M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, auteur de la question n° 1129, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Cédric Chevalier. Monsieur le président, madame la ministre, j’ai récemment visité l’usine Smurfit Kappa Nord-Est, située à Épernay. Il s’agit de la première entreprise de production d’emballages en carton ondulé, de caisses et de Bag-in-Box en Europe.
Je souhaite vous interroger sur l’obligation, à compter du 3 juillet 2024, de produire des bouchons qui restent attachés à leur bouteille en plastique, en application de l’article 1er du décret n° 2020-1724 du 28 décembre 2020.
Pourriez-vous m’indiquer si cette réglementation s’applique aux bouteilles vendues aux remplisseurs de bouteilles ?
Les bouteilles ou préformes vendues vides aux remplisseurs de bouteilles, donc mises sur le marché national avant le 3 juillet 2024, peuvent-elles bénéficier d’un écoulement des stocks ? En est-il de même des bouchons ?
Pourriez-vous également apporter des précisions quant à la zone territoriale d’application de la réglementation et au cas particulier du transport aérien ou maritime transfrontière à destination ou au départ d’un pays hors de l’Union européenne ?
Ma dernière question concerne plus spécifiquement les Bag-in-Box. Leur fermeture se compose de plusieurs éléments : un goulot et un robinet, qui restent attachés à l’emballage, et une inviolabilité détachable, qui doit être séparée et jetée avant l’utilisation du robinet.
J’aimerais savoir si le robinet est concerné par le périmètre de l’interdiction. Qu’en est-il de l’inviolabilité détachable du robinet, en particulier si elle doit rester attachée à la bouteille, comme les autres bouchons ? De fait, tout le dispositif de fermeture doit-il rester attaché ?
Il peut y avoir également un opercule – en aluminium, par exemple, comme sur les bouteilles de lait –, placé à l’extrémité du robinet. Est-il également concerné ?
Je reconnais que ce sont des questions bien techniques, mais vos réponses, madame la ministre, sont de nature à faire évoluer les process industriels d’ici au mois de juillet 2024. Les industriels que j’ai rencontrés veulent être certains d’être en parfaite conformité avec la loi.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Chevalier, l’obligation en place à partir de juillet 2024 de rendre solidaires les bouchons des bouteilles en plastique est issue de la directive européenne relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement.
Son objectif est de prévenir et de réduire l’impact des produits en plastique fortement générateurs de déchets susceptibles de se retrouver dans l’environnement, comme les bouchons. Cette mesure est connue depuis juin 2019, soit depuis cinq ans.
Le respect de cette exigence conditionne la mise sur le marché européen de toutes les bouteilles et briques d’une capacité maximale de trois litres ; les récipients pour boissons en verre ou en métal ne sont pas concernés.
Pour ce qui est des récipients utilisés dans des moyens de transport transfrontaliers, la mesure s’applique, quel que soit le moyen de transport, dès lors que la destination est un pays de l’Union européenne, peu importe le pays de départ.
En outre, je vous confirme que les bouchons non attachés et les bouteilles et préformes vendues vides aux embouteilleurs avant cette date, donc déjà mises sur le marché national avant le 3 juillet 2024, peuvent bénéficier d’un écoulement des stocks.
Enfin, j’en viens aux boîtes cartonnées composées d’une poche en matière plastique, d’un film métallisé et d’un robinet, également appelé Bag-in-Box. Si le robinet est bien visé par cette disposition, les opercules de scellement situés sur ce type de récipient ne sont en revanche pas concernés. L’inviolabilité détachable en aluminium à laquelle vous faites référence reste donc autorisée.
D’une manière générale, il convient de considérer qu’une membrane d’étanchéité n’entre pas dans la définition de bouchon ou de couvercle au sens de la directive européenne.
report de l’interdiction des polymères non recyclables
M. le président. La parole est à M. Bernard Pillefer, auteur de la question n° 1338, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Bernard Pillefer. Madame la ministre, j’appelle votre attention sur la situation alarmante dans laquelle se trouvent les entreprises productrices de polystyrène.
