous avez en effet tout dit. Évidemment, si nous pouvons faire avec moins de fiscalité, nous le ferons, mais il faudra qu’au cours des prochains jours se dégage une majorité pour faire des économies et non, comme cela a pu se produire naguère dans une autre assemblée, en faveur de plus d’impôts…

Enfin, monsieur Olivier, je souhaite reprendre, parmi tous les points que vous avez mentionnés, une idée, qui montre d’ailleurs que l’on ne peut pas qualifier ce budget d’« austéritaire » : le réarmement régalien, qui concerne l’armée, la justice, la police et les moyens du ministère de l’intérieur, est bien à l’ordre du jour, car la première des libertés est la sécurité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canévet applaudit également.)

M. le président. La discussion générale est close.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures trente-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Discussion générale (suite)

3

 
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article liminaire

Projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024

Adoption d’un projet de loi modifié

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de finances de fin de gestion pour 2024 (projet n° 155, rapport n° 159).

Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que les candidatures pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur ce projet de loi ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, nous examinons cet après-midi le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024. Vous connaissez la spécificité de ce texte : il a un objet limité aux seuls ajustements budgétaires indispensables pour boucler l’année en cours, à l’exclusion de toute mesure fiscale nouvelle.

Vous le savez, l’Assemblée nationale a rejeté ce projet de loi. Je le regrette, croyez-le bien, car c’est un texte nécessaire et utile, à plus d’un titre : d’abord, l’effort complémentaire de maîtrise de la dépense de l’État qu’il prévoit est indispensable pour contenir le déficit pour 2024 à 6,1 % du PIB ; ensuite, y sont inscrites des ouvertures de crédits dont certaines sont urgentes ou impératives – nous y reviendrons. Je souhaite donc que nous prenions nos responsabilités et trouvions ensemble, ici, à la chambre haute, un chemin pour ce texte.

Mon propos s’articulera en trois temps. D’abord, je me permettrai de vous dire combien ce projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) confirme les hypothèses macroéconomiques que nous avons retenues dans le cadre du PLF pour 2025. Ensuite, j’expliquerai pourquoi nous devons contenir à 6,1 % le déficit public pour 2024. Enfin, j’évoquerai les mouvements de crédits en eux-mêmes et la nécessité de limiter la dépense.

Commençons par les hypothèses macroéconomiques.

La croissance du PIB atteindra bien, selon les dernières estimations, 1,1 % en 2024 ; et les principales institutions spécialisées – l’OCDE, la Banque de France, le FMI, l’Insee, l’OFCE, le Consensus des économistes – retiennent d’ailleurs la même prévision.

C’est une bonne nouvelle pour nos finances publiques, mais aussi pour notre pays : ainsi la solidité et la résilience de notre économie se trouvent-elles attestées, auprès de nos voisins européens notamment. Nous le devons à la nature même de notre tissu économique, mais également, en cette année particulière, à l’effet des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, qu’il ne faut pas sous-estimer.

En ce qui concerne l’inflation, la prévision est également maintenue, à 2,1 %, chiffre en forte baisse par rapport à 2023 – l’inflation atteignait alors 4,9 %. Cette décrue était attendue – elle avait du reste motivé notre décision, prise de concert, de mettre en extinction les boucliers anti-crises, comme je l’ai rappelé ce matin –, et elle a même été plus rapide que prévu.

Il faut en effet savoir sortir de ces dispositifs dès lors que leur existence n’est plus justifiée. Il y va d’une exigence de bonne gestion, à laquelle il est nécessaire de nous conformer si nous voulons reconstituer les marges de manœuvre dont nous aurons besoin pour protéger notre pays en cas de nouvelle crise. Or, eu égard au contexte mondial, nul doute que de prochaines crises nécessiteront un État fort pour protéger notre économie, nos entreprises, nos épargnants et nos collectivités territoriales.

Dans son avis, le Haut Conseil des finances publiques estime que les prévisions de croissance et d’inflation retenues dans le PLFG sont « réalistes » et que notre prévision de déficit est « plausible ».

J’en viens maintenant à l’objectif premier de ce texte, qui est de contenir le déficit pour 2024 à 6,1 % du PIB.

Pourquoi est-il si important de s’y tenir ? Si nous ne faisions pas cet effort dès cette année, notre objectif de déficit pour 2025 – 5 % – serait tout simplement irréaliste. Nous devons donc freiner au maximum la dépense dès 2024 pour ne pas dépasser 6,1 % de déficit. En d’autres termes, il s’agit d’un préalable nécessaire au redressement de nos finances publiques.

Vous le savez, la commission des finances du Sénat, qui a examiné le sujet…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avec sérieux !

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Comme d’habitude, monsieur le rapporteur général !

La commission des finances, disais-je, a souligné un écart sensible par rapport à la loi de finances initiale, qui prévoyait un solde de –4,4 %.

Cet écart d’environ 50 milliards d’euros est principalement lié à l’évolution des prélèvements obligatoires, dont le produit est revu à la baisse pour plus de 40 milliards d’euros par rapport aux prévisions initiales ; ce chiffre s’explique pour moitié par l’exécution constatée en 2023. Monsieur le rapporteur général, vous avez eu l’occasion récemment d’exposer les conclusions de la mission d’information de la commission des finances du Sénat sur le sujet.

J’ai bien conscience des enjeux de confiance et de crédibilité que soulèvent ces écarts, imputables à la grande volatilité de notre économie en période de crise puis de rebond, mais, quand on connaît une crise aussi importante que la crise sanitaire, suivie immédiatement d’un plan de relance lui-même important et d’une grave crise inflationniste, alors, oui, l’élasticité des recettes fiscales à la croissance est extrêmement difficile à prévoir. Lors des premiers exercices budgétaires post-covid – 2021 et 2022 –, les recettes fiscales avaient été supérieures aux prévisions, mais c’est le contraire qui s’est produit en 2023 et 2024.

Cela ne va pas sans poser des difficultés, puisque cette situation nous oblige aujourd’hui à redresser les comptes. Reste que, sur l’ensemble de ces quatre exercices, le rebond et l’élasticité observés s’avèrent, somme toute, à peu près conformes aux prévisions de croissance ; simplement, la courbe ne s’est pas comportée comme prévu.

Le ministre de l’économie et des finances et moi-même avons donc lancé un travail de réflexion ouvert sur la base d’expertises issues de tous horizons. Ce travail devra aboutir d’ici à la mi-décembre à un plan d’action visant à mieux piloter et à mieux suivre nos finances publiques. Nous ferons dans ce cadre des propositions pour renforcer encore l’information, et notamment celle qui est mise à la disposition du Parlement, comme nous nous y sommes engagés à plusieurs reprises devant vous.

L’écart par rapport à la prévision initiale résulte également du dynamisme des dépenses publiques en 2024, en dépit, je tiens à le rappeler, des efforts de freinage bien réels enclenchés par le précédent gouvernement en matière de dépense de l’État – j’y reviendrai.

Pour ce qui est des dépenses sociales, nous avons récemment détecté, pour l’année 2024, un nouveau risque pesant sur les dépenses de médicaments – nous l’avons évoqué lors de l’examen du PLFSS –, en raison d’un niveau de remises consenties par les laboratoires inférieur de 1,2 milliard d’euros à la prévision qui avait été retenue.

Le jeu des stabilisateurs automatiques devrait permettre de contenir d’environ un tiers en 2024 le dépassement qui aurait résulté de cette nouvelle prévision. Ainsi, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) pour 2024 sera revu à la hausse de 0,8 milliard d’euros. Le Gouvernement a immédiatement signalé cette donnée nouvelle au Parlement, afin qu’il se prononce sur les textes financiers en toute connaissance de cause et puisse prendre toutes les mesures utiles de redressement et de maîtrise de ce dépassement.

Nous avons travaillé en particulier avec la commission des affaires sociales dans le cadre de l’examen du PLFSS, afin de réagir le plus rapidement possible. Nous proposons de mobiliser plusieurs leviers qui permettront de ramener à 0,2 milliard d’euros le dépassement par rapport à la trajectoire de l’Ondam 2025 présentée dans le texte initial. Je cite ce chiffre, car il s’agit de l’estimation la plus récente dont nous disposions.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, vous le savez, nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises, je suis là non pas pour distribuer les bons et les mauvais points, mais pour trouver, avec vous, le chemin du redressement de nos comptes publics. Comme je m’y suis engagé, je ferai preuve à cet égard de la plus grande transparence possible.

Qu’il s’agisse de l’État, de la sécurité sociale ou des collectivités, nous sommes tous soumis aux difficultés de prévision et de gestion qu’impliquent les périodes de crise puis de rebond économique, comme celles que nous avons connues au cours des deux derniers exercices.

D’ailleurs, notre niveau d’endettement actuel résulte moins de ces aléas que des choix collectifs que nous avons faits ces dernières années. Je le répète régulièrement, si nous avons protégé notre pays lors des crises, il est aujourd’hui de notre responsabilité collective de redresser nos comptes, dans un contexte où l’endettement a évidemment largement augmenté.

La dette s’élève ainsi à plus de 3 220 milliards d’euros. C’est donc l’affaire de tous. La charge de la dette, elle, a progressé de 17 % entre 2023 et 2024, passant de 39 milliards à près de 46 milliards d’euros.

C’est la raison pour laquelle, dans ce texte, nous limitons la dépense de l’État au strict nécessaire, en allant au maximum de ce qu’il est possible de faire en matière d’annulations de crédits. Concrètement, la dépense de l’État s’établira à un niveau inférieur de 6 milliards d’euros à celui qui a été prévu en loi de finances initiale.

Je tiens à souligner de nouveau le volontarisme déployé en ce sens depuis de nombreux mois : décret d’annulation pris en février, surgel de crédits décidé en juillet, mesures auxquelles il convient d’ajouter les lettres plafond du budget 2025, transmises à l’été. Cet effort de freinage, nécessaire, date donc non pas de ces dernières semaines, mais bien du début d’année. Nous devons le poursuivre en annulant des crédits qui ne peuvent pas être reportés et en comptabilisant dès l’exercice 2024 la part la plus importante possible des crédits non consommés.

C’est en nous appuyant sur ces deux mesures de régulation que nous proposons, dans le cadre du PLFG, des annulations de crédits à hauteur de 5,6 milliards d’euros sur le périmètre de dépenses de l’État.

Ces annulations portent très majoritairement sur la réserve de précaution, renforcée cet été grâce au surgel de juillet que je viens d’évoquer. Elles ont fait l’objet de discussions approfondies avec l’ensemble des ministères, tout comme les ouvertures de crédits que je vous présenterai dans un instant.

Ce travail utile et nécessaire de construction collective nous a permis de calibrer les moyens au plus près des besoins réels de gestion des administrations, en limitant les crédits au strict nécessaire.

Au total, les trois quarts des 16 milliards d’euros de crédits mis en réserve ne seront pas consommés en 2024.

Avec les annulations contenues dans le décret de février et celles du texte qui vous est présenté, c’est à plus de 15 milliards d’euros que s’élève la réduction des dépenses de l’État en cours d’année.

C’est inédit et, pour le dire un peu trivialement, c’est le maximum de ce qu’il est possible de faire.

En tenant compte de mouvements inverses, en particulier de l’effet net des reports de crédits de 2023 et des ouvertures nécessaires, à hauteur de 4,2 milliards d’euros, pour faire face à des dépenses imprévues et exceptionnelles que je vais vous présenter, la prévision d’exécution des dépenses de l’État est inférieure de 6 milliards d’euros au niveau prévu en loi de finances initiale.

Enfin, et ce sera mon dernier point, le Gouvernement, avec ce PLFG, propose 4,2 milliards d’euros d’ouvertures de crédits afin de répondre à des besoins impératifs.

Il s’agit, d’abord, de financer le soutien à la Nouvelle-Calédonie. C’est la responsabilité de la Nation et cela correspond à un engagement fort de l’État.

Je pense notamment à des avances de trésorerie urgentes, eu égard à la situation financière de la collectivité, mais aussi à la prise en charge des forces de l’ordre et de défense mobilisées pour assurer la sécurité sur place, ou encore aux mesures de soutien aux entreprises, aux salariés, aux collectivités et aux hôpitaux, qui permettent à la Nouvelle-Calédonie de tenir. Au total, 1 milliard d’euros de dépenses supplémentaires sont prévus en 2024 à ce titre.

Il s’agit, ensuite, de sécuriser le financement des opérations extérieures (Opex) et de permettre à nos armées de renouveler les équipements militaires qu’elles ont livrés à l’Ukraine, en soutien à la résistance de tout un peuple face à l’invasion russe.

Il s’agit, en outre, d’assurer le paiement des salaires de la fonction publique. Je parle ici de l’éducation nationale, mais aussi du ministère de l’intérieur, au sein duquel ce réabondement permettra notamment de payer les primes dues aux agents qui ont activement contribué à la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques.

Il s’agit également de compléter le financement des dépenses de guichet en faveur des plus vulnérables, dépenses dont le niveau, vous le savez, peut varier en cours de gestion. Concrètement, il est ici question des bourses sur critères sociaux pour les étudiants, de l’allocation aux adultes handicapés, de la préservation du parc d’hébergement d’urgence ou encore de l’accueil des réfugiés ukrainiens.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, voilà en quelques mots quels sont l’esprit et le contenu de ce PLFG.

Je l’ai dit, c’est un texte nécessaire à double titre : d’abord, pour oser freiner la dépense, et le discours que j’ai tenu ce matin à cette même tribune n’aurait aucune crédibilité si nous ne nous montrions pas exemplaires dès cette année 2024 ; ensuite, pour ouvrir des crédits, soit urgents, à l’instar de ceux qui sont inscrits en faveur de la Nouvelle-Calédonie, soit tout simplement nécessaires et inéluctables en fin de gestion, comme c’est le cas chaque année, et je fais notamment référence aux dépenses de guichet et aux mesures sociales que j’ai évoquées.

Qu’il s’agisse d’un texte nécessaire à plus d’un titre, vous en conviendrez donc ici toutes et tous, me semble-t-il. Je serai évidemment très heureux d’en discuter avec vous, dans le cadre de l’examen des amendements que vous aurez déposés.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est la seconde fois que nous examinons un projet de loi de finances de fin de gestion. En effet, la traditionnelle loi de finances rectificative de fin d’année a laissé la place, depuis l’an passé, à une loi de finances dite « de fin de gestion » (LFG).

Comme le prévoit désormais la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), la LFG se limite, pour l’essentiel, à ajuster les crédits relatifs à l’exercice en cours, sans contenir ni autoriser de mesures fiscales.

La concordance dans notre assemblée de l’examen du PLFG avec le début de la discussion du PLF pour 2025 ne fait que démontrer la pertinence de cette modification. Dans le cas contraire, nous aurions deux textes financiers potentiellement concurrents à examiner au même moment. La situation actuelle a donc le mérite de la clarté.

Ce qui est cause de moins de clarté, c’est la situation politique à l’Assemblée nationale. En effet, comme le projet de loi de finances pour 2025, le présent texte financier y a été rejeté. Les raisons du rejet ne me sont pas apparues clairement, autant le dire. De nouveau, le Sénat va donc avoir à se prononcer sur la copie initiale du Gouvernement et il nous reviendra, en commission mixte paritaire, de tout faire pour nous mettre d’accord avec les députés sur un texte commun.

En ce qui concerne le projet de loi qui nous est présenté, je veux d’abord relever le caractère crédible de ses sous-jacents macroéconomiques, que vous avez vous-même exposés, monsieur le ministre.

Ainsi le Gouvernement anticipe-t-il une croissance du PIB de 1,1 % en 2024, chiffre d’ailleurs situé pile dans la moyenne des prévisions du Consensus des économistes et parfaitement en ligne avec les prévisions « institutionnelles ». Cette prévision est d’autant plus crédible à mes yeux que, selon les dernières données de l’Insee, l’acquis de croissance au troisième trimestre est déjà de 1,1 %.

Toutefois, ne nous y trompons pas : il n’y a pas matière à donner un satisfecit particulier aux gouvernements précédents, dont la prévision, révisée à 1 % au moment de la présentation du programme de stabilité 2024-2027 en avril, a finalement été atteinte. En effet, je le souligne, les facteurs de croissance n’ont rien à voir avec ce qui était anticipé, en tout cas par le précédent gouvernement. La croissance devait être tirée par la consommation. Or elle a été soutenue non seulement par le commerce extérieur, mais aussi et surtout par la demande publique.

En clair, c’est le dérapage complet du déficit public cette année qui a permis d’atteindre l’objectif de croissance du Gouvernement, fixé à 1,1 %. J’entends nombre de responsables politiques se féliciter de ladite croissance. Pourtant, je n’avais pas cru entendre ni comprendre que l’explosion du déficit était au cœur de la politique économique portée par le ou les précédents gouvernements.

Le fait est donc là : malgré l’atteinte de la prévision de croissance pour 2024, la situation des finances publiques s’est encore très fortement dégradée pour dépasser le niveau historique de 2023. Le Gouvernement prévoit ainsi pour 2024 un déficit de 6,1 % du PIB. Nous assistons – nous l’avons déjà dit – à une dérive lente mais continue du déficit, passé de 4,7 % en 2022 à 5,5 % en 2023, pour atteindre, donc, 6,1 % en 2024. Comme je l’ai indiqué ici même ce matin, je regrette toujours et à ce stade que personne n’assume la responsabilité politique de ce dérapage et de cette sortie de route.

J’en viens au présent projet de loi de fin de gestion.

Nous l’avons également indiqué dans le cadre de notre mission sur la dégradation des finances publiques, la principale cause de la dégradation se situe du côté des recettes.

La prévision de croissance retenue dans le PLF 2024 était tout bonnement surévaluée : 1,4 % au lieu de 1,1 % de croissance réalisée. S’y ajoute une prévision d’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance que l’on peut qualifier de très, voire trop, optimiste : 1,1 en prévision au lieu de 0,7 en exécution. C’est bien le cumul de ces deux facteurs, probablement combiné à une trop forte dose de volontarisme politique, qui a conduit à surestimer les recettes : au total, les prélèvements obligatoires sont inférieurs de plus de 41 milliards d’euros à la prévision initiale.

Pour ce qui est du déficit budgétaire de l’État, monsieur le ministre, il serait, en 2024, de 163,2 milliards d’euros, soit une dégradation de 16,3 milliards d’euros par rapport à la prévision de la loi de finances initiale, autrement dit, tout de même, 10 % d’écart…

Je relève que le présent projet de loi annule 1,9 milliard d’euros net de crédits de paiement. L’an dernier, j’avais, ici, qualifié le projet de loi de fin de gestion de texte « riche, voire opulent ». Cette année, on en revient, et c’est salutaire, à davantage de mesure.

Sur le périmètre des dépenses de l’État, c’est-à-dire hors remboursements et dégrèvements, et des dépenses liées à la dette, en 2024, les dépenses sont inférieures de 2,7 milliards d’euros à celles de 2023 et de 5,5 milliards d’euros à celles qui ont été prévues en loi de finances initiale pour 2024. Elles sont également inférieures à ce qui est inscrit dans la loi de programmation, laquelle prévoyait 491 milliards d’euros, contre une exécution de 486 milliards d’euros.

Pour une fois, ne boudons pas notre plaisir. Il faut nous en féliciter, bien qu’un tel effort ne soit ni exagéré ni, pour répondre à mes collègues de gauche, la marque d’une austérité brutale : c’est une réponse, partielle, à la dégradation – à l’aggravation – de la situation des finances publiques, donc à la chute des recettes.

Un tel résultat est relativement facile à atteindre, nous l’avions souligné dans nos travaux sur le projet de loi de finances pour 2024 : à l’époque, souvenez-vous, toutes les missions du budget de l’État étaient en progression, à part la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Le point de départ des crédits de la loi de finances pour 2024 était donc très haut. Il était même trop haut.

Ce texte marque une autre rupture par rapport aux années précédentes : c’est la première fois depuis 2019 et la quatrième fois en treize ans que les annulations de crédits dépassent – enfin, oserai-je dire… – les ouvertures de crédits dans le collectif budgétaire de fin d’année.

Les ouvertures de crédit les plus importantes concernent, pour les citer très rapidement, les dépenses supplémentaires liées aux jeux Olympiques et Paralympiques, à la situation en Nouvelle-Calédonie et à la dynamique de certaines prestations sociales – vous avez signalé ces dépenses nouvelles, monsieur le ministre –, ainsi que le coût des élections législatives anticipées. C’est pourquoi la mission « Sécurités », concernée au premier chef par plusieurs de ces enjeux, est la première par l’augmentation de ses crédits.

Sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », ce sont les surcoûts des prestations sociales, en l’occurrence l’aide aux adultes handicapés (AAH) et l’aide universelle d’urgence pour les personnes victimes de violences conjugales, qui justifient à titre principal les ouvertures de crédits.

Parmi les missions dont les crédits sont globalement en diminution, la mission « Investir pour la France de 2030 » fait l’objet d’une annulation très importante de crédits, de 1,2 milliard d’euros, justifiée par le lissage de la trésorerie des opérateurs. Cela rejoint l’analyse faite par notre rapporteur spécial, Laurent Somon.

Sur la mission « Engagements financiers de l’État », je relève que le reflux de l’inflation permet de réduire la charge de la dette de 537 millions d’euros par rapport à la prévision.

Habituellement, le projet de loi de fin de gestion prévoit des augmentations d’emplois. Il n’y en a pas cette année : le plafond des autorisations d’emplois n’est pas majoré. Je veux y voir également le signe d’un retour à une gestion plus rigoureuse des finances publiques.

Pour conclure, je dirai que ce texte est d’abord un constat.

D’une part, il tire les conclusions d’une exécution budgétaire troublée notamment par le refus du gouvernement précédent de présenter un projet de loi de finances rectificative. Nous le redisons, je le redis, seul un PLFR aurait permis, plus tôt et en temps utile, de redresser la barre : ces mots ne sont pas seulement les miens ; ce sont aussi ceux de l’ancien ministre de l’économie.

Ainsi le texte qui nous parvient constitue-t-il un expédient un peu tardif : les efforts auraient dû être accomplis plus tôt. Le PLFG participe à « contenir » le déficit pour 2024 à 6,1 % du PIB, chiffre qui aurait pu être plus élevé encore.

D’autre part, ce projet de loi ajuste les crédits du budget de l’État pour permettre l’accomplissement de ses missions en fin d’année. De ce point de vue, il remplit bien sa fonction.

Par conséquent, je vous proposerai d’en adopter les crédits, sous réserve de l’adoption des amendements de la commission des finances, adoption dont je vous remercie par avance, mes chers collègues ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances de fin de gestion est un texte singulier : il est circonscrit aux seuls ajustements de crédits nécessaires à la clôture de l’exercice budgétaire en cours. Ainsi ne voyons-nous aucune raison valable de nous y opposer. Le PLFG ne contient pas de dispositions fiscales nouvelles, de telles mesures figurant dans le PLF 2025, dont l’examen en séance a débuté ce matin.

L’an dernier, nous avions été saisis d’un projet de loi de finances de fin de gestion pour la première fois depuis la réforme de la Lolf intervenue en 2021 ; nous l’avions adopté. Je vous propose que nous restions sur la même ligne, de façon à veiller au respect de l’autorisation parlementaire accordée en loi de finances initiale.

Sur le plan économique, le texte ne contient aucune surprise, puisqu’il repose sur le même scénario que le projet de loi de finances pour 2025 : une croissance prévue à 1,1 % en 2024 et une inflation contenue à 2,1 %. Nous notons que ces prévisions ont été jugées réalistes par le Haut Conseil des finances publiques.

Pour ce qui est du déficit, si nous voulons redresser nos finances publiques, il est impératif de le contenir à 6,1 % du PIB en 2024. Cette étape est indispensable pour atteindre les 5 % en 2025 et viser moins de 3 % d’ici à 2029.

Bien entendu, personne ne se réjouit de l’écart significatif entre la prévision de déficit à 4,4 % inscrite il y a un an en loi de finances initiale et le déficit constaté à 6,1 %. Ce gouffre, que nous avons cherché à comprendre au travers de la récente mission d’information sénatoriale sur la dégradation des finances publiques depuis 2023, nous oblige. Nous nous devons d’encourager l’effort proposé par le Gouvernement, qui vise à ce que l’exécution de la dépense sur le périmètre de l’État baisse de près de 6 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Ce redressement progressif est un préalable nécessaire si nous voulons garantir la soutenabilité de nos finances publiques ; il y va de notre responsabilité.

Pour ce qui est des 4,2 milliards d’euros d’ouvertures de crédits proposés par le Gouvernement, ils concernent des dépenses indispensables. Qu’il s’agisse du soutien à la Nouvelle-Calédonie ou à l’Ukraine, des opérations extérieures de nos armées ou encore de mesures en faveur des plus vulnérables, comme celles qui ont trait à l’allocation aux adultes handicapés ou aux bourses étudiantes, ces dépenses reflètent nos priorités nationales et internationales.

Ce texte apparaît nécessaire pour respecter les objectifs budgétaires prévus pour 2025. Pour l’ensemble des raisons que je viens d’évoquer, la grande majorité des sénateurs du groupe Union Centriste voteront en faveur du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. le rapporteur général, M. Laurent Somon et Mme Vanina Paoli-Gagin applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce budget supplémentaire est un objet législatif encore nouveau et peu connu des Français. Ce n’est peut-être pas grave : il est vide de tous droits nouveaux pour les salariés et pour les foyers les plus modestes !

Comme je l’indiquais encore ce matin, le capital ne cesse de s’accumuler, sans être mis à contribution. Pour cette raison – elle est très claire, monsieur le rapporteur général –, ce texte a été légitimement rejeté à l’Assemblée nationale.

Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky votera contre pour deux raisons.

D’une part, ce projet de loi de finances de fin de gestion conclut une année budgétaire catastrophique pour la France. L’exercice 2024 a accru les déficits, fait exploser les inégalités et accéléré la crise de confiance envers la démocratie.

Dès le 9 octobre 2024, soit huit jours avant le début des discussions au Parlement, le ministre chargé des comptes publics assumait avoir besoin du 49.3 pour faire voter le budget.

M. Pascal Savoldelli. C’est éclairant !

Ici même, le 30 novembre 2023, lors du vote de la première partie du PLF pour 2024, nous avions dénoncé un budget politiquement insincère. Notre groupe avait donné l’alerte concernant un manque de recettes insoutenable, pointant notamment du doigt un renforcement de niches fiscales qui promettait d’accroître comme jamais les déficits publics. Nous avions dénoncé le niveau de ce volet recettes, que la majorité sénatoriale, à l’époque, avait adopté. Ledit volet portait mal son nom, quand n’y étaient votées que des dépenses en faveur des plus hauts revenus.

De 49.3 en 49.3, le Gouvernement avait alors fait le choix de contourner le débat parlementaire et d’ignorer les alertes citoyennes, sociales et syndicales quant à la situation du pays.

Quelques mois plus tard, le 24 février 2024, il annonçait, sans aucun débat démocratique, une coupe de 10 milliards d’euros dans le financement des services publics. C’était bien la démonstration que ses prévisions étaient fausses et que le budget était insincère !

Pourtant, le Gouvernement faisait le choix de persister dans cette orientation libérale, autoritaire et injuste. Reconnaissez, monsieur le ministre, que les coupes effectuées dans l’éducation, dans l’hôpital ou dans les retraites ont été sévèrement sanctionnées lors des élections, européennes puis législatives ! L’exécutif s’est entêté à refuser tout budget rectificatif qui aurait pu entériner les choix des Français et le rejet démocratiquement exprimé alors, par leurs votes, d’une politique injuste et inégalitaire.

Voilà le bilan – disons plutôt le dépôt de bilan… – de cette année budgétaire que l’on nous demande d’approuver ! Ce projet de loi de finances de fin de gestion est le seul moyen de résorber la hausse de 58 milliards d’euros d’encours de la dette sur un an. Cet outil est pourtant ô combien limité, puisqu’il interdit à la démocratie parlementaire de voter des dispositions fiscales nouvelles.

Le niveau final auquel s’établit le déficit, 6,1 % du PIB, est en lui-même un aveu d’échec de la politique de l’offre et du ruissellement, et révèle l’hypocrisie des discours sur la dette.

D’autre part – j’en viens à la deuxième raison de notre vote contre –, ce projet de loi acte un besoin de financement de 317 milliards d’euros, dont 163 milliards au titre de nos déficits. Si quelques missions sont épargnées – la sécurité sort grande gagnante de cet exercice, avec 847,5 millions d’euros de crédits de paiement supplémentaires ouverts, visant principalement à financer le déploiement inouï des forces de sécurité en Kanaky –, vous proposez un nouvel affaiblissement de l’État, des services publics et donc de la cohésion sociale via plus de 6 milliards d’euros de coupes supplémentaires.

Le plan France 2030, dont l’objectif affiché était le renouveau industriel, perd 1,2 milliard d’euros : autrement dit, on abandonne les ouvriers de Michelin, de Sanofi ou de Vencorex. La mission « Écologie, développement et mobilité durables » perd 898 millions d’euros en autorisations d’engagement, la mission « Justice » 697 millions et la mission « Cohésion des territoires » 685 millions d’euros en crédits de paiement, principalement des fonds à destination du logement, alors que 12 millions de familles sont victimes de la crise qui frappe le secteur.

Pourquoi toutes ces coupes ? Pour une raison simple : les recettes fiscales nettes sont inférieures de 24,3 milliards d’euros aux prévisions de la loi de finances initiale. Pourtant, le Gouvernement propose d’augmenter de 7,7 milliards d’euros les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » ! Cette politique assumée en faveur des plus riches sanctionne les travailleurs et les victimes de la crise, comme les agents du service public et les agriculteurs.

Nous voterons donc contre ce projet de loi et nous appelons à son rejet.

Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Ghislaine Senée. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances de fin de gestion est le deuxième du genre présenté au Parlement, à la suite de la modification en 2021 de la fameuse loi organique relative aux lois de finances. Cette évolution émane d’une initiative parlementaire dont vous êtes l’auteur, monsieur Saint-Martin. Elle est cohérente avec la ligne politique défendue par les gouvernements nommés par le Président de la République depuis 2017 : les dépenses peuvent être ajustées, mais il ne faut surtout pas toucher aux recettes. Sans vouloir tirer de premier bilan de cette révision de la Lolf, j’affirme que cette ligne constitue le défaut majeur des PLFG, monsieur le ministre.

L’an dernier, les recettes fiscales de l’impôt sur le revenu ont été surestimées de près de 8 milliards d’euros à moins de deux mois de la fin de l’exercice. Les ministres de l’époque le savaient. Un projet de loi de finances rectificative aurait dû être l’occasion de redresser la barre et d’ajuster les recettes ; il n’en fut rien.

Pour 2024, la situation est pire encore : la comparaison des prévisions de recettes entre PLF et PLFG montre un décrochage de l’ordre de 24,3 milliards d’euros, dont 14 milliards pour l’impôt sur les sociétés. Or les deux seules variables d’ajustement sont dans le présent texte les coupes dans les dépenses et la dette.

Nous savons maintenant que le PLF 2024 était insincère. Dès le mois de février dernier et la publication d’un décret d’annulation des crédits, la détérioration brutale du solde public nécessitait un projet de loi de finances rectificative. Monsieur le ministre, hormis les soutiens du Président de la République – et encore : Bruno Le Maire en réclamait un lui-même ! –, chacun convenait qu’il n’y avait pas d’alternative, y compris vos nouveaux alliés de la majorité sénatoriale. Votre rapport sur ce PLFG, monsieur le rapporteur général, ne dit pas autre chose.

Si le déficit a explosé sous nos yeux, c’est qu’aucun gouvernement n’a eu cette année la lucidité de traiter le sujet des recettes et des dépenses fiscales. Le texte présenté aujourd’hui n’y change rien, car les PLFG sont de toute façon techniquement conçus pour ne pas traiter du volet recettes.

Monsieur le ministre, votre vision dogmatique de l’économie, dont la politique de l’offre constitue le seul horizon, en arrive à déstabiliser jusqu’à vos alliés du parti Les Républicains. Même pour eux, l’ampleur des dépenses fiscales non compensées semble excessive, d’autant que ce projet de loi de finances de fin de gestion confirme l’échec économique et, surtout, la catastrophe financière provoqués par cet entêtement : 6,1 % de déficit hors période de crise, soit 163 milliards d’euros, alors même que tous les leviers possibles de réduction des dépenses ont été actionnés – décret d’annulation de crédits, gel, surgel –, désormais confirmés par ce texte.

Les politiques publiques sacrifiées sont justement celles qui ont vocation à préparer l’avenir en garantissant les conditions d’habitabilité de notre planète et notre capacité de vivre ensemble en faisant société. Je pense d’abord au sacrifice, comme à chaque fois, de la transition écologique, de la prévention des risques et de l’adaptation de notre territoire aux effets des dérèglements climatiques. Je pense ensuite à la rénovation thermique des logements et au droit d’être logé et de loger dignement. Je pense aussi au travail, notamment aux politiques en faveur des personnes les plus éloignées de l’emploi, dans un contexte de recrudescence du chômage. Je pense enfin à la recherche publique et à l’enseignement supérieur, ainsi qu’à l’aide publique au développement.

La lecture des tableaux d’ouvertures de crédits est révélatrice d’une défaillance forte de l’État en matière de trajectoire budgétaire. La France savait depuis 2017 qu’elle serait pays hôte des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, mais les crédits supplémentaires nécessaires à la sécurisation de l’événement sont seulement ouverts dans le présent projet de loi de finances de fin de gestion… Quel manque d’anticipation !

Pour en venir à la question de la Nouvelle-Calédonie-Kanaky, nous ne pouvons que regretter l’évolution de la situation sur place en 2024. Celle-ci résulte en grande partie, disons-le, du manque d’écoute du chef de l’État et de son incapacité à mener efficacement à terme le processus de décolonisation. Cette incapacité s’avère d’autant plus navrante que les ressources actuellement mobilisées pour le maintien de l’ordre auraient pu être mieux employées à réduire les inégalités persistantes entre les Kanaks, les Caldoches et les autres communautés.

Quant au coût de la dissolution de l’Assemblée nationale, qui a dû être supporté sans compensation par les collectivités, le Président de la République en porte l’entière responsabilité.

Au chapitre des collectivités, justement, le compte n’y est pas. Nous ne pouvons que déplorer l’absence dans ce texte de compensation des décisions de l’État relatives aux départements, notamment l’extension du Ségur aux professionnels du secteur sanitaire, social et médico-social et la revalorisation du revenu de solidarité active (RSA). Il en va de même pour les crédits du fonds vert.

Ce PLFG aurait pu être l’occasion d’adopter enfin des dispositifs d’urgence à destination de nos nombreux compatriotes touchés cette année encore par des catastrophes dites naturelles. Tel n’est pas le cas. Nos amendements permettront de jeter la lumière sur ces manques, sans grand espoir d’un rééquilibrage : nous sommes lucides, en effet, sur l’issue des débats !

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre ce projet de loi de finances de fin de gestion, qui conforte la trajectoire prise par le Gouvernement avant les élections législatives : continuer sans limite les dépenses fiscales non compensées et ne réduire les déficits qu’en actionnant le levier de la baisse des dépenses publiques destinées au financement des services publics et de la préparation de notre avenir climatique et social. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Briquet. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Isabelle Briquet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, que dire ? Il est en effet difficile de trouver l’adjectif adéquat pour qualifier ce texte : « inquiétant » ? « surréaliste » ? « désastreux » ? Il est en tout cas inédit.

Présenté comme un simple ajustement technique, le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 est en réalité révélateur des carences et des erreurs de la politique budgétaire des exécutifs ces dernières années. Depuis sept ans, les gouvernements successifs ont tous fait le choix de sacrifier les recettes fiscales sur l’autel de l’idéologie néolibérale, affaiblissant ainsi les capacités de l’État à faire face aux différentes crises. Les réductions d’impôts mises en œuvre depuis 2017 ont engendré un manque à gagner global d’environ 62 milliards d’euros par an.

Cette diminution des ressources fiscales a eu plusieurs conséquences notables.

En premier lieu, la dette publique a connu une augmentation marquée, en l’absence de réduction à due proportion des dépenses. Les baisses de recettes ont été financées par un recours accru à l’emprunt. Ainsi la dette publique française a-t-elle franchi en 2024 la barre des 3 100 milliards d’euros, soit environ 112 % du PIB, en augmentation de 14 points par rapport à 2017.

En second lieu, les déficits budgétaires se sont aggravés, la perte de recettes fiscales ayant mécaniquement conduit à les creuser. Alors qu’il était en baisse avant la pandémie de covid-19, le déficit a atteint en 2020 des niveaux record, 8,9 % du PIB, et reste très préoccupant : il s’établit à 6,1 % en 2024 alors que le Gouvernement tablait, dans la loi de finances initiale, sur 4,4 %. Il s’agit là d’une dégradation d’une ampleur exceptionnelle, hors période de crise.

Ne nous méprenons pas : il y va non pas seulement d’une question de chiffres, mais également d’une question de vision, de choix politiques et de respect – le respect dû au Parlement, aux Françaises et aux Français. Ce débat dépasse les frontières de l’arithmétique budgétaire : il touche au cœur même de la justice sociale et de la soutenabilité économique de notre modèle.

La situation que je viens d’exposer est la conséquence directe d’une politique marquée par des prévisions irréalistes et par des décisions irresponsables. Dès décembre 2023, le Gouvernement disposait de notes internes alarmantes sur la dégradation des finances publiques. Pourtant, aucune mesure corrective sérieuse n’a été prise. Pis encore, les responsables gouvernementaux ont maintenu des prévisions optimistes qu’ils savaient irréalistes.

Le président de la commission des finances et le rapporteur général décrivent parfaitement les choses dans le rapport de la mission d’information sur le dérapage de nos finances publiques : un « pari » politique risqué combiné à un « déni » des réalités économiques et budgétaires.

Face à une situation budgétaire critique, le Gouvernement aurait dû présenter un projet de loi de finances rectificative dès le premier semestre 2024, comme le groupe socialiste le demandait. Un tel texte aurait permis d’engager les ajustements nécessaires pour contenir le déficit. Las ! l’exécutif a préféré procéder de manière accélérée en utilisant des décrets d’annulation de crédits, privant le Parlement de son rôle de contrôle et de décision. Ce mépris envers le législatif est un affront à la représentation nationale.

D’ailleurs, il est profondément préoccupant de constater le mépris affiché par d’anciens ministres et Premiers ministres à l’égard du travail rigoureusement mené par le président de la commission des finances Claude Raynal et le rapporteur général Jean-François Husson. Ces ex-ténors du Gouvernement ont qualifié le rapport de notre commission de « réquisitoire d’opposants politiques, truffé de mensonges ». Cette réaction est non seulement injustifiée, mais elle témoigne surtout de leur fébrilité et de leur volonté de discréditer une assemblée qui a le défaut de ne pas être d’accord avec eux. Le rapport sénatorial repose sur des données factuelles et sur des analyses précises, loin des déclarations péremptoires.

Cela étant dit, un projet de loi de finances rectificative était indispensable non seulement pour maîtriser les dépenses, mais aussi pour explorer la possibilité de nouvelles recettes fiscales, en évitant les demi-mesures du Gouvernement. Schématiquement, la France fait face à un mur de financement, tant en investissement qu’en dépenses de fonctionnement quotidien. Pour reprendre l’expression de l’économiste Michaël Zemmour, la logique du Gouvernement est marquée par ce que l’on pourrait qualifier de « néolibéralisme de la stagnation ».

La logique austéritaire qui sous-tend ce PLFG est non seulement injuste, mais aussi contre-productive. Investir dans la transition écologique, renforcer nos services publics, voilà ce qui stimulerait l’économie tout en préparant notre pays aux défis de demain ! À l’inverse, persister dans cette logique d’austérité ne fera qu’aggraver les fractures sociales et territoriales.

Mes chers collègues, ce PLFG n’est pas un simple texte technique : il symbolise une politique budgétaire et fiscale à la fois injuste et inefficace. Malgré le dépôt par le rapporteur général, dont je tiens à saluer la persévérance sur ce sujet, d’un amendement de minoration des annulations de crédits relatifs à l’entretien des voiries communales, nous ne saurions entériner des décisions qui, à notre sens, ne prennent pas suffisamment en compte l’intérêt général.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe socialiste votera contre ce projet de loi de finances de fin de gestion, à moins que nos débats ne conduisent à une évolution majeure de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. le rapporteur général et M. Pascal Savoldelli applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de la passation de pouvoir entre l’ancien et le nouveau ministre de l’économie, M. Armand s’était estimé heureux « d’hériter d’un tel bilan ». Ce bilan, nous l’avons cet après-midi devant nous, et les Français en subissent les conséquences !

L’étude de ce projet de loi de finances de fin de gestion laisse pantois. Comme nous l’avons déjà suffisamment souligné, le déficit s’est dramatiquement creusé, le dérapage atteignant près de 50 milliards d’euros en une seule année, et ce sans qu’aucune crise majeure ni aucun retournement soudain de l’économie soient venus justifier une telle dégradation.

Lors de l’étude du projet de loi de finances pour 2024, nous avions alerté, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, sur les prévisions optimistes et même, oserai-je dire, irresponsables du Gouvernement. Le groupe Rassemblement national de l’Assemblée avait déposé une motion de censure contre le gouvernement d’alors, qui se refusait à présenter un projet de loi de finances rectificative. Apeuré par la perspective d’une déroute électorale, engoncé dans des vanités et des ambitions personnelles, le gouvernement Attal n’avait rien fait pour engager la reprise en main de nos comptes. Certes, un décret d’annulation de près de 10 milliards d’euros de crédits avait été pris, mais cette décision avait été aussitôt engloutie par l’ampleur du dérapage.

Cette situation m’inspire un rappel historique.

Il y a dix ans, le nouveau gouvernement grec découvrait les maquillages comptables laissés par son prédécesseur. Confronté à une situation critique, il lançait sans le vouloir son pays dans la plus grave crise financière et politique de son histoire, exposant aussi, ce faisant, les faiblesses congénitales de la zone euro. À l’époque, Athènes clamait n’être pas l’Argentine. Aujourd’hui, monsieur le ministre, vous vous enfoncez dans le même déni, affirmant que nous ne sommes pas encore dans la situation de la Grèce, alors même que nous empruntons déjà à un taux plus élevé qu’elle. Ce parallèle est troublant et inquiétant.

Je veux pour preuve de la gravité de la situation les chiffres édifiants relatifs à la baisse des prélèvements obligatoires. Rien que pour l’impôt sur les sociétés, le Gouvernement tablait, selon ses propres chiffres, sur un rendement de 72 milliards d’euros. Résultat : l’État n’en a perçu que 57 milliards. Tous les intervenants auditionnés par la mission d’information de la commission des finances du Sénat sur la dérive des comptes publics ont tenté de justifier cette contre-performance en invoquant une prétendue élasticité nouvelle des recettes fiscales à la croissance. Ils ont affirmé qu’il était impossible d’anticiper, que tout avait été fait dans les règles, mais que des circonstances imprévues avaient empêché d’atteindre les objectifs fixés.

Cette justification malhabile ne saurait tromper personne. Face à la dérive volontairement occultée des comptes publics, entreprises et ménages renoncent à investir. De plus, la situation économique apparaît en réalité bien plus dégradée que le Gouvernement ne le pensait. Les Français entendent déjà résonner l’écho des plans sociaux, de Michelin aux usines de foie gras du Périgord, en passant, dans le Nord, par ArcelorMittal. Le chômage refait lentement surface, et avec lui son lot de malheurs.

Mes chers collègues, nous ne saurions donner quitus au Gouvernement : par ce projet de loi qui acte ses illusions et ses mensonges économiques, il ne propose que des économies éparses ou des reports importants qui grèveront le budget de l’année prochaine.

Des recettes fiscales en chute libre, des dépenses imprévues, des reports compromettant l’avenir et une opacité coupable quant à la réalité budgétaire : tout cela impose que nous ne votions pas ce texte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin. (M. le rapporteur général applaudit.)

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte nous fait entrer dans une sorte de faille spatiotemporelle : le passé et l’avenir se télescopent brutalement. Ce matin, nous nous projetions vers le futur en entamant la discussion générale du projet de loi de finances pour 2025, dont nous commencerons dans un instant à examiner les articles. Dans l’intervalle, nous repartons vers le passé, pour clore les comptes de l’exercice écoulé.

Le projet de loi de finances de fin de gestion 2024 permet de dresser le constat d’un triple échec collectif : échec du redressement de nos comptes publics ; échec des prévisions macroéconomiques ; échec lié à la configuration politique de l’Assemblée nationale.

Premièrement, pour ce qui est du redressement de nos comptes, avec un déficit de 6,1 % et une dette de 112 % du produit intérieur brut, la France se trouve dans une situation déplorable.

Cela s’explique d’abord et surtout par un demi-siècle de légèreté budgétaire, au cours duquel le Parlement a cessé de croire qu’il est sain et même rationnel de voter un budget à l’équilibre. Pis, il s’est convaincu que notre économie se porterait mieux si nous nous endettions sans limites.

Cette logique est aux finances publiques ce que la consommation débridée est à la préservation de la planète : de même qu’un modèle de consommation infinie dans un monde aux ressources finies est un contresens, un modèle d’endettement infini dans un pays à la démographie déclinante et à la croissance morose est tout simplement une absurdité.

« OK, boomer ! », diraient mes enfants. (M. le ministre sourit.) J’ai envie de dire plutôt : « KO, boomer ! » Il faut changer de logiciel ; il faut changer de culture ; il faut changer de méthode. La génération qui exigera de ses responsables politiques qu’ils votent des budgets à l’équilibre est-elle déjà née ? Je l’ignore, mais, en tout cas, je l’espère vivement. En attendant, si nous voulons redresser nos comptes, il est urgent de retrouver un horizon de projection souhaitable, en dehors du matraquage fiscal et de la dépense à gogo.

Deuxièmement, ce PLFG permet d’acter l’échec de nos prévisions macroéconomiques. Le déficit public, cela a été rappelé, a dérapé de plus de 1 point de PIB depuis l’adoption du projet de loi de finances initiale. À qui la faute ?

Le rapporteur général et le président de notre commission des finances ont conduit une mission d’information visant à identifier les failles dans la chaîne de responsabilité. Au-delà de la mise en cause de telle ou telle personne, j’espère surtout que ces travaux seront l’occasion de formuler des propositions systémiques permettant d’éviter que de telles erreurs ne se reproduisent.

À mon sens, c’est surtout l’inflation qui est en cause, elle qui nous fait perdre la raison et qui nourrit nos démons. Les prix augmentent ? Vite, dépensons plus pour protéger les particuliers et les entreprises, car, de toute façon, les recettes augmenteront à due concurrence et le déficit, rapporté à la richesse produite, n’explosera pas ! Encore raté… L’augmentation des recettes n’a pas suivi celle des dépenses et nous voilà renvoyés à notre incapacité à nous focaliser sur la réduction de notre déficit public !

Il faut dire que la responsabilité budgétaire n’a pas vraiment le vent en poupe – et j’en viens au troisième échec collectif que j’évoquais. Les démagogues, à l’extrême gauche comme à l’extrême droite, promettent tout à la fois de baisser les impôts, d’augmenter les dépenses et de réduire le déficit.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le bonheur…

Mme Vanina Paoli-Gagin. Ce sont eux qui ont rejeté, à l’Assemblée nationale, ce projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024. Ils excellent dans la critique, mais ne proposent rien pour améliorer la situation ; la tentation populiste n’a jamais été aussi forte dans notre pays.

Pour tenter d’apporter une solution structurelle à ce triple échec, je vous ai proposé, mes chers collègues, de changer de méthode en renforçant la programmation pluriannuelle. Cette option n’a pas prospéré, je le déplore. Peut-être n’était-elle pas la bonne ? En tout cas, je reste convaincue qu’il n’est pas possible de continuer ainsi très longtemps.

En attendant, le groupe Les Indépendants votera évidemment en faveur de ce budget de fin de gestion.

Tout d’abord, ce texte ouvre des crédits pour éteindre le feu social et économique qui a pris en Nouvelle-Calédonie et qui menace l’unité nationale.

Ensuite, il ouvre des crédits pour payer les primes promises aux agents qui ont assuré la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques. Lesdits agents ont contribué au rayonnement de la France dans le monde entier : nous le leur devons.

Enfin, ce budget ouvre des crédits pour nos forces armées. Celles-ci, il ne faut pas l’oublier, interviennent en appui de nos amis ukrainiens, lesquels doivent pouvoir compter sur notre soutien alors que la Russie rehausse l’intensité de ses frappes sur leur sol et menace la démocratie en Europe.

Voilà pour 2024 ! Nous avons vraiment hâte de tourner la page pour nous lancer, avec détermination et sans résignation, dans l’examen du projet de budget pour 2025. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. le rapporteur général applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Sautarel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Sautarel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024, qui a été rejeté par l’Assemblée nationale. Pourtant, comme cela a été rappelé, ce texte est nécessaire.

Même si je me réjouis de l’inflexion qu’il permet enfin, je serai un peu plus sévère que ce matin dans mes propos. Ce PLFG pour 2024 s’inscrit, en effet, entre testament et promesse.

Je commencerai mon propos en évoquant le testament.

C’est le testament d’une gouvernance passée, qui n’a su ni anticiper ses ressources ni freiner ses dépenses. Et le coût des frais de succession est particulièrement élevé pour le gouvernement actuel, mais surtout pour la Nation et les Français : une dégradation de 1,7 point du déficit public, soit un glissement de 50 milliards d’euros par rapport à la prévision initiale, et une impasse de 41 milliards d’euros sur les recettes publiques.

Je n’égrènerai pas ici, en particulier, la liste des recettes fiscales affichant une moins-value.

Si nous tenons une croissance de 1,1 %, inférieure aux prévisions de l’ancien gouvernement, mais conforme aux estimations des principaux instituts, c’est grâce à l’investissement public et au commerce extérieur, et non, comme à l’accoutumée, grâce au moteur de la consommation en berne.

On peut à ce titre regretter, et c’est un euphémisme, l’absence de collectif budgétaire au printemps. Elle marque une rupture démocratique que nul ne saurait accepter.

Face aux prévisions de recettes erronées, visiblement insincères, auxquelles s’ajoute une insuffisance de freinage de la dépense malgré quelques expédients de régulation budgétaire, nous devons agir en responsabilité, à la fois, en faisant face à l’urgence, mais aussi en nous inscrivant dans l’anticipation pour préparer les nécessaires réformes structurelles.

Soit Bercy a encore beaucoup plus de pouvoirs qu’on ne l’imagine, soit le politique a failli. Les deux hypothèses sont tout aussi inquiétantes l’une que l’autre. Quoi qu’il en soit, les gouvernements qui se sont succédé depuis 2022 ont mis en péril l’avenir de notre pays ; pis encore, ils ont peut-être provoqué la crise démocratique que nous connaissons.

La mission d’information sur la dégradation des finances publiques, conduite par notre commission des finances sous la houlette de son président, Claude Raynal, et du rapporteur général, Jean-François Husson, a présenté ses conclusions accablantes voilà quelques jours. Après avoir remercié nos collègues pour leurs travaux, je veux m’y arrêter un instant, tant l’irresponsabilité budgétaire dont ont fait preuve les gouvernements en place d’octobre 2023 à septembre 2024 est grave, et tant le Parlement a été ignoré au cours de toute cette période.

Il est désormais avéré que, dès décembre 2023, le gouvernement en place connaissait l’état critique des finances publiques. Il aurait donc dû réagir vigoureusement, et il ne l’a pas fait. Le fort risque de dégradation des recettes par rapport à la prévision était même identifié dès le 30 octobre 2023. Le double discours des ministres Bruno Le Maire et Thomas Cazenave est patent.

Au premier semestre de 2024, le Gouvernement et le Président de la République ont donc refusé de présenter un projet de loi de finances rectificative, pourtant seul à même de redresser la situation, d’après le ministre des finances lui-même. C’est une faute.

Au total, rappelons-le, le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 prévoit un écart en recettes par rapport aux prévisions du PLF pour 2024 de 41,5 milliards d’euros, dont 22,6 milliards d’euros proviennent d’un point de départ plus dégradé que prévu du fait des résultats de 2023.

Le Gouvernement a pris des demi-mesures, pas toujours assumées, et sans doute justifiées par des calculs politiques de courte vue.

Avec le pari de la dissolution, pour lequel l’Histoire sera sans doute cruelle, l’exécutif a laissé filer le déficit au-delà de 6 % en 2024 ; si rien n’était fait, il attendrait près de 7 % en tendance en 2025. C’est irresponsable, et pourtant c’est peut-être l’impossibilité de construire un budget pour 2025 qui a conduit à cette dissolution coupable.

Comment les anciens responsables peuvent-ils aujourd’hui vous mettre en cause, monsieur le ministre, vous et l’ensemble du Gouvernement ? C’est inique !

On sait que votre tâche est immense et que le budget pour 2025, dont nous avons commencé à débattre ce matin, s’apparente à un budget impossible. Il porte pourtant une promesse, que l’on pressent déjà dans ce PLFG.

J’en viens donc à la promesse.

C’est une promesse que nous n’avions pas connue depuis longtemps, la promesse d’un nouveau chemin, d’une sincérité budgétaire, d’un freinage de la dépense… Bien sûr, ce chemin sera long. La première marche proposée en 2025 est haute, mais nécessaire si nous voulons retrouver notre crédibilité sur la scène internationale et garantir notre souveraineté.

Ce PLFG est un premier marchepied, avec un niveau de dépenses de l’État inférieur à ceux qui figurent dans la loi de finances initiale et dans la loi de programmation des finances publiques. Pour preuve, et je ne vais pas non plus les égrener, les diminutions de crédits portent sur la majorité des missions du budget général, tout en permettant l’accomplissement des missions jusqu’à la fin de l’année.

Hors remboursements et dégrèvements, le montant des crédits annulés est supérieur de 1,9 milliard d’euros à celui des crédits ouverts. C’est la première fois depuis 2019 que le collectif budgétaire de fin d’année présente des économies par rapport à la loi de finances initiale.

Dix missions connaissent des ouvertures nettes et vingt-trois missions des annulations nettes en crédits de paiement.

Je m’arrête toutefois un instant sur la mission « Sécurités », qui bénéficie de la plus forte hausse de crédits – 824,4 millions d’euros –, et cela à raison : il s’agit de répondre à différents enjeux, dont, notamment, la situation en Nouvelle-Calédonie.

Néanmoins, laissez-moi m’étonner, pour ne pas dire plus, de l’incapacité de notre pays à honorer les loyers de nos gendarmeries auprès des bailleurs sociaux ou des communes. Heureusement, cela va être modifié – et cette mesure justifierait, à elle seule, le vote de ce PLFG. Mais, là aussi, quels errements dans la gestion ! Quelle insincérité ! La charge locative ancienne est une charge certaine. Un ménage, une entreprise, une collectivité qui ne l’intégrerait pas dans son budget serait sanctionné, rappelé à l’ordre. Mais l’État « d’un monde liquide » se l’était autorisé… Nous allons y remédier par notre vote, et je m’en réjouis.

Face à un déficit budgétaire abyssal et historique à la fin de 2024, dont les gouvernements précédents portent seuls la responsabilité, un déficit subi par le Parlement et les Français, qui présente aujourd’hui un véritable risque de crise démocratique et institutionnelle, la nécessité de mesures de redressement conjuguant courage, responsabilité, rigueur, mais aussi espoir est bien certaine.

Vous vous y engagez, monsieur le ministre, et nous voulons vous y aider, parce qu’il y va de l’intérêt général, de la place de la France et de l’avenir des Français. C’est la raison pour laquelle notre groupe adoptera ce PLFG amendé. Certes, ce n’est qu’un premier pas, mais il y a là, enfin, une première inflexion. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient.

M. Georges Patient. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen du présent projet de loi de fin de gestion nous permet de dresser un bilan presque complet de la situation budgétaire pour l’année 2024, qui touche à sa fin. Il nous impose également un exercice d’introspection.

Certains indicateurs traduisent une dynamique économique maîtrisée. La croissance économique, bien que modérée, demeure positive, avec une progression de 1,1 % du PIB. Le taux des prélèvements obligatoires diminue : 42,8 % en 2024 contre 43,2 % en 2023. L’inflation a été contenue à 2,1 %, contre 4,9 % en 2023. Les dépenses publiques s’établiront à un niveau inférieur de 6 milliards d’euros aux prévisions de la loi de finances initiale.

Toutefois, l’année 2024 marque également une dégradation préoccupante de notre déficit public.

Initialement estimé à 4,4 % du PIB, celui-ci devrait finalement atteindre un niveau de 6,1 % du PIB. Cette évolution n’est pas le résultat d’une dérive des dépenses, mais s’explique principalement par des recettes fiscales inférieures de 24,3 milliards d’euros par rapport aux prévisions.

Un rapport de l’inspection générale des finances (IGF), publié en juillet 2024, éclaire ces difficultés. Il souligne que l’année 2023 a été marquée par des dynamiques atypiques : l’élasticité des prélèvements obligatoires au PIB, qui mesure la croissance des prélèvements en rapport avec celle du PIB, a atteint une valeur de 0,42, bien inférieure à sa moyenne de longue période, proche de 1. Cette faiblesse, la deuxième de cette importance relevée depuis 1991, reflète les effets conjugués d’une inflation élevée liée à la crise énergétique de 2022 et du net ralentissement de la croissance de la masse salariale en fin d’année.

L’IGF souligne ainsi la difficulté à anticiper les évolutions atypiques.

Dans ce contexte, le groupe RDPI soutient pleinement les travaux menés par le Parlement et le Gouvernement pour améliorer la fiabilité des prévisions économiques et budgétaires. Nous saluons en particulier la mise en place, sous l’égide des ministres Antoine Armand et Laurent Saint-Martin, d’un comité scientifique indépendant destiné à renforcer le pilotage des prévisions économiques et à mieux informer le Parlement.

Bien que nous ne partagions pas toutes les conclusions de la mission d’information sur la dégradation des finances publiques, nous adhérons pleinement à son appel en faveur d’une meilleure association du Parlement, dans un esprit de transparence et de concertation, aux décisions relatives à la gestion des finances publiques. Nous pensons que la création de ce comité contribuera à éclairer nos débats.

Je tiens également à souligner que l’action des gouvernements successifs, cette année, illustre une volonté constante de responsabilité budgétaire.

Face à des prévisions macroéconomiques de plus en plus pessimistes, le gouvernement en place a agi tout au long de l’année 2024 pour compenser la moindre dynamique des recettes fiscales et limiter son impact sur le déficit. Ces efforts se sont traduits, d’une part, par un décret d’annulation de 10 milliards d’euros de crédits inscrits dans la loi de finances initiale pour 2024 et, d’autre part, par un gel supplémentaire de 16,5 milliards d’euros, visant à préserver des marges de manœuvre pour le gouvernement à venir.

Celui-ci – c’est-à-dire l’actuel gouvernement – a montré son sens de la responsabilité avec la présentation d’un projet de loi de finances pour 2025 affichant des économies estimées à 60 milliards d’euros, afin de ramener le déficit public à 5 %.

Enfin, ce projet de loi de fin de gestion ne se limite pas aux ajustements budgétaires nécessaires. Il engage également des moyens supplémentaires en faveur de secteurs essentiels tels que la sécurité, l’éducation et le soutien au rétablissement de la Nouvelle-Calédonie, avec des hausses respectives de 850 millions d’euros, 350 millions d’euros et 230 millions d’euros.

Parallèlement, des fermetures stratégiques de crédits seront opérées, dans un souci de redressement des finances publiques.

En somme, ce PLFG traduit la stratégie que nous devons poursuivre dans les années à venir : réduire le niveau de nos dépenses publiques de manière ciblée et concertée, afin de dégager des marges de manœuvre indispensables pour relever les défis du changement climatique, des aléas économiques et des enjeux de sécurité. Il nous invite également à rechercher des compromis et à œuvrer collectivement pour l’avenir de notre pays.

C’est pourquoi, mes chers collègues, nous voterons ce texte de responsabilité et de vérité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Raphaël Daubet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Raphaël Daubet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’aurais pu, ou dû, monter à la tribune pour dénoncer ce projet de loi de finances de fin de gestion. Car, comme je l’indiquais ce matin, il faut continuer à clarifier les responsabilités eu égard à la situation catastrophique dans laquelle nous nous trouvons, et il faudra surtout, un jour prochain, mettre fin aux dysfonctionnements de Bercy.

Mme Nathalie Goulet. Vaste programme !

M. Raphaël Daubet. Mais, aujourd’hui, nous avons un double devoir : il nous faut gérer l’urgence du présent, tout en posant les jalons d’une gestion plus rigoureuse de nos finances publiques.

À chaque seconde, 5 600 euros : c’est la vitesse à laquelle notre déficit public s’est aggravé en 2024. Pendant que je prononce cette phrase, notre dette vient de s’alourdir de plus de 50 000 euros. Si encore ce creusement de la dette avait servi à l’investissement public et aux investissements d’avenir… Mais non ! Cet argent, malheureusement, est pour une grande part dilapidé dans le fonctionnement de l’État.

Derrière ces chiffres vertigineux se cache une réalité préoccupante : nos méthodes de prévision budgétaire sont défaillantes. Comment expliquer un manque de 20 milliards d’euros de recettes qui n’avait pas été anticipé ?

Monsieur le ministre, nous disposons d’une richesse inexploitée : les déclarations détaillées de nos entreprises sont une mine d’informations précieuses, que nous délaissons au profit de données macroéconomiques approximatives. Cette situation d’incertitude n’est plus tenable pour la deuxième économie de la zone euro. Face à des défis budgétaires majeurs, nous devons nous tourner vers l’intelligence collective de nos territoires et y prendre directement la température.

En attendant, rien ne peut justifier l’inaction face aux défis immédiats qui nous attendent. C’est là tout le paradoxe de notre situation : rejeter ce projet de loi de finances de fin de gestion pourrait apparaître comme irresponsable, mais l’adopter avaliserait des méthodes que nous nous refusons à cautionner. C’est là le dilemme !

Il nous faut regarder au-delà des chiffres et des défaillances techniques pour voir l’essentiel : certaines ouvertures de crédits sont tout simplement vitales et ne peuvent souffrir aucun délai.

Je pense d’abord à notre soutien à l’Ukraine, qui ne se résume pas seulement à un engagement financier, mais symbolise notre attachement aux valeurs démocratiques. C’est le premier acte de résistance que nous devons opposer aux ennemis de l’Europe.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Raphaël Daubet. Je pense ensuite au soutien indispensable à la Nouvelle-Calédonie. Nous ne pouvons laisser ce territoire dans la situation dramatique qui est la sienne aujourd’hui.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Raphaël Daubet. Ne ternissons pas non plus la réussite des jeux Olympiques et Paralympiques, qui ont ébloui le monde par leur magie. Notre pays a démontré sa capacité à organiser un événement exceptionnel ; il doit maintenant mobiliser les moyens nécessaires pour boucler sereinement ce chapitre historique. (M. Vincent Delahaye sexclame.)

Enfin, je citerai l’hébergement d’urgence pour nos concitoyens les plus fragiles, alors que l’hiver approche et que la précarité ne cesse de progresser.

Ces engagements ne sont pas de simples lignes budgétaires. Ils incarnent notre pacte social, notre solidarité nationale et internationale. Derrière chaque euro de crédit se cache une réalité humaine.

