Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Madame la sénatrice Romagny, en ce qui concerne le calendrier, je rappelle que la réforme a été reportée à deux reprises depuis 2020 et qu’elle a été adoptée à l’unanimité par le Sénat, après un an de concertation avec les parlementaires, les associations d’élus et les acteurs économiques et associatifs.
Par ailleurs, je vous confirme que le Gouvernement porte une attention toute particulière aux communes sortantes.
D’une part, il n’y aura pas de sortie sèche : les entreprises et professions médicales profitant actuellement des exonérations continueront à en bénéficier jusqu’à la date initialement prévue, jusqu’à extinction de leurs droits.
D’autre part, je vous confirme que ces communes font d’ores et déjà l’objet d’un accompagnement spécifique. Ainsi, comme les parlementaires et élus locaux qui m’ont saisi le savent, toutes les mesures du plan France Ruralités seront activées en fonction des besoins de chaque territoire.
Le zonage FRR constitue en effet un seul des quatre axes de France Ruralités. Ainsi, les chefs de projet Villages d’avenir, en plus de Petites Villes de demain, et les volontaires territoriaux en administration (VTA) sont à disposition des territoires.
Les crédits d’ingénierie, considérablement augmentés dans la loi de finances pour 2024, seront également mobilisés en priorité sur ces territoires. D’autres zonages, à l’instar des aides à finalité régionale, permettent également de venir aider les entreprises des territoires. En ce qui concerne les enjeux de désertification médicale, je suis enfin en lien étroit avec la ministre chargée de la santé et des solidarités pour mobiliser au mieux les dispositifs de droit commun.
Par ailleurs, si nous sommes vigilants sur les communes touchées par un effet de seuil, maintenir de façon artificielle dans le dispositif les 2 400 communes sortantes, comme cela a été fait en 2015, ne ferait malheureusement que fragiliser les 4 000 communes qui, elles, intègrent le zonage.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour la réplique.
Mme Anne-Sophie Romagny. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
Soutenir les communes exclues des ZRR et les accompagner le temps de redresser la situation de manière non précipitée me semble important.
Ne laissons pas mourir des projets qui étaient sur le point d’aboutir. Ne fragilisons pas l’installation des professionnels de santé. N’oublions pas nos maisons France Services et nos agences postales communales. Ne perdons pas de vue, enfin, notre appui au commerce et aux entreprises locales. Ce n’est pas uniquement une question de fiscalité !
encadrement des coupes rases en forêt et valorisation de la sylviculture mélangée à couvert continu
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, auteur de la question n° 1123, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Monsieur le ministre, les coupes rases en forêt font l’objet de controverses particulièrement fortes ces dernières semaines.
Des associations alertent sur leur multiplication et leur impact. Plusieurs médias ont traité le sujet à des heures de grande audience et des riverains sont allés jusqu’à bloquer des chantiers.
Les demandes d’encadrement font suite à la publication de l’expertise CRREF – coupes rases et renouvellement des peuplements forestiers –, commandée par le ministère auquel vous êtes rattaché et par le ministère de l’agriculture. Cette expertise souligne notamment les effets néfastes de ces pratiques pour les sols et le microclimat forestier. Elle indique également que plus les coupes rases sont grandes, plus l’impact sur la biodiversité est élevé.
Étant donné que le puits de carbone en forêt française a été divisé par deux au cours des dix dernières années et que 27 % des espèces forestières françaises sont menacées ou quasi menacées selon l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), il apparaît en effet prioritaire d’encadrer les coupes rases et de mettre en avant la sylviculture mélangée à couvert continu.
Cette pratique permet de récolter du bois de qualité en alliant les enjeux économiques et environnementaux.
Deux propositions de loi récemment déposées à l’Assemblée nationale envisagent des mesures en ce sens. Le Président de la République a annoncé vouloir planter un milliard d’arbres d’ici à 2032 pour faire face au changement climatique.
Au-delà de l’effet de communication, c’est une véritable politique d’adaptation des forêts qui doit être bâtie avec tous les acteurs.
