M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, le PLF pour 2024 est un budget peu protecteur, face à des prix incertains. Notre commission souscrit à la revalorisation des crédits liés à la rénovation énergétique, à la mobilité propre et à la chaleur renouvelable, qu’elle avait appelée de ses vœux l’an passé.
En revanche, elle s’inquiète de l’extinction des mécanismes exceptionnels de protection des consommateurs, lesquels ne dépassent pas désormais 3 milliards d’euros, soit une baisse de 90 % par rapport à l’exercice précédent. Un grand nombre de ces dispositifs ne sont pas pleinement reconduits : amortisseur et filet de sécurité pour l’électricité, bouclier individuel pour le gaz et chèques fioul et bois pour les carburants et les combustibles. Or les prix des énergies demeurent bien supérieurs à leurs niveaux d’avant-crise !
Pis, l’État a tendance à capter des recettes exceptionnelles tirées de cette crise. Le budget 2024 lui permet ainsi de doubler le tarif de l’accise sur le gaz, pour 3,5 milliards d’euros, mais aussi de disposer des compléments de prix de l’Arenh, pour 1,6 milliard d’euros, et des compléments de rémunération de l’électricité renouvelable, pour 1,3 milliard d’euros.
Or, en juillet dernier, notre commission, dans un rapport d’information sur le sujet, et la Commission de régulation de l’énergie (CRE), dans une délibération, ont clairement appelé à ce que les recettes exceptionnelles issues des compléments de prix de l’Arenh soient reversées aux consommateurs. Il nous faut absolument corriger le tir !
Dans le même esprit, aucun débat public n’est conduit sur l’utilisation de la contribution au service public de l’électricité (CSPE), qui a vocation à financer le développement des énergies renouvelables et représente un gain pour l’État de 3 milliards d’euros. Pour ma part, je pense qu’utiliser des gains structurels pour financer des dépenses conjoncturelles est une mauvaise pratique budgétaire.
Enfin, notre commission déplore plusieurs angles morts. Ainsi, la revitalisation des territoires touchés par l’arrêt d’une centrale à charbon ou d’une centrale nucléaire – je pense à Fessenheim – ne fait l’objet d’aucune mesure de soutien. Je note également que le principe de neutralité technologique n’est pas toujours appliqué à l’énergie et à l’hydrogène nucléaires, à l’hydroélectricité, au biogaz et aux biocarburants.
Dans ce contexte, le Sénat a examiné il y a quelques jours plusieurs amendements fiscaux, que j’ai présentés à titre personnel et dont l’adoption a contribué à supprimer la hausse du tarif de l’accise sur le gaz ; à soutenir les électrolyseurs d’hydrogène et le captage du CO2 ; à valoriser l’hydrogène nucléaire aux côtés de l’hydrogène produit à partir de sources renouvelables.
Par ailleurs, pour remédier aux difficultés que j’ai indiquées, notre commission a adopté sept amendements budgétaires visant à garantir l’éligibilité des collectivités territoriales au bouclier tarifaire et des différents propriétaires à MaPrimeRénov’ ; à augmenter de 350 000 euros les moyens dont dispose la CRE pour contrôler le bouclier tarifaire ; à relever de 115 millions d’euros les crédits du chèque énergie, de 180 millions d’euros ceux du fonds Chaleur renouvelable et de 40 millions d’euros ceux de la ligne budgétaire qui finance, au sein du programme « Énergie, climat et après-mines », les actions de revitalisation des territoires.
Je forme le vœu que le PLF pour 2024, ainsi infléchi, protège les consommateurs et consolide notre transition et notre souveraineté énergétiques.
Au nom de la commission des affaires économiques, je vous invite donc, mes chers collègues, à voter en faveur des crédits de cette mission, sous réserve de l’adoption de nos amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pascal Martin, rapporteur pour avis, applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, le transport aérien sort tout juste d’une terrible crise, un retour à la normale du trafic est prévu en 2024, mais déjà de nouveaux défis importants se présentent.
Je veux commencer par dire un mot sur l’administration responsable du secteur, dont la situation est plus que critique. Sa dette a explosé, passant de 700 millions d’euros en 2019 à 2,7 milliards d’euros fin 2022.
L’administration a certes annoncé une trajectoire ambitieuse de désendettement, mais, parallèlement, elle doit mener d’intenses investissements de modernisation du fait de l’obsolescence des outils du contrôle aérien français. Formons le vœu que ce désendettement ne se fasse pas au détriment du rattrapage technologique dont le contrôle aérien a urgemment besoin.