Reporter ces décisions au nom de la rigueur budgétaire serait non seulement une erreur politique, mais sûrement une faute morale. Car, si nous devons être intransigeants sur la gestion de nos finances publiques, nous ne pouvons l’être au détriment de nos valeurs fondamentales et de nos engagements les plus essentiels.

C’est pourquoi, malgré nos inquiétudes légitimes sur notre endettement, malgré l’incurie de la gestion passée de nos finances publiques – vous n’y êtes pour rien, monsieur le ministre –, nous ne voulons pas nous opposer frontalement à l’adoption de ce texte. Mais cela ne signifie pas que nous cautionnons la gestion de vos prédécesseurs et les méthodes employées pour cacher l’ampleur réelle du déficit.

Nous ne pouvons plus nous permettre cette navigation à vue, qui érode la confiance de nos concitoyens dans nos institutions.

La confiance se mérite ; elle se construit sur la transparence de nos comptes publics et la fiabilité de nos prévisions. Il est temps de donner des gages concrets aux parlementaires et aux Français. Notre démocratie et notre cohésion sociale en dépendent. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Vincent Delahaye. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est en effet la deuxième fois que nous examinons un projet de loi de finances de fin de gestion. Alors qui doit-on juger ? Le précédent gouvernement ? L’actuel ? C’est une question que l’on se pose au moment d’examiner ce texte…

Celui-ci affiche un dérapage sans précédent du déficit, qui augmente de 17 milliards d’euros pour atteindre 163 milliards d’euros, soit 33 % du total des dépenses – lequel se monte à 486 milliards d’euros. Et ce dérapage provient principalement, non pas des dépenses, mais des recettes, avec deux éléments particuliers.

Le premier a trait à la prévision de croissance. Celle-ci avait été fixée à 1,4 % dans le projet de loi de finances, et nous avions été un certain nombre, à l’époque, à dénoncer un taux trop optimiste. Il est aujourd’hui rétabli à 1,1 %.

Le second a trait à des prévisions de recettes fiscales totalement fausses. Leur montant est inférieur de 24 milliards d’euros aux prévisions.

Comme l’expliquer ? Qui est responsable ? Si l’on écoute vos prédécesseurs, monsieur le ministre, ce ne sont pas eux ! Ils invoquent les modèles, ou encore le groupe de fonctionnaires experts qui déterminent les éléments macroéconomiques utilisés dans ces modèles. Celui qui vous a précédé dans vos fonctions – je ne sais pas si c’est votre cas aussi ; cela m’étonnerait, car vous êtes quelqu’un de sérieux – nous a affirmé que le ministre ne validait pas les prévisions de recettes. C’est incompréhensible ! Le ministre n’est pas seulement là pour dépenser ; il doit aussi s’assurer que l’on dispose de l’argent nécessaire !

Nous avons par exemple perdu 14 milliards d’euros sur l’impôt sur les sociétés. Or, voilà quelques années, on a eu une idée : on a décidé d’un système de solde et d’acomptes anticipant sur l’année d’après, ce qui était adapté à un contexte de résultats croissants, mais a cessé de fonctionner quand les résultats ont baissé. C’est visiblement l’un des facteurs qui a joué cette année, puisque le quatrième acompte de l’impôt sur les sociétés est inférieur à ce qui était anticipé.

Il manque par ailleurs 4 milliards d’euros sur la TVA. Voilà plusieurs années que je demande l’instauration d’une mission au sein de la commission des finances pour examiner les principaux facteurs déterminant les recettes de TVA. Avant, les nouvelles étant bonnes, on s’en fichait un peu ; depuis qu’elles sont mauvaises, on s’interroge. Convenons néanmoins que la croissance, dont le taux est désormais établi à 1,1 %, est tirée principalement par la dépense des administrations publiques. Pensez-vous que cela va accroître les recettes de TVA ? Non !

Il est donc urgent, je le dis, de fiabiliser nos prévisions de recettes et j’espère, monsieur le ministre, que conformément à vos engagements et à celui du ministre de l’économie, nous recevrons prochainement une documentation beaucoup plus importante sur l’évaluation des recettes. Je crains en effet que nous ne rencontrions les mêmes problèmes l’an prochain, le PLF pour 2025 me semblant de nouveau présenter des prévisions de recettes trop optimistes.

N’ayant que quatre minutes de temps de parole, je ne pourrai pas aborder tous les points sur lesquels je voulais insister. J’indiquerai simplement pourquoi je vais voter contre ce texte. N’y voyez rien contre vous, monsieur le ministre, ni contre le gouvernement actuel. Il se trouve que je n’ai pas voté la loi de finances initiale, car je considérais que la situation était trop dégradée par rapport à ce qui nous était présenté et que les prévisions de recettes étaient trop optimistes. Le présent PLFG confirme cet optimisme excessif et reflète une situation encore plus dégradée ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Olivier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Olivier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet exercice 2024 a été, à bien des égards, celui de tous les records.

Jamais sous la Ve République, hors période de crise, l’écart entre le solde public prévu en loi de finances et le solde constaté en exécution n’a été aussi élevé. Il atteint 1,7 point de PIB, soit une dégradation de près de 50 milliards d’euros.

Jamais les recettes fiscales de l’État, hors période de crise, n’ont été autant sous-estimées, à hauteur de 25 milliards d’euros.

Jamais, face à une situation aussi critique, les responsabilités de ce dérapage n’ont été aussi peu assumées par les gouvernements qui en sont à l’origine, comme vient de le montrer la mission d’information menée par le président Claude Raynal et le rapporteur général Jean-François Husson.

L’année 2024 s’achève donc avec un déficit public de 6,1 % du PIB, plaçant la France dans une situation de grave défaut au regard tant de ses engagements européens que de ses engagements pluriannuels.

À ces dérapages budgétaires s’ajoute un problème politique, puisque les mouvements de régulation budgétaire sont intervenus par voie réglementaire. Certes, la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf) le permet, mais à aucun moment le Parlement n’a été clairement informé ni amené à se prononcer.

Aujourd’hui, il n’est question ni de cautionner ce dérapage – nous ne le pourrions pas – ni de sanctionner les errements du passé – la mission d’information que j’évoquais a permis, sinon d’apporter des éléments de réponse, au moins de montrer qu’il eût été nécessaire de voter une loi de finances rectificative et que le texte examiné aujourd’hui ne pouvait que partiellement résoudre le problème.

Ce texte pare au plus pressé. Il apparaît d’abord comme une nécessité, en raison des crédits qu’il permet d’ouvrir. Ces 4,2 milliards d’euros de crédits supplémentaires permettront de financer des mesures de soutien aux entreprises, aux forces de l’ordre, d’assurer le financement de nos armées ou encore de payer les suppléments de salaire de la fonction publique, notamment les primes liées aux jeux Olympiques et Paralympiques. Je profite de ce dernier point pour saluer la formidable réussite de cet événement historique, grâce à la mobilisation des moyens de l’État.

Mais, et c’est là l’essentiel du présent PLFG, des efforts budgétaires importants sont réalisés. Les ouvertures de crédits sont en effet plus que compensées par l’annulation de 5,6 milliards d’euros de dépenses de l’État. En accord avec les ministères concernés, le Gouvernement a dégagé des économies sur l’aide publique au développement, la recherche et l’enseignement supérieur ou encore les engagements financiers de l’État. Ces annulations de crédits s’additionnent aux 5,8 milliards d’euros de moindres dépenses du budget général, permises par les 10 milliards d’euros de crédits annulés par le précédent gouvernement en février, une mesure de bon sens que nous saluons.

Ainsi, le projet de loi de finances de fin de gestion qui nous est présenté permet 7,4 milliards d’euros de moindres dépenses du budget général par rapport à ce qui était prévu en loi de finances initiale. C’est un fait particulièrement notable, qui rompt avec les pratiques habituelles : depuis 2014, c’est seulement le troisième projet de loi de finances de fin d’exercice qui procède à des annulations nettes de crédits. Le texte permet ainsi de stabiliser la dégradation des finances publiques, évitant que notre déficit ne s’envole à 6,2 % du PIB en 2024.

Au vu de la situation budgétaire désastreuse qui s’impose à lui, le gouvernement de Michel Barnier a donc fait le choix, dans l’urgence, de prendre ses responsabilités. C’est la première pierre sur le chemin du redressement des comptes publics, que concrétisera le PLF pour 2025.

Voilà pourquoi, à l’heure où il nous faut faire des choix décisifs pour la souveraineté et la viabilité budgétaire de notre pays, le groupe Les Républicains votera ce projet de loi de finances de fin de gestion, étape nécessaire au redressement des finances de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Je vous informe, mes chers collègues, que le Gouvernement devrait déposer un amendement à l’article d’équilibre – cet amendement ne nous est pas encore parvenu, mais cela ne devrait pas tarder. Je réunirai donc la commission des finances pour quelques instants afin qu’elle puisse l’examiner et rendre son avis.

Mme la présidente. Nous passons à la discussion des articles.

projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 1er

Article liminaire

Les prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, les prévisions de solde par sous-secteur, la prévision, déclinée par sous-secteur d’administration publique, de l’objectif d’évolution en volume et la prévision en milliards d’euros courants des dépenses d’administrations publiques, les prévisions de prélèvements obligatoires, de dépenses et d’endettement de l’ensemble des administrations pour l’année 2024, les prévisions pour 2024 de ces mêmes agrégats de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, ainsi que les données d’exécution pour l’année 2023 s’établissent comme suit :

 

(En points de produit intérieur brut, sauf mention contraire)

2023

2024

2024

Projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024

LPFP 2023-2027*

Ensemble des administrations publiques

Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel)

-5,1

-5,7

-3,7

Solde conjoncturel (2)

-0,3

-0,4

-0,6

Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel)

-0,1

-0,1

-0,1

Solde effectif (1 + 2 + 3)

-5,5

-6,1

-4,4

Dette au sens de Maastricht

109,9

112,8

109,7

Taux de prélèvements obligatoires (y compris Union européenne, nets des crédits d’impôts)

43,2

42,8

44,1

Dépense publique (hors crédits d’impôts)

56,4

56,8

55,3

Dépense publique (hors crédits d’impôts, en milliard d’euros)

1591

1657

1622

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (en %) (1)

-1,0

2,1

0,5

Principales dépenses d’investissement (en milliards d’euros) (2)

25

30

30

Administrations publiques centrales

Solde

-5,5

-5,4

-4,7

Dépense publique (hors crédits d’impôts, en milliards d’euros)

646

654

639

Évolution de la dépense publique en volume (en %) (3)

-3,9

-0,7

-1,4

Administrations publiques locales

Solde

-0,4

-0,7

-0,3

Dépense publique (hors crédits d’impôts, en milliards d’euros)

316

336

322

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (en %) (3)

2,4

4,8

0,9

Administrations de sécurité sociale

Solde

0,4

0,0

0,6

Dépense publique (hors crédits d’impôts, en milliards d’euros)

738

776

761

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (en %) (3)

-0,1

3,2

1,7

Les chiffres en comptabilité nationale relatifs au projet de loi de fin de gestion pour 2024 se réfèrent, pour 2023, au compte publié par lInsee en comptabilité nationale en base 2020, et pour 2024, aux prévisions du Gouvernement dans la même base. Les prévisions relatives à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 en comptabilité nationale, antérieures au changement de base des comptes nationaux français, étaient relatives à la base antérieure des comptes nationaux, la base 2014.

* Loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

(1) À champ constant.

(2) Au sens de la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027.

(3) À champ constant, hors transferts entre administrations publiques.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, sur l’article.

M. Vincent Delahaye. Je me permets de reprendre la parole, n’ayant pas eu le temps de m’exprimer complètement à la tribune.

Je mentionnerai notamment un point sur lequel nous n’avons pas du tout insisté au cours de la discussion sur ce projet de loi de finances de fin de gestion : il s’agit des reports de dépenses d’une année sur l’autre. Il faudrait tout de même que l’on y prête attention, car 18 milliards d’euros de dépenses de 2023 ont été reportés sur 2024 – habituellement, les reports de dépenses avoisinent plutôt 3 à 4 milliards d’euros – et l’on s’apprête à reporter 13 milliards d’euros de dépenses de 2024 sur 2025. C’est autant de dépenses en moins pour l’exercice qui débute.

Même s’il y a une amélioration, puisque le report s’élevait auparavant à 18 milliards d’euros, je pense qu’il faut avoir cela en tête.

Ce phénomène de report des dépenses d’un exercice sur l’autre, qui n’est pas très caractéristique d’une bonne gestion, joue dans la dégradation des comptes publics.

Mes chers collègues, ce doit être un sujet d’attention pour nous tous, y compris pour le Gouvernement, bien entendu.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article liminaire.

(Larticle liminaire est adopté.)

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Article liminaire
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 2

Article 1er

L’article 156 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 est ainsi modifié :

I. – Le tableau constituant le deuxième alinéa est ainsi modifié :

1° À la troisième ligne, le nombre : « 2 044 150 000 » est remplacé par le nombre : « 1 650 811 986 » ;

2° À l’avant-dernière ligne, le nombre : « 136 500 000 » est remplacé par le nombre : « 145 600 000 ».

II. – Le tableau constituant le quatrième alinéa est ainsi modifié :

1° À la deuxième ligne, le nombre : « 2 044 150 000 » est remplacé par le nombre : « 1 650 811 986 » ;

2° À la dernière ligne, le nombre : « 136 500 000 » est remplacé par le nombre : « 145 600 000 ».

Mme la présidente. L’amendement n° 11, présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 6

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Ghislaine Senée.

Mme Ghislaine Senée. La baisse des taxes affectées à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), qui va priver le plan Vélo de 250 millions d’euros pour l’année en cours, est un mauvais arbitrage budgétaire.

Nous avons besoin de décarboner le secteur des mobilités, responsable de 29 % des émissions de gaz à effet de serre de notre pays. Ce n’est donc pas sur le développement des modes actifs de déplacement qu’il faut taper ; c’est sur ce qui va nous empêcher d’atteindre nos objectifs inscrits dans la stratégie nationale bas-carbone, notamment pour le secteur routier.

Nous rejetons d’autant plus ces coupes qu’elles auront, une fois encore, un impact direct sur les collectivités. Rappelons que 400 projets d’aménagements cyclables sécurisés avaient été déposés par plus de 300 collectivités territoriales à la suite d’appels à projets gouvernementaux.

À l’Assemblée nationale, les débats ont porté sur le supposé accord donné par le président de l’Afit France à l’amputation de son budget. Suivant un conseil du Gouvernement, ce dernier aurait anticipé, gelant des crédits qu’il pressentait ne pas avoir in fine.

Ce n’est pas acceptable ! Les effets des dérèglements climatiques touchent notre pays de manière de plus en plus visible et concrète pour toutes et tous. Il y a urgence à changer de braquet.

Nous proposons la suppression des alinéas 3 à 6 afin de garder un semblant de cohérence avec notre stratégie globale face à l’urgence climatique. Ne prenons pas aujourd’hui des mesures que nous regretterons demain !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Convenons que les recettes de l’Afit France ont fortement augmenté en 2024. D’ailleurs, l’Afit France a reçu 188 millions d’euros d’arriérés des sociétés d’autoroute.

Par ailleurs, en 2024, ses dépenses ont baissé de 200 millions d’euros par rapport au budget d’origine. Toutefois, ses recettes totales resteront supérieures de 850 millions d’euros par rapport à 2023.

Si l’on regarde l’évolution sur dix ans – je vous invite, mes chers collègues, à lire le rapport –, on voit même que les recettes sont deux fois supérieures à leur niveau de 2019.

Il faut reconnaître que les moments difficiles sont difficiles en termes de gestion des finances publiques. Oui, il faut faire des efforts et des progrès. Cependant, il faut aussi convenir que ces efforts doivent être faits à tous les niveaux ! À cet égard, les crédits de l’Afit France ont connu une progression très importante. Ce n’est pas comme si elle avait été négligée !

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Les lois de fin de gestion ne font que matérialiser dans la loi des économies qui ont été réalisées en gestion – on trouvait la même disposition dans les PLFR. Ce n’est donc pas à proprement parler une baisse d’ambition. (M. Thomas Dossus marque son scepticisme.)

C’est précisément ce qui se passe avec les crédits de l’Afit France.

Par ailleurs, vous évoquez un quasi-abandon du plan Vélo, à hauteur de 250 millions d’euros. Ce n’est pas la réalité : des crédits de l’Afit France sont toujours destinés au plan Vélo ! L’ambition est maintenue, comme nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’examen du PLF pour 2025.

Je souscris à ce qu’a dit M. le rapporteur général : ce qu’il faut voir, c’est la tendance à l’augmentation des crédits. À cet égard, malgré le plafond, le financement de l’Afit France reste supérieur en 2024 à ce qu’il était en 2023.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée, pour explication de vote.

Mme Ghislaine Senée. Encore heureux que le budget soit supérieur à ce qu’il était ! Je rappelle que nous avons des objectifs de décarbonation des mobilités. Si vous nous annonciez une diminution du budget pour l’Afit France, monsieur le ministre, nous serions très inquiets… Mais reconnaissez tout de même qu’il y a définitivement un manque d’ambition !

Surtout, c’est un mauvais message que l’on envoie. Nous en débattrons dans le cadre du PLF, mais nous savons que le plan Vélo va subir une forte réduction de ses moyens, et nous savons à quel point les collectivités territoriales, si elles n’arrivent pas à obtenir ces subventions, seront, là encore, obligées de ponctionner leur budget d’investissement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 11.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
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Après l’article 2

Article 2

Au 2° du 1 du VI de l’article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, le montant : « 4 026 728 396 » est remplacé par le montant : « 3 976 056 557 ».

Mme la présidente. L’amendement n° 12, présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à maintenir la dotation de 50 millions d’euros que le Gouvernement souhaite retirer à l’audiovisuel public.

Nous pensons que ces économies – cette « prise d’acte de gestion », comme dit M. le ministre – interviennent au pire moment.

L’audiovisuel public, dont nous avons réussi à stabiliser le financement, même si c’est avec un texte qui nous semblait bancal au moment où nous l’avons voté, doit être soutenu.

Je pense que le signal à envoyer doit plutôt être la protection de l’audiovisuel public dans le contexte actuel de multiplication de fausses nouvelles et alors que nous avons besoin de journalistes compétents.

Nous pensons donc que ce n’est pas le moment de raboter !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’ai eu l’occasion d’évoquer, dans le débat que nous avons eu ce matin, les travaux de la mission d’information sur la dégradation des finances publiques.

Chacun doit convenir que les efforts doivent être partagés, collectifs.

Sur l’initiative de plusieurs groupes et avec le soutien de l’ensemble de notre assemblée, nous avons plutôt garanti l’avenir de l’audiovisuel public, selon des modalités qui, au départ, ne faisaient pas consensus dans cet hémicycle.

Pour ma part, je crois qu’il y a de bons journalistes partout. Je ne suis pas sûr que ce soit l’exclusivité de l’audiovisuel public. Restons objectifs !

La commission émet évidemment un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. La baisse de ces crédits concerne le plan de transformation. Or vous savez, si vous avez suivi le calendrier de cette année 2024, que les projets de réforme de la gouvernance notamment ont amené les crédits de ce plan à la baisse. Il n’y a donc, là aussi, ni plus ni moins qu’une matérialisation de la réalité de la gestion.

Par ailleurs, j’ai signé aujourd’hui même la modification de la loi organique relative aux lois de finances concernant le financement de l’audiovisuel public. Ce texte est important pour assurer la pérennité d’une forme d’indépendance, même si l’indépendance du financement demeure évidemment à la main du Parlement. Il est extrêmement important que cela reste ainsi.

La modification de la loi organique que vous avez voulue sera évidemment traduite dans les faits.

En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.

Mme Isabelle Briquet. Cet amendement est l’occasion de nous pencher une nouvelle fois sur le financement de l’audiovisuel public.

J’ai entendu la position de M. le ministre sur le sujet, mais on voit bien que la variabilité des recettes de TVA est une source de fragilité pour le financement de l’audiovisuel public.

Je souhaite alerter encore une fois mes collègues sur la nécessité de trouver un mécanisme beaucoup plus stable et pérenne pour notre audiovisuel public : ce serait assurer une pluralité et garantir la qualité de ce qui est communiqué par les médias.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 12.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 3

Après l’article 2

Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Uzenat et Cozic, Mme Briquet, MM. Kanner et Raynal, Mme Blatrix Contat, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 137 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le montant : « 45 057 825 520 € » est remplacé par le montant : « 45 071 825 520 € » ;

2° Le tableau du second alinéa est ainsi modifié :

a) Avant la dernière ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :

« 

Prélèvement sur les recettes de lÉtat destiné à compenser le financement par les régions de lextension du « Ségur » dans le secteur sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif pour lannée 2024

14 000 000

 » ;

b) À la dernière ligne de la seconde colonne, le montant : « 45 057 825 520 € » est remplacé par le montant : « 45 071 825 520 € ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Simon Uzenat.

M. Simon Uzenat. Cet amendement vise à compenser l’extension de la prime Ségur aux organismes de formation en travail social.

Monsieur le ministre, le 25 juin dernier, un accord a été agréé par le Gouvernement afin d’étendre cette prime à l’ensemble des professionnels non concernés dans le secteur sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif, dont les organismes de formation en travail social.

Cette mesure, par ailleurs rétroactive à compter du 1er janvier 2024, n’a pas fait l’objet d’une concertation avec les régions et n’est pour le moment pas compensée par l’État. Vous conviendrez aisément que la mise en œuvre, en cours d’année budgétaire, de dispositions décidées sans concertation préalable – j’insiste sur ce point – place les collectivités, régionales ou autres, dans une impasse financière, dès lors qu’elles ont, pour une bonne part d’entre elles, voté leur budget 2024 en décembre 2023 !

Si la mesure représente une avancée sociale importante pour le secteur, qui connaît une crise d’attractivité préoccupante – nous en sommes tous d’accord –, elle ne peut être imposée sans une discussion préalable avec les collectivités, dont la situation budgétaire est particulièrement fragilisée. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans le cadre de l’examen du PLF.

Le présent amendement vise à demander à l’État une compensation afin de permettre aux régions de mettre en œuvre cette extension du Ségur, à hauteur de son coût annuel, estimé à 14 millions d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je rappelle qu’un arrêté ministériel paru cet été a défini les conditions pour qu’un certain nombre de personnes qui échappaient au Ségur puissent en bénéficier – plus de 110 000 personnes étaient concernées.

Mes chers collègues, je nous invite à être attentifs au dispositif que nous allons être amenés à voter pour 2025 : si vous votez les moyens que nous vous proposerons par voie d’amendements, ce que je crois, les départements se retrouveront globalement, en 2025, dans une situation plus favorable que celle que permettrait l’adoption de la présente mesure – le différentiel est de 14 millions d’euros, que vous réclamez au titre du prélèvement sur recettes (PSR).

Par conséquent, je sollicite le retrait de votre amendement, au bénéfice du dispositif que nous adopterons, je pense, dans le cadre du PLF.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je sollicite également le retrait de cet amendement, car le véhicule n’est pas le bon : le sujet relève non pas d’un PLFG, mais d’un PLF.

Nous aurons l’occasion d’en discuter lors des prochains jours, dans le cadre de l’examen du PLF pour 2025.

Mme la présidente. Monsieur Uzenat, l’amendement n° 2 rectifié est-il maintenu ?

M. Simon Uzenat. Oui, madame la présidente.

Qu’il n’y ait pas de méprise, monsieur le rapporteur général : nous parlons bien là des régions ! S’il y a évidemment aussi un sujet pour les départements, ce sont les régions qui sont concernées ici. S’il est vrai que leurs difficultés sont moins identifiées, moins connues, il n’empêche que c’est une réalité.

J’entends bien vos propositions, mais nous préférons que les choses soient actées, raison pour laquelle je maintiens l’amendement.

En l’occurrence, monsieur le ministre, nous parlons bien de l’année 2024. Il est évidemment important de poursuivre cet engagement ou, en tout cas, de le mettre en œuvre en 2025, mais nous souhaiterions que ce soit effectif dès 2024.

J’insiste sur le lien de cette mesure avec la libre administration des collectivités et leur autonomie financière : leur demander de mettre en œuvre une décision à 14 millions d’euros, décidée par l’État, mais non financée par lui, revient à leur demander de changer leurs choix politiques et leurs arbitrages budgétaires !

Les régions sont trop souvent laissées pour compte. Je ne reviendrai pas sur ce que l’État n’a pas fait pour elles ces dernières années, notamment au moment de la crise inflationniste.

Nous maintenons donc cet amendement. Nous espérons que les membres de la majorité sénatoriale entendront raison sur ce sujet important pour la formation, notamment sanitaire et sociale.

Pour terminer, je veux dire, en ce 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, que nous avons, comme vous je suppose, reçu nombre de messages d’alerte des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF), qui, eux aussi, subissent très directement la mise en œuvre de cette extension de la prime Ségur, laquelle menace de fermeture nombre d’entre eux. Nous ne pouvons évidemment nous y résoudre.

Je sais bien que je m’éloigne de l’objet de l’amendement, monsieur le ministre, mais je lance cet appel, en espérant que vous saurez y répondre, parce que nous avons plus que jamais besoin de ces structures pour accompagner les femmes qui subissent des violences.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 5 rectifié, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, MM. Karoutchi, Somon, Lefèvre, Pellevat et Klinger, Mme Lassarade, M. Bruyen, Mme Dumont, M. Pointereau, Mme V. Boyer, MM. Allizard, Mandelli et Anglars, Mme Borchio Fontimp, MM. J.B. Blanc et Belin, Mmes Bellurot et M. Mercier et MM. Bouchet et Dumoulin, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au titre de l’année 2024, il est institué un prélèvement sur les recettes de l’État visant à compenser, pour les départements, la ville de Paris, le département de Mayotte, la métropole de Lyon, la collectivité territoriale de Guyane et la collectivité territoriale de Martinique, les dépenses au titre de la mise en œuvre de l’arrêté du 25 juin 2024 relatif à l’agrément de certains accords de travail applicables dans les établissements et services du secteur social et médico-social privé à but non lucratif.

Le montant de cette dotation est fixé à 170 millions d’euros.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Il est question ici non plus de 14 millions d’euros, mais de 170 millions ! En effet, cet amendement vise non plus les régions, mais les départements, collectivités qui sont le plus en difficulté cette année – ils le seront encore davantage l’année prochaine.

En effet, comme cela a été rappelé, l’extension du « Ségur 2 » a eu lieu en milieu d’année 2024, avec effet rétroactif au 1er janvier, alors que tous les budgets des départements étaient votés.

Christine Lavarde a évoqué, ce matin, la nécessité de respecter les règles quand on joue en société, mais aussi dans les rapports de l’État avec ses opérateurs.

Nous parlons là d’une dépense supplémentaire qui a été imposée sans aucune concertation, alors même qu’elle était prévue dans les textes, et qui coûte 170 millions d’euros à des départements déjà en difficulté.

Mes chers collègues, je vous propose, par cet amendement de crédits, de compenser cette différence, de telle sorte que les départements ne se trouvent pas déséquilibrés dans leur exercice budgétaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’ai émis mon avis par anticipation en m’exprimant sur l’amendement précédent, qui concernait les régions.

Je vous épargnerai donc le plaisir de m’écouter longuement une seconde fois sur le sujet, mes chers collègues. Je sollicite le retrait de l’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je veux rappeler le niveau des appuis aux départements qui ont déjà été actés en 2024 : abondement exceptionnel du fonds de sauvegarde de 100 millions d’euros ; renforcement significatif du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), à hauteur de 150 millions d’euros supplémentaires ; prise en charge renforcée des mineurs non accompagnés (MNA), à hauteur de 100 millions d’euros.

Je vous accorde qu’il s’agit d’autres sujets, mais je veux vous démontrer que le soutien aux départements, au cours de l’année 2024, n’a pas été nul.

Je rappelle une nouvelle fois que les mesures d’ordre général du PLFG n’ont pas pour objet de définir des mesures de soutien et de compensation de l’État aux collectivités territoriales pour des dépenses de ce type. Je le répète : débattons-en sur le PLF 2025 !

Je sollicite moi aussi le retrait de l’amendement.

Mme la présidente. Monsieur Bazin, l’amendement n° 5 rectifié est-il maintenu ?

M. Arnaud Bazin. Bien sûr que nous en débattrons pour 2025 ! Cependant, je ne peux entendre que l’on renvoie à 2025 la compensation d’une dépense qui a été décidée pour 2024 et qui va peser en année pleine pour les départements. Cela n’a guère de sens.

Je voulais dénoncer ici les décisions de ce type, malheureusement habituelles de la part de l’État irresponsable, qui consistent à décréter des dépenses pour, dans le meilleur des cas, les financer avec de la dette pour ses opérateurs et, dans le pire des cas, comme ici, à ne pas les financer du tout, ce qui est absolument insupportable pour les collectivités.

Cela dit, j’ai entendu l’appel exprès de M. le rapporteur général, et je veux bien retirer l’amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 5 rectifié est retiré.

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 6 rectifié est présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, MM. Karoutchi, Somon, Lefèvre, Pellevat et Klinger, Mme Lassarade, M. Bruyen, Mme Dumont, M. Pointereau, Mme V. Boyer, MM. Allizard, Mandelli et Anglars, Mme Borchio Fontimp, MM. J.B. Blanc et Belin, Mmes Bellurot et M. Mercier et MM. Bouchet, Dumoulin et Sido.

L’amendement n° 8 est présenté par MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat et Briquet, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 14 est présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 137 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le montant : « 45 057 825 520 € » est remplacé par le montant : « 45 227 825 520 € » ;

2° Le tableau du second alinéa est ainsi modifié :

a) Avant la dernière ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :

« 

Prélèvement sur les recettes de l’État destiné à compenser le financement par les départements de l’extension du « Ségur » dans le secteur sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif pour l’année 2024

170 000 000

 »

b) À la dernière ligne de la seconde colonne, le montant : « 45 057 825 520 € » est remplacé par le montant : « 45 227 825 520 € ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Arnaud Bazin, pour présenter l’amendement n° 6 rectifié.

M. Arnaud Bazin. Je le retire, madame la présidente.

C’était un amendement de coordination avec le précédent.

Mme la présidente. L’amendement n° 6 rectifié est retiré.

La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 8.

Mme Isabelle Briquet. Cet amendement se justifie par les raisons déjà évoquées.

Le projet de loi de finances de fin de gestion concerne l’année 2024. Or la décision de mise en œuvre du Ségur qui a été prise a un effet rétroactif pour les départements à compter du 1er janvier de l’année en cours.

Compte tenu de la situation des départements, dont nous aurons l’occasion de parler plus avant dans le PLF pour 2025, j’estime qu’il aurait été de bon ton d’accorder de la considération à la mesure que nous demandons, d’autant qu’elle est réclamée depuis différentes travées de cet hémicycle.

Je prends note du retrait de l’amendement de mon collègue. Pour notre part, nous maintenons cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour présenter l’amendement n° 14.

M. Grégory Blanc. C’est un appel à l’aide de l’ensemble des départements de ce pays que nous relayons.

J’ai entendu vos propos, monsieur le ministre. Il y a un an, effectivement, on nous expliquait ici même qu’un certain nombre de dispositifs allaient permettre aux départements d’aller un peu mieux.

Or, tout au long de l’année 2024, nous avons assisté, d’une part, à la poursuite de la baisse des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et à des décalages de prévision – c’est le moins que l’on puisse dire – de Bercy concernant la TVA, avec des transferts aux départements de fractions de TVA plus faibles qu’annoncé – pour chaque département, il y va de plusieurs millions d’euros de décalage.

Et, parallèlement, nous avons assisté à des hausses de charges, comme, en l’espèce, sur le transfert de la prime Ségur – nous parlerons tout à l’heure du RSA.

La réalité est simple : la décentralisation consiste, bien évidemment, en des transferts de compétences, mais aussi en des transferts de recettes. Or, là, il n’y en a pas eu ! Au final, il y a même moins de recettes sur l’année 2024 que ce qui a été initialement annoncé.

Si l’on veut que le système fonctionne, il faut de la confiance entre l’État et les départements. Il faut rétablir de la confiance. Or, sur la prime Ségur, il n’y a eu aucune coordination, aucune consultation, aucun échange avec les départements de ce pays.

Cette situation est lourde de problèmes pour 2025, les départements ayant eu encore plus la tête sous l’eau en 2024 qu’auparavant. Ils abordent donc le PLF en sachant que les dispositifs annoncés dans celui-ci sont d’ores et déjà insuffisants.

Il y a ceux qui, parce qu’ils serrent les rangs, ont peut-être raison aujourd’hui politiquement – ce sera le choix de la majorité. Et il y a ceux qui auront raison dans six ou dans huit mois.

J’espère que tous ceux qui fixent l’horizon en rappelant l’urgence pour les départements de ce pays se retrouveront pour voter cet amendement !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je sollicite le retrait des amendements nos 8 et 14, qui étaient des amendements de coordination par rapport à l’amendement précédent.

Je sollicite également le retrait des amendements nos 9 et 13, qui, eux aussi, relèvent davantage du PLF que de ce PLF de fin de gestion.

Cela dit, il y a un sujet. Le Sénat a déjà alerté sur la situation tendue des finances des départements l’an passé ; nous avions alors été partiellement suivis.

Mais nous aurons l’occasion de revenir sur le sujet. Je ne veux pas allonger les débats.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis : retrait.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Bien entendu, je soutiens ces amendements.

Au-delà des finances des départements, le problème, c’est que, devant les difficultés, voire l’impossibilité financière, les départements remettent parfois en cause l’opposabilité des conventions collectives nationales. Certains finissent par contester cette opposabilité auprès des associations – à l’aval, en quelque sorte – ou se désengagent, par des procédures de retrait d’agrément, de « décertification », etc.

Au bout de la chaîne, ce sont les relations avec les départements ou les métropoles, pour les prestations afférentes à ces conventions collectives, qui se dégradent : quand les opérateurs n’obtiennent pas de compensation, c’est le département, qui est en première ligne, qui doit assumer toute la conflictualité, alors qu’il n’obtient lui-même pas de compensation de la part de l’État en amont.

Enfin, si les agréments avec effet rétroactif sont un peu dangereux, c’est souvent dû à la lenteur de l’agrément : quand les partenaires sociaux, employeurs comme organisations syndicales, signent un avenant ou une convention collective, il faut parfois attendre longtemps ! Peu importe que l’accord ait prévu une mise en œuvre au 1er janvier, par exemple.

Monsieur le ministre, il faudrait donner à temps les agréments pour éviter cet effet retardé.

Mme la présidente. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Je soutiens naturellement ces amendements, en cohérence avec celui que j’avais déposé et qui a malheureusement été rejeté par notre assemblée.

Je dois vous avouer que ce n’est pas la première fois, depuis mon arrivée au Sénat l’année dernière, que je m’étonne de la façon dont les régions sont traitées.

Pour moi, les choses sont relativement simples : le Sénat est la chambre qui représente les collectivités territoriales – toutes les collectivités territoriales ! Les régions ne sont pas des sous-collectivités. Nous devons en avoir conscience et être collectivement à la hauteur des enjeux.

Je souscris totalement aux propos tenus par notre collègue Arnaud Bazin sur les départements. Et je pense qu’il est de bonne gestion de dire que les principes que nous édictons pour les départements doivent aussi s’appliquer pleinement aux régions, que nous parlions de libre administration ou d’autonomie fiscale et financière. Les régions ne vivent pas dans un monde parallèle !

Je le dis d’autant plus que l’amendement que j’ai déposé a été travaillé avec Régions de France. On sait très bien comment cette association est pilotée politiquement : elle ne saurait être soupçonnée de parti pris…

Je m’étonne donc vraiment, et j’espère, chers collègues de la majorité sénatoriale, que, dans les mois et les années qui viennent, nous pourrons évoluer collectivement.

De fait, au-delà de la méconnaissance totale des réalités que vivent les régions et du peu de considération à leur endroit, je m’étonne systématiquement de la fin de non-recevoir qui leur est opposée.

Encore une fois, elles ne vivent pas sur une autre planète ! Elles sont confrontées aux mêmes difficultés que les autres collectivités, parfois même de manière accrue, parce que l’État ne les a pas aidées de la même façon, que ce soit au moment de la crise sanitaire ou lors de la crise inflationniste.

Je souhaite que la représentation nationale prenne davantage conscience de ces réalités et, le moment venu, adopte les mesures adéquates.

J’espère, monsieur le rapporteur général, que vous en ferez bon usage pour les débats à venir !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 et 14.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 9 est présenté par MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat et Briquet, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 13 est présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 137 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le montant : « 45 057 825 520 € » est remplacé par le montant : « 45 402 825 520 € » ;

2° Le tableau du second alinéa est ainsi modifié :

a) Avant la dernière ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :

« 

Compensation aux départements de la revalorisation du revenu de solidarité active pour 2024 

345 000 000

 » ;

b) À la dernière ligne de la seconde colonne, le montant : « 45 057 825 520 € » est remplacé par le montant : « 45 402 825 520 € ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l’amendement n° 9

M. Thierry Cozic. Dans la foulée du débat sur le Ségur, je vais évoquer la compensation aux départements de l’impact budgétaire, sur 2024, de l’augmentation de 4,6 % du RSA, qui est intervenue le 1er avril dernier.

Pour échanger régulièrement sur le sujet, nous savons que les départements sont en grande difficulté. Leur situation financière résulte principalement d’une série de dépenses nouvelles peu, voire pas compensées par l’État. Et je pourrais citer, dans cette longue liste, plusieurs exemples de décisions que l’État a prises unilatéralement : l’avenant 43, le médico-social, les deux hausses du point d’indice, diverses revalorisations salariales… Et ce ne sont là que quelques exemples !

Si la revalorisation du dispositif RSA, notamment eu égard au niveau de l’inflation, est légitime dans un contexte social complexe, elle vient néanmoins se greffer à la longue liste de dépenses auxquelles les départements doivent désormais faire face et qui pèsent de plus en plus sur leurs budgets, de plus en plus contraints.

Or, on le sait – cela a notamment été évoqué par notre collègue Arnaud Bazin –, les départements font aujourd’hui face à une nette réduction de leurs ressources, du fait de la baisse des DMTO, et à une progression constante de leurs dépenses de solidarité.

De plus, cette évolution du RSA apparaît pérenne et structurelle. Elle devra, dès 2025, être absorbée par les départements sans pour autant être compensée par l’État, malgré l’engagement pris par ce dernier par le passé. Sur les 10,2 milliards d’euros de dépenses d’allocation du RSA, les départements auront un reste à charge de plus de 5 milliards.

L’équation deviendra de plus en plus insoluble si les mesures d’économies proposées par le Gouvernement dans le PLF pour 2025 sont adoptées.

Il paraît donc opportun de compenser à tout le moins à hauteur de 345 millions d’euros, cette année, la hausse du RSA intervenue le 1er avril dernier.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour présenter l’amendement n° 13.

M. Grégory Blanc. Nous parlons beaucoup de la manière dont nous allons aborder l’année 2025. Cependant, j’étais présent aux assises des départements de France à Angers, dans un très beau département que j’invite chacun à découvrir. Que s’y est-il passé ? Le Premier ministre a procédé à plusieurs annonces, dont un certain nombre de départements ont cru, de bonne foi, qu’elles régleraient leurs problèmes. Je pense, notamment, à la proposition de hausse d’un demi-point du taux des DMTO – nous en reparlerons lors de l’examen du budget.

Or cette hausse ne s’appliquera qu’à partir de juillet, trois mois après le vote des budgets des départements. Ainsi, vous discutez de mesures pour qu’ils résistent à l’année 2025… Mais c’est inapproprié, car ils ne tiennent déjà plus en 2024, année qu’ils finiront sous l’eau ! Et en 2025, pour au moins la moitié des départements de ce pays, cela ne passera pas !

Nous proposons donc, par cet amendement, de faciliter la fin de l’année 2024 pour ces collectivités, afin qu’elles aient plus de marges pour aborder leur débat budgétaire en 2025.

Je conclus sur une réflexion : si les départements finissent l’année 2024 en situation plus tendue, avec davantage de recours à l’emprunt, cela dégradera forcément les comptes de la Nation. En fin de compte, il s’agit d’un jeu à somme nulle, mais le message, lui, est très clair : en refusant cet amendement, vous préférez détériorer encore les comptes des départements pour préserver un peu plus ceux de l’État.

Mme la présidente. La commission des finances a déjà émis un avis défavorable, par anticipation.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Voilà la suite de notre débat de ce matin. Notre collègue Arnaud Bazin a doublement fait acte de responsabilité, en présentant une mesure acceptable, puis en consentant à la retirer, alors qu’elle était soutenue par l’Assemblée des départements de France (ADF).

Les amendements de la gauche qui remédient aux difficultés des départements sont, eux, rejetés par la majorité sénatoriale. Nous voyons bien le fil conducteur de la stratégie qui sera employée lors des débats du PLF, ce qui est très éclairant.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Savoldelli, vous êtes parfaitement honnête, puisque vous dites que ces amendements sont rejetés par la majorité sénatoriale. J’ajoute que c’est parce que ces mesures seront discutées dans le cadre du PLF 2025, juste après ce projet de loi de fin de gestion.

M. Pascal Savoldelli. On ne connaît pas le résultat des votes à venir !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 9 et 14.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, comme l’avait annoncé M. le président Raynal, je vais suspendre la séance pour dix minutes, afin de permettre à la commission des finances de se réunir pour l’examen de l’amendement du Gouvernement à l’article d’équilibre.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trois, est reprise à dix-sept heures quinze.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Après l’article 2
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 4

Article 3

I. – Pour 2024, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :

 

(en millions deuros*)

RESSOURCES

CHARGES

SOLDE

dont fonctionnement

dont fonctionnement

dont investissement

dont investissement

Budget général

Recettes fiscales** / dépenses***

-24 347

-24 347

0

-1 889

-1 870

-19

Recettes non fiscales

+1 009

-763

+1 772

Recettes totales / dépenses totales

-23 338

-25 110

+1 772

-1 889

-1 870

-19

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de lUnion européenne

+670

+670

Montants nets pour le budget général

-24 008

-25 780

+1 772

-1 889

-1 870

-19

-22 119

Évaluation des fonds de concours et des attributions de produits

0

0

0

0

0

0

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

-24 008

-25 780

+1 772

-1 889

-1 870

-19

Budgets annexes

Contrôle et exploitation aériens

+40

+40

-36

-30

-6

+76

Publications officielles et information administrative

+9

+9

-1

-1

0

+10

Totaux pour les budgets annexes

+49

+49

-38

-31

-6

+86

Évaluation des fonds de concours et des attributions de produits :

- Contrôle et exploitation aériens

0

0

0

0

- Publications officielles et information administrative

0

0

0

0

Totaux pour les budgets annexes y compris fonds de concours

+49

+49

-38

-31

-6

Comptes spéciaux

Comptes d’affectation spéciale

-2 390

-455

-1 936

+94

+134

-41

-2 484

Comptes de concours financiers

-169

-169

-1 784

0

-1 784

+1 615

Comptes de commerce (solde)

+162

Comptes d’opérations monétaires (solde)

0

Solde pour les comptes spéciaux

-707

Solde général

-22 740

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million deuros le plus proche ; il résulte de lapplication de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

** Recettes fiscales brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

*** Dépenses budgétaires brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

II. – Pour 2024 :

1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :

 

(En milliards deuros)

Besoin de financement

Amortissement de la dette à moyen et long termes

155,1

Dont remboursement du nominal à valeur faciale

151,1

Dont suppléments dindexation versés à léchéance (titres indexés)

4,0

Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau

2,7

Amortissement des autres dettes reprises

0,0

Déficit à financer

163,2

Autres besoins de trésorerie

-3,7

Total

317,3

Ressources de financement

Émission de dette à moyen et long termes nettes des rachats

285,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

6,5

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

35,9

Variation des dépôts des correspondants

-3,0

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

0,0

Autres ressources de trésorerie

-7,1

Total

317,3

 

2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année et en valeur nominale, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.

État A

VOIES ET MOYENS POUR 2024 RÉVISÉS

I. – BUDGET GÉNÉRAL

(en euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2024

1. Recettes fiscales

11. Impôt net sur le revenu

-5 296 509 310

1101-net

Impôt net sur le revenu

-5 296 509 310

12. Autres impôts directs perçus par voie démission de rôles

+215 900 511

1201

Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles

+215 900 511

13. Impôt net sur les sociétés

-14 346 898 081

1301-net

Impôt net sur les sociétés

-14 346 898 081

13 bis. Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

-150 600 000

1302

Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

-150 600 000

13 ter. Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de limpôt sur les sociétés

+245 000 000

1303

Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

+245 000 000

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

+344 295 677

1401

Retenues à la source sur certains bénéfices non commerciaux et de l’impôt sur le revenu

+320 000 000

1402

Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes

+100 000 000

1405

Prélèvement exceptionnel de 25 % sur les distributions de bénéfices

+1 135 409

1406

Impôt sur la fortune immobilière

+213 357 061

1407

Taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et de stockage

+1 666 583

1408

Prélèvements sur les entreprises d’assurance

-7 362 889

1410

Cotisation minimale de taxe professionnelle

-177 172

1411

Cotisations perçues au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction

-7 576 837

1412

Taxe de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue

+2 249 467

1413

Taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection et d’antiquité

-7 308 091

1416

Taxe sur les surfaces commerciales

+1 942 530

1421

Cotisation nationale de péréquation de taxe professionnelle

+204 927

1427

Prélèvements de solidarité

-425 090 272

1430

Taxe sur les services numériques

-44 000 000

1431

Taxe d’habitation sur les résidences principales

-180 000 000

1497

Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

+130 663 216

1498

Cotisation foncière des entreprises

+1 292 405

1499

Recettes diverses

+243 299 340

15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques nette

+534 761 715

1501-net

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques nette

+534 761 715

16. Taxe sur la valeur ajoutée nette

-3 770 282 779

1601-net

Taxe sur la valeur ajoutée nette

-3 770 282 779

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

+136 366 922

1701

Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d’offices

-133 368 501

1702

Mutations à titre onéreux de fonds de commerce

+19 568 933

1703

Mutations à titre onéreux de meubles corporels

+767 182

1704

Mutations à titre onéreux d’immeubles et droits immobiliers

-23 330 006

1705

Mutations à titre gratuit entre vifs (donations)

+447 870 877

1706

Mutations à titre gratuit par décès

+205 000 000

1707

Contribution de sécurité immobilière

-332 911 584

1711

Autres conventions et actes civils

-61 432 032

1713

Taxe de publicité foncière

-20 061 317

1714

Prélèvement sur les sommes versées par les organismes d’assurances et assimilés à raison des contrats d’assurances en cas de décès

+9 090 384

1716

Recettes diverses et pénalités

+10 075 910

1721

Timbre unique

+7 129 482

1726

Produit de la taxe additionnelle à la taxe sur les certifications d’immatriculation des véhicules

+159 473 596

1752

Contribution sur la rente infra-marginale de la production d’électricité

+33 733 333

1753

Autres taxes intérieures

+2 255 728 527

1754

Autres droits et recettes accessoires

-488 081

1755

Amendes et confiscations

-5 988 462

1756

Taxe générale sur les activités polluantes

-75 000 000

1768

Taxe spéciale sur certains véhicules routiers

-941 019

1769

Autres droits et recettes à différents titres

-18 999 556

1776

Redevances sanitaires d’abattage et de découpage

-5 718 532

1777

Taxe sur certaines dépenses de publicité

+912 746

1781

Taxe sur les installations nucléaires de base

-380 663

1782

Taxes sur les stations et liaisons radioélectriques privées

-3 275 590

1785

Produits des jeux exploités par la Française des jeux (hors paris sportifs)

-91 655 569

1786

Prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos

-103 312 823

1787

Prélèvement sur le produit brut des paris hippiques

-18 763 415

1788

Prélèvement sur les paris sportifs

+86 982 500

1789

Prélèvement sur les jeux de cercle en ligne

-2 339 398

1797

Taxe sur les transactions financières

+41 000 000

1799

Autres taxes

-2 243 000 000

18. Autres remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat

-2 258 909 179

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, autres que ceux s’appliquant à l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques et la taxe sur la valeur ajoutée

-2 258 909 179

2. Recettes non fiscales

21. Dividendes et recettes assimilées

+1 757 754 373

2110

Produits des participations de l’État dans des entreprises financières

-125 624 810

2116

Produits des participations de l’État dans des entreprises non financières et bénéfices des établissements publics non financiers

+903 273 323

2199

Autres dividendes et recettes assimilées

+980 105 860

22. Produits du domaine de lÉtat

-186 598 958

2201

Revenus du domaine public non militaire

-173 951 074

2202

Autres revenus du domaine public

+2 395 107

2203

Revenus du domaine privé

+78 457 764

2204

Redevances d’usage des fréquences radioélectriques

-92 881 390

2299

Autres revenus du Domaine

-619 365

23. Produits de la vente de biens et services

-998 355 454

2301

Remboursement par l’Union européenne des frais d’assiette et de perception des impôts et taxes perçus au profit de son budget

-145 972 760

2303

Autres frais d’assiette et de recouvrement

-39 914 103

2304

Rémunération des prestations assurées par les services du Trésor Public au titre de la collecte de l’épargne

-15 608 666

2305

Produits de la vente de divers biens

-50 872

2306

Produits de la vente de divers services

-1 287 509

2399

Autres recettes diverses

-795 521 544

24. Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

+14 294 926

2401

Intérêts des prêts à des banques et à des États étrangers

-42 415 681

2402

Intérêts des prêts du fonds de développement économique et social

-2 089 620

2403

Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

-18 302 878

2409

Intérêts des autres prêts et avances

+6 886 010

2411

Avances remboursables sous conditions consenties à l’aviation civile

+217 095

2499

Autres remboursements d’avances, de prêts et d’autres créances immobilisées

+70 000 000

25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites

-162 186 589

2501

Produits des amendes de la police de la circulation et du stationnement routiers

+143 643 998

2502

Produits des amendes prononcées par les autorités de la concurrence

+27 988 735

2503

Produits des amendes prononcées par les autres autorités administratives indépendantes

-168 610 776

2504

Recouvrements poursuivis à l’initiative de l’agence judiciaire de l’État

+4 677 426

2505

Produit des autres amendes et condamnations pécuniaires

-162 891 062

2510

Frais de poursuite

-5 964 241

2511

Frais de justice et d’instance

-1 981 452

2512

Intérêts moratoires

+2 397

2513

Pénalités

+948 386

26. Divers

+583 645 335

2601

Reversements de Natixis

+198 000 000

2602

Reversements au titre des procédures de soutien financier au commerce extérieur

-114 800 000

2603

Prélèvements sur les fonds d’épargne gérés par la Caisse des Dépôts et Consignations

+8 000 000

2604

Divers produits de la rémunération de la garantie de l’État

-70 820 000

2611

Produits des chancelleries diplomatiques et consulaires

-13 326 100

2612

Redevances et divers produits pour frais de contrôle et de gestion

+8 331 599

2615

Commissions et frais de trésorerie perçus par l’État dans le cadre de son activité régalienne

+50 093

2616

Frais d’inscription

+806 972

2617

Recouvrement des indemnisations versées par l’État au titre des expulsions locatives

-1 647 466

2618

Remboursement des frais de scolarité et accessoires

+822 578

2620

Récupération d’indus

+231 910 000

2621

Recouvrements après admission en non-valeur

+925 202

2623

Reversements de fonds sur les dépenses des ministères ne donnant pas lieu à rétablissement de crédits

+34 930 368

2624

Intérêts divers (hors immobilisations financières)

+9 120 238

2625

Recettes diverses en provenance de l’étranger

-6 761 518

2626

Remboursement de certaines exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties (art. 109 de la loi de finances pour 1992)

+201 469

2697

Recettes accidentelles

+53 606 339

2698

Produits divers

-27 507 145

2699

Autres produits divers

+271 802 706

3. Prélèvements sur les recettes de lÉtat

32. Prélèvement sur les recettes de lÉtat au profit de lUnion européenne

+669 885 531

3201

Prélèvement sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne

+669 885 531

 

RECAPITULATION DES RÉVISIONS DE RECETTES DU BUDGET GÉNÉRAL

(en euros)

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2024

1. Recettes fiscales

-24 346 874 524

11. Impôt net sur le revenu

-5 296 509 310

12. Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles

+215 900 511

13. Impôt net sur les sociétés

-14 346 898 081

13 bis. Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

-150 600 000

13 ter. Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

+245 000 000

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

+344 295 677

15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques nette

+534 761 715

16. Taxe sur la valeur ajoutée nette

-3 770 282 779

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

+136 366 922

18. Autres remboursements et dégrèvements d’impôts d’État

-2 258 909 179

2. Recettes non fiscales

+1 008 553 633

21. Dividendes et recettes assimilées

+1 757 754 373

22. Produits du domaine de l’État

-186 598 958

23. Produits de la vente de biens et services

-998 355 454

24. Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

+14 294 926

25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites

-162 186 589

26. Divers

+583 645 335

3. Prélèvements sur les recettes de lÉtat

+669 885 531

32. Prélèvement sur les recettes de l’État au profit de l’Union européenne

+669 885 531

Total des révisions de recettes, nettes des prélèvements (1 + 2 – 3)

-24 008 206 422

 

II. – BUDGETS ANNEXES

(en euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2024

Contrôle et exploitation aériens

+39 582 617

7060

Redevance océanique et redevances pour services terminaux de la circulation aérienne en outre-mer

+2 200 000

7061

Redevances de route

+20 118 000

7063

Redevances pour services terminaux de la circulation aérienne pour la métropole

-3 726 000

7067

Redevances de surveillance et de certification

+27 383

7069

Contribution Bâle-Mulhouse

+3 023 190

7081

Recettes diverses

+5 711 061

7501

Tarif de l’aviation civile (part de la taxe sur le transport aérien de marchandises et de la taxe sur le transport aérien de passagers)

+12 228 983

7503

Tarif de solidarité de la taxe sur le transport aérien de passagers

+2 000 000

9200

Produit de cession d’actif

-2 000 000

Publications officielles et information administrative

+9 000 000

A704

Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales

+9 000 000

Total

+48 582 617

 

III. – COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE

(en euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2024

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

+285 825 302

Section : Circulation et stationnement routiers

+285 825 302

04

Amendes forfaitaires de la police de la circulation et amendes forfaitaires majorées issues des infractions constatées par la voie du système de contrôle-sanction automatisé et des infractions aux règles de la police de la circulation

+285 825 302

Développement agricole et rural

+12 600 000

01

Taxe sur le chiffre d’affaires des exploitations agricoles

+12 600 000

Gestion du patrimoine immobilier de lÉtat

-50 200 000

01

Produits des cessions immobilières

-50 200 000

Participations financières de lÉtat

-1 935 567 613

01

Produit des cessions, par l’État, de titres, parts ou droits de sociétés détenus directement

+2 978 987

05

Remboursements de créances liées à d’autres investissements, de l’État, de nature patrimoniale

+71 453 000

06

Versement du budget général

-2 009 999 600

Pensions

-702 953 801

Section : Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires dinvalidité

-754 025 101

01

Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension

-48 866 718

02

Personnels civils : retenues pour pensions : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension

-208 911

03

Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension

-5 865 504

04

Personnels civils : retenues pour pensions : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension

+1 335 811

05

Personnels civils : retenues pour pensions : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste)

-264 754

06

Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de France Télécom et agents détachés à France Télécom

-3 493 113

07

Personnels civils : retenues pour pensions : primes et indemnités ouvrant droit à pension

-1 091 328

10

Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État : surcotisations salariales du temps partiel et des cessations progressives d’activité

+389 731

12

Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres de La Poste et agents détachés à La Poste

-6 253 934

14

Personnels civils : retenues pour pensions : agents propres et détachés des budgets annexes

-549 591

21

Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension (hors allocation temporaire d’invalidité)

-300 725 504

22

Personnels civils : contributions des employeurs : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors allocation temporaire d’invalidité)

-2 911 643

23

Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension

+77 338 993

24

Personnels civils : contributions des employeurs : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension

-4 453 315

25

Personnels civils : contributions des employeurs : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste)

+8 642 712

26

Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres de France Télécom et agents détachés à France Télécom

-15 928 560

27

Personnels civils : contributions des employeurs : primes et indemnités ouvrant droit à pension

-7 007 567

32

Personnels civils : contributions des employeurs : agents propres de La Poste et agents détachés à La Poste

-17 042 390

33

Personnels civils : contributions des employeurs : allocation temporaire d’invalidité

-987 038

41

Personnels militaires : retenues pour pensions : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension

-30 963 047

42

Personnels militaires : retenues pour pensions : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension

-23 917

43

Personnels militaires : retenues pour pensions : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension

-340 049

44

Personnels militaires : retenues pour pensions : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension

-245 817

45

Personnels militaires : retenues pour pensions : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste)

-103 218

47

Personnels militaires : retenues pour pensions : primes et indemnités ouvrant droit à pension

-1 030 310

51

Personnels militaires : contributions des employeurs : agents propres de l’État et agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi conduisant à pension

-371 259 569

52

Personnels militaires : contributions des employeurs : agents détachés dans une administration de l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension

-275 437

53

Personnels militaires : contributions des employeurs : agents propres des établissements publics et agents détachés en établissement public sur un emploi conduisant à pension

-2 186 792

54

Personnels militaires : contributions des employeurs : agents détachés dans les collectivités et établissements publics locaux sur un emploi conduisant à pension

-946 202

55

Personnels militaires : contributions des employeurs : agents détachés hors l’État sur un emploi ne conduisant pas à pension (hors France Télécom et hors La Poste)

-326 319

57

Personnels militaires : contributions des employeurs : primes et indemnités ouvrant droit à pension

-14 171 988

61

Recettes diverses (administration centrale) : Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) : transfert au titre de l’article 59 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010

-11 000 000

65

Recettes diverses (administration centrale) : compensation démographique généralisée : personnels civils

+6 790 187

Section : Ouvriers des établissements industriels de lÉtat

+587 167

71

Cotisations salariales et patronales

-12 122 247

72

Contribution au Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État (FSPOEIE) et au Fonds des rentes d’accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM)

-261 485

73

Compensations inter-régimes généralisée et spécifique

+1 304 935

74

Recettes diverses

+11 775 621

75

Autres financements : Fonds de solidarité vieillesse (FSV), Fonds de solidarité invalidité (FSI) et cotisations rétroactives

-109 657

Section : Pensions militaires dinvalidité et des victimes de guerre et autres pensions

+50 484 133

81

Financement de la retraite du combattant : participation du budget général

+5 203 893

83

Financement du traitement de membres de la Légion d’honneur : participation du budget général

-69 063

85

Financement du traitement de personnes décorées de la Médaille militaire : participation du budget général

+69 063

87

Financement des pensions militaires d’invalidité : participation du budget général

+27 937 004

89

Financement des pensions d’Alsace-Lorraine : participation du budget général

+558 046

91

Financement des allocations de reconnaissance des anciens supplétifs : participation du budget général

+16 785 190

Total

-2 390 296 112

IV. – COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS

(en euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Révision des évaluations pour 2024

Avances à laudiovisuel public

-50 671 838

01

Recettes

-50 671 838

Avances aux collectivités territoriales

+1 815 810 408

Section : Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

+1 815 810 408

05

Recettes diverses

+407 804 292

09

Taxe d’habitation et taxes annexes

+1 086 449 048

10

Taxes foncières et taxes annexes

+65 882 975

11

Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

+14 235 947

12

Cotisation foncière des entreprises et taxes annexes

+241 438 146

Prêts à des États étrangers

+848 106

Section : Prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France

-4 165 670

01

Remboursement des prêts accordés à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France

-4 165 670

Section : Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

+5 013 776

02

Remboursement de prêts du Trésor

+5 013 776

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

-16 008 732

Section : Prêts et avances pour le logement des agents de lÉtat

+122

04

Avances aux agents de l’État à l’étranger pour la prise en location d’un logement

+122

Section : Prêts pour le développement économique et social

-16 008 854

06

Prêts pour le développement économique et social

-19 013 873

12

Prêts octroyés dans le cadre des programmes d’investissement d’avenir

+3 005 019

Prêts et avances à divers services de lÉtat ou organismes gérant des services publics

-1 919 372 580

01

Remboursement des avances octroyées au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

-1 800 000 000

03

Remboursement des avances octroyées à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

-108 800 000

04

Remboursement des prêts et avances octroyés à des services de l’État

-10 182 708

06

Remboursement des prêts octroyés aux exploitants d’aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

-389 872

Total

-169 394 636

 

Mme la présidente. L’amendement n° 28, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – État A

Rédiger ainsi les évaluations de recettes :

I. Budget général

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Évaluation pour 2024

1. Recettes fiscales

 

 

3ter. Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

-126 000 000

1303

Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

minorer de

-126 000 000

 

4. Autres impôts directs et taxes assimilées

 

+147 000 000

1431

Taxe d’habitation sur les résidences principales

majorer de

+147 000 000

Récapitulation des recettes du budget général

(En euros)

Numéro de ligne

Intitulé de la recette

Évaluation pour 2024

 

1. Recettes fiscales

 

+21 000 000

3 ter

Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés

minorer de

-126 000 000

4

Autres impôts directs et taxes assimilées

majorer de

+147 000 000

 

Total des recettes fiscales et non fiscales (I)

majorer de

+21 000 000

 

Total des recettes (I), nettes des prélèvements

majorer de

+21 000 000

IV. Comptes de concours financiers

(En euros)

Numéro e ligne

Intitulé de la recette

Évaluation pour 2024

 

Prêts à des États étrangers

majorer de

+1 710 726 740

 

Prêts aux États membres de la zone euro

majorer de

+1 710 726 740

4

Remboursement des prêts consentis aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro

majorer de

+1 710 726 740

 

Total des recettes

majorer de

+1 710 726 740

 

II. – Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

(En millions deuros*)

RESSOURCES

CHARGES

SOLDE

 

Dont fonctionnement

Dont investissement

Dont fonctionnement

Dont investissement

Budget général

 

 

 

 

 

 

 

Recettes fiscales** / dépenses***

-24 326

-24 326

0

-1 889

-1 870

-19

 

Recettes non fiscales

1 009

-763

1 772

 

0

0

 

Recettes totales nettes / dépenses nettes

-23 317

-25 089

1 772

-1 889

-1 870

-19

 

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de lUnion européenne

+670

+670

 

 

 

 

 

Montants nets pour le budget général

-23 987

-25 759

1 772

-1 889

-1 870

-19

-22 098

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

0

0

0

0

0

0

 

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

-23 987

-25 759

1 772

-1 889

-1 870

-19

 

Budgets annexes

 

 

 

 

 

 

 

Contrôle et exploitation aériens

+40

+40

+0

-36

-30

-6

+76

Publications officielles et information administrative

+9

+9

+0

-1

-1

0

+10

Totaux pour les budgets annexes

+49

+49

0

-38

-31

-6

+86

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

 

 

 

 

 

 

 

Contrôle et exploitation aériens

0

0

0

0

0

0

 

Publications officielles et information administrative

0

0

0

0

0

0

 

Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

+49

+49

0

-38

-31

-6

 

Comptes spéciaux

 

 

 

 

 

 

 

Comptes d’affectation spéciale

-2 390

-455

-1 936

+94

+134

-41

-2 484

Comptes de concours financiers

+1 541

0

+1 541

-1 784

0

-1 784

3 326

Comptes de commerce (solde)

 

 

 

 

 

 

162

Comptes d’opérations monétaires (solde)

 

 

 

 

 

 

0

Solde pour les comptes spéciaux

 

 

 

 

 

 

1 003

Solde général

 

 

 

 

 

 

-21 009

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million deuros le plus proche ; il résulte de lapplication de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

** Recettes fiscales brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

*** Dépenses budgétaires brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

 

III. – Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

(En milliards deuros)

Besoin de financement

 

Amortissement de la dette à moyen et long termes

155,1

Dont remboursement du nominal à valeur faciale

151,1

Dont suppléments dindexation versés à léchéance (titres indexés)

4,0

Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau

2,7

Amortissement des autres dettes reprises

0,0

Déficit à financer

161,5

Autres besoins de trésorerie

-3,7

Total

315,6

 

 

Ressources de financement

 

Émissions de dette à moyen et long termes nettes des rachats

285,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

6,5

Variation nette de l’encours de titres d’État à court terme

34,2

Variation des dépôts des correspondants

-3,0

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

0,0

Autres ressources de trésorerie

-7,1

Total

315,6

La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Cet amendement à l’article d’équilibre tient compte de l’actualisation du solde budgétaire, qui s’établit désormais à –161,5 milliards d’euros, ce qui résulte de l’amélioration du solde des comptes spéciaux de 1,7 milliard d’euros et d’une hausse des recettes fiscales nettes de 21 millions d’euros.