Monsieur le ministre, le règlement européen sur la restauration de la nature a été adopté le 27 février dernier. Comment comptez-vous appliquer ce règlement, notamment en matière de restauration des écosystèmes forestiers ? Soutenez-vous les textes déposés dernièrement pour encadrer les coupes rases ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Gilbert-Luc Devinaz, je tiens d’abord à rappeler la qualité de la gestion des forêts françaises, contrairement à la vision caricaturale qui est parfois véhiculée. Le débat se focalise trop souvent, à mon sens, sur les coupes rases.
La surface de forêt hexagonale a doublé depuis le milieu du XIXe siècle, et le volume de bois sur pied a augmenté de plus de 50 % depuis les années 1980. Les indicateurs de bois mort et de diversité des essences recensés par l’IGN progressent depuis vingt ans, signe d’une biodiversité mieux préservée en forêt que dans d’autres milieux.
Cependant, un réchauffement de 2,5 à 3,5 degrés Celsius à l’horizon 2050 aura des effets majeurs sur les forêts françaises.
Trois priorités fondent notre stratégie d’adaptation forestière : d’abord, accompagner nos forêts vers de nouveaux profils sylvicoles, avec des bouquets d’essences diversifiées et adaptées au climat sec et chaud ; ensuite, valoriser en usage matériaux les bois actuellement présents dans nos forêts avant que leur qualité technologique ne se dégrade au point de les condamner à un usage bois énergie ; enfin, étendre et amplifier la prévention des incendies.
Ces priorités figurent en bonne place parmi les objectifs du prochain plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc), qui sera soumis à la consultation du public par le ministre Christophe Béchu dans les prochaines semaines.
La transition forestière nécessitera agilité et innovation. Elle passera par une diversité de solutions et de modes de sylviculture adaptés au profil des peuplements forestiers, ainsi qu’au contexte de chaque massif, loin des idéologies, des carcans et d’un modèle unique dans lesquels certains souhaiteraient enfermer les propriétaires forestiers.
La transition forestière oblige à être encore plus attentif aux enjeux de la protection du capital naturel que constituent les sols forestiers et la biodiversité et à renforcer le mélange des essences de reboisement.
Les propositions de loi que vous avez évoquées contiennent effectivement des mesures qui vont en ce sens. Il reviendra au Parlement de se prononcer à leur sujet.
La transition forestière appelle surtout à l’action, à une mobilisation collective et positive aux côtés de ceux qui sont en première ligne face au défi du changement climatique. Je pense aux propriétaires, aux gestionnaires, aux exploitants et aux industriels du secteur forestier. Le Gouvernement est à leurs côtés, en consacrant des moyens inédits au secteur forestier dans le cadre de la planification écologique.
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour la réplique.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais ma question portait sur la façon dont vous envisagiez d’appliquer le règlement européen adopté le 27 février dernier.
Les conséquences sur la biodiversité seront l’indicateur qui nous permettra de mesurer les évolutions dans le temps, au-delà des effets d’annonce, qui ne peuvent pas compenser l’action.
conditions de travail des conducteurs de vtc durant les jeux olympiques
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, auteur de la question n° 1023, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, voilà maintenant plus de dix ans qu’Uber s’est implanté en France, proposant l’illusion d’une vie de chef d’entreprise à des individus en quête d’un emploi décent.
L’État a tout mis en œuvre pour favoriser l’émergence de cette plateforme, faisant ainsi des chauffeurs de voiture de transport avec chauffeur (VTC) des acteurs incontournables dans le paysage des transports parisiens.
Malgré cette contribution, ils seront exclus des voies olympiques prioritaires lors des jeux Olympiques de Paris 2024. Cette décision aura un impact significatif non seulement sur eux, mais également sur les usagers de ces moyens de mobilité.
Pour résumer, ces hommes et des femmes qui n’ont rien – ni droit ni protection – se retrouveront, en plus, pendant les jeux, relégués dans la grande couronne parisienne, où la demande sera très faible !
