compte rendu intégral

Présidence de M. Alain Marc

vice-président

Secrétaires :

M. François Bonhomme,

Mme Nicole Bonnefoy.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

régulation du montant des niveaux de prise en charge dans le champ de l’apprentissage

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, auteure de la question n° 826, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

Mme Laure Darcos. Madame la ministre, l’apprentissage connaît des moments très difficiles. La régulation du montant des niveaux de prise en charge des formations professionnelles en apprentissage menace l’existence même de nos centres de formation d’apprentis (CFA), alors que le Gouvernement souhaite atteindre 1 million de contrats en 2027. Quel paradoxe !

En Essonne, la faculté des métiers gère le plus grand centre de formation en alternance du sud francilien. Elle forme chaque année 2 900 apprentis dans huit filières relevant du commerce, de l’industrie et de l’artisanat.

Cinquante-trois formations sur soixante-neuf et 90 % des effectifs vont être affectés par la baisse des niveaux de prise en charge avec une perte sèche de financement de 1,5 million d’euros en année pleine.

Pour la faculté des métiers, les résultats d’exploitation s’annoncent donc déficitaires. C’est aussi pour elle une moindre capacité à investir et à rénover les plateaux techniques, sans parler des conséquences sur l’accompagnement des jeunes, notamment les plus fragiles, issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville, qui seront nécessairement pénalisés.

Tous nos CFA, notamment celui du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) de Brétigny-sur-Orge, subiront les conséquences de cette politique d’économies alors que les charges liées aux formations sont souvent très consommatrices de ressources énergétiques et de matières premières, dont le coût a crû de manière exponentielle.

Il est urgent de tenir compte des réalités du terrain, faute de quoi, au moment où de nombreux pans de l’économie manquent de compétences, une part importante de l’offre de formation prisée par les entreprises disparaîtra des territoires, et les pénuries de main-d’œuvre, dont l’appareil productif du pays a tant besoin, s’aggraveront.

Quels engagements le Gouvernement est-il prêt à prendre pour un juste financement de l’apprentissage ? Le prélèvement sur les recettes de l’Unédic au profit de France Compétences permettra-t-il de faire revenir vers l’apprentissage les ressources qui lui font actuellement tant défaut ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de linsertion et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de lenseignement et de la formation professionnels. Madame la sénatrice Darcos, la politique volontariste de soutien à l’apprentissage a permis de multiplier par 2,5 le nombre d’apprentis dans l’Essonne, et par près de 3 en France. L’Île-de-France est motrice pour la formation par l’apprentissage, puisqu’un quart des contrats d’apprentissage sont conclus dans cette seule région.

Nous devons ce succès croissant depuis 2018 à un niveau d’investissement inédit dans l’apprentissage et, plus largement, dans la formation de nos jeunes. Il est également inédit d’avoir apporté une telle modalité de financement : gratuité de la formation et aide de 6 000 euros pour les entreprises ; j’ai souhaité que cette aide soit simple et lisible pour toutes les entreprises.

Les résultats sont là, puisque sept apprentis sur dix réussissent à s’insérer dans l’emploi ; c’est pour nous une boussole importante de notre politique. Dans certains métiers en tension, notamment ceux de l’artisanat, le taux d’insertion va jusqu’à 80 % ; c’est dire à quel point l’apprentissage est une réussite.

Notre objectif est simple : garantir aux CFA un juste niveau de financement pour fonctionner correctement, tout en prévenant les marges excessives. Or, à ce jour, le taux de marge est en moyenne de 15 %. C’est pourquoi nous travaillons à faire baisser le niveau de prise en charge des contrats.

La fixation du niveau de financement n’est – je tiens à le rappeler – ni arbitraire ni politique. Elle dépend d’une méthode fondée sur l’observation des coûts réels engagés par les CFA, que France Compétences analyse chaque année ligne par ligne. En 2022 et 2023, nous avons ainsi mis au jour des écarts qui étaient encore importants dans certaines formations entre le niveau de subventionnement et le coût réel de la formation.

Nous visons un objectif de juste prix dans le cadre de notre politique globale visant à atteindre un million d’apprentis par an.

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.

Mme Laure Darcos. Le Sénat examinera cet après-midi les crédits de la mission « Travail et emploi ». Le groupe Les Indépendants – République et Territoires appelle le Sénat à approuver le transfert de l’Unédic vers France Compétences. Nos CFA en ont besoin.

inquiétudes liées à la baisse des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, auteur de la question n° 911, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

M. Jean-Jacques Michau. Madame la ministre, je souhaite à mon tour vous interroger sur les graves conséquences de la baisse, entrée en vigueur au mois de septembre 2023, des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage.