Les 1,7 milliard d’euros de hausse au titre des comptes spéciaux sont dus à la décision, prise par la Grèce, de réaliser un remboursement par anticipation du capital du prêt qui lui avait été octroyé, améliorant de fait les recettes du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

Quant aux recettes fiscales majorées, elles tiennent compte de nouvelles informations disponibles à ce jour faisant état d’une baisse du résultat prévisionnel de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), d’où une évolution des recettes de sa contribution représentative de l’impôt sur les sociétés de –126 millions d’euros, d’une part ; d’une correction technique de la prévision des recettes de la taxe d’habitation sur les résidences principales de +147 millions d’euros, d’autre part. La différence entre les deux aboutit bien à des recettes majorées de 21 millions d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’ai peu d’observations sur cet amendement, que je demande à nos collègues de bien vouloir voter.

Dans ces temps difficiles, monsieur le ministre, j’attire notre attention collective sur le fait que, après avoir connu de sérieuses difficultés budgétaires, la Grèce – ce n’est pas la première fois ces dernières années – est au rendez-vous des remboursements, avec même une certaine anticipation. Voilà qui nous permet de mesurer l’importance et – comme l’a dit le Premier ministre – la gravité du moment.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Je rebondis sur ce remboursement de la Grèce afin de vous questionner, monsieur le ministre, sur les propos de la porte-parole du Gouvernement, Maud Bregeon. En effet, celle-ci nous a expliqué que si ce budget n’était pas voté en l’état, nous nous orienterions vers une situation « à la grecque ».

Ma question est donc simple, monsieur le ministre : les sept ans de votre politique fiscale nous ont-ils menés dans une situation d’insincérité et d’instabilité proche de celle de la Grèce en 2008 ? Votre réponse est attendue, puisque la parole de la France, en matière budgétaire, est scrutée par certaines institutions. Les mots de votre collègue porte-parole du Gouvernement ont-ils été prononcés à la légère, ou sont-ils sérieusement étayés ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. La question n’est pas celle de la sincérité des comptes. (M. Thomas Dossus sexclame.) Il s’agit plutôt de faire soit des choix courageux aujourd’hui, pour redresser nos comptes, soit des choix plus douloureux demain.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas la question !

M. Laurent Saint-Martin, ministre. C’est tout à fait la question ! En tout cas, ce sera ma réponse. (Protestations sur les travées des groupes GEST et SER.)

En effet, certains pays – la Grèce n’est pas le seul exemple – n’ont pas été souverains dans le choix de leur budget, justement du fait d’un dérapage excessif de leurs finances publiques. Je crois que personne ici ne souhaite que ce soit le cas du nôtre. Nous avons donc un rendez-vous très important, dans quelques heures : le projet de loi de finances pour 2025 et le redressement de nos comptes publics. (MM. Thomas Dossus et Victorin Lurel protestent.)

Je l’ai dit tout à l’heure, et je le redirai pendant les prochains jours : ne nous trompons pas de débat ! Si nous devons redresser nos comptes, c’est d’abord parce que nous avons mieux protégé nos concitoyens que d’autres pays.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Nous pourrons consulter toutes les archives que vous voulez et faire l’inventaire de toute la dépense publique que nous avons, collectivement, voulue dans ce pays entre 2020 et 2024. Croyez-moi, les appels à dépenser sont plus venus des bancs de l’opposition de l’époque que des différents gouvernements et majorités.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous proposions des recettes ! (MM. Thierry Cozic, Thomas Dossus et Victorin Lurel renchérissent.)

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Aujourd’hui, notre rendez-vous est simplement celui de la responsabilité, afin de redresser nos comptes et d’éviter que d’autres décident pour nous de notre avenir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 3 et de l’état A annexé, modifié.

(Larticle 3 et létat A annexé sont adoptés.)

Vote sur l’ensemble de la première partie

Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024.

Je rappelle que, en application de l’article 42 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, lorsque le Sénat n’adopte pas la première partie d’un projet de loi de finances de fin de gestion, l’ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024.

(La première partie du projet de loi est adoptée, modifiée.)

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE IER

AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2024 – CRÉDITS DES MISSIONS

Article 3
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 5

Article 4

I. – Il est ouvert aux ministres, pour 2024, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement aux montants de 10 629 547 239 € et de 11 495 232 471 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.

II. – Il est annulé pour 2024, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 6 975 663 290 € et de 6 457 707 514 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.

État B

REPARTITION DES CRÉDITS POUR 2024 OUVERTS/ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMME, AU TITRE DU BUDGET GÉNÉRAL

BUDGET GÉNÉRAL

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations dengagement annulées

Crédits de paiement annulés

Action extérieure de lÉtat

58 759 594

58 737 595

Action de la France en Europe et dans le monde

32 862 957

32 862 957

Diplomatie culturelle et d’influence

21 222 858

21 222 859

Français à l’étranger et affaires consulaires

4 673 779

4 651 779

dont titre 2

3 250 737

3 250 737

Administration générale et territoriale de lÉtat

140 364 441

144 164 449

46 362 144

113 360 012

Administration territoriale de l’État

15 840 714

20 840 685

dont titre 2

9 340 714

9 340 714

Vie politique

124 523 727

123 323 764

210 864

210 864

dont titre 2

210 864

210 864

Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

46 151 280

113 149 148

dont titre 2

12 330 832

12 330 832

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

20 405 183

20 405 183

221 465 347

146 967 994

Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

138 081 117

1 869 031

Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

79 318 764

124 037 524

dont titre 2

19 495 830

19 495 830

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

4 977 359

4 977 359

4 065 466

21 061 439

dont titre 2

4 977 359

4 977 359

Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)

15 427 824

15 427 824

Aide publique au développement

319 850 952

275 057 768

Aide économique et financière au développement

252 050 952

207 257 768

Solidarité à l’égard des pays en développement

67 800 000

67 800 000

dont titre 2

800 000

800 000

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

51 776 891

48 693 091

2 504 610

2 534 368

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

51 776 891

48 693 091

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

2 504 610

2 534 368

dont titre 2

9 135

9 135

Cohésion des territoires

250 000 000

250 000 000

600 768 144

684 933 171

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

250 000 000

250 000 000

Aide à l’accès au logement

224 191 058

224 191 058

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

302 078 062

381 314 440

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

20 033 674

18 033 674

dont titre 2

2 333 674

2 333 674

Politique de la ville

51 397 930

51 397 930

dont titre 2

1 397 930

1 397 930

Interventions territoriales de l’État

3 067 420

9 996 069

Conseil et contrôle de lÉtat

1 970 430

1 970 430

15 309 959

10 394 062

Conseil d’État et autres juridictions administratives

9 834 870

8 278 983

dont titre 2

8 278 983

8 278 983

Conseil économique, social et environnemental

1 970 430

1 970 430

dont titre 2

35 809

35 809

Cour des comptes et autres juridictions financières

5 475 089

2 115 079

dont titre 2

1 115 080

1 115 080

Crédits non répartis

50 000 000

50 000 000

Dépenses accidentelles et imprévisibles

50 000 000

50 000 000

Culture

2 492 000

1 600 000

29 505 435

32 752 027

Création

2 090 562

1 954 584

Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

27 414 873

30 797 443

Soutien aux politiques du ministère de la culture

2 492 000

1 600 000

dont titre 2

1 600 000

1 600 000

Défense

677 000 000

677 000 000

805 634 612

802 550 812

Environnement et prospective de la politique de défense

33 000 000

33 000 000

Préparation et emploi des forces

677 000 000

677 000 000

Soutien de la politique de la défense

240 683 800

237 600 000

dont titre 2

200 000 000

200 000 000

Équipement des forces

531 950 812

531 950 812

Direction de laction du Gouvernement

4 171 778

6 171 778

18 787 543

12 880 321

Coordination du travail gouvernemental

4 171 778

4 171 778

18 300 535

12 689 722

dont titre 2

4 171 778

4 171 778

Protection des droits et libertés

2 000 000

487 008

190 599

dont titre 2

190 599

190 599

Écologie, développement et mobilité durables

50 167 658

251 422 082

947 186 133

338 220 333

Infrastructures et services de transports

48 878 275

250 132 699

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

9 769 622

3 111 715

Paysages, eau et biodiversité

67 041 251

85 105 955

Énergie, climat et après-mines

182 000 000

Service public de l’énergie

470 372 597

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

1 289 383

1 289 383

2 663

3 002 663

dont titre 2

1 289 383

1 289 383

Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires

400 000 000

65 000 000

Économie

195 634 354

211 096 542

186 182 490

271 253 869

Développement des entreprises et régulations

195 634 354

211 096 542

7 096 515

7 096 515

dont titre 2

7 096 515

7 096 515

Plan France Très haut débit

84 621 039

Statistiques et études économiques

10 139 747

13 803 665

dont titre 2

5 412 266

5 412 266

Stratégies économiques

7 946 228

4 732 650

dont titre 2

4 732 650

4 732 650

Financement des opérations patrimoniales en 2024 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État »

161 000 000

161 000 000

Engagements financiers de lÉtat

149 140 938

149 140 938

537 000 000

558 758 491

Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

537 000 000

537 000 000

Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

140 140 938

140 140 938

Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État (crédits évaluatifs)

9 000 000

9 000 000

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

21 758 491

Enseignement scolaire

355 682 946

350 241 334

460 698 418

478 647 687

Enseignement scolaire public du premier degré

73 104 326

84 904 326

dont titre 2

46 783 626

46 783 626

Enseignement scolaire public du second degré

123 285 235

126 785 235

dont titre 2

112 785 235

112 785 235

Vie de l’élève

283 703 787

283 703 787

225 562 015

225 562 015

dont titre 2

283 703 787

283 703 787

Enseignement privé du premier et du second degrés

38 442 210

33 000 598

2 600 000

dont titre 2

33 000 598

33 000 598

Soutien de la politique de l’éducation nationale

33 536 949

33 536 949

dont titre 2

33 536 949

33 536 949

Enseignement technique agricole

38 746 842

38 796 111

dont titre 2

21 399 260

21 399 260

Gestion des finances publiques

610 760

143 966 091

95 708 168

Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

66 783 844

68 659 126

dont titre 2

46 595 056

46 595 056

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

59 413 204

18 353 267

dont titre 2

10 883 888

10 883 888

Facilitation et sécurisation des échanges

610 760

17 769 043

8 695 775

dont titre 2

8 695 775

8 695 775

Immigration, asile et intégration

31 876 488

64 599 692

26 317 511

17 289 495

Immigration et asile

31 876 488

64 599 692

Intégration et accès à la nationalité française

26 317 511

17 289 495

Investir pour la France de 2030

1 214 579 771

Soutien des progrès de l’enseignement et de la recherche

14 025 000

Valorisation de la recherche

4 851 000

Accélération de la modernisation des entreprises

784 300

Financement des investissements stratégiques

922 204 551

Financement structurel des écosystèmes d’innovation

272 714 920

Justice

697 104 145

61 032 093

Justice judiciaire

227 940 129

25 882 738

dont titre 2

25 882 738

25 882 738

Administration pénitentiaire

361 429 390

9 815 993

dont titre 2

7 535 371

7 535 371

Protection judiciaire de la jeunesse

34 899 373

13 176 639

dont titre 2

2 868 220

2 868 220

Accès au droit et à la justice

7 305 043

7 357 635

Conduite et pilotage de la politique de la justice

65 432 178

4 701 056

dont titre 2

4 701 056

4 701 056

Conseil supérieur de la magistrature

98 032

98 032

dont titre 2

98 032

98 032

Médias, livre et industries culturelles

33 008 686

20 235 291

Presse et médias

16 623 953

16 002 841

Livre et industries culturelles

16 384 733

4 232 450

Outre-mer

55 616 172

33 231 693

90 678 418

1 229 116

Emploi outre-mer

55 616 172

26 231 693

1 229 116

1 229 116

dont titre 2

1 229 116

1 229 116

Conditions de vie outre-mer

7 000 000

89 449 302

Plan de relance

150 000 000

Cohésion

150 000 000

Pouvoirs publics

28 540 900

28 540 900

Assemblée nationale

28 540 900

28 540 900

Recherche et enseignement supérieur

100 241 287

102 450 447

315 089 698

317 573 466

Formations supérieures et recherche universitaire

51 470 192

51 470 191

dont titre 2

225 448

225 448

Vie étudiante

54 092 058

56 291 923

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

117 918 733

117 918 733

Recherche spatiale

100 000 000

100 000 000

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

46 149 229

46 158 524

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

27 248 276

29 718 002

Enseignement supérieur et recherche agricoles

18 452 497

18 466 540

dont titre 2

5 345 881

5 345 881

Régimes sociaux et de retraite

162 996 842

162 996 842

Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

150 145 805

150 145 805

Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

12 851 037

12 851 037

Relations avec les collectivités territoriales

128 122 754

159 746 631

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

104 999 779

76 707 208

Concours spécifiques et administration

23 122 975

83 039 423

Remboursements et dégrèvements

7 693 409 009

7 693 409 009

Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

6 926 584 017

6 926 584 017

Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

766 824 992

766 824 992

Santé

13 923 894

14 159 823

123 500

123 500

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

13 923 894

14 159 823

123 500

123 500

dont titre 2

123 500

123 500

Sécurités

556 293 707

847 518 057

374 381 141

23 080 412

Police nationale

355 986 507

443 484 884

321 473 105

dont titre 2

355 986 507

355 986 507

Gendarmerie nationale

200 307 200

363 807 320

dont titre 2

48 808 511

48 808 511

Sécurité et éducation routières

10 780 000

15 280 000

Sécurité civile

40 225 853

42 128 036

7 800 412

dont titre 2

7 800 412

7 800 412

Solidarité, insertion et égalité des chances

247 786 677

245 583 149

19 034 439

42 255 555

Inclusion sociale et protection des personnes

60 434 477

58 230 949

1 696 779

1 696 779

dont titre 2

1 696 779

1 696 779

Handicap et dépendance

158 801 877

158 801 877

Égalité entre les femmes et les hommes

28 550 323

28 550 323

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

17 337 660

40 558 776

dont titre 2

8 758 776

8 758 776

Sport, jeunesse et vie associative

3 052 486

3 052 486

28 389 440

28 389 440

Sport

3 052 486

3 052 486

dont titre 2

3 052 486

3 052 486

Jeunesse et vie associative

28 389 440

28 389 440

dont titre 2

15 634 987

15 634 987

Transformation et fonction publiques

100 019 635

41 774 156

Performance et résilience des bâtiments de l’État et de ses opérateurs

16 456 030

13 579 912

Transformation publique

66 557 256

7 898 148

dont titre 2

540 000

540 000

Innovation et transformation numériques

8 726 533

11 747 167

dont titre 2

15 000

15 000

Fonction publique

7 810 000

8 079 113

dont titre 2

110 000

110 000

Conduite et pilotage de la transformation et de la fonction publiques

469 816

469 816

dont titre 2

469 816

469 816

Travail et emploi

350 170 628

556 415 609

284 645 068

Accès et retour à l’emploi

209 745 739

277 168 249

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

350 170 628

334 899 392

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

7 444 604

3 241 940

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

4 325 874

4 234 879

dont titre 2

908 896

908 896

Total

10 629 547 239

11 495 232 471

6 975 663 290

6 457 707 514

 

Mme la présidente. L’amendement n° 15, présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Mission cohésion des territoires

Modifier ainsi les annulations des crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

 

 

 

 

Aide à l’accès au logement

 

224 191 058

 

224 191 058

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

 

 

 

 

Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

dont titre 2

 

 

 

 

Politique de la ville

dont titre 2

 

 

 

 

Interventions territoriales de l’État

 

 

 

 

TOTAL

 

224 191 058

 

224 191 058

SOLDE

- 224 191 058

- 224 191 058

 

La parole est à Mme Ghislaine Senée.

Mme Ghislaine Senée. Par cet amendement, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souligne son opposition au coup de rabot de 2024 sur les aides au logement, tant à la construction qu’à la rénovation. Rappelons les chiffres : 4 millions de personnes sont mal-logées, voire sans logement personnel, et 12 millions sont fragilisées par rapport au logement.

Notre pays a besoin d’un parc social étendu et rénové, notamment grâce à son isolation thermique et phonique, afin d’améliorer les conditions de vie des habitants qui y sont logés. Or les coupes budgétaires, année après année, sont insupportables pour eux.

Cet amendement d’appel vise, monsieur le ministre, à souligner dans ce débat l’importance, pour les plus précaires et les plus vulnérables de nos concitoyens, des investissements publics dans le logement, c’est-à-dire dans le logement social et très social. Je vous rassure : je n’attends absolument aucun avis favorable, ni de la commission des finances ni du Gouvernement, mais il est important de mettre en exergue cette coupe, depuis février dernier, de 224 millions d’euros de crédits.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ma chère collègue, il n’y a ni coupe ni découpe. Il s’agit simplement d’un ajustement pour tenir compte des crédits consommés.

Je vous rejoins, en revanche, sur le constat des difficultés du secteur du logement depuis dix ans, lorsque Cécile Duflot était ministre du logement. Depuis elle, puis ses successeurs, la situation ne s’est jamais redressée. (Mme Ghislaine Senée proteste.) Aujourd’hui, nous sommes dans une situation de crise sérieuse dans tous les domaines : pavillonnaire, locatif, locatif social aidé, territoires urbains, Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine)… Le sujet est majeur. J’espère que nous pourrons le traiter en début d’année prochaine, pourquoi pas dans le cadre d’un texte de loi ?

La politique du logement traverse les générations et doit s’ajuster aux besoins des Français. Comme vous le savez, nous avons besoin d’une croissance du nombre de logements plus rapide que celle de la population, même si la tendance sera sans doute, à l’avenir, à la décroissance.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Vous avez reconnu, madame la sénatrice, qu’il s’agissait d’un amendement d’appel, puisqu’il concerne des ajustements techniques.

Ainsi, le programme visé par cet amendement concerne essentiellement les aides personnelles au logement (APL), que nous n’avons, évidemment, aucune difficulté à financer et à payer. Sur la fin de cet exercice 2024, comme chaque année, il s’agit d’un simple réglage.

Sur la problématique du logement, rendez-vous à l’examen du PLF pour 2025. Le Gouvernement s’est montré ouvert à certaines évolutions, comme sur le prêt à taux zéro (PTZ) ou la primo-accession. Il redéposera, lors de l’examen au Sénat, certains amendements adoptés à l’Assemblée nationale. Nous pourrons en reparler à plusieurs occasions.

En conséquence, l’avis du Gouvernement est également défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 19, présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Mission Direction de l’action du Gouvernement

I. – Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+ (majorer l’ouverture de)

– (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

– (minorer l’ouverture de)

Coordination du travail gouvernemental

dont titre 2

 

 

 

 

Protection des droits et libertés

dont titre 2

4 000 000

 

4 000 000

 

TOTAL

4 000 000

 

4 000 000

 

SOLDE

+4 000 000

+4 000 000

 

II. – Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+ (majorer l’annulation de)

– (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

– (minorer l’annulation de)

Coordination du travail gouvernemental

dont titre 2

4 000 000

 

4 000 000

 

Protection des droits et libertés

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

4 000 000

 

4 000 000

 

SOLDE

–4 000 000

–4 000 000

 

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Dans la même logique que celle de notre précédent amendement sur l’audiovisuel public, nous souhaitons défendre l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), autorité administrative indépendante (AAI) qui garantit que notre audiovisuel respecte des règles. Or certains milliardaires, détenteurs de canaux gratuits, tentent de s’en affranchir, ce qui n’est pas sans provoquer une hausse du nombre de saisines de cette autorité.

Il est temps de respecter ces AAI. C’est pourquoi nous proposons une légère hausse, de 4 millions d’euros, de leur budget.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La dotation budgétaire de l’Arcom ne pose pas de difficulté particulière.

Je précise, par souci du détail, que vous mentionnez, dans l’objet de votre amendement, un montant de 487 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. C’est certes beaucoup : enlever deux zéros serait plus exact… (M. Thomas Dossus en convient.)

L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 19.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 17, présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Mission écologie, développement et mobilité durables

Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Infrastructures et services de transports

 

 

 

 

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

 

 

 

 

Prévention des risques

dont titre 2

 

 

 

 

Énergie, climat et après-mines

 

 

 

 

Service public de l’énergie

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires

 

100 000 000

 

65 000 000

TOTAL

 

100 000 000

 

65 000 000

SOLDE

–100 000 000

–65 000 000

La parole est à Mme Ghislaine Senée.

Mme Ghislaine Senée. Nous proposons de rétablir une partie des crédits du fonds vert. Le décret d’annulation de février 2024 a en effet privé les collectivités locales de 500 millions euros fléchés vers l’accélération de la transition écologique dans les territoires. Cette baisse draconienne est confirmée par le PLF pour 2025, au sein duquel la baisse de 60 % des crédits du fonds vert nous apparaît disproportionnée.

Ralentir la transition écologique dans les territoires aura des effets dramatiques sur le long terme, qui nous coûteront bien plus cher que les 500 millions d’euros économisés ici. La multiplication des catastrophes naturelles en France ne cesse de démontrer l’urgence d’agir, ainsi que la capacité des collectivités à mettre en œuvre des politiques climatiques pertinentes.

Une diminution aussi sévère du fonds vert ne peut que susciter des interrogations sur la volonté même du Gouvernement de le supprimer. Elle a, de plus, des conséquences directes sur les populations et accroît la menace sur l’habitabilité de notre pays.

C’est pourquoi nous proposons, dans un esprit de responsabilité, de rétablir 100 millions d’euros de crédits au bénéfice du fonds vert. Si cela permettait à nos collectivités de débloquer des dossiers coincés à la préfecture, ce serait un réel gain.

Nous revenons, toutes et tous, du congrès des maires, qui s’est tenu la semaine dernière. Les maires ont clairement exprimé leurs inquiétudes quant à ces suppressions de crédits. Pour un certain nombre de dossiers, ils misaient sur ce levier de financement, dont ils ne pourront bénéficier faute de crédits. Des projets de transition écologique dans les territoires sont, au mieux, reportés et, au pire annulés : ce n’est pas tenable.

Rétablissons au moins la moitié des crédits annulés : il en est encore temps !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Les crédits supprimés l’ont été parce qu’ils n’auraient pas été dépensés avant la fin de l’année. L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Il s’agit en effet d’un ajustement par rapport aux prévisions de décaissement, sans aucune baisse d’ambition.

À l’occasion de l’examen du PLF, nous pourrons reparler du fonds vert, qui représente 1 milliard d’euros d’autorisations d’engagement en 2025. Attention à bien distinguer le freinage de la dépense publique d’une baisse d’ambition : le fonds vert n’existait pas il y a encore quelques années. C’est le ministre Christophe Béchu qui l’a instauré. (M. Olivier Paccaud proteste.) Je rappelle que nous parlons d’un milliard d’euros : on ne peut pas dire que l’État n’est pas ambitieux.

Je l’ai dit à l’occasion de la discussion générale du projet de loi de finances pour 2025 : les crédits du budget vert, que vous pouvez consulter dans les annexes, n’auront jamais été aussi élevés qu’en 2025. Bien entendu, nous pouvons toujours discuter des priorités qu’il faudrait fixer au sein de ce budget.

En tout cas, l’annulation des 65 millions d’euros de crédits de paiement est la conséquence de l’ajustement des décaissements sur l’année 2024.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée, pour explication de vote.

Mme Ghislaine Senée. Je vous rappelle que le fonds vert devait être porté, à l’origine, à 2,5 milliards d’euros ! Et nous devrions nous réjouir qu’il atteigne 1 milliard… Il y a, très clairement, un problème d’ambition. La tendance est systématiquement à la baisse.

De surcroît, pour montrer son engagement sur le fonds vert, le Président de la République avait annoncé une augmentation de 500 millions d’euros pour permettre aux collectivités locales de rénover en profondeur leurs écoles, c’est-à-dire une goutte d’eau ! Mais à force de supprimer ces abondements, on part d’une annonce à 2,5 milliards d’euros pour finir avec un budget à 1 milliard. Vous jugez peut-être que c’est ambitieux. Pour notre part, nous trouvons la tendance catastrophique.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 17.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 18, présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Mission « Écologie, développement et mobilité durables »

I. – Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

Infrastructures et services de transports

 

 

 

 

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

 

 

 

 

Prévention des risques

dont titre 2

100 000 000

 

100 000 000

 

Énergie, climat et après-mines

 

 

 

 

Service public de l’énergie

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires

 

 

 

 

TOTAL

100 000 000

 

100 000 000

 

SOLDE

+ 100 000 000

+ 100 000 000

 

II. – Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Infrastructures et services de transports

 

 

 

 

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

 

 

 

 

Prévention des risques

dont titre 2

 

 

 

 

Énergie, climat et après-mines

 

 

 

 

Service public de l’énergie

100 000 000

 

100 000 000

 

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires

 

 

 

 

TOTAL

100 000 000

 

100 000 000

 

SOLDE

+ 100 000 000

+ 100 000 000

La parole est à Mme Ghislaine Senée.

Mme Ghislaine Senée. Nous proposons d’abonder le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier, de 100 millions d’euros supplémentaires. Notre objectif est de promouvoir une politique de prévention des risques contre les catastrophes naturelles véritablement efficace.

Nous le savons, 1 euro investi en prévention représente en moyenne 3 euros gagnés en cas de catastrophe naturelle. C’est pourquoi toute économie réalisée aujourd’hui sur le fonds Barnier se paiera trois fois plus cher dans les années à venir. Ce constat est d’autant plus vrai au regard de l’accélération du changement climatique et de la hausse du nombre de catastrophes naturelles.

Nous avons évoqué l’importance de ce fonds il y a quelques semaines, dans cet hémicycle, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi visant à assurer l’équilibre du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles de Mme Lavarde.

Alors que 18,5 millions de Français sont concernés par les risques d’inondation et que 10,4 millions de maisons individuelles sont exposées au phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA), il est nécessaire d’agir pour la protection de nos concitoyens et de les accompagner dans une démarche de prévention et d’adaptation au risque.

Nous proposons donc, par cet amendement, d’augmenter les crédits consacrés à la prévention de 100 millions d’euros. Dans le contexte des inondations qui ont laissé tant de personnes sinistrées ces deux dernières années, il y a urgence à agir.

J’en profite pour dire combien la réforme de 2021 de ce fonds, qui n’en est plus un, d’un point de vue formel, est préjudiciable pour notre avenir climatique. En effet, depuis que le fonds Barnier a été intégré au budget de l’État, les crédits qui n’ont pas été consommés au cours de l’année ne peuvent plus être utilisés l’année suivante.

Cette situation est d’autant plus regrettable que la part prélevée sur la prime des contrats d’assurance dite surprime CatNat, fléchée sur le fonds Barnier, passera de 12 % à 20 % au mois de janvier 2025. Or cette prime peut être utilisée pour une tout autre finalité !

J’espère que le Gouvernement acceptera de revenir sur cette disposition et de conserver les crédits non consommés qui seront malheureusement indispensables dans les années à venir. Nous en reparlerons à l’occasion de l’examen du PLF.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je suis parfaitement d’accord avec la fin de votre propos et je partage votre préoccupation.

Je ne pense pas que les 100 millions d’euros dont vous proposez d’abonder le fonds Barnier pourraient être dépensés avant la fin de l’année.

Toutefois, je rappelle que nous avons voté en commission une augmentation de ce fonds. Elle me paraît indispensable.

Je m’étais en effet inquiété de la baisse de ce fonds – mais on ne gagne pas tous les combats ! Je ne dis pas cela parce que M. Barnier est devenu Premier ministre, mais un travail d’ampleur doit être mené sur le sujet. Nous aurons l’occasion d’en reparler très rapidement.

L’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. D’abord, la capacité de l’État à financer les urgences liées aux inondations que vous avez mentionnées d’ici à la fin de l’année 2024 ne fait aucun doute.

Ensuite, concernant l’année 2025, votre amendement est satisfait puisque les crédits alloués au fonds Barnier augmenteront de 300 millions d’euros. Vous insistez à juste titre sur la nécessité d’abonder ce fonds et c’est précisément ce que prévoit le PLF pour 2025.

Je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 18.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 22, présenté par M. Capo-Canellas, est ainsi libellé :

Mission « Écologie, développement et mobilité durables »

I. – Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

Infrastructures et services de transports

 

 

 

 

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

6 500 000

 

6 500 000

 

Prévention des risques

dont titre 2

 

 

 

 

Énergie, climat et après-mines

 

 

 

 

Service public de l’énergie

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires

 

 

 

 

TOTAL

6 500 000

 

6 500 000

 

SOLDE

+ 6 500 000

+ 6 500 000

 

II. – Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Infrastructures et services de transports

 

 

 

 

Affaires maritimes, pêche et aquaculture

 

 

 

 

Paysages, eau et biodiversité

 

 

 

 

Expertise, information géographique et météorologie

 

 

 

 

Prévention des risques

dont titre 2

 

 

 

 

Énergie, climat et après-mines

 

 

 

 

Service public de l’énergie

6 500 000

 

6 500 000

 

Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires

 

 

 

 

TOTAL

6 500 000

 

6 500 000

 

SOLDE

+ 6 500 000

+ 6 500 000

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.

M. Vincent Capo-Canellas. Cet amendement vise à augmenter la subvention à l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) de 6,5 millions d’euros, comme plusieurs députés l’ont proposé par des amendements au PLF pour 2025.

Je suis conscient du contexte budgétaire contraint, mais cette demande est bien justifiée. En effet, la très forte détérioration des finances de l’IGN met en cause son équilibre et rendra difficile le vote de son budget, au risque d’appeler à des financements par douzièmes.

L’IGN est un opérateur de référence sur la donnée géolocalisée et bénéficie d’une réputation mondiale. Il œuvre ainsi dans un domaine central pour les évolutions économiques de demain.

Comment expliquer l’impasse dans laquelle se trouve l’Institut ? La politique de l’open data permet au grand public d’utiliser les travaux produits par l’IGN, sans qu’aucune compensation ait jamais été prévue.

Dans mon rapport Acteur de référence de la donnée géolocalisée souveraine, lIGN avance sur un chemin à baliser de 2022, je signalais le risque de trou d’air, la subvention représentant environ 50 % du budget de l’IGN. En pratique, donc, l’IGN subsiste grâce aux commandes des ministères.

Au-delà de ce trou d’air que je pressentais, et dont nous avons constaté les effets dès l’an dernier, l’inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd) estime nécessaire un rebasage du budget de l’IGN à hauteur de 15 millions d’euros.

Aussi, malgré les contraintes budgétaires que nous connaissons, je profite de l’examen du projet de loi de finances de fin de gestion pour sonner dès à présent l’alerte, car le PLF ne semble pas présenter de piste pour résoudre cette difficulté pourtant importante.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

Monsieur le ministre, sachez que Vincent Capo-Canellas est rapporteur pour avis du programme « Expertise, information géographique et météorologie » du PLF pour 2025. Il est un véritable orfèvre du budget, sur lequel il mène un travail de précision. Aussi, s’il en est arrivé à ce niveau de détail, c’est que le problème qu’il soulève est d’importance. Prenons garde à ne pas mettre l’IGN en difficulté.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. C’est un sujet que nous regardons bien entendu de près. Aux yeux du Gouvernement, les crédits de l’IGN devraient suffire pour finir l’année 2024.

En revanche, comme vous l’avez sans doute vu dans les documents budgétaires, le PLF pour 2025 prévoit un rehaussement des crédits de l’IGN à hauteur de 4,5 millions d’euros.

Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le ministre, j’entends vos propos, mais la progression de la masse salariale, à elle seule, consommera ces 4 millions d’euros supplémentaires.

Ce sont les services du Gouvernement, au travers de l’Igedd, qui ont identifié un déficit de 15 millions d’euros. Le rapport de l’inspection met en évidence une forme de fuite en avant, masquée par le fait que la trésorerie de l’IGN est largement abondée par les commandes des différents ministères.

Ces 4 millions d’euros et quelques ne vont rien régler.

C’est donc un amendement d’appel. J’invite le Gouvernement à se pencher sur ce problème.

D’une part, il faut s’assurer que les ministères qui s’étaient engagés auprès de l’IGN tiennent bien parole. Leurs commandes représentent la moitié du budget de l’Institut : nous devons instaurer des systèmes de convention garantissant ces financements.

D’autre part, le rebasage de 15 millions est une nécessité. C’est l’Igedd qui l’affirme.

Le conseil d’administration de l’IGN risque de ne pas voter le budget pour l’année prochaine. Dès le mois d’octobre, l’Institut n’aura plus de quoi payer son personnel…

Par cet amendement d’appel, je souhaitais donc exposer ce problème. Je suis prêt à participer à des discussions plus profondes sur le sujet, car nous ne pouvons laisser la situation perdurer. Or ces 4 millions d’euros supplémentaires ne changeront strictement rien.

Pour autant, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 22 est retiré.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 20 rectifié quater est présenté par M. Chaize, Mme Jacques, MM. Mandelli et D. Laurent, Mme Belrhiti et MM. Milon, Michallet et Genet.

L’amendement n° 24 rectifié ter est présenté par Mme Saint-Pé, MM. Courtial, Marseille et Parigi et Mmes Perrot, Sollogoub et Antoine.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Mission « Économie »

I. Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

Développement des entreprises et régulations

dont titre 2

15 000 000

 

15 000 000

 

Plan France Très haut débit

 

 

 

 

Statistiques et études économiques

dont titre 2

 

 

 

 

Stratégies économiques

dont titre 2

 

 

Financement des opérations patrimoniales en 2024 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État »

 

 

 

 

TOTAL

15 000 000

15 000 000

SOLDE

+ 15 000 000

+ 15 000 000

 

II. Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Développement des entreprises et régulations

dont titre 2

 

 

Plan France Très haut débit

 

 

 

 

Statistiques et études économiques

dont titre 2

 

 

 

 

Stratégies économiques

dont titre 2

 15 000 000

15 000 000 

Financement des opérations patrimoniales en 2024 sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État »

 

 

 

 

TOTAL

15 000 000

15 000 000

SOLDE

+ 15 000 000

+ 15 000 000

 

La parole est à Mme Micheline Jacques, pour présenter l’amendement n° 20 rectifié quater.

Mme Micheline Jacques. Cet amendement de notre collègue Patrick Chaize vise à abonder de 15 millions d’euros l’action n° 04 « Développement des postes, des télécommunications et du numérique » afin de rétablir les crédits de la mission « Aménagement du territoire ».

En effet, la loi impose à La Poste le maintien des 17 000 agences postales, assurant ainsi un service public de proximité dans les territoires isolés. En contrepartie, le Gouvernement s’est engagé à verser à La Poste une compensation financière de 174 millions d’euros. En ponctionnant cette compensation de 50 millions d’euros, l’État ne respecte pas son engagement envers La Poste et l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) avec lesquels il a signé le contrat de présence postale.

Force est de constater que le Gouvernement tend à se désengager par un tour de passe-passe budgétaire. L’État se doit d’honorer sa parole.

Mme la présidente. La parole est à Mme Denise Saint-Pé, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié ter.

Mme Denise Saint-Pé. Dans le droit fil des propos de Mme Jacques, j’appelle à mon tour l’État à honorer ses engagements.

La présence postale sur tous les territoires français est absolument indispensable. C’est un enjeu d’équité, de solidarité et d’équilibre social.

J’espère donc que M. le ministre et M. le rapporteur général émettront un avis favorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?-

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La question de la compensation assurée par le Gouvernement doit en effet se poser. Pour autant, les auteurs de ces deux amendements n’évoquent pas la promesse du Premier ministre de ne pas amputer le contrat de présence postale de 50 millions d’euros.

Il me paraîtrait plus approprié de revenir sur cette question dans le cadre de l’examen du PLF pour 2025. Je m’associe néanmoins aux demandes légitimes de mes collègues. J’ai proposé, en commission des finances, aux deux rapporteurs qui déposaient un amendement similaire aux vôtres de le retirer, afin de présenter un amendement à la fois différent dans sa forme et plus ambitieux.

Un temps de débat sur La Poste est nécessaire, car il est important de placer le curseur au juste niveau des besoins.

Je demande le retrait de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le Gouvernement partage vos inquiétudes concernant le groupe La Poste.

Nous étions prêts à émettre un avis favorable sur ces amendements de rehaussement de crédits. Cependant, les arguments du rapporteur général me paraissent tout à fait fondés. Si le groupe La Poste peut assumer la fin de gestion de l’année 2024 pour son maillage territorial, nous pourrions envisager de débattre de ce sujet dans le cadre du PLF pour 2025.

Je demande également le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable. Le Gouvernement s’engage néanmoins à reporter cet effort dans le PLF pour 2025, afin de couvrir les besoins du maillage territorial et d’éviter de laisser les territoires les plus fragiles de côté.

Mme la présidente. Madame Micheline Jacques., l’amendement n° 20 rectifié quater est-il maintenu ?

Mme Micheline Jacques. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié quater est retiré.

Madame Denise Saint-Pé, l’amendement n° 24 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Denise Saint-Pé. J’ai bien entendu les propos de M. le ministre et de M. le rapporteur général. Je retire mon amendement, à condition que l’examen du PLF pour 2025 soit bien l’occasion d’évoquer les besoins du groupe La Poste, mais aussi, plus généralement, ceux de la population française.

Mme la présidente. L’amendement n° 24 rectifié ter est retiré.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 27, présenté par M. Husson, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Mission « Investir pour la France de 2030 »

Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Soutien des progrès de l’enseignement et de la recherche

 

 

 

 

Valorisation de la recherche

 

 

 

 

Accélération de la modernisation des entreprises

186 000 000

 

186 000 000

 

Financement des investissements stratégiques

 

 

 

 

Financement structurel des écosystèmes d’innovation

114 000 000

 

114 000 000

 

TOTAL

300 000 000

 

300 000 000

 

SOLDE

+ 300 000 000

+ 300 000 000

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à annuler les reliquats des crédits des programmes d’investissements d’avenir (PIA) 1 à 3, à hauteur de 300 millions d’euros.

Par son amendement n° 23, le Gouvernement propose d’ailleurs de réallouer ces reliquats sans même consulter le Parlement. Tiens donc ! Nous préférons procéder dans le bon ordre.

Je propose donc l’annulation de ces 300 millions d’euros de crédits. Le Gouvernement pourra ensuite repasser devant le Parlement pour réallouer ces crédits.

Mme la présidente. L’amendement n° 23, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Mission « Investir pour la France de 2030 »

I. Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

Soutien des progrès de l’enseignement et de la recherche

 

 

 

 

Valorisation de la recherche

 

 

 

 

Accélération de la modernisation des entreprises

 

 

 

 

Financement des investissements stratégiques

 

 

 

 

Financement structurel des écosystèmes d’innovation

186 000 000

 

186 000 000

 

TOTAUX

186 000 000

 

186 000 000

 

SOLDE

+ 186 000 000

+ 186 000 000

 

 II. Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Soutien des progrès de l’enseignement et de la recherche

 

 

 

 

Valorisation de la recherche

 

 

 

 

Accélération de la modernisation des entreprises

186 000 000

 

186 000 000

 

Financement des investissements stratégiques

 

 

 

 

Financement structurel des écosystèmes d’innovation

 

 

TOTAUX

186 000 000

 

186 000 000

 

SOLDE

+ 186 000 000

+ 186 000 000

La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Monsieur le rapporteur général, il y a tout de même une différence sensible entre votre amendement et celui du Gouvernement. En effet, nous souhaiterions redéployer les crédits entre les PIA et France 2030, tandis que vous proposez simplement de les supprimer !

J’attire votre attention sur l’importance du plan France 2030, que nous soumettons déjà à un effort important, tant en matière de trésorerie que de lissage de programmes, au travers de ce PLFG 2024 et du PLF pour 2025. Nous demandons déjà à France 2030 le maximum possible sans risquer de trop grever les investissements d’avenir.

Nous sommes nombreux ici à reconnaître l’importance de faire des économies sans pour autant compromettre les investissements de demain. Or France 2030 permet d’investir dans la recherche, le développement et l’innovation dans des secteurs prioritaires pour l’avenir.

Si nous cassons net la dynamique d’investissement, nous risquons d’envoyer le message récessif que nous craignons tant.

Préservons donc un quantum d’investissement pour l’avenir, en nous assurant que ni la fin de gestion 2024 ni le budget pour 2025 ne freinent la croissance de demain. Au contraire, nous devons garder des crédits d’investissement, notamment pour les innovations de rupture.

C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 27.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous touchons finalement ici la difficulté des programmes directement à la main de l’État.

Nous avons auditionné le secrétaire général pour l’investissement (SGPI), qui est chargé de la mise en œuvre de France 2030. À cette occasion, les membres de la commission ont eu le sentiment que le rôle de la représentation nationale se réduisait à constater les dépenses. Soyons vigilants. Dans ce projet comme dans les autres, il est nécessaire de remettre les compteurs à zéro. Nous avons intérêt à échanger collectivement sur les projets de ce type, pour décider, s’il le faut, de les recalibrer.

En effet, en nous prononçant sur les investissements d’avenir, tels que ceux qui sont engagés dans le cadre de France 2030, nous devons aussi prendre en compte les enjeux relatifs, d’une part, à l’aménagement du territoire, et, d’autre part, à la qualification et à la formation des femmes et des hommes qui réalisent ces projets.

J’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 23.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 27.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 23 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 26, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Mission « Pouvoirs publics »

Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

Présidence de la République

 

 

 

 

Assemblée nationale

9 006 627 

9 006 627 

Sénat

 

 

 

 

La Chaîne parlementaire

 

 

 

 

Indemnités des représentants français au Parlement européen

 

 

 

 

Conseil constitutionnel

 

 

 

 

Haute Cour

 

 

 

 

Cour de justice de la République

 

 

 

 

TOTAL

9 006 627 

9 006 627 

SOLDE

- 9 006 627

- 9 006 627

 

La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Cet amendement, déposé avec l’aval des questeurs de l’Assemblée nationale, prévoit de minorer la dotation de l’Assemblée nationale pour 2024 afin de tenir compte de la révision à la baisse du coût lié à la dissolution. Cela représente une économie d’un peu plus de 9 millions d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Sagesse !

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.

Mme Isabelle Briquet. Je suis pour ma part assez surprise par cet amendement. L’exposé des motifs précise : « La présidente et le collège des questeurs de l’Assemblée nationale ont exprimé le souhait que le montant de la dotation complémentaire demandé pour l’exercice 2024 corresponde, au plus près, aux charges supplémentaires effectivement supportées du seul fait de la dissolution. » Cela revient finalement à minorer la dotation complémentaire inscrite au programme « Assemblée nationale » de la mission « Pouvoirs publics ».

Je suis surprise qu’il revienne à notre chambre de se prononcer sur les crédits destinés à l’Assemblée nationale. J’imagine mal, à l’inverse, nos questeurs et notre président demander à l’Assemblée nationale de minorer la dotation du Sénat…

Mon groupe ne prendra pas part au vote sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. C’est une très bonne remarque. Permettez-moi de vous apporter deux éléments de réponse.

D’abord, la réunion des questeurs a eu lieu après le vote du PLFG à l’Assemblée nationale. C’est la raison pour laquelle cet amendement devait être examiné au Sénat.

Ensuite, il ne vous aura pas échappé que cette partie du PLFG n’a pas été examinée à l’Assemblée nationale. Cet amendement n’aurait donc pas pu y être débattu.

Vous aurez, néanmoins, l’occasion d’en discuter avec les députés lors de la commission mixte paritaire. (M. Victorin Lurel sexclame.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par M. Husson, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Mission « Relations avec les collectivités territoriales »

Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

 

70 000 000

 

70 000 000

Concours spécifiques et administration

 

 

 

 

TOTAL

 

70 000 000

 

70 000 000

SOLDE

- 70 000 000

- 70 000 000

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre, il vous appartient de faire mentir l’adage « jamais deux sans trois » !

Il y a deux ans, nous avions voté, avec l’aval du Gouvernement, 50 millions d’euros d’aides à destination des collectivités territoriales afin de leur permettre de développer leur réseau routier.

Manque de chance, lors de la loi de règlement, nous avons découvert que la promesse n’avait pas été tenue. En raison d’une bizarrerie administrative, l’aide avait été affectée au réseau routier national – dans les directions interdépartementales des routes (DIR), chacun s’en était réjoui et avait trouvé cela formidable !

J’ai donc évoqué le sujet une nouvelle fois à l’occasion du PLFG pour 2023, pour laisser au Gouvernement une chance de se racheter. Inflation oblige, l’aide était passée de 50 millions d’euros à 60 millions.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Ce sont les taux d’intérêt !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Non, ce ne sont pas les taux d’intérêt !

Nous devons faire respecter les mesures que nous votons. Cette fois, les crédits avaient été fléchés minutieusement. Mais, nouveau manque de chance, des décrets ont pour l’essentiel supprimé la promesse faite au Parlement si peu de temps avant. Quelque 11 millions d’euros ont été fléchés sur la dotation de solidarité en faveur de l’équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des évènements climatiques ou géologiques (DSECG). Convenez qu’il est regrettable, et même un peu énervant, que le Gouvernement ne respecte pas un engagement qu’il a pourtant pris devant le Parlement !

Tenez donc parole, cette fois. C’est le seul amendement que j’ai déposé en ce sens. Vous avez eu droit à l’erreur, puis au remords. Vous avez maintenant une chance de tenir votre promesse !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Sagesse.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Très bien ! Merci.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 21, présenté par M. Bazin, est ainsi libellé :

Mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »

I. – Modifier ainsi les ouvertures de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

+ (majorer l’ouverture de)

- (minorer l’ouverture de)

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

23 000 000

 

23 000 000

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

23 000 000

 

23 000 000

 

SOLDE

+ 23 000 000

+ 23 000 000

 

II. – Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

dont titre 2

23 000 000

 

23 000 000

 

TOTAL

23 000 000

 

23 000 000

 

SOLDE

+ 23 000 000

+ 23 000 000

La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Nous avons évoqué, tout à l’heure, une dépense imposée aux départements sans les 170 millions d’euros de financement nécessaires. Je veux maintenant parler d’une dépense de 23 millions d’euros imposée aux établissements et services d’aide par le travail (Ésat) au titre de la complémentaire maladie.

La situation financière de ces établissements est mauvaise, plusieurs rapports le montrent – elle est même critique pour un tiers d’entre eux.

La loi du 18 décembre 2023 pour le plein emploi a imposé aux Ésat de proposer une complémentaire santé à leurs usagers. Cette mesure a été approuvée par les associations, mais le problème, c’est qu’elle n’est pas financée. Le rapport conjoint réalisé par l’inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’inspection générale des finances (IGF) en février dernier indique que cette obligation risquerait de faire passer la proportion d’Ésat en difficulté de 29 % à plus de 40 %. En outre, 78 % de ces établissements estiment que ces difficultés financières auront un effet sur la qualité de leur prise en charge des personnes handicapées.

Il vous est proposé, par cet amendement, de permettre à l’État de financer à hauteur de 50 % la part employeur, soit 25 % de la dépense totale de cette complémentaire santé. Cela représente un montant de 23 millions d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement soulève la question des dépenses liées à la prise en charge du handicap, qui représentent un poste de dépenses important pour les régions.

Plus globalement, nous devons permettre la prise en charge à hauteur de 50 % de la complémentaire santé des fonctionnaires territoriaux, à l’image des mesures relatives aux ressources des départements que nous avons prévues dans le cadre du PLF pour 2025. C’est la raison pour laquelle, comme je l’ai expliqué dans mon propos liminaire, la discussion des articles de ce PLFG comporte si peu d’amendements.

Je demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Si je vous demande également de retirer votre amendement, ce n’est pas parce que je suis en désaccord sur le montant représenté par cette mesure ou sur l’importance de la politique publique en question.

Dans leur mission, l’Igas et l’IGF préconisent précisément un certain temps d’expertise et de contractualisation, afin de garantir des solutions bien plus pérennes que ce que nous autorise le PLFG pour 2024. Je suis bien entendu favorable à nombre de recommandations de ce rapport.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. Outre l’objectif affiché, cet amendement vise à dénoncer, une fois de plus, les dépenses supplémentaires imposées aux partenaires et opérateurs de l’État sans leur apporter les financements nécessaires. Je sais que cela sonnera comme une rengaine…

Cet amendement a également pour objet d’attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la situation des Ésat. C’est une des fiertés du modèle français que de permettre aux personnes handicapées, parfois lourdement, de s’insérer par le travail. Or les Ésat sont en danger. Leur situation financière est préoccupante. Le déséquilibre aggravé par cette mesure ne restera pas sans conséquence.

Nous aurons certainement l’occasion de revenir sur ce sujet lors de l’examen du PLF. Néanmoins, le déséquilibre financier des Ésat a commencé dès l’année 2024. Cette dimension devra donc être prise en compte dans le PLF pour 2025. Toutefois, par esprit de responsabilité, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 21 est retiré.

L’amendement n° 25, présenté par M. Delcros, est ainsi libellé :

Mission « Sport, jeunesse et vie associative »

Modifier ainsi les annulations de crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

+ (majorer l’annulation de)

- (minorer l’annulation de)

Sport

dont titre 2

20 000 000

20 000 000

Jeunesse et vie associative

dont titre 2

 

20 000 000

 

20 000 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

 

La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. Cet amendement vise à permettre le financement des services civiques en fin d’année.

En effet, le décret du 21 février 2024 a annulé 100 millions d’euros de crédits destinés aux services civiques. Cette réduction place aujourd’hui l’Agence du service civique et les associations dans l’incapacité de tenir leurs engagements vis-à-vis des jeunes qui participent à ce dispositif.

L’adoption de cet amendement permettrait de sécuriser les financements des missions déjà engagées pour garantir qu’elles puissent être menées à terme. Pour cela, nous proposons d’abonder l’action n° 04 du programme 163 « Jeunesse et vie associative » à hauteur de 20 millions d’euros.

Le service civique connaît un grand succès. Il serait regrettable, pour les jeunes comme pour les associations qui les accueillent, de réduire la portée de ce dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je m’inquiète également de la situation critique, en fin de cette année, de la trésorerie de l’Agence du service civique. Quelque 20 millions d’euros lui manqueraient pour terminer la gestion pour 2024.

La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. L’annulation des 100 millions d’euros de crédits de l’Agence du service civique, décidée par décret, n’a pas remis en cause l’atteinte de l’objectif fixé en 2024 de 150 000 jeunes.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. J’entends bien la réaction de M. le ministre. Cependant, pour suivre de près ce dossier avec la présidente de l’Agence du service civique, je puis vous dire que ces sommes seront extrêmement utiles pour boucler correctement l’année.

Mon groupe soutiendra l’amendement de M. Delcros. Le service civique doit être sécurisé. Nous débattrons, le moment venu, sur l’avenir du service national universel (SNU), qu’un récent rapport de la Cour des comptes, notamment, a remis en cause.

En revanche, le service civique est source d’une grande satisfaction, notamment de la part des élus locaux, qui utilisent ce dispositif sur des missions nouvelles au sein des collectivités territoriales. Aussi, tout ce qui peut concourir à sécuriser le service civique est une bonne chose.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.

M. Bernard Delcros. Je précise que le prélèvement de 100 millions d’euros que j’ai mentionné ne permet pas de répondre aux demandes des jeunes pour cette fin d’année 2024.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 25.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 16, présenté par Mme Senée, MM. G. Blanc, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Mission « Travail et emploi »

Modifier ainsi les annulations des crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

68 000 000

37 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

68 000 000

37 000 000

SOLDE

-68 000 000

-37 000 000

La parole est à Mme Ghislaine Senée.

Mme Ghislaine Senée. Cet amendement vise à rétablir les crédits annulés du programme « Accès et retour à l’emploi » qui concernaient les missions locales.

Le décret du 21 février 2024 a définitivement asséché le parcours contractualisé d’accompagnement adapté vers l’emploi et l’autonomie (Pacea) qui vise à conseiller les jeunes en situation d’exclusion sociale pour soutenir leur retour à l’emploi et sécuriser leur autonomie financière.

Ce dispositif, indispensable outil de lutte contre la pauvreté, constitue une aide directe pour les jeunes, auxquels il permet parfois d’avoir un déclic.

Les missions locales n’ont peut-être pas été remises en cause concrètement par l’annulation de ces crédits. Toutefois, nous avons besoin de les accompagner, ainsi que nous le verrons lors de l’examen du PLF. En effet, les missions locales sont cofinancées par l’État, les régions et le bloc communal. Lorsqu’elles sont mises en défaut par l’annulation de crédits budgétaires, ce sont là encore les collectivités locales qui doivent en assurer la charge.

La coupure brutale des crédits en février dernier a provoqué le gel des budgets du Pacea dès la moitié de l’année. Aujourd’hui, des jeunes sont en situation d’urgence absolue ! Les missions locales devraient pouvoir reprendre d’urgence ce dispositif, même seulement pendant le mois de décembre, car ce moment est très compliqué pour les jeunes qui sont le plus en situation de pauvreté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mme la sénatrice l’a rappelé, l’annulation de ces crédits n’a pas créé de tensions cette année, à moins de quelques cas particuliers qui doivent être traités autrement que par le biais d’un PLF de fin de gestion.

En quatre ans, entre 2020 et 2024, les crédits des missions locales ont significativement augmenté, passant de 372 millions d’euros à 623 millions d’euros. En outre, il me semble qu’il y a parfois eu des crédits non consommés.

Notre ancienne collègue Mme Taillé-Polian avait rendu un rapport d’information sur les missions locales. Il ne me semble pas que l’urgence commande de réaffecter des crédits dans le cadre du projet de loi de finances de fin de gestion.

Aussi, même si cela ne signifie pas que j’approuve complètement les mesures prises dans le décret du 21 février dernier, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 16.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 4 et de l’état B annexé, modifié.

(Larticle 4 et létat B annexé sont adoptés.)

Article 4
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 6

Article 5

Il est annulé pour 2024, au titre des budgets annexes, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 25 369 750 € et de 37 701 937 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état C annexé à la présente loi.

État C

REPARTITION DES CREDITS POUR 2024 OUVERTS/ANNULES, PAR MISSION ET PROGRAMME, AU TITRE DES BUDGETS ANNEXES

BUDGETS ANNEXES

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d’engagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations d’engagement annulées

Crédits de paiement annulés

Contrôle et exploitation aériens

23 800 000

36 250 000

Soutien aux prestations de l’aviation civile

17 000 000

18 000 000

dont charges de personnel

16 000 000

16 000 000

Navigation aérienne

6 300 000

15 500 000

Transports aériens, surveillance et certification

500 000

2 750 000

Publications officielles et information administrative

1 569 750

1 451 937

Pilotage et ressources humaines

1 569 750

1 451 937

dont charges de personnel

1 451 937

1 451 937

Total

25 369 750

37 701 937

 – (Adopté.)

Article 5
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article liminaire (pour coordination)

Article 6

I. – Il est ouvert aux ministres, pour 2024, au titre des comptes d’affectation spéciale, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement aux montants de 134 337 891 € et de 134 337 891 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

II. – Il est annulé pour 2024, au titre des comptes d’affectation spéciale, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 70 521 745 € et de 40 671 167 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

III. – Il est ouvert aux ministres, pour 2024, au titre des comptes de concours financiers, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant respectivement aux montants de 231 739 000 € et de 231 739 000 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

IV. – Il est annulé pour 2024, au titre des comptes de concours financiers, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 2 002 708 029 € et de 2 016 108 029 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état D annexé à la présente loi.

État D

REPARTITION DES CREDITS POUR 2024 OUVERTS/ANNULES, PAR MISSION ET PROGRAMME, AU TITRE DES COMPTES SPECIAUX

I. – COMPTES D’AFFECTATION SPÉCIALE

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d’engagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations d’engagement annulées

Crédits de paiement annulés

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

134 337 891

134 337 891

Désendettement de l’État

134 337 891

134 337 891

Gestion du patrimoine immobilier de l’État

70 521 745

40 671 167

Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État

70 521 745

40 671 167

Total

134 337 891

134 337 891

70 521 745

40 671 167

 

II. – COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d’engagement supplémentaires ouvertes

Crédits de paiement supplémentaires ouverts

Autorisations d’engagement annulées

Crédits de paiement annulés

Avances à l’audiovisuel public

539 000

539 000

31 210 838

31 210 838

ARTE France

150 000

150 000

France Médias Monde

1 060 846

1 060 846

Institut national de l’audiovisuel

162 000

162 000

TV5 Monde

377 000

377 000

Programme de transformation

29 999 992

29 999 992

Avances aux collectivités territoriales

231 200 000

231 200 000

Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie

231 200 000

231 200 000

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

1 300 000

1 300 000

Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise de la covid-19 ou par le conflit en Ukraine

1 300 000

1 300 000

Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

1 970 197 191

1 983 597 191

Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

1 800 000 000

1 800 000 000

Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

13 400 000

Prêts et avances à des services de l’État

155 197 191

155 197 191

Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex

15 000 000

15 000 000

Total

231 739 000

231 739 000

2 002 708 029

2 016 108 029

 – (Adopté.)

Demande de coordination

Mme la présidente. En application de l’article 47 bis, alinéa 3, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une coordination de l’article liminaire, ainsi que de l’article d’équilibre, article 3 et état A, du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024.

Quel est l’avis de la commission sur cette demande de coordination ?

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Avis favorable.

Mme la présidente. Je consulte le Sénat sur cette demande de coordination formulée par le Gouvernement et acceptée par la commission.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Le renvoi pour coordination est ordonné.

Nous allons procéder à la coordination.

Dans l’attente de la distribution de ces amendements, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures quinze.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 6
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article liminaire

Article liminaire (pour coordination)

Mme la présidente. Le Sénat a précédemment adopté l’article liminaire dans la rédaction suivante.

Article liminaire (pour coordination)
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 3 (pour coordination) (début)

Article liminaire

(Conforme)

Mme la présidente. L’amendement n° COORD-1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi le tableau

(En points de produit intérieur brut, sauf mention contraire)

Loi de finances de fin de gestion pour 2023

LPFP 2023-2027*

2023

2024

2024

Ensemble des administrations publiques

Solde structurel (1) (en point de PIB potentiel)

-5,1

-5,7

-3,7

Solde conjoncturel (2)

-0,3

-0,4

-0,6

Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3)

-0,1

-0,1

-0,1

Solde effectif (1+2+3)

-5,5

-6,1

-4,4

Dette au sens de Maastricht

109,9

112,8

109,7

Taux de prélèvements obligatoires (y.c UE nets des CI)

43,2

42,8

44,1

Dépense publique (hors CI)

56,4

56,8

55,3

Dépense publique (hors CI, en Md€)

1591

1658

1622

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%)1

-1,0

2,1

0,5

Principales dépenses d’investissement (en Md€)2

25

30

30

Administrations publiques centrales

Solde

-5,5

-5,4

-4,7

Dépense publique (hors CI, en Md€)

646

654

639

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%)3

-3,9

-0,7

-1,4

Administrations publiques locales

Solde

-0,4

-0,7

-0,3

Dépense publique (hors CI, en Md€)

316

337

322

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%)3

2,4

4,8

0,9

Administrations de sécurité sociales

Solde

0,4

0,0

0,6

Dépense publique (hors CI, en Md€)

738

776

761

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%)3

-0,1

3,2

1,7

Les chiffres en comptabilité nationale relatifs au projet de loi de fin de gestion pour 2024 se réfèrent, pour 2023, au compte publié par l’Insee en comptabilité nationale en base 2020, et pour 2024, aux prévisions du Gouvernement dans la même base. Les prévisions relatives à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 en comptabilité nationale, antérieures au changement de base des comptes nationaux français, étaient relatives à la base antérieure des comptes nationaux, la base 2014.

*Loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

1À champ constant.

2Au sens du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027.

3À champ constant, hors transferts entre administrations publiques.

La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Plusieurs amendements adoptés par le Sénat tendent à modifier le solde budgétaire, qui s’établit désormais à -161,2 milliards d’euros.

L’amendement n° 27 vise à annuler les crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 » à hauteur de 300 millions d’euros, dont 186 millions d’euros sur le programme « Accélération de la modernisation des entreprises » et 114 millions d’euros sur le programme « Financement structurel des écosystèmes d’innovation ».

L’amendement n° 1, présenté par la commission des finances, tend à minorer les annulations de crédit sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » à hauteur de 70 millions d’euros.

L’amendement n° 26, présenté par le Gouvernement, a pour objet de minorer de 9 millions d’euros l’ouverture des crédits du programme « Assemblée nationale » dans la mission « Pouvoirs publics ».

En complément, l’adoption de l’amendement n° 25 du sénateur Delcros a un impact nul sur le solde, puisqu’il est financé par le redéploiement de crédits au sein de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Le présent amendement vise donc à ce que ces amendements adoptés par le Sénat soient pris en compte dans l’article liminaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° COORD-1.

(Lamendement est adopté.)