Étant donné la responsabilité des gouvernements successifs dans l’essor de ces emplois, il devient impératif de garantir des conditions de travail décentes pour les conducteurs de VTC. C’est d’ailleurs le sens de la directive européenne qui vient d’être adoptée sur les droits des travailleurs des plateformes.
Dans cette perspective, monsieur le ministre, quelles sont les mesures que le Gouvernement compte mettre en place afin d’éviter que les chauffeurs de VTC ne soient exclus lors des jeux Olympiques qui se dérouleront à Paris à partir de juillet 2024 ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Pascal Savoldelli, vous interrogez le Gouvernement sur les conditions de circulation des VTC pendant les jeux Olympiques. Concernant les déplacements et les plans de circulation durant cette période, deux dispositifs spécifiques seront mis en œuvre.
Il y aura, d’abord, des voies olympiques et paralympiques réservées, dont l’objectif premier sera de permettre aux personnes accréditées de relier les sites olympiques dans les délais définis par le Comité international olympique (CIO). Les accès possibles à ces voies sont définis par la loi. Il s’agit, en premier lieu, des transports en commun et des véhicules d’urgence. Les taxis peuvent y avoir accès – et non les VTC –, sous réserve de la fluidité du trafic et à l’appréciation du préfet de police.
Pour la plupart, une seule voie est mobilisée sur l’axe routier, les autres voies restant, bien entendu, accessibles à l’ensemble des usagers.
Ensuite, des zones de circulation restreinte seront mises en place autour des sites olympiques. Celles-ci seront, pour des raisons de sécurité, définies par le préfet de police, après une large consultation. Les taxis et les VTC auront les mêmes droits et interdictions d’accès à ces zones.
Par ailleurs, les clients des VTC pourront accéder aux différentes zones ouvertes à la circulation sur le territoire francilien.
Les chauffeurs VTC ne seront ni pénalisés ni exclus des jeux Olympiques 2024. Nous avons besoin de la mobilisation de tous les opérateurs de mobilité !
Tout comme pour les taxis, l’accès à la profession de chauffeur indépendant de VTC est réglementé. Les candidats sont soumis à l’obligation de réussite à un examen, largement commun à celui des taxis, sauf pour les personnes qui, ayant une expérience significative dans le domaine des transports, bénéficient d’une équivalence.
Les chauffeurs indépendants de VTC sont, par ailleurs, soumis à des règles d’accès à la profession : inscription sur un registre, honorabilité, garantie financière…
Le Gouvernement a mis en place, sous l’égide de l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (Arpe), un dispositif original de dialogue social, lequel a permis de mettre en place, depuis 2021, les premiers accords entre les plateformes et les chauffeurs visant à la régulation sociale du secteur. Je pense, par exemple, aux règles applicables par les plateformes en cas de désactivation des comptes ou à la mise en place d’un revenu minimal par course.
Enfin, l’État a réaffirmé, par ordonnance, les principes d’indépendance qui doivent prévaloir dans la relation entre les plateformes et les travailleurs.
Cependant, le Gouvernement reste vigilant sur la pérennité et l’équilibre de ce dialogue.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour la réplique.
M. Pascal Savoldelli. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais il me semble que, sur la question des travailleurs des plateformes, vous vous tirez une balle dans le pied.
Depuis 2010, une concurrence déloyale a été imposée par ce nouveau modèle économique, rendant nécessaire la mise en œuvre d’un dialogue social et d’une régulation. Alors que de nombreux collectifs de taxis ont engagé des procédures judiciaires, vous n’avez jamais rien fait pour réparer les injustices dont sont victimes l’ensemble des acteurs concernés !
Puisque nous parlons de dialogue social et de régulation, je vous demande l’application, au niveau national, de la directive européenne. C’est l’occasion unique de mettre en place les normes et les protections nécessaires.
Il est impératif que le droit français assure, au plus vite, des droits équitables aux travailleurs des plateformes. Ainsi, nous mettrons fin à leur marginalisation.