Concernant maintenant l’enjeu crucial de la décarbonation du secteur, il faut créer, quasiment ex nihilo, une filière de carburants aériens durables.
Madame, messieurs les ministres, le plan annoncé par le Président de la République, doté de 200 millions d’euros, permettra tout au plus de produire une goutte de biocarburant dans un océan de kérosène. Il convient d’être beaucoup plus ambitieux, en soutenant la filière et en accompagnant les compagnies ; il y va de notre souveraineté et de notre indépendance énergétiques.
J’ai déposé un amendement en ce sens au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ; je me réjouis de son adoption et j’espère qu’il ne sera pas torpillé par la grande faucheuse du 49.3. (Sourires.)
Par ailleurs, les premiers éléments de la future programmation pluriannuelle de l’énergie m’inquiètent. L’usage de la biomasse dans le secteur aérien ne sera en effet développé que « raisonnablement et sous conditions ».
Comment prétendre alors vouloir respecter les nouveaux objectifs européens fixés dans le règlement ReFuelEU aviation ? Être à la hauteur des ambitions annoncées, c’est prendre, pour les concrétiser, des décisions qui soient elles-mêmes à la mesure des objectifs affichés !
Le secteur aérien a, par-dessus le marché, d’autres cailloux dans la chaussure, comme l’a indiqué notre collègue rapporteur spécial Vincent Capo-Canellas ; ainsi la nouvelle et fameuse taxe sur les infrastructures de transport de longue distance risque-t-elle de l’affecter très durablement.
Il convient également de soutenir la sobriété énergétique des aéronefs et d’encourager à cet effet le renouvellement des flottes. À cet égard, j’espère, comme mon collègue, que l’amendement de la commission adopté en séance publique ne sera pas rayé d’un trait de plume par la direction du budget.
Pour conclure, je souhaite évoquer la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires (TNSA), qui finance les travaux d’insonorisation des logements des riverains des aéroports et qui a vu son rendement fortement baisser lors de la crise sanitaire.
Je présenterai dans quelques instants un amendement tendant à compenser cette baisse, proposition formulée par la commission chaque année depuis quatre ans. Le Gouvernement ne l’a entendue jusqu’à présent que d’une oreille ; espérons que la seconde frétillera positivement à l’idée de cette proposition teintée de bon sens ! (Sourires. – M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial, applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits relatifs aux transports routiers de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l’adoption de quatorze amendements.
Trois de ces amendements ont d’ores et déjà été adoptés, ce dont je me félicite. Ils portaient respectivement sur la diminution du taux de TVA à 5,5 % sur les transports du quotidien ; sur la généralisation à tout le territoire de l’expérimentation du prêt à taux zéro (PTZ) pour l’acquisition d’un véhicule léger peu polluant et le prolongement d’un an de ce dispositif ; sur l’instauration d’un prêt à taux zéro pour l’acquisition de véhicules lourds peu polluants.
Je vous présenterai, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, d’autres amendements portant sur les crédits de la mission que nous examinons aujourd’hui.
Je souhaite aborder deux points sur lesquels j’ai insisté dans mon rapport pour avis.
J’en viens premièrement à la question du modèle de financement des autorités organisatrices de la mobilité, qui doivent répondre à de multiples défis.
Les AOM vont faire face, d’une part, à une forte hausse de la demande de transports collectifs, sous l’effet de la mise en œuvre rapide des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) et des services express régionaux métropolitains (Serm) – nous avons récemment adopté un projet de loi à ce sujet. Elles sont confrontées, d’autre part, à une hausse de leurs dépenses de fonctionnement due à l’inflation et vont devoir intégrer à leur équation budgétaire les coûts liés au renouvellement de leurs flottes de véhicules.
À la faveur du PLF 2024, un signal positif est émis : le plafond du versement mobilité est rehaussé pour Paris et pour la petite couronne. Néanmoins, ce traitement particulier de la région parisienne pose question eu égard aux besoins considérables des autres AOM. Il me semble donc urgent d’engager une réflexion sur une évolution du versement mobilité, en prêtant une attention particulière aux AOM situées en zones peu denses et dont le potentiel fiscal ne permet pas de lever le versement mobilité.
Le financement du verdissement du parc automobile constitue un deuxième point d’alerte. Là encore, un soutien plus volontariste est nécessaire en faveur des AOM qui doivent assumer des dépenses considérables pour satisfaire à leurs obligations de renouvellement des flottes d’autobus et d’autocars.