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

Article liminaire
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
Article 3 (pour coordination) (fin)

Article 3 (pour coordination)

I. – Pour 2024, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :

 

(en millions deuros*)

RESSOURCES

CHARGES

SOLDE

dont fonctionnement

dont fonctionnement

dont investissement

dont investissement

Budget général

Recettes fiscales** / dépenses***

-24 326

-24 326

0

-1 889

-1 870

-19

Recettes non fiscales

+1 009

-763

+1 772

0

0

Recettes totales / dépenses totales

-23 317

-25 089

+1 772

-1 889

-1 870

-19

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de lUnion européenne

+670

+670

Montants nets pour le budget général

-23 987

-25 759

+1 772

-1 889

-1 870

-19

-22 098

Évaluation des fonds de concours et des attributions de produits

0

0

0

0

0

0

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

-23 987

-25 759

+1 772

-1 889

-1 870

-19

Budgets annexes

Contrôle et exploitation aériens

+40

+40

0

-36

-30

-6

+76

Publications officielles et information administrative

+9

+9

0

-1

-1

0

+10

Totaux pour les budgets annexes

+49

+49

0

-38

-31

-6

+86

Évaluation des fonds de concours et des attributions de produits :

- Contrôle et exploitation aériens

0

0

0

0

0

0

- Publications officielles et information administrative

0

0

0

0

0

0

Totaux pour les budgets annexes y compris fonds de concours

+49

+49

0

-38

-31

-6

Comptes spéciaux

Comptes d’affectation spéciale

-2 390

-455

-1 936

+94

+134

-41

-2 484

Comptes de concours financiers

+1 541

0

+1 541

-1 784

0

-1 784

+3 326

Comptes de commerce (solde)

+162

Comptes d’opérations monétaires (solde)

0

Solde pour les comptes spéciaux

+ 1003

Solde général

-21 009

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million deuros le plus proche ; il résulte de lapplication de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

** Recettes fiscales brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

*** Dépenses budgétaires brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

II. – Pour 2024 :

1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :

 

(En milliards deuros)

Besoin de financement

Amortissement de la dette à moyen et long termes

155,1

Dont remboursement du nominal à valeur faciale

151,1

Dont suppléments dindexation versés à léchéance (titres indexés)

4,0

Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau

2,7

Amortissement des autres dettes reprises

0,0

Déficit à financer

161,5

Autres besoins de trésorerie

-3,7

Total

315,6

Ressources de financement

Émission de dette à moyen et long termes nettes des rachats

285,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

6,5

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

34,2

Variation des dépôts des correspondants

-3,0

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

0,0

Autres ressources de trésorerie

-7,1

Total

315,6

2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année et en valeur nominale, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.

Mme la présidente. L’amendement n° COORD-2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Rédiger ainsi le tableau de l’alinéa 1 :

(en millions deuros*)

RESSOURCES

CHARGES

SOLDE

dont fonctionnement

dont fonctionnement

dont investissement

dont investissement

Budget général

Recettes fiscales** / dépenses***

-24 326

-24 326

0

-2 128

-2 109

-19

Recettes non fiscales

+1 009

-763

+1 772

0

0

Recettes totales / dépenses totales

-23 317

-25 089

+1 772

-2 128

-2 109

-19

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de lUnion européenne

+670

+670

Montants nets pour le budget général

-23 987

-25 759

+1 772

-2 128

-2 109

-19

-21 859

Évaluation des fonds de concours et des attributions de produits

0

0

0

0

0

0

Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

-23 987

-25 759

+1 772

-2 128

-2 109

-19

Budgets annexes

Contrôle et exploitation aériens

+40

+40

0

-36

-30

-6

+76

Publications officielles et information administrative

+9

+9

0

-1

-1

0

+10

Totaux pour les budgets annexes

+49

+49

0

-38

-31

-6

+86

Évaluation des fonds de concours et des attributions de produits :

- Contrôle et exploitation aériens

0

0

0

0

0

0

- Publications officielles et information administrative

0

0

0

0

0

0

Totaux pour les budgets annexes y compris fonds de concours

+49

+49

0

-38

-31

-6

Comptes spéciaux

Comptes d’affectation spéciale

-2 390

-455

-1 936

+94

+134

-41

-2 484

Comptes de concours financiers

+1 541

0

+1 541

-1 784

0

-1 784

+3 326

Comptes de commerce (solde)

+162

Comptes d’opérations monétaires (solde)

0

Solde pour les comptes spéciaux

+ 1003

Solde général

-20 770

* Les montants figurant dans le présent tableau sont arrondis au million deuros le plus proche ; il résulte de lapplication de ce principe que le montant arrondi des totaux et sous-totaux peut ne pas être égal à la somme des montants arrondis entrant dans son calcul.

** Recettes fiscales brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

*** Dépenses budgétaires brutes, minorées des remboursements et dégrèvements dimpôts dÉtat (cf. état B, mission « Remboursements et dégrèvements », programme 200).

 

II. – Rédiger ainsi le tableau de l’alinéa 3 :

(En milliards deuros)

Besoin de financement

Amortissement de la dette à moyen et long termes

155,1

Dont remboursement du nominal à valeur faciale

151,1

Dont suppléments dindexation versés à léchéance (titres indexés)

4,0

Amortissement de la dette reprise de SNCF Réseau

2,7

Amortissement des autres dettes reprises

0,0

Déficit à financer

161,2

Autres besoins de trésorerie

-3,7

Total

315,3

Ressources de financement

Émission de dette à moyen et long termes nettes des rachats

285,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

6,5

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

33,9

Variation des dépôts des correspondants

-3,0

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

0,0

Autres ressources de trésorerie

-7,1

Total

315,3

La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Cet amendement vise à retracer sur l’article d’équilibre les mesures adoptées par le Sénat.

Comme je l’indiquais, le déficit à financer passe de 161,5 milliards d’euros à 161,2 milliards d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre, par la double grâce des Grecs et du Sénat, à l’issue de l’examen de ce texte le solde sera amélioré de deux milliards d’euros.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Il s’améliore surtout grâce aux Grecs ! (Sourires.)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Oui, j’en conviens, la décision de la Grèce rapporte six fois plus que les mesures votées par le Sénat. (Nouveaux sourires.)

Monsieur le ministre, je vois que, grâce à cette amélioration du solde, qui n’est tout de même pas de l’ordre de l’épaisseur du trait, vous avez le sourire. Nous aussi !

J’émets donc un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° COORD-2.

(Lamendement est adopté.)

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024, modifié.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 78 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 333
Pour l’adoption 232
Contre 101

Le Sénat a adopté.

Article 3 (pour coordination) (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024
 

4

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Article liminaire

Loi de finances pour 2025

Suite de la discussion d’un projet de loi

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale (texte n° 143, rapport n° 144, avis nos 145, 146, 147, 148, 149 et 150).

Nous en sommes parvenus à la discussion de l’article liminaire.

projet de loi de finances pour 2025

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Article 40

Article liminaire

Les prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, les prévisions de solde par sous-secteur, la prévision, déclinée par sous-secteur d’administration publique, de l’objectif d’évolution en volume et la prévision en milliards d’euros courants des dépenses d’administrations publiques, les prévisions de prélèvements obligatoires, de dépenses et d’endettement de l’ensemble des administrations pour l’année 2025, les prévisions pour 2025 de ces mêmes agrégats de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, ainsi que les données d’exécution pour l’année 2023 et les prévisions d’exécution pour l’année 2024 de ces mêmes agrégats, s’établissent comme suit :

(En points de produit intérieur brut, sauf mention contraire)

Loi de finances pour 2025

LPFP 2023-2027*

2023

2024

2025

2025

Ensemble des administrations publiques

Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel)

-5,1

-5,7

-4,8

-3,3

Solde conjoncturel (2)

-0,3

-0,4

-0,4

-0,4

Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel)

-0,1

-0,1

-0,1

-0,1

Solde effectif (1 + 2 + 3)

-5,5

-6,1

-5,2

-3,7

Dette au sens de Maastricht

109,9

112,9

114,7

109,6

Taux de prélèvements obligatoires (y compris Union européenne, nets des crédits d’impôts)

43,2

42,8

43,6

44,4

Dépense publique (hors crédits d’impôt)

56,4

56,8

56,5

55,0

Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros)

1 591

1 658

1 699

1 668

Évolution de la dépense publique hors crédits d’impôts en volume (en %) **

-1,0

2,1

0,7

0,8

Principales dépenses d’investissement (en milliards d’euros) ***

25

30

30

34

Administrations publiques centrales

Solde

-5,5

-5,4

-4,7

-4,3

Dépense publique (hors crédits d’impôts, en milliards d’euros)

646

654

668

658

Évolution de la dépense publique en volume (en %) ****

-3,9

-0,6

1,1

1,9

Administrations publiques locales

Solde

-0,4

-0,7

-0,7

-0,2

Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros)

316

336

343

329

Évolution de la dépense publique hors crédits d’impôt en volume (en %) ****

2,4

4,8

0,2

0,2

Administrations de sécurité sociale

Solde

0,4

0,0

0,2

0,7

Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros)

738

776

795

779

Évolution de la dépense publique hors crédits d’impôt en volume (en %)****

-0,1

3,2

0,6

0,3

Les chiffres en comptabilité nationale relatifs à la loi de finances pour 2025 se réfèrent, pour 2023, au compte publié par lINSEE en comptabilité nationale en base 2020 et, pour 2024 et 2025, aux prévisions du Gouvernement dans la même base. Les prévisions relatives à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 en comptabilité nationale, antérieures au changement de base des comptes nationaux français, étaient relatives à la base antérieure des comptes nationaux, la base 2014.

* Loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

** À champ constant.

*** Au sens de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

**** À champ constant, hors transferts entre administrations publiques.

Mme la présidente. L’amendement n° I-358 rectifié, présenté par M. Capo-Canellas, Mme Romagny, M. Henno, Mme Sollogoub, M. Cambier, Mme Vérien, MM. Canévet, Pillefer, Fargeot et Hingray, Mme Billon et MM. Courtial et Longeot, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2, tableau, quatrième colonne

1° Quatrième ligne

Remplacer le nombre :

-4,8

par le nombre :

-5,1

2° Septième ligne

Remplacer le nombre :

-5,2

par le nombre :

-5,5

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.

M. Vincent Capo-Canellas. Malgré les évolutions du contexte politico-économique, le Gouvernement n’a pas actualisé les prévisions figurant à l’article liminaire du PLF.

Cet amendement vise à ajuster la prévision du solde structurel pour 2025 de -4,8 points à -5,1 points de PIB, pour la rapprocher des estimations de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). En effet, selon cet organisme, le déficit public devrait atteindre 5,3 % du PIB en 2025, la dette publique atteignant 115,1 % du PIB.

Ces prévisions sont jugées plus réalistes que celles qui sont avancées par le Gouvernement. Je propose de les reprendre. Naturellement, il s’agit d’un amendement d’appel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mon cher collègue, il s’agit des éternelles interrogations propres à l’examen des PLF sur les chiffres qui fondent les scénarios de prévision de croissance, et leurs conséquences sur les projections, tant des recettes que des dépenses.

J’ai bien entendu l’alerte que vous donnez. Toutefois, il est curieux de passer par un amendement pour cela, d’autant que nous avons l’un et l’autre rappelé ce point lors de la discussion générale.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le Gouvernement prend en compte et anticipe un éventuel effet récessif de ce budget. Je ne voudrais pas laisser penser que ce sujet a été balayé, car tel n’est pas le cas. Nous avons eu de nombreuses discussions sur ce point avant d’établir le solde de l’article liminaire.

Il faut bien le comprendre, ce budget est un budget d’équilibre. C’est un budget inédit par l’ampleur de son effort, de 60 milliards d’euros. Et nous faisons en sorte de réduire le plus possible son effet récessif.

C’est pourquoi les hausses de prélèvements obligatoires que nous proposons sont exceptionnelles, ciblées et, pour la grande majorité d’entre elles, temporaires. Nous visons surtout la baisse de la dépense publique, et d’abord dans les domaines où celle-ci a fortement augmenté ces dernières années, notamment pour la relance ou pour l’accélération de certaines politiques publiques. Par définition, c’est dans ces domaines que l’effet récessif sera le moindre.

Pour autant, monsieur le sénateur, nous partageons votre vigilance, et je vous remercie de cet amendement d’appel.

Nous devons étudier de façon très fine les réactions des entreprises, notamment celles de certains secteurs industriels, et réagir vite. C’est pour cela que, comme vous l’aurez noté, nous avons des débats sur la compétitivité des entreprises et le niveau de leurs cotisations, de la manière la plus transparente possible.

Le PLF et le PLFSS ont été élaborés avec une très grande attention au maintien de notre politique de l’offre et de l’attractivité, donc de l’emploi.

Nous considérons qu’il n’y a pas matière à changer les soldes définis à l’article liminaire, mais, monsieur le sénateur, nous partageons une même vigilance.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Comme nos débats sont enregistrés, nous pourrons nous référer à ces prévisions le moment venu.

La Commission européenne prévoit également que le déficit sera de 5,3 % du PIB ; Goldman Sachs annonce un déficit de 5,4 % ; et certains économistes vont encore au-delà.

Si j’ai souhaité solennellement appeler votre attention sur ce point, c’est qu’il n’y aurait pas de mal à reconnaître que, aujourd’hui, on ne pourra pas atteindre les 5 % de PIB de déficit en 2025. Et contrairement à ce que vous indiquez, le Gouvernement n’a pas suffisamment pris en compte l’effet récessif.

C’est justement sur la base de cet effet que l’OFCE a établi ses prévisions. L’avis du Haut Conseil des finances publiques relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2025 précise d’ailleurs en creux que le chiffre de 5 % du PIB a été déterminé avant la prise en compte de l’effet récessif…

Il y a un réel questionnement sur ce sujet. Il me semble que, en 2025, il sera nécessaire que le Gouvernement dépose assez rapidement un PLFR pour corriger ses prévisions.

Le sujet est de bien évaluer le comportement des acteurs économiques à la suite des mesures relatives aux dividendes et à la surtaxe d’impôt sur les sociétés. Vous le savez comme moi, chacun étudiera la règle pour voir comment éviter de payer plus. Le rendement fiscal attendu par le Gouvernement est donc tout de même assez aléatoire.

Je soutiens le Gouvernement et je comprends la grande difficulté à laquelle il est confronté, mais il faudra revoir ces prévisions à un moment.

Comme je l’avais annoncé, madame la présidente, je retire cet amendement, mais je voulais tout de même insister sur ce point.

Mme la présidente. L’amendement n° I-358 rectifié est retiré.

M. Grégory Blanc. Je le reprends, madame la présidente !

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° I-358 rectifié bis, présenté par M. Grégory Blanc et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° I-358 rectifié.

Vous avez la parole pour le défendre, mon cher collègue.

M. Grégory Blanc. Monsieur le ministre, selon vous, l’ensemble des mesures du budget n’aura pas d’effet récessif, ou n’en aura que peu. Soit !

L’année dernière, lors de l’examen du projet de loi de finances, nous discutions à partir de certains chiffres, alors même que le Gouvernement disposait d’informations qui, d’entrée de jeu, rendaient le budget caduc…

Il a fallu la mission d’information de la commission des finances sur la dégradation des finances publiques depuis 2023 pour mettre en évidence ce qui apparaît au moins comme un problème de méthode et de gestion. Le rapporteur général de la commission des finances s’est largement exprimé sur ce sujet, tout comme le président de la commission des finances.

Cette année, l’examen du budget commence de manière encore plus critique : d’entrée de jeu, nous savons que les chiffres présents dans cet article liminaire sont fallacieux.

D’une part, il y a le problème des effets récessifs mentionné par Vincent Capo-Canellas. D’autre part, les chiffres sont incompréhensibles les uns par rapport aux autres.

Je ne prendrai qu’un exemple. Lors du débat sur le Plan budgétaire et structurel à moyen terme (PSMT) pour 2025-2029, je faisais déjà remarquer au Gouvernement que ce document prévoit une augmentation du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) en 2025 par rapport à l’année précédente, sans tenir compte ni de l’électrification du parc automobile ni de la baisse des prix du pétrole prévue par les analystes.

Le ministre m’a alors répondu qu’il y aurait un surplus de croissance en 2025. Très bien, mais, dans ce cas, on devrait retrouver pour d’autres impôts les conséquences de ce surplus de croissance ! Or le Gouvernement prévoit, par exemple, un rendement de l’impôt sur les sociétés quasiment identique entre 2024 et 2025.

Si nous voulons être responsables et ne pas discuter dans le vide, nous devons débattre à partir de chiffres précis, étayés et solides.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-358 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° I-882 rectifié quater, présenté par M. V. Louault, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Médevielle, Brault, Chevalier, Grand, L. Vogel, Capus et A. Marc, Mme Bourcier et M. Rochette, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2, dernière colonne

1° Quatrième ligne

Remplacer le nombre :

-3,3

par le nombre :

-3,1

2° Septième ligne

Remplacer le nombre :

-3,7

par le nombre :

-3,5

La parole est à M. Emmanuel Capus.

M. Emmanuel Capus. Au travers de cet amendement, Vincent Louault souhaite appeler l’attention du Sénat sur un point : nous aurions intérêt à réaliser des économies sur le budget de l’État et de ses différents comités ou agences, plutôt que sur celui des collectivités territoriales.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. S’agissant d’un amendement d’appel, l’avis de la commission sera défavorable.

De plus, il est délicat de modifier la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) en cours de route, alors que nous examinons un autre texte budgétaire. Alors que le déficit public s’est dégradé par rapport à la loi de finances initiale (LFI), concentrons-nous plutôt sur le projet de loi de finances pour 2025, dont nous entamons l’examen.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Monsieur le sénateur, je ne puis que vous donner raison. Depuis le début de l’examen des textes budgétaires à l’Assemblée nationale, le Gouvernement répète que la priorité est de diminuer la dépense publique.

Nous devons maintenir un cap clair : l’État doit être le premier contributeur à la baisse de la dépense publique.

Ainsi, sur les 40 milliards d’euros d’économies que nous proposons, 21 milliards d’euros proviennent du budget de l’État. Il est vrai que l’on m’interroge depuis plusieurs jours sur les postes budgétaires visés. L’Assemblée nationale n’ayant pas examiné la deuxième partie du PLF sur les dépenses, le Sénat sera le révélateur des économies supplémentaires qui seront proposées par le Gouvernement, notamment par voie d’amendement.

Par exemple, 5 milliards d’euros seront prélevés sur les missions de l’État. Nous proposerons également que 15 milliards d’euros soient retranchés du budget de la sécurité sociale ; ce dernier fera l’objet d’un scrutin solennel ici même, demain. Quant à la contribution des collectivités territoriales, elle s’élève à 5 milliards d’euros dans le texte initial, mais nous avons d’ores et déjà annoncé qu’elle serait revue à la baisse au regard des amendements que vous avez déposés.

Je comprends que l’adoption à l’Assemblée nationale de certains amendements, notamment ceux qui ont été déposés par le Nouveau Front populaire, ait pu brouiller le message. Mais soyons clairs : les deux tiers des ressources dégagées doivent provenir d’une baisse de la dépense publique.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Capus, l’amendement n° I-882 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Emmanuel Capus. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° I-882 rectifié quater est retiré.

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote sur l’article.

M. Vincent Delahaye. Je n’ai pas déposé cette année, comme j’aime le faire, un amendement visant à changer le titre de l’article liminaire pour indiquer qu’il assure le déséquilibre plutôt que l’équilibre des comptes.

Toutefois, cet article liminaire ne contribue guère à la compréhension de nos finances publiques par nos compatriotes, dans la mesure où il présente une situation après transferts entre les différents comptes. Nous gagnerions à présenter les comptes avant transferts, ce qui donnerait un résultat quelque peu différent.

Par ailleurs, il présente un biais en ce qui concerne les recettes de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades). Celles-ci sont comptabilisées dans le budget de la sécurité sociale, alors que le remboursement de la dette l’est dans le budget de l’État.

C’est une anomalie : il devrait exister une correspondance entre la dépense et la recette. Dès lors que la dépense liée à la Cades incombe à l’État, les recettes devraient être portées sur le budget de ce dernier, ce qui dégraderait le déficit de la sécurité sociale et atténuerait celui de l’État.

Enfin, tous les régimes de retraite ne sont pas pris en compte dans le budget de la sécurité sociale. Certains d’entre eux sont comptabilisés dans les dépenses de personnel de l’État.

Monsieur le rapporteur général, la commission des finances ferait œuvre utile en améliorant la lisibilité de l’article liminaire du PLF.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article liminaire.

(Larticle liminaire est adopté.)

Mme la présidente. Nous passons à la discussion des articles de la première partie.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Mme la présidente. Nous allons tout d’abord examiner, au sein du titre Ier de la première partie du projet de loi de finances pour 2025, l’article 40 relatif à l’évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne.

Article 40 et participation de la France au budget de l’Union européenne

Mme la présidente. Dans la discussion, la parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Michel Masset applaudit également.)

M. Jean-Marie Mizzon, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme chaque année, il nous revient d’examiner l’évaluation du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne présentée dans le projet de loi de finances. Il s’agit d’un exercice incertain, dans la mesure où le montant inscrit dans le projet de loi de finances est seulement prévisionnel.

Les négociations entre le Conseil et le Parlement européen autour du budget européen pour 2025 ont touché à leur fin ces derniers jours. Le 16 novembre dernier, ces deux institutions se sont accordées sur un montant de 199 milliards d’euros en crédits d’engagement et de 155 milliards d’euros en crédits de paiement. Ces deux institutions ont désormais jusqu’à la fin du mois pour approuver formellement l’accord intervenu. Le Conseil devrait l’adopter aujourd’hui même.

Comme il est d’usage, le Gouvernement devrait déposer prochainement un amendement visant à tenir compte du montant du budget européen sur la contribution française. Je regrette, pour la clarté de nos débats, que nous ne disposions pas d’une évaluation révisée du prélèvement sur recettes (PSR).

Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer quand sera déposé cet amendement ? Et quel serait le montant révisé de l’évaluation du PSR ?

Une forte progression de la contribution française est attendue, celle-ci étant estimée par la direction du budget à 30,4 milliards d’euros en 2026 et à 32,4 milliards d’euros en 2027.

Si cette progression est en partie cyclique, la consommation des crédits se faisant plus marquée à mesure que l’on progresse dans le cadre financier pluriannuel, elle reflète le fait incontournable que la contribution annuelle moyenne de la France a fortement progressé, passant de 20,1 milliards d’euros par an entre 2014 et 2020 à 26,2 milliards d’euros par an entre 2021 et 2027.

La France est ainsi confrontée à un effet ciseaux : d’une part, le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 prévoit des dépenses en hausse ; d’autre part, lorsque le Royaume-Uni a quitté l’Union européenne, cette dernière a perdu l’un de ses principaux contributeurs.

Monsieur le ministre, un tel niveau de contribution est-il soutenable dans le contexte budgétaire que nous connaissons ? Les négociations sur le prochain cadre financier pluriannuel commenceront l’an prochain ; quelle sera la position de la France ?

L’un des enjeux de la révision du prochain cadre financier pluriannuel sera l’adoption de nouvelles ressources propres. Les États membres sont convenus de ce principe dès 2020.

Une telle mesure est indispensable pour notre pays. En effet, l’engagement financier de la France au titre de Next Generation EU est de l’ordre de 75 milliards d’euros. Ainsi, un défaut d’adoption de ces nouvelles ressources signifierait un surcroît de 2,5 milliards d’euros annuels sur la contribution française au budget de l’Union européenne à partir de 2028, qui s’ajouterait aux perspectives budgétaires préoccupantes que je viens d’évoquer.

Monsieur le ministre, dans un contexte politique incertain, où la coalition qui gouverne l’Allemagne traverse une crise politique, quelles sont les perspectives d’adoption de ces nouvelles ressources propres ?

Enfin, les sommes que j’ai évoquées ne visent qu’à financer les politiques publiques existantes de l’Union européenne.

Or l’ancien président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, a fait état dans un rapport qui a fait grand bruit d’un déficit criant de compétitivité de l’économie européenne, nous appelant notamment à combler le fossé de l’innovation. L’actualité nous rappelle constamment que la compétition avec les puissances chinoise et américaine se fait chaque jour plus pressante.

Mario Draghi estime l’investissement nécessaire à un minimum de 800 milliards d’euros par an. Si le gros de ces investissements doit être endossé par le secteur privé, le rapport préconise, au vu des enjeux, une mobilisation mieux ciblée, plus efficace et peut-être plus large du budget européen, au travers de l’émission d’un nouvel emprunt commun.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous surmonter les contraintes économiques et politiques pour permettre à l’Europe, donc à la France, de tenir son rang en matière de compétitivité ?

Mes chers collègues, lors de l’examen de l’article 40 par la commission des finances le 31 octobre dernier, celle-ci s’est prononcée en faveur d’une adoption sans modification. Je vous invite donc à suivre cet avis. (M. Vincent Delahaye applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires européennes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les bonnes nouvelles étant rares, il faut saluer celle-ci : la France est le premier pays de l’Union européenne en matière de consommation des crédits du plan de relance européen. En effet, elle a consommé 30 milliards d’euros de subventions à ce titre depuis 2022, soit 76 % des fonds auxquels elle a droit, contre une moyenne de 42 % dans les autres États membres.

Cette bonne performance est une chance pour notre pays, ce plan finançant des projets très concrets, comme le chantier de la ligne C du métro toulousain ou la construction d’un nouveau bâtiment scientifique de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) à Nantes. Voilà toute l’importance de la contribution française au titre du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne.

Monsieur le ministre, cette bonne nouvelle ne doit cependant pas éclipser deux sujets d’inquiétude.

Tout d’abord, si nous consommons les crédits du plan de relance européen, tel n’est pas le cas pour les crédits en gestion directe du budget de l’Union européenne, c’est-à-dire ceux qui sont directement exécutés par la Commission européenne, sans intervention des États membres.

C’est particulièrement vrai pour la rubrique 1 du budget de l’Union européenne, consacrée à la recherche, à l’innovation et au numérique. Le taux de retour français sur cette rubrique est passé de près de 20 % en 2021 à environ 15 % en 2023. Notre performance est particulièrement mauvaise en ce qui concerne la consommation du programme-cadre Horizon Europe, le taux de retour étant inférieur à 12 % en 2023.

Monsieur le ministre, ces chiffres interpellent. Quelles sont les raisons de cette sous-consommation ? Quel premier bilan peut-on tirer du travail réalisé par la cellule du secrétariat général des affaires européennes (SGAE) chargée de la mobilisation des fonds européens, qui a été mise en place il y a bientôt deux ans ?

Dans un contexte de finances nationales dégradées, alors que l’argent public se fait rare, nous ne pouvons pas nous permettre de nous priver de crédits européens. Le SGAE m’a indiqué que la France pouvait espérer bénéficier de 2 milliards d’euros de crédits européens supplémentaires. Il est donc impératif d’optimiser nos retours sur le budget de l’Union européenne !

Enfin, j’appelle votre attention sur l’évolution de la contribution de la France. En 2028, doit commencer le remboursement du principal emprunt levé pour financer le plan de relance européen, dont le montant est de 750 milliards d’euros. En 2020, les États s’étaient accordés pour introduire de nouvelles ressources propres d’ici à 2026, afin de financer ce remboursement et d’éviter qu’il ne se traduise par un surcroît des contributions nationales.

Monsieur le ministre, je vous ai souvent sollicité sur ce sujet depuis que vous êtes en poste, car j’estime qu’il s’agit d’un véritable point d’inquiétude, d’une ombre menaçante qui plane sur nos finances publiques.

Dans son acte de certification des comptes de l’État pour 2023, la Cour des comptes a d’ailleurs relevé que l’absence de ce montant dans les engagements hors bilan constituait une anomalie manifeste. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno.

M. Olivier Henno. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu de mes convictions, c’est toujours un plaisir et une fierté pour moi que de rejoindre cette tribune pour parler de l’Europe. Dans le cadre du projet de loi de finances, nous débattons aujourd’hui de la contribution de la France au budget de l’Union européenne.

Je n’aborderai pas le programme consacré à la recherche, le président de la commission des affaires européennes s’en étant déjà chargé. Je consacrerai mon intervention au montant de la contribution elle-même, à la question de la politique agricole commune (PAC), qui doit rester un poste pivot, et aux fonds structurels.

Pour l’année 2025, le prélèvement sur recettes en faveur de l’Union s’élèvera à 23,3 milliards d’euros. Ce montant représente une hausse d’un peu plus de 1 milliard d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2024. Comme l’a rappelé Jean-Marie Mizzon, si l’on ajoutait à ce montant le prélèvement des droits de douane nets versés par la France au budget européen, la contribution totale s’élèverait à 25,3 milliards d’euros.

En regard de cette contribution, il convient de rappeler que les retours représentent tout de même 16,5 milliards d’euros. Aussi ne pouvons-nous que déplorer la façon dont s’est déroulé l’examen de l’article 40 à l’Assemblée nationale. En effet, la France percevra notamment 9,4 milliards d’euros au titre de la PAC et environ 3 milliards d’euros au titre de la politique de cohésion.

À ce propos, je tiens à le souligner, la PAC doit demeurer un point prioritaire pour la France au cours des négociations. Nous nous souvenons tous de l’engagement de Jacques Chirac sur ce sujet, qui doit demeurer l’un des fondamentaux de notre doctrine européenne.

Il n’en demeure pas moins que la France est contributrice nette au budget de l’Union européenne, à hauteur de 9 milliards d’euros. Il convient de le noter, sans pour autant reprendre le fameux « I want my money back ! » de Margaret Thatcher. Rappelons que l’Europe apporte la paix entre les pays membres, la monnaie commune et, bien sûr, les retombées économiques de notre marché intérieur, qui valent bien plus que le montant de notre contribution.

À cet égard, le Brexit coûterait environ 120 milliards d’euros par an au Royaume-Uni, soit bien davantage que sa contribution nette passée au budget de l’Union.

Je partage toutefois les inquiétudes exprimées par notre rapporteur. Nous devons collectivement être conscients que le montant de la contribution française sera encore plus important pour les années à venir, la direction du budget en estimant le montant à 30,4 milliards d’euros en 2026 et à 32,4 milliards d’euros en 2027. Cela s’explique par la progression de la contribution française attendue sur l’ensemble du cadre financier pluriannuel 2021-2027.

À mon sens, il convient d’ouvrir une réflexion sur le fonctionnement des instances européennes, pour en réduire le coût.

En ce qui concerne l’utilisation par la France des fonds européens, celle-ci se heurte à des obstacles bureaucratiques. Il existe huit principaux fonds européens. Comme nombre d’entre vous, mes chers collègues, je rencontre très fréquemment des maires ou des présidents d’exécutifs qui me font part de leur désarroi quant à l’utilisation des fonds européens. Deux difficultés majeures sont fréquemment déplorées : la complexité de la procédure et le délai du versement.

Les dernières données statistiques portant sur le sujet démontrent que la France a un taux de dépenses certifiées de 35 %. Si ce taux se situe au-dessus de la moyenne européenne, nous sommes loin de pays comme le Danemark ou la Roumanie, qui demandent des rallonges de crédits, alors que nous en reversons pour ne pas avoir su les utiliser.

Monsieur le ministre, il convient d’accentuer les travaux du gouvernement précédent visant à simplifier l’accès aux fonds européens, dont le recours manque encore de lisibilité.

Les collectivités territoriales disposeront dans les années à venir de moins en moins de ressources, ou, à tout le moins, de plus en plus de besoins financiers. Leur faciliter l’accès aux fonds européens serait un réel coup de pouce pour nombre d’entre elles, en vue de financer les nombreux investissements qui les attendent, ne serait-ce qu’en matière de transition écologique.

Les régions ont le statut d’autorité de gestion des fonds européens depuis 2014, mais il existe des disparités régionales importantes dans l’utilisation de ces fonds. Les taux de programmation traduisent des modes de gestion et des stratégies d’utilisation différentes selon les régions. Certaines d’entre elles ont notamment fait le choix de surprogrammer certains fonds pour se prémunir d’un risque de sous-réalisation.

J’ajoute que le délai moyen de versement des aides est de deux à trois ans, ce qui est largement perfectible.

Monsieur le ministre, le Gouvernement doit se saisir de cette question et faciliter l’accès des collectivités territoriales aux fonds européens. En effet, si nous atteignions un taux de dépenses certifiées supérieur à 50 %, l’Union européenne serait davantage incarnée dans nos territoires et sa nécessité apparaîtrait plus clairement dans le quotidien de nos élus et de nos compatriotes.

L’Union européenne est plus qu’une nécessité dans le contexte géopolitique que nous traversons : elle est un idéal dont nous avons besoin. Certes, l’Europe a un coût, mais celui-ci est nécessaire.

Pour conclure, le groupe Union Centriste votera en l’état l’article 40 du projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Masset applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Barros. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Pierre Barros. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le prélèvement sur recettes de la France au profit de l’Union européenne s’élève cette année à 23,3 milliards d’euros, soit une hausse de 7,9 % par rapport à 2024.

Or cette tendance haussière n’est qu’un début. Dans un rapport publié le 25 juillet 2023, la Cour des comptes estime que la non-adoption de ressources propres d’ici à 2028 contraindra la France à relever sa contribution annuelle au budget de l’Union européenne de 2,5 milliards d’euros sur une période de trente ans, ce qui montre la situation alarmante dans laquelle nous nous trouvons.

Cependant, le débat sur la définition de ces nouvelles ressources pour l’Union européenne s’enlise. Les nouvelles recettes envisagées seraient issues du système communautaire des quotas carbone, de revenus du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) et des bénéfices de certaines multinationales. Ces ressources sont injustes et volatiles et elles font la part belle au capital.

Pourquoi ne pas s’accorder sur la taxation des transactions financières que propose la Commission européenne ? Cette ressource fondée sur la spéculation pourrait soulager la contribution des États membres. Il s’agit, mes chers collègues, d’une question prioritaire pour éviter que notre prélèvement n’explose ces prochaines années.

La hausse de notre contribution grève nos marges de manœuvre, alors que la France est visée par une procédure de déficit excessif, car elle ne respecte pas les critères imposés par le carcan du pacte de stabilité et de croissance (PSC). La réponse du Premier ministre consiste en une cure d’austérité qui mettra à contribution les Français et leurs services publics.

Nous n’accepterons pas que les peuples européens continuent de payer le prix de telles mesures : en 2024, d’après Eurostat, près de 95 millions de personnes sont déjà menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale dans l’Union européenne. Combien le seront demain ?

Par ailleurs, la contribution de la France est aussi majorée par les rabais accordés à d’autres pays de l’Union européenne. Ce mécanisme antidémocratique est accordé par dérogation à certains États dont la contribution a été jugée excessive. L’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, les Pays-Bas et la Suède sont concernés.

La France représente le premier contributeur à ces rabais : nous les finançons à hauteur de 1,5 milliard d’euros en 2025, soit 26,8 % du total. Nous pouvons donc légitimement douter de l’efficacité de notre contribution, d’un point de vue strictement comptable.

La France est ainsi le deuxième pays contributeur net aux fonds européens, son solde net s’élevant à 9,3 milliards d’euros en 2023. Depuis 2017, la France a contribué à hauteur de 60 milliards d’euros en cumulé. Or elle n’est que le vingt-deuxième bénéficiaire des dépenses de l’Union en 2023, avec 242 euros par habitant.

Il est vrai que nous demeurons le premier pays bénéficiaire des fonds de la politique agricole commune. Mais en signant à tour de bras des accords de libre-échange, la Commission européenne reprend d’une main ce qu’elle donne de l’autre. Nos agriculteurs en sont les premières victimes.

Dans le même temps, l’Union européenne durcit sa politique de lutte contre l’immigration et y met les moyens, au détriment de notre politique de réindustrialisation ou de transition écologique. Entre le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020 et celui pour la période 2021-2027, les crédits alloués à la protection de l’environnement n’ont que légèrement augmenté, cependant que ceux qui sont consacrés au contrôle des migrations et à la gestion des frontières ont explosé de plus de 700 %.

De même, les crédits alloués aux investissements stratégiques européens ou pour l’interconnexion en Europe sont largement insuffisants : ils représentent 7 milliards d’euros, sur un budget total de 147 milliards d’euros. La volonté de liquider Fret SNCF en est l’illustration.

Nous devrions à l’inverse investir massivement pour faire advenir une nouvelle construction européenne axée sur un développement industriel en phase avec la préservation du vivant.

Mario Draghi lui-même, dans son rapport sur la compétitivité de l’Union européenne publié en septembre dernier, alerte sur le risque d’une « lente agonie » économique. Notre modèle actuel est dépassé. Il ne fait plus rêver et nous mène droit dans le mur.

Pour toutes ces raisons, le groupe CRCE-K votera contre l’article 40. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Jacques Fernique. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat sur notre contribution à l’Union européenne n’est pas simplement l’occasion pour nous d’entériner l’apport financier qui matérialise notre engagement européen et traduit notre participation à ce projet historique commun – bien sûr, le groupe écologiste confirmera par son vote sa volonté européenne !

Ce n’est pas simplement l’occasion de répondre, une fois encore, aux critiques de ceux qui évaluent notre rapport à l’Europe en fonction de ce que cela nous rapporte, selon une logique comptable et transactionnelle fondée sur des sorties et des entrées, le calcul des retours et la contribution nette. Cette logique, nous le savons, a conduit le Royaume-Uni au Brexit. Loin de leur amener la prospérité promise, ce dernier coûte aux Britanniques environ 120 milliards d’euros par an selon l’agence Bloomberg.

En effet, il existe une importante plus-value européenne. Qu’en est-il pour la France ? Sa contribution nette a été de 7,3 milliards d’euros en 2023, les retours s’élevant à 16,5 milliards d’euros, principalement au titre de la PAC et de la politique de cohésion. En tenant compte de l’ensemble des ressources propres traditionnelles, le solde net négatif de notre pays atteint 9,3 milliards d’euros.

Certes, c’est beaucoup, mais bien moins que les gains liés à l’accès au marché européen, qui profite à 55 % de nos exportations ; bien moins que les bénéfices de la monnaie commune ; bien moins que les avantages de la mutualisation des projets de recherche et d’innovation – on sait que seule l’Union européenne a la taille critique pour déployer des infrastructures et des programmes de niveaux comparables à ceux des États-Unis ou de la Chine ; surtout, bien moins que les bénéfices de la paix et du vivre-ensemble entre les peuples européens et entre les États membres.

Ce débat sur l’article 40 est surtout l’occasion pour nous de prendre la mesure des menaces et des exigences budgétaires qui se précisent pour l’Union et d’affirmer notre détermination commune à y répondre.

Je pense à la menace de ne pouvoir faire face aux échéances de remboursement du plan post-covid, qui s’élèveront à 30 milliards d’euros par an pendant trente ans à partir de 2028 ; à la menace que la guerre russe en Ukraine et toutes ses conséquences pèsent très lourdement sur le budget européen ; à l’exigence, aussi, de financer les dépenses d’avenir.

Le rapport Draghi montre combien nous devons axer notre politique sur trois axes prioritaires : la transition écologique, l’ambition industrielle et technologique et le renforcement de la sécurité commune.

Ce débat porte donc bel et bien sur les ressources propres qu’il convient de dégager avant d’être contraints, faute de moyens, à sacrifier des pans entiers de l’action européenne. Et ce n’est pas la ressource en plastique qui compensera le manque de moyens, même si notre pays en est le triste champion, lui qui consomme bien trop de plastique et qui en recycle si peu.

Le système d’échange de quotas d’émission de l’UE, qui est en cours d’évolution, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières et la taxation à hauteur de 15 % des bénéfices résiduels d’entreprises multinationales constituent certes des perspectives sérieuses. Mais nous sommes encore loin du compte pour les rendre opérationnelles.

Depuis que le Parlement et la Commission européenne se sont mis d’accord sur ces ressources propres, nous attendons la décision du Conseil. Celle-ci doit être unanime, chaque État membre devant l’approuver selon ses propres règles. Comment faire aboutir ce cheminement décisionnel ? Comment gagner l’adhésion démocratique des peuples ?

Je parle d’adhésion démocratique, alors que le scrutin européen a donné à l’extrême droite près d’un tiers de l’hémicycle européen. Chaque fois que l’extrême droite avance, c’est l’Europe qui recule ! Qu’un vice-président de la commission puisse être issu du néofascisme et siéger dans le même groupe que Marion Maréchal montre combien nos valeurs se délitent au travers de compromis honteux.

Ce n’est pas avec des nationalistes réactionnaires, pro-Pouline, antisociaux, anti-migrants délirants, sourds à la biodiversité et climatosceptiques que l’Union répondra aux menaces budgétaires grandissantes ni qu’elle traduira concrètement les orientations du rapport Draghi !

Le gouvernement français est-il déterminé à raviver la ligne d’une majorité démocrate et pro-européenne sur notre continent ? Saurons-nous réactiver l’espoir européen ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Jean-Luc Brault applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Florence Blatrix Contat. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ce premier jour d’examen du projet de loi de finances pour 2025, nous abordons l’article 40, relatif au prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne.

Cette contribution, qui représente environ 1 % du revenu national brut de la France, s’établira en 2025 à 23,3 milliards d’euros, soit une hausse de près de 8 % par rapport à 2024.

Bien qu’elle soit notable, cette augmentation doit être relativisée, car elle s’inscrit dans la continuité des tendances récentes. Le faible niveau observé en 2024 était dû à des circonstances exceptionnelles, notamment des retards dans l’exécution des fonds de cohésion.

En réalité, notre contribution au budget européen s’établit, depuis plusieurs années, autour de 25 milliards d’euros, contre environ 20 milliards d’euros dans les années 2010.

Cette évolution résulte de plusieurs phénomènes.

Tout d’abord, le Brexit a provoqué une augmentation mécanique de notre contribution relative dans le budget européen, laquelle est passée de 15 % à 17 %.

Ensuite, les nouvelles priorités européennes, dictées par des crises majeures d’une ampleur et d’une complexité inédites – dérèglement climatique, guerre en Ukraine, pandémie, tensions commerciales – ont exigé une révision à la hausse du cadre financier pluriannuel. Surtout, elles ont mis en lumière les limites du modèle financier de l’Union européenne. Car c’est bien là que réside le problème : un financement européen fondé quasi exclusivement sur les contributions nationales.

D’un côté, nous demandons toujours plus à nos budgets nationaux, déjà sous tension. Pour la France, ce sont potentiellement 75 milliards d’euros supplémentaires à l’horizon 2058, soit 2,5 milliards d’euros de plus par an.

De l’autre, comme l’a indiqué le président Rapin, nous constatons que les taux de retour restent décevants. En 2023, les dépenses européennes en France représentaient 16,5 milliards d’euros, dont environ 60 % pour la PAC. En termes de retour par habitant, la France n’est que le vingt-deuxième bénéficiaire des dépenses de l’Union européenne en 2023. Est-ce satisfaisant ? Non, bien évidemment. Nous devons faire mieux, notamment sur des programmes comme Horizon Europe.

Au-delà des chiffres se pose une question plus fondamentale : l’Europe a-t-elle aujourd’hui les moyens de son ambition ? Nous le savons, les défis sont immenses : transition écologique, compétitivité industrielle, montée en puissance des tensions géopolitiques. Face à cela, continuer à fonctionner avec un budget limité et une dépendance quasi totale aux contributions nationales nous conduit à l’impasse.

Aussi, que faire ?

Tout d’abord, avancer réellement sur les ressources propres. Le rapport Draghi, publié en septembre dernier, est très clair : pour sortir de cette dépendance, il faut un choc d’investissement, financé par des ressources autonomes.

Les pistes existent : l’extension du marché carbone européen, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ou la taxation des multinationales sont autant de solutions concrètes, déjà identifiées, mais leur adoption reste bloquée, souvent par une logique de « paquets » qui paralyse totalement les négociations. Il est temps de sortir de cette impasse.

Ensuite, il faut envisager un nouvel emprunt européen commun. Nous y sommes favorables, à condition qu’il repose sur des ressources propres pérennes. Cet emprunt serait un outil puissant pour financer des investissements à long terme : le renforcement de la défense et de la sécurité européenne, des infrastructures décarbonées pour accélérer la transition énergétique, des cofinancements pour les transports du quotidien, qui touchent directement nos concitoyens.

Ce que nous défendons, c’est une Europe qui prend son destin en main, une Europe qui investit, non pas pour alourdir sa dette, mais pour créer des actifs durables et renforcer sa souveraineté. Il s’agit de bâtir une autonomie financière européenne, qui permette à l’Union européenne d’être à la hauteur de ses ambitions.

Mes chers collègues, nous sommes à un moment charnière. L’Europe ne peut plus se permettre d’hésiter. Regardons autour de nous : les États-Unis et la Chine avancent à grands pas, tant dans leur transition énergétique que dans leur compétitivité industrielle. L’Europe, elle, reste empêtrée dans ses limites financières. Si nous ne réagissons pas rapidement, c’est non seulement notre position dans le monde qui est menacée, mais aussi notre capacité à garantir un avenir prospère à nos concitoyens.

La révision du cadre financier pluriannuel intervenue en février 2024, qui a entraîné une augmentation de nos contributions, était une nécessité, mais, à terme, donner à l’Europe les moyens de ses ambitions ne pourra pas reposer uniquement sur nos budgets nationaux, qui ne peuvent tout porter seuls.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera bien sûr cet article, mais il appelle également à un sursaut. Investir, se renforcer, redistribuer : tels sont les impératifs d’une Europe qui se veut écologique, souveraine, compétitive et protectrice.

Ce sont les enjeux du futur cadre financier pluriannuel qui sera présenté par la Commission européenne en 2025. Nous ne pouvons pas nous contenter du statu quo. C’est à nous, parlementaires, de porter cette vision, pour que l’Europe redevienne ce qu’elle a toujours aspiré à être : un moteur de progrès, une force de paix, un espace de prospérité partagée. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Jean-Luc Brault applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la participation de la France au budget de l’Union européenne pour l’année 2025 connaît, avant que nous ne l’examinions, une hausse de 4,79 % par rapport à 2024. Cette augmentation s’explique par la reprise du paiement des fonds de cohésion et par la faible hausse des ressources propres traditionnelles.

Cette participation devrait d’ailleurs augmenter plus fortement encore dans les années à venir, en raison de la hausse de notre contribution au cadre financier pluriannuel pour 2026 et 2027, mais aussi pour financer le plan Next Generation EU.

La France est toujours le deuxième plus important contributeur au budget de l’Union européenne, après l’Allemagne, mais il ne faut pas oublier ce que l’Union européenne nous apporte en retours directs et indirects.

Il faut le dire une énième fois, mes chers collègues, l’Union européenne n’a jamais été une option, et elle l’est de moins en moins. Elle est un levier fondamental pour répondre aux nombreux enjeux qui nous attendent : objectifs climatiques, compétitivité, cohésion, Horizon Europe, etc. L’Union européenne est confrontée à de tels enjeux mondiaux en matière de défense, de transitions, de recherche, d’innovation, de technologies telles que le quantique, le cloud ou l’intelligence artificielle qu’il est impératif de lui octroyer les moyens d’y faire face.

Ce budget permettra de poursuivre dans les priorités que nous nous sommes fixées et dans les engagements politiques que nous avons pris, ainsi que de faire face aux crises urgentes, aux niveaux nationaux et européen. L’Union européenne, plus que jamais, se doit d’être solidaire et puissante.

Certes, de nombreux chantiers se profilent : la rationalisation des instruments existants, une plus grande flexibilité, sans compter la révision du prochain cadre financier pluriannuel ou la nécessité de se mettre d’accord pour trouver de nouvelles ressources propres.

Ce sont là autant de sujets qui peuvent inquiéter quant au montant des futures contributions de la France. Toutefois, au-delà de la reconstruction de nos industries, de notre engagement pour une économie plus durable, de la restauration de notre indépendance, il faut que l’Union européenne se pense et se considère comme puissance.

Les conflits en cours à nos portes nous y obligent, et le résultat des élections américaines ne fait que confirmer la nécessité d’accepter notre rôle. Nous devons nous donner les moyens de notre ambition, et nous devons nous donner les moyens de notre dimension.

Si nous n’acceptons pas de contribuer, quels Européens décidons-nous d’être ? Quelles ressources consacrons-nous pour garantir notre autonomie ? Je vous pose la question, mes chers collègues.

Nous devons donner l’impulsion à l’Union européenne dans le sens prôné par MM. Draghi et Letta. Démocratie, marché commun, climat, défense, autonomie stratégique : donnons-nous les moyens d’être cette Europe forte. Nos peuples le méritent. Je crois, avec Julia Kristeva, que, « sans l’Europe, ce sera le chaos ».

Mes chers collègues, soyons enfin ce que nous devons être. C’est à cela que notre contribution participe. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Michel Masset applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Cadec.

M. Alain Cadec. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec un transfert de plus de 23 milliards d’euros, auxquels il faudra ajouter au moins 2 milliards d’euros net au titre des ressources propres traditionnelles, l’apport de la France au financement de l’Union européenne approchera les 26 milliards d’euros l’année prochaine.

C’est, à l’évidence, un montant tout à fait considérable. En effet, au travers de cette contribution, ce sont 7 % de ses recettes fiscales nettes que l’État consentira à mettre à disposition de l’Europe. Si cette participation était considérée comme une dépense sur le plan comptable, elle se situerait parmi nos missions budgétaires les mieux dotées, au coude à coude avec la mission « Sécurités ».

Bien sûr, si l’on prend en compte les retours des politiques européennes sur le territoire national, le solde repasse sous la barre des 10 milliards d’euros. N’oublions pas non plus que notre économie tire des bénéfices très substantiels de son intégration au marché unique : au minimum 120 milliards d’euros par an, soit 4 % de notre PIB, tout de même.

Il n’en reste pas moins que, à l’heure où l’état de nos finances nous contraint à un exercice budgétaire inédit, autoriser ce transfert de ressources va bien au-delà du simple fait de satisfaire à une obligation contractuelle de la France.

Il s’agit d’un geste financier fort, auquel le groupe Les Républicains souscrira en votant l’article 40 de ce projet de loi de finances. Il s’agit, surtout, d’un engagement politique sans équivoque vis-à-vis d’une Union européenne qui, au regard des grands bouleversements mondiaux, n’a jamais paru aussi nécessaire.

En effet, face à la menace russe, qui perdure, face à la concurrence chinoise, qui s’intensifie, et face à la distance américaine, qui s’accroît, l’Europe est la bonne échelle, la seule en réalité qui nous donne une chance de rester à la table du monde, la seule qui nous permette de relever les défis de notre temps, qu’il s’agisse de l’enjeu énergétique et climatique, de la compétition technologique et stratégique ou encore de la gestion des flux migratoires.

Pour remplir ces missions, l’Europe devra néanmoins apprendre à voir le monde tel qu’il se dessine, avec sa fragmentation croissante et ses rapports de force exacerbés.

Elle devra aussi accepter de livrer de nombreuses batailles. La première d’entre elles sera économique, tant il est vrai que, sans prospérité, et donc sans moyens, aucun défi ne peut être relevé.

Or Enrico Letta et Mario Draghi l’ont rappelé : malgré sa force collective, l’Europe n’est pas aujourd’hui sur une trajectoire qui lui permettra d’être au rendez-vous du XXIe siècle. Leur constat est clair : l’Union européenne doit accélérer sa transformation économique.

En premier lieu, ses politiques fondamentales devront se mettre au diapason de la nouvelle donne internationale.

Certes, les principes d’ouverture commerciale et de libre concurrence devront rester au cœur du fonctionnement de notre marché. Cependant, face aux politiques industrielles agressives conduites à Pékin, à Washington ou ailleurs, leur mise en œuvre ne pourra rester en l’état : elle devra nécessairement évoluer pour intégrer de nouveaux concepts clés, par exemple celui de la réciprocité. Le traité Union européenne-Mercosur en est un exemple douloureux.

Puissance normative par excellence, l’Europe devra par ailleurs se rendre compte que, de l’agriculture aux technologies de rupture, la performance des entreprises passe aussi par l’efficacité réglementaire et par la retenue bureaucratique. Qu’elle passe, en outre, par des prix de l’énergie maîtrisés, donc par un marché de l’électricité révisé et une filière nucléaire confortée.

Des réformes fondamentales devront donc être mises en œuvre. Elles seront toutefois insuffisantes si l’Europe n’investit pas massivement pour atteindre ses objectifs stratégiques en matière de défense, d’énergie, d’alimentation ou de maîtrise des frontières.

Elles seront vaines si les capitaux nécessaires ne sont pas mobilisés pour stimuler l’innovation dans les technologies de demain : celles du spatial, du numérique ou de la transition écologique.

Or, nous le savons tous, les financements nécessaires pour rester dans cette course sont colossaux. Alors que le prochain cadre financier pluriannuel devrait être mis en discussion l’année prochaine, ces besoins financiers relancent légitimement le débat sur la taille du budget européen. Mais ils relancent surtout l’idée de nouveaux emprunts !

Soyons toutefois réalistes : comment pourrait-on envisager d’accroître nos dettes communes alors que, à ce jour, à peine un tiers des fonds du plan de relance post-covid ont été consommés ? Comment accepter de s’engager sur de nouvelles émissions alors que, quatre ans après son élaboration, le plan de financement de Next Generation EU n’est toujours pas bouclé ?

En effet, comme l’on pouvait malheureusement s’y attendre, la question des nouvelles ressources propres est encore en suspens. Je me rappelle que, déjà en 2009, à l’occasion de mon premier mandat de député européen, on évoquait l’urgence de mettre en place ces ressources propres…

Certes, la Commission a fait des propositions en 2021, puis de nouveau en 2023. Mais, depuis lors, il s’est en réalité passé bien peu de choses au Conseil, et les divergences entre États membres restent particulièrement marquées.

L’enjeu est pourtant fondamental : c’est d’abord une question de crédibilité pour l’Europe, mais c’est surtout une question financière, qui devient chaque jour plus urgente. En effet, si le remboursement des intérêts a déjà commencé, à des taux d’ailleurs bien plus élevés que cela avait été anticipé, le remboursement du principal, lui, commencera dans un peu plus de trois ans. À partir de là, ce seront au minimum 15 milliards d’euros supplémentaires qu’il faudra trouver chaque année.

Si les nouvelles ressources propres devaient manquer à l’appel, cela se traduirait par un ressaut de la contribution française de plus de 2,5 milliards d’euros par an, soit une hausse d’environ 10 % du prélèvement sur recettes actuel. Dans de telles conditions, la charge que le budget européen ferait peser sur les finances nationales deviendrait une question encore plus sensible qu’elle ne l’est aujourd’hui. Il est donc essentiel de chercher les moyens d’en maîtriser la soutenabilité.

Tout d’abord, bien sûr, il faut aboutir sur les nouvelles ressources propres.

Puis, il faut mettre enfin sur pied une union des marchés de capitaux capable de mobiliser l’épargne inexploitée, donc de suppléer en partie aux fonds publics européens pour le financement des investissements d’avenir.

Ensuite, il convient d’exiger, dans le prochain cadre financier pluriannuel, la fin des rabais que la France finance aujourd’hui à hauteur de 1,4 milliard d’euros par an, et ce, au profit d’États membres pourtant plus riches qu’elle.

Enfin, il faut aller chercher beaucoup mieux que nous ne le faisons actuellement les financements communautaires : voilà une vingtaine d’années, près de 17 % des dépenses européennes étaient effectuées sur le territoire français ; aujourd’hui, ce taux de retour est tombé à 11,5 %.

Certes, la composition de l’Union européenne a beaucoup changé depuis le début des années 2000, ce qui explique cette évolution défavorable. Il n’en reste pas moins qu’il y a là des gisements de ressources inexploités qui, en ces temps de disette budgétaire, doivent impérativement être mieux identifiés et mieux captés par notre pays.

Cette recherche d’efficacité, en somme, devra plus que jamais devenir, dans les années qui viennent, le maître mot de la France, comme celui de l’Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Georges Patient. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour l’année 2025, la contribution française à l’Union européenne s’élèvera à 23,3 milliards d’euros, marquant une augmentation de 1,7 milliard d’euros par rapport à la loi de finances pour 2024.

Ce montant confirme la position de la France en tant que deuxième contributeur au budget de l’Union européenne, derrière l’Allemagne. Surtout, notre pays demeure le premier bénéficiaire, en volume, des dépenses de l’Union européenne : en 2023, quelque 16,5 milliards d’euros ont été redistribués à notre tissu économique et associatif, ainsi qu’à nos collectivités.

Ce montant global comprend notamment les subventions allouées au titre de la politique agricole commune : 9,5 milliards d’euros pour notre secteur agricole, afin de favoriser notre souveraineté alimentaire, d’assurer un revenu à nos agriculteurs et de répondre au mieux aux enjeux du changement climatique.

La contribution nette de la France à l’Union européenne pour 2025 sera de plus de 7 milliards d’euros. À cela s’ajoutent environ 2 milliards d’euros issus des ressources propres traditionnelles, principalement des droits de douane prélevés sur les importations de pays tiers, nets des frais de perception, portant ainsi la contribution nette totale à 9 milliards d’euros.

Des hausses significatives du prélèvement sur recettes sont prévues pour les années 2026 et 2027 ; celui-ci sera porté à 30,4 milliards d’euros puis à 32,4 milliards d’euros. C’est pourquoi, monsieur le ministre, il est impératif d’œuvrer à l’adoption de nouvelles ressources propres pour l’Union européenne, afin de limiter ces augmentations futures.

En effet, l’engagement financier de la France au titre de l’emprunt Next Generation EU avoisine 75 milliards d’euros, et cet emprunt est censé être remboursé par le biais de nouvelles ressources propres. À cet égard, la Commission européenne a proposé en 2023 plusieurs mécanismes pour garantir un financement durable.

Une part accrue des recettes du système européen d’échange de quotas d’émission de CO2 constituerait un premier volet de financement, dont 30 % seraient affectés au budget de l’Union européenne dès 2028.

Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), qui vise à prévenir les fuites de carbone et à égaliser les coûts pour les importations extra-européennes, pourrait également rapporter 1,5 milliard d’euros annuels à l’Union européenne.

La taxation des bénéfices résiduels des multinationales dans le cadre de l’accord OCDE-G20 sur la fiscalité internationale représenterait une contribution supplémentaire comprise entre 2,5 milliards d’euros et 4 milliards d’euros par an.

Enfin, la Commission propose une ressource temporaire fondée sur l’excédent brut d’exploitation des entreprises nationales, qui rapporterait annuellement 16 milliards d’euros entre 2028 et 2030 pour répondre à des besoins ponctuels.

Il est absolument nécessaire de parvenir à un accord sur la question des nouvelles ressources propres. Le groupe RDPI y sera attentif.

Nous voterons évidemment cet article 40. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Michel Masset. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour entamer nos discussions sur le projet de loi de finances, nous examinons l’article 40, qui concerne la participation de la France au budget de l’Union européenne.

Pour 2025, cette contribution suit la trajectoire de hausse, après deux exercices budgétaires européens qui s’étaient soldés par une sous-exécution des dépenses, trajectoire tracée par le cadre financier pluriannuel 2021-2027, lequel a été entériné par la loi du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

Notre participation par le prélèvement sur recettes s’établit cette année à 23,3 milliards d’euros. Globalement, l’ambition exprimée par l’Union européenne au travers de son budget porte la marque des enjeux actuels du continent.

Ainsi, la relance économique qui a suivi la crise de la covid-19 a conduit les membres à s’accorder sur le plan Next Generation EU à hauteur de 750 milliards d’euros. Sur ce point, d’ailleurs, il demeure des questions relatives à son remboursement : je nous invite à la vigilance pour éviter que cela ne pèse sur les contributions des États membres.

Cherchons plutôt vers de nouvelles ressources propres qui s’ajouteraient aux ressources actuelles. La création d’une taxe carbone aux frontières ou la mise en place d’une contribution des géants du numérique sont des mesures soutenues depuis longtemps par le RDSE.

Dans cet effort commun, il faut également mentionner le soutien à la défense de l’Ukraine face à l’agression de la Russie, guerre qui conduit l’Europe à financer fortement son indépendance énergétique vis-à-vis du gaz russe.

Ces dépenses constituent des investissements dans la coopération européenne. L’adoption par le Sénat de cet article 40, que l’Assemblée nationale a rejeté dans les circonstances que l’on sait, ne doit pas nous exonérer d’une réflexion large sur l’état de l’Union européenne et ses perspectives d’évolution.

En effet, les défis auxquels nous faisons face appellent sans doute des réflexions structurelles : face à la défiance, le renforcement du parlementarisme européen est indispensable pour légitimer de nouvelles dépenses qui doivent être menées au niveau communautaire.

Le renforcement de notre souveraineté politique et budgétaire est pressant au regard de l’agenda politique outre-Atlantique.

Je pense notamment à l’insuffisance des crédits alloués à la défense européenne à l’heure où la prochaine installation du président élu américain nous contraint à nous poser cette question : devons-nous avoir la capacité de nous défendre sans les États-Unis ?

Cette défense doit être fondée sur une souveraineté du continent en matière d’armement, au travers de commandes publiques européennes et d’investissements dans les lignes de production.

Je pense également au défi climatique : les investissements pour atteindre les objectifs d’ici à 2050 sont estimés à 3 600 milliards d’euros par la Commission européenne. La mutualisation de ces crédits permettra leur soutenabilité.

Rappelons également que la France bénéficie de son adhésion à l’Union européenne, notamment au titre de la PAC, sans laquelle notre modèle agricole, qui connaît des difficultés importantes, n’aurait peut-être pas fait sa mue structurelle pour mener sa transition écologique et être capable de surmonter de nouveaux – et nombreux – défis.

Ainsi, cette participation de la France au budget de l’Union européenne doit recevoir toute notre attention et faire l’objet de toute notre vigilance, mais, en l’état, elle renforce notre capacité à faire face aux enjeux contemporains.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDSE votera dans sa très grande majorité en faveur de cet article 40. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Frédéric Buval applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du Premier ministre et du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires européennes, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de cet échange de qualité que nous venons d’avoir sur le prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne.

À la veille de la négociation d’un nouveau cadre financier pluriannuel, il constitue un enjeu fondamental pour l’influence de notre pays dans les débats budgétaires européens.

Vous avez été nombreux à rappeler les priorités qui seront celles de la France à cette occasion, dans le contexte, géopolitique notamment, que vous connaissez : guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine – ce conflit est à nos portes –, résultat des élections américaines, mais aussi enjeux liés à la transition numérique et environnementale ou recommandations du rapport Draghi à investir dans la compétitivité de notre continent et dans l’innovation.

Voter ce prélèvement sur recettes, c’est aussi porter la voix de la France et promouvoir son influence auprès de nos partenaires européens et des institutions, pour faire valoir nos priorités.

Vous avez été nombreux à le souligner, la France est contributeur net de l’Union européenne. À cet égard, je voudrais répondre à quelques-unes des interrogations qui ont été formulées.

Tout d’abord, à la suite des sénateurs Rapin et Patient, je rappelle que la France se situe au deuxième rang des pays bénéficiaires des fonds européens.

Monsieur Rapin, vous l’avez également souligné, ces fonds, notamment ceux du plan de relance Next Generation EU, profitent ainsi concrètement à nos territoires, que ce soit par le soutien à la transition numérique, par des projets d’infrastructures de transport – vous avez cité l’exemple de la ligne C du métro de Toulouse –, par des investissements dans la décarbonation de nos territoires, ou encore par le soutien à nos agriculteurs au travers de la politique agricole commune.

Par ailleurs, comme l’ont souligné le sénateur Fernique et le sénateur Cadec – aux propos duquel j’ai accordé, comme toujours, une attention soutenue (Sourires.) –, on ne peut avoir une approche uniquement transactionnelle de ces fonds. Le prélèvement opéré sur les recettes de l’État et, plus globalement, le budget de l’Union européenne ne doivent pas être analysés comme le serait un bilan comptable, avec, d’un côté, des entrées, et, de l’autre, des sorties.

Le bénéfice que retirent nos entreprises, nos agriculteurs, qui sont exportateurs nets au sein du marché agricole européen, de l’intégration de la France au marché unique dépasse largement la simple question du montant des fonds et des subventions perçus. Je ne parle même pas de nos étudiants qui partent étudier dans les différents pays européens ou des touristes qui viennent visiter la France.

Ce prélèvement sur recettes représente le coût de notre appartenance à l’Union européenne. Je le répète, nous en retirons des bénéfices pour notre économie et pour notre influence qui vont bien au-delà de simples considérations budgétaires.