Au-delà de cette parenthèse des jeux Olympiques, nous devons garantir le respect de la dignité de toutes ces femmes et de tous ces hommes travaillant pour le compte des plateformes numériques.
compétence eau et assainissement
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, auteure de la question n° 1143, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le ministre, la loi du 27 décembre 2019 permet aux communautés de communes de déléguer, par convention, tout ou partie des compétences eau, assainissement et gestion des eaux pluviales urbaines à une commune ou à un syndicat infracommunautaire existant au 1er janvier 2019.
Des communes exercent actuellement la compétence « eau ». Elles assurent, via des conventions, la production par captage puis la fourniture d’eau potable pour plusieurs autres.
C’est, par exemple, le cas de la commune de Villelongue, dans les Hautes-Pyrénées, qui, grâce à six sources captées, assure la fourniture d’eau potable pour ses habitants et ceux de trois autres communes voisines, soit 2 070 habitants au total. Ces conditions d’organisation de distribution d’eau potable sont régies par des conventions entre les communes concernées.
Cette situation locale et ces modalités de gestion donnent entièrement satisfaction aux élus locaux, raison pour laquelle la perspective du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) au 1er janvier 2026 les inquiète.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que ces modalités de gestion pourront perdurer par conventionnement avec l’intercommunalité au-delà de cette date ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Madame la sénatrice Viviane Artigalas, l’accès à l’eau potable représente un enjeu fondamental sur l’ensemble du territoire national.
L’échelon communautaire a été choisi par le législateur pour remédier aux difficultés sanitaires, économiques et écologiques engendrées par l’émiettement des services. En effet, la mutualisation des moyens financiers et d’expertise à cette échelle permet d’améliorer la résilience et de moderniser les réseaux de distribution d’eau potable. C’est cette logique qui sous-tend le transfert obligatoire aux communautés de communes de la compétence eau au 1er janvier 2026.
Concrètement, cela signifie que l’ensemble des composantes du service d’eau potable, de la production à la distribution, en passant par le transport et le stockage, sera assuré par les communautés de communes. En conséquence de ce transfert, la communauté de communes se substituera de plein droit aux communes qui la composent dans tous leurs actes, dont les éventuelles conventions concernant la production et la fourniture d’eau potable.
Toutefois, madame la sénatrice, je tiens à vous rassurer : en application de l’article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales, la communauté de communes pourra déléguer, par convention, tout ou partie de ses compétences relatives à l’eau à l’une de ses communes membres. Dans ce cadre, les compétences déléguées seront exercées par la commune au nom et pour le compte de la communauté de communes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui me convient.
Pour de nombreuses communes, le service de l’eau répond d’abord à une logique géographique de bassin versant, réalité parfois éloignée des frontières administratives des EPCI. C’est particulièrement vrai en montagne, ainsi que dans les territoires où l’habitat est dispersé et la densité de population faible.
Les difficultés que pose le transfert obligatoire de la compétence eau et assainissement prouvent à quel point il est complexe de tenir compte des besoins et des spécificités des territoires.
Dans certains cas, c’est bien la commune qui reste l’échelon le plus pertinent pour l’exercice de cette compétence : la compétence doit alors rester optionnelle ou, a minima, comme vous l’avez dit, pouvoir, par conventionnement, être entièrement déléguée aux communes.
aménagement du territoire des aéroports régionaux
Mme la présidente. La parole est à M Claude Nougein, auteur de la question n° 1133, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Claude Nougein. Monsieur le ministre, les aéroports régionaux et les lignes d’aménagement du territoire (LAT) traversent aujourd’hui des zones de turbulence.
Depuis 2002, l’État a mis en place des obligations de service public (OSP) sur des liaisons aériennes métropolitaines, afin que puissent être desservies des destinations qui ne le seraient pas dans les conditions normales du marché.
Ces territoires sont également desservis de manière catastrophique par le réseau ferré. Par exemple, dans mon département, la Corrèze, alors que le Capitole mettait trois heures quarante-cinq pour rejoindre Paris depuis Brive-la-Gaillarde en 1970, Intercités met aujourd’hui quatre heures trente au minimum – les retards sont fréquents – pour le même trajet. Admirez le progrès : quarante-cinq minutes en plus en cinquante ans ! (M. Christian Cambon s’exclame.)