En effet, cette seconde diminution, annoncée par France Compétences le 17 juillet 2023, intervient alors qu’une première vague de baisses en septembre 2022 a déjà contribué à déstabiliser fortement la formation de nos apprentis, surtout pour les formations infra-bac aux métiers en tension.

Il est à craindre qu’une telle mesure n’engendre un déficit important pour les CFA, déjà fragilisés économiquement et appelés à supporter des charges supplémentaires.

Ces coups de rabot répétés, conjugués aux augmentations de charges dues à l’inflation, pénalisent fortement les centres de formation et entrent en contradiction avec l’annonce faite par le Gouvernement d’atteindre le million d’apprentis à l’horizon 2027.

Je veux le souligner, l’Ariège est un département d’excellence dans le domaine de l’apprentissage, puisque, six mois après l’obtention de leur diplôme, près de 80 % des jeunes apprentis ariégeois ont trouvé un emploi. Ces chiffres sont encore meilleurs que ceux de la moyenne nationale, cette dernière étant proche des 75 %.

Aussi, je souhaite savoir si le Gouvernement va revenir sur une telle décision et approuver l’amendement présenté cet après-midi par les sénateurs socialistes dans le cadre de l’examen de la mission « Travail et emploi » du PLF pour 2024 et visant à créer un fonds de compensation pour soutenir, en particulier, les petits centres de formation, notamment ceux qui sont installés en zone rurale et qui sont isolés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de linsertion et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de lenseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur, je le rappelle, le Gouvernement mène une politique volontariste en faveur de l’apprentissage, qui – nous en sommes convaincus – permet une meilleure réussite des jeunes.

L’objectif d’un million d’apprentis nouvellement entrés en formation par an d’ici à 2027 reste notre boussole, car nous sommes convaincus, comme vous, que l’apprentissage favorise l’insertion professionnelle des jeunes.

Pour autant, nous souhaitons que le modèle de financement s’appuie sur des réalités objectives, c’est-à-dire les dépenses réellement engagées par les CFA. Or nous constatons des marges élevées, de 15 % en moyenne. La régulation que nous avons opérée vise à faire baisser de 5 points en moyenne ce taux de marge pour revenir autour de 10 %, ce qui permet de soutenir le modèle économique des CFA tout en tenant compte de l’inflation. Nous n’avons pas opéré de baisses trop importantes : aucune ne dépasse 10 %.

Je tiens à rappeler que 180 millions d’euros et 137 millions d’euros sont versés aux régions pour financer l’apprentissage, respectivement pour l’investissement et le fonctionnement des CFA. Nous soutenons ainsi les politiques régionales visant à favoriser l’accompagnement des jeunes, notamment ceux qui sont issus des zones rurales ou qui sont en difficulté.

Nous soutenons aussi des modalités pédagogiques différenciées et un maillage du territoire par les CFA. D’ailleurs, ceux-ci doivent peut-être être accompagnés différemment.

Dans le cadre de la préparation de la loi de 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, nous avions négocié les deux enveloppes que j’ai évoquées de manière à permettre une politique régionale au plus proche des réalités territoriales. Je crois que cela répond à votre aspiration, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour la réplique.

M. Jean-Jacques Michau. Certes, madame la ministre, il est nécessaire de garantir la soutenabilité du système. Mais le calcul des niveaux de prise en charge des formations doit s’appuyer sur une stratégie partagée avec les acteurs de l’apprentissage.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. C’est le cas !

aides aux postes des structures d’insertion par l’activité économique

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, auteur de la question n° 615, adressée à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

M. Olivier Cigolotti. Ma question porte sur la programmation pour les exercices à venir des volumes d’aides aux postes destinées aux structures d’insertion par l’activité économique. Elle concerne tout particulièrement le réseau Auvergne-Rhône-Alpes.

Les 521 structures de la région font part d’inquiétudes au sujet de la programmation des conventionnements proposant de reconduire le volume d’équivalent temps plein (ETP) conventionné sur la base du réalisé de l’exercice précédent.

Le maintien de cette base présente un certain risque. En effet, un grand nombre de ces structures d’insertion engagent des contrats à durée déterminée d’insertion sur quatre mois ou six mois minimum.

La politique de limitation des ETP va conduire à des effets de réajustement, se traduisant par une baisse du nombre d’embauches de salariés en parcours. Cette situation freine également le développement économique des structures engagées sur des activités et des marchés nouveaux.