En effet, la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et Résilience, prévoit l’interdiction, à compter du 1er janvier 2025, des emballages constitués pour tout ou partie de polymères ou de copolymères styréniques non recyclables et dans l’incapacité d’intégrer une filière de recyclage.
Après l’annonce de cette mesure, les entreprises productrices de polystyrène se sont retrouvées en difficulté : en témoigne la fermeture de cinq sites de production du groupe Knauf Industries basés sur le territoire national, conduisant au licenciement de 130 personnes en 2023.
Pourtant, dès 2022, les industriels du secteur ont engagé un projet visant à démontrer la recyclabilité des matériaux. Ces travaux ont notamment permis d’obtenir des résultats concrets, permettant de répondre aux conditions posées par la loi Climat et Résilience et à la nouvelle réglementation européenne PPWR (Proposal Packaging and Packaging Waste Regulation).
Ces efforts risquent malheureusement de rester vains, le délai imposé par la loi se révélant insuffisant. En France, de nombreuses usines de la filière polystyrène pourraient être menacées, alors même que les entreprises concernées ont considérablement investi dans le renforcement de la filière de recyclage du polystyrène.
La transition écologique et durable est nécessaire, mais elle ne doit pas s’accomplir au détriment de la sauvegarde de nos emplois.
Les industriels de la filière ont besoin de vos réponses, madame la ministre. Aussi, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il adopter afin de ne pas condamner ce secteur de l’industrie française ? Un report peut-il être envisagé avant la mise en œuvre de cette interdiction ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Pillefer, l’objectif de cette mesure de la loi Climat et Résilience est tout simplement de réduire l’impact environnemental des emballages en polystyrène et de les inscrire dans une logique d’économie circulaire par l’émergence d’une filière de recyclage française très opérationnelle.
Cette mesure doit aussi permettre à la France d’atteindre les objectifs européens de recyclage et de réduire sa contribution au budget de l’Union européenne, qui représentait plus de 1,5 milliard d’euros en 2023 au titre des emballages en plastique non recyclés.
L’interdiction française a été en partie reprise par la Commission européenne, puisque le futur règlement sur les emballages prévoit que l’ensemble des emballages doit être recyclable en 2030, et même recyclé à l’échelle industrielle d’ici 2035.
Je sais les efforts significatifs déjà engagés par les industriels de la plasturgie pour développer une industrie du recyclage de ces résines plastiques. Néanmoins, nous constatons que ces travaux n’ont pas encore permis d’atteindre la recyclabilité de l’ensemble de ces emballages à l’échéance prévue par la loi.
Dans la mesure où les dispositions similaires du règlement sur les emballages entreront en vigueur en 2030 et que la disposition de la loi Climat et Résilience n’est pas encore entrée en vigueur, il apparaît raisonnable de reporter cette interdiction de 2025 à 2030.
Ce délai supplémentaire limitera tout risque de surtransposition et permettra surtout aux projets visant à développer une industrie du recyclage de ces résines plastiques d’aboutir.
La disposition de la loi Climat et Résilience a été codifiée à l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement. Ainsi, tout report de son entrée en vigueur nécessitera l’adoption d’une nouvelle mesure législative par le Parlement.
M. le président. La parole est à M. Bernard Pillefer, pour la réplique.
M. Bernard Pillefer. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Cette orientation me paraît claire : elle permettra non seulement de mettre en concordance la réglementation européenne et les exigences législatives votées en France, mais aussi d’éviter une surtransposition.
libre accès aux sentiers de randonnée dans les forêts privées du haut-rhin
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, auteur de la question n° 1114, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, madame la ministre, le 2 février 2023, la loi visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée était promulguée.
L’engrillagement est une pratique répondant à la volonté légitime de certains propriétaires d’assurer le respect de leur droit de propriété. Elle nuit toutefois à la faune en empêchant la continuité écologique. En outre, elle complique l’entretien des forêts, de même que la prévention et la lutte contre le risque incendie, et conduit in fine à une forte artificialisation des milieux.