De nombreuses lignes étaient opérées historiquement par Air France, puis par sa filiale HOP ! À la suite de l’épidémie de covid-19, l’État est intervenu pour aider massivement le groupe Air France-KLM, avec des subventions ou des prêts, à hauteur de 7 milliards d’euros – 3 milliards d’euros de prêts de l’État actionnaire et 4 milliards d’euros de prêts bancaires garantis par l’État, les PGE.
Que s’est-il passé depuis cette date ? En guise de remerciement envers la Nation, Air France a abandonné tous les territoires ruraux les uns après les autres lors des renouvellements des OSP. L’entreprise ne fait même plus acte de candidature !
La première victime de ce désengagement fut l’aéroport de Brive, dans mon département, puis ce fut le tour de tous les aéroports, à chaque renouvellement d’OSP. Par exemple, Air France a abandonné Rodez, Aurillac, Limoges, Le Puy-en-Velay, Castres, c’est-à-dire toute cette zone centrale de la France qui n’est pas desservie par le TGV. C’est un véritable abandon des territoires ruraux !
Est-ce une volonté de les abandonner purement et simplement ? L’abandon par Air France a-t-il été piloté par l’État, actionnaire à hauteur de 30 %, ce qui, me semble-t-il, lui donne son mot à dire ?
Monsieur le ministre, ma question est simple : allez-vous demander à Air France de réviser sa position et de reprendre ces lignes d’aménagement du territoire, soit en direct, soit en affrètement, comme il le faisait dans de nombreux aéroports avant cet abandon tragique ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Claude Nougein, le Gouvernement vous rejoint sur l’importance qu’il convient d’accorder à la connectivité des territoires les plus enclavés.
Depuis la crise sanitaire, le trafic aérien en métropole a connu des évolutions structurelles, en raison notamment des changements des habitudes de travail. On observe une diminution très sensible du trafic lié aux voyages d’affaires : le nombre de passagers faisant des allers-retours dans la journée a baissé de 60 %. Tandis qu’en novembre 2023, le trafic aérien, en France, dans son ensemble, avait rejoint son niveau de 2019, le trafic domestique dépassait à peine 75 % de son niveau d’avant la crise.
Ce contexte a bien évidemment bouleversé l’équilibre économique de toutes les lignes d’aménagement du territoire. La baisse constatée du trafic et l’augmentation de certains postes de coûts ont provoqué une augmentation des compensations financières demandées aux collectivités locales et à l’État. Face à la hausse de ces compensations, certaines collectivités ont fait le choix de supprimer la délégation de service public, d’autres de réduire le service.
Le groupe Air France, qui exploitait quatre lignes d’aménagement du territoire avant la crise sanitaire, a tenu son engagement de ne pas dénoncer les délégations de service public en cours. Malgré les pertes, Air France et HOP ! ont ainsi été contraints d’aller jusqu’au terme de l’exécution des conventions de délégation de service public.
Dans le même temps, Air France doit mettre en œuvre toutes les solutions permettant de mettre fin aux pertes rencontrées sur le réseau domestique, ce qui explique le désengagement progressif des LAT entrepris par la compagnie.
Face à cette réalité, l’État demeure aux côtés des collectivités qui renouvellent et financent les contrats de délégation de service public. En 2023, 22 millions d’euros y ont été consacrés, dont plus de la moitié pour les LAT métropolitaines.
Outre ces montants, l’État apporte également toute son aide technique aux collectivités pour la définition d’obligations de service public qui soient le mieux ajustées possible pour répondre à la défaillance du marché, à l’effondrement de la demande et remédier aux particularités des formes d’enclavement territorial.
couvre-feu à vingt-trois heures pour l’aéroport d’orly
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 1150, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Christian Cambon. Monsieur le ministre, je reste dans le domaine aéronautique pour vous parler, une fois de plus dans cet hémicycle, des nuisances de l’aéroport d’Orly, dans le Val-de-Marne, qui ont évidemment un impact sur la santé des riverains.
