Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Bernard Buis et Mme Olivia Richard applaudissent également.)
M. Michel Masset. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous voilà arrivés au terme du parcours législatif de ce texte important et attendu, et ce dans un temps très satisfaisant.
Cette proposition de loi relative au régime de la responsabilité civile pour les dommages causés par les troubles de voisinage répond à des problématiques bien connues dans nos territoires. Le tableau est le suivant : d’un côté, des entreprises, des associations culturelles ou sociales, qui font vivre nos territoires ; de l’autre, des habitants, qui cherchent à préserver leur cadre de vie.
J’avais déjà évoqué, à cette tribune, le phénomène d’expansion des zones d’habitat, qui conduit au rapprochement géographique des zones d’activité économique et des habitations.
Ce rapprochement entraîne inévitablement des frictions entre deux catégories d’occupants et une augmentation de la pression contentieuse sur les acteurs économiques.
Des artisans ou des industriels sont obligés de renoncer à des projets, pourtant vertueux pour l’économie française. Ils sont même parfois contraints de partir.
Plutôt que de laisser les acteurs s’opposer frontalement devant les juges, cette proposition de loi vise au contraire à clarifier les règles, pour éviter que les contentieux ne s’accumulent.
En effet, ce texte consacre dans la loi la solution qu’avait trouvée le juge judiciaire en instituant un régime autonome de responsabilité civile extracontractuelle pour les préjudices du fait de troubles du voisinage.
Je ne reviendrai pas sur l’importance des règles qui nous permettent de faire société et de bien vivre ensemble. Les débats que nous avions tenus dans cet hémicycle ont éclairé le texte que nous nous apprêtons à adopter.
De la navette parlementaire sort un texte d’équilibre, qui répond à un double objectif : d’une part, un objectif de justice, qui passe par une conciliation entre les intérêts en présence, la liberté d’entreprendre et celle de jouir de ses biens ; d’autre part, un objectif de lisibilité du droit et, partant, de sécurité juridique, que ce soit pour les habitants ou pour les acteurs à l’origine des nuisances. C’est une avancée vers une meilleure prévisibilité de l’application du droit.
Le groupe du RDSE se réjouit du consensus qui a été trouvé avec les députés. Dans l’ensemble, ce texte nous semble atteindre son but.
J’aimerais m’attarder sur le retour à la formulation générale pour les activités bénéficiant d’une cause exonératoire. Il nous apparaît positif de retenir une acception plus large que les seules activités économiques. Comme l’a souligné Mme la rapporteure, cette rédaction permettra d’inclure notamment les activités associatives et culturelles, qui ne sont pas moins essentielles à la vie de nos collectivités.
Je voudrais également saluer la solution équilibrée trouvée en CMP sur les troubles provenant des activités agricoles.
Ce régime dérogatoire vient protéger les agriculteurs à deux titres, en sus de ce que prévoit le régime commun. D’abord, il prévoit une appréciation in concreto par le juge du caractère substantiel d’une modification de nature ou d’intensité de l’activité. Ensuite, et c’est le point principal, il protège les exploitants dans les cas où les nuisances seraient liées à une modification de l’activité ne visant qu’à se conformer aux lois et règlements. C’est une exigence : le poids de l’intérêt général exprimé dans les normes ne peut peser seulement sur quelques-uns, surtout quand les conséquences préjudicielles peuvent être très lourdes.
Si je m’inscris totalement dans la volonté de protéger nos agriculteurs, qui représentent une part importante de l’économie de nos campagnes, je voudrais tout de même réitérer mes regrets quant à la restriction de la dérogation au seul secteur agricole.
En effet, sur de nombreux territoires cohabitent d’autres activités économiques, comme l’industrie, par exemple, qui est très importante pour notre économie et notre souveraineté. Or certaines normes environnementales sont également de nature à entraîner un changement dans les nuisances produites par lesdites activités.
Malgré cette dernière nuance d’appréciation, le groupe RDSE votera ce texte juste et opportun. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI et INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Bitz, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE.)
M. Olivier Bitz. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il convient tout d’abord de souligner l’intérêt des travaux conduits au sein des deux assemblées parlementaires et de la commission mixte paritaire. Je tiens d’emblée à remercier notre rapporteure, Françoise Gatel, pour la qualité de son travail et la synthèse à laquelle elle a su parvenir avec nos collègues députés.