En Auvergne-Rhône-Alpes, les structures d’insertion représentent environ 13 % des structures conventionnées à l’échelle de la France métropolitaine. Cependant, la programmation budgétaire n’accorde à la région qu’une enveloppe représentant 11,7 % de l’enveloppe nationale.

Plus inquiétant encore, le maintien du réalisé 2022 conduit à une baisse de budget de 4 % sur 2023, soit près de 5 millions d’euros, alors que les structures ont été largement incitées à développer leurs activités.

Ce constat illustre une certaine incohérence avec la politique de promotion de l’insertion par l’activité économique dans laquelle l’État s’est engagé depuis plusieurs années. Les moyens envisagés en 2023 ne semblent pas tenir compte des enjeux et du contexte d’urgence sociale et économique auxquels les structures d’insertion sont chargées de répondre.

Madame la ministre, quels moyens complémentaires le Gouvernement compte-t-il mettre en place pour encourager la dynamique qui a permis aux structures d’insertion par l’activité économique à la fois de construire de multiples partenariats avec des secteurs en tension, comme les métiers de l’autonomie ou encore de la logistique, et d’investir des filières durables à l’image du maraîchage et du réemploi de biodéchets ou de certains matériaux ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de linsertion et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de lenseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur, l’insertion par l’activité économique (IAE) est un instrument majeur de lutte contre le chômage de longue durée. Ces dernières années, le Gouvernement s’est mobilisé pour développer l’IAE dans le cadre du Pacte d’ambition, avec pour objectif la création de 100 000 emplois supplémentaires à la fin de 2022.

Nous nous sommes attachés à maintenir en 2023 l’effort d’augmentation du budget global pour les aides aux postes : le budget a été porté à 1,25 milliard d’euros en loi de finances initiale (LFI) pour 2023 contre 1,19 milliard en LFI pour 2022.

Nous avons également relevé de 25 % le budget du plan d’investissement dans les compétences de l’insertion par l’activité économique (PIC IAE), qui permet de financer de la formation pour les personnes en IAE, et nous avons prolongé les expérimentations Seve, Tapaj et Convergence, qui visent des publics de l’IAE très fragiles, en dépit d’un exercice budgétaire contraint par les augmentations successives du Smic, qui ont entraîné une augmentation du montant des aides aux postes.

Durant le premier trimestre 2023, face à des besoins de financement supplémentaires, un rehaussement de l’enveloppe a été décidé pour cette année à hauteur de 133 millions d’euros. Des crédits complémentaires ont encore été notifiés dernièrement dans le cadre de l’exercice des bourses aux postes interrégionales.

S’agissant du budget pour 2024, le projet de loi de finances prévoit une enveloppe de 1,46 milliard d’euros pour les aides aux postes, soit une augmentation de 210 millions par rapport à la LFI 2023, qui avait ouvert 1,25 milliard d’euros.

Les crédits alloués à l’IAE augmentent ainsi de manière continue depuis 2018 : ils sont passés de 800 millions d’euros à près de 1,5 milliard d’euros.

Pour autant, le développement du secteur ne saurait se résumer à une augmentation quantitative du nombre de parcours. Il doit également être orienté vers une attention renforcée à leur qualité. C’est le sens de la concertation qui sera lancée dès le mois de janvier avec le secteur.

conception du citoyen du ministre de l’éducation nationale

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 166, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Jean-Marie Mizzon. Ma question s’adressait initialement à M. Ndiaye. Comme elle demeure plus que jamais d’actualité, c’est à vous que je la pose aujourd’hui, madame la ministre.

Le Dictionnaire constitutionnel publié par les Presses universitaires de France, source éminemment incontestable, donne une définition du citoyen. Je la lis pratiquement in extenso tant, pour la parfaite information de tous, il peut être utile d’en faire l’exégèse exacte. Le citoyen est celui qui est « membre d’une communauté politique territoriale, titulaire de droits et soumis à des obligations uniformes indépendamment, en principe, de son appartenance à des collectivités “particulières” : sexe, lignages, tribus, corporations, castes, communes, classes, religions ».

Madame la ministre, dans le contexte actuel, il serait bon d’entendre votre définition. Je vous écoute.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de linsertion et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de lenseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Jean-Marie Mizzon, vous interrogez mon collègue Gabriel Attal, que je vous prie de bien vouloir excuser et qui m’a chargée de vous répondre.

La République française n’admet aucune différence entre ses citoyens. Elle doit leur garantir les mêmes droits et les mêmes libertés. Dans notre État de droit, les institutions jouent un rôle majeur dans la protection des citoyens. C’est pourquoi nos élèves doivent en comprendre le fonctionnement et apprendre à leur faire confiance.