Dès le premier intervenant, puis par plusieurs autres orateurs, il a été souligné que le montant de ce prélèvement sur recettes augmentait. Il ne s’agit pas d’une surprise, puisque ce prélèvement s’inscrit dans la trajectoire du cadre financier pluriannuel adopté voilà quelques années.

Plus précisément, l’explication est à rechercher dans les retards de décaissement des fonds de cohésion. Ce sont d’abord les fonds du plan Next Generation EU, c’est-à-dire le fonds plan de relance – le plan qu’a soutenu la France pour répondre à la crise covid – qui ont été décaissés, et l’on assiste aussi à un effet de rattrapage, qui perdurera dans les années qui viennent.

Toujours est-il, je tiens à le dire, que cette augmentation du prélèvement était prévue et qu’elle a bien été budgétée.

Cela dit, vous avez été plusieurs à insister sur un certain nombre d’enjeux qui sont effectivement des points de vigilance pour notre action européenne.

Monsieur le président de la commission des affaires européennes, vous avez insisté sur la nécessité de mieux mobiliser les fonds communautaires. Il s’agit là d’une priorité du Premier ministre et du Gouvernement tout entier. En langage technocratique, on parle à ce sujet de « maximisation des retours ».

À certains égards, il apparaît effectivement que nous sommes sous-performants. Dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche, vous avez cité le fonds Horizon Europe. J’y ajouterai les fonds dédiés aux territoires d’outre-mer. (M. le président de la commission des affaires européennes acquiesce.)

Nous tous, à commencer bien sûr par l’État, devons nous efforcer de mieux faire connaître ces fonds. Ce travail de communication et d’accompagnement relève de notre responsabilité collective.

En matière de recherche, sans doute les levées de fonds sont-elles entravées par certains biais culturels : les acteurs concernés ne sollicitent pas spontanément les crédits européens. S’y ajoute, dans certains cas, un déficit de communication. Sans doute faudrait-il aussi assurer une meilleure coordination entre les centres de recherche, les établissements d’enseignement supérieur et les entreprises, qui travaillent mieux ensemble chez certains de nos voisins.

Gardons-nous de tout fatalisme. Au contraire, ce constat doit nous inciter à recourir aux fonds européens de manière plus volontariste.

Avec mon homologue chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche, Patrick Hetzel, j’ai prévu de réunir un certain nombre d’acteurs dès le début de l’année 2025, précisément pour élaborer une véritable stratégie de mobilisation des fonds européens.

Au sujet de l’outre-mer, nous ferons de même. Je le répète sans cesse lors de mes déplacements à travers la France, au cours desquels je m’emploie à faire connaître les fonds européens aux différents acteurs, qu’il s’agisse des collectivités territoriales ou des entreprises : allons chercher l’argent de Bruxelles là où il est. Les fonds ne sont pas épuisés – je pense notamment aux fonds gérés exclusivement par l’Union européenne ; nous pouvons être plus performants.

Plusieurs orateurs ont mentionné les ressources propres, non sans raison, car il va bien falloir envisager le remboursement du plan Next Generation EU. Dès à présent, il faut chercher les moyens de dégager de nouvelles ressources pour faire face aux différentes priorités. Je vous rappelle que, selon le rapport Draghi, le continent européen souffre d’un déficit d’investissement de 800 milliards d’euros par an.

Les fonds privés peuvent être mobilisés via l’unification des marchés de capitaux, l’union bancaire, l’effort de simplification ou encore le soutien à l’innovation et au capital-risque à l’échelle européenne.

En parallèle, on doit recourir aux fonds publics pour dégager des ressources propres. Il faut s’en donner les moyens. Plusieurs d’entre vous ont mentionné telle ou telle piste défendue par la France – le Président de la République lui-même les a mises en avant dans son second discours de la Sorbonne, qu’il s’agisse de la taxation des transactions financières ou de la taxe carbone aux frontières.

Reste à trouver des consensus avec nos partenaires européens. Nous nous y attelons : ce sujet devra lui aussi figurer parmi les priorités des négociations qui s’ouvriront dans les prochains mois, au titre du nouveau cadre financier pluriannuel.

Pour les prochaines années, nous défendrons notamment le prélèvement sur recettes, le soutien à l’innovation sur l’ensemble du continent et l’augmentation des moyens alloués à l’Europe de la défense. Dans le contexte géopolitique que nous connaissons, il est indispensable de soutenir l’émergence d’une industrie européenne de défense autonome ; pour favoriser l’émergence d’une « Europe puissance », comme l’a souligné Mme Paoli-Gagin,…

M. Emmanuel Capus. Très bien !

M. Benjamin Haddad, ministre délégué. … grâce à nos instruments de défense commerciale et de sécurité économique.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la France est plus forte quand elle est influente en Europe. La France tire bénéfice de son appartenance à l’Union européenne.

Quand nous traitons du prélèvement sur recettes, ce dont nous parlons, c’est bien sûr de l’influence de notre pays en Europe.

Un orateur a cité le précédent du Brexit. Une stratégie purement transactionnelle appelle nécessairement la logique des rabais, qui, dans le cas du Royaume-Uni, a conduit à la sortie de l’Union européenne. On mesure aujourd’hui les conséquences économiques, diplomatiques et géopolitiques d’un tel choix. Aujourd’hui, ce pays est appauvri et isolé en Europe. Moins influent, il peine à défendre ses priorités.

Le prélèvement sur recettes nous permet de faire entendre haut et fort la voix de la France et de faire valoir nos intérêts. Sachez que le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour défendre l’influence française à Bruxelles.

Mme la présidente. Nous passons à la discussion de l’article 40.

Article liminaire
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Article 1er

Article 40

Le montant du prélèvement effectué sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne est évalué pour l’exercice 2025 à 23 320 855 052 €.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-566, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :

Remplacer le montant :

23 320 855 052 €

par le montant :

18 320 855 052 €

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Cet amendement vise à réduire de 5 milliards d’euros la contribution financière de la France au budget de l’Union européenne.

Notre pays est désormais le dernier grand contributeur net au budget de l’Europe ne bénéficiant d’aucune compensation ni d’aucun rabais. L’Allemagne et les Pays-Bas, eux, ont obtenu des aménagements. Cette situation est d’autant plus intolérable que la France traverse une crise budgétaire sans précédent.

J’ajoute que notre contribution est vouée à augmenter au cours des prochaines années, pour dépasser les 30 milliards d’euros en 2027. Il est nécessaire de dire stop, dès maintenant, à la folie de l’Union européenne. Il est essentiel de le rappeler : la coopération européenne ne passe pas nécessairement par des hausses de crédits. Or ces dernières sont devenues incessantes.

L’Union européenne ne comprend que la force, et notre force, c’est notre contribution. Nous devons donc le signifier avec force aux dirigeants de Bruxelles : l’Union européenne doit apprendre à faire mieux avec moins, en se concentrant sur ses missions fondamentales.

Cet ajustement financier permettrait également de recentrer les ressources nationales vers nos objectifs vitaux, comme la réduction de la dette publique et le soutien aux services publics.

Mme la présidente. L’amendement n° I-172, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Remplacer le montant :

23 320 855 052 €

par le montant :

23 240 855 052 €

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Je suis, je vous l’avoue, fort marrie de cette discussion commune, car les dispositions de ces deux amendements n’ont pas grand-chose à voir entre elles…

Je plaide pour ma part en faveur de l’Europe, à l’instar d’Olivier Henno, dont j’approuve pleinement les propos. Mais je me dois de dresser un triste constat d’inertie : malgré les rappels formulés par M. Darmanin lorsqu’il était ministre de l’intérieur, malgré le travail accompli par Nathalie Loiseau et François-Xavier Bellamy, malgré les prises de parole que mes collègues et moi-même multiplions dans cet hémicycle lors des questions d’actualité ou sous la forme de rappels au règlement, un certain nombre d’entités en lien avec les Frères musulmans et l’Islam radical continuent de percevoir des financements européens, en toute opacité.

J’ai scruté le budget de l’Union européenne et j’ai fini par trouver la ligne budgétaire incriminée. Cette situation est non seulement irritante, mais affolante.

Il y a quelques semaines, à l’occasion des questions d’actualité au Gouvernement, j’ai procédé à un bref inventaire. Je ne le reprendrai pas aujourd’hui. Je signale toutefois que, dans le cadre des programmes Erasmus, l’université islamique de Skopje reçoit un certain nombre de crédits. De même, nous finançons diverses entités faisant la promotion du voile, quand elles ne sont pas franchement antisémites.

Monsieur le ministre, vous étiez présent, hier, à la convention nationale du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) (M. le ministre chargé du budget et des comptes publics acquiesce.), pour soutenir nos compatriotes juifs face à la montée de l’antisémitisme.

On sait ce qui se passe à Berlin, où l’on trouve désormais des No-Jew zones. On sait ce qui se passe à Amsterdam et ailleurs encore… Il est urgent de mettre fin à ces financements. C’est la raison pour laquelle je souhaite que la France réduise de 80 millions d’euros sa contribution au budget de l’Union européenne, jusqu’à ce que l’Europe entende raison.

Les crédits dont il s’agit doivent devenir plus transparents : il est grand temps que l’on cesse de financer, au nom de la diversité, d’authentiques ennemis de la République.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Mizzon, rapporteur spécial. Monsieur Hochart, un rabais ne se décide pas de manière unilatérale : il se négocie…

M. Joshua Hochart. Eh bien, négocions !

M. Jean-Marie Mizzon, rapporteur spécial. … lors de la fixation des ressources propres. Procéder autrement, c’est tout simplement se livrer à un coup d’État.

La France ne peut pas se désengager de cette manière : la commission est donc défavorable à votre amendement.

Madame Goulet, je comprends votre indignation. Les crédits européens ne sauraient financer des structures soutenant l’Islam radical. Néanmoins, ce débat n’est pas de nature philosophique ou même politique : il s’agit d’un exercice strictement budgétaire et – je le répète – nous devons honorer nos engagements relatifs aux ressources propres.

Si votre amendement était voté, la contribution française s’en trouverait réduite unilatéralement, ce qui, dans un État de droit, n’est pas acceptable. Je vous prie, dès lors, de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benjamin Haddad, ministre délégué. Madame Goulet, je vous remercie sincèrement du combat que vous menez contre cette forme d’opacité budgétaire. Je me suis moi-même engagé aux côtés du ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, pour demander à la Commission européenne de mettre un terme aux financements que reçoit l’université de Gaziantep.

Je m’inscris dans le droit fil de vos propos : l’Union européenne est une union de valeurs. Rien ne saurait justifier que l’Europe finance des structures liées à l’Islam radical et aux Frères musulmans, ou a fortiori des organisations antisémites.

Nous sommes pleinement mobilisés. Au cours de la précédente mandature, un certain nombre de financements ont déjà été interrompus, notamment grâce à la mobilisation de députés européens, parmi lesquels Nathalie Loiseau et François-Xavier Bellamy. Vous avez cité leurs noms, et je tiens, à mon tour, à saluer leur engagement sur ce sujet.

Nous saurons nous montrer intraitables pour défendre à la fois nos valeurs et la sécurité de tous les citoyens européens. Toutefois, l’examen de cet article étant un exercice comptable – M. le rapporteur spécial l’a rappelé –, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-566.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-172.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 40.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 79 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l’adoption 322
Contre 21

Le Sénat a adopté.

Monsieur le ministre chargé du budget et des comptes publics, permettez-moi de vous remercier de votre présence au Sénat cette après-midi.

Nous poursuivons l’examen des articles de la première partie.

Article 40
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Après l’article 1er

Article 1er

I. – La perception des ressources de l’État et des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l’État est autorisée pendant l’année 2025 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi.

II. – Sous réserve de dispositions contraires, la présente loi s’applique :

1° À l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2024 et des années suivantes ;

2° À l’impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2024 ;

3° À compter du 1er janvier 2025 pour les autres dispositions fiscales.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 2 (début)

Après l’article 1er

Mme la présidente. L’amendement n° I-1930 rectifié bis, présenté par MM. Sautarel, P. Vidal, Somon et Karoutchi, Mme Belrhiti, M. J.B. Blanc, Mmes P. Martin et Lassarade, MM. Bruyen et Lefèvre, Mmes Ciuntu et Ventalon, MM. Belin, Klinger et Mandelli, Mme Joseph, M. C. Vial, Mme Micouleau, M. Gremillet et Mme Evren, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Sont abrogés :

- l’article 1388 ter du code général des impôts ;

- l’article 1691 ter du code général des impôts ;

- l’article 1466 A-I sexies du code général des impôts ;

- l’article 156-II-2° quater du code général des impôts ;

- l’article 199 decies H du code général des impôts ;

- l’article 199 terdecies-0 B du code général des impôts ;

- l’article 199 vicies A du code général des impôts ;

- l’article 200 sexdecies du code général des impôts ;

- les articles 150-0 A-II-1, 150-0 D-8, 163 bis C et 200 A-6 du code général des impôts ;

- les articles 80 quaterdecies et 200 A-6 bis du code général des impôts ;

- l’article 163 A du code général des impôts ;

- l’article 31-I-1°-j du code général des impôts ;

- l’article 31-I-1°-m du code général des impôts ;

- l’article 31-I-1°-o du code général des impôts ;

- l’article 28-II de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 ;

- l’article 150-0 B quater du code général des impôts ;

- l’article 156-I bis du code général des impôts ;

- l’article 39 quinquies FB du code général des impôts ;

- l’article 39 decies D du code général des impôts ;

- l’article 39 decies A du code général des impôts ;

- l’article 20 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 ;

- l’article 140 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 ;

- l’article 1er de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 ;

- l’article 39 decies B du code général des impôts ;

- l’article 39 decies E du code général des impôts ;

- l’article 39 decies G du code général des impôts ;

- l’article 39 quinquies FA du code général des impôts ;

- les articles 44 sexies A et 44 sexies-0 A du code général des impôts ;

- l’article 44 septies du code général des impôts ;

- l’article 206-5 du code général des impôts ;

- l’article 239 octies du code général des impôts ;

- l’article 1655 bis du code général des impôts ;

- les articles 220 nonies, 220 R et 223 O-1-r du code général des impôts ;

- les articles 220 sexies A et 220 F bis du code général des impôts ;

- les articles 793-2-4° à 6° et 793 ter du code général des impôts ;

- l’article 298 duodecies du code général des impôts ;

- les articles L. 312-75 et L. 312-76 du code des impositions sur les biens et les services ;

- les articles L. 312-75 et L. 312-77 du code des impositions sur les biens et les services ;

- et l’article L. 421-61 du code des impositions sur les biens et les services.

La parole est à M. Stéphane Sautarel.

M. Stéphane Sautarel. Mes chers collègues, le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 dénombre 474 dispositifs fiscaux dérogatoires classés comme dépenses fiscales.

Le coût des dépenses fiscales pour 2025 est estimé à plus de 85 milliards d’euros. Ces dernières permettent certes de limiter le recours à la dépense budgétaire et, en ce sens, elles peuvent avoir un intérêt ; mais il convient de les encadrer.

Ces niches sont nombreuses et leur coût global est élevé, d’autant que les chiffres officiels sous-estiment la réalité. En effet, depuis 2006, certaines niches ont été déclassées : elles ne figurent plus dans le rapport qui recense les dépenses fiscales, document annexé tous les ans au projet de loi de finances.

Au regard de leur montant, les dépenses fiscales constituent un enjeu majeur pour le respect de la trajectoire des finances publiques. Or l’évaluation dont elles font l’objet demeure embryonnaire. Dans un rapport daté de 2010, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) la jugeait même inexistante.

Pourtant, ces niches sont sans cesse confirmées. La loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 avait prévu leur évaluation systématique. En 2011, l’inspection générale des finances (IGF) a remis un rapport couvrant 315 niches jugées inefficientes ou peu efficientes. Mais, faute de volonté politique, ces dispositifs ont tous été maintenus.

Je vous propose aujourd’hui de supprimer les quarante dépenses fiscales dont le fait générateur est éteint. Nous pourrons ainsi réduire le montant des dépenses fiscales de 351 millions d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La réponse à cette question est moins évidente qu’il y paraît : même si son fait générateur est éteint, une dépense fiscale peut encore produire des effets. Il faut éclaircir ce point, faute de quoi l’on risque de faire plus de mal que de bien.

C’est pourquoi la commission sollicite l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Antoine Armand, ministre de léconomie, des finances et de lindustrie. Monsieur le sénateur, je consultais à l’instant le rapport relatif aux dépenses fiscales pour l’année 2025.

Vous le soulignez avec raison, non seulement ces dispositifs sont beaucoup trop nombreux, mais ils restent insuffisamment évalués. Je souhaite d’ailleurs que nous examinions le sujet de près au cours des prochains mois.

Je tiens donc à dire combien votre intention me paraît louable. Néanmoins – M. le rapporteur général l’a relevé –, ce n’est pas parce que le fait générateur d’une dépense fiscale est éteint que cette dernière ne produit plus d’effet. Par exemple, si vous avez obtenu en 2007 un crédit d’impôt courant sur dix-huit ou dix-neuf ans, vous continuez d’en tirer bénéfice, même en l’absence de flux entrants. C’est précisément pourquoi l’adoption de votre amendement aurait une incidence budgétaire supérieure à 350 millions d’euros.

Enfin – je tiens à formuler ce rappel –, si l’on peut légitimement croire que les dépenses fiscales sont des dépenses publiques, la suppression d’une dépense fiscale représente, en fait, une augmentation d’impôt.

Dans l’attente du travail que nous engagerons dans les prochains mois, et auquel je ne manquerai pas de vous associer, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Sautarel, l’amendement n° I-1930 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Stéphane Sautarel. Je tiens à remercier M. le rapporteur général de son attention bienveillante et M. le ministre de sa réponse, qui ne me surprend pas : il s’agit là d’un amendement d’appel.

Je le concède, on ne peut pas procéder de manière si massive et si brutale, mais il convient réellement de s’atteler à une véritable revue de ces dépenses fiscales. Leur suppression se traduira bien par un accroissement de la fiscalité, et non par une baisse de la dépense, mais le solde public n’en sera pas moins amélioré. Or c’est là notre but à tous. (M. le ministre le confirme.)

Mes chers collègues, je sais que nombre d’entre vous sont sensibles à cette question. J’espère que nous pourrons la travailler en profondeur, car il est grand temps de réduire la dépense fiscale.

J’avais déposé un autre amendement visant à limiter la durée de vie des niches : en pareil cas, on n’aurait plus à s’interroger sur leur incidence financière dix-huit ou vingt ans après leur création, alors même qu’elles ne sont plus du tout d’actualité. Mais cet amendement, auquel je tenais, a été jugé irrecevable – comme d’autres, d’ailleurs, par lesquels je traitais de ces questions.

Ces précisions étant apportées, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° I-1930 rectifié bis est retiré.

B. – Mesures fiscales

Après l’article 1er
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Article 2 (interruption de la discussion)

Article 2

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

A. – À la première phrase du second alinéa de l’article 196 B, le montant : « 6 674 € » est remplacé par le montant : « 6 807 € » ;

B. – Au I de l’article 197 :

1° Au 1 :

a) Aux deux premiers alinéas, le montant : « 11 294 € » est remplacé par le montant : « 11 520 € » ;

b) À la fin du deuxième alinéa et au troisième alinéa, le montant : « 28 797 € » est remplacé par le montant : « 29 373 € » ;

c) À la fin du troisième alinéa et à l’avant-dernier alinéa, le montant : « 82 341 € » est remplacé par le montant : « 83 988 € » ;

d) À la fin des deux derniers alinéas, le montant : « 177 106 € » est remplacé par le montant : « 180 648 € » ;

2° Au 2 :

a) Au premier alinéa, le montant : « 1 759 € » est remplacé par le montant : « 1 794 € » ;

b) À la fin de la première phrase du deuxième alinéa, le montant : « 4 149 € » est remplacé par le montant : « 4 232 € » ;

c) À la fin du troisième alinéa, le montant : « 1 050 € » est remplacé par le montant : « 1 071 € » ;

d) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le montant : « 1 753 € » est remplacé par le montant : « 1 788 € » ;

e) À la première phrase du dernier alinéa, le montant : « 1 958 € » est remplacé par le montant : « 1 997 € » ;

3° Au a du 4, le montant : « 873 € » est remplacé par le montant : « 890 € » et le montant : « 1 444 € » est remplacé par le montant : « 1 473 € » ;

C. – Au 1 du III de l’article 204 H :

1° Le tableau du second alinéa du a est ainsi rédigé :

 

«

Base mensuelle de prélèvement

Taux proportionnel

Inférieure à 1 623 €

0 %

Supérieure ou égale à 1 623 € et inférieure à 1 686 €

0,5 %

Supérieure ou égale à 1 686 € et inférieure à 1 794 €

1,3 %

Supérieure ou égale à 1 794 € et inférieure à 1 915 €

2,1 %

Supérieure ou égale à 1 915 € et inférieure à 2 046 €

2,9 %

Supérieure ou égale à 2 046 € et inférieure à 2 155 €

3,5 %

Supérieure ou égale à 2 155 € et inférieure à 2 298 €

4,1 %

Supérieure ou égale à 2 298 € et inférieure à 2 719 €

5,3 %

Supérieure ou égale à 2 719 € et inférieure à 3 113 €

7,5 %

Supérieure ou égale à 3 113 € et inférieure à 3 546 €

9,9 %

Supérieure ou égale à 3 546 € et inférieure à 3 991 €

11,9 %

Supérieure ou égale à 3 991 € et inférieure à 4 657 €

13,8 %

Supérieure ou égale à 4 657 € et inférieure à 5 585 €

15,8 %

Supérieure ou égale à 5 585 € et inférieure à 6 988 €

17,9 %

Supérieure ou égale à 6 988 € et inférieure à 8 728 €

20 %

Supérieure ou égale à 8 728 € et inférieure à 12 115 €

24 %

Supérieure ou égale à 12 115 € et inférieure à 16 408 €

28 %

Supérieure ou égale à 16 408 € et inférieure à 25 756 €

33 %

Supérieure ou égale à 25 756 € et inférieure à 55 170 €

38 %

Supérieure ou égale à 55 170 €

43 %

 

2° Le tableau du second alinéa du b est ainsi rédigé :

 

«

Base mensuelle de prélèvement

Taux proportionnel

Inférieure à 1 862 €

0 %

Supérieure ou égale à 1 862 € et inférieure à 1 975 €

0,5 %

Supérieure ou égale à 1 975 € et inférieure à 2 176 €

1,3 %

Supérieure ou égale à 2 176 € et inférieure à 2 376 €

2,1 %

Supérieure ou égale à 2 376 € et inférieure à 2 623 €

2,9 %

Supérieure ou égale à 2 623 € et inférieure à 2 766 €

3,5 %

Supérieure ou égale à 2 766 € et inférieure à 2 861 €

4,1 %

Supérieure ou égale à 2 861 € et inférieure à 3 148 €

5,3 %

Supérieure ou égale à 3 148 € et inférieure à 3 892 €

7,5 %

Supérieure ou égale à 3 892 € et inférieure à 4 981 €

9,9 %

Supérieure ou égale à 4 981 € et inférieure à 5 657 €

11,9 %

Supérieure ou égale à 5 657 € et inférieure à 6 552 €

13,8 %

Supérieure ou égale à 6 552 € et inférieure à 7 851 €

15,8 %

Supérieure ou égale à 7 851 € et inférieure à 8 728 €

17,9 %

Supérieure ou égale à 8 728 € et inférieure à 9 920 €

20 %

Supérieure ou égale à 9 920 € et inférieure à 13 641 €

24 %

Supérieure ou égale à 13 641 € et inférieure à 18 125 €

28 %

Supérieure ou égale à 18 125 € et inférieure à 27 664 €

33 %

Supérieure ou égale à 27 664 € et inférieure à 60 469 €

38 %

Supérieure ou égale à 60 469 €

43 %

 

3° Le tableau du second alinéa du c est ainsi rédigé :

 

«

Base mensuelle de prélèvement

Taux proportionnel

Inférieure à 1 994 €

0 %

Supérieure ou égale à 1 994 € et inférieure à 2 155 €

0,5 %

Supérieure ou égale à 2 155 € et inférieure à 2 403 €

1,3 %

Supérieure ou égale à 2 403 € et inférieure à 2 709 €

2,1 %

Supérieure ou égale à 2 709 € et inférieure à 2 813 €

2,9 %

Supérieure ou égale à 2 813 € et inférieure à 2 910 €

3,5 %

Supérieure ou égale à 2 910 € et inférieure à 3 005 €

4,1 %

Supérieure ou égale à 3 005 € et inférieure à 3 338 €

5,3 %

Supérieure ou égale à 3 338 € et inférieure à 4 607 €

7,5 %

Supérieure ou égale à 4 607 € et inférieure à 5 963 €

9,9 %

Supérieure ou égale à 5 963 € et inférieure à 6 725 €

11,9 %

Supérieure ou égale à 6 725 € et inférieure à 7 803 €

13,8 %

Supérieure ou égale à 7 803 € et inférieure à 8 584 €

15,8 %

Supérieure ou égale à 8 584 € et inférieure à 9 510 €

17,9 %

Supérieure ou égale à 9 510 € et inférieure à 11 037 €

20 %

Supérieure ou égale à 11 037 € et inférieure à 14 849 €

24 %

Supérieure ou égale à 14 849 € et inférieure à 18 887 €

28 %

Supérieure ou égale à 18 887 € et inférieure à 30 270 €

33 %

Supérieure ou égale à 30 270 € et inférieure à 63 892 €

38 %

Supérieure ou égale à 63 892 €

43 %

.

II. – Le C du I s’applique aux revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2025.

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1666, présenté par MM. G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 4 à 8

Remplacer ces alinéas par quinze alinéas ainsi rédigés :

1° Le 1 est ainsi rédigé :

1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 10 434 € le taux de :

« – 5 % pour la fraction supérieure à 10 434 € et inférieure ou égale à 15 639 € ;

« – 10 % pour la fraction supérieure à 15 639 € et inférieure ou égale à 20 856 € ;

« – 15 % pour la fraction supérieure à 20 856 € et inférieure ou égale à 28 152 € ;

« – 20 % pour la fraction supérieure à 28 152 € et inférieure ou égale à 32 290 € ;

« – 25 % pour la fraction supérieure à 32 290 € et inférieure ou égale à 35 415 € ;

« – 27,5 % pour la fraction supérieure à 35 415 € et inférieure ou égale à 38 836 € ;

« – 32,5 % pour la fraction supérieure à 38 836 € et inférieure ou égale à 44 849 € ;

« – 40 % pour la fraction supérieure à 44 849 € et inférieure ou égale à 62 579 € ;

« – 45 % pour la fraction supérieure à 62 579 € et inférieure ou égale à 104 291 € ;

« – 50 % pour la fraction supérieure à 104 291 € et inférieure ou égale à 146 015 € ;

« – 55 % pour la fraction supérieure à 146 015 € et inférieure ou égale à 261 173 € ;

« – 65 % pour la fraction supérieure à 261 173 € et inférieure ou égale à 400 000 € ;

« – 70 % pour la fraction supérieure à 400 000 €. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Grégory Blanc.

M. Grégory Blanc. Cet article ouvre le débat relatif à l’impôt sur le revenu. Il nous invite, plus largement, à aborder le rapport de nos concitoyens à l’impôt.

Nous le savons tous – plusieurs orateurs l’ont d’ailleurs rappelé lors de la discussion générale –, la France entre dans un cycle de remboursements.

Après la pandémie de covid, à laquelle a succédé la crise inflationniste, tous les pays occidentaux ont décidé de rehausser leur fiscalité, tout simplement parce qu’il faut rembourser un certain nombre de dettes. Le dollar disposant d’un statut tout à fait spécifique parmi les différentes monnaies du monde, les États-Unis occupent, eux, une position à part.

Désormais, la question est donc : qui doit payer ? Vous l’avez compris, l’enjeu, c’est la justice fiscale.

À nos yeux, l’impôt sur le revenu est le plus juste qui soit, même s’il reste perfectible. Nous déplorons notamment les modifications qu’il a pu subir au fil de l’eau.

Pour assurer une meilleure redistribution, il faut instaurer une progressivité beaucoup plus forte. À cette fin, nous proposons quatorze tranches d’impôt sur le revenu. Les classes populaires paieront moins. En revanche, l’impôt sera ajusté à la hausse pour les foyers fiscaux dont les revenus sont les plus élevés.

Mes chers collègues, chacun doit contribuer à la mesure de ses moyens. Nous renforcerons ainsi la justice fiscale et la cohésion sociale. Au fond, peu importe que les tranches soient au nombre de dix ou de quatorze : le véritable enjeu, c’est de renforcer la progressivité de l’impôt acquitté par nos concitoyens.

Mme la présidente. L’amendement n° I-652 rectifié, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 4 à 8

Remplacer ces alinéas par douze alinéas ainsi rédigés :

1° Le 1 est ainsi rédigé :

« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction le taux de :

« – 5 % pour la fraction supérieure à 11 700 € et inférieure ou égale à 20 000 € ;

« – 10 % pour la fraction supérieure à 20 000 € et inférieure ou égale à 30 000 € ;

« – 20 % pour la fraction supérieure à 30 000 € et inférieure ou égale à 40 000 € ;

« – 25 % pour la fraction supérieure à 40 000 € et inférieure ou égale à 50 000 € ;

« – 30 % pour la fraction supérieure à 50 000 € et inférieure ou égale à 60 000 € ;

« – 35 % pour la fraction supérieure à 60 000 € et inférieure ou égale à 75 000 € ;

« – 40 % pour la fraction supérieure à 75 000 € et inférieure ou égale à 100 000 € ;

« – 45 % pour la fraction supérieure à 100 000 € et inférieure ou égale à 125 000 € ;

« – 50 % pour la fraction supérieure à 125 000 € et inférieure ou égale à 150 000 € ;

« – 55 % pour la fraction supérieure à 150 000 €. »

II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le 1° du B du I est applicable à compter de l’imposition des revenus de 2024.

III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, avec votre collègue chargé du budget et des comptes publics, vous appelez à un effort de redressement, en précisant que cet effort doit être partagé. En examinant les tranches de l’impôt sur le revenu, nous nous trouvons au cœur du sujet ; et nous sommes tentés de vous prendre au mot, sans caricature – sinon, le débat perd son intérêt.

Pour notre part, nous voulons renforcer l’imposition des revenus les plus élevés. Jusqu’à 60 000 euros annuels, nous souhaitons baisser l’impôt sur le revenu. En revanche, nous entendons l’augmenter au-delà de ce montant, grâce à un barème constitué de dix tranches.

Si notre amendement était adopté, 26 503 850 foyers fiscaux seraient gagnants. En parallèle, nous demanderions un peu plus aux 14 % de foyers qui perçoivent la moitié des revenus de notre pays. Vous l’imaginez bien : les travailleuses et les travailleurs qui sont au Smic seraient ravis de gagner 60 000 euros par an, quitte à être imposés.

Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons laisser perdurer une troisième tranche si large, entre 29 374 et 83 987 euros, assortie d’un taux d’imposition de 30 %. Comment accepter que des revenus si différents soient taxés de la même manière ?

On parle parfois des classes moyennes à tort et à travers. Moi-même, je peux employer cette expression de manière quelque peu abusive, mais une chose est sûre : quand on gagne 30 000 euros par an, on appartient aux classes moyennes et, en l’état actuel de la fiscalité, on est trop imposé. L’effort doit être mieux partagé.

Mes chers collègues, notre proposition est responsable et, partant, acceptable.

Mme la présidente. L’amendement n° I-902, présenté par MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat et Briquet, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4 à 8

Remplacer ces alinéas par douze alinéas ainsi rédigés :

1° Le 1 est ainsi rédigé :

« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 10 000 € le taux de :

« – 5 % pour la fraction supérieure à 15 000 € et inférieure ou égale à 20 000 € ;

« – 10 % pour la fraction supérieure à 20 001 € et inférieure ou égale à 25 000 € ;

« – 15 % pour la fraction supérieure à 25 001 € et inférieure ou égale à 30 000 € ;

« – 20 % pour la fraction supérieure à 30 001 € et inférieure ou égale à 35 000 € ;

« – 25 % pour la fraction supérieure à 35 001 € et inférieure ou égale à 40 000 € ;

« – 27,5 % pour la fraction supérieure à 40 001 € et inférieure ou égale à 45 000 € ;

« – 32,5 % pour la fraction supérieure à 45 001 € et inférieure ou égale à 50 000 € ;

« – 40 % pour la fraction supérieure à 50 001 € et inférieure ou égale à 75 000 € ;

« – 45 % pour la fraction supérieure à 75 001 € et inférieure ou égale à 100 000 € ;

« – 50 % pour la fraction supérieure à 100 000 €. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Mes chers collègues, le débat relatif à la progressivité de l’impôt sur le revenu est lancé. Et ce sujet permet, à mon sens, d’engager avec vigueur l’examen du PLF.

Les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain proposent un barème en dix tranches, afin d’assurer une réelle progressivité de la contribution citoyenne.

Nous faisons face, aujourd’hui, à un constat alarmant : la régressivité de notre système fiscal. J’ajoute que le sujet est bien documenté. Les travaux de Thomas Piketty et l’étude de l’institut des politiques publiques (IPP) intitulée Quels impôts les milliardaires paient-ils ? soulignent le caractère profondément injuste de notre système de prélèvements.

Aujourd’hui, les impôts proportionnels, comme les cotisations sociales ou la contribution sociale généralisée (CSG), pèsent beaucoup plus lourdement sur les salaires moyens et modestes que sur les très hauts revenus, en particulier ceux qui sont issus du capital.

L’échec de la politique de l’offre menée depuis 2017 par les gouvernements qui se sont succédé se cristallise autour de ce constat : le produit des prélèvements proportionnels est insuffisamment redistribué, alors même que lesdits impôts sont censés garantir l’équité.

La politique fiscale des dernières années n’a fait que creuser ce fossé socio-économique. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les milliardaires français n’acquittent que 2 % d’impôts sur leurs revenus économiques, quand les contribuables ordinaires sont ponctionnés, en moyenne, à hauteur de 50 %.

Nous ne pouvons raisonnablement pas continuer dans cette voie. Une réforme s’impose pour rétablir l’équité fiscale et garantir une véritable justice sociale.

Avec le barème en dix tranches qui est proposé par les élus du groupe socialiste, la progressivité de l’impôt serait renforcée. Chaque tranche de revenus serait traitée de manière plus juste.

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Thierry Cozic. On éviterait en effet les sauts de tranche brutaux, par nature pénalisants.

Mme la présidente. L’amendement n° I-653, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 7 et 8

Supprimer ces alinéas.

II. – Après l’alinéa 18

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

… Après le même tableau du second alinéa du a, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les contribuables déclarant des revenus excédant 82 341 €, la base mensuelle de prélèvement fixée au a du 1 du III du présent article dans sa rédaction issue de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 s’applique. » ;

III. – Après l’alinéa 20

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

… Après le même tableau du second alinéa du b, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les contribuables déclarant des revenus excédant 82 341 €, la base mensuelle de prélèvement fixée au b du 1 du III du présent article dans sa rédaction issue de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 s’applique. » ;

IV. – Après l’alinéa 22

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

… Après le même tableau du second alinéa du c, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les contribuables déclarant des revenus excédant 82 341 €, la base mensuelle de prélèvement fixée au c du 1 du III du présent article dans sa rédaction issue de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 s’applique. » ;

La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Comme chaque année, le barème de l’impôt sur le revenu est revalorisé à hauteur de l’inflation.

Cette indexation sur l’évolution de l’indice des prix hors tabac, de 2 %, est certes appliquée à toutes les tranches uniformément, mais elle majore les seuils d’imposition les plus élevés d’un montant supérieur. En résulte une inéquité indéniable.

L’article 2 reporte ainsi le seuil initial d’imposition de 226 euros, tout en décalant l’entrée dans la dernière tranche, laquelle est assortie d’un taux de 45 %, de 177 106 euros à 180 648 euros. Le seuil de cette tranche est donc rehaussé de 3 642 euros.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’indexation indifférenciée accorde aux plus aisés un avantage quatorze fois supérieur à celui des travailleurs les plus précaires. Cette injustice est d’autant plus scandaleuse qu’elle entraîne une perte de recettes de 3,7 milliards d’euros en 2025. Par notre amendement, nous proposons d’en récupérer une partie.

Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° I-913 rectifié est présenté par MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° I-1095 rectifié est présenté par Mme Pantel, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve et MM. Laouedj et Roux.

L’amendement n° I-1433 rectifié est présenté par M. Buval, Mme Duranton, M. Omar Oili, Mme Phinera-Horth, M. Patient, Mme Schillinger et M. Buis.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 7 et 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l’amendement n° I-913 rectifié.

M. Thierry Cozic. Par cet amendement, les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain présentent l’une des vingt propositions de recettes qu’ils défendent depuis la présentation du PLF par le Gouvernement. À l’Assemblée nationale, nos collègues socialistes ont d’ailleurs déposé un amendement identique.

Il s’agit de désindexer les deux tranches supérieures du barème de l’impôt sur le revenu.

Mes chers collègues, l’article 2 neutralise les effets de l’inflation sur l’impôt sur le revenu. Toutefois, en modifiant le seuil imposable pour les contribuables des deux plus hautes tranches, les alinéas 7 et 8 accordent de facto un avantage fiscal aux intéressés, au détriment des finances publiques.

Un tel choix contrevient à l’impératif de redressement de notre économie.

Rappelons que, selon l’Insee, moins de 1 % des Français sont concernés par ces seuils. En outre, ces contribuables percevant de très hauts revenus bénéficient déjà de maintes mesures avantageuses. Il ne semble pas déraisonnable de leur demander un effort fiscal supplémentaire après sept années au cours desquelles le camp présidentiel n’a cessé de leur prodiguer des avantages.

D’après le simulateur LexImpact, les dispositions de cet amendement dégageront 200 millions d’euros d’économies sans rien changer à la situation de 99,99 % des Françaises et des Français.

Quant à ceux dont l’impôt augmentera, ils acquitteront au maximum 322 euros supplémentaires : cette somme représente moins de 0,2 % de leur revenu fiscal de référence.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour présenter l’amendement n° I-1095 rectifié.

M. Jean-Yves Roux. Nous sommes nous aussi favorables à la progressivité de l’impôt sur le revenu. C’est pourquoi nous souhaitons supprimer l’indexation sur l’inflation des deux tranches supérieures du barème de cette imposition.

Les contribuables dont nous parlons perçoivent des revenus annuels supérieurs à 82 341 euros et représentent, en tout et pour tout, 2 % des foyers fiscaux.

Il s’agit, selon nous, d’un amendement de bon sens. D’un point de vue philosophique, ces dispositions permettent d’associer un peu mieux les hauts revenus à l’effort collectif de redressement des comptes publics. D’un point de vue budgétaire, elles assurent une économie de 200 millions d’euros.

Dans le contexte que nous connaissons, il nous semble juste d’équilibrer les efforts entre, d’une part, celles et ceux qui ne peuvent les consentir, et, de l’autre, celles et ceux qui en ont les moyens.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° I-1433 rectifié.

M. Bernard Buis. Ces dispositions viennent d’être excellemment défendues, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, comme vous le savez, moins de la moitié des contribuables français sont soumis à l’impôt sur le revenu. En outre, 10 % des foyers fiscaux versent plus de 70 % du produit de cette imposition.

Il ne vous a pas non plus échappé que ce projet de loi de finances instaure une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ; nous devons veiller à l’équilibre général des choix auxquels nous procédons.

Je me dois de vous rappeler que la France est le pays du monde où le niveau de prélèvements et de taxes est le plus élevé. Il y a un peu plus de dix ans, le ministre des finances, nommé depuis lors Premier président de la Cour des comptes, dénonçait le ras-le-bol fiscal. Or le feu continue de couver : prenons garde à ne pas souffler sur les braises…

Sans surprise, la commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Antoine Armand, ministre. Au sujet de l’impôt sur le revenu, dont le caractère progressif ou proportionnel continue d’inspirer d’importants débats, M. le rapporteur général a dit l’essentiel : 10 % des contribuables français paient 75 % de l’impôt sur le revenu.

J’insiste également sur le problème juridique que soulèverait, à tout le moins, l’adoption des amendements nos I-1666, I-652 rectifié et I-902 : le Conseil constitutionnel risquerait fort de juger de telles dispositions confiscatoires, d’autant que l’augmentation de l’impôt sur le revenu viendrait probablement s’ajouter à la contribution différentielle.

Au-delà du taux facial qui s’affiche – sur ce point, je vous renvoie à l’échange que nous avons eu à l’instant avec M. Sautarel –, la multiplication des dépenses fiscales et des niches permet aux personnes disposant de très hauts revenus de bénéficier d’un plus faible taux d’imposition que les personnes dont les revenus sont presque dix fois moins importants. D’où l’intérêt de créer une CDHR.

Enfin, je formulerai une remarque d’ordre philosophique. Ce gouvernement a choisi de ne pas taxer le travail ; nous aurons sans doute l’occasion de débattre de la taxation du patrimoine et du capital.

Dès lors, imposer d’une manière aussi extrême les revenus du travail, même élevés, serait presque confiscatoire et constituerait un changement de paradigme. Ce serait sortir d’une logique d’équité, alors que l’impôt sur le revenu est déjà très progressif.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cette série d’amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. Je rappellerai au rapporteur général et au ministre que, l’année dernière, le dogme de la stabilité fiscale était invoqué à l’envi, ici même, par ceux qui prétendaient apporter de la lisibilité aux entreprises ou à d’autres acteurs. Cela s’entend, mais il faut être sérieux et donner à ces derniers une perspective sur deux ou trois années.

Tel était d’ailleurs l’enjeu du pacte de stabilité et de croissance (PSC) et du plan budgétaire et structurel de moyen terme (PSMT), qui semblent avoir été vidés de leur contenu.

Nous avons accompli un certain nombre d’efforts, et l’État, à juste titre, est intervenu lors de la crise de la covid et l’explosion de l’inflation. Maintenant, il faut rembourser les sommes qui ont été distribuées en soutien à l’économie. Mais comment va-t-on s’y prendre ?

Cette année, vous avez ouvert les discussions budgétaires en disant vouloir taper sur la sécurité sociale et, de manière assez symbolique, vous avez annoncé mettre à contribution les riches et les entreprises qui gagnent le plus. Par ailleurs, vous avez insisté sur la nécessité de réduire la dépense publique.

Soyons sérieux, monsieur le ministre : dans les faits, une hausse de la fiscalité est inévitable. D’ailleurs, beaucoup commencent à parler d’augmenter la TVA…

Depuis quelques années, les baisses d’impôts engagées coûtent au pays de 50 milliards d’euros à 60 milliards d’euros par an. Au-delà, nous avons investi et soutenu les entreprises au travers des crises. D’où la nécessité d’augmenter la fiscalité. Mais qui va-t-elle concerner ? Si l’on rehausse la TVA, ce sont tous les citoyens qui seront concernés. Ne devrait-on pas plutôt réintroduire de la progressivité, afin que l’effort soit justement réparti ?

Enfin, le Gouvernement répète que 10 % des Français paient à eux seuls 75 % de l’impôt sur le revenu. Mais il faut aller au-delà.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Grégory Blanc. Tous les contribuables remplissent une déclaration fiscale, de manière légale. Et il faut mettre plus de progressivité dans cette imposition.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic, pour explication de vote.

M. Thierry Cozic. Vous n’étiez pas à cette place l’an dernier, monsieur le ministre, mais vous faites preuve d’une constance assez formidable dans vos propos.

Vous affirmez que 10 % des foyers les plus riches paient 75 % de l’impôt sur le revenu. Toutefois, nous débattons ici de la progressivité de cet impôt, et celle-ci n’est pas démontrée aujourd’hui. La TVA, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et la taxe foncière, qui représentent la plus grande part de nos impôts, ont un caractère régressif : plus les contribuables sont modestes, plus la TVA représente un pourcentage important de leur revenu.

Nous pouvons rendre l’impôt sur le revenu plus progressif encore : c’est bien l’objet de ces amendements. Toutefois, la progressivité pose un réel problème, comme notre collègue Savoldelli l’a signalé tout à l’heure, car il existe au milieu du barème une tranche concernant les foyers dont les revenus s’étalent entre 29 000 euros et 84 000 euros. Dans ces conditions, comment cet impôt peut-il être redistributif ? Au contraire, il s’agit clairement d’un système anti-redistributif.

Encore une fois, aux yeux du Gouvernement, notre architecture fiscale est très progressive, comme l’illustre au plus haut point l’impôt sur le revenu.

Entre 2017 et 2023, le rendement de la TVA a progressé de 36,8 %, passant de 152 milliards d’euros à 206 milliards d’euros. Dans le même temps, les recettes de l’impôt sur le revenu sont passées de 73 milliards à 90 milliards d’euros, soit une hausse de 23 %.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Thierry Cozic. Au cours des dernières années, on a donc pris davantage d’argent dans la poche des Français qui paient la TVA que dans celle des contribuables qui s’acquittent de l’impôt sur le revenu. Or celui-ci est le seul impôt progressif.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je m’attendais à ce que ces amendements reçoivent un avis défavorable ; ils ne seront probablement pas adoptés.

Pour autant, le rapporteur général et le ministre devraient les chiffrer : cela permettrait à nos concitoyens de se forger une opinion et de porter un regard critique sur les propositions que nous formulons dans cet hémicycle.

M. Cazenave s’y était d’ailleurs employé l’année dernière. Quant au rapporteur général, il avait refusé, comme aujourd’hui, tous les amendements visant à renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu.

Par ailleurs, cela ne va sans doute pas plaire à tout le monde ici, mais invoquer l’argument de l’inconstitutionnalité pour faire échec à ces amendements ne tient pas. Ne le prenez pas mal, monsieur le ministre, mais je vous invite à faire preuve de cohérence, car, l’an dernier, le Gouvernement a présenté un projet de loi pour contrôler l’immigration en sachant pertinemment que certains articles seraient déclarés anticonstitutionnels et censurés.

Mme Nathalie Goulet. Ah ! Bien joué !

M. Pascal Savoldelli. Je vous le dis avec sérieux et rigueur, sans volonté de polémiquer : le Gouvernement serait bien inspiré de ne pas opposer l’argument de l’inconstitutionnalité à notre amendement qui tend à fixer un taux de progressivité à 55 %.

Enfin, lors de la discussion générale, j’ai parlé de « désharmonie sociale ». Je n’ai pas de monopole sur les propos que je m’apprête à tenir, mais songez que des millions de gens veulent payer des impôts : cessez donc de prétendre le contraire !

Certains ne sont pas en mesure de contribuer parce qu’ils n’en ont pas les moyens, même si la plupart d’entre eux travaillent ; j’aimerais que vous puissiez comprendre cela.

J’ai toujours milité pour augmenter les salaires. En revanche, jamais je n’aurais pensé que nous puissions avoir un jour un débat sur une catégorie de Français qu’on appelle les « bas salaires », comme c’est le cas aujourd’hui. Car c’est bien d’eux que nous parlons au travers de ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-1666.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-652 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-902.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-653.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-913 rectifié, I-1095 rectifié et I-1433 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2 (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Discussion générale

5

Modification de l’ordre du jour

Mme la présidente. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande d’inscrire par priorité, en premier point de l’ordre du jour du mercredi 4 décembre prochain, et sous réserve de leur dépôt, la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024.

En avant-dernier point de l’ordre du jour du jeudi 5 décembre, il demande d’inscrire, sous réserve de leur dépôt, la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

En dernier point de l’ordre du jour du jeudi 12 décembre, il demande d’inscrire la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à prolonger la dérogation d’usage des titres-restaurants pour tout produit alimentaire.

Enfin, en deuxième point de l’ordre du jour du mercredi 18 décembre, il demande d’inscrire, sous réserve de leur dépôt, la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2025.

Acte est donné de ces demandes.

Pour chacun de ces textes, nous pourrions fixer le délai limite pour l’inscription des orateurs des groupes la veille, à quinze heures.

Pour l’examen, le jeudi 12 décembre, de la proposition de loi visant à prolonger la dérogation d’usage des titres-restaurants pour tout produit alimentaire, nous pourrions fixer le délai limite pour le dépôt des amendements de séance au lundi 9 décembre, à douze heures.

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de M. Dominique Théophile.)

PRÉSIDENCE DE M. Dominique Théophile

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

6

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Monsieur le président, lors du scrutin n° 63 sur l’amendement n° 135 rectifié bis, mon collègue Jean-Baptiste Lemoyne souhaitait voter contre.

M. le président. Acte est donné de votre mise au point, mon cher collègue. Elle figura dans l’analyse politique du scrutin concerné.

7

Article 2 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Après l’article 2 (début)

Loi de finances pour 2025

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2025.

Dans la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier, aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 2.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Après l’article 2 (interruption de la discussion)

Après l’article 2

M. le président. L’amendement n° I-654, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 4 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Pour une durée de dix ans, et sous réserve des conventions fiscales signées par la France, les personnes de nationalité française ayant résidé au moins trois ans en France sur les dix années ayant précédé leur changement de résidence fiscale vers un État pratiquant une fiscalité inférieure de plus de 50 % à celle de la France en matière d’imposition sur les revenus du travail, du capital ou du patrimoine. Les personnes soumises aux obligations du présent alinéa bénéficient d’un crédit d’impôt égal à l’impôt sur ces mêmes revenus qu’elles ont déjà acquitté dans leur pays de résidence. »

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement vise à imposer les exilés fiscaux qui partent s’installer dans un pays étranger où le taux d’imposition est inférieur de moitié à celui qui est applicable en France. Ainsi, seuls les citoyens qui résident dans les paradis fiscaux seront concernés.

C’est une mesure que nous défendons régulièrement ; j’ai bien pris acte de l’avis que le rapporteur général a formulé les années précédentes.

Toutefois, je tiens à lui rappeler que nous sommes, nous aussi, attachés au principe de la résidence fiscale. Nous sommes donc défavorables à une imposition fondée sur le critère de nationalité. Le présent amendement vise simplement à élargir la notion de résidence fiscale. La clause anti-abus ainsi créée ne la remettrait pas en cause.

Par ailleurs, l’adoption de cet amendement permettrait d’harmoniser la fiscalité au sein de l’Union européenne, d’autres pays ayant déjà adopté un dispositif similaire.

Ainsi, la loi suédoise prévoit que le contribuable installé à l’étranger, quel que soit le pays concerné, demeure imposable pendant dix ans pour l’ensemble de ses revenus – dividendes, plus-values, revenus immobiliers, salaires –, au même titre que les résidents.

L’imposition en France des contribuables partis à l’étranger est donc conforme au droit européen. Elle serait grandement facilitée, en pratique, par l’échange automatique de renseignements sur les comptes financiers qui est en place depuis 2016.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Par habitude et par constance, j’émettrai un avis défavorable sur cet amendement, comme les années précédentes pour des dispositions similaires.

Je commencerai par une remarque d’ordre philosophique. Au travers de cet amendement, mon cher collègue, vous introduisez un critère de nationalité, alors que notre système fiscal repose sur un critère de résidence. Il est d’ailleurs assez ironique que les sénateurs communistes s’inspirent du système fiscal en vigueur aux États-Unis… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe CRCE-K.)

Par ailleurs, sur le plan technique, votre dispositif est inopérant, et cela pour trois raisons.

Tout d’abord, il s’applique sous réserve des conventions fiscales internationales qui couvrent plus de 130 pays.

Ensuite, un critère de pays à fiscalité limitée est difficile à appliquer, tant les modèles d’imposition varient selon les États.

Enfin, l’adoption de cet amendement aurait pour effet de pénaliser de manière excessive les binationaux. D’ailleurs, comment les traiteriez-vous ? Je serais curieux de le savoir…

Comme les années précédentes sur des dispositions similaires, par habitude aussi bien que par constance, j’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Il me semble essentiel de s’en tenir à la notion de résidence fiscale et de ne pas introduire de critère de nationalité.

Seuls deux pays recourent à un tel critère : l’Érythrée et les États-Unis ; d’ailleurs, des amendements sont déposés chaque année devant le Congrès américain pour remédier aux difficultés rencontrées par les binationaux.

Si votre objectif est de lutter contre la fraude, je vous rejoins bien volontiers, mais d’autres mesures sont envisageables. Ainsi, je vous renvoie à l’amendement de Mme Goulet, que nous examinerons dans quelques instants et qui vise la durée de reprise fiscale, un point sur lequel nous pouvons effectivement progresser.

J’y insiste, gardons-nous de mettre un pied dans la question de la nationalité, qui créerait des problèmes très difficiles à résoudre.

Enfin, votre amendement n’est pas conforme aux règles constitutionnelles, me semble-t-il.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je comprends parfaitement les arguments qui ont été opposés à ces amendements. Toutefois, cela fait des années que nous discutons de l’application de l’article 238 A du code général des impôts sur les paradis fiscaux, ainsi que de leur définition.

Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la signature d’une simple convention pour exclure certains pays de la liste noire ou de la liste grise. Il faudra que nous nous penchions sérieusement sur ce sujet.

Vous le savez, monsieur le ministre, il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. En l’espèce, ce n’est pas parce que des pays signent une convention qu’ils vont forcément l’appliquer. Nous en avons de nombreux d’exemples, y compris en Europe.

Cet amendement est peut-être mal rédigé ; en tout état de cause, il ne donne satisfaction ni au rapporteur général ni au ministre. Cela étant, son objet met en lumière le rapport problématique que notre pays entretient avec certains États, comme la Suisse ou le Luxembourg, qui demeurent des paradis fiscaux au cœur de l’Europe.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le rapporteur général, vous avez été véhément.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mais non !

M. Pascal Savoldelli. Alors, je me suis peut-être mal exprimé. Notre amendement vise non pas à fonder l’imposition sur le critère de nationalité, mais à élargir la notion de résidence fiscale, afin d’éviter les abus.

Encore une fois, les expatriés, qui travaillent à l’étranger et perçoivent des revenus de source étrangère, ne sont pas concernés par notre amendement. Celui-ci vise seulement les exilés fiscaux.

Voilà pourquoi je ne comprends pas votre véhémence. En ne tenant pas compte du dispositif proposé, vous n’encouragez pas l’application de la fiscalité, telle que le Parlement la définit. Ainsi, vous laissez proliférer les paradis fiscaux qui, à mon avis, alimentent une fraude parfaitement inacceptable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-654.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-892 rectifié ter, présenté par M. Iacovelli, Mme Havet, M. Buval, Mmes Nadille et Lermytte et MM. Rohfritsch et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au début de l’article 80 septies, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les pensions alimentaires reçues au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation d’un enfant mineur ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu. » ;

2° Le deuxième alinéa du 2° du II de l’article 156 est ainsi rédigé :

« À partir du 1er janvier 2025, le contribuable ne peut déduire que la moitié des sommes versées au cours de l’année, au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation d’un enfant mineur, lorsque ce dernier n’est pas pris en compte dans le calcul du quotient familial.

« À compter du 1er janvier 2026, aucune déduction ne peut être opérée au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation pour les descendants mineurs qui ne sont pas inclus dans le calcul du quotient familial. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. Je m’inspire ici du rapport que j’ai remis à l’ancien Premier ministre Gabriel Attal, en septembre dernier, sur les familles monoparentales et les pensions alimentaires.

L’amendement n° I-892 rectifié ter vise à défiscaliser la pension alimentaire reçue par le parent ayant la garde de l’enfant, soit la mère dans près des trois quarts des cas, et à supprimer l’avantage fiscal dont bénéficie le parent qui la verse. En effet, le parent contraint de verser une pension alimentaire peut la déduire de ses revenus, tandis que celui qui la reçoit doit l’ajouter à ses revenus, ce qui peut le rendre imposable ou entraîner une augmentation significative de son imposition.

Le bénéficiaire de la pension qui, en raison de faibles revenus, ne paie pas d’impôts peut même devenir imposable à ce titre.

Cet amendement est une mesure de justice fiscale particulièrement nécessaire, notamment pour les familles monoparentales, le parent seul étant la mère dans 82 % des cas.

Selon l’Insee, en 2018, quelque 41 % des enfants vivant dans ces familles se trouvaient sous le seuil de pauvreté, contre 21 % dans les autres familles.

La pension alimentaire, qui vise à couvrir partiellement les dépenses liées à l’entretien et à l’éducation des enfants, est aujourd’hui considérée comme un revenu imposable. Cela aboutit à une double peine pour les parents seuls, majoritairement les mères, comme je l’ai rappelé.

Non seulement elles paient plus d’impôts, mais elles voient leurs droits sociaux diminuer, ceux-ci étant souvent soumis à des conditions de ressources. Il est donc essentiel de corriger cette anomalie fiscale, afin de mieux protéger ces familles vulnérables et réduire les inégalités socioéconomiques.

Nous proposons d’échelonner cette réforme sur deux ans, pour que les parents qui versent la pension alimentaire ne subissent pas une hausse d’impôts trop brutale.

M. le président. L’amendement n° I-451 rectifié ter, présenté par M. Iacovelli, Mme Havet, MM. Buval et Rohfritsch, Mmes Nadille et Lermytte et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au début de l’article 80 septies, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les pensions alimentaires reçues au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation d’un enfant mineur ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu dans la limite de 4 000 euros par enfant plafonnée à 12 000 euros par an. » ;

2° Le 2° du II de l’article 156 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après les mots : « 767 du code civil à l’exception », sont insérés les mots : « de celles versées au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation d’un enfant mineur et » ;

b) Le deuxième alinéa est supprimé ;

c) La première phrase du dernier alinéa est supprimée.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. Il s’agit d’un amendement de repli. Encore une fois, les familles monoparentales rencontrent des difficultés spécifiques : 35 % d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté, contre 14 % des familles biparentales.

J’y insiste, cette vulnérabilité s’aggrave lorsque le parent seul est la mère. Ainsi, le taux de pauvreté des enfants vivant seuls avec leur mère atteint 46 %, contre 22 % pour les enfants qui vivent seuls avec leur père.

Dans le même temps, le non-recours au revenu de solidarité active (RSA) et à l’allocation de soutien familial (ASF) s’élève à 15 %, alors qu’il s’agit des seules aides réservées à ces familles en difficulté.

Dans un rapport publié en 2021, le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) avait d’ailleurs signalé l’existence d’incohérences et de ruptures d’égalité entre les parents, en raison de ce système d’imposition.

Nous proposons donc, pour l’exercice 2025, que le montant de la pension alimentaire soit réintégré dans le calcul de l’impôt sur le revenu du parent qui la verse – le parent bénéficiaire jouira ainsi d’une défiscalisation –, avec un plafonnement à 4 000 euros par enfant et à 12 000 euros par an.

Une telle mesure contribuera à réduire le déficit public, avec un gain estimé à 450 millions d’euros par an pour l’État. Ce gain s’explique par un taux d’imposition plus élevé pour le père que pour la mère, car il touche souvent des revenus plus importants.

M. le président. L’amendement n° I-655, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au début de l’article 80 septies, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les pensions alimentaires reçues au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation d’un enfant mineur ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu. ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Notre collègue Iacovelli a très bien présenté les enjeux ; j’ajouterai quelques éléments sur la défiscalisation de la pension alimentaire pour le parent bénéficiaire.

Selon une étude de l’Insee publiée en 2015, mais qui reste d’actualité, le montant moyen de la pension alimentaire plafonne à 170 euros. L’Institut de recherches économiques et sociales (Ires), de son côté, évalue le montant par enfant à 625 euros.

Je le rappelle, la pension alimentaire n’est pas fiscalisée pour le parent qui la verse, soit le père dans la majorité des cas. Parallèlement, le parent qui la reçoit devrait pouvoir bénéficier d’une défiscalisation. Tel est l’objet du présent amendement.

Nous n’avons pas l’habitude de réclamer l’instauration d’une niche fiscale, mais, en l’occurrence, il serait intéressant de faire droit à cette demande.

De façon plus générale, nombre de pensions alimentaires ne sont pas versées. Comme le révèle l’Agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires (Aripa), cela représente tout de même 180 millions d’euros par an.

M. le président. Le sous-amendement n° I-2222, présenté par M. Iacovelli, est ainsi libellé :

Amendement n° 655

I. – Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

, dans la limite de 4 000 euros par enfant et 12 000 euros par an

II. – Après l’alinéa 4

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

2° Le I de l’article 194 est ainsi modifié :

a) La première phrase du quatrième alinéa est complétée par les mots : « ou pour lequel il verse une pension alimentaire afin de contribuer à son entretien et son éducation. » ;

b) La seconde phrase du même quatrième alinéa et les cinquième à neuvième alinéas sont supprimés.

III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État de l’alinéa […] est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. Ce sous-amendement vise à compléter le dispositif proposé.

Pour compenser la défiscalisation offerte au parent qui bénéficie de la pension alimentaire, nous proposons de rééquilibrer le régime fiscal de la contribution à l’éducation et à l’entretien de l’enfant au niveau des demi-parts.

Nous renforcerions ainsi l’équité fiscale entre les parents, tout en limitant les effets de déductibilité asymétriques.

M. le président. L’amendement n° I-1523 rectifié bis, présenté par MM. Rochette, Chasseing, V. Louault, Grand et Brault, Mmes L. Darcos et Bourcier, M. A. Marc, Mme Lermytte, M. Chevalier, Mme Paoli-Gagin et MM. Capus, Fargeot et Delahaye, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° du II de l’article 156 du code général des impôts est abrogé.

La parole est à M. Emmanuel Capus.

M. Emmanuel Capus. Cet amendement de notre collègue Rochette vise simplement à supprimer la possibilité de déduire les pensions alimentaires versées à l’étranger de l’impôt sur le revenu.

M. le président. L’amendement n° I-616 rectifié, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 2° du II de l’article 156 de code général des impôts, après le mot : « civil, », sont insérés les mots : « versés aux seuls parents résidant sur le territoire national, ».

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Le présent amendement vise à encadrer l’avantage fiscal lié à la déduction des pensions alimentaires, en réservant celle-ci spécifiquement aux parents résidant en France.

Actuellement, les pensions alimentaires versées à des proches, comme les parents, sont déductibles des impôts sous certaines conditions, indépendamment du lieu de résidence du bénéficiaire.

Ainsi, nous proposons de restreindre cet avantage aux pensions versées aux parents résidant sur le territoire national.

Le motif économique est clair.

Tout d’abord, il s’agit de garantir que les contribuables bénéficiant de cet allègement fiscal contribuent directement à l’économie et au système fiscal français. Ainsi, nous nous assurons que les fonds restent dans le circuit économique national, ce qui est essentiel pour financer les services publics et maintenir la solidarité nationale.

Ensuite, les dispositions de cet amendement répondent à une préoccupation croissante concernant le risque d’évasion et de fraude fiscales, lié aux versements effectués à des bénéficiaires vivant à l’étranger. En effet, il est souvent difficile de contrôler l’utilisation des fonds versés hors de France ou de vérifier la légitimité des pensions alimentaires.

Dans ces cas, en restreignant l’avantage fiscal aux seuls résidents français, nous réduisons les risques d’abus et de détournement des mécanismes fiscaux. À titre d’exemple, le 7 septembre 2023, Gabriel Attal, alors ministre des comptes publics, révélait que deux agents de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) avaient été envoyés au consulat français d’Alger. Mille retraités quasi centenaires y avaient été convoqués ou avaient fait l’objet de visites à domicile. Une telle opération avait permis de révéler la non-conformité d’environ 300 dossiers…

Plus récemment, on a constaté qu’une femme installée en Algérie percevait indûment des aides sociales au titre du décès de son père survenu en 2011.