Il faut parallèlement redoubler d’efforts pour accompagner les ménages et les professionnels dans le verdissement de leurs véhicules. L’annonce du lancement du leasing social au 1er janvier 2024 est une bonne nouvelle, mais on ne peut que s’alarmer du flou artistique – ou administratif ! – qui est entretenu quant à l’enveloppe budgétaire prévue et aux modalités précises de sa mise en œuvre.
Dans ces conditions, on peut craindre un nouvel ajournement du dispositif ou, à tout le moins, un démarrage très timide. Compte tenu des besoins et vu l’attente que suscite cette mesure, voilà qui ne serait pas acceptable. Nous y serons donc particulièrement attentifs. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guy Benarroche applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur les crédits relatifs au transport ferroviaire, fluvial et maritime pour l’année 2024.
Si l’effort budgétaire consenti mérite d’être salué, les transports, avec le ferroviaire pour fil d’Ariane, ne doivent plus rester à quai. (Sourires.)
Le ferroviaire a longtemps été source d’instabilité dans l’action du Gouvernement : priorité fut donnée une année au train du quotidien, l’année suivante à la grande vitesse, l’année d’après aux petites lignes… Après des années sans cap, un début timide de stabilité semble se dessiner pour 2024.
Je dis « timide », car nous demeurons malheureusement dans un léger brouillard, qui entoure tant le financement du plan de 100 milliards d’euros annoncé par la Première ministre que celui des Serm.
Lassés d’attendre, nous vous donnons rendez-vous en juin 2024, via une demande de rapport, pour connaître enfin le montant véritable de la participation de l’État.
Il faut agir, il faut planifier, il faut flécher des ressources pérennes : TVA à 5,5 %, enveloppe supplémentaire en faveur de la modernisation, soutien aux wagons isolés, voilà des mesures qui nous permettront de sortir notre réseau de la paupérisation et de revoir enfin à la hausse le contrat de performance entre l’État et SNCF Réseau.
Pour ce qui est du transport fluvial, qui reste trop sous-exploité, nous devons doper ses capacités, en lien avec la cérémonie d’ouverture des jeux Olympiques et la reprise des circulations dans les Hauts-de-France.
Concernant enfin ces secteurs fortement concurrentiels que sont les secteurs maritime et portuaire, je plaide pour que nous les rendions encore plus compétitifs et plus vertueux au niveau environnemental qu’ils ne le sont déjà.
Agir sur les mobilités, c’est proposer une diversité de solutions dans tous les secteurs ; telle est l’ambition portée par notre commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Didier Mandelli, en remplacement de M. Guillaume Chevrollier, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, je vous prie d’excuser l’absence de mon collègue Guillaume Chevrollier, dont je me fais le porte-parole.
Comme viennent de l’indiquer les rapporteurs spéciaux, la trajectoire budgétaire en faveur de l’environnement est plutôt encourageante : le doublement des crédits consacrés à la biodiversité permettra d’impulser la nouvelle stratégie nationale pour 2030. Formons le vœu que celle-ci ne se solde pas, comme les précédentes, par un échec.
Le relèvement du plafond mordant des agences de l’eau fait présager une politique en la matière mieux outillée pour relever les nouveaux défis, guidée par les objectifs de sobriété et de reconquête de la qualité de la ressource.
Je n’apprends cependant à personne dans cet hémicycle que les mesures budgétaires inscrites dans le PLF ne constituent que des impulsions et ne garantissent pas à elles seules le succès des politiques publiques. Les enjeux des politiques environnementales sont colossaux ; pareils défis ne sauraient être relevés par le seul biais de moyens budgétaires nouveaux, aussi ambitieux soient-ils.
Au-delà de la question des moyens se pose, avec une acuité grandissante, celle de la cohérence des politiques environnementales : les efforts affichés au sein de cette mission ne doivent pas être contrecarrés par des mesures aux effets contraires. Parfois, ce que fait la main budgétaire de l’État peut être neutralisé par ce que fait sa main fiscale… Cet impératif de cohérence doit désormais irriguer l’ensemble des politiques publiques sectorielles.
En outre, en matière de préservation et de restauration de la biodiversité, l’État n’est qu’un acteur parmi d’autres et le rôle des collectivités territoriales doit être rappelé avec force. Celles-ci doivent être mieux associées aux politiques afférentes, car elles sont les véritables moteurs des transitions : l’action locale est déterminante pour la biodiversité, bien plus encore que pour le climat.