C’est l’un des enjeux majeurs de l’éducation à la citoyenneté, qui doit d’abord s’appuyer sur les principes et les valeurs de la République, ce qui revient à les connaître, à les comprendre et à y adhérer.

Au-delà des droits et libertés politiques attachés à la notion de citoyenneté française, l’exercice de la citoyenneté ne se limite pas, dans notre société démocratique, à l’exercice des droits politiques.

Être citoyen, c’est aussi appartenir à une communauté de valeurs. Construire une société dont chacun des membres se sent appartenir à une communauté et à une même destinée est également au cœur de notre action.

Cela suppose de transmettre aux élèves une culture institutionnelle et juridique et, dans le même temps, de faire en sorte qu’ils saisissent le sens de l’engagement, qu’ils en soient acteurs, notamment par le biais de la démocratie scolaire et des actions éducatives – nombreuses – dans le champ de la culture citoyenne dans lesquelles ils peuvent s’investir.

Les nouveaux programmes d’enseignement moral et civique et leur volume horaire renforcé permettront de consolider la formation de nos élèves pour leur inculquer ce que c’est, aujourd’hui, être citoyen.

Et puis, la formation des citoyens ne s’arrête pas aux portes des établissements scolaires. C’est un enjeu central de la politique en faveur de la jeunesse : je pense au service national universel et au service civique. Ce sont des vecteurs que nous devons promouvoir pour que la jeunesse y trouve le moyen d’exprimer et de vivre son attachement à la Nation.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, je constate que nous sommes d’accord sur les principes. J’en suis heureux.

Avant d’être un élu, je suis moi-même un citoyen. Comme tel, je tiens pour acquis que notre République est une et indivisible. Elle est fondée sur le principe intangible selon lequel le citoyen, c’est-à-dire le pilier politique de la société, n’a, pour l’essentiel, ni couleur de peau, ni sexe, ni religion, ni statut économique et social. Surtout, notre République rassemble.

Tel devrait être notre évangile à tous, madame la ministre. Il conviendrait de le diffuser le plus largement possible auprès de notre jeunesse, qui tient entre ses mains le destin de notre Nation et l’avenir de notre pays. Nous avons tous à y gagner.

hommage national à dominique bernard dans les écoles privées

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, auteur de la question n° 877, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

M. Pierre Ouzoulias. Le 16 octobre dernier, la Nation rendait hommage à Dominique Bernard et Samuel Paty. Le Président de la République a souhaité – je le cite – que cet hommage soit rendu par « tous les élèves de France ». Or plusieurs établissements privés sous contrat ont refusé d’organiser cet hommage.

Par ailleurs, le ministre de la santé a lancé une grande campagne de vaccination contre le papillomavirus, et il a révélé que plusieurs établissements privés sous contrat avaient aussi refusé d’organiser cette vaccination.

Enfin, malgré l’arrêté de juillet 2021, plusieurs établissements privés sous contrat refusent d’organiser des cours sur la laïcité. Ils refusent même de donner à leurs enseignants des formations à l’enseignement de la laïcité.

Les établissements privés sous contrat sont financés à 73 % par la puissance publique. Cela représente 8,5 milliards d’euros.

Madame la ministre, quelles procédures allez-vous mettre en œuvre pour que tous les établissements privés sous contrat appliquent les politiques nationales ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de linsertion et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de lenseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Ouzoulias, je vous remercie de votre question : le terrible assassinat terroriste du professeur Dominique Bernard a bouleversé la France entière. S’attaquer à un professeur, c’est s’attaquer à notre ciment républicain.

C’est pourquoi Gabriel Attal, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, a recommandé à l’ensemble des réseaux d’enseignement public et privé sous contrat de permettre la mise en place d’un temps banalisé consécutif à la mort de Dominique Bernard : un temps de recueillement essentiel face à l’extrême gravité de ce lâche assassinat terroriste.

Vous m’interrogez pour connaître le nombre exact d’établissements qui n’ont pas organisé ce temps de recueillement. Le ministère ne dispose pas d’une telle donnée statistique.

Pour les établissements sous contrat, il s’agissait bien d’une recommandation, et non pas d’une directive contraignante. Vous le savez, l’État reconnaît aux établissements privés sous contrat un caractère propre, c’est-à-dire qu’ils peuvent s’exprimer librement sur tout ce qui ne relève pas du strict respect des programmes scolaires. C’est le sens de la loi du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l’État et les établissements d’enseignement privés, dite loi Debré, qui s’applique encore aujourd’hui.