Au cours de l’examen de cette proposition de loi, qui s’est déroulé dans un esprit d’écoute et de responsabilité, nous avons cherché à offrir une visibilité et une sécurité juridique accrues à nos concitoyens, particulièrement nos agriculteurs.
De l’entame de nos travaux jusqu’à la conclusion de la commission mixte paritaire, le 26 mars dernier, je retiens la qualité des échanges et l’évolution de ce texte vers une plus grande clarté et une meilleure protection des exploitations agricoles.
La ruralité ne désigne pas seulement un espace de repos, de loisir, de détente. C’est également un espace de production, de consommation et de développement.
Nos concitoyens attendent de nous des perspectives et des garanties pour que ces territoires puissent continuer à produire et à se développer. Les habitants des villes, qui sont de plus en plus nombreux à faire le choix de s’établir durablement ou épisodiquement, lors des fins de semaine, dans ces territoires ruraux, aspirent de leur côté au calme et à la tranquillité.
Ces attentes sont compréhensibles. Elles ne doivent toutefois pas porter préjudice aux projets et aux activités menés dans ces mêmes territoires.
Le dialogue peut certes résoudre des incompréhensions et des crispations. Les agriculteurs et les industriels ont d’ailleurs bien souvent entrepris des efforts réels pour améliorer leurs relations avec leurs voisins.
Néanmoins, les contentieux liés aux troubles de voisinage ont connu un essor préoccupant. C’est pourquoi il est nécessaire d’assurer une application homogène du droit civil sur tout le territoire national, sur la base de la jurisprudence récente, afin d’aboutir à de nouveaux points d’équilibre.
Les amendements relatifs à la cause exonératoire de responsabilité spécifique aux activités agricoles, qui ont été introduits dans le texte, vont dans le bon sens. Cette disposition permettra de tenir compte des conditions de mise en conformité d’une exploitation ou d’une installation imposée par la puissance publique. Elle est aussi de nature à encourager les exploitants et les repreneurs, la transmission des exploitations étant un enjeu majeur dans la grande majorité des territoires.
Le texte a été enrichi par plusieurs amendements, dont certains émanaient du groupe RDPI. J’y insiste, permettre l’évolution et le développement d’une exploitation existante est fondamental, même en l’absence d’obligation imposée par la puissance publique.
Notre groupe tient à réaffirmer que le maintien des sources de vitalité et de dynamisme dans nos territoires ruraux est non pas une option, mais une orientation ardente, légitime et bénéfique.
Ce développement doit naturellement se concilier avec la vie de l’ensemble des habitants. La protection du voisinage, si elle constitue une exigence partagée, ne peut éclipser ou reléguer, sous n’importe quel prétexte, la liberté d’entreprendre, qu’elle soit agricole, industrielle ou associative.
Le groupe RDPI, satisfait du travail mené et des inflexions rédactionnelles apportées, votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Audrey Linkenheld. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous voilà au terme de l’examen de la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels.
Derrière ces mots se cachent les troubles de voisinage dans une société contemporaine, qui prône le respect de l’autre et le vivre ensemble, mais qui bute au quotidien sur le délicat accommodement des hommes entre eux, sur la cohabitation parfois douloureuse de l’homme et de son environnement ou encore sur la difficile conciliation de l’activité humaine avec les activités économiques, agricoles, culturelles.
Cette proposition de loi se donne donc pour objectif ambitieux de contribuer à l’apaisement de cette cohabitation.
Malgré les efforts déployés, tant ici, au Sénat, qu’à l’Assemblée nationale ou en commission mixte paritaire, force est de constater que le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain reste encore et toujours circonspect quant à l’utilité de ce texte.
Nous l’avons dit : voilà près de quarante ans, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ». Il s’agit là d’un régime de responsabilité objective, qui ne dépend pas de la démonstration d’un comportement fautif, mais qui requiert la démonstration d’un trouble permanent et continu, excédant la gêne normalement attendue dans le cadre des relations de voisinage. Celui-ci peut être sonore, olfactif, esthétique, visuel, diurne, nocturne et s’exprimer en ville comme à la campagne.