Alors que des efforts significatifs sont demandés aux contribuables français, il est temps d’agir de manière plus efficace contre la fraude.

L’adoption de cet amendement permettrait non seulement de mieux protéger nos finances publiques, mais aussi de redonner du sens à l’équité fiscale et à la confiance dans le système.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. En prétendant remédier aux difficultés rencontrées par les familles monoparentales, notamment dans le cadre du versement de la pension alimentaire, les dispositions de ces amendements ratent leur cible.

En effet, dans un certain nombre de cas, les ménages aux revenus modestes ne sont pas imposables ; parfois, le quotient familial s’applique pour l’autre conjoint, ce qui est normal.

Les dispositions des amendements nos I-1523 rectifié bis et I-616 rectifié, en particulier, reviendraient à imposer différemment les parents qui doivent verser une pension alimentaire en fonction du choix du lieu de résidence du bénéficiaire. Un tel dispositif n’est pas équitable et poserait des problèmes de constitutionnalité.

En conséquence, la commission sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. En effet, les dispositions des deux derniers amendements en discussion commune se heurteraient à la Constitution.

Quant aux autres amendements, leurs dispositions soulèvent quelques problèmes pratiques, même si je comprends la philosophie qui les sous-tend.

Nous ne pouvons pas exclure de l’équation le quotient familial et les demi-parts ou parts complémentaires, qui assurent une forme d’équilibre, même s’il est imparfait. C’est la raison pour laquelle la pension alimentaire est imposable : il s’agit d’un revenu récurrent, dont le bénéficiaire peut déclarer une part ou une demi-part.

Surtout, ce qui me pose le plus de difficulté, c’est l’iniquité qu’un tel dispositif créerait entre plusieurs contribuables. En effet, un contribuable qui perçoit 24 000 euros de revenus annuels et qui les utilise en partie pour subvenir aux besoins de son enfant se verra imposé. En revanche, celui qui ne déclare pas les 4 000 euros de pension alimentaire dont il bénéficie, en plus de ses 20 000 euros de revenus propres, ne sera pas imposé.

Ainsi, instituer un avantage fiscal pour les bénéficiaires d’une pension alimentaire créerait une inégalité par rapport aux personnes qui n’en perçoivent pas. Tel est précisément le biais qu’il nous faut éviter.

Je n’ignore pas, monsieur le sénateur Iacovelli, à quel point vous vous êtes investi sur le sujet des familles monoparentales. Or au sein même de ces familles, certaines ne bénéficient pas de pensions alimentaires. Il serait parfaitement injuste que celles-ci paient plus d’impôt pour ce seul motif.

C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.

M. Xavier Iacovelli. Nous devons progresser sur un point important : la systématisation du prélèvement à la source des pensions alimentaires. Si les efforts de l’Agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires (Aripa) et le travail entrepris par la Caisse d’allocations familiales (CAF) permettent d’y parvenir partiellement, notamment s’agissant du flux, un effort important reste à fournir quant au stock.

Globalement, nous commençons à atteindre cet objectif, mais nous pourrions nous inspirer de modèles étrangers, en particulier du modèle québécois, en matière de prélèvement à la source, afin de ne plus permettre au parent qui n’a pas la garde de l’enfant d’organiser son insolvabilité afin de se soustraire au versement de la pension alimentaire.

Monsieur le ministre, la contribution moyenne à l’éducation de l’enfant s’élève aujourd’hui à environ 196 euros. Or cette contribution devrait, selon moi, être prioritairement ciblée vers l’enfant et ses besoins réels, et non pas seulement vers les revenus du parent qui la verse.

Cette somme de 196 euros peut pourtant conduire certaines familles à franchir un seuil et à devenir imposables ou à être privées d’autres allocations qui pourraient être utiles à l’entretien de la famille.

Lors d’une séparation, le parent gardien, une femme dans 80 % des cas, subit une perte de pouvoir d’achat de 25 %. Force est de constater qu’il existe aujourd’hui une inégalité vis-à-vis de ces pensions alimentaires, qui ne sont qu’indicatives et ne correspondent pas réellement à la prise en charge des besoins de l’enfant. Il faut engager un travail de fond sur les montants et les barèmes de ces pensions alimentaires.

C’est la raison pour laquelle, dans les amendements et les sous-amendements que j’ai rédigés, je propose des barèmes selon lesquels, au-delà d’un certain montant, les pensions alimentaires versées seraient fiscalisables pour le bénéficiaire et déductibles pour le parent qui les verse, mais resteraient défiscalisées en deçà de cette somme.

À défaut de retenir un tel modèle, dans lequel la pension serait fiscalisable pour l’un et déductible pour l’autre, nous pourrions à tout le moins attribuer des demi-parts égalitaires aux deux parents, ce qui inciterait chacun d’eux à verser sa contribution.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-892 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-451 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° I-2222.

(Le sous-amendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-655.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Monsieur Capus, l’amendement n° I-1523 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Emmanuel Capus. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1523 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° I-616 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-676, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 80 quater est abrogé ;

2° Le II de l’article 199 octodecies est ainsi rétabli :

« II. – Les sommes d’argent mentionnées à l’article 275 du code civil lorsqu’elles sont versées sur une période supérieure à douze mois à compter de la date à laquelle la convention de divorce par consentement mutuel mentionnée à l’article 229-1 du même code a acquis force exécutoire ou le jugement de divorce est passé en force de chose jugée ne constituent pas des revenus imposables pour leur bénéficiaire. » ;

3° Au premier alinéa de l’article 1133 ter, les mots : « et qui ne sont pas soumis aux dispositions de l’article 80 quater du présent code » sont supprimés.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement vise à réparer une injustice fiscale née d’un dispositif qui était lui-même censé en réparer une autre au sein du couple… Il est ici question de la prestation compensatoire, dont l’objet est de remédier au déséquilibre financier entraîné par la vie commune, le régime matrimonial et, partant, le divorce.

Les femmes travaillent gratuitement au service du foyer, bien souvent au détriment de leur carrière professionnelle. En France, elles réalisent en moyenne 71 % du travail domestique et 65 % du travail familial. Si le temps qu’elles y consacrent a reculé depuis les années 1980, ce qui est heureux, la part qu’y prennent les hommes est demeurée stable.

Par conséquent, la persistance des comportements genrés dans la répartition du travail domestique nous amène à concevoir des mécanismes de réduction des inégalités économiques issues de la relation.

Depuis une loi adoptée en 2000, le régime fiscal de la prestation compensatoire prévoit que, si le capital est libéré en numéraire sur une période supérieure à douze mois à compter de la date du jugement, le débiteur – l’homme, en l’espèce – bénéficie d’une déduction d’impôt illimitée.

En revanche, s’il s’en acquitte dans un délai inférieur à douze mois, l’avantage qu’il en retire est plus limité, puisqu’il s’agit d’une réduction d’impôt de 25 %, dans la limite de 30 500 euros.

Pis, dans le premier cas, lorsque le versement s’étale dans le temps, l’ex-conjointe n’est pas imposable, alors qu’elle le devient dans le second.

Ce dispositif revient donc à inciter à différer le versement de la prestation compensatoire, ce qui nous apparaît comme une double peine consécutive au divorce. Cette violence économique ne peut plus perdurer et, malgré les avancées obtenues dans la loi de finances pour 2021, qu’il faut saluer, il convient d’aligner le traitement fiscal des prestations compensatoires en généralisant la déduction la plus large.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Un problème de rupture d’égalité devant l’impôt pourrait se poser, si j’en crois la présentation qui vient d’être faite. Il me semble d’ailleurs que les débats à l’Assemblée nationale avaient également soulevé cette difficulté.

Je souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Ce sujet d’une grande complexité a également été discuté à l’Assemblée nationale, notamment avec Mme la députée Marie-Pierre Rixain.

Il importe de bien distinguer les prestations compensatoires des pensions alimentaires. L’objectif du règlement rapide que vous avez évoqué, qui justifie la réduction d’impôt, est précisément de permettre le versement dans des délais plus courts. Cela doit, me semble-t-il, être préservé.

En dehors de ce contexte, il n’existe pas véritablement de motif d’intérêt général justifiant de déroger aux principes généraux de l’impôt sur le revenu et d’égalité devant les charges publiques, lesquels prévoient l’imposition des revenus perçus selon les capacités contributives de chacun.

C’est pourquoi, monsieur le sénateur, je vous invite à retirer cet amendement, qui, pour plusieurs raisons, notamment juridiques, n’est pas viable en l’état.

En revanche, comme je m’y suis engagé auprès de Marie-Pierre Rixain et comme je m’y engage de nouveau devant vous, nous allons y travailler, et déterminer, avec les délégations aux droits des femmes, les moyens de faire progresser ce sujet.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je remercie M. le ministre d’avoir prêté attention aux débats qui se sont tenus, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Je le reconnais, nous sommes face à une situation d’une extrême complexité.

Je maintiendrai néanmoins cet amendement, tout en ne doutant pas de votre sincérité quant à votre volonté de travailler en commun sur ce sujet, car il nous faut garder une trace du travail que nous engageons.

Le régime fiscal actuellement applicable incite les ex-conjoints à pratiquer une forme de rétention sur la somme due, dans la plupart des cas, à l’ex-conjointe ou, plus rarement, à l’ex-conjoint. C’est une réalité, il ne s’agit donc pas d’une posture.

Vous nous dites que vous y travaillerez, mais un vote dans cet hémicycle permettra de garantir que le travail se poursuive dans les deux assemblées.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-676.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-62 rectifié bis, présenté par Mme N. Goulet, MM. Fargeot, Menonville et Cambier, Mme Romagny, M. Kern, Mmes Perrot et Billon et M. Courtial, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des impôts est ainsi modifié

1° À l’article 80 quinquies les mots : « à l’exclusion de la fraction des indemnités allouées aux victimes d’accidents du travail exonérée en application du 8° de l’article 81 et des indemnités qui sont allouées à des personnes atteintes d’une affection comportant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse » sont supprimés ;

2° Le 8° de l’article 81 est abrogé.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. J’ai lu avec la plus grande attention un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur la revue des dépenses relatives aux affections de longue durée (ALD). J’ai ainsi constaté que le coût des ALD pour les finances publiques était évalué à 12 milliards d’euros, dont 600 millions d’euros d’exonérations fiscales.

Je me suis alors penchée sur le code général des impôts et j’ai découvert que son article 80 quinquies organisait la défiscalisation des indemnités allouées au titre des accidents du travail et des affections de longue durée. Poursuivant ma lecture du rapport de l’Igas, j’ai relevé que ses auteurs considéraient qu’il s’agissait d’un revenu de remplacement et s’interrogeaient par conséquent sur la légitimité de sa défiscalisation.

À l’heure où, notamment lors de l’examen du PLFSS, il a été expliqué qu’il fallait assujettir les revenus de remplacement à des charges sociales, à l’heure où nous aspirons à l’égalité de traitement, pourquoi cet article prévoit-il une défiscalisation dans ce cas, alors qu’il s’agit purement et simplement d’un revenu de remplacement ?

C’est la raison pour laquelle je vous propose de supprimer ces dispositifs de défiscalisation.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° I-136 rectifié bis est présenté par Mme N. Goulet, MM. Marseille, Fargeot, Menonville et Cambier, Mme Romagny, M. Kern, Mmes Perrot et Billon et M. Courtial.

L’amendement n° I-1867 rectifié bis est présenté par MM. Canévet et Longeot, Mme Sollogoub et MM. Folliot et Delcros.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des impôts est ainsi modifié

1° À l’article 80 quinquies les mots : « de la fraction des indemnités allouées aux victimes d’accidents du travail exonérée en application du 8° de l’article 81 et » sont supprimés ;

2° Le 8° de l’article 81 est abrogé.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° I-136 rectifié bis.

Mme Nathalie Goulet. Il s’agit d’un amendement de repli.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° I-1867 rectifié bis.

M. Michel Canévet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° I-62 rectifié bis tend à supprimer d’un bloc trois dépenses fiscales : premièrement, l’exonération des indemnités journalières de sécurité sociale servies au titre des maladies longues et coûteuses ; deuxièmement, l’exonération partielle des indemnités temporaires servies aux victimes d’accidents du travail ; troisièmement, l’exonération des prestations et rentes viagères servies aux victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP).

L’objet de l’amendement me semble incomplet, en ce qu’il omet de mentionner ces deux derniers points.

Je comprends l’objectif de simplification et de réduction du nombre des dépenses fiscales, mais la suppression sèche de ces trois dispositifs, qui n’ont pas été évalués depuis 2011, me paraît, à ce stade, disproportionnée. En outre, elle reviendrait à bouleverser le régime d’imposition de populations qui, pour certaines, sont fragiles.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, mon avis serait défavorable.

S’agissant des amendements identiques n° I-136 rectifié bis et I-1867 rectifié bis, je rappelle que les indemnités temporaires ne sont exonérées qu’à hauteur de 50 % de leur montant. Seules les prestations et les rentes viagères sont totalement exonérées. Il conviendrait donc soit de mener un travail supplémentaire, soit d’aller un peu plus loin dans le réexamen de ces niches sociales, pour peut-être proposer de nouveaux amendements à l’occasion de l’examen du prochain projet de loi de finances.

Je sollicite donc, là encore, le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Comme l’a indiqué M. le rapporteur général, il est question de plusieurs niches sociales qu’il convient de bien distinguer.

Tout d’abord, s’agissant des indemnités journalières (IJ), notamment celles qui sont servies aux victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles, elles peuvent être considérées comme venant compenser en partie le préjudice extrapatrimonial subi par le salarié. C’est ce qui explique leur exonération partielle actuelle.

Vous évoquez également l’exonération des indemnités versées notamment au titre des affections de longue durée (ALD), qui permet d’alléger la fiscalité des personnes devant supporter des frais médicaux élevés et dont le reste à charge peut se révéler important, alors même que leur revenu d’activité peut être structurellement en baisse. Cette niche sociale existe précisément pour cette raison.

Ensuite, les suppressions d’exonération que vous visez concernent les seuls salariés et remettraient donc en cause des évolutions législatives récentes qui tendent à aligner le traitement fiscal des salariés et des non-salariés placés dans la même situation.

Enfin, je note que la rédaction de cet amendement va au-delà de sa cible, puisque celui-ci tend à supprimer l’exonération d’impôt sur le revenu applicable également aux prestations et rentes viagères, comme l’a indiqué M. le rapporteur général, notamment à celles qui sont versées aux victimes d’AT-MP et à leurs ayants droit.

Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-62 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-136 rectifié bis et I-1867 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-556 rectifié, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du 1° de l’article 81 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La deuxième phrase est supprimée ;

2° Au début de la troisième phrase, les mots : « Il en est de même des » sont remplacés par le mot :

« Les » ;

3° La dernière phrase est supprimée.

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Cet amendement vise à supprimer l’avantage fiscal accordé aux journalistes, une niche fiscale qui apparaît aujourd’hui injustifiée dans le contexte économique actuel.

Face à une augmentation du coût de la vie, marquée notamment par l’explosion des prix de l’énergie et des produits de consommation courante, il est impératif de garantir une égalité fiscale entre l’ensemble des professions.

Alors que de nombreux Français peinent à boucler leurs fins de mois, le maintien d’un tel avantage pour les journalistes, hérité d’une autre époque, ne peut plus être justifié.

Cette suppression s’inscrirait dans une démarche de rationalisation des dépenses fiscales, lesquelles doivent être réservées à des objectifs stratégiques ou sociaux clairement identifiés, dans un souci d’équité. Il est indispensable de mettre fin à des dispositifs qui créent des inégalités et alimentent un sentiment d’injustice parmi les contribuables.

La situation budgétaire de la France nécessite de repenser l’ensemble des niches fiscales, afin de ne conserver que celles qui répondent à un intérêt général avéré.

M. le président. L’amendement n° I-615 rectifié, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la troisième phrase du premier alinéa du 1° de l’article 81 du code général des impôts, après la première occurrence du mot : « même », sont insérés les mots : « , à l’exception des conseillers régionaux, ».

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Cet amendement vise, quant à lui, à supprimer la niche fiscale des conseillers régionaux. En effet, le texte avait initialement pour objectif de revaloriser les indemnités des élus locaux des petites communes et ne visait pas les conseillers régionaux, qui sont pourtant concernés.

Il s’agit donc, par ces deux amendements, de supprimer la niche fiscale des journalistes comme celle des conseillers régionaux. Chacun doit apporter sa part !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. S’agissant du bénéfice de l’avantage fiscal lié aux indemnités de fonction, j’avoue ne pas avoir bien compris ce qui vous conduit à proposer une telle mesure.

Les élus perçoivent des indemnités, il convient de les traiter tous de la même manière, avec équité. Je ne vois donc pas ce qui justifie de stigmatiser les élus régionaux, départementaux ou communaux. Or c’est un peu cela que vous proposez de faire.

Il y a environ 500 000 élus locaux. Il vaut mieux, selon moi, être solidaire des femmes et des hommes qui choisissent de s’engager dans un mandat public électif. Évitons donc ces stigmatisations inutiles. Elles ne servent personne dans la situation que la France connaît actuellement et qui est marquée par une forme de dégagisme.

Une démocratie repose sur des élus qui s’engagent. Il est normal qu’ils perçoivent une indemnité de fonction, quel que soit leur niveau de responsabilité et quelle que soit l’assemblée dans laquelle ils siègent, puisqu’ils ont ainsi acquis une légitimité.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Joshua Hochart, pour explication de vote.

M. Joshua Hochart. Monsieur le rapporteur général, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! Je n’ai pas stigmatisé les conseillers régionaux. J’ai proposé de rendre le système plus égalitaire en renforçant l’indemnité des élus locaux des petites communes, comme entendait le faire la loi à l’origine.

On ne peut pas comparer un adjoint au maire ou un maire d’une commune, qui perçoit parfois 600 euros par mois, et un conseiller régional, notamment dans les grandes régions.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-556 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-615 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1846 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Longeot et Courtial, Mmes Sollogoub et Billon, M. Delcros, Mme O. Richard, MM. Bleunven et Folliot et Mmes Antoine et Saint-Pé, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 18° de l’article 81 et les articles 163 bis AA et 163 bis B sont abrogés.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1846 rectifié est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-98 rectifié, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 80 duodecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du 1, les mots : « , sous réserve des dispositions suivantes » sont supprimés ;

2° Le deuxième alinéa est supprimé ;

3° Les 1° , 2° , 3° , 4° et 6° sont abrogés ;

4° La seconde phrase du 2 est supprimée.

II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2025.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Je n’aurai sans doute pas plus de chance avec cet amendement, lequel vise à soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités de fin de contrat de travail.

Dans la grande majorité des pays de l’OCDE, ces indemnités n’existent pas ; or, dans notre régime, elles sont défiscalisées. Il s’agit pourtant d’un revenu de remplacement que rien ne justifie de défiscaliser.

Pour revenir sur l’amendement que j’ai précédemment défendu, il va falloir travailler ce sujet : je ne vois pas pourquoi l’Igas formulerait des propositions que nous ne pourrions pas intégrer dans la loi lorsque nous débattons en séance !

Cet amendement vise donc à soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités de fin de contrat, en cas de licenciement comme de rupture conventionnelle.

M. le président. L’amendement n° I-1983 rectifié, présenté par Mmes Puissat et Lavarde, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Au 1° du 1 de l’article 80 duodecies du code général des impôts, après la référence « L. 1235-13, », est insérée la référence : « L. 1235-16, ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Mme Christine Lavarde. À l’inverse du précédent, cet amendement vise à exonérer d’impôt sur le revenu les indemnités versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi si celui-ci est annulé et que le salarié n’est pas réintégré dans l’entreprise.

En fait, il s’agit d’un alignement sur les conditions fiscales qui s’appliquent aux indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. le président. L’amendement n° I-1845 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Longeot et Courtial, Mmes Sollogoub et Billon, MM. Delahaye et Delcros, Mme O. Richard, M. Folliot, Mme Antoine, M. Bleunven et Mmes Saint-Pé, Gacquerre, Havet et Romagny, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 6° du 1 de l’article 80 duodecies du code général des impôts est abrogé.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Le présent amendement vise à soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités reçues par les salariés en cas de rupture conventionnelle du contrat de travail, considérant qu’il s’agit là d’un revenu de remplacement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de l’amendement n° I-98 rectifié, lequel vise à soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités reçues en cas de rupture du contrat de travail, notamment en cas de licenciement ou de rupture conventionnelle.

Ces éléments de rémunération sont particuliers, et il n’est pas illogique qu’ils soient exonérés, d’autant que ces exonérations sont limitées. Je rappelle d’ailleurs que ces indemnités ne sont pas liées à une rupture unilatérale du contrat par le salarié, mais bien à une rupture subie ou conclue d’un commun accord avec l’employeur.

Comme l’an passé, je demande également le retrait de l’amendement n° I-1845 rectifié, qui tend à soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités versées en cas de rupture conventionnelle. En effet, cette exonération n’est ni conditionnelle ni illimitée ; une telle mesure priverait la rupture conventionnelle de son caractère incitatif ; enfin, cette proposition crée une différence de traitement, puisque les indemnités de licenciement sont, quant à elles, exonérées d’impôt sur le revenu dans certaines limites.

Quant à l’amendement n° I-1983 rectifié, défendu par Mme Lavarde, ses dispositions ont été déposées à l’Assemblée nationale et adoptées dans les conditions que l’on sait.

Cette mesure a en outre le mérite de souligner que les indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse sont exonérées d’impôt sur le revenu. Il est donc logique de procéder de même pour les indemnités versées au profit d’un salarié dont le contrat prend fin dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, lorsque celui-ci est ensuite annulé par le juge.

La commission est donc favorable à l’amendement n° I-1983 rectifié, mais défavorable aux deux autres amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Mon avis rejoint celui du rapporteur. Je considère en effet que, dans le cas de la rupture conventionnelle, une telle exonération est justifiée. J’émets donc un avis défavorable sur les amendements qui tendent à la supprimer.

En revanche, l’amendement présenté par Mme Lavarde vise simplement à mettre en cohérence le dispositif ; rien ne justifie que cette exonération ne soit pas mise en place.

L’avis du Gouvernement est donc tout à fait favorable à l’amendement n° I-1983 rectifié.

M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° I-98 rectifié est-il maintenu ?

Mme Nathalie Goulet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-98 rectifié est retiré.

Monsieur le ministre, levez-vous le gage sur l’amendement n° I-1983 rectifié ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Oui, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° I-1983 rectifié bis.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

Monsieur Canévet, l’amendement n° I-1845 rectifié est-il maintenu ?

M. Michel Canévet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1845 rectifié est retiré.

L’amendement n° I-1615, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L’article 81 A du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’indemnité de résidence allouée aux fonctionnaires civils et militaires en service à l’étranger est exonérée d’impôt sur le revenu à hauteur de 66 % de la fraction qui excède le taux de cette indemnité tel qu’il est fixé à Paris.

II. - L’article 81 A du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’indemnité de résidence allouée aux fonctionnaires civils et militaires en service à l’étranger est exonérée d’impôt sur le revenu à hauteur de 33 % de la fraction qui excède le taux de cette indemnité tel qu’il est fixé à Paris.

III. - L’article 81 A du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’indemnité de résidence allouée aux fonctionnaires civils et militaires en service à l’étranger est soumise à l’impôt sur le revenu.

IV. – Le I s’applique pour l’imposition des revenus perçus entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2024.

V. – Le II s’applique pour l’imposition des revenus perçus entre le 1erf janvier 2025 et le 31 décembre 2025.

VI. – Le III s’applique pour l’imposition des revenus perçus à compter du 1er janvier 2026.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Cet amendement vise à soumettre à l’impôt sur le revenu les indemnités de résidence à l’étranger. Il y a quelque temps, j’ai réalisé un contrôle budgétaire, avec mon excellent collègue socialiste Rémi Féraud (Marques de satisfaction sur les travées du groupe SER.), sur les rémunérations du personnel de l’action extérieure de l’État.

J’ai alors découvert, non sans une certaine stupéfaction, que les indemnités de résidence à l’étranger – elles représentent en moyenne 42 % de la rémunération des diplomates qui en bénéficient – ne font l’objet d’aucune justification de notes de frais ou de frais réels, ni d’aucun contrôle, alors même que ces diplomates sont logés, nourris et blanchis.

Je ne vois guère de justification à cette absence d’imposition sur le revenu de telles indemnités.

Afin de ne pas procéder de manière brutale, je propose d’échelonner cette mesure sur trois ans, par tiers, de façon progressive, et non de l’appliquer sur une seule année.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Comme à son habitude, le sénateur Delahaye formule un avis pertinent et empreint de sagesse, susceptible, me semble-t-il, d’obtenir le soutien réfléchi de notre assemblé. Il le souligne lui-même : la mise en œuvre de cette mesure sera progressive.

Je m’en remets donc naturellement à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. L’avis du Gouvernement rejoint celui du rapporteur général, mais nous serons vigilants quant à l’exécution de cette mesure, sur le plan tant juridique que calendaire. Il conviendra d’examiner attentivement, dans le cadre de la navette parlementaire, comment celle-ci pourra être mise en œuvre dans le texte de loi.

Pour autant, le Gouvernement émet également un avis de sagesse sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1615.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-494 rectifié bis, présenté par M. Lurel et Mmes Bélim, Conconne, G. Jourda, Daniel et Blatrix Contat, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le b du 19° ter de l’article 81 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par exception, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, la limite globale est portée à 900 €, dont 600 € pour les frais de carburant ; »

II. – Le I s’applique à compter de l’imposition des revenus de l’année 2025.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Cet amendement a pour objet les frais de carburant. Il vise à maintenir le différentiel qui existait entre la métropole et les outre-mer. Ses dispositions s’appliqueraient tant aux entreprises qu’aux ménages.

M. le président. L’amendement n° I-495 rectifié bis, présenté par M. Lurel et Mmes Bélim, Conconne, G. Jourda et Daniel, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le b du 19° ter de l’article 81 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par exception, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, la limite globale est portée à 800 €, dont 500 € pour les frais de carburant ; »

II. – Le I s’applique à compter de l’imposition des revenus de l’année 2025.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Cet amendement de repli ne vise que les automobilistes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2022 avait prévu un relèvement du plafond de la prime de transport, en le portant de 500 euros à 700 euros, et à 900 euros pour les outre-mer, ainsi qu’une augmentation de la prime carburant de 200 euros à 400 euros et à 600 euros pour les outre-mer.

L’article 7 de la loi de finances pour 2024 prévoit également une majoration pérenne de 100 euros des plafonds d’exonération fiscale pour la « prime transport », la portant ainsi à 600 euros, contre 500 euros auparavant. Une majoration supplémentaire s’appliquera à partir de 2025.

Ces mesures représentent un effort significatif par rapport aux dispositifs existants avant la crise sanitaire.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. J’entends les propos de M. le rapporteur général, mais j’avoue ne pas avoir compris les chiffres de majoration qu’il a évoqués.

L’amendement tend à relever le plafond de 200 euros à 300 euros pour l’Hexagone et de 200 euros à 600 euros pour les outre-mer. L’article 7 de la loi de finances pour 2024 avait pérennisé, à compter de l’imposition des revenus de 2025, une majoration des plafonds de droit commun de 100 euros. Cela ne rétablit pas pour autant l’écart entre 200 euros et 600 euros pour les outre-mer. La proportion appliquée entre l’Hexagone et les outre-mer n’est pas tout à fait respectée.

J’entends ces arguments, mais je ne retire pas mes amendements, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-494 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-495 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-565 rectifié, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 81 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les revenus procurés par une activité relevant du régime d’assurance vieillesse des professions libérales mentionnés à l’article L. 643-6 du code de la sécurité sociale. Le montant de l’affranchissement n’est pas déduit du montant de l’assiette mentionnée à l’article L. 131-6 du même code. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Le présent amendement vise à exonérer d’impôts sur le revenu les revenus des médecins généralistes relevant de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (Carmf) et des infirmières relevant de la Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes (Carpimko), lorsque ceux-ci entrent dans le champ du cumul emploi-retraite.

L’objectif est d’inciter les professionnels de santé à prolonger leur activité après leur départ à la retraite, afin de pallier la pénurie croissante de praticiens dans certaines régions. Le système de cumul emploi-retraite a permis à de nombreux médecins et infirmiers retraités de poursuivre leur activité, contribuant ainsi à la prise en charge des patients, en particulier dans les zones rurales ou sous-médicalisées.

En exonérant ces revenus d’impôt, nous cherchons à rendre le cumul emploi-retraite plus attractif et à renforcer l’offre de soins dans les territoires où les déserts médicaux se font de plus en plus prégnants.

Cette réforme vise à soutenir notre système de santé en facilitant la réintégration de ces professionnels, tout en leur offrant une incitation financière supplémentaire. Elle permettrait de maintenir un niveau d’activité nécessaire dans un secteur en pleine tension, sans pour autant pénaliser les retraités désireux de continuer à apporter leur contribution à la collectivité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je prends acte de la demande formulée par notre collègue.

Je tiens cependant à rappeler que l’article 3 du PLFSS prévoit d’ores et déjà l’extension du régime simplifié des professions médicales aux médecins libéraux en cumul emploi-retraite, permettant ainsi de minorer les cotisations dues par ces praticiens.

Cette mesure est favorable au cumul emploi-retraite et constitue un effort notable, qu’il convient de souligner dans le contexte actuel de tensions sur nos finances publiques.

En conséquence, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-565 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-619 rectifié, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le I de l’article 81 quater du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette limite annuelle est revue chaque année, en appliquant un coefficient de hausse correspondant à l’indice annuel des prix à la consommation de l’Institut national de la statistique et des études économiques, à partir du 1er janvier 2025. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Cet amendement vise à indexer sur l’inflation le plafond de défiscalisation des heures supplémentaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Monsieur le sénateur, je rappelle que le plafond que vous visez a été relevé pendant la crise.

Comme vous le savez, la philosophie qui préside à ce budget consiste à encourager le travail et la rémunération par le travail, tout en étant vigilants quant à nos finances publiques. À ce stade, j’estime qu’il convient de ne pas augmenter ce plafond.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-619 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-657, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 4 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificatives pour 2022 est abrogé.

La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Par cet amendement, je propose d’abaisser le plafond de défiscalisation des heures supplémentaires et, partant, de socialiser cette partie de la rémunération sans en voler le bénéfice aux travailleurs. Notre pacte social repose sur la contribution, par les salaires, à l’ensemble des dispositifs d’accompagnement des personnes, par exemple lorsque celles-ci sont malades.

Si je ne suis naturellement pas opposé aux heures supplémentaires, j’estime que celles-ci doivent être compensées par des temps de repos. Dans une société de plus en plus ubérisée, elles constituent de plus un élément du chantage aux bas salaires.

Depuis le retour du dispositif de défiscalisation, nulle évaluation n’a été produite, ni sur le nombre d’heures supplémentaires défiscalisées ni sur leur coût pour les finances publiques.

Nous disposons toutefois d’estimations datant de la période durant laquelle le dispositif dit Sarkozy s’est appliqué, entre 2007 et 2012. En 2011, le coût de ce dispositif pour les finances publiques s’est élevé à près de 4 milliards d’euros. Or, contrairement à ce qui avait été avancé pour justifier ce dispositif, aucun emploi n’a alors été créé.

Dans le PLFSS, il a été décidé de faire travailler les salariés sept heures de plus par an. J’estime pour ma part que, pour renouer avec des recettes nous permettant de financer l’ensemble des services publics, nous avons intérêt à faire cotiser les salariés qui font des heures supplémentaires, plutôt que de priver l’ensemble des travailleurs de jours de repos.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je relève une inexactitude dans l’exposé des motifs votre amendement, mon cher collègue Barros. Dans le dispositif que vous proposez, le plafond, qui a été porté à 7 500 euros par la loi du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022, serait en effet ramené à 5 000 euros. Ce dispositif n’emportera donc pas les conséquences que vous espérez pour les finances publiques.

Pour tout vous dire, j’estime que, dans le contexte de pénuries de professionnels que nous connaissons dans tous les métiers, notamment de santé, mais pas seulement, la défiscalisation des heures supplémentaires constitue une incitation bienvenue à travailler davantage. Ceux qui le souhaitent sont ainsi récompensés de leurs efforts par l’amélioration de leur niveau de vie.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je le rappelle, pour les salariés à temps partiel, les heures supplémentaires et complémentaires sont exonérées de cotisations sociales, mais, contrairement aux exonérations compensées par l’État, elles emportent une perte sèche pour la sécurité sociale.

Que, dans le cadre de ce PLF, le budget de l’État ne soit pas affecté par ces défiscalisations, cela vous arrange, monsieur le ministre ! Depuis 2019, la sécurité sociale enregistre de ce fait chaque année une perte de recettes non compensées de 1,1 milliard d’euros.

Je rappelle de plus que ces heures supplémentaires et complémentaires ouvrent des droits contributifs aux salariés. Si je soutiens l’ouverture de tels droits, il faut reconnaître qu’elle emporte un effet ciseaux évident pour la sécurité sociale, qui délivre des prestations sans percevoir les recettes qui devraient financer celles-ci.

J’estime que, en matière d’incitation, les exonérations de cotisation suffisent. Je suis même favorable à la fiscalisation intégrale des heures supplémentaires et complémentaires.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-657.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1847 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Longeot et Courtial, Mmes Sollogoub et Billon, MM. Delahaye, Cambier et Delcros, Mmes O. Richard, Saint-Pé et Romagny, MM. Bleunven et Folliot et Mme Antoine, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 10° de l’article 93 du code général des impôts est abrogé.

II – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je sors mon sifflet ! (Sourires.)

Je ne suis pas certain de bien comprendre l’objectif qui sous-tend cet amendement, mon cher collègue. En effet, je doute que le niveau de rémunération de la plupart des arbitres et juges arbitres soit très élevé. Je crois plutôt qu’il s’apparente davantage au défraiement de bénévoles qui passent de longues heures sur les terrains de sport et dont l’engagement est nécessaire à l’équilibre des clubs sportifs.

Je sollicite toutefois l’avis du Gouvernement, qui sera, je l’espère, plus éclairé – pardonnez-moi ce tacle, qui s’adresse du reste au précédent gouvernement, monsieur le ministre ! – que lors de sa funeste décision, l’année dernière, de batailler ferme pour que le siège de la Fédération internationale de football association (Fifa) puisse s’installer en France dans des conditions difficilement acceptables. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je suis certain qu’il n’y a pas de lien direct entre l’installation du siège de la Fifa et le présent amendement, monsieur le rapporteur général !

Les indemnités perçues par les arbitres étant très faibles, l’exonération qu’il est proposé du supprimer est l’un des éléments de l’équilibre qui permet aux clubs de garantir la participation de ces arbitres aux rencontres qui sont partie intégrante de la pratique sportive.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Connaissez-vous le tournoi de Claret, organisé dans l’Hérault à la Pentecôte, mon cher collègue Canévet ?

M. Albéric de Montgolfier. Évidemment, on ne connaît que ça !

M. Patrick Kanner. La trésorière de ce club étant Manuelle Kanner, vous me répondrez sans doute qu’il y a là un conflit d’intérêts ! (Sourires.)

Quoi qu’il en soit, les arbitres de ce tournoi, qui consiste en une trentaine de matchs de catégorie U7 à U10, c’est-à-dire pour des jeunes, sont défrayés – pardonnez-moi l’expression, mes chers collègues – entre 20 et 30 balles.

La suppression de l’exonération des sommes perçues par les arbitres emporterait certes 7 millions d’euros de recettes pour le Gouvernement, mais elle priverait aussi les clubs d’arbitres et, partant, de tournois. À défaut de ces arbitres, qui sont du reste souvent maltraités durant les rencontres, des milliers de clubs de football, de basket, de judo et autres ne pourraient plus se réunir.

Je rejoins donc l’avis défavorable de M. le ministre, à moins que vous n’acceptiez de retirer l’amendement, monsieur Canévet ?

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.

Mme Maryse Carrère. Le territoire dont je suis l’élue, les Hautes-Pyrénées, étant une terre de rugby, je ne puis que rejoindre les propos qui viennent d’être tenus par mon collègue Kanner.

L’engagement des arbitres de rugby sur le terrain est vecteur de transmission de valeurs. Dans le petit club de l’Entente sportive des coteaux de l’arrêt (Esca), à Luc, dans les Hautes-Pyrénées, un arbitre perçoit une indemnité de 60 euros par dimanche, soit tout juste de quoi payer le déplacement avec son véhicule.

L’adoption de cet amendement emporterait une crise des vocations qui serait fort dommageable au regard de tout ce que le sport apporte en matière d’accompagnement des jeunes et d’apprentissage des valeurs.

Par ailleurs, une telle décision ne peut être prise, me semble-t-il, sans une consultation préalable des fédérations sportives qui permettra d’en mesurer les conséquences.

Le groupe du RDSE ne votera pas cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

M. Michel Canévet. J’estime qu’il conviendrait d’exclure les arbitres professionnels du dispositif, dont ils bénéficient eux aussi.

Étant toutefois sensible aux arguments du président Kanner et de la présidente Maryse Carrère, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1847 rectifié est retiré.

Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-773 rectifié ter, présenté par M. Dhersin, Mme Antoine, MM. Klinger et Folliot, Mme Lermytte, M. Bleunven, Mmes Drexler, Nédélec, Romagny et Billon et MM. Cambier, Longeot et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les deuxièmes et dernier alinéas du a, les b, b bis et les trois premiers alinéas du b quinquies du 5 de l’article 158 du code général des impôts sont supprimés.

La parole est à M. Franck Dhersin.

M. Franck Dhersin. Par cet amendement, mes chers collègues, je vous propose d’aborder un sujet sensible, mais bien moins sportif et peu porteur sur le plan politique, je le reconnais. Comme l’amendement de repli n° I-774 rectifié quater, que je présenterai ensuite, il ne vise à rien d’autre qu’à rétablir davantage de justice fiscale.

De fait, la proposition que je vous soumets est juste et équitable à plusieurs titres, mes chers collègues.

Premièrement, l’abattement de 10 % appliqué sur les pensions de retraite pour le calcul de l’impôt sur le revenu (IR) copie l’abattement appliqué aux actifs pour compenser leurs frais professionnels. Or les retraités n’ont de facto plus de frais professionnels. Un tel avantage fiscal n’est donc pas justifié.

Deuxièmement, sous la pression de la démographie et du vieillissement de la population, le coût de cette niche fiscale est en train d’exploser. Il s’élève à près de 5 milliards d’euros par an, soit la moitié du budget du ministère de la justice. Ce n’est pas rien !

Troisièmement, l’écrasante majorité des retraités qui bénéficient de cet abattement comptent parmi les retraités les plus aisés.

Dans son récent rapport intitulé Conforter légalité des citoyens devant limposition du revenu, le Conseil des prélèvements obligatoires note que 30 % de l’avantage fiscal est consenti aux 10 % des retraités les plus riches et que deux tiers de cet avantage bénéficient aux 30 % des retraités les plus riches. Le gain effectif peut atteindre 1 855 euros par an pour des foyers situés dans la tranche d’imposition la plus élevée, sans aucune justification sociale. L’absence de ciblage de cet avantage pose donc question.

Les retraités modestes, qui, n’étant pas imposables, ne sont pas concernés par cet abattement, ne seraient affectés ni par la présente disposition ni par celle que l’amendement de repli vise à introduire.

La suppression de cet abattement rapporterait à l’État 4,9 milliards d’euros de recettes supplémentaires, qui pourraient contribuer au désendettement de notre pays.

Il me paraît toutefois qu’un consensus pourrait se dégager, avec l’assentiment de la commission, autour de la version de repli que je présenterai ensuite. Je retire donc cet amendement, au bénéfice des amendements identiques nos I-86 rectifié bis, I-635 rectifié bis et I-774 rectifié quater.

M. le président. L’amendement n° I-773 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° I-173 rectifié, présenté par Mme Lavarde, M. Belin, Mme Belrhiti, MM. J.B. Blanc, Brisson et Chevrollier, Mmes Ciuntu, Di Folco, Dumont et Estrosi Sassone, M. Genet, Mmes Josende et Lassarade, M. Michallet, Mme Nédélec, MM. Panunzi, Paumier et Pellevat, Mme Puissat, MM. Rapin, Sautarel et Savin et Mme Valente Le Hir, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa du a du 5 de l’article 158 du code général des impôts, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 5 % ».

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Mme Christine Lavarde. Pour compléter les propos déjà quasi exhaustifs de M. Dhersin, permettez-moi de revenir sur l’historique de ce dispositif, mes chers collègues.

Ce dispositif a été introduit en 1977, non pas pour que les retraités puissent déduire de supposés frais professionnels, mais pour les aider à passer le saut brutal entre leurs revenus d’activité et leur pension de retraite, en adoucissant l’imposition de cette dernière. Depuis l’instauration du prélèvement à la source, qui assure la contemporanéité entre la perception des revenus et le prélèvement des impôts, un tel abattement n’a plus de raison d’être.

Il est donc temps de corriger l’oubli par lequel ce dispositif n’a toujours pas été abrogé, mes chers collègues.

Toutefois, je vais retirer cet amendement, car l’abaissement du taux d’abattement qu’il vise à introduire concernerait l’ensemble des retraités, au profit de l’amendement n° I-635 rectifié bis, qui vise à abaisser le plafond de cet abattement à 2 300 euros, une disposition qui ne concernera que les retraités dont les pensions relèvent des derniers déciles.

Je retire donc cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-173 rectifié est retiré.

Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° I-86 rectifié bis est présenté par M. Lefèvre, Mme Belrhiti, MM. Daubresse, Bacci, Frassa et Belin, Mme Dumont, MM. J.B. Blanc, D. Laurent et Pellevat, Mme Malet et MM. Panunzi, Genet et Rapin.

L’amendement n° I-635 rectifié bis est présenté par Mme Lavarde, MM. Brisson et Chevrollier, Mmes Ciuntu, Di Folco, Estrosi Sassone, Josende et Lassarade, MM. Michallet, Paumier et Piednoir, Mme Puissat, MM. Sautarel et Savin et Mme Valente Le Hir.

L’amendement n° I-774 rectifié quater est présenté par M. Dhersin, Mme Antoine, MM. Klinger et Folliot, Mme Lermytte, M. Bleunven, Mmes Romagny et Billon et MM. Longeot et Gremillet.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa du a du 5 de l’article 158 du code général des impôts, le plafond : « 4 321 € » est remplacé par le plafond : « 2 300 € ».

La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° I-86 rectifié bis.

M. Antoine Lefèvre. Cet amendement ayant déjà été brillamment défendu, et certains de mes collègues s’y étant ralliés, je n’ai rien à ajouter.

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour présenter l’amendement n° I-635 rectifié bis.

Mme Christine Lavarde. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Franck Dhersin, pour présenter l’amendement n° I-774 rectifié quater.

M. Franck Dhersin. Par cet amendement de repli, à défaut de supprimer tout à fait l’abattement, il vous est proposé de réduire l’avantage qu’il emporte pour les retraités les plus aisés, mes chers collègues.

L’abaissement du plafond d’abattement à 2 300 euros limiterait en effet l’avantage fiscal consenti aux foyers relevant des tranches les plus élevées de l’impôt sur le revenu. La réduction du poids de cette niche fiscale, qui la classe du reste en quatrième position des niches les plus coûteuses, alors même – je le rappelle – qu’aucune politique publique n’en justifie l’existence, permettra une économie massive pour l’État.

Je vous invite donc à voter cet amendement de justice fiscale, mes chers collègues.

M. le président. L’amendement n° I-1487 rectifié, présenté par Mme Nadille, MM. Iacovelli, Buis et Rohfritsch, Mmes Duranton et Schillinger et MM. Omar Oili et Théophile, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa du a du 5 de l’article 158 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « , dont 2 000 € au maximum au titre des pensions de retraite » ;

2° Au début de la deuxième phrase, les mots : « Ce plafond s’applique » sont remplacés par les mots : « Ces plafonds s’appliquent » ;

3° À la dernière phrase, les mots : « il est révisé » sont remplacés par les mots : « ils sont révisés ».

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement vise à réduire le plafond de l’abattement susvisé à 2 000 euros, afin de concentrer son bénéfice sur les classes moyennes.

Une telle disposition emportera une économie massive de plus de 2 milliards d’euros dès 2025. Il s’agit par ailleurs d’une mesure pérenne et juste, qui permettrait notamment d’éviter la suppression massive des allègements de charges sur le travail.

M. le président. L’amendement n° I-1388 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Laménie, Brault et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et M. V. Louault, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le a du 5 de l’article 158 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « et retraites » sont remplacés par les mots : « , autres que les pensions de retraite et de vieillesse, » ;

b) À la deuxième phrase, les mots : « et retraites » sont remplacés par les mots : « , autres que les pensions de retraite et de vieillesse, ».

2° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les pensions de vieillesse et de retraites font l’objet d’un abattement de 10 %. La somme de cet abattement avec celui prévu au deuxième alinéa ne peut excéder 3 000 €. Ce plafond s’applique au montant total des pensions et retraites perçues par l’ensemble des membres du foyer fiscal. Chaque année, il est révisé selon les mêmes modalités que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. »

3° La première phrase du dernier alinéa est ainsi rédigée : « La somme des abattements indiqués aux trois premiers alinéas ne peut être inférieure à 442 €, sans pouvoir excéder le montant brut des pensions et retraites. »

La parole est à M. Emmanuel Capus.

M. Emmanuel Capus. Les retraités n’ayant pas stricto sensu de frais professionnels, les amendements qui ont été présentés visent, pour certains, à supprimer purement et simplement ou à moduler l’abattement, et, pour d’autres, à abaisser le plafond d’abattement de 4 231 euros à 2 300 euros – M. le rapporteur général et M. le ministre nous expliqueront peut-être les raisons qui ont présidé au choix de ce dernier montant, que je ne comprends pas bien.

Par le présent amendement, il vous est proposé une voie intermédiaire, emportant un effort plus modéré pour les retraités concernés, puisque ce plafond serait porté à 3 000 euros.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Dans la situation que nous connaissons, lorsqu’un dispositif n’a plus de raison d’être, il me paraît opportun de tirer les conclusions qui s’imposent. Je remercie donc Mme Lavarde, qui est la plus jeune intervenante au sein de cette discussion, de nous avoir rappelé l’histoire de ce dispositif.

Pour ce qui est de la fixation du plafond d’abattement, je vous propose de suivre la loi du nombre et de nous en tenir à 2 300 euros, mes chers collègues, même si ce chiffre ne s’impose pas pour une raison particulière.

J’entends parfois sur ma gauche qu’il nous faut instaurer des dispositifs permettant un effort collectif. En l’occurrence, au regard des efforts contributifs consentis par l’ensemble des Français, un effort est demandé aux retraités dont nous pensons qu’ils ont davantage de moyens.

Je sollicite donc le retrait des amendements nos I-1487 rectifié et I-1388 rectifié bis au profit des amendements identiques nos I-86 rectifié bis, I-635 rectifié bis et I-774 rectifié quater, sur lesquels je m’en remets à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je ne nie pas la légitimité de ce sujet, qui est du reste abordé chaque année.

Toutefois, le Gouvernement ne souhaite pas faire peser la pression fiscale sur l’ensemble des retraités imposables, comme le proposaient les auteurs des amendements nos I-773 rectifié ter et I-173 rectifié.

Bien que tel ne soit pas le cas des amendements restant en discussion, qui tendent à abaisser le plafond de l’abattement, l’avis du Gouvernement est défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est la première fois que nous avons ce débat au Sénat, monsieur le ministre.

Une telle mesure serait une preuve du courage que l’on attend tellement aujourd’hui des politiques et des élus. Elle emporterait de plus des recettes supplémentaires pour le Gouvernement.

Mes chers collègues, je vous invite donc – je ne le fais pas souvent – à voter ces amendements identiques. Je ne doute pas, du reste, que la majorité sénatoriale les votera. Nous pourrons alors annoncer au Premier ministre que nous avons trouvé quelques recettes supplémentaires, monsieur le ministre. Celles-ci me paraissent préférables aux nouvelles recettes que certains collègues nous proposeront dans les heures ou dans les jours qui viennent.

M. Franck Dhersin. Absolument !

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Je ne voterai pas ces amendements, en particulier les trois amendements identiques, au nom d’une double cohérence.

Tout d’abord, lors de nos longs débats sur la réforme des retraites, j’ai souvent insisté sur la nécessité de faire cette réforme pour préserver le pouvoir d’achat des retraités. Il me semble donc peu opportun de baisser le pouvoir d’achat des retraités à la première occasion. Telle est la première cohérence.

Ensuite, j’estime qu’il convient plutôt d’aller vers des économies et une plus grande maîtrise des dépenses que vers des augmentations d’impôt. Or prendre une telle mesure revient à augmenter les impôts. Telle est la seconde cohérence.

Enfin, j’ajoute une dernière raison, celle-ci d’opportunité. L’année prochaine, nous demanderons déjà un effort aux retraités qui perçoivent une pension supérieure à 1 500 euros – ils sont tout de même nombreux – d’un montant équivalent à la moitié de l’inflation. J’estime que cela suffit et qu’il ne faudrait pas basculer dans une forme de retraités-bashing.

« L’excès nuit en tout », disait Voltaire. Point trop n’en faut, mes chers collègues ! Je voterai contre ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

M. Vincent Delahaye. J’abonderai dans le sens de mon collègue Olivier Henno.

Nous devons faire des efforts collectifs, dont les retraités ne doivent naturellement pas être écartés. J’estime toutefois qu’il faudrait débattre globalement des mesures fiscales qui les concernent, en incluant la désindexation des retraites prévue par le PLFSS.

Pour ma part, je ne suis pas favorable aux augmentations d’impôt, qui sont déjà trop nombreuses à mon sens dans ce PLF. Je préfère la réduction de la dépense publique, en faveur de laquelle je souhaite que nous œuvrions davantage.

À défaut d’une suppression d’impôt équivalente – je n’ai pas entendu les auteurs de ces amendements en suggérer –, la disposition qui nous est proposée n’est rien d’autre qu’une augmentation d’impôt.

Je ne voterai donc pas ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Mme Christine Lavarde. Permettez-moi de corriger une imprécision : la disposition qui est proposée par l’amendement n° I-635 rectifié bis consiste à modifier, non pas le taux, mais le plafond d’abattement ; elle ne concerne pas tous les retraités, puisqu’elle ne s’applique qu’aux retraités imposables et dont le revenu est suffisant pour que l’abattement auxquels ils peuvent prétendre atteigne le plafond.

Le taux d’épargne des retraités s’établit aujourd’hui à 25 %, quand il n’est que de 13 % pour les actifs. Cette seule donnée permet d’établir que le pouvoir d’achat des retraités est supérieur à celui des actifs.

Par ailleurs, les perspectives d’évolution du niveau de vie des retraités sur le long terme, établies par le Conseil d’orientation des retraites (COR), montrent que les générations qui sont aujourd’hui actives vivront moins bien lorsqu’elles seront à la retraite que les retraités d’aujourd’hui.

Des travaux montrent enfin que les retraités français sont mieux lotis que leurs voisins européens.

Contrairement aux retraités, les actifs s’acquittent effectivement de frais professionnels, ne serait-ce que pour se rendre sur leur lieu de travail. Il s’agit donc de rétablir davantage d’équité fiscale, d’autant que, si la disposition visée pouvait avoir sa raison d’être lors de son instauration en 1977, force est aujourd’hui de reconnaître que les évolutions du mode de collecte de l’impôt ne la justifient plus.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Revenons aux fondamentaux, mes chers collègues : la retraite est soit un salaire différé, soit un salaire consolidé. Du travail a permis de créer de la valeur ajoutée, et cela mérite d’être reconnu.

Avec ces amendements, nous sommes au cœur du débat du PLF : la majorité sénatoriale demande un effort temporaire aux 24 600 foyers les plus riches et, dans le même temps, envisage de baisser l’abattement dont les retraités bénéficient. C’est tout de même incroyable !

Si nous votions les amendements identiques nos I-86 rectifiés bis, I-635 rectifié bis et I-774 rectifié quater, l’avantage fiscal serait plafonné à 1 916 euros de pension par mois. Non contents de vous attaquer aux retraités en sous-indexant leurs pensions, vous entendez à présent augmenter leurs impôts en remettant en cause leur abattement, et tout cela alors que vous refuserez sans doute de rétablir l’impôt sur la fortune !

Puisque nous évoquons l’abattement dont les retraités bénéficient, mettons l’ensemble des éléments sur la table : en 2025, les retraités verront leur pension augmenter au titre de l’inflation, non pas de 400 euros, mais de 200 euros. Comment allez-vous le leur expliquer ? Il y a tout de même un problème !

Mme Lavarde estime qu’ils vivent trop bien. Dont acte !

Mme Christine Lavarde. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mais non !

Mme Dominique Estrosi Sassone. Vous avez fait pour le moins un raccourci !

M. Pascal Savoldelli. C’est ce que vous avez dit, lorsque vous avez opposé les retraités aux actifs, madame Lavarde.

Je suis effaré par ces amendements. Ces dispositions relèvent de l’aveuglement anti-retraités et constituent un signal très négatif pour l’harmonie de notre société.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Nos discussions montrent que ce sujet mérite d’être débattu. J’estime toutefois que la majorité sénatoriale et le Gouvernement ne permettent pas la tenue d’un débat serein, honnête et équilibré. En effet, nos discussions ne tiennent compte ni de la réforme des retraites, ni de la désindexation des pensions dont nous avons débattu dans le cadre du projet loi de financement de la sécurité sociale, ni de la situation des nombreux retraités précaires de notre pays.

Si la majorité paraît finalement opter pour un abaissement du plafond plutôt que du taux d’abattement, cette discussion participe d’une ambiance générale. De fait, on peut comprendre que certains ressentent une forme de retraités-bashing.

Les paramètres de ce projet de loi de finances n’étant ni justes ni équitables – la suite de la discussion des articles le montrera – nous ne pouvons débattre sereinement d’un projet de société qui devrait lui aussi être juste et équitable.

Comment comprendre le sens de la justice évoqué par les auteurs de ces amendements, quand, il y a quelques jours, les mêmes défendaient sept heures, et pour certains dix-huit heures de travail supplémentaire gratuit ?

M. Michel Canévet. Ce n’était pas gratuit !

M. Simon Uzenat. La clarté et la sincérité de nos débats s’en trouvent atteintes, et nous le regrettons, car les questions posées sont parfaitement légitimes.

Je rejoins notre collègue Pascal Savoldelli : veillons à préserver une forme de cohésion et de sérénité dans notre pays. Je regrette que la majorité sénatoriale et le Gouvernement ne nous le permettent pas.

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour explication de vote.

M. Bernard Buis. Monsieur le président, je retire l’amendement n° I-1487 rectifié, au profit des amendements identiques nos I-86 rectifié bis, I-635 rectifié bis et I774 rectifié quater.

M. le président. L’amendement n° I-1487 rectifié est retiré.

La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Je serai bref, car mes collègues de gauche ont dit l’essentiel.

Lorsque Michel Barnier nous a présenté sa feuille de route, il nous a assuré que nous pourrions aborder ce projet de loi de finances sans tabou et qu’il serait ouvert à toutes les propositions. Or nous observons que plusieurs points semblent dessiner une direction droitière. Le rapporteur général a indiqué que, à une disposition qui concernerait quelques-uns des plus fortunés, il préfère une mesure qui affectera de nombreux retraités.

Mme Christine Lavarde. Les trois derniers déciles !

M. Thomas Dossus. Tels sont ceux que vous souhaitez faire contribuer, mes chers collègues.

Nos débats sur le PLFSS et ce PLF montrent que vous voulez que tout le monde contribue toujours davantage, à l’exception de certains. Comme mes collègues de gauche, j’estime donc que ces amendements ne sont pas acceptables.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous débattons sereinement, me semble-t-il, monsieur Savoldelli.

Il est vrai que ce sujet n’est pas celui des retraites. Mais, quand j’entends parler de cohésion et de solidarité, je tiens à rappeler que les régimes de retraite sont essentiellement fondés sur la répartition. Les actifs, dont le nombre diminue, doivent financer les retraites d’une part de la population qui augmente de plus en plus. Il ne faut donc pas crier à l’injustice ni au manque de solidarité. Le système de retraite par répartition finira, sans doute à moyen terme, par être soumis à de fortes tensions.

Au travers de cet amendement, il s’agit de proposer une participation des retraités qui s’inscrit dans le cadre du pacte social et de la cohésion entre les générations, ni plus ni moins. Et la solidarité reste assurée par les actifs.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Je ne suis vraiment pas certain que nous puissions traiter ce genre de sujet autrement que par un amendement d’appel qui sera ensuite retiré. En effet, cette question mériterait tout de même un débat public, qui s’inscrirait dans un cadre plus large que celui d’un amendement voté au détour du projet de loi de finances.

De manière générale, que faisons-nous en examinant ce texte ? Des mesures gouvernementales ont été prises dans l’urgence, que nous choisissons de voter ou non – c’est la fonction du débat politique –, en faisant preuve d’une certaine compréhension compte tenu du fait que le Gouvernement a eu très peu de temps pour élaborer des solutions.

En revanche, revenir par voie d’amendement sur des sujets de cette nature n’est certainement pas la bonne formule. En effet, il faut se donner le temps de poser les termes du débat, y compris en consultant les principaux intéressés, dont les syndicats de retraités. Ce n’est pas une manière de faire que d’introduire le sujet au détour d’un amendement en fin de soirée !

Ce débat a son utilité, comme tous ceux que nous ouvrons, mais on ne pourra pas le trancher par un vote où l’on se prononcerait à la volée, sans approfondir ni clarifier l’effort demandé aux retraités. Sinon, le débat risque de n’avoir aucune limite. Et jusqu’où ira-t-on en reprenant ainsi des mesures à l’envi ?

Mieux vaut prendre le temps de poser les termes de cette discussion et y revenir l’année prochaine. De toute façon, il n’y a pas d’inquiétude à avoir, car, si j’ai bien compris ce qu’ont dit les ministres, les occasions de débattre pour trouver de nouveaux moyens de financement ne manqueront pas dans les années à venir.

Ce soir, il ne faut guère faire plus que poser le débat, puisque certains de nos collègues le souhaitent, à bon droit. Toutefois, de grâce, il faut retirer ces amendements et envisager d’ouvrir une phase de dialogue.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-86 rectifié bis, I-635 rectifié bis et I-774 rectifié quater.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Union Centriste.

Je rappelle que la commission s’en remet à la sagesse du Sénat et que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 80 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 292
Pour l’adoption 139
Contre 153

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° I-1388 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-618 rectifié, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le I de l’article 194 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Les sixième à dernière lignes de la seconde colonne constituant le tableau du deuxième alinéa sont ainsi rédigées :

«

2,5

3,5

3,5

4,5

4,5

5,5

5,5

6,5

6,5

 » ;

2° Le a est ainsi modifié :

a) Les mots : « chacun des deux premiers » sont remplacés par les mots : « le premier » ;

b) Le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « deuxième ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Notre pays traverse une crise de la natalité ; et c’est peu de le dire, car le taux y afférant est au plus bas depuis 1945.

La politique familiale française historique, joyau de la période de la Libération, a été systématiquement affaiblie pour des raisons idéologiques contraires à l’intérêt national et au droit au bonheur des familles. Aujourd’hui, chacun des deux premiers enfants permet de bénéficier d’une demi-part fiscale. Ce dispositif n’est plus en adéquation avec la situation du pays.

Cet amendement vise donc à accorder une part fiscale pleine dès le deuxième enfant. Son adoption permettrait à la fois de soutenir une politique de natalité et de rendre du pouvoir d’achat aux Français.

En effet, pour permettre le renouvellement des générations, une politique de natalité forte est nécessaire. Accueillir un nouvel enfant entraîne évidemment des dépenses supplémentaires obligatoires, notamment pour changer de logement ou de véhicule. En bénéficiant de cette mesure, les parents pourront envisager sereinement leur projet familial.

Il s’agira, en effet, d’un gain important pour le budget des familles. Ainsi, pour un foyer de classe moyenne comptant deux enfants, cette part fiscale pleine représentera un montant annuel supplémentaire de 560 euros environ.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à vouloir encourager une politique qui favorise la natalité. Mais, comme précédemment au sujet des retraites, il ne me semble pas opportun de procéder ainsi au détour d’un amendement.

En effet, il s’agit tout de même ici de modifier sensiblement les modalités de calcul de la part fiscale, pour un coût de 3 milliards d’euros.

Mon cher collègue, j’ai cru comprendre que, comme nous, vous souhaitiez que les comptes publics soient bien tenus. Or vous proposez une mesure qui créerait une dérive assez importante ou, en tout cas, une évidente dégradation de nos comptes publics.

C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-618 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1111 rectifié, présenté par M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin et MM. Bourgi, Féraud et Redon-Sarrazy, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 197 A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

«… Par dérogation à l’article 164 A, pour le calcul du taux de l’impôt français sur l’ensemble des revenus mondiaux prévu au a du présent article, les prestations compensatoires prévues au I de l’article 199 octodecies sont admises en déduction sous les mêmes conditions et limites, lorsque ces prestations sont imposables entre les mains de leur bénéficiaire en France et que leur prise en compte n’est pas de nature à minorer l’impôt dû par le contribuable dans son État de résidence. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. La mesure que nous défendons au travers de cet amendement concerne les Français de l’étranger. En effet, la loi de finances pour 2019 a autorisé les personnes fiscalement domiciliées hors de France à déduire de leurs revenus mondiaux les pensions alimentaires imposables en France.

Cet amendement a pour objet d’étendre ce dispositif aux prestations compensatoires qui sont imposables en France. Je précise qu’une disposition similaire a déjà été adoptée au Sénat lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. En effet, cette mesure a déjà été adoptée au Sénat, initialement dans le cadre de la proposition de loi relative aux Français établis hors de France, présentée en 2019 par notre l’ancien président du groupe Les Républicains, Bruno Retailleau. Nous devons faire preuve de logique et de continuité dans nos votes.

J’émets donc un avis de sagesse.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le Gouvernement s’est prononcé sur ce sujet à l’Assemblée nationale. Par ailleurs, nous avions déjà discuté de cette mesure l’an dernier.

L’avis du Gouvernement reste défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1111 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° I-1113 rectifié, présenté par M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Bourgi et Redon-Sarrazy et Mmes Blatrix Contat et Monier, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I de l’article 197, après la référence :« l’article 4 B », sont insérés les mots : « et les contribuables non domiciliés en France au sens du même article 4 B » ;

2° Le a de l’article 197 A est ainsi rédigé :

« a. Perçoivent des revenus de source française ; dans ce cas, le taux de l’impôt français applicable sur l’ensemble des revenus de source française ou étrangère des contribuables qui ont leur domicile fiscal dans un État membre de l’Union européenne ou dans un État avec lequel la France a signé une convention d’assistance administrative de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ou une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement d’impôt. »

II. – Le I et le II s’appliquent pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 2025.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement a lui aussi pour objet de proposer une modernisation et une simplification de la fiscalité des Français de l’étranger. En effet, nous voulons soumettre automatiquement les revenus de source française et étrangère des non-résidents au taux moyen, pour favoriser la progressivité de l’impôt.