C’est pour ces raisons que nous avons encadré cette pratique, sans toutefois l’interdire. En contrepartie, et dans une volonté de rassurer les propriétaires quant au respect de leur droit de propriété, une contravention de quatrième classe sanctionne désormais les cas de pénétration sans autorisation dans une propriété privée, rurale ou forestière.
Lors des débats autour de ce texte, rien ne semblait indiquer que ces dispositions seraient préjudiciables aux simples promeneurs. Pourtant, depuis son entrée en vigueur, les restrictions d’accès aux espaces boisés se multiplient.
Dans mon département, deux sentiers très prisés, pourtant banalisés et entretenus par le Club vosgien, sont désormais interdits aux randonneurs, les privant d’accès à pas moins de 64 hectares de forêt.
Mme la secrétaire d’État chargée de la ville, qui répondait le 5 mars dernier à mon collègue député Hubert Ott sur ce même sujet, considérait que les associations pouvaient, comme avant, continuer leur action de développement et d’entretien des sentiers.
Il existe pourtant un risque avéré quant à l’intégrité et à la pérennité de ces sentiers ancestraux, qui garantissent aux promeneurs un accès sécurisé à la nature. Alors que la grande majorité de la forêt française est privée, il serait souhaitable – j’insiste – de pouvoir s’assurer de la pérennité et de l’accessibilité de ces sentiers.
Qu’entendez-vous donc mettre en œuvre pour préserver l’accès à ces espaces ?
Plus particulièrement, envisagez-vous d’intégrer parmi les missions du comité de suivi d’application de la loi du 2 février 2023 la surveillance et la prévention des effets du texte sur l’accès à la nature ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Schillinger, je vous remercie de votre question. Elle me permet de saluer le rôle central joué par les associations qui entretiennent les sentiers de randonnée de nos territoires et qui, de ce fait, assurent l’attractivité touristique de ces espaces.
J’ajoute que de nombreux accès aux espaces naturels sont déjà ouverts gratuitement à nos concitoyens, notamment les forêts publiques et les sentiers du littoral. Par ailleurs, la stratégie nationale biodiversité (SNB) a pour objectif d’ouvrir au public 100 % des parcs nationaux et des réserves naturelles d’ici à 2030.
La loi du 2 février 2023 prévoit que, « dans le cas où le caractère privé du lieu est matérialisé physiquement, pénétrer sans autorisation dans la propriété privée rurale ou forestière d’autrui, sauf les cas où la loi le permet, constitue une contravention de la 4e classe ».
Cette disposition n’entraîne néanmoins pas la fermeture des sentiers existants. Les associations peuvent poursuivre leurs actions, sous réserve de s’assurer préalablement que les propriétaires ont donné leur accord pour qu’un sentier traverse leur propriété.
Le principe présidant à la création des itinéraires de randonnée est celui de la concertation, mais aussi celui de la contractualisation. La loi a prévu, dans chaque département, une commission départementale des espaces, des sites et itinéraires (CDESI), mise en place par le conseil départemental, et la réalisation d’un schéma qui permet notamment une contractualisation avec les propriétaires.
L’enquête menée en 2020 par le Pôle ressources national sports de nature (PRNSN) a montré que tous les départements ne s’étaient pas saisis de ces outils.
Pour répondre aux difficultés que vous soulevez, il nous semble absolument indispensable que ces démarches de concertation et de contractualisation puissent aboutir partout, sur l’initiative des comités départementaux.
projet de navettes fluviales franciliennes de transport de passagers
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, auteur de la question n° 1264, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Akli Mellouli. Madame la ministre, j’appelle votre attention sur un projet d’installation de navettes fluviales pour le transport de passagers en Île-de-France.
Un appel à projets organisé par Voies navigables de France (VNF) et l’Agence de l’innovation pour les transports (AIT), visant à créer un démonstrateur de bateaux décarbonés, avec des essais sur une ligne spécifique en Essonne, a été remporté par la coopérative RiverCat.
Cependant, il est nécessaire d’aller plus loin en concrétisant le projet de navettes fluviales reliant notamment Alfortville et Issy-les-Moulineaux, en passant par les escales parisiennes.