Il faut bien reconnaître qu’en quarante ans ce type de trouble n’a pas disparu. Pis, il s’en invente régulièrement de nouveaux : les poules, les tracteurs, la musique et même les enfants…
Ce sont donc ces situations anciennes et nouvelles que la proposition de loi cherche à couvrir en ajoutant un nouveau chapitre au code civil intitulé : Les troubles anormaux du voisinage.
À la suite des échanges en commission mixte paritaire, un nouvel article 1253 viendra consacrer, en cas d’adoption des présentes conclusions, d’abord le principe de responsabilité fondée sur ces troubles anormaux du voisinage, puis les exceptions, liées notamment à l’antériorité du trouble constaté, et la spécificité des activités agricoles au travers d’un nouvel article du code rural et de la pêche maritime.
Avec une telle articulation, les deux chambres pensent enfin avoir trouvé le bon schéma de cohabitation entre l’homme aspirant à sa quiétude et le développement d’activités utiles à notre société.
Bien évidemment, nos agriculteurs ont besoin de poursuivre leurs activités sereinement, à la condition de respecter les codes de l’urbanisme, de l’environnement et de la santé publique, comme une grande majorité d’entre eux le font déjà.
Bien évidemment, les habitants aspirant à une vie à la campagne doivent entendre qu’il s’agit d’une vie de tous les jours et non pas de vacances. Et comme toute vie de tous les jours, celle-ci peut être bruyante, odorante, parfois dérangeante.
De même, les habitants préférant la vie en ville, parce qu’elle offre une foultitude de services et d’équipements, doivent entendre que ces aménités vont avec quelques effets secondaires comme les éclats de voix et de rire entendus depuis les trottoirs, les terrasses et les cours de récréation, ou encore le bruit des ballons qui rebondissent.
Les élus que nous sommes savent que les Français, même s’ils restent très attachés à la défense des libertés collectives, sont aussi de plus en plus exigeants quant à leur liberté individuelle, à leur bien-être ou à leur confort personnel.
Cependant, aussi louable soit l’intention des auteurs de cette proposition de loi, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain n’est pas convaincu qu’elle arrivera véritablement à transformer certains voisinages disputés en paradis sur terre.
Même si nous ne nions pas les efforts entrepris par les deux rapporteures pour surmonter leurs différences d’appréciation et pour chercher le nécessaire équilibre entre la liberté d’entreprendre et la protection de la jouissance d’un bien, entre la liberté d’installation et le droit au recours ou à réparation, je ne vous cache pas que nous ne sommes pas pleinement satisfaits du résultat de cette CMP conclusive.
En effet, si la réécriture législative enrichit le code civil, il n’en reste pas moins qu’elle affaiblit le code de la construction et de l’habitation, et ce même si elle en garde l’esprit en englobant finalement toutes les activités, quelle que soit leur nature.
Nombreux sont les associations et les collectifs citoyens, urbains comme ruraux, qui continuent de s’interroger sur l’utilité de modifier ainsi nos codes.
Derrière tout cela, on sent bien que ce qui compte au fond est moins un travail d’écriture in abstracto qu’un travail de dentelle in concreto. Et la finesse de la dentelle se saisit mieux, selon nous, dans les décisions sur mesure que nos juges continueront de rendre plutôt que dans la capacité du code civil ou du code rural à dissuader froidement les requérants potentiels.
Aussi, le doute subsistant, le groupe socialiste s’abstiendra sur ce texte. Pour améliorer notre vivre ensemble, la réponse la plus efficace du Gouvernement face à l’inquiétude du monde agricole et aux enjeux majeurs du logement et de la transition écologique serait plutôt de sécuriser les revenus et les investissements nécessaires. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadine Bellurot, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
Mme Nadine Bellurot. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous nous retrouvons pour adopter – du moins je l’espère – l’article unique constituant la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Les troubles du voisinage constituent un problème récurrent. Nous sommes arrivés à un texte équilibré entre liberté d’entreprendre et protection de la jouissance d’un bien. Je souhaite saluer le travail de la rapporteure – chère Françoise Gatel –, qui a œuvré en ce sens. La rédaction finale répond à cette double exigence tout en reprenant les trois critères déjà établis, à savoir l’existence d’un dommage, l’anormalité du trouble et la relation de voisinage entre le défendeur et le demandeur.