Cet aéroport est inclus dans un tissu urbain particulièrement dense et provoque beaucoup de nuisances. C’est pourquoi, en 1968, un couvre-feu avait été établi entre vingt-trois heures trente et six heures du matin, avec la possibilité de stopper l’ensemble des vols. Par ailleurs, le trafic a été plafonné depuis 1994.
Malheureusement, cet aéroport s’est étendu sur quatre îlots, et ce sont maintenant plus de 740 000 riverains qui subissent l’augmentation du trafic aérien, avec une exposition au bruit qui, bien évidemment, a des conséquences directes sur leur santé.
Toutes les mesures qui ont été établies ont montré que, pour respecter les directives européennes, nous devrions baisser le bruit d’au moins 6 décibels. Des experts sollicités par le Gouvernement proposent d’avancer le début du couvre-feu de vingt-trois heures trente à vingt-trois heures, ce qui rallongerait le temps de sommeil des riverains de trente minutes – croyez-moi, ce n’est pas énorme !
C’est le seul scénario acceptable, et tous les élus du Val-de-Marne sont unanimement mobilisés pour soutenir cette proposition, laquelle présenterait l’intérêt d’assurer la conformité du plan de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE) de l’aéroport d’Orly à celui de la métropole du Grand Paris, qui a été voté à l’unanimité des 131 communes membres.
Aussi, monsieur le ministre, ma question est-elle simple : le Gouvernement a-t-il l’intention de prendre cette mesure pour faire en sorte que les riverains aient enfin sept heures consécutives pour dormir, ce qui serait bon pour leur santé ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Christian Cambon, vous appelez l’attention du ministre chargé des transports sur la protection des habitants exposés aux nuisances sonores aériennes de l’aéroport de Paris-Orly.
Comme vous le rappelez, le trafic sur cet aéroport est déjà soumis à des restrictions d’exploitation aéroportuaire qui figurent parmi les plus contraignantes d’Europe et font l’objet d’une surveillance stricte des autorités locales de l’aviation civile.
Depuis 1968, un couvre-feu y est en vigueur, entre vingt-trois heures trente et six heures et, depuis 1994, le trafic y est plafonné à 250 000 créneaux par an.
Le plan de prévention du bruit dans l’environnement de l’aéroport, qui a été approuvé le 17 mars 2022, prévoyait la réalisation d’une étude d’impact selon l’approche équilibrée, sur laquelle les ministres chargés de l’environnement et des transports pourraient s’appuyer pour adopter de nouvelles restrictions d’exploitation.
Le plan de prévention prévoyait de diminuer le bruit généré entre vingt-deux heures et six heures d’au moins 6 décibels par rapport à la situation de référence de 2018 et, sur le même périmètre, de diviser par deux l’indicateur sanitaire de fortes perturbations du sommeil.
Ces objectifs du plan de prévention ont été pris en compte dans l’étude d’impact dirigée par la préfète du Val-de-Marne. Toutefois, cette étude a mis en évidence un biais dans l’indicateur acoustique retenu de nature à fragiliser l’objectif de réduction du bruit de 6 décibels contenu dans le PPBE.
Ce constat a été partagé avec l’ensemble des parties prenantes, dont les élus locaux concernés, lors d’une réunion d’information qui s’est tenue le 26 octobre 2023.
L’étude d’impact est maintenant finalisée, et plusieurs scénarios de restriction ont été soigneusement étudiés. Ils comportent chacun des mesures ambitieuses, d’un niveau inédit en Europe.
Monsieur le sénateur, soyez assuré que le ministre de la transition écologique et le ministre chargé des transports tireront prochainement de ces travaux toutes les conclusions utiles à la préservation de l’équilibre entre les intérêts économiques des territoires, d’une part, et la protection de la population contre les nuisances sonores, d’autre part.
Je vous confirme, enfin, sur un plan plus général, que le Gouvernement s’est engagé de manière constante à maîtriser les nuisances sonores du transport aérien, tout particulièrement en région parisienne, où la densité de population majore bien évidemment les problèmes.