Les critères environnementaux sont évidemment respectés puisque la flotte sera propulsée au biocarburant, et en partie au 100 % électrique, d’autant qu’a été pris l’engagement de la décarboner à 100 % à l’horizon de 2030.
Île-de-France Mobilités (IDFM) a validé officiellement le projet, conformément au code des transports, et a donné carte blanche à la société.
Le modèle économique prévoit un financement de l’exploitation intégralement supporté par les futurs utilisateurs et divers financeurs privés. Toutes les conditions sont donc réunies pour lancer ce projet innovant et parfaitement adapté aux enjeux de mobilité durable.
Malheureusement, l’établissement public Haropa, chargé de la gestion des escales dans Paris, y fait obstacle. Depuis janvier 2022, une demande de mise en concurrence pour l’occupation du domaine public a été déposée, mais elle est refusée par Haropa Port.
Avant le remaniement ministériel de janvier 2024, un courrier signé par une trentaine d’élus franciliens de toutes nuances politiques a été adressé au ministère des transports. Dans sa réponse, celui-ci avait confirmé l’appui de l’État au projet, mais cela est malheureusement resté sans suite.
Face à cette situation, les élus avaient préconisé qu’une réunion de travail avec Haropa Port et la coopérative RiverCat soit tenue dans les plus brefs délais. Malheureusement, le directeur d’Haropa a refusé d’y participer.
Je vous demande donc, madame la ministre, si vous entendez répondre favorablement à la demande d’organiser rapidement cette réunion tripartite, qui pourrait se tenir sous votre égide.
L’objectif est de valoriser l’intérêt général via le développement d’un nouveau mode de transport fluvial de passagers décarboné dans la région, soutenu par les élus et attendu par nos populations.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Mellouli, le Gouvernement partage avec vous l’ambition de développer dans nos territoires de nouvelles offres de transport décarbonées innovantes.
Dans ce contexte, et avec l’accueil des jeux Olympiques et Paralympiques, l’entreprise RiverCat a été lauréate de l’appel à projets « démonstrateurs de bateaux autonomes » pour les Jeux de Paris 2024, organisé par le ministère des transports.
Il s’agit de déployer des services de transport de passagers autonomes et décarbonés avec la création d’escales fluviales en barges autonomes entre Juvisy et Ris-Orangis, sur le domaine confié à VNF.
À ce titre, l’entreprise bénéficie depuis 2023 d’un appui de l’État – avec le soutien de VNF, de l’AIT et des services chargés de la navigation intérieure –, afin que le projet puisse être conduit à son terme cet été.
Le projet sur lequel vous évoquez une divergence de vues entre RiverCat et Haropa relève d’une autre logique : il porte sur l’exploitation de services sur le bief de Suresnes avec des bateaux conventionnels et carbonés.
Les analyses menées ont conclu que ce service devait être qualifié de service touristique. Dès lors, la mise à disposition des quais et escales par Haropa ne pouvait être envisagée qu’à l’issue d’un processus de mise en concurrence via un appel à manifestation d’intérêt.
Nous entendons votre demande de dialogue. En ce sens, nous nous engageons à ce que les services de la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) invitent Haropa et le porteur de projets à partager l’analyse.
En tout état de cause, je vous confirme l’engagement du Gouvernement à soutenir toutes les initiatives en vue de développer un transport fluvial décarboné, dans le respect de la règle de droit.
nuisances des nouvelles trajectoires aériennes de l’aéroport de beauvais-tillé
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1309, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Olivier Paccaud. Beauvais-Tillé – ou « Paris-Beauvais », selon Ryanair – est le premier aéroport des Hauts-de-France, avec plus de 5 millions de passagers et 32 000 mouvements enregistrés en 2023.
Si cet aéroport est aujourd’hui pour l’Oise un atout, créateur d’emplois et de richesses – je tiens à saluer tous les employés de l’aéroport, qui travaillent souvent dans des conditions difficiles –, il ne faut surtout pas qu’il devienne un handicap, à l’heure où se joue son avenir, puisque le syndicat qui gère l’aéroport a décidé de le donner en concession à un nouvel exploitant qui veut passer de 30 000 à 45 000, puis 53 000 mouvements annuels.