Bien que le droit en vigueur permette assez largement de répondre aux contentieux, la création d’un régime dérogatoire se justifie au regard de la nécessité de protéger nos territoires ruraux et urbains face aux troubles anormaux de voisinage. Cette codification était attendue par de nombreux acteurs, en particulier les exploitants agricoles, essentiels au dynamisme économique et social de nos campagnes. Elle pourrait être jugée superfétatoire, mais c’est un signal opportun qui a son importance.
Dans la rédaction finale, le terme générique « activités » permet de viser l’ensemble de ces dernières, qu’elles soient économiques, sociales, culturelles ou associatives.
En commission mixte paritaire, les dispositions du Sénat relatives à la notion d’installation ont été conservées, même si une précision a été apportée afin d’en sécuriser la définition.
En ce qui concerne le régime spécifique prévu pour les activités agricoles, l’objectif était de parvenir au meilleur équilibre possible entre, d’une part, la liberté d’entreprendre des agriculteurs et, d’autre part, le droit au recours et à la réparation d’un préjudice pour les voisins. La dérogation entérinée en commission mixte paritaire semble avoir atteint cet objectif.
Je pense en cet instant à un conflit que j’ai eu à gérer en tant que maire de la commune viticole de Reuilly. De nouveaux arrivants étaient fort gênés par les éoliennes antigel, qui étaient pourtant là, de même que les vignerons, bien avant que ces résidents ne s’installent…
Concernant le critère de la poursuite de l’activité, dès lors qu’une exploitation agricole modifierait les conditions d’exercice de son activité pour se mettre en conformité aux lois et règlements, le trouble anormal qui en résulterait ne pourrait engager la responsabilité de l’exploitant. Cette disposition protégera nos agriculteurs face aux excès de normes, que nous regrettons tous – je pense au fameux exemple des poules pondeuses, évoqué par Mme la rapporteure.
Je salue également l’apport de notre collègue Laurent Duplomb, qui permet une exonération de responsabilité en cas de modification non substantielle de la nature ou de l’intensité de l’activité – que le juge appréciera in concreto.
Au travers de ce texte, nous apportons une attention particulière au monde agricole, qui en a bien besoin. Cette précision juridique permettra de lutter contre le sentiment d’abandon, souvent évoqué pas nos agriculteurs, face aux néoruraux qui connaissent parfois mal les pratiques et le mode de vie du monde rural.
Le groupe Les Républicains soutient donc cette initiative et votera en faveur du texte issu des travaux de la commission mixte paritaire.
Mme la présidente. La parole est à M. Louis Vogel, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (M. Ludovic Haye applaudit.)
M. Louis Vogel. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il revient parfois au législateur de devoir préciser des évidences.
C’est le cas aujourd’hui avec cette proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels.
Son article unique insère dans le code civil à la fois une création d’origine jurisprudentielle, à savoir la responsabilité sans faute en cas de trouble anormal de voisinage, et son exception, la théorie de la pré-occupation.
L’objectif est clair : limiter le nombre de contentieux de voisinage déclenchés par les personnes qui s’installent en milieu rural sans en accepter les particularités. Je veux le répéter ici, après tous ceux qui m’ont précédé : la ruralité est une identité, une culture qui se partage, à condition qu’on la respecte.
Depuis quelques années, nombre d’élus locaux et d’exploitants agricoles font face à une hausse des incidents relevant d’un décalage entre une vision fantasmée – et donc forcément déformée – de la vie rurale, développée par ceux que l’on appelle les néoruraux, et le réel.
Importunés par de prétendus désagréments sonores, visuels ou olfactifs, ils multiplient les plaintes en mairie ou auprès de la gendarmerie.
Avant de développer mon propos, je me félicite de ce que la commission mixte paritaire ait été conclusive. L’esprit consensuel qui y a régné est la preuve de la ferme volonté de la représentation nationale de consacrer une jurisprudence bien établie, afin que le principe de responsabilité fondée sur les troubles anormaux de voisinage, à la campagne comme à la ville, puisse être appliqué sur l’ensemble du territoire de manière uniforme.
À cet égard, je suis particulièrement heureux de souligner que les travaux du Sénat ont contribué à améliorer ce texte.