À titre d’exemple, je souhaite évoquer le pacte en faveur de la haie et l’objectif qui le sous-tend de restaurer 50 000 kilomètres de linéaire de haies d’ici à 2030.
La préservation et le développement de ces véritables « tours de Babel écologiques » contribuent en effet à améliorer les services écosystémiques rendus par les trames bocagères – séquestration de carbone, coupe-vent, gestion des flux hydriques, préservation des prairies de pâturage. Telles sont les raisons pour lesquelles j’appelle de mes vœux une stratégie ambitieuse et cohérente qui associe les agriculteurs ainsi que les gestionnaires en valorisant économiquement l’entretien des haies.
Je conclurai mon intervention en évoquant la politique de l’eau.
Au fil des années, la centralité des agences de l’eau s’est affirmée. De fait, leurs interventions territoriales produisent de puissants effets de levier.
Le rehaussement progressif du plafond mordant des recettes était un prérequis s’agissant de relever des défis hydriques d’ampleur inédite et d’assumer des missions qui s’étendent désormais à la défense de la biodiversité, sans compter que les agences doivent garantir en même temps la disponibilité d’une eau de qualité en quantité, objectif d’autant plus complexe à atteindre que des pressions croissantes s’exercent sur la ressource.
On le sait désormais, la ressource en eau peut venir à manquer dans notre pays ; la réforme des redevances devra par conséquent faire l’objet d’une réflexion mieux préparée et d’une concertation avec les acteurs, afin de favoriser le consentement à payer. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Fabien Genet, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, le rapport pour avis que j’ai présenté à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable porte sur les crédits relatifs à la transition énergétique et au climat.
Comme à l’accoutumée, ce travail s’est concentré sur trois thèmes : le verdissement des finances publiques, le développement des énergies renouvelables et la rénovation énergétique des bâtiments.
Concernant le verdissement des finances publiques, notre commission a estimé qu’il était urgent de mieux outiller et de mieux accompagner les collectivités territoriales, qui font face à un mur d’investissements verts à réaliser. Si le « budget vert » constitue à cet égard un outil pertinent pour les élus locaux, sa généralisation, voulue par l’Assemblée nationale, pourrait, parce qu’elle est prématurée, se révéler contre-productive.
Tel est l’avis, du reste, des associations environnementales que j’ai entendues. Avec mes collègues Guillaume Chevrollier et Pascal Martin, nous vous proposerons donc, mes chers collègues, d’adopter un amendement tendant à rendre facultative, du moins pour l’instant, l’élaboration de ce budget vert.
Notre commission a également souhaité se saisir de l’occasion offerte par cet examen budgétaire pour prolonger les efforts engagés au travers de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables promulguée en 2023. Aussi a-t-elle adopté plusieurs amendements tendant à accélérer le déploiement des capacités de production photovoltaïque, à renforcer les moyens mobilisés en faveur du développement de la chaleur et du froid renouvelables et à faire bénéficier les territoires des retombées économiques des projets.
Le Sénat a d’ores et déjà retenu certaines de nos propositions : extension de l’éco-PTZ à l’autoconsommation ; instauration d’un taux de TVA réduit à 5,5 % pour les réseaux de froid ; suppression de l’article qui prévoyait une exonération de taxe foncière sur les éoliennes.
Sur notre suggestion, le Sénat a également accru les recettes budgétaires de 400 millions d’euros grâce au relèvement du taux de la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité. Mes chers collègues, la commission vous proposera aujourd’hui de prolonger cette dynamique et de profiter des marges financières ainsi dégagées en portant les moyens du fonds Chaleur de 820 millions à 1 milliard d’euros, montant cohérent avec celui qui est proposé dans le récent rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique.
Nous vous proposerons également de créer un fonds de garantie doté de 50 millions d’euros géré par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) pour encourager la valorisation de la chaleur fatale. Ce faisant, nous relayons une recommandation faite par le secrétariat général à la planification écologique.
Concernant la rénovation énergétique des bâtiments, nous constatons que la hausse annoncée des crédits découle pour partie d’une habile distorsion de périmètre.
Cela étant, la refonte de MaPrimeRénov’ constitue un motif de satisfaction ; mais des inquiétudes persistent. Il est par exemple à craindre que le nombre d’« accompagnateurs Rénov’ » disponibles sur le terrain soit insuffisant, ce qui pourrait entraver le déploiement des aides.