Or, depuis plusieurs mois, les trajectoires d’approche de la plateforme sont de moins en moins respectées. À peu près 20 % des vols ne les respectent pas, selon le syndicat, et bien plus selon les riverains. Le nombre de communes subissant un impact négatif à cause de l’activité aéroportuaire est passé de dix à environ trente : dégazages, pollution sonore, dévalorisation de l’immobilier. La direction générale de l’aviation civile (DGAC) a été saisie, sans aucune suite.
En outre, les conditions de passation de la nouvelle délégation de service public posent problème. Il n’y a eu ni débat public ni étude d’impact. Alors qu’aujourd’hui, quand est découvert sur un chantier un os mérovingien, une orchidée sauvage, une chauve-souris ou une grenouille, tous les travaux sont arrêtés, dans le cas qui nous intéresse, plus de 100 000 personnes sont concernées et il n’y a pas d’étude d’impact. Alors, madame la ministre, j’ai deux questions à vous poser : à quoi sert la DGAC ? L’espèce humaine n’aurait-elle pas droit, elle aussi, à une protection ? (Mme Valérie Boyer applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Paccaud, la question des trajectoires de vol des avions à l’arrivée ou au départ de l’aéroport Beauvais-Tillé fait l’objet d’échanges réguliers entre les services de l’État et les élus de la communauté d’agglomération du Beauvaisis.
À la suite du remplacement des procédures de départ dites conventionnelles, utilisant des moyens de radionavigation au sol, par des procédures de départ fondées sur un guidage satellitaire, des changements mineurs des faisceaux de trajectoires se sont en effet produits en 2020.
Un groupe de travail « Trajectoires », émanation de la Commission consultative de l’environnement (CCE), a alors été réactivé en 2022 sur l’initiative de l’État et s’est réuni à trois reprises, dont, récemment, le 14 mars 2024.
Les trajectoires de navigation aérienne sont définies en premier lieu pour garantir la sécurité des vols. Elles sont également optimisées afin de réduire les survols de populations et les nuisances sonores associées.
Le travail avec les acteurs du territoire se poursuit au sein de ce groupe de travail et les services de la direction générale de l’aviation civile continuent d’étudier les possibilités d’optimisation du dispositif en vue de réduire les nuisances.
Les élus et les habitants du territoire seront appelés à se prononcer sur les modifications proposées. L’État est, par ailleurs, attaché à maintenir une totale transparence sur la question des trajectoires, ce qui se concrétisera par la mise en service au cours de l’année de l’outil « MonCiel », lequel permettra aux riverains d’accéder aux données de trafic, dont les faisceaux de trajectoires suivies.
Pour plus de précisions, je vous invite à saisir MM. les ministres Béchu et Vergriete, dont je vous demande par la même occasion de bien vouloir excuser l’absence ce matin. (M. Olivier Paccaud brandit deux enveloppes.)
Je transmettrai les courriers, monsieur le sénateur.
réponse du gouvernement face à la situation de l’aéroport de beauvais
M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, auteur de la question n° 1319, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Alexandre Ouizille. Madame la ministre, permettez-moi d’abord de saluer Olivier Paccaud, puisque nos questions portent sur le même sujet, celui de l’aéroport Beauvais-Tillé. Notre collègue a rejoint voilà quelques semaines le combat qui est mené localement depuis des mois sur la question de l’extension de l’aéroport, et je reconnais qu’il le fait courageusement, les choses n’étant pas simples au sein de la majorité du conseil départemental, qui soutient ce projet.
Ma question est assez simple. Une augmentation considérable du trafic sur cet aéroport est programmée : aujourd’hui de 5,5 millions de passagers par an, il devrait, selon le nouveau contrat de délégation conclu avec le consortium Bouygues-Egis, passer à plus de 8 millions de passagers en 2035, pour atteindre entre 9 millions et 10 millions de passagers en 2050.
Il se prépare donc une augmentation massive.