Nous lèverions ainsi l’incertitude fiscale liée à la méthode de calcul qui pèse sur les Français de l’étranger lorsque ceux-ci doivent faire leur déclaration. Nous mettrions également fin à l’injustice que le système en vigueur crée entre les bas et les hauts revenus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1113 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1518 rectifié bis, présenté par MM. Delcros et Laugier, Mme N. Goulet, MM. S. Demilly, Courtial et Henno, Mme Sollogoub, M. Menonville, Mmes Billon, Housseau et Romagny, MM. Chauvet, L. Vogel, Duffourg et Canévet, Mme Vermeillet, M. Chasseing, Mme Antoine, M. Longeot et Mme Saint-Pé, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le premier alinéa du I de l’article 199 septies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le montant : « 1 525 € » est remplacé par le montant : « 1 625 € » ;

2° Le montant : « 300 € » est remplacé par le montant : « 320 € ».

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. Le contrat d’épargne handicap est un produit d’épargne qu’une personne en situation de handicap souscrit pour se garantir le versement de revenus futurs. Il ouvre droit à une réduction d’impôt de 25 % du montant des versements, dans la limite de 1 525 euros par an.

Or ce plafond n’a jamais augmenté depuis 2005 et n’a donc pas intégré les effets cumulés de l’inflation.

Mes chers collègues, je vous propose de le faire évoluer pour le porter à 1 616 euros, soit une majoration de seulement 91 euros par an et de moins de 8 euros par mois. Le montant de cette majoration est certes très limité, mais sa portée concrète et symbolique serait réelle pour nos concitoyens en situation de handicap.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue Delcros a raison de rappeler que le plafond de réduction d’impôt sur le revenu applicable aux primes d’assurance au profit d’une personne en situation de handicap n’est pas indexé sur l’inflation.

Toutefois, il me semble que les personnes handicapées ont bénéficié récemment d’autres dispositifs de soutien. Ainsi, l’allocation aux adultes handicapés (AAH) a fait l’objet de revalorisations successives. Elle permet de compenser la perte de revenu due au handicap, et, je le rappelle, elle a été déconjugalisée, ce qui satisfait une demande ancienne.

En réalité, la réduction d’impôts que vise cet amendement est moins ciblée que les critères actuels d’attribution de l’allocation aux adultes handicapés. Quoi qu’il en soit, le coût budgétaire de cette mesure n’est pas chiffré.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. La loi de finances pour 2024 a étendu le bénéfice de la majoration du plafond de versements annuels de 300 euros à toutes les personnes à la charge du souscripteur, de sorte que celle-ci ne vise plus uniquement ses enfants.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.

M. Bernard Delcros. Je précise qu’il ne s’agit pas d’indexer le plafond sur l’inflation. Son montant n’a pas évolué depuis vingt ans et je ne propose qu’une légère augmentation de 8 euros par mois, qui ne représente pas même un cinquième de l’inflation cumulée !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1518 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1093 rectifié, présenté par Mme Pantel, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 199 quindecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° À la première phrase, les mots : « d’une réduction d’impôt égale » sont remplacés par les mots : « d’un crédit d’impôt égal » ;

2° À la seconde phrase, les mots : « à la réduction » sont remplacés par les mots : « au crédit ».

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. André Guiol.

M. André Guiol. Le mécanisme de réduction d’impôt visant à compenser une partie des frais de dépendance est doublement insatisfaisant. Il crée une injustice fiscale, car il ne bénéficie pas aux foyers les plus modestes, mais joue un rôle important pour ceux qui ont un haut revenu.

Cet amendement vise à transformer ce mécanisme de réduction d’impôt en un crédit d’impôt remboursable, ce qui permettrait aux résidents d’Ehpad non imposables de bénéficier eux aussi d’un soutien financier direct. On allégerait ainsi le reste à charge de nombreux foyers modestes.

Monsieur le ministre, vous m’objecterez sans doute qu’il faudrait plutôt envisager une réforme structurelle de la branche autonomie pour financer plus durablement les frais de dépendance et d’hébergement des personnes âgées dépendantes. Mais aurons-nous le courage de regarder les yeux dans les yeux les résidents des Ehpad, qui se trouvent très souvent en grande précarité, ainsi que leurs familles, quand nous leur dirons d’attendre une année, voire plus longtemps, avant de voir leurs conditions de vie s’améliorer ?

Au travers de cet amendement, nous proposons d’introduire une mesure de justice fiscale concrète et immédiate, sans pour autant fermer la porte à une réflexion plus structurelle.

M. le président. L’amendement n° I-1432 rectifié, présenté par M. Buval, Mme Phinera-Horth, M. Omar Oili, Mme Duranton, M. Patient, Mme Schillinger et M. Buis, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la première phrase de l’article 199 quindecies du code général des impôts, les mots : « d’une réduction d’impôt égale » sont remplacés par les mots : « d’un crédit d’impôt égal ».

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Frédéric Buval.

M. Frédéric Buval. Cet amendement vise à transformer en crédit d’impôt la réduction d’impôt accordée au titre des frais de dépendance et d’hébergement pour les personnes dépendantes accueillies en établissement spécialisé.

Aujourd’hui, les personnes domiciliées fiscalement en France et accueillies dans un Ehpad ou dans un établissement de soins de longue durée bénéficient d’une réduction d’impôt égale à 25 % des dépenses effectuées, dans une limite de 10 000 euros par personne hébergée.

L’avantage fiscal sous forme de réduction d’impôt ne bénéficie donc qu’aux personnes imposables, excluant de fait celles qui ne le sont pas ou dont le montant de l’impôt est inférieur au montant de la réduction.

Sont donc exclues de cet avantage fiscal les personnes âgées en perte d’autonomie, à revenu modeste, hébergées en établissement. À domicile, les personnes âgées en situation de perte d’autonomie peuvent, quant à elles, bénéficier d’un crédit d’impôt, et cela depuis 2017.

Par conséquent, une personne âgée en perte d’autonomie demeurant à domicile voit son avantage fiscal supprimé ou fortement réduit lorsqu’elle entre en établissement, à la suite d’un accident de la vie ou de l’apparition de troubles du comportement sévères. On évalue à au moins 25 000 euros par an les frais de séjour en établissement spécialisé, de sorte que les familles doivent être mises à contribution.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Les auteurs de ces amendements proposent de transformer cette réduction d’impôt en un crédit d’impôt.

Je rappelle tout d’abord que la réduction d’impôt couvre jusqu’à 25 % du montant des dépenses engagées dans la limite d’un plafond de 10 000 euros par personne. Nous souhaitons tous que les personnes âgées qui sont en situation de perte d’autonomie ou de dépendance bénéficient d’un soutien.

Toutefois, le dispositif de réduction d’impôt qui existe déjà pèse sur nos comptes publics pour près de 300 millions d’euros. Si nous le transformions en crédit d’impôt, le coût dépasserait allègrement le milliard d’euros. Il faut en tenir compte dans un débat budgétaire.

En outre, le dispositif serait beaucoup moins ciblé et profiterait en réalité davantage aux foyers qui ont le plus de moyens, le crédit d’impôt étant toujours plus avantageux pour cette catégorie de la population.

La commission sollicite donc le retrait de ces deux amendements, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je me rallie aux arguments de M. le rapporteur général : au-delà du coût pour les finances publiques que représenterait cette transformation du dispositif de réduction d’impôt en crédit d’impôt, le financement de l’hébergement en établissement et, plus largement, de la dépendance en général nécessite une réflexion structurelle – nous avons eu ce débat lors de l’examen du PLFSS –, qui ne peut être menée dans le cadre limité d’un amendement fiscal.

Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Comme notre collègue vient de le rappeler, nous avions eu le même débat au sujet des services domiciliaires. En effet, il s’agissait également de transformer en crédit d’impôt la réduction d’impôt dont bénéficiaient les personnes résidant à domicile qui recevaient l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) ou la prestation de compensation du handicap (PCH).

Par conséquent, je ne comprends pas bien le raisonnement de M. le rapporteur. Où est la différence ? Nos collègues proposent tout simplement d’inclure dans le périmètre de cette mesure les personnes non imposables, en rattrapant un dispositif qui n’était pas complet, car il ne couvrait pas les personnes les plus modestes – si l’on convient que, par définition, les personnes non imposables sont celles dont le revenu est le plus faible.

Monsieur le rapporteur général, vous avez rappelé que les personnes imposables bénéficiaient d’une réduction d’impôt couvrant jusqu’à 25 % du montant des dépenses engagées dans la limite d’un plafond de 10 000 euros par personne.

Nous souhaitons que ce dispositif soit transformé en crédit d’impôt, couvrant le même montant de dépenses, et non pas 50 % comme on l’entend parfois, afin que les personnes âgées en perte d’autonomie, qui sont non imposables, continuent de bénéficier de leur avantage fiscal lorsqu’elles entrent en établissement.

Comment comprendre en effet qu’une personne âgée, non imposable, dès lors qu’elle doit être hébergée en établissement, perde l’avantage fiscal dont elle bénéficiait quand elle était à domicile ?

Si l’entrée en Ehpad intervient en moyenne dix ans plus tard qu’auparavant, c’est parce que les personnes âgées en perte d’autonomie peuvent rester plus longtemps à domicile, grâce aux services prévus pour cela. Et pour qu’elles puissent bénéficier des services domiciliaires, nous avons mis fin à l’iniquité fiscale en transformant la réduction d’impôt en crédit d’impôt.

Cette mesure a un coût, c’est certain. Mais peut-être pourrons-nous trouver le moyen de financer son élargissement en faisant des économies ailleurs ?

Quoi qu’il en soit, je voterai ces amendements.

M. le président. Monsieur Guiol, l’amendement n° I–1093 rectifié est-il maintenu ?

M. André Guiol. À l’évidence, compte tenu des arguments qui viennent d’être avancés, il faudra une loi plus structurelle.

Je retire donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1093 rectifié est retiré.

Monsieur Buval, l’amendement n° I-1432 rectifié est-il maintenu ?

M. Frédéric Buval. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je le mets aux voix.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° I-397 rectifié est présenté par MM. Gold et Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° I-918 rectifié est présenté par MM. Cozic, Lurel, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud, Jeansannetas et Fichet, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° I-1670 rectifié est présenté par MM. G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 199 quindecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « jusqu’au 31 décembre 2024 » ;

2° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Au titre des dépenses supportées du 1er janvier 2025 au 31 décembre 2026, les contribuables bénéficient, à titre expérimental, d’un crédit d’impôt égal à 25 % de celles-ci en lieu et place de la réduction d’impôt susmentionnée. Le montant annuel des dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt ne peut pas excéder 10 000 € par personne hébergée. »

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° I-397 rectifié.

Mme Maryse Carrère. Le système actuel relatif à la réduction d’impôt sur les dépenses d’hébergement engagées en cas de séjour en Ehpad est injuste et injustifié. Nous faisons nôtres les arguments développés précédemment par notre collègue André Guiol.

Dans ce système, les résidents les plus aisés sont notoirement mieux aidés que ceux qui disposent de moins de ressources. À l’inverse, 76 % des résidents ne peuvent pas couvrir financièrement leurs frais de séjour avec leur revenu courant. Voilà une injustice fiscale particulièrement insoutenable à l’heure où le sujet du pouvoir d’achat des petites retraites est brûlant et où la réforme du modèle des Ehpad reste au milieu du gué.

Dans ce contexte, cet amendement de notre collègue Éric Gold vise à introduire une mesure qui fait largement consensus. En effet, dans le cadre de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, notre collègue Christine Pirès-Beaune avait défendu un amendement identique qui avait été adopté, par scrutin public, par une large majorité des députés.

J’entends bien que ces mesures doivent être plus travaillées et mieux évaluées. Cependant, voilà longtemps que, au Sénat, nous demandons une réforme ambitieuse sur l’autonomie. Il pourrait donc être intéressant d’utiliser ce PLF pour introduire des mesures concrètes de justice sociale en faveur des résidents d’Ehpad les plus modestes.

M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l’amendement n° I-918 rectifié.

M. Thierry Cozic. Comme vient de le faire ma collègue Maryse Carrère, je rends hommage à Christine Pirès-Beaune, notre collègue socialiste à l’Assemblée nationale, qui a proposé dans un amendement que nous transformions la réduction d’impôt au titre des frais de dépendance et d’hébergement pour les personnes dépendantes accueillies en établissements spécialisés en un crédit d’impôt.

Le coût de cette dépense fiscale est estimé, pour 2023, à près de 272 millions d’euros pour plus de 424 000 bénéficiaires.

La réduction d’impôt s’élève à 25 % des dépenses engagées au titre de la dépense et de l’hébergement des seules personnes dépendantes hébergées dans un établissement spécialisé, à l’exclusion des dépenses de soins, qui sont couvertes par la sécurité sociale. Les dépenses couvertes par le dispositif sont plafonnées à 10 000 euros par an et par bénéficiaire.

Par ailleurs, cette réduction d’impôt est cumulable avec le bénéfice d’autres aides, qui prennent en charge tout ou partie des frais associés à l’hébergement des personnes.

Dans le rapport que Christine Pirès-Beaune a remis à la Première ministre en juin 2023, notre collègue considère que la transformation en crédit d’impôt de ce dispositif fiscal le rendrait plus redistributif. En effet, si le montant total des restes à charge est plus élevé pour les bénéficiaires de la réduction d’impôt, il représente néanmoins une part moins importante de leurs ressources, le taux d’effort passant à 90 % contre 150 % aujourd’hui.

Dès lors, nous proposons au travers de cet amendement d’étendre le dispositif aux publics les plus fragiles, dans un souci de justice sociale et de lutte contre les inégalités. Nous souhaitons que la mesure soit mise en œuvre pour les dépenses engagées en 2025 et 2026, dans l’attente d’une réforme structurelle de la prise en charge des frais liés à la dépendance.

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour présenter l’amendement n° I-1670 rectifié.

M. Grégory Blanc. J’ai bien entendu les positions qu’ont défendues les uns et les autres sur les amendements précédents. Il faut le reconnaître, le débat ne porte pas uniquement sur les finances de l’État ; en l’occurrence, il est étroitement lié à la situation des départements, puisque c’est à cet échelon que la tarification des hébergements est fixée.

Or les départements sont de plus en plus nombreux à instaurer une double tarification, avec, d’un côté, une tarification à l’aide sociale, pour les résidents qui en bénéficient, et, de l’autre, une tarification libre, pour tous les autres résidents. C’est donc un système à double vitesse qui tend à s’installer.

Pour en limiter les conséquences, une option serait de mieux aider les Ehpad et les départements. Or ce n’est pas celle que le Gouvernement a choisie, comme M. le ministre vient de le confirmer.

L’autre option est d’aider tous ceux qui ne bénéficient pas de l’aide sociale et dont le revenu reste faible par rapport au reste de la population, c’est-à-dire les classes populaires et les classes moyennes, qui subissent aujourd’hui les conséquences de ce système de double tarification.

Nous le savons tous, la prise en charge de la dépendance coûtera de plus en plus cher. Par conséquent, la question est : veut-on permettre à tous d’accéder aux Ehpad ou veut-on en exclure les familles qui ne sont ni riches ni pauvres ?

Cet amendement vise à corriger cette injustice. Si l’on s’y oppose, disons-le clairement, mais il convient alors de supprimer la niche dans sa totalité : soit celle-ci a vocation à s’appliquer à tout le monde et il faut en faire un crédit d’impôt, soit elle ne doit s’appliquer à personne et il faut la supprimer.

M. le président. L’amendement n° I-685, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 199 quindecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « jusqu’au 31 décembre 2024 » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre des dépenses supportées du 1er janvier 2025 au 31 décembre 2026, les contribuables bénéficient d’un crédit d’impôt égal à 25 % de celles-ci. Le montant annuel des dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt ne peut pas excéder 10 000 € par personne hébergée. »

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Cet amendement, qui s’inscrit dans la droite ligne des autres amendements en discussion commune, vise à transformer en un crédit d’impôt la réduction d’impôt accordée au titre des frais de dépendance et d’hébergement des personnes accueillies en établissement spécialisé, afin d’élargir le nombre de bénéficiaires.

D’après une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), l’ensemble des départements accordent chaque année 3,7 milliards d’euros d’aide sociale à l’hébergement en établissement ou en accueil familial, via principalement l’allocation personnalisée d’autonomie et l’aide sociale à l’hébergement (ASH).

Or, si la réduction d’impôt est plafonnée à 10 000 euros, le montant médian des aides sociales à l’accueil par bénéficiaire s’élève à 4 900 euros par an. En outre, la réduction d’impôt est cumulable avec les aides sociales départementales.

Le montant de la prise en charge des départements est donc infime : comme l’a rappelé notre collègue Cozic, les personnes âgées en établissement s’acquittent de frais de séjour s’élevant en moyenne, en 2017, à 2 382 euros par mois – 1 866 euros pour l’hébergement et 516 euros pour la dépendance. Par ailleurs, en moyenne, les personnes âgées perçoivent, toutes aides confondues, 419 euros par mois : 325 euros au titre de l’APA, 42 euros d’aide au logement et 52 euros de réduction d’impôt.

Ainsi, pour atteindre le montant de 2 382 euros que je mentionnais, le reste à charge moyen avant ASH s’élève à 1 965 euros, niveau très important. C’est pourquoi la transformation de cette réduction d’impôt en un crédit d’impôt constituerait une mesure de justice sociale et fiscale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements suivent la même logique que les amendements examinés précédemment et recevront donc le même avis.

De manière plus générale, je souhaite réitérer la réflexion qu’a eue voilà quelques instants le président de la commission : on ne peut proposer une réforme de cette ampleur, sur la perte d’autonomie et la dépendance, au détour d’un amendement.

Il est vrai que ce sujet est sur la table depuis près de vingt ans. Pour ma part, je regrette qu’aucun gouvernement, toutes majorités confondues, n’ait jamais réussi à proposer le début d’une vision permettant de définir un certain nombre de priorités dans ce domaine. Néanmoins, je le répète, il convient de mener une réflexion plus large sur cette question plutôt que de procéder par petites touches, qui ne me paraissent en outre pas particulièrement pertinentes.

La commission demande donc le retrait de ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. La transformation d’une réduction d’impôt en crédit d’impôt, dans le but de couvrir une frange plus large de nos concitoyens, ne se défend pas systématiquement ; en outre, il n’est pas « fiscalement correct » de faire en sorte que ceux qui ne paient pas d’impôts soient toujours bénéficiaires de crédits d’impôt.

Il me semble préférable – je rejoins le rapporteur général à cet égard – de se poser la question du financement global de la dépendance. Ceux qui ne sont pas imposables bénéficient d’aides auxquelles les personnes imposables ne peuvent prétendre, s’agissant d’aides accordées sous condition de ressources. Il faut examiner la question dans son ensemble.

Si vous proposez une remise à plat complète du financement de l’autonomie, je serai d’accord, mais la transformation d’une réduction d’impôt en crédit d’impôt n’est pas la solution en l’espèce. De manière générale, elle constitue rarement le remède à un problème de financement, surtout pour ce qui concerne la cinquième branche de la sécurité sociale.

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. Sans doute, monsieur le ministre, mais, d’une part, tout le monde parle du financement de la dépendance depuis des années, mais rien n’arrive jamais ; de l’autre, l’avantage du crédit d’impôt – si j’ai bien compris comment cela fonctionne – est qu’il profite aux ménages qui paient l’impôt sur le revenu une année et qui n’en paient pas l’année suivante, ou inversement.

Il n’existe pas deux catégories étanches : ceux qui, ad vitam æternam, paieront de l’impôt et ceux qui n’en paieront jamais. On n’est pas assigné à vie à l’une ou à l’autre de ces catégories. Dans la vraie vie, les ménages des classes populaires ou moyennes sont, d’une année sur l’autre, imposés différemment : certaines années, ils sont mis à contribution ; d’autres années, ils y échappent.

Par conséquent, le fait d’instaurer un crédit d’impôt permet à toutes ces familles, d’une part, d’avoir une certaine visibilité pluriannuelle, de l’autre, d’être accompagnées par l’État. Pour ma part, je crois que ceux qui sont dans un entre-deux, mais qui travaillent, doivent aussi pouvoir être aidés. Cette aide ne doit pas profiter qu’aux plus hauts revenus.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Certains de nos collègues agitaient précédemment les mots de justice ou d’équité, je saisis donc la balle au bond ! Ce débat fait écho à celui que nous avons eu la semaine dernière, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

Monsieur le ministre, vous évoquez la nécessité de financer le grand âge – sur ce point, tout le monde est d’accord. Vous confirmez en outre que le crédit d’impôt, grâce à son assiette plus large, permet de toucher les plus modestes. Or tel est bien justement l’enjeu d’un système plus juste : faire en sorte que les plus modestes aient aussi droit à telle ou telle aide.

Pourtant, non seulement l’instauration de ce crédit d’impôt nous est refusée, mais, la semaine dernière, même si les avis du Gouvernement étaient parfois divergents, la majorité sénatoriale – celle-là même qui aujourd’hui prétend défendre la justice et l’équité – a adopté le principe des sept heures de travail gratuit pour financer le grand âge.

On peut donc résumer simplement le message que le Sénat est en train d’envoyer aux plus modestes : « Vous ne bénéficierez pas d’un crédit d’impôt, mais, en revanche, vous allez travailler gratuitement pour financer le grand âge. »

Je veux bien que l’on invoque ensuite la justice ou la solidarité, mais vous comprendrez bien, mes chers collègues, que ce message ne sera pas entendu par nos concitoyens. Nous regrettons vivement ce choix, car d’autres mesures sont possibles, à commencer par celle qui est proposée au travers de ces amendements. Espérons que le Sénat entendra raison…

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. J’ai vérifié : la transformation, en 2017, de la réduction d’impôt en crédit d’impôt pour les services à domicile – je dirigeais à l’époque une association d’aide à domicile – a bien été décidée dans la loi de finances pour 2017. On n’a donc pas attendu une hypothétique loi Grand Âge pour agir dans ce domaine, ni dans un sens ni dans l’autre d’ailleurs, puisque, parfois, les choses peuvent aussi se rabougrir…

Je m’étonne en outre des réactions d’une partie de cet hémicycle, pourtant habituellement prompte à demander que soit résolue la question du reste à charge : mes chers collègues, commençons déjà par amoindrir, par équité, le reste à charge pour les ménages des classes populaires et moyennes qui ne paient pas d’impôt tout en étant confrontés, dans les Ehpad, à un reste à charge trop important.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-397 rectifié, I-918 rectifié et I-1670 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 81 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 110
Contre 232

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° I-685.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-89 rectifié, présenté par M. Lefèvre, Mme Belrhiti, MM. Daubresse, Bacci, Frassa et Belin, Mme Dumont, MM. J.B. Blanc, D. Laurent et Pellevat, Mme Malet et MM. Panunzi, Genet et Rapin, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 1 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au a, après le mot : « emploi » sont insérés les mots : « , pour les personnes mentionnées aux quatre alinéas suivants, » ;

2° Le même a est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« – les personnes âgées, invalides, en situation de handicap ou les proches-aidants ;

« – les personnes justifiant de contraintes professionnelles, géographiques ou de la présence au sein du foyer d’au moins un enfant ;

« – les personnes malades ou convalescentes nécessitant un soutien temporaire ;

« – les personnes isolées socialement, les personnes âgées, veuves ou vivant seules ; »

3° Le b est complété par les mots : «, au profit des personnes définies au a du présent 1 ».

4° Le dernier alinéa est complété par les mots : «, pour accompagner les bénéficiaires définis au a du présent 1 » ;

II. – Les dispositions du I s’appliquent à compter de l’imposition des revenus de l’année 2026.

La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Cet amendement d’appel vise à attirer l’attention du Sénat sur les dérives d’une dépense fiscale, dont le coût et le périmètre semblent désormais beaucoup trop importants au regard de leur objet initial.

Le crédit d’impôt « services à la personne » (Cisap) a coûté en 2023 plus de 6 milliards d’euros, pour des dépenses qui ne semblent plus répondre exclusivement aux objectifs qu’il est censé viser, à savoir inciter les usagers à adopter certains comportements vertueux et encourager des secteurs économiques en croissance.

Aussi, afin de restaurer le principe d’équité fiscale, nous proposons, au travers de cet amendement, de recentrer le Cisap sur les publics prioritaires et les services essentiels. Nous suivons en cela la préconisation de la Cour des comptes figurant dans le rapport de mars 2024 sur le soutien de l’État aux services à la personne, qui conseillait de restreindre ce crédit d’impôt aux activités de la vie quotidienne et de réallouer une partie de son produit aux branches famille et vieillesse de la sécurité sociale.

Si le dispositif proposé par l’amendement est sans doute trop large, il serait toutefois justifié d’exclure du périmètre des activités éligibles un certain nombre de dépenses difficilement justifiables et très peu vérifiables. En particulier, il serait utile d’envisager de renforcer la prévention contre les cas de fraude dans l’utilisation du Cisap pour l’emploi d’un salarié à domicile.

M. le président. L’amendement n° I-914 rectifié, présenté par Mme Artigalas, MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le a du 1 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Les mots : « aux articles L. 7231-1 et D. 7231-1 du code du travail » sont supprimés ;

2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« – à l’article L. 7231-1 du code du travail ainsi qu’au I, au 1° et 21° du II de l’article D. 7231-1du même code ;

« – aux alinéas 2° à 12° et 14° à20° du même l’article D. 7231-1 si le contribuable bénéficie d’une allocation mentionnée au livre VIII du code de la sécurité sociale ; ».

II. – Les dispositions du I s’appliquent à compter de l’imposition des revenus de l’année 2025.

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Dans un souci de réduction des dépenses publiques, il a été envisagé de réduire le champ d’application du crédit d’impôt « services à la personne », qui constitue, semble-t-il, la deuxième dépense fiscale la plus importante pour les finances publiques.

Le coût de ce dispositif, qui profite à l’ensemble des contribuables, est en constante augmentation : il s’est élevé à 6 milliards d’euros en 2023 pour 4,7 millions de foyers, soit une hausse de 4,2 % par rapport à la prévision actualisée pour 2023 et de 8,8 % par rapport à la réalisation de 2022.

Il n’en reste pas moins que le Cisap est lié à tout un écosystème de services à la personne et d’activités d’entretien qui accompagnent nos concitoyens, des jeunes parents aux seniors, à chaque étape de leur vie. Il touche en outre tout un tissu de petites entreprises, dont la disparition, si elle advenait du fait de la réduction du champ d’application de ce dispositif, affecterait négativement le dynamisme économique des territoires, notamment ruraux.

Aussi, dans un souci de justice sociale et de maîtrise des dépenses publiques, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain propose, au travers de cet amendement, de mieux cibler cette dépense fiscale et d’en limiter l’éligibilité aux seules activités de services à la personne soumises à agrément, au sens du code du travail : la garde à domicile et l’accompagnement des enfants, ou encore l’assistance à domicile et l’accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées ou atteintes de pathologies chroniques. Resteront également éligibles les activités d’entretien de la maison, petits travaux de jardinage et travaux ménagers, ainsi que les activités de coordination et de délivrance des services proposées par des organismes déclarés, agréés ou autorisés.

Les autres prestations pourront continuer d’ouvrir droit au crédit d’impôt, sous réserve de bénéficier d’une allocation mentionnée au livre VIII du code de la sécurité sociale : allocations aux personnes âgées, allocation aux adultes handicapés (AAH) ou encore prime d’activité. En revanche, certaines prestations de confort, telles que la maintenance, l’entretien ou la vigilance temporaire des résidences principales et secondaires, seront totalement exclues du dispositif.

M. le président. Veuillez conclure.

Mme Viviane Artigalas. Ces dispositions entreraient en vigueur à compter de l’imposition des revenus de l’année 2025.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nos collègues posent un certain nombre de questions pertinentes, mais leurs amendements suscitent quelques difficultés d’interprétation.

En tout état de cause, il me semble qu’une réflexion approfondie s’impose sur la dépense fiscale évoquée, qui, comme l’ont rappelé nos collègues, représente un coût annuel de quelque 7 milliards d’euros et constitue la deuxième dépense fiscale de l’État.

La commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le Cisap représente même la première dépense fiscale en ce qui concerne les particuliers. D’où son importance, c’est vrai, dans notre pays : cela a été dit, derrière ce crédit d’impôt, c’est tout un secteur d’activité qui est en jeu, avec une réelle problématique sur l’emploi. Il nous faut donc être extrêmement vigilants quand il s’agit de toucher à ce dispositif.

Je ne suis jamais opposé à l’idée d’engager une revue des dépenses et des services, car il est toujours utile de contrôler leur pertinence et leur utilisation. Néanmoins, dès qu’il est question de toucher au Cisap, soit à son taux, soit à la nature des dépenses visées, c’est généralement et très rapidement le travail dissimulé qui l’emporte. Il importe de bien avoir cela à l’esprit quand on entend raboter une telle niche, qui permet non seulement de déclarer de l’emploi, mais aussi de faire vivre tout un panel d’activités.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-89 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-914 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1180, présenté par Mme Poncet Monge, MM. G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 3 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 3. Les dépenses mentionnées au 1 sont retenues, pour leur montant effectivement supporté, dans la limite de 2 000 €. Par dérogation, les dépenses mentionnées au 1 sont retenues, pour leur montant effectivement supporté :

a) Dans une limite de 12 000 €, pour l’emploi d’un salarié qui rend uniquement des services mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 7231-1 du code du travail et aux 3° à 5° du I de l’article D. 7231-1 du même code ;

b) Dans une limite de 20 000 € pour les contribuables mentionnés au 3° de l’article L. 341-4 du code de la sécurité sociale ainsi que pour les contribuables ayant à leur charge une personne, vivant sous leur toit, mentionnée au même 3°, ou un enfant donnant droit au complément d’allocation d’éducation de l’enfant handicapé mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 541-1 du même code. »

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à recentrer, pour le rendre plus utile, le crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile sur les services à la personne essentiels au quotidien des personnes âgées ou en situation de handicap.

Selon Clément Carbonnier et Nathalie Morel, il s’agit d’un crédit d’impôt fortement anti-redistributif. Plus de la moitié des services consommés concernent des prestations de confort concentrées sur les ménages les plus aisés.

Surtout, monsieur le ministre, si l’introduction de la réduction d’impôt en 1991, avec un niveau de plafond relativement bas, a effectivement eu un effet positif sur l’emploi ou sa régularisation, tel n’est plus le cas des hausses de plafond successives, qui ont eu un fort effet d’aubaine, comme cela est documenté.

Nous suggérons donc d’abaisser à 2 000 euros le plafond du montant pouvant être défiscalisé pour les prestations dites de confort. En revanche, nous entendons conserver les plafonds pour les services à domicile liés à l’assistance des personnes âgées, des personnes en situation de handicap et des autres personnes qui ont besoin d’une aide personnelle à leur domicile ou d’une aide à la mobilité favorisant leur maintien à domicile.

Notre proposition répond à l’une des recommandations formulées par la Cour des comptes dans son rapport publié en mars 2024 : « réduire le coût du crédit d’impôt pour les activités de la vie quotidienne ne relevant pas des politiques en faveur de l’autonomie et de la garde d’enfants ».

L’ensemble des économies dégagées par la réduction des services de confort devraient notamment être fléchées pour couvrir les services essentiels, qui souffrent d’un sous-financement chronique, ou pour financer le passage de la réduction d’impôt au crédit d’impôt au titre des frais d’hébergement pour les personnes accueillies en Ehpad.

Rappelons en conclusion que, sur ces quelque 7 milliards d’euros, quelque 44 % de la subvention bénéficie au décile de la population percevant les revenus les plus élevés.

Ce plafond de 2 000 euros aura donc vocation à embrasser toutes les prestations dites de confort ; pour le reste, nous maintenons les plafonds en vigueur.

M. le président. L’amendement n° I-1379 rectifié, présenté par Mmes Billon, Housseau et Tetuanui et MM. Cambier, Courtial, Duffourg, Fargeot, Longeot, Menonville et Bleunven, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le 3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La limite mentionnée au premier alinéa est fixée à 750 € pour les contribuables mentionnés au deuxième alinéa du 4 » ;

2° Après le premier alinéa du 4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Ce taux est porté à 80 % des dépenses telles que définies au précédent alinéa lorsqu’elles sont supportées par toute personne physique s’engageant au sein d’un syndicat professionnel relevant des articles L. 2131-1 et suivants du code du travail ou d’une association déclarée régie par la loi du 1er juillet 1901 et exerçant un mandat de représentation syndicale ou associatif. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Yves Bleunven.

M. Yves Bleunven. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ma chère collègue, vous proposez, au travers de l’amendement n° I-1180, de diviser par six le plafond applicable pour la majorité des bénéficiaires, même si vous le maintenez à un niveau plus élevé pour certaines catégories de services.

Vous vous appuyez sur un certain nombre de travaux, certes, mais il faut certainement aller plus loin et l’une de nos commissions aurait tout intérêt à se pencher sur le sujet. Lorsque le Sénat propose des pistes d’économies, cela fait en général suite à des travaux ayant permis d’évaluer les dispositifs, leur pertinence, la réponse aux besoins et le coût. Il me paraîtrait plus logique d’agir ainsi.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, ainsi que sur le suivant.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le rapporteur général, je suis prête à retirer mon amendement, tout du moins si vous prenez l’engagement de lancer une mission flash, tant il est vrai que vous nous tenez le même discours chaque année.

Le Cisap, deuxième dépense fiscale et première pour les particuliers, est capté à 43,5 % par le décile le plus élevé. Rares sont les dépenses fiscales aussi anti-redistributives.

Lorsque vous affirmez que cela risque de pousser nombre de bénéficiaires à se priver de certains services, c’est assez faux : dans les neuf premiers déciles, le plafond de 2 000 euros couvre amplement les besoins. Je ne connais guère de ménages modestes, ou même appartenant aux classes moyennes, qui aillent au-delà.

Comme nous vous le disons, cette dépense fiscale est concentrée sur le dernier décile. Des personnes très aisées font entretenir leur jardin, promener leurs chiens et garder leur maison l’été, puisque ces services s’effectuent toujours à domicile. De fait, elles ont simplement bénéficié d’un effet d’aubaine pour des emplois qu’elles généraient déjà. Cela ne changera rien, car ce ne sont pas elles qui recouraient au travail dissimulé.

Parmi les personnes composant le dernier décile, il en est qui ne déclarent pas leurs dépenses, mais cela n’a rien à voir avec l’existence ou non d’un crédit d’impôt : si elles continuent de le faire, c’est parce que, pour elles, c’est peanuts ! Il s’agit donc vraiment d’un effet d’aubaine, documenté qui plus est. Les travaux que j’ai évoqués sont très importants, parus depuis plusieurs années. Qu’attendons-nous pour agir ?

Je le répète, je retirerai mon amendement en échange de l’engagement d’une mission flash.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1180.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. Yves Bleunven. Je retire l’amendement n° I-1379 rectifié, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° I-1379 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° I-695 rectifié est présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° I-906 est présenté par MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 6 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts, après le mot : « versées », sont insérés les mots : « ainsi que la nature de l’organisme et la personne morale ou physique définie au 1 dont les services rendent le contribuable bénéficiaire du crédit d’impôt ».

La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° I-695 rectifié.

M. Pascal Savoldelli. C’est parce que je suis aussi le rapporteur spécial de la mission « Remboursements et dégrèvements » que je reprends cet amendement intéressant de Mme Christine Pirès Beaune, mon homologue à l’Assemblée nationale.

J’ai eu l’occasion, dans l’édition du rapport spécial consacrée au budget pour 2025, de pointer que la contemporanéité – quel mot compliqué ! – des crédits d’impôt, notamment en faveur de l’aide à domicile, a accru la dynamique et les coûts de trésorerie pour l’État, qui devraient augmenter de 49 % pour atteindre 2,4 milliards d’euros.

Plus généralement, les dispositifs fiscaux relatifs à l’impôt sur le revenu augmentant de 7,9 %, il faut évaluer leur efficacité et les cibler pour ne pas créer d’effet d’aubaine.

Force est de constater que nous manquons d’informations sur un tel dispositif. Si nous savons que 60 % des dépenses concernent l’entretien de la maison, les travaux ménagers ou les petits travaux de jardinage, nous n’avons aucune indication sur la nature des organismes ni sur la personne morale ou physique qui effectue la prestation.

En demandant ces éléments dans la déclaration prévue à l’article 170 du code général des impôts, nous serons à même d’évaluer ce crédit d’impôt, qui essuie le feu des critiques de différentes institutions.

La Cour des comptes constate qu’il ne répond pas aux objectifs qui lui sont assignés et le Conseil des prélèvements obligatoires note à son propos : « Le choix de recourir à un crédit d’impôt avec avance immédiate revient à rapprocher la dépense fiscale d’une logique de dépenses budgétaires sans présenter les mêmes avantages en termes de contrôle. »

Nous nous interrogeons donc sur le périmètre de ce dispositif coûteux et peu contrôlable.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° I-906.

Mme Isabelle Briquet. Dans le droit fil de ce qui vient d’être dit par mon collègue, il s’agit par cet amendement de demander une précision aux fins de mieux évaluer ce même dispositif.

J’ai bien entendu tout à l’heure M. le ministre rappeler l’importance des travaux et des emplois liés à un tel crédit d’impôt. Néanmoins, cela a aussi été rappelé, le coût de ce dernier s’élève tout de même à 6 milliards d’euros.

À notre sens, une évaluation serait tout à fait pertinente pour savoir vraiment de quoi l’on parle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je comprends pourquoi M. Savoldelli a quasi épuisé son temps de parole pour présenter son amendement, tant il doit savourer l’avis favorable émis par la commission ! (Sourires.)

Je signale d’ailleurs que nous avons pris le temps de regarder ce qui a été voté à l’Assemblée nationale, où un amendement identique a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement, amendement déposé par MM. Labaronne et Marion, ainsi que par l’ancien ministre chargé des comptes publics, M. Cazenave.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-695 rectifié et I-906.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° I-1838 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Longeot et Courtial, Mmes Sollogoub et Billon, M. Delcros, Mme Havet, M. Duffourg, Mme O. Richard, M. Folliot, Mme Antoine, M. Bleunven et Mmes Saint-Pé et Romagny, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Au 6 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts, les mots : « et des cotisations sociales » sont remplacés par les mots : « des cotisations sociales et de la contribution due au titre de la prévention et de la santé au travail prévue au premier alinéa de l’article L. 4625-3 du code du travail ».

II. Le code du travail est ainsi modifié :

1° Au cinquième alinéa de l’article L. 4622-6, après les mots : « à l’article L. 7123-2 » sont insérés les mots : « et au 3° de l’article L. 4625-2 » ;

2° Le premier alinéa de l’article L. 4625-3 est ainsi modifié :

a) Les mots : « dont le montant est fixé » sont remplacés par les mots : « proportionnelle à la masse salariale brute dont le taux est fixé en adéquation avec les dépenses prévisibles » ;

b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : « La contribution est fixée à 0,2 % de la masse salariale brute jusqu’à l’entrée en vigueur au plus tôt à compter du 1er juillet 2025 d’un accord collectif de branche étendu répondant aux exigences de proportionnalité et adapté aux différents modèles d’accès aux services à domicile. »

III. – Le I et le II sont applicables à compter du 1er janvier 2025.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Il s’agit d’intégrer, dans le cadre du calcul de l’avance immédiate liée au crédit d’impôt pour les services à la personne, la nouvelle contribution relative à la prévention et à la santé au travail, dont vont devoir s’acquitter les particuliers employeurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1838 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1112 rectifié, présenté par M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Bourgi, Jomier, Féraud et Redon-Sarrazy et Mme Blatrix Contat, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 9° du II de la section V du chapitre Ier du titre Ier de la première partie du livre premier du code général des impôts, est insérée une division ainsi rédigée :

« …° Réduction dimpôt accordée au titre de laffiliation volontaire au régime dassurance sociale pour les Français domiciliés à létranger

« Art 199. – Les cotisations versées par les contribuables, du fait de leur affiliation volontaire aux régimes d’assurance sociale, en application du titre VI du livre VII du code de la sécurité sociale, ouvrent droit à une réduction d’impôt sur le revenu. »

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Il s’agit de rendre déductibles des impôts les cotisations aux assurances de base à la Caisse des Français de l’étranger pour les cotisants et leurs ayants droit, étant entendu que ces personnes n’ont pas accès au régime de sécurité sociale en France.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1112 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1596 rectifié, présenté par Mmes Vermeillet, N. Goulet et Guidez, M. Longeot, Mme Sollogoub, MM. Fargeot et P. Martin, Mmes Saint-Pé, Florennes, Romagny et Billon, M. Courtial, Mmes Jacquemet, Perrot, Housseau et Antoine et M. Delcros, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 200 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du 1, le taux : « 66 % » est remplacé par le taux : « 50 % » ;

2° À la première phrase du 1 ter, le taux : « 75 % » est remplacé par le taux : « 50 % ».

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Demande de retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Cet amendement figure parmi les premiers d’une série visant à attaquer le monde associatif au travers d’une baisse de la déduction fiscale en cas de dons aux associations.

Depuis le covid, les associations ont déjà perdu beaucoup de ressources, qu’il s’agisse des dons, des cotisations ou même des subventions. Avec ce budget, les subventions aux associations ne vont pas aller en s’améliorant.

Le dispositif proposé dans cet amendement est donc extrêmement dangereux pour l’ensemble du secteur associatif.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1596 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1598 rectifié, présenté par Mme Le Houerou, MM. Pla, Ros, Temal et Bourgi, Mme Bélim, MM. Tissot et Redon-Sarrazy, Mme Monier, M. M. Weber et Mme Espagnac, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le b du 1 de l’article 200 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette disposition s’applique également aux regroupements d’organismes d’intérêt général mentionnés à cet alinéa lorsqu’ils concourent, directement ou indirectement, à la réalisation de leurs missions ; » ;

2° Le a du 1 de l’article 238 bis est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elles s’appliquent également aux regroupements d’organismes d’intérêt général mentionnés à cet alinéa lorsqu’ils concourent, directement ou indirectement, à la réalisation de leurs missions ; ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Frédérique Espagnac.

Mme Frédérique Espagnac. Cet amendement vise à préciser les articles 200 et 238 bis du code général des impôts en incluant dans leur champ d’application les coordinations et fédérations d’associations lorsque celles-ci « concourent » à l’objectif d’intérêt général de leurs missions.

Ces modifications de forme permettraient simplement aux coordinations et aux fédérations d’associations d’intérêt général de se financer, en sus de la subvention publique, auprès des particuliers, de fondations et d’entreprises en bénéficiant de mécénat et de mécénat de compétences.

Cet amendement a été élaboré avec le Mouvement associatif de Bretagne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1598 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1907 rectifié bis, présenté par Mmes Evren, Puissat, Valente Le Hir, Aeschlimann et Dumont, MM. Perrin, Rietmann, Karoutchi, Brisson, Genet et Paccaud, Mme Noël, MM. Houpert et Savin, Mme Dumas, M. Tabarot, Mme Lassarade, MM. Grosperrin et Piednoir, Mmes Gosselin et V. Boyer, M. Klinger, Mme Joseph, MM. Mandelli et Olivier, Mme Micouleau, M. Gremillet, Mme Borchio Fontimp, MM. Panunzi, Meignen et Belin, Mme Bellurot et MM. Naturel et Dumoulin, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 200 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le b du 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de la réduction d’impôt est exclu pour les dons aux associations, aux fondations et aux organismes dont un ou des membres du bureau ont été reconnus coupables d’atteinte aux principes de la République au titre de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République s’ils n’ont pas été exclus de l’association à la suite du jugement. » ;

2° Le premier alinéa du 5 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les associations, aux fondations et aux organismes dont un ou des membres du bureau n’ont pas été exclus après avoir été reconnus coupables d’atteinte aux principes de la République au titre de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République ne peuvent délivrer les pièces justificatives susmentionnées. L’absence de respect de cette interdiction entraîne l’application de l’amende mentionnée à l’article 1740 A. »

La parole est à M. Olivier Rietmann.

M. Olivier Rietmann. Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1907 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-458, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 200 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le b du 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de la réduction d’impôt est exclu pour les dons aux associations dont les adhérents sont reconnus coupables d’avoir, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger en France ; »

2° Le premier alinéa du 5 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les associations dont les adhérents sont reconnus coupables d’avoir facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger en France ne peuvent délivrer les pièces justificatives susmentionnées. L’absence de respect de cette interdiction entraîne l’application de l’amende mentionnée à l’article 1740 A. »

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Je suggère une piste d’économies. Certaines associations subventionnées par des fonds publics aident directement à faire entrer de manière illégale des étrangers en France, voire organisent ces arrivées. Ce mode d’action, délictueux, fait malheureusement rarement l’objet de poursuites judiciaires.

Non seulement cette situation est inacceptable du point de vue du droit, mais le fait qu’elle provienne d’associations parfaitement connues et bénéficiant de l’aide financière des pouvoirs publics l’est davantage encore. Ces organismes étant financés, entre autres, par des dons, ils bénéficient de la réduction d’impôt de l’article 200 du code général des impôts.

Par conséquent, cet amendement a pour objet d’exclure du bénéfice de cette réduction « les dons aux associations dont les adhérents sont reconnus coupables d’avoir, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger en France ».

En outre, il tend à interdire à ces mêmes associations de fournir des reçus fiscaux, nécessaires pour que les contribuables bénéficient de la réduction d’impôt.

M. le président. L’amendement n° I-558, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 200 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le b du 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de la réduction d’impôt est exclu pour les dons aux associations dont les adhérents sont reconnus coupables d’actes d’intrusion ou de dégradations sur les installations nucléaires ou d’actes de violence vis-à-vis de professionnels ; »

2° Le premier alinéa du 5 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les associations dont les adhérents sont reconnus coupables d’actes d’intrusion ou de dégradations sur les installations nucléaires ou d’actes de violence vis-à-vis de professionnels ne peuvent délivrer les pièces justificatives susmentionnées. L’absence de respect de cette interdiction entraîne l’application de l’amende mentionnée à l’article 1740 A. »

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Depuis plusieurs années, des associations se revendiquant de l’écologie radicalisent leurs modes d’action, en dégradant des biens publics et en s’attaquant à des propriétés ou à des installations agricoles, à des œuvres d’art ou, pire encore, à nos forces de l’ordre, comme à Sainte-Soline. Les opérations militantes visant les installations nucléaires sont, elles, plus ancrées historiquement dans le registre de certaines de ces associations.

Dans le contexte des débats sur l’avenir énergétique de la France, nous risquons de faire face une recrudescence de ce mode d’action délictueux, qui fait rarement l’objet de poursuites judiciaires, d’autant que ces structures sont financées par les impôts des Français.

Cet amendement a donc pour objet d’exclure du bénéfice de la réduction d’impôt de l’article 200 du code général des impôts les dons destinés à ces associations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », et moi-même nous sommes penchés en commission des finances, au travers de la mission flash d’information sur les mécanismes de suspension de la réduction d’impôt pour les dons aux associations, sur la manière de lutter contre le phénomène des structures bénéficiant de fonds publics qui se livrent à certaines exactions. Nous avons formulé des propositions.

Monsieur le sénateur, l’extension que vous proposez pourrait se révéler inconstitutionnelle. Toutefois, je pense que vous aurez satisfaction si vous attendez encore un peu : lorsque nous examinerons certains articles rattachés de la deuxième partie du projet de loi de finances, j’aurai l’occasion de soumettre un amendement visant à rendre enfin effective la procédure prévue pour les infractions figurant au II de l’article 1378 octies du code général des impôts.

Je rappelle que notre mission flash d’information avait été créée à la suite d’une pétition déposée par le président de la Fédération nationale des chasseurs. (M. Thomas Dossus sexclame.)

Je demande le retrait des deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Il ne faut pas que la liste des associations pouvant bénéficier de réductions d’impôt, de crédits d’impôt ou d’avantages fiscaux soit déterminée par les services fiscaux. Nous ne pouvons valider un amendement qui tendrait à interdire ces dispositifs à un type d’association du fait d’une opinion politique ou d’un positionnement militant ou idéologique. Si les actions menées par l’un de ces organismes sont illégales, il revient à la justice seulement de se prononcer.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je voudrais revenir non pas sur les deux amendements, mais sur le dispositif en question. Dans un référé, la Cour des comptes estime qu’il y a extrêmement peu de contrôles a posteriori. En la matière, la marge de progression est extrêmement importante puisque les déductions se font avant les contrôles.

Nous reviendrons sur le sujet lors de l’examen de certains articles rattachés. Ces déductions représentent tout de même des centaines de millions d’euros.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Ces amendements sont criminels : (M. Joshua Hochart sexclame.) ils visent à entraver l’action de tous ceux qui, solidaires, se rendent, parfois au péril de leur vie, tant en mer qu’à la montagne, à la rescousse de personnes qui tentent de traverser la frontière.

En outre, je ne comprends pas vraiment comment le dispositif de ces amendements pourrait trouver à s’appliquer, comme vient en partie de l’expliquer M. le rapporteur général : faudrait-il supprimer les avantages fiscaux de toutes les associations dont serait membre une personne solidaire qui se ferait condamner pour l’une des infractions évoquées dans les dispositifs de ces amendements ? De nombreux organismes risquent d’être concernés par des situations qui n’ont rien à voir avec leur objet…

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I- 458.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I- 558.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-1990, présenté par Mme de Marco, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le b du 1 de l’article 200 du code général des impôts, il est inséré un b bis ainsi rédigé :

« b bis) De tiers lieux à statut sociaux ou culturels à vocation d’intérêt général disposant d’un statut d’association au sens de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association et du décret du 16 août 1901. »

II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Les tiers-lieux sont en expansion, sachant que près de 60 % d’entre eux se situent en dehors des grandes métropoles. Ces espaces de vie et d’échanges sont des vecteurs essentiels de la cohésion sociale. Ils permettent de tisser un réseau de solidarités locales en proposant des réponses concrètes aux défis du quotidien : isolement, précarité, difficulté d’accès à la culture…

Le budget présenté au travers du PLF pour 2025 pourrait, selon France Tiers-Lieux, signer la fin de cette politique à destination des territoires. La coupe budgétaire prévue réduirait à néant les efforts pour accompagner ceux qui innovent dans nos quartiers, dans nos petites villes et dans nos villages.

Ainsi, cet amendement tend à ce que les dons versés aux tiers-lieux sociaux et culturels à vocation d’intérêt général bénéficient d’une réduction d’impôt au même titre qu’un don à une association.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle y sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je demande le retrait de l’amendement pour une simple raison : votre demande, madame la sénatrice, est satisfaite.

M. le président. Madame de Marco, l’amendement n° I-1990 est-il maintenu ?

Mme Monique de Marco. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1990 est retiré.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1096 rectifié bis, présenté par Mme Pantel, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Guiol, Mme Jouve et MM. Roux, Fialaire et Gold, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la fin de la seconde phrase du second alinéa du 2° du g du 1 de l’article 200 du code général des impôts, les mots : « peuvent être évalués sur le fondement du barème forfaitaire prévu au huitième alinéa du 3° de l’article 83 » sont remplacés par les mots : « ouvrent droit à un crédit d’impôt sur le fondement d’un barème forfaitaire fixé par décret ».

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. André Guiol.

M. André Guiol. Cela n’est un secret pour personne : le secteur associatif accuse un manque criant de bénévoles. Pour autant, il connaît une dynamique importante ces dernières années. J’en veux pour preuve que 71 128 associations ont été créées entre juillet 2022 et juin 2023.

Devant cette situation, il nous faut actionner davantage de leviers pour entretenir et faire grossir notre vivier de bénévoles. Pour rappel, 90 % des associations fonctionnent seulement grâce à ces derniers, selon le réseau associatif Recherches et solidarités.

Dans cet esprit, cet amendement vise à démocratiser l’engagement associatif en réduisant les barrières monétaires qui peuvent dissuader les Français les plus modestes de sauter le pas. En effet, la mesure que nous proposons tend à substituer un crédit d’impôt à la réduction d’impôt actuelle afin de rétablir une forme d’équité fiscale et d’égalité entre les bénévoles assujettis à l’impôt sur le revenu et ceux qui ne le sont pas.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° I-755 rectifié est présenté par MM. Michau, Bourgi et Darras, Mme Le Houerou, MM. P. Joly, Pla, Tissot et Montaugé, Mmes Artigalas, Bélim et Linkenheld, M. Ziane, Mme Espagnac et M. Mérillou.

L’amendement n° I-819 rectifié bis est présenté par M. Redon-Sarrazy, Mmes Daniel, Brossel et Monier et MM. Ros et Chantrel.

L’amendement n° I-1181 est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la fin de la seconde phrase du dernier alinéa du 1 de l’article 200 du code général des impôts, les mots : « peuvent être évalués sur le fondement du barème forfaitaire prévu au huitième alinéa du 3° de l’article 83 » sont remplacés par les mots : « ouvrent le droit à un crédit d’impôt sur le fondement d’un barème forfaitaire fixé par arrêté du ministre chargé du budget. »

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Frédérique Espagnac, présenter l’amendement n° I-755 rectifié.

Mme Frédérique Espagnac. Depuis la crise covid, la France traverse une crise du bénévolat de gouvernance à la suite d’un déclin de l’engagement des plus de 65 ans, catégorie d’âge surreprésentée au sein des instances associatives.

La séquence des jeux Olympiques et Paralympiques a mis en lumière l’implication des 45 000 volontaires qui ont activement contribué à la réussite de cet événement historique. Or il est important de rappeler que les associations et leurs bénévoles jouent au quotidien un rôle fondamental dans notre pays en soutenant des projets au service de la justice sociale, de la solidarité et de la protection des plus fragiles ou en contribuant à la vie culturelle, civique et sportive dans les territoires.

Le présent amendement a pour objet de substituer à la réduction d’impôt au titre des frais de déplacement des bénévoles un crédit d’impôt, afin de rétablir une forme d’équité fiscale et d’égalité entre les personnes assujetties à l’impôt sur le revenu et celles qui ne le sont pas. Nous redonnerions ainsi la possibilité à toutes et à tous de s’engager.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° I-819 rectifié bis.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° I-1181.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à compléter par un crédit d’impôt la réduction d’impôt au titre des frais kilométriques engagés dans le cadre d’une activité bénévole.

De fait, cette réduction concerne seulement les personnes imposables, situation qui ne doit pas être celle de nombreux bénévoles. Ces derniers, au nombre de 13 millions en France, qu’ils soient soumis à l’impôt ou non, donnent de leur temps et font face à des dépenses dans le cadre de leur engagement, notamment pour leurs déplacements.

Les associations pallient en partie les insuffisances de l’État en matière de lutte contre la grande pauvreté et de réduction des inégalités sociales et territoriales. En 2023, les Restos du Cœur ont accompagné 128 000 enfants de moins de 3 ans pour leur assurer nourriture et produits d’hygiène.

Le rôle des bénévoles dans toutes ces associations n’est plus à souligner. Toutefois, ceux qui ne sont pas imposables ne sont pas remboursés de leurs frais kilométriques. Passer au crédit d’impôt serait une mesure de justice fiscale, qui mettrait enfin un terme à une inégalité de traitement et à une intolérable iniquité.

J’avais déjà défendu cet amendement l’année dernière. Monsieur le ministre, je vous saurais gré de m’indiquer le coût que cette mesure représenterait afin de mieux comprendre votre refus d’une telle mesure de justice fiscale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’entends les difficultés que rencontre le bénévolat. Je ne suis pas sûr qu’elles tiennent à une question de réduction d’impôt ou de crédit d’impôt.

Je prétends non pas avoir la vérité, mais vous apporter quelques éclairages. Toutefois, certaines de vos réflexions m’échappent. Le bénévolat a reflué consécutivement à la crise sanitaire. De manière générale, comme nous le voyons dans beaucoup de domaines, celle-ci a provoqué un phénomène d’isolement et des difficultés de santé mentale pour diverses générations. Nous ne résoudrons pas le problème en monétisant l’engagement ou en accordant des réductions d’impôt.

Nous devrions d’abord mener un travail plus en profondeur sur un certain nombre de déterminants de l’implication bénévole. Peut-on parler de crise ? Le cas échéant, dans quels domaines et dans quels territoires ? Certains modes d’action sont-ils plus concernés que d’autres ? Le dispositif proposé pourrait ne pas avoir un coût aussi mineur que vous le pensez…

La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je ne peux vous fournir d’estimation de coûts, madame la sénatrice, car les différents amendements n’indiquent pas de taux.

Ceci étant, nous n’avons pas besoin d’adopter vos propositions : un bénévole peut déjà exiger le remboursement de ses frais kilométriques, que ce soit par le biais d’une réduction d’impôt ou d’un remboursement de frais. S’il n’est pas imposable, il peut choisir cette dernière option.

Je rejoins donc l’avis de M. le rapporteur général : il n’est pas d’une impérieuse nécessité de passer d’une réduction d’impôt à un crédit d’impôt.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le ministre, je suis très intéressée par votre réponse. Nous comptons tous dans nos départements des associations de porte-drapeaux qui nous réclament des mesures au sujet des indemnités kilométriques. Si vous me confirmez qu’ils peuvent demander des déductions à ce titre, même s’ils sont non imposables, je porterai immédiatement cette information à l’association nationale des porte-drapeaux (M. le rapporteur général sourit.) et nous saisirons aussitôt les services de la direction générale des finances publiques (DGFiP) pour voir comment procéder.

Au même titre que les confréries – je ne parle pas que du camembert (Sourires.) –, les porte-drapeaux sont dans nos départements des associations extrêmement importantes. Les bénévoles y donnent de leur personne. Vous nous transmettez la très bonne nouvelle de la soirée !

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. S’il faut aller au bout du raisonnement, supprimons la réduction d’impôt ! Madame Goulet, j’ai bien peur que vous n’ayez mal compris ma proposition, à moins que vous ne fassiez semblant de mal la comprendre… (Mme Nathalie Goulet fait un signe de dénégation.)

Je n’imagine pas un bénévole des Restos du Cœur, qui réalise des collectes de dons tant monétaires qu’alimentaires, demander à l’association, par laquelle la démarche doit passer, un remboursement de ses frais kilométriques. Personne ne le fera !

Mme Raymonde Poncet Monge. Dans certaines structures, le choix entre réduction d’impôt et remboursement pourrait être envisageable, mais pas dans le champ du « caritatif », j’en suis presque certaine.

Si vous pensez que nos propositions n’ont aucun intérêt, alors il faut supprimer la réduction d’impôt. Vous ne pouvez dicter un raisonnement aux non imposables et un autre aux imposables.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mais si, comme vous !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1096 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-755 rectifié, I-819 rectifié bis et I-1181.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le mardi 26 novembre 2024, à zéro heure vingt, est reprise à zéro heure trente.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Si vous en êtes d’accord, monsieur le président, je propose de lever la séance à deux heures du matin. Il serait bon que nous ayons, à cette heure, terminé l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 2 et que nous ayons entendu nos deux collègues – Jean-François Husson et Isabelle Briquet – qui souhaitent s’exprimer sur l’article 3.

Si vous sentez que nous sommes un peu justes par rapport à l’horaire, mes chers collègues, il n’est pas interdit d’accélérer pour essayer de tenir le programme…

M. le président. L’amendement n° I-696, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La première phrase du 1 ter de l’article 200 du code général des impôts est complétée par les mots : « , ainsi qu’au profit d’organismes sans but lucratif qui exercent des actions concrètes en faveur des victimes de violence domestique, qui leur proposent un accompagnement ou qui contribuent à favoriser leur relogement ».

III. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Mettre les finances publiques en adéquation avec l’ambition de la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes : tel est le sens de cet amendement visant à permettre aux associations qui accompagnent et relogent les femmes victimes de violences domestiques de bénéficier du taux majoré de réduction d’impôt sur le revenu pour les dons consentis par les particuliers. C’est une cause fondamentale.

Depuis le début de l’année, déjà 122 femmes sont mortes, parce que femmes – c’est 122 de trop ! En 2021, dans notre pays, les femmes ont été victimes d’au moins 210 000 viols ou tentatives de viol, soit une agression toutes les deux minutes trente. En moyenne, chaque année sur la période 2011-2018, 213 000 femmes âgées de 18 à 75 ans ont déclaré avoir été victimes de violences physiques ou sexuelles de la part d’un conjoint – concubin, pacsé, petit ami – ou d’un ex-conjoint. Parmi ces victimes, 29 % sont âgées de 18 à 29 ans.

Face à ces données édifiantes, popularisées par le collectif #NousToutes, nous souhaitons apporter notre soutien et permettre à chacun de le faire. Dans ce domaine, les associations sont un palliatif à une puissance publique, malheureusement souvent défaillante. Elles agissent pour le bien, travaillant avec nos élus et nos administrations locales, pour accompagner et former aux bonnes pratiques.

Il faut extraire le plus prématurément possible les victimes et leurs enfants d’un contexte domestique impitoyable, dans lequel ils risquent, à chaque seconde, des insultes, des coups, voire pire. Parce qu’elles les sauvent, les associations concernées méritent la reconnaissance de la Nation. La fiscalité est un moyen – certes modeste – de leur accorder cette reconnaissance et de les soutenir dans ce combat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Sur cet amendement, je vais m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

Néanmoins, je me risque à évoquer la tendance qui, je pense, se dessinera progressivement. Rappelons que le taux majoré de réduction d’impôt sur le revenu à 75 % a longtemps été réservé au dispositif des Restos du Cœur de Coluche. Il y a ensuite eu quelques avancées, notamment pour le patrimoine – le taux a été appliqué aux dons au profit de la Fondation du patrimoine – et, pendant la crise sanitaire et à titre temporaire, pour la lutte contre les violences intrafamiliales.

Je n’ai aucune difficulté, aujourd’hui, à envisager de soutenir cette cause. J’attire juste l’attention sur le fait que l’on ouvre une porte… On trouvera dans le temps d’autres luttes qui méritent tout autant – ou plus, ou moins, là n’est pas le sujet – un soutien, et la question d’une réduction d’impôt ou d’un crédit d’impôt finira par se poser.

Il faudrait donc évaluer les conséquences, mener une réflexion un tant soit peu prospective sur le sujet. Sans cela, on finit par engendrer des déséquilibres : ce que l’on n’obtient pas par l’impôt, on finit par l’obtenir par la dépense fiscale.

Je me permets de vous alerter, mes chers collègues, car il ne vous a pas échappé que nos finances publiques sont dans une situation relativement tendue, pour ne pas dire très préoccupante.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Par définition, il est difficile d’estimer le coût de cette mesure : il dépend des dons effectivement réalisés, sachant que cette mesure vise précisément à inciter aux dons…

Toutefois, il est temps d’introduire de nouveaux types d’associations dans le dispositif, notamment celles qui œuvrent pour cette cause absolument essentielle : le Gouvernement s’en remet également à l’avis de la Haute Assemblée.

M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Oui, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° I-696 rectifié.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° I-915 rectifié, présenté par Mme Briquet, MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat et Espagnac, MM. Éblé, Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le premier alinéa du 1 ter de l’article 200 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La deuxième phrase est ainsi rédigée : « Ces versements sont retenus dans la limite de 1 000 € à compter de l’imposition des revenus de l’année 2024 » ;

2° La dernière phrase est supprimée.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Mme Isabelle Briquet. Le présent amendement a pour objet de pérenniser un dispositif ayant fait ses preuves : la réduction d’impôt, dite Coluche, de 75 % pour les dons faits à des organismes d’aide aux personnes en difficulté, dans la limite d’un plafond de 1 000 euros.