Ainsi, et on peut, certes, le déplorer dans ce cas précis, ces établissements privés sous contrat étaient libres de respecter ou non la recommandation du ministre de l’éducation nationale d’organiser un temps de recueillement en hommage à Dominique Bernard. Cela relève du caractère propre de ces établissements.

Je tiens toutefois à vous préciser que le secrétariat général de l’enseignement catholique a assuré le ministère que la très grande majorité des établissements privés catholiques avaient respecté cette directive.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour la réplique.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, je comprends votre argumentation, mais cela veut dire que le caractère propre de ces établissements publics leur permet de s’exonérer de l’application de toute politique nationale.

Jean-Marie Mizzon nous a très justement rappelé à l’instant que notre objectif était d’éduquer des citoyens. Comment des établissements privés sous contrat peuvent-ils s’exonérer de la loi commune et définir pour eux seuls ce qu’il convient, ou pas, d’enseigner ?

Par ailleurs, vous ne m’avez pas répondu sur le papillomavirus. La chose est grave, madame la ministre. Vous savez comme moi que plusieurs milliers de femmes meurent chaque année du cancer de l’utérus et qu’aujourd’hui, la vaccination contre le papillomavirus est très importante pour lutter contre ce fléau.

Je crois qu’il faut faire preuve d’un peu de sévérité. On ne peut pas accepter de tels comportements séparatistes.

financement des diagnostics archéologiques préventifs réalisés par les collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Daniel Gueret, auteur de la question n° 931, adressée à Mme la ministre de la culture.

M. Daniel Gueret. Chacun connaît l’ampleur de l’engagement des collectivités territoriales en faveur de l’archéologie préventive. Cependant, l’archéologie territoriale rencontre de réelles difficultés liées au système actuel de financement des diagnostics, qui entraîne une distorsion dans la manière dont sont traités les opérateurs publics.

Depuis 2016, un système de subventionnement a remplacé une redevance affectée, de sorte que les collectivités territoriales ne bénéficient plus d’une ligne de crédit stabilisée au plan national leur permettant de financer les missions de recherche et de valorisation qu’elles assurent.

Le système de barème mis en place a par ailleurs pour conséquence d’aboutir à des sous-financements de leurs opérations, notamment en milieu urbain. Par exemple, la ville de Chartres dispose depuis longtemps d’un service archéologique territorial. Entre 2018 et 2022, celui-ci a reçu une subvention de 25 000 euros, pour un coût opérationnel annuel de 250 000 euros.

C’est la raison pour laquelle je vous remercie, madame la ministre, de m’indiquer si le Gouvernement entend procéder à un rééquilibrage de la répartition des montants collectés sur la fiscalité de l’archéologie préventive pour encourager l’archéologie territoriale, et de quelle manière il entend opérer.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de linsertion et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de lenseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur, le dispositif de subvention par le ministère de la culture des collectivités territoriales habilitées à réaliser des diagnostics archéologiques a été mis en place à la suite de la budgétisation de la redevance d’archéologie préventive en 2016.

L’objectif est de permettre le financement de ces services, qui sont des acteurs essentiels du dispositif d’archéologie préventive. Le code du patrimoine fixe les conditions de versement de ces subventions, ce qui constitue une garantie pour les collectivités, en leur permettant d’anticiper le montant des sommes à percevoir.

Cela va également dans le sens d’une plus grande équité entre les services bénéficiaires, puisque les montants alloués sont fondés sur les opérations réellement réalisées au regard de leurs caractéristiques.

Une concertation engagée en 2019 avec les représentants des services habilités de collectivités a débouché sur l’évolution des modalités de calcul de ces subventions pour une plus juste prise en compte des coûts de réalisation de certaines catégories de diagnostics, notamment en milieu urbain et périurbain. Pour accompagner l’évolution de ce dispositif, la dotation budgétaire a été réévaluée à hauteur de 14,2 millions d’euros au PLF 2023, soit +2,4 millions par rapport à 2022. Cette enveloppe est maintenue au PLF 2024.

Les démarches entreprises par le ministère de la culture visent à soutenir l’activité des services habilités de collectivités territoriales, en leur procurant les ressources les plus appropriées à la mise en œuvre de cette mission de service public de diagnostic archéologique dans un contexte de relance économique marqué par l’inflation.

Une nouvelle concertation avec les représentants des services habilités de collectivités territoriales sera engagée prochainement par les services du ministère de la culture en vue d’une éventuelle évolution du dispositif. Soyez assuré de la mobilisation du ministère de la culture sur le sujet, monsieur le sénateur.