Pourtant, la chambre régionale des comptes, dès juin 2023, avait sonné l’alerte, considérant que ce projet était mal pensé et mal calibré.
Madame la ministre, j’attire votre attention sur les risques localement associés à ce projet, qui n’ont pas du tout été pris en compte. Je les liste pour que nous les ayons bien en tête.
Il y a tout d’abord un risque sanitaire, lié à la fois à la pollution de l’air par les particules ultrafines et à la pollution sonore liée, dont l’augmentation prévisible n’a fait l’objet d’aucune évaluation sérieuse.
Il y a ensuite un risque environnemental. Le Gouvernement est garant de la trajectoire de la France au regard de l’accord de Paris. Or les émissions de CO2 vont mécaniquement exploser avec cette hausse importante du trafic.
Il y a encore un risque foncier, économique, puisque la valeur des propriétés des habitants autour de l’aéroport et dans le Beauvaisis va baisser.
Il y a enfin un risque pour le cadre de vie, les trajectoires n’étant plus respectées, comme l’a souligné le sénateur Paccaud. J’ai discuté récemment avec la maire de Laversines, qui pourrait vous montrer les difficultés qu’elle recense, cartes à l’appui. Elle est en effet toute la journée penchée sur celles-ci pour vérifier la manière dont les choses se passent.
Madame la ministre, face à ce problème, nous avons besoin de la parole de l’État. Or le dialogue est aujourd’hui interrompu. Il faut donc qu’un tiers de confiance vienne le rétablir. Le sujet commence à avoir un écho national et une grande manifestation doit avoir lieu le 15 juin à Beauvais. J’y insiste, nous avons besoin de savoir quelle est la position de l’État dans ce dossier. Il est essentiel que M. le ministre des transports reçoive les élus du Beauvaisis.
M. le président. Il faut conclure !
M. Alexandre Ouizille. Dix-neuf d’entre eux ont d’ailleurs déposé une motion.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Ouizille, l’aéroport de Beauvais-Tillé est la propriété du syndicat mixte de l’aéroport de Beauvais-Tillé (SMABT), réunissant la région Hauts-de-France, le département de l’Oise et la communauté d’agglomération du Beauvaisis.
Le SMABT a fait le choix en 2008 de confier l’exploitation de l’aéroport à un concessionnaire, dont la délégation arrive à échéance, et a choisi un consortium emmené par Bouygues et Egis pour le nouveau contrat.
L’État n’est pas partie à cette procédure et n’a pas défini les ambitions de développement de l’aéroport, retenues conjointement par le SMABT et le nouveau concessionnaire.
Néanmoins, l’État est pleinement investi pour s’assurer que les nuisances sonores résultant de l’activité aérienne soient limitées. Je rappelle qu’à ce titre les décollages et les atterrissages sur l’aéroport sont d’ores et déjà interdits entre minuit et cinq heures du matin et qu’un travail pour optimiser les trajectoires de navigation aérienne et réduire les nuisances, réalisé en concertation avec l’ensemble des parties prenantes, se déroule depuis 2022 au sein d’un groupe de travail dédié.
Comme il s’agit d’un aéroport décentralisé, l’État n’a pas vocation à se substituer aux collectivités territoriales pour définir ce que serait un « bon développement » de cette infrastructure.
Cependant, la croissance du trafic sur l’aéroport de Beauvais, avec une hausse de 45 % en 2023 par rapport à 2019, est inédite et repose sur un fort développement des compagnies low cost.
Il s’agira de confirmer ces prochaines années, dans le cadre de la nouvelle concession, si cette croissance du trafic s’inscrit dans la durée et d’évaluer les conséquences qu’elle pourrait avoir sur les populations riveraines avant, éventuellement, de décider d’une évolution des restrictions d’utilisation de l’aéroport.
Comme je l’ai déjà dit à M. Paccaud, Christophe Béchu et Patrice Vergriete, respectivement ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et ministre délégué chargé des transports, continueront à suivre avec une grande attention ce dossier.
réouverture de la ligne sncf la ferté-milon-fismes au trafic voyageurs