Enfin, afin de soutenir plus massivement la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités territoriales, nous vous proposerons un amendement visant à accroître les moyens du fonds vert de 100 millions d’euros.
Sous réserve de l’adoption de ces amendements, la commission émet un avis favorable sur les crédits relatifs à la transition énergétique et au climat inscrits dans le projet de loi de finances pour 2024. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pascal Martin, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, compte tenu de la trajectoire de hausse que décrivent les crédits de ce PLF 2024 relatifs à la prévention des risques, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur leur adoption.
Je note ainsi avec satisfaction l’augmentation des crédits consacrés à la prévention des risques, ainsi que la hausse des effectifs du pôle ministériel de la transition écologique, après une stabilisation l’année dernière et une diminution les années précédentes.
Je souhaite toutefois appeler votre attention sur un problème majeur pour les effectifs de ce pôle, à savoir l’attractivité des postes. Comment recruter des ingénieurs dans des secteurs particulièrement compétitifs ?
Le problème est particulièrement marqué pour l’inspection des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), le nombre important de vacances de poste s’y expliquant notamment par les écarts de rémunération. En début de carrière, à poste équivalent, un ingénieur du secteur privé a un salaire supérieur de 42 % à celui d’un inspecteur de l’ICPE ; en fin de carrière, cet écart atteint 220 %.
Dans le secteur du nucléaire, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) rencontrent les mêmes difficultés d’attractivité. La relance du nucléaire crée une pénurie de compétences dans le secteur, rendant le recrutement d’ingénieurs spécialisés difficile. En 2023, 91 postes sont ainsi vacants au sein de l’IRSN.
S’il n’existe pas de réponse facile à ce problème d’attractivité, la révision du cadre de rémunération, celle du parcours de carrière ou la refonte de l’offre de formation sont autant de pistes qui peuvent être esquissées pour attirer les ingénieurs.
Il y a là, en tout état de cause, un point d’attention majeur.
Je conclurai en indiquant les trois orientations que la commission considère comme prioritaires pour 2024 dans le domaine de la prévention des risques.
Il est indispensable, premièrement, d’améliorer les plans de prévention des risques technologiques (PPRT), dont le bilan est aujourd’hui mitigé. Faute de financements adéquats et par manque d’information, 75 % des logements privés exposés n’ont pas fait l’objet de travaux de mise en sécurité, et 62 % seulement des mesures foncières d’expropriation ou de délaissement ont été exécutées.
Le résultat de ces bilans, hétérogène selon les territoires, dépend du volontarisme des services déconcentrés de l’État et de la volonté politique des collectivités territoriales concernées par ces risques technologiques.
Je me félicite de l’adoption par le Sénat, en séance publique, vendredi dernier, d’un amendement de la commission tendant à relever le plafond du crédit d’impôt relatif aux travaux prescrits par un PPRT ; ainsi le dispositif est-il renforcé.
La deuxième orientation sur laquelle je souhaite insister a trait au renforcement des moyens de l’ASN et de l’IRSN : il est d’autant plus nécessaire que 2024 sera une année charnière pour la relance du nucléaire en France.
Dans l’avis que j’ai rendu en janvier dernier au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur le projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, j’insistais sur la nécessité que la relance s’accompagne d’un renforcement des moyens attribués à la sûreté nucléaire. Je défendrai tout à l’heure un amendement en ce sens.
Nous avons enfin souhaité – c’est notre troisième orientation – marquer l’importance de la prévention du risque inondation après la catastrophe météorologique survenue cette année, notamment dans le département du Pas-de-Calais. S’agissant du premier risque naturel auquel la France est exposée, il convient de ne pas tergiverser et de tirer toutes les leçons de cette crise pour mieux prévenir les inondations, mes chers collègues.
Une réflexion devra être engagée, à laquelle la commission prendra toute sa part. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’an dernier, le groupe Les Indépendants avait rappelé quels enjeux majeurs soulève la mission « Écologie ». Nous avions en effet été confrontés à de nombreux événements climatiques qui n’étaient qu’une énième répétition de ce que nous vivons désormais annuellement.
La fréquence des aléas d’ampleur s’accélère à tel point que l’on peut se demander s’il s’agit toujours d’aléas. En tout état de cause, cela justifie que notre budget se verdisse.
La France, aux côtés de ses alliés européens, s’est fixé des objectifs ambitieux de transition. Si nous pouvons en être fiers, il faut qu’une fois la décision prise vienne le temps de l’action. Notre pays est sur la bonne voie, mais il est surtout nécessaire que nous nous donnions les moyens de nos ambitions, ce qui prescrit à mes yeux deux impératifs.
Premier impératif : être organisé.
Cela passe essentiellement par la cohérence, particulièrement dans les choix que nous faisons, c’est-à-dire dans le sens que nous donnons à nos politiques publiques. Comme nous n’opposons pas écologie et économie, nous devons faire converger nos stratégies, mes chers collègues ; cela suppose de l’engagement.
Je tiens à cet égard à saluer la planification écologique proposée par le Gouvernement, et notamment son volet territorial.
Comme vous le savez, mes chers collègues, je suis attachée au fait de donner à nos élus locaux les marges de manœuvre dont ils ont besoin. Faisons-leur confiance : ils connaissent les spécificités de leur territoire ainsi que les enjeux auxquels la Nation doit faire face. Ils sont la source des solutions pragmatiques et, partant, des solutions efficaces.
Second impératif : affecter à ces politiques des moyens substantiels.
Je plaide régulièrement pour que les fonds privés soient eux aussi au rendez-vous de nos transitions ; vous connaissez, mes chers collègues, mon engagement en la matière. Je vais poursuivre ce combat, car l’accélération significative desdites transitions exige que de tels fonds soient mobilisés massivement. Je pense par exemple à l’hydrogène, au stockage, aux smart grids ou encore au gaz renouvelable.
Comme je le disais, le budget de l’État se verdit et les crédits inscrits sont substantiels. Je note et je salue les efforts particuliers portant sur la mission « Écologie ». J’indique d’ailleurs sans attendre que le groupe Les Indépendants en votera les crédits.
Avoir les moyens, c’est bien. Les affecter au bon endroit, au bon moment et les déployer correctement, c’est encore mieux.
C’est sur ces points précis, qui sont souvent critiques, que nous serons le plus attentifs. J’ai choisi d’évoquer deux secteurs clés, pour lesquels la décarbonation est cruciale.
Le premier, celui de l’énergie, est évidemment essentiel à notre réindustrialisation.
Nous avons la chance, en France, de produire une énergie bas-carbone. Je me félicite que les crédits soient relevés sur le volet prévention des risques du nucléaire. La France est à la pointe dans ce domaine, mais le dérèglement climatique nous oblige à aller plus vite encore, et plus loin, s’agissant d’une filière qui est précisément en train d’être relancée.
Les investissements seront colossaux. Ils devront être extrêmement bien pensés. De fait, tout retard supplémentaire serait lourd de conséquences pour notre indépendance, au-delà même de la question énergétique. C’est pourquoi je renouvelle mon soutien à la construction de deux réacteurs pressurisés européens (EPR) supplémentaires à Nogent-sur-Seine, ainsi qu’à l’ouverture d’un pôle majeur de formations sectorielles dédiées.
Les énergies renouvelables (EnR) seront également un pilier fondamental de la décarbonation de la production d’énergie, notamment dans une logique de circuit court production-consommation.
La nécessité que nos efforts financiers se tournent vers des produits propres et européens a fait l’objet – enfin – d’une prise de conscience, que je salue. Dépenser nos deniers publics à alimenter d’autres économies qui ne nous sont pas favorables n’est souhaitable ni au regard des impôts que paient nos concitoyens ni du point de vue de notre balance commerciale.
Le constat est exactement le même dans le secteur des mobilités : la décarbonation de nos modes de transports constituera un pas franchi dans la lutte contre le dérèglement climatique. En l’espèce, modernisation et innovation seront les maîtres mots.
Les efforts consentis en faveur des réseaux, notamment le réseau ferroviaire, vont dans le bon sens ; il faut les accentuer. Je soutiendrai d’ailleurs un amendement tendant à augmenter les moyens alloués à la modernisation du réseau.
J’estime aussi que l’appui apporté au verdissement des flottes d’autobus relève du bon sens. Je défendrai à cet égard un amendement visant à augmenter le montant de la prime au rétrofit, qui est un bon moyen de réduire l’impact financier de la transition et d’y insuffler de la circularité.
Je souhaite enfin faire un point rapide sur le fonds vert. Si l’idée est excellente, l’exécution concrète des crédits afférents mérite d’être améliorée. Pour pertinent que soit l’outil, l’ingénierie reste nécessaire à sa pleine réussite.
La boussole à laquelle se fie le groupe Les Indépendants est simple : il faut des moyens suffisants et bien déployés.
Nous voterons les crédits de cette mission. (Applaudissements au banc des commissions.)