Je veux parler de l’insertion dans le code rural d’une exonération particulière pour les activités agricoles. Ainsi, la responsabilité sans faute d’un exploitant agricole ne pourra pas être engagée si ses activités se sont poursuivies dans les mêmes conditions ou si elles n’ont fait l’objet d’aucune modification substantielle. C’est fondamental, la jurisprudence n’étant pas univoque à ce sujet.
Je veux remercier notre rapporteure, Françoise Gatel, pour son implication et la qualité des travaux qu’elle a menés, en bonne intelligence avec l’ensemble des parlementaires et le Gouvernement, pour aboutir à ce texte consensuel et équilibré.
Il faut protéger nos agriculteurs contre les actions abusives et aider les maires à désamorcer les conflits de voisinage au sein de leurs communes : la proposition de loi les aidera à atteindre cet objectif.
Quels sont ces avantages ? Elle permettra de contribuer à la pacification des relations de voisinage, à la ville comme à la campagne. Elle participera aussi au désengorgement des tribunaux – il n’y a pas de place pour des conflits de cette nature devant notre justice.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. C’est vrai !
M. Louis Vogel. Enfin, elle renforcera la sécurité juridique dans nos territoires.
Monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera cette proposition de loi, qui constitue un travail de codification indispensable. (M. Ludovic Haye applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Olivia Richard, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Olivia Richard. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, alors qu’hier, sur un tout autre texte, face à l’impossibilité de trouver un accord entre les deux chambres, le groupe Union Centriste votait une motion tendant à opposer la question préalable, je me félicite que nous adoptions aujourd’hui les conclusions de cette commission mixte paritaire. Je remercie Mme la rapporteure d’avoir permis cette issue heureuse.
Cette proposition de loi vise à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels. Elle a ainsi pour objet d’améliorer la lisibilité du droit applicable et de limiter les conflits de voisinage. Il est question non pas de révolutionner le code civil, mais de le rendre plus lisible pour nos concitoyens. À l’issue de la CMP, il me semble que ce texte a atteint ces objectifs.
Tout d’abord, il s’agit d’introduire dans le code civil le principe jurisprudentiel de responsabilité fondée sur les troubles anormaux du voisinage afin d’en garantir une application homogène sur l’ensemble du territoire national.
Le texte prévoit également une exception tirée de la théorie de la pré-occupation. Ainsi, une activité licite, antérieure à l’installation d’un nouveau voisin et continue ne saurait être contestée par ce dernier. Cette disposition répond aux préoccupations du monde rural en ce qu’elle permet de limiter les litiges avec les néoruraux.
Je tiens à saluer les apports du Sénat et l’engagement sans faille de la rapporteure – chère Françoise Gatel. L’examen de cette proposition de loi par la chambre haute a permis d’expliciter et de renforcer la protection des activités agricoles. À cet égard, vous avez obtenu une dérogation circonstanciée dans la cause exonératoire en faveur des activités agricoles.
En commission mixte paritaire toujours, le Sénat a également permis de mieux préciser les critères d’installation.
Un débat tout à fait légitime avait eu lieu dans cet hémicycle pour que les crèches et les écoles ne soient pas menacées de contentieux pour trouble anormal de voisinage. Les enfants pourront continuer de crier, puisque ce texte étend dans sa rédaction actuelle la dérogation à l’ensemble des activités, de quelque nature qu’elles soient. Par ailleurs, le caractère substantiel de modification d’activité restera opportunément soumis à l’appréciation souveraine du juge.
Soyez rassurés, mes chers collègues, le recours au juge reste protégé par la Constitution. Les comportements que vous décriviez me semblent relever davantage du code de l’environnement, voire du code pénal.
Je tiens enfin à saluer la prise en compte des préoccupations légitimes exprimées dans les deux hémicycles. La commission mixte paritaire a permis de trouver un juste équilibre entre intérêt général, liberté individuelle et liberté d’entreprendre. Le texte offre une meilleure lisibilité aux justiciables, et ainsi une plus grande sérénité dans les rapports de bon voisinage, dont on sait à quel point ils sont primordiaux. En adoptant ce texte, nous ajouterons donc une modeste pierre à l’édifice d’un meilleur vivre ensemble.
Le groupe Union Centriste votera les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. André Guiol et Ludovic Haye applaudissent également.)
Mme la présidente. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je vais mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(La proposition de loi est adoptée.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-trois, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.)
Mme la présidente. La séance est reprise.