En 2020, face à l’urgence sociale provoquée par la crise sanitaire, le plafond initialement fixé à 537 euros avait été temporairement relevé à 1 000 euros. Ce relèvement, prolongé à plusieurs reprises, a démontré toute son efficacité, en incitant nos concitoyens à une générosité sans précédent. Les dons concernés ont ainsi progressé de manière significative, passant de 442 millions d’euros en 2019 à 711 millions d’euros en 2022.

Cette dynamique est vitale pour les organismes comme les Restos du Cœur, la Croix-Rouge, les banques alimentaires ou encore le Secours populaire.

Ces structures jouent un rôle indispensable dans notre société en venant en aide à celles et ceux qui, chaque jour, peinent à subvenir à leurs besoins essentiels. Dans un contexte marqué par une augmentation du nombre de bénéficiaires, leurs besoins ne cessent de croître. C’est pourquoi il serait bon de maintenir ce dispositif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’exprimerai de nouveau un avis de sagesse, mais, je le dis clairement, je vais proposer à la commission des finances de travailler sur le dispositif.

La raison en est assez simple : nous sommes engagés, me semble-t-il, dans une sorte de fuite en avant. De manière assez surprenante, en dépit de la multiplication des dispositifs de soutien – qui se comprennent et s’entendent –, nous ne sommes jamais parvenus à endiguer le phénomène. Il y a les dispositifs communaux et départementaux – centres communaux d’action sociale (CCAS) et autres ; depuis 1986, s’y ajoutent les Restos du Cœur, mais aussi la Croix-Rouge, le Secours populaire, le Secours catholique… Je me souviens très bien avoir rencontré, l’an dernier, un certain nombre de ces grandes associations nationales caritatives. Elles éprouvaient de graves difficultés et certaines sonnaient l’alarme. Nous avons accordé des moyens supplémentaires ; toutefois, il me semble avoir récemment lu dans la presse que les difficultés demeuraient.

Il faut, à un moment donné, poser tranquillement, sereinement et objectivement les éléments du problème. Quelles politiques faut-il corriger ? Y a-t-il des défaillances au niveau de l’État ou des collectivités ? Comment coordonner ? Quelle doit être la contribution du secteur associatif ? Et tout cela, bien sûr, de manière à mieux répondre aux besoins des bénéficiaires sur l’ensemble du territoire national.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je rejoins l’avis de sagesse du rapporteur général.

M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Oui, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° I-915 rectifié bis.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° I-132 est présenté par Mmes M. Vogel et Ollivier, MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Souyris.

L’amendement n° I-1110 rectifié est présenté par M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Bourgi, Féraud et Redon-Sarrazy et Mme Blatrix Contat.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 7 de l’article 200 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :

« 7. La réduction d’impôt est applicable, dans les mêmes conditions, aux dons et versements, y compris l’abandon exprès de revenus ou produits, effectués par les contribuables non domiciliés en France au sens de l’article 4 B, à condition que la prise en compte de ces dons et versements ne soit pas de nature à minorer l’impôt dû par le contribuable dans son État de résidence. »

II. – Le I du présent article s’applique aux dons réalisés à compter du 1er janvier 2025.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° I-132.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le présent amendement a pour objet de permettre aux Françaises et Français résidant hors de France qui effectuent des dons et versements au profit d’organismes d’intérêt général, bien entendu français, de bénéficier d’une réduction d’impôt au même titre que des résidentes et résidents fiscaux français. Nous précisons, bien évidemment, que cette réduction d’impôt se limitera à la seule partie française de leurs impôts.

Dès lors que l’on considère que la réduction d’impôt a un effet incitatif sur le montant des dons, c’est une façon indirecte d’inciter ces Françaises et ces Français à soutenir lesdits organismes.

À cet égard, je pense en effet que la lutte contre la pauvreté, particulièrement contre la grande pauvreté, est en échec en France. Les Restos du Cœur, dernièrement, ont annoncé devoir restreindre leur public de bénéficiaires pour pouvoir se recentrer sur l’aide à apporter à 128 000 enfants de moins de 3 ans.

On en est là ! On en est à ce que les Restos du Cœur ne puissent pas accepter tout le monde et parent au plus scandaleux, à savoir le manque de ressources alimentaires et de produits d’hygiène dont souffrent plus de 100 000 enfants en France.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° I-1110 rectifié.

M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement de Yan Chantrel vise à étendre aux contribuables non-résidents le bénéfice de la réduction d’impôt au titre des dons et versements aux œuvres.

Le fait que le bénéfice de cette réduction d’impôt soit strictement limité aux contribuables résidents est une source d’incompréhension pour les contribuables établis hors de France et souhaitant, par leurs dons, maintenir un lien avec leur pays et soutenir des causes qui leur sont chères.

Toutefois, cette extension doit être strictement encadrée. Un non-résident ne doit pas pouvoir bénéficier, dans son État de résidence, d’un avantage fiscal lui permettant de minorer son imposition, au titre des dons effectués en France au profit des organismes listés à l’article 200 du code général des impôts.

Tel est le sens de cet amendement. Le dispositif, ainsi modifié, permet d’allier solidarité nationale et équité fiscale.

Notons que des amendements ont été adoptés en ces termes, comme article 24 de la proposition de loi relative aux Français établis hors de France, elle-même adoptée par le Sénat en mai 2020, mais aussi dans le cadre des projets de loi de finances pour 2022 et 2023.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Fidèle aux avis qu’elle a rendus jusqu’à maintenant, la commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Les contribuables non-résidents sont soumis à une obligation fiscale limitée en France.

Par ailleurs, le régime permet déjà, sous conditions, aux contribuables non-résidents de France, mais résidant dans un autre État membre de l’Union européenne, de bénéficier des réductions d’impôt, en particulier dans le cadre de dons. Le régime découle de la prise en compte d’une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), susceptible de s’appliquer à tous les États membres de l’Union européenne et impliquant une réciprocité qui ne serait pas garantie dans le cadre d’une résidence fiscale dans un État tiers.

Enfin, l’augmentation du coût des dépenses fiscales n’est pas compatible avec la situation budgétaire actuelle. En incluant les réductions d’impôt déjà possibles, le montant global pourrait dépasser les 2 milliards d’euros, selon des données comptabilisées depuis 2023.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-132 et I-1110 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° I-1989, présenté par Mme de Marco, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1 de l’article 200 du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …- Sont exclus du bénéfice de la réduction d’impôt les dons versés à tout organisme, fondation, ou association ayant pour objet la contribution directe ou indirecte au financement d’un établissement scolaire privé sous contrat ou hors contrat. »

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Dans leur rapport d’avril 2024 relatif au financement public de l’enseignement sous contrat, les députés Paul Vannier et Christopher Weissberg ont relevé que certaines dépenses des parents, notamment les dons à l’Organisme de gestion de l’enseignement catholique (Ogec) ou les cotisations d’adhésion aux associations de parents d’élèves, peuvent ouvrir droit à des crédits d’impôt, constituant dès lors une forme de financement indirect de la part de l’État.

Le présent amendement vise à exclure du bénéfice de la réduction d’impôt de 66 % les dons faits aux organismes, fondations ou associations ayant pour objet la contribution au financement d’un établissement scolaire privé sous contrat ou hors contrat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1989.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° I-477 rectifié ter est présenté par MM. Cambier, Levi, S. Demilly et P. Martin, Mme Guidez, MM. J.B. Blanc, Longeot et Menonville, Mme Romagny, MM. Kern et Courtial, Mmes Billon et Lermytte, MM. Grosvalet et Folliot, Mmes Sollogoub et Jacquemet, M. Fargeot, Mme Herzog, MM. Chasseing et Chauvet, Mmes Housseau et Antoine et M. Duffourg.

L’amendement n° I-1856 rectifié ter est présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Pillefer et Delcros et Mme Havet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 200 quater du code général des impôt est ainsi modifié :

1° Le 2° du b du 1 est complété par les mots : « ou en double vitrage de première génération fabriqué avant 2000 » ;

2° Le 8° du b du 6 est complété par les mots : « ou en double vitrage de première génération fabriqué avant 2000 ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour présenter l’amendement n° I-477 rectifié ter.

M. Jean-Baptiste Blanc. L’amendement est défendu.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° I-1856 rectifié ter.

M. Michel Canévet. Il s’agit, par cet amendement, de voir si le changement des fenêtres de première génération, même à double vitrage, pourrait être éligible à MaPrimeRénov’. Aujourd’hui, ces fenêtres ne sont plus tout à fait aussi performantes ; leur remplacement mériterait donc d’être intégré au dispositif, pour l’amélioration de l’efficacité thermique des logements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de ces deux amendements ; à défaut, elle y sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Avis défavorable.

M. Jean-Baptiste Blanc. Je retire l’amendement, monsieur le président !

M. Michel Canévet. Je retire le mien également !

M. le président. Les amendements nos I-477 rectifié ter et I-1856 rectifié ter sont retirés.

L’amendement n° I-1637 rectifié, présenté par MM. Gontard, Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le II de la section V du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par une division ainsi rédigée :

« …° Crédit d’impôt pour les dépenses de réparation sur certains biens

« Art. 200…. – I. – Les contribuables domiciliés en France au sens de l’article 4B peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt sur le revenu au titre des dépenses effectivement supportées pour des travaux de réparation et de réemploi portant sur :

« 1° Les biens électroménagers, électroniques grand public et informatiques ;

« 2° Les vélos et vélos à assistance électrique ;

« 3° L’ameublement ;

« 4° Les équipements et appareils de chauffage ou de fourniture d’eau chaude sanitaire utilisant une source d’énergie renouvelable.

« II. – Le crédit d’impôt est égal à 50 % des dépenses effectivement supportées prises dans la limite cumulée de 500 € par foyer fiscal. Si le crédit d’impôt excède l’impôt dû, l’excédent est restitué.

« III. – Les dépenses supportées ouvrent droit au bénéfice du crédit d’impôt, sous réserve que le contribuable soit en mesure de présenter, à la demande de l’administration fiscale, la facture d’un réparateur professionnel, suivant les conditions définies par un décret en Conseil d’État. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Notre amendement fait appel au bon sens paysan : avant de jeter, on répare. Il vise donc à promouvoir l’économie circulaire et la réparabilité des objets, avec la création d’un crédit d’impôt, limité à 500 euros par foyer fiscal, qui s’appliquerait sur la réparation des biens électroménagers, biens électroniques, vélos et ameublements.

L’objectif visé est triple : il est évidemment social ; il est économique, puisque l’on favorise l’économie circulaire ; il est enfin écologique.

Ce crédit d’impôt s’ajoute au fonds de réparation voté dans le cadre de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi Agec. Il s’agit aussi de booster ce fonds, qui peine à trouver son rythme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Aucune indication n’est donnée sur le coût de la mesure. Par ailleurs, pour reprendre un point qui me semble transparaître de l’objet de l’amendement, le crédit d’impôt n’est pas le meilleur outil pour cibler les ménages les plus modestes. Enfin, le fonds Économie circulaire de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) sera abondé de 200 millions d’euros en 2025 et des financements seront ouverts pour l’économie circulaire dans le programme 380 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Je nous invite collectivement à être économes, mes chers collègues. L’accumulation de dispositifs fait perdre en lisibilité, pertinence et efficacité. Elle est en outre coûteuse pour les finances publiques, étant rappelé, une fois de plus, l’état dégradé de celles-ci.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Comme M. le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne peux que vous inviter à avoir la main légère sur la dépense fiscale.

Nous avons trop facilement le réflexe d’une conduite des politiques publiques par la dépense fiscale. C’est probablement, je le sais, une conséquence de l’article 40 de la Constitution lui-même… En attendant, cela rend le pilotage complexe, avec un ciblage difficile, voire impossible, et, face à cela, une dépense budgétaire qui existe et qui est méconnue. Je pense notamment au bonus réparation, mis en place en 2022 et très peu utilisé à ce jour.

Commençons donc par faire la promotion des dispositifs existants, ce qui permettra un meilleur pilotage de nos comptes publics, avant de créer une dépense fiscale : avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. M. le rapporteur général a affirmé à plusieurs reprises que le crédit d’impôt ne visait pas le public le moins aisé. Or c’est justement à lui que le dispositif s’adresse – ou alors il faudra me donner de plus amples explications, car je ne comprends pas l’argumentation.

Certes, il s’agit de dépenses ; mais réparer un bien ou un produit coûte aujourd’hui plus cher que d’en acheter un neuf. Il faut donc bien – s’il est d’autres moyens plus efficaces, qu’on me le dise – un levier fiscal pour réorienter, réorganiser et permettre la création d’une filière. D’ailleurs, ce sont des dépenses susceptibles d’engendrer des profits, puisque l’on mettrait ainsi en place toute une filière économique. La question doit donc s’examiner à moyen et long terme.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1637 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-656, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1 du I de l’article 223 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, le taux : « 3 % » est remplacé par le taux : « 8 % » ;

2° Au troisième alinéa, le taux : « 4 % » est remplacé par le taux : « 10 % ».

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. L’an dernier, notre rapporteur général – il sait que je ne déformerai pas ses paroles – nous disait : « Pour certains, je le sais, il y a trop de gens aisés. […] Mais ce n’est pas par une politique qui accentue les prélèvements sur les hauts revenus que vous répondrez au problème difficile du consentement à l’impôt, déjà mentionné. Prélever plus sur les plus hauts revenus ne changera rien si l’on ne change pas le système fiscal. »

M. Albéric de Montgolfier. Il a dit ça ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Pascal Savoldelli. On va nous dire que notre amendement n’est pas nécessaire, qu’il faut le retirer et qu’à défaut, l’avis sera défavorable, car il y a l’article 3… Toutefois, mes chers collègues, ça ne fait pas la maille ! (Sourires.)

De la sorte, on n’a pas épuisé le sujet ! Il faut bien – comme nous le proposons au travers de cet amendement – imposer plus les revenus dépassant 250 000 euros, pour une personne seule, ou 500 000 euros, pour un couple.

Cette proposition n’a pas toujours émané des communistes. J’ai cherché : la contribution a été instaurée par François Baroin en 2011, à l’occasion de l’examen du PLF pour 2012, alors qu’il était membre d’un gouvernement Fillon, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. J’ai également en mémoire la proposition, l’an dernier, de notre collègue Bernard Delcros, d’un taux de 5 % appliqué à la fraction de revenu fiscal de référence supérieure à 750 000 euros par an et de 6 % à la fraction de revenu fiscal de référence supérieure à 1 million d’euros.

Il s’agit donc d’une approche responsable, acceptable et transpartisane.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le sénateur Pascal Savoldelli a très justement deviné que mon avis serait défavorable et a bien anticipé une partie de mon argumentaire. (Sourires.)

Nous pouvons partager un certain nombre des préoccupations que vous évoquez, mais il faut tenir compte des dispositions prévues à l’article 3 du présent PLF.

Par ailleurs, nous devons veiller au phénomène, que j’ai évoqué à plusieurs reprises, de ras-le-bol fiscal, lié au haut niveau de prélèvements obligatoires et taxes de toutes sortes. Pour le moins, le dispositif proposé devrait être borné dans le temps.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Monsieur Savoldelli, je vous renvoie en effet à l’article 3, qui me semble plus pertinent en ce qu’il prévoit, sur la même base de revenu fiscal de référence, soit 250 000 euros pour une personne seule et 500 000 euros pour un couple sans enfant, non pas une augmentation du taux marginal de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), mais l’introduction d’une nouvelle disposition, la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR).

Ce dispositif est source d’une plus grande justice fiscale, car il évite un certain niveau d’optimisation fiscale et impose un seuil minimal d’impôts à payer, dès lors que les revenus imposables entrent dans la catégorie concernée par la contribution.

Je vous invite donc à retirer votre amendement et à voter l’article 3.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-656.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-2020 n’est pas soutenu.

L’amendement n° I-1247 rectifié, présenté par Mmes Canalès, Bélim et Blatrix Contat, M. Bourgi, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. P. Joly, Mmes G. Jourda et Le Houerou, M. Kerrouche, Mme Linkenheld et MM. Pla, Redon-Sarrazy, Ros, Tissot, M. Weber et Ziane, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1 du I de l’article 244 quater F du code général des impôts est complété par les mots : « à l’exclusion de leur dirigeants assimilés salariés ».

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de cet amendement et, à défaut, y sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1247 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1246 rectifié, présenté par Mmes Canalès, Bélim et Blatrix Contat, M. Bourgi, Mme Brossel, MM. Cardon et Chantrel, Mme Daniel, M. P. Joly, Mmes G. Jourda et Le Houerou, M. Kerrouche, Mme Linkenheld et MM. Pla, Redon-Sarrazy, Ros, Tissot, M. Weber et Ziane, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l’article 244 quater F du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bénéfice du crédit d’impôt n’est ouvert que lorsque le tarif unitaire annuel pour l’accueil de l’enfant est inférieur à 12 000 €, toutes taxes comprises. Ce montant est révisé annuellement sur la base d’un coefficient égal à la prévision d’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, retenue pour la même année. »

La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.

Mme Florence Blatrix Contat. Avec votre autorisation, monsieur le président, je présenterai conjointement l’amendement n° I-1245 rectifié bis.

M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° I-1245 rectifié bis, présenté par Mmes Canalès, Bélim et Blatrix Contat, M. Bourgi, Mme Brossel, MM. Cardon et Chantrel, Mme Daniel, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou et Linkenheld et MM. Pla, Redon-Sarrazy, Ros, Tissot, M. Weber et Ziane, et ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l’article 244 quater F du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bénéfice du crédit d’impôt n’est ouvert que lorsque le tarif unitaire annuel pour l’accueil de l’enfant est inférieur à un montant déterminé par arrêté du ministre en charge des questions de petite enfance, révisé annuellement sur la base d’un coefficient égal à la prévision d’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, retenue pour la même année. »

Veillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Florence Blatrix Contat. Tirant les conséquences du livre Les Ogres, de Victor Castanet, et du détournement du crédit d’impôt famille (Cifam), nous proposons par l’amendement n° I-1246 rectifié de limiter le prix du berceau à 12 000 euros, pour éviter les prix prohibitifs.

L’amendement de repli n° I-1245 rectifié bis vise, quant à lui, à déterminer un montant par décret.

M. le président. L’amendement n° I-1179, présenté par Mme Poncet Monge, MM. G. Blanc et Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1 du I de l’article 244 quater F du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un montant maximal de la place d’accueil pris en charge au titre du crédit d’impôt mentionné au premier alinéa du point 1 est déterminé chaque année par la Caisse nationale des allocations familiales pour chaque département, après consultation du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge et des collectivités territoriales. Ce montant tient compte des coûts de fonctionnement ou du foncier, à partir du tarif au mètre carré déterminé par les commissions départementales des valeurs locatives des locaux professionnels dans les conditions déterminées par l’article 1498 du code général des impôts.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Au même titre que pour les Ehpad, la financiarisation croissante du secteur des crèches a ouvert la porte à de multiples dérives, permises par l’insuffisante régulation de la captation des ressources publiques par de grands groupes privés, qui privilégient la rentabilité au détriment du bien-être des enfants.

Parmi certaines pratiques répandues, l’instrumentalisation et l’optimisation de dispositifs fiscaux tels que le crédit d’impôt famille, le fameux Cifam.

Dans son rapport de janvier 2024 sur les modèles de financement et la qualité d’accueil des micro-crèches, l’inspection générale des affaires sociales a mis en exergue les multiples limites du Cifam. Elle a constaté que ce dispositif avait contribué à l’accroissement des inégalités, parce qu’il bénéficie en majorité aux grandes entreprises, mais surtout parce qu’aucune limite n’a été posée quant au prix unitaire du berceau, lequel a subi de ce fait un fort effet inflationniste.

La liberté accordée aux micro-crèches en matière de pratiques commerciales a ainsi permis aux grands groupes privés de crèches de pratiquer des tarifs anormalement élevés sur le prix des places, en ciblant principalement les grandes entreprises.

Les écologistes rappellent qu’il faut urgemment envisager le redéploiement partiel des moyens alloués au Cifam, source d’inégalités importantes, vers le financement d’un véritable service public de la petite enfance. C’est ce que préconise aussi l’Igas, dont je me demande parfois si le Gouvernement lit les rapports…

Le présent amendement tend ainsi à établir un plafond au prix de la place en crèche, pris en charge au titre du crédit d’impôt famille. Le gouvernement en place en avril dernier avait soutenu cette proposition devant une commission d’enquête.

Ce montant sera déterminé par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) – c’est son rôle – pour chaque département, après consultation du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, et, bien sûr, des collectivités territoriales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous partageons les préoccupations que vous avez évoquées, madame la sénatrice, mais je note un problème rédactionnel dans votre amendement : si l’idée d’un plafond sur le prix du berceau est intéressante, le dispositif crée, en réalité, du fait de son emplacement, un plafond général d’éligibilité à l’ensemble du crédit d’impôt, en fixant notamment un montant maximal par enfant accueilli.

Or le crédit d’impôt est plus large que le seul financement des places en crèche : il concerne également les dépenses de formation, les subventions pour garde d’enfants, etc.

Au-delà des enjeux rédactionnels, il faut regarder la politique de financement des places en crèche de manière générale.

À cet égard, il convient certainement d’attendre les conclusions de la commission des affaires sociales, qui a lancé une mission sur les établissements d’accueil du jeune enfant. Faisons confiance à nos collègues Laurence Muller-Bronn, Émilienne Poumirol et Olivier Henno. Nous pourrons, j’imagine, faire œuvre utile avec certaines de leurs conclusions.

Pour l’heure, je sollicite le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je renvoie au débat que nous avons eu en PLFSS sur le sujet.

Nous reconnaissons qu’il est nécessaire d’améliorer l’offre publique de petite enfance quantitativement et qualitativement. En attendant, nous avons besoin de cette offre privée.

Si l’amendement était adopté, que se passerait-il ? Il risquerait d’y avoir, à l’inverse, une pression sur les coûts ou un reste à charge plus important pour les familles, qui ne pourraient pas le payer et ne pourraient donc pas avoir accès à ces services de crèche. Je crois donc vraiment que ce n’est pas une solution.

Le Cifam permet tout simplement à des familles qui ne peuvent avoir accès aux crèches publiques de trouver une solution dans le secteur privé. Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Attendons le rapport de la commission.

Cependant, on sait très bien que des berceaux peuvent être vendus jusqu’à 27 000 euros à de grands groupes. On peut citer plusieurs exemples de grands groupes privés de crèches qui ont une telle politique. Face aux dérives scandaleuses et un peu trop visibles d’autres groupes, pour ce qui concerne notamment l’alimentation des bébés, ils ne se sont pas embêtés : ils se sont carrément spécialisés dans les crèches des grandes entreprises ou les micro-crèches, dont on connaît l’inégale répartition géographique.

Et, comme ils s’adressent à de grands groupes, ils montent le prix des berceaux jusqu’à 27 000 euros, loin du prix moyen de référence entre 12 000 euros et 15 000 euros. Ce montant n’empêche pas de bénéficier du crédit d’impôt.

Pour les familles, c’est autre chose : elles obtiennent le financement via un autre dispositif. C’est la vente de places de berceau auprès de grands groupes qui fait l’objet d’une spéculation inflationniste.

Sur ce, j’entends la remarque de M. le rapporteur général sur l’insuffisante précision de notre dispositif et sur le fait qu’il englobe d’autres dispositifs du crédit d’impôt. L’année prochaine, si rien ne s’est passé, nous redéposerons cet amendement, en précisant cette fois que nous ne parlons que du prix de vente de berceaux aux grands groupes par les grands groupes privés de crèche – de fait, il s’agit là d’une affaire entre grands groupes.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1246 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1245 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1179.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les quatre premiers sont identiques.

L’amendement n° I-115 rectifié bis est présenté par Mme Lavarde, MM. Duplomb et Darnaud, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, M. J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme, Bonnus, Bouchet, J.M. Boyer, Brisson, Burgoa et Cadec, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mme Ciuntu, MM. Cuypers et Daubresse, Mmes Demas, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. Frassa et Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret et Hugonet, Mmes Hybert, Imbert, Jacques, Josende et Joseph, MM. Joyandet et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, de Legge, Le Gleut et H. Leroy, Mmes Lopez et Malet, M. Mandelli, Mme P. Martin, M. Meignen, Mme M. Mercier, M. Michallet, Mme Micouleau, MM. Milon, de Montgolfier, Mouiller et Naturel, Mme Nédélec, MM. de Nicolaÿ, Nougein, Olivier, Panunzi, Paul, Paumier, Pernot, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mme Puissat, MM. Rapin et Reynaud, Mme Richer, MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon, Szpiner et Tabarot, Mmes Valente Le Hir et Ventalon et MM. C. Vial, P. Vidal et J.P. Vogel.

L’amendement n° I-121 rectifié quinquies est présenté par MM. V. Louault et Malhuret, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Médevielle, Brault, Chevalier, Grand, Capus et A. Marc et Mme Bourcier.

L’amendement n° I-253 rectifié quinquies est présenté par MM. Bleunven, Menonville et Canévet, Mme Billon, MM. Cambier, Chauvet, Courtial, Delahaye, Dhersin, S. Demilly et Folliot, Mmes Gacquerre et Guidez, M. Henno, Mmes Housseau et Jacquemet, MM. Kern, Levi, Longeot et P. Martin, Mmes Morin-Desailly et Perrot, M. Pillefer et Mmes Romagny, Saint-Pé, Sollogoub et Vermeillet.

L’amendement n° I-285 rectifié quinquies est présenté par MM. Favreau et Bruyen.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le II de l’article 1378 octies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La référence : « 223-15-3 » est remplacée par les références : « 225-2, 226-4, 226-8 » ;

2° Après le mot : « pénal », sont insérés les mots : « et des articles 23, 24 et 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Olivier Rietmann, pour présenter l’amendement n° I-115 rectifié bis.

M. Olivier Rietmann. Aux termes du code général des impôts, l’administration fiscale est tenue de suspendre les avantages fiscaux des associations tombant sous le coup de décisions pénales définitives rendues dans le cadre d’infractions énumérées de manière exhaustive.

Depuis plusieurs années, certains professionnels de l’agriculture ne cessent d’alerter les pouvoirs publics et les parlementaires sur la recrudescence d’actes de malveillance de la part d’associations activistes. Ces dernières ont multiplié les actions d’une radicalité inquiétante. Les agriculteurs, les professionnels de l’agroalimentaire, les éleveurs, les abatteurs subissent ces agissements d’une rare violence. Or lesdites actions ne sont pas comprises dans la liste concernée par le II de l’article 1378 octies du code général des impôts.

Notre amendement vise à corriger cet oubli, en intégrant les actions illicites subies majoritairement par le monde agricole à la liste des infractions pénales susceptibles d’entraîner l’exclusion des associations concernées du champ de la réduction d’impôt accordée au titre des dons des particuliers.

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour présenter l’amendement n° I-121 rectifié quinquies.

M. Emmanuel Capus. L’amendement a été fort bien défendu par Olivier Rietmann.

L’administration fiscale doit suspendre les avantages fiscaux accordés aux associations condamnées pénalement. Un certain nombre d’infractions sont visées par le code général des impôts.

L’amendement a pour objet d’étendre la liste de ces infractions, notamment aux infractions subies par les agriculteurs dans leurs propriétés, en particulier l’entrave au travail, l’entrave à l’activité économique, l’introduction dans le domicile d’autrui ainsi qu’un certain nombre d’autres infractions qui, aujourd’hui, n’entrent pas dans la liste limitative des infractions pénales permettant de priver une association de l’avantage fiscal.

M. le président. La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° I-253 rectifié quinquies.

M. Yves Bleunven. Le même amendement a été défendu à l’Assemblée nationale, avec le même esprit, par mon collègue breton Corentin Le Fur. Il y a d’ailleurs été voté.

L’élevage français est en pleine contradiction. Le contexte est paradoxal puisque, d’un côté, la loi d’orientation agricole, qui consacrera la souveraineté alimentaire comme étant d’intérêt général, sera votée dans quelques semaines et, de l’autre, il n’y a jamais eu autant d’attaques de la part des associations anti-élevage, anti-spécistes… Les statistiques enflent et commencent à faire peur.

Dès lors, il est important que nous apportions des précisions pour que tous ces actes répréhensibles ne soient plus financés aujourd’hui par l’impôt national.

C’est peut-être une coïncidence, mais nous découvrons dans la presse aujourd’hui qu’une association bretonne, dénommée Peta, vient de demander à la ville de Lamballe d’élever une stèle, voire un mémorial en l’honneur des cochons décédés dans l’incendie d’une porcherie voilà quelques jours… Je pensais que nous avions touché le fond, mais les dingueries continuent ! (Murmures sur les travées du groupe GEST.) Cela vous donne une petite idée des démarches complètement insensées dont les élevages français doivent faire les frais.

Nous défendons tous cet amendement avec force conviction.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Favreau, pour présenter l’amendement n° I-285 rectifié quinquies.

M. Gilbert Favreau. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-1009, présenté par Mme Rossignol, MM. Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat et Briquet, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas et Lurel, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au II de l’article 1378 octies du code général des impôts, après les mots : « code pénal » sont insérés les mots : « ou de l’article L. 2223-2 du code de la santé publique, ».

La parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Le code général des impôts dispose qu’en cas de condamnation définitive pour un certain nombre d’infractions pénales, les dons, legs ou versements effectués au profit de l’organisme condamné ne peuvent plus donner lieu au bénéfice d’un quelconque avantage fiscal.

Le présent amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain tend à ajouter la condamnation pour délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse aux infractions énumérées à l’article 1378 octies du code général des impôts.

Il s’agit de refuser que les organisations entravant la liberté constitutionnellement garantie des femmes à interrompre leur grossesse puissent obtenir des avantages fiscaux, donc être indirectement financées par les contribuables.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je sollicite le retrait des amendements identiques, pour les raisons que j’ai évoquées tout à l’heure : comme je l’ai dit, je présenterai un amendement sur les articles non rattachés qui répond parfaitement, je crois, aux préoccupations de leurs auteurs.

Pour le moment, la loi prévoit que la sanction soit transmise par la justice à l’administration fiscale pour sa mise en œuvre – c’est ce que nous avons découvert lors des travaux de la mission d’information que j’ai menée avec Éric Jeansannetas.

Avec l’amendement que je déposerai, nous aurons la garantie qu’en cas de décision de justice rendue à l’encontre d’actes répréhensibles, le lien avec l’administration fiscale pourra être fait : non seulement les auteurs des infractions ou des délits seront condamnés, mais ils pourront aussi se voir retirer l’agrément dont ils bénéficiaient, au titre soit de leur personne, soit de l’association. Cela tombe sous le sens.

Par ailleurs, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° I-1009, qu’a présenté le sénateur Thierry Cozic.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Chers collègues signataires des quatre amendements identiques, comprenez bien que ces dispositions ne concernent pas uniquement les associations qui s’attaquent aux élevages. C’est l’ensemble du monde associatif qui est attaqué, y compris, d’ailleurs, les syndicats agricoles. Faites attention !

Votre enrobage est intéressant, du reste. Je ne nie évidemment pas l’existence d’actions violentes – je pense notamment aux atteintes aux biens par des incendiaires –, mais il est déjà possible de dissoudre les associations qui commettent de telles attaques. Une fois l’association dissoute, il n’est plus nécessaire de chercher à suspendre cet avantage fiscal.

Cependant, d’autres délits sont visés par ces amendements : les montages de la parole sans consentement, donc les enquêtes vidéo réalisées par L214 ; la diffamation, ce qui est un point essentiel ; l’introduction dans le domicile d’autrui sans autorisation.

Je voudrais revenir un instant sur le cas de l’association L214, directement ciblée par ces amendements : si elle-même n’a jamais été condamnée définitivement, elle a fait condamner un certain nombre d’éleveurs et d’élevages du fait de leurs très mauvaises pratiques.

De telles associations ont un rôle à la fois de lanceur d’alerte et d’intérêt général pour la protection du bien-être animal. Viser la diffamation, c’est commencer à construire des procédures bâillons susceptibles de toucher toutes les associations et de les empêcher de pratiquer des déductions fiscales si elles sont condamnées pour ce motif. Certaines associations de lanceurs d’alerte risquent d’intérioriser la nécessité du silence, ce qui les mettra en danger.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Favreau, pour explication de vote.

M. Gilbert Favreau. Il est important, je crois, de rappeler que nos collègues députés ont adopté le même amendement.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est un encouragement !

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Chers collègues, je veux insister sur ce qu’a dit Thomas Dossus : faites attention, car si les objets de vos amendements identiques sont très clairement ciblés sur un type d’associations, le dispositif proposé s’applique à l’ensemble du monde associatif, ce qui peut être problématique par rapport à l’objectif visé.

Je note aussi que, dans vos objets, vous mettez dans le même panier les chasseurs, par exemple, qui subiraient des pressions de certaines associations, les agriculteurs et les artisans. Autrement dit, vous comparez un loisir, dont la pratique est payante, à une activité professionnelle… La rédaction des amendements doit sans doute être revue.

Si l’on prend l’exemple des associations de chasse, nombre d’entre elles ont été condamnées à la suite de battues mal organisées, qui ont abouti à des jets de carcasses dans des ruisseaux entraînant souvent des conséquences dramatiques, et même des morts. Et ce sont parfois leurs membres qui ont été condamnés, à titre individuel, pour des tirs sur de grands cormorans ou des aigles royaux, par exemple.

Or ces mêmes associations touchent presque plus de 15 millions d’euros pour des actions normalement liées à la biodiversité. Si l’on va dans votre sens, il faudra leur retirer ces millions d’euros à raison de ces condamnations… Est-ce bien ce que vous souhaitez ?

M. Olivier Rietmann. Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-115 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je voudrais compléter les propos de mes collègues.

On voit bien quelles associations ciblent les auteurs de ces amendements. Celles-ci se contentent essentiellement de filmer ce qu’elles voient ; très peu commettent des agressions physiques – et heureusement ! Au demeurant, il y a des procédures judiciaires pour condamner de tels agissements.

Pour ma part, je trouve très salvateur que des lanceurs d’alerte viennent parfois montrer ce que l’on n’aimerait pas voir. Cela permet de faire évoluer la loi.

Chers collègues, j’entends bien votre indignation par rapport à ces pratiques, mais j’aimerais entendre la même colère face aux attaques féroces qui sont commises aujourd’hui contre l’Office français de la biodiversité (OFB). Lorsque les bâtiments de l’OFB sont incendiés, comme ils l’ont été à Brest, lorsqu’ils sont murés ou recouverts de lisier, étonnamment, je n’entends rien du tout…

Par ailleurs, lors d’un certain nombre de manifestations agricoles qui ont eu lieu en Bretagne, des dégradations ont été commises, avec le déversement de centaines de tonnes de déchets de tous ordres, y compris de l’amiante ou des pneus. Pour les collectivités territoriales, le coût a pu s’élever à plusieurs millions d’euros – je pourrais vous communiquer les chiffres ultérieurement.

Il ne peut y avoir deux poids, deux mesures : j’appelle donc à un peu de dignité.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky soutiendra totalement l’amendement n° I-1009, qui tend à ajouter la condamnation pour délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse aux infractions énumérées à l’article 1378 octies du code général des impôts. L’IVG est une liberté constitutionnelle qui a été très largement approuvée par le Parlement, réuni en congrès.

Nous allons poursuivre ensemble l’examen du PLF ces prochains jours. Nous verrons bien si les entreprises – certes minoritaires – condamnées par la justice ne bénéficient plus d’exonérations de cotisations sociales ni d’aides publiques – il ne manquerait plus que ça !

Nous appliquerons alors votre raisonnement, chers collègues. Nous verrons si vous saurez faire preuve de la même ténacité, de la même détermination.

M. le président. Monsieur Capus, l’amendement n° I-121 rectifié quinquies est-il maintenu ?

M. Emmanuel Capus. Oui, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Bleunven, l’amendement n° I-253 rectifié quinquies est-il maintenu ?

M. Yves Bleunven. Oui, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Favreau, l’amendement n° I-285 rectifié quinquies est-il maintenu ?

M. Gilbert Favreau. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-121 rectifié quinquies, I-253 rectifié quinquies et I-285 rectifié quinquies.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 82 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 304
Pour l’adoption 78
Contre 226

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° I-1009.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 83 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l’adoption 127
Contre 205

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° I-830 rectifié ter, présenté par Mmes Billon, L. Darcos, M. Carrère, Housseau, Saint-Pé, Tetuanui et Vermeillet et MM. Courtial, Delcros, Duffourg, Fargeot, Longeot, Menonville et Bleunven, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. –Au IV de l’article 1691 bis du code général des impôts, le mot : « recouvrées » est remplacé les mots : « effectivement encaissées ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Il s’agit d’un amendement de Mme Billon.

La loi du 31 mai 2024 visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille permet à l’époux qui vient de bénéficier d’une décharge de solidarité fiscale d’obtenir le remboursement des sommes que l’administration fiscale a encaissées après les événements attestant de la séparation des époux – divorce, séparation de corps, dissolution du pacte civil de solidarité (Pacs), résidences séparées.

Cependant, l’administration fiscale, dans une note adressée à ses agents pour détailler les modalités d’application de ce texte, prévoit que, dans certains cas, il sera tenu compte non pas de la date effective d’encaissement, mais d’un événement juridique créateur de droits antérieur à cette date.

Or les premiers actes de poursuite aux fins de recouvrement interviennent très rapidement après la procédure de contrôle. Dans la pratique, lorsque l’époux solidaire n’a pas forcément encore pris conscience de l’implication, voire de l’existence de la solidarité et qu’il n’a donc pas encore sollicité la séparation ou le divorce, l’existence d’actes de poursuite empêche la mise en œuvre de la restitution du fait de leur rapidité.

Aussi l’interprétation de la notion de « sommes recouvrées » par l’administration fiscale déconnecte-t-elle ces dernières de la notion d’« encaissement » et l’éloigne-t-elle considérablement de l’intention initiale de la loi.

Le présent amendement vise donc à préciser l’intention du législateur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La loi du 31 mai 2024, qui vise à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille, a introduit une extension du dispositif de décharge de responsabilité solidaire.

Il est notamment prévu que celle-ci peut donner lieu à la restitution de sommes déjà recouvrées par le fisc après l’événement attestant de la séparation. Les auteurs de l’amendement proposent que les montants potentiellement restitués soient les sommes « effectivement encaissées » et non les sommes « recouvrées ».

Je sollicite l’avis du Gouvernement sur ce point, pour qu’il nous informe des conséquences d’un tel changement sur un texte que nous avons adopté très récemment.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. La réforme du 31 mai 2024 a été opérée conformément à l’esprit voulu par le législateur. Pour le Gouvernement, rien ne justifie qu’elle soit déjà amendée.

En outre, la solidarité du paiement des époux et partenaires de Pacs reste l’un des fondements du droit français, et les quatre décharges de solidarité doivent demeurer des exceptions.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-830 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° I-1133 rectifié bis est présenté par Mmes L. Darcos et Bourcier, MM. Brault, Chasseing, Grand et Verzelen, Mme Lermytte, MM. Wattebled, V. Louault, Laménie et Chevalier et Mme Paoli-Gagin.

L’amendement n° I-1325 rectifié bis est présenté par MM. Daubet et Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° I-1647 rectifié bis est présenté par Mmes Schillinger et Havet, M. Iacovelli, Mmes Duranton et Cazebonne, MM. Lévrier et Buis et Mmes Ramia et Nadille.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 5 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 est ainsi modifié :

1° Au I, les années : « 2022, 2023 et 2024 » sont remplacés par les années : « 2025 et 2026 » ;

2° Au IV, l’année : « 1er octobre 2024 » est remplacée par l’année : « 1er octobre 2026 ».

II. - A. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

B. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent et du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

C. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Jean-Luc Brault, pour présenter l’amendement n° I-1133 rectifié bis.

M. Jean-Luc Brault. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Raphaël Daubet, pour présenter l’amendement n° I-1325 rectifié bis.

M. Raphaël Daubet. Cet amendement, élaboré avec la Confédération des petites et moyennes entreprises et adopté à l’Assemblée nationale, vise à prolonger la durée d’exonération des pourboires de l’imposition sur le revenu et des cotisations sociales pour les années 2025 et 2026.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° I-1647 rectifié bis.

Mme Patricia Schillinger. L’exonération des pourboires des cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu a prouvé son efficacité depuis sa mise en place, en 2022.

En trois ans, elle a permis et aux entreprises du secteur de l’hôtellerie-restauration de gagner en attractivité, ce qui est un atout crucial dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, et aux salariés de bénéficier d’une reconnaissance accrue de leurs revenus, notamment pour des démarches comme l’accès au crédit.

Le dispositif de cet amendement, élaboré en concertation avec la CPME et défendu initialement par la députée Olivia Grégoire, vise à prolonger cette exonération jusqu’en 2026. C’est une mesure de justice sociale, qui améliore les conditions de travail des salariés tout en soutenant un secteur clef de l’économie française et du tourisme. La pérenniser enverrait un signal fort, montrant que nous sommes aux côtés des employeurs et des employés pour valoriser ces métiers indispensables au dynamisme de notre économie et à l’excellence de notre offre touristique.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° I-849 rectifié bis est présenté par MM. Capus et Malhuret, Mme Paoli-Gagin, M. Laménie, Mme Bourcier, MM. Brault, V. Louault et Grand, Mme Lermytte et MM. A. Marc, Chasseing, Chevalier, Lemoyne, Houpert et Longeot.

L’amendement n° I-1163 rectifié bis est présenté par Mme Berthet, M. Belin, Mme Belrhiti, M. E. Blanc, Mmes Drexler et Dumont et MM. Gremillet, Karoutchi, Panunzi et Sido.

L’amendement n° I-1250 rectifié quinquies est présenté par MM. Rietmann et Klinger, Mmes Estrosi Sassone et Gosselin, M. Sautarel, Mme Valente Le Hir, MM. Canévet et Pellevat, Mme Sollogoub, M. Perrin, Mme Demas, MM. Genet, Mandelli et Levi, Mme Josende, MM. Kulimoetoke, Bacci, Bruyen et Henno, Mmes P. Martin et Saint-Pé, M. J. B. Blanc, Mmes Billon et Nédélec, M. Duffourg et Mmes Borchio Fontimp, Micouleau, Evren et Romagny.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au I de l’article 5 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, les mots : « et 2024 » sont remplacés par les mots : « , 2024 et 2025 ».

II. - A. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

B. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent et du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

C. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Emmanuel Capus, pour présenter l’amendement n° I-849 rectifié bis.

M. Emmanuel Capus. Cet amendement est très proche des amendements précédents, si ce n’est que la prorogation de l’exonération fiscale et sociale sur les pourboires ne serait que d’une année au lieu de deux.

Ce dispositif a fait ses preuves et représente un soutien important pour les salariés du secteur de l’hôtellerie et de la restauration. Il marque également une adaptation au fait que les pourboires ne sont désormais plus seulement versés en pièces ou en billets, mais aussi par carte bleue. Il y a donc une logique, avec ce nouveau mode de paiement, à prolonger l’exonération de charge fiscale et sociale.

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° I-1163 rectifié bis.

Mme Martine Berthet. Il s’agit de prolonger en 2025 l’exonération des cotisations sociales et fiscales, afin de répondre aux difficultés de recrutement du secteur des cafés, hôtels et restaurants (CHR).

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour présenter l’amendement n° 1250 rectifié quinquies.

M. Olivier Rietmann. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait des amendements nos I-1133 rectifié bis, I-1325 rectifié bis et I-1647 rectifié bis, et s’en remet à la sagesse du Sénat pour les amendements nos I-849 rectifié bis, I-1163 rectifié bis et I-1250 rectifié quinquies.

En effet, ces trois derniers amendements visent à prolonger en 2025 cette exonération, dont je rappelle qu’elle n’est pas inconditionnelle, ne concernant que les salariés dont le revenu ne dépasse pas 1,6 Smic.

Monsieur le ministre, il nous faut absolument une évaluation du dispositif, comme cela aurait dû être le cas au 1er octobre. Certes, les turbulences survenues cette année ont pu poser quelques difficultés, mais il convient que vous vous y atteliez très rapidement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je rejoins le rapporteur général sur la nécessité d’évaluer le dispositif. Nous allons regarder selon quel calendrier nous pourrons le faire.

J’émets un avis favorable sur les amendements nos I-849 rectifié bis, I-1163 rectifié bis et I-1250 rectifié quinquies, et demande le retrait des autres.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-1133 rectifié bis, I-1325 rectifié bis et I-1647 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage sur les amendements nos I-849 rectifié bis, I-1163 rectifié bis et I-1250 rectifié quinquies ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le gage est levé, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc des amendements nos I-849 rectifié ter, I-1163 rectifié ter et I-1250 rectifié sexies.

Je les mets aux voix.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° I-850 rectifié bis, présenté par MM. Capus et Malhuret, Mme Paoli-Gagin, M. Laménie, Mme Bourcier, MM. Brault, V. Louault et Grand, Mme Lermytte, MM. A. Marc et Chasseing, Mme L. Darcos et MM. Chevalier, Houpert, Longeot et Pellevat, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au premier alinéa du I de l’article 5 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022, la date : « 31 décembre 2025 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2026 ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Emmanuel Capus.

M. Emmanuel Capus. Cet amendement vise à sécuriser le dispositif de monétisation des RTT, introduit par la loi du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022, en l’étendant jusqu’au 31 décembre 2026 afin de donner de la visibilité aux salariés et employeurs concernés.

Cette mesure, vous vous en souvenez, permet aux salariés qui souhaitent augmenter leur activité de convertir en rémunération, avec l’accord de leur employeur, leurs demi-journées ou journées de réduction du temps de travail. Les heures de travail ainsi effectuées font l’objet d’un régime social et fiscal favorable.

Il apparaît nécessaire de proroger cette mesure, qui permet d’améliorer la rémunération et le pouvoir d’achat des salariés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le dispositif de monétisation des RTT est en effet intéressant.

J’aimerais, monsieur le ministre, que vous nous en dressiez un bilan ; ainsi l’avis du Gouvernement pourra-t-il éclairer notre assemblée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Plus qu’un bilan, je vous livre une conviction, monsieur le rapporteur général : il s’agit d’une mesure en faveur du pouvoir d’achat des travailleurs. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement de M. Capus.

M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Oui, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° I-850 rectifié ter.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° I-399 rectifié quater, présenté par MM. Bilhac, Daubet et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est ainsi modifié :

1° Le V est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le montant : « 3 000 € » est remplacé par le montant : « 5 000 € » ;

b) Au troisième alinéa, le montant : « 6 000 € » est remplacé par le montant : « 7 000 € » ;

2° Au deuxième alinéa du VI, le montant : « 6 000 € » est remplacé par le montant : « 7 000 € » ;

3° Au VI bis, les mots : « trois fois » est remplacé par les mots : « deux fois et demi ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Raphaël Daubet.

M. Raphaël Daubet. Cet amendement concerne le pouvoir d’achat des classes moyennes. Il vise à leur donner de l’air en allégeant la fiscalité sur les versements de prime de partage de la valeur (PPV) pour les salariés des entreprises de moins de cinquante salariés touchant des revenus de travail moyens, voire modestes compris entre 1 530 euros et 2 787 euros par mois pour une personne seule.

À cette fin, l’amendement comprend deux dispositifs, qui s’appliqueront jusqu’à l’extinction de ce régime dérogatoire, le 31 décembre 2026.

Tout d’abord, il tend à cibler davantage l’exonération, en la réservant aux rémunérations allant jusqu’à deux Smic et demi, au lieu de trois actuellement. Ensuite, il vise à augmenter les deux plafonds d’exonération, respectivement à 5 000 euros et 7 000 euros.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Demande de retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-399 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° I-155 rectifié ter, présenté par Mme Drexler, MM. Klinger, Longeot, Houpert, Mandelli et Belin, Mme de La Provôté, M. D. Laurent, Mmes Muller-Bronn, Ventalon et Demas, MM. Savin et J. B. Blanc, Mme Morin-Desailly, MM. Kern et Panunzi, Mmes Josende et Belrhiti, M. Bruyen, Mmes Billon et L. Darcos, MM. Wattebled, Gremillet, Genet, Perrin, Rietmann, Grosperrin, Sautarel, Levi, Courtial, C. Vial et Sido et Mme Evren, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au premier alinéa de l’article 30 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, les mots : « de la Fondation du patrimoine en vue d’assurer, dans le cadre de son activité » sont remplacés par les mots : « des fondations reconnues d’utilité publique dont les statuts prévoient qu’elles remplissent une mission » et le mot : « local, » est remplacé par les mots : « , pour contribuer au financement d’études et de travaux pour ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Sabine Drexler.

Mme Sabine Drexler. Le Président de la République a annoncé, le 15 septembre 2023, le lancement d’une collecte nationale de dons pour financer les travaux de conservation et de restauration des édifices religieux des communes de moins de 10 000 habitants en métropole, et de moins de 20 000 habitants en outre-mer.

Ces édifices, qui participent à l’identité et au charme de nos villages, sont aujourd’hui en péril : le manque d’entretien et les budgets contraints des communes qui en ont la charge plongent progressivement bon nombre de nos églises, temples et synagogues dans un état de délitement.

Afin d’inciter les particuliers à concourir à cette collecte nationale, l’article 30 de la loi de finances pour 2024 porte le taux de la réduction d’impôt de 66 % à 75 % pour les dons effectués entre le 15 septembre 2023 et le 31 décembre 2025 au profit de la Fondation du patrimoine, dans le cadre de son activité d’intérêt général.

Cet amendement tend à élargir le nombre d’organismes collecteurs, au-delà de cette seule fondation, à d’autres fondations reconnues d’utilité publique (FRUP) qui agissent elles aussi pour la conservation et la restauration du patrimoine, afin que l’ensemble des donateurs bénéficient de manière équitable du même taux de réduction d’impôt.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande le retrait de cet amendement, pour deux raisons.

Premièrement, le dispositif proposé contrevient à l’objet même de l’article 30 de la loi de finances initiale pour 2024, puisqu’il s’agit d’une mesure temporaire, en vigueur du 15 septembre 2023 au 31 décembre 2025, visant les dons au profit de la collecte nationale pour sauver le patrimoine religieux de nos villages, confiée à la Fondation du patrimoine. Le taux majoré de la réduction d’impôt se concentrant sur un objectif spécifique, son élargissement disperserait l’effort de solidarité.

Deuxièmement, les FRUP bénéficient d’ores et déjà de la réduction d’impôt de droit commun, à hauteur de 66 %, au profit d’ailleurs d’œuvres et d’organismes d’intérêt général.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. L’avis du Gouvernement est favorable sur le principe, avec une difficulté d’ordre constitutionnel posée par le caractère rétroactif de l’amendement.

M. Albéric de Montgolfier. On va le rectifier !

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Il conviendrait de le rectifier au cours de la navette, afin qu’il soit bien conforme à la Constitution.

M. Albéric de Montgolfier. Autant le voter !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Afin de trouver un point d’accord en commission mixte paritaire, je me range à l’avis favorable du Gouvernement.

M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le gage est levé, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° I-155 rectifié quater.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.

L’amendement n° I-1333 rectifié, présenté par MM. Raynal et Cozic, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Les taux mentionnés au début des troisième, quatrième et dernier alinéas du 1 du I de l’article 197 du code général des impôts sont majorés respectivement de un point, de deux points et de trois points.

II. - Le I du présent article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2024. Lorsque le déficit public des administrations publiques françaises tel que constaté par Eurostat est inférieur à 3 % du produit intérieur brut, les taux applicables aux revenus perçus à compter du 1er janvier de l’année pour laquelle ce constat est établi sont ceux définis au 1 du I de l’article 197 dans sa rédaction résultant de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

La parole est à M. Claude Raynal.

M. Claude Raynal. Pour ce dernier amendement de la soirée, et puisque le Gouvernement semble prêt à accepter beaucoup de choses, (Sourires.) je vous soumets une réflexion sur un sujet simple, que j’ai évoqué en discussion générale et, de manière plus générale, sur ce que nous faisons.

Les gouvernements précédents se sont privés de produits fiscaux très importants, au travers de la suppression non seulement de la CVAE, mais aussi de la taxe d’habitation, qui fait l’objet de cet amendement.

M. Claude Raynal. Le président Macron avait promis de la supprimer pour 80 % de la population, ce qui a été fait dans un premier temps. Puis, le Conseil constitutionnel, comme nous l’avions prédit dès le premier jour, a élargi la mesure aux 20 % restants.

M. Albéric de Montgolfier. C’était évident !

M. Claude Raynal. On peut penser ce que l’on veut de la promesse présidentielle, toujours est-il que les Français, par leur vote, ont approuvé la première suppression, qui représentait 9 milliards d’euros. Restait le produit versé par les 20 % de contribuables restants, soit 9 milliards d’euros supplémentaires. Chaque année, d’ailleurs, ces 18 milliards d’euros alourdissent la dette…

On peut continuer de reporter ces milliards d’euros sur nos enfants, mais je vous proposerai plutôt de sortir de l’hypocrisie qui consiste, non plus à faire des cadeaux, mais à reprendre d’une main, au travers de la taxe sur l’électricité ou de la non-indexation des retraites, ce que l’on a donné de l’autre.

Selon moi, il ne faut pas accepter la hausse de la taxe sur l’électricité, mais remettre dans le circuit une partie de la taxe d’habitation que les 20 % les plus aisés ne versent plus.

Si, par extraordinaire, mon amendement venait à ne pas être voté, nous en reparlerions l’an prochain ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Remédier à la dégradation des comptes publics, dont vous avez fait le diagnostic, est un objectif que nous avons en commun, monsieur le président Raynal.

Vous proposez une participation accrue des personnes concernées par les trois tranches supérieures de l’impôt sur le revenu, en précisant que la mesure sera maintenue tant que le déficit public ne sera pas revenu sous les 3 % du PIB.

Je ne puis qu’approuver l’objectif de lutter contre la dégradation des comptes publics, mais je ne vous rejoindrai pas sur la solution proposée.

Je rappelle la relative concentration de l’impôt sur le revenu : en 2023, moins de la moitié des foyers ont été imposés. Cette minorité a fourni près de 90 milliards d’euros, effort encore plus significatif pour les trois derniers déciles, qui représentent 93 % du rendement.

Votre solution augmenterait encore l’effort demandé à ces foyers, qui acquittent, je le répète, 93 % du rendement ! L’effet serait d’ailleurs bien plus important que ce que vous en dites sur les classes moyennes. J’ai même fait quelques simulations : un couple de retraités mariés, touchant chacun moins de deux Smic, verrait son imposition augmenter de 150 euros environ ; pour un salarié du privé gagnant trois Smic, la hausse atteindrait 200 euros. Ainsi, des personnes de la classe moyenne seraient concernées.

Nous devons résister, alors que notre taux de prélèvements obligatoires est très élevé. Nous ne cessons de répéter qu’il faut des mesures ciblées, temporaires et exceptionnelles. Je ne crains pas que votre dispositif manque sa cible, puisqu’elle est très concentrée : il s’agit des contributeurs de 93 % du produit de l’impôt sur le revenu. Je redoute, en revanche, qu’il soit durable. Nous devons certes travailler à réduire le déficit, mais soyons réalistes : atteindre un déficit de 5 % en 2025 serait déjà une belle étape.

Pour ces raisons, j’émettrai un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Monsieur le président Raynal, je vous rejoins sur deux points que vous avez évoqués.

Tout d’abord, en 2017, la proposition était bien de supprimer la taxe d’habitation pour 80 % des ménages. La nécessité constitutionnelle de l’élargir à 100 % des redevables a, de fait, posé une problématique de finances publiques.

Ensuite, je suis d’accord avec l’idée de trouver une mesure de justice fiscale pour résoudre ladite problématique.

Cependant, j’ai une meilleure solution : recourir à la contribution différentielle sur les hauts revenus, plus redistributive, parce que mieux ciblée. La CDHR ne se concentre pas sur les trois dernières tranches de l’impôt sur le revenu, puisque sa base imposable est celle de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Son principe est qu’il n’y ait pas d’imposition en deçà de 20 % – nous en reparlerons ultérieurement.

Cela me semble plus juste et mieux ciblé sur les hauts revenus, tout en offrant à peu près le même rendement – 2 milliards d’euros contre un peu moins de 3 milliards pour votre proposition, monsieur Raynal.

Certes, nos finalités ne sont pas si éloignées, mais le Gouvernement a une ligne rouge : ne pas toucher au barème de l’impôt sur le revenu, sinon en l’indexant sur l’inflation, et ne pas augmenter encore les taux d’imposition marginaux, déjà extrêmement élevés, et même parmi les plus hauts au monde compte tenu de la CEHR.

La question, pour nous, n’est donc pas d’agir sur les tranches de l’impôt sur le revenu, mais de trouver des dispositifs de justice fiscale, à l’instar de la CDHR, présente à l’article 3 : avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.

M. Claude Raynal. Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, je ne partage pas vos propos, même si je suis prêt à prendre les deux points que me donne M. le ministre… (Sourires.)

Il y a tout de même un petit souci : la CDHR figure actuellement dans votre projet. J’ai mentionné les 3,6 milliards d’euros de surtaxe sur l’électricité, que vous proposez également : c’est ceux-là qu’il faut remplacer par une mesure nouvelle, donc pas par la CDHR, qui est déjà prévue.

Vous ne me répondez donc pas : d’un côté, les 20 % des ménages les plus aisés ont bénéficié d’une suppression de la taxe d’habitation pour un montant de 9 milliards d’euros ; de l’autre, je propose de récupérer 3 milliards de manière temporaire, tant que le déficit n’est pas revenu sous les 3 % du PIB. Ma mesure est donc complémentaire à ce que vous prévoyez.

Je trouve normal, encore une fois, de mettre à contribution les bénéficiaires d’une mesure inattendue, dont une grande part du produit est épargnée. L’épargne des Français a d’ailleurs considérablement augmenté récemment. Au lieu de cela, vous proposez de mettre tout le monde à contribution avec la prime sur l’électricité ou la non-indexation des retraites.

Enfin, vous avez mentionné, monsieur le rapporteur général, des sommes de 150 euros ou 200 euros ; on reste donc très en deçà du montant de la taxe d’habitation que payaient ces familles-là !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Pas forcément !

M. Claude Raynal. Vous aurez bien du mal à trouver, parmi les 20 % des familles les plus aisées, un foyer qui paierait seulement 150 euros de taxe d’habitation…

Je vous propose une mesure de justice sociale, qui contribuera à résoudre nos difficultés. Je la maintiens et je pense que nous en reparlerons.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Vous avez raison, monsieur le président Raynal, nous risquons d’en reparler.

Mais cela aura eu l’intérêt de poser les conditions du débat. Nous avons fait un choix autre : non pas de créer des recettes nouvelles, mais de réduire des dépenses publiques. Ce n’est certes jamais agréable, surtout lorsque cela arrive soudainement.

En revanche, comme vous, monsieur Raynal, nous ne sommes pas favorables, pour mille et une raisons, à l’augmentation quelque peu subreptice des prélèvements sur l’électricité. Nous y reviendrons. Notre objectif est donc le même : préserver le pouvoir d’achat des Français. L’énergie, et particulièrement l’électricité, est un sujet sensible.

En revanche, nous prévoyons, de notre côté, une compensation par une baisse des dépenses. Nous devons poursuivre en ce sens, parce que nous ne pouvons continuer de vivre avec un niveau de fiscalité à ce point élevé.

Je l’ai dit au sujet de dépenses fiscales s’ajoutant les unes aux autres : nous perdons le sens du financement de notre modèle économique et social. En outre, nous devons faire attention : au-delà des effets de bord, nos concitoyens s’y perdent aussi. Sur ce point, plus tôt dans la journée, certaines réactions, venues plutôt de la gauche de l’hémicycle, en défense de principes qui étaient plutôt les nôtres jusqu’à maintenant, m’ont surpris.

Restons attentifs et gardons, les uns et les autres, une ligne d’action.

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Mme Christine Lavarde. J’ai beaucoup entendu parler de justice fiscale et de taxe d’habitation. Or l’idée qui a présidé à la suppression de cette taxe est tout simplement qu’il s’agissait d’un impôt injuste, car assis sur des valeurs locatives qui n’avaient pas de sens.

Aujourd’hui, un impôt toujours basé sur ces mêmes valeurs demeure : la taxe foncière. Des travaux sur sa révision auraient dû être menés entre 2023 et 2026, mais ils ont été reportés, de PLF en PLF. Je pose donc une question ouverte : qu’en est-il de la révision des valeurs locatives sur lesquelles est assise la taxe foncière ? Puisque nous parlons de justice fiscale, il serait temps de s’intéresser à ce dossier.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.

Mme Isabelle Briquet. Deux points me semblent essentiels dans ce débat.

Le premier est l’effet de la suppression de la taxe d’habitation et la nécessité d’imaginer une nouvelle contribution locale. Cette suppression a laissé un vide béant dans les recettes fiscales de nos collectivités territoriales, qui s’en sont trouvé fragilisées, au même titre que l’équilibre de nos finances publiques.

Que nous propose le Gouvernement pour combler ce déficit ? Une augmentation de la fiscalité sur l’électricité, mesure non ciblée qui pénaliserait l’ensemble des Français sans distinction. Ce n’est pas acceptable, comme nous en discuterons prochainement.

C’est précisément pour cette raison que cet amendement offre une solution plus juste et plus équitable : une surtaxe ciblée sur les foyers les plus aisés, qui disposent des capacités contributives nécessaires. Cela a été rappelé : seuls 80 % des foyers étaient initialement concernés par la suppression voulue en 2017.

Deuxièmement, ce dispositif n’est peut-être pas idéal, mais il n’en est pas moins temps d’ouvrir une réflexion sérieuse sur l’autonomie financière et fiscale des collectivités. La suppression de la taxe d’habitation ne peut rester un éternel regret. Tout le monde demande plus d’autonomie fiscale, mais cela suppose de récolter un impôt supplémentaire. Disons les choses.

Il est donc temps que l’État travaille avec les collectivités et les parlementaires pour imaginer une contribution adaptée aux réalités locales et, surtout, pour restaurer le lien entre le citoyen et les territoires.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I- 1333 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 101 amendements au cours de la journée ; il en reste 1 898 à examiner sur le projet de loi de finances pour 2025.

Après l’article 2 (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2025
Discussion générale

8

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée aujourd’hui, mardi 26 novembre 2024 :

À quatorze heures trente, le soir et la nuit :

Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, (texte n° 129, 2024-2025) ;

Suite du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale (texte n° 143, 2024-2025) :

Suite de l’examen des articles de la première partie.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 26 novembre 2024, à deux heures.)

nomination de membres dune éventuelle commission mixte paritaire

La liste des candidats désignés par la commission des finances pour faire partie de léventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024 a été publiée conformément à larticle 8 quater du règlement.

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai dune heure prévu par larticle 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :

Titulaires : MM. Claude Raynal, Jean-François Husson, Mme Christine Lavarde, MM. Stéphane Sautarel, Vincent Delahaye, Thierry Cozic et Stéphane Fouassin ;

Suppléants : M. Jean-Baptiste Olivier, Mme Marie-Carole Ciuntu, M. Jean-Marie Mizzon, Mme Florence Blatrix Contat, M. Pascal Savoldelli, Mmes Vanina Paoli-Gagin et Ghislaine Senée.

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER