Mme Nathalie Delattre. Le « prix hébergement » des Ehpad est fixé différemment selon que les places sont habilitées à l’aide sociale ou non.
Pour les places habilitées à l’aide sociale, c’est le conseil départemental qui fixe le montant du prix hébergement. Pour les places non habilitées à l’aide sociale, c’est le gestionnaire de l’établissement qui fixe librement le prix hébergement.
Dans les établissements les plus onéreux, ce tarif peut atteindre plusieurs milliers d’euros. C’est sur ce poste que se fait l’essentiel des profits des résidences privées.
À la suite de l’affaire Orpea, en 2022, certaines organisations du secteur avaient suggéré de fixer une redevance dont devraient s’acquitter les établissements non habilités à l’aide sociale. L’idée était de permettre à ces établissements de pratiquer des tarifs d’hébergement dits libres tout en réinjectant les sommes collectées via la redevance dans les établissements habilités à l’aide sociale, afin de pérenniser le modèle de ces derniers.
Dans cet esprit, cet amendement vise à instaurer une redevance pour les établissements non habilités à l’aide sociale qui souhaitent pratiquer des tarifs d’hébergement dits libres. Le produit de cette redevance serait affecté à la branche autonomie.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 633 rectifié ter.
M. Michel Canévet. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour présenter l’amendement n° 669 rectifié.
Mme Anne-Sophie Romagny. Défendu !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 798 rectifié bis.
M. Laurent Burgoa. Défendu !
Mme Raymonde Poncet Monge. Il y a un problème, mon cher collègue ?
Vous avez raison, monsieur le ministre, taxer n’est pas la solution.
En 2023, l’arrêté annuel a prévu un taux maximal d’évolution des prix de 5,14 % pour les structures du secteur privé lucratif, contre 3 % pour les établissements habilités à l’aide sociale.
À la différence des établissements non habilités, les établissements ayant une habilitation totale ou majoritaire ne peuvent pratiquer des tarifs différents de ceux qui sont fixés par le conseil départemental.
En offrant aux établissements non habilités à l’aide sociale la possibilité d’augmenter leurs prix de 5,14 %, monsieur le ministre, vous créez un différentiel au détriment du public et du privé non lucratif qui équivaut à une taxe ; et, en l’espèce, taxer est en effet un problème !
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 888 rectifié.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il a été très bien défendu par Mme Poncet Monge.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 483 rectifié bis, 633 rectifié ter, 669 rectifié, 798 rectifié bis et 888 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 44 rectifié, présenté par Mmes Guidez et Vermeillet, MM. Henno et Vanlerenberghe, Mme Jacquemet, MM. Kern et Canévet, Mmes Billon et Gatel, MM. J.M. Arnaud, Longeot, Duffourg, Guerriau, Houpert et Panunzi, Mmes Lermytte et Morin-Desailly, MM. Gremillet et Bleunven et Mme Malet, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le quatrième alinéa de l’article L. 313-1 du code de la construction et de l’habitation, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cadre de l’aide à l’acquisition à la propriété de la résidence principale, en complément des deux modalités existantes, prévues aux premiers et seconds alinéas et totalement exonérées de charges sociales et fiscales, l’employeur peut prendre en charge tout ou partie des intérêts du coût du crédit immobilier contracté par le salarié.
« Dans les conditions prévues à l’alinéa précédent, sont exonérées de cotisations sociales, hors contribution sociale généralisée, contribution pour le remboursement de la dette sociale et forfait à 20 %, les sommes versées par les entreprises, chaque mois, pour la prise en charge d’une partie ou de la totalité des intérêts du coût du crédit immobilier contracté par le salarié.
« Ce dispositif vient en complément de la participation des employeurs à l’effort de construction (Peec), entendu au sens des règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale acquitté par les entreprises au taux de 0,45 %.
« Cette exonération est instaurée pour une durée d’un an, au titre de l’exercice budgétaire 2024.
« Ce dispositif, sur une base volontaire, est plafonné à 5 % du nombre de salariés en contrat à durée indéterminée et dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article. »
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la réduction de 16 % à 14 % du plafond annuel de la sécurité sociale, correspondant au montant maximum de l’abondement versé par l’employeur au plan d’épargne pour la retraite collectif et exonéré de cotisations, au sens des règles prévues au chapitre Ier du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Face à la crise du logement, il est plus que jamais essentiel de favoriser l’accession à la propriété de tous les ménages, particulièrement des classes moyennes, notamment dans les zones tendues.
Dans cette perspective, plusieurs entreprises – vingt-deux à ce jour – accompagnent leurs salariés en prenant en charge tout ou partie du coût des intérêts du crédit immobilier contracté par ces derniers, la prise en charge moyenne annuelle s’élevant à 1 727 euros.
Cette aide, considérée jusqu’à présent comme un avantage en nature fourni par l’employeur, renforce l’apport personnel du salarié, ce qui améliore sa capacité d’emprunt et l’aide à respecter les normes définies par le Haut Conseil de stabilité financière, à savoir un taux d’endettement maximum de 35 % et une limitation à vingt-cinq ans de la durée des prêts.
Ce dispositif pour le logement des salariés vient en compléter d’autres comme la participation des employeurs à l’effort de construction (Peec) ou encore, par exemple, l’épargne salariale.
Toutefois, l’absence d’exonération de charges sociales pour l’employeur désireux de participer à l’effort de logement de ses salariés est un obstacle à la généralisation du dispositif. Les salariés se voient contraints, dans les faits, de mobiliser leur épargne retraite.
Nous proposons de préciser que cet abondement de l’employeur reste assujetti, comme l’est le plan d’épargne retraite (PER) collectif, à la CSG sur les revenus d’activité et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), ainsi qu’au forfait social au taux de 20 %.
Les entreprises privées employant 50 salariés ou plus versent déjà une taxe de participation à l’effort de construction qui représente 0,45 % de leur masse salariale. Celles d’entre elles qui proposent un dispositif complémentaire sous forme de prêt subventionné doivent pouvoir être exonérées de charges sociales et fiscales comme le sont les prêts à l’accession distribués par Action Logement.
Le présent amendement vise donc à établir, sur la base du volontariat et pour une durée d’un an, du 1er janvier au 31 décembre 2024, une phase d’expérimentation durant laquelle les entreprises bénéficieront du gel des cotisations sociales, hors CSG, CRDS et forfait social à 20 %, sur les sommes versées chaque mois pour la prise en charge d’une partie ou de la totalité du coût des intérêts du crédit immobilier du salarié.
Il s’agirait donc d’un dispositif collectif, fléché sur le seul achat de la résidence principale et sans plafond de ressources, complémentaire des dispositifs existants.
Selon les prévisions de Sofiap, une telle mesure rapporterait à l’État 27 millions d’euros de recettes annuelles, tout en permettant à près de 80 000 ménages d’être soutenus dans leur démarche d’accession à la propriété pendant toute la durée de l’expérimentation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vous remercie, ma chère collègue, d’évoquer la question du logement. Si les médias y reviennent de manière lancinante depuis quelque temps, si tous les élus locaux nous alertent, c’est qu’il y a en la matière un sérieux problème.
Est-ce pour autant à la sécurité sociale qu’il revient de soutenir ce secteur ?
Mes chers collègues, je vous encourage à ne pas créer de nouvelle niche sociale, car nous en avons déjà créé beaucoup.
Par ailleurs, j’entends votre calcul : ce dispositif pourrait rapporter à l’État de nouvelles recettes. Toutefois, la durée de l’exonération proposée – un an seulement – me paraît trop courte pour constituer un véritable levier de lutte contre la crise du logement. (Mme Jocelyne Guidez proteste.)
Il faut trouver d’autres solutions, ma chère collègue : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. C’est un montage assez complexe qui est proposé : on créerait une exonération sur les cotisations sociales pour permettre à l’employeur de prendre en charge les intérêts d’un prêt souscrit par le salarié.
Je partage l’avis de Mme la rapporteure générale : il n’est pas souhaitable de créer une nouvelle exonération de cotisations sociales. Nous avons besoin de ces prélèvements pour financer la sécurité sociale.
En outre, ce dispositif reviendrait à impliquer l’employeur dans la décision d’acquisition du salarié, donc à créer une nouvelle relation entre l’un et l’autre. Or il me semble que l’employeur n’a pas à connaître d’une telle décision. S’il veut aider le salarié dans son acte d’acquisition, il y a plus simple : la prime de partage de la valeur, que la majorité a pérennisée.
Mme Audrey Linkenheld. Et la taxation du capital !
Mme Jocelyne Guidez. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 44 rectifié est retiré.
L’amendement n° 911, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le taux de cotisation patronale versée au titre du financement de l’assurance vieillesse est augmenté d’un point.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement a pour objet d’augmenter d’un point le taux des cotisations d’assurance vieillesse versées par l’employeur.
À l’occasion de la discussion de la réforme reculant l’âge légal de départ à la retraite, nous n’avions pas pu débattre, avec la majorité sénatoriale, de l’autre option que représente l’augmentation des taux de cotisation pour la branche vieillesse, et en particulier du taux des cotisations qui sont dues par les employeurs.
M. Bruno Retailleau – je le salue – avait utilisé l’article 38 du règlement pour faire tomber 1 100 amendements, y compris celui que nous proposions à cet effet, et réécrire l’article 7 du projet de loi, qui permet aux salariés de travailler deux années de plus…
Or, à l’époque, 59 % des Français – pas plus de gauche que de droite – étaient prêts à cotiser davantage plutôt que de travailler plus longtemps, ce qui témoigne d’un écart de vision entre le Gouvernement et les salariés à l’égard des cotisations sociales.
Je vous propose un petit calcul : ainsi ferons-nous pour une fois de l’économie plutôt que de l’idéologie ! (M. le ministre délégué s’en amuse.)
Imaginons, pour une rémunération équivalente au salaire moyen, une hausse des cotisations de 11 euros par mois en 2024, augmentant progressivement jusqu’à atteindre 28 euros mensuels en 2027 : au total, 12 milliards d’euros de déficit seraient ainsi résorbés !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ça, c’est de l’économie !
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, vous répétez régulièrement, comme le Gouvernement l’a fait au moment de la réforme des retraites, qu’il ne faut pas augmenter le coût du travail. La priorité – vous aimez le dire le cœur sur la main –, c’est l’emploi !
Résultat : vous avez volé deux de leurs meilleures années de retraite aux salariés. Vous n’avez pas augmenté le fameux coût du travail ; cela n’empêche pas le déficit du système de retraite d’atteindre 4 milliards d’euros, excusez du peu. En outre, 60 000 emplois ont été supprimés.
Cet amendement vise donc, dans un esprit de responsabilité, à augmenter d’un point le taux de cotisation patronale de la branche vieillesse.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Monsieur Savoldelli, j’adore votre démonstration : elle a presque un côté magique… (Sourires.)
Cela étant, il est habituel que les salariés que je rencontre me demandent comment il est possible que les cotisations inscrites sur leur bulletin de paie, salariales comme patronales, soient si nombreuses : si l’on additionne celles qu’ils règlent en tant que salariés et celles qui sont payées par l’entreprise, cela fait en effet beaucoup, d’autant que cette part va croissant. Ils n’en sont pas dupes, même si ces cotisations – ils le comprennent – leur permettent d’être couverts contre différents risques.
Si l’on continue d’augmenter la part des cotisations, on renforcera cette impression qu’ont beaucoup de salariés : c’est de l’argent qui ne va pas directement dans leur poche. (Mme Monique Lubin proteste.)
Par ailleurs, le volume des cotisations est déjà si énorme pour les entreprises que l’accroître encore conduirait probablement certaines d’entre elles à ne plus pouvoir embaucher ou à embaucher moins. Elles pourraient peut-être d’ores et déjà recruter davantage, d’ailleurs, si elles avaient moins de cotisations à payer…
Surtout, une telle augmentation risque de donner à certains l’idée d’aller s’installer ailleurs, où les cotisations sont beaucoup moins importantes. (Protestations sur des travées du groupe SER.)
Mme Monique Lubin. C’est trop facile !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Certes, l’argument est facile et vous me direz que nous l’invoquons régulièrement, mais c’est ce que me disent les chefs d’entreprise.
L’augmentation des cotisations peut aussi faire perdre le goût de l’entrepreneuriat. En effet, nombreux sont ceux qui, au moment de monter une entreprise et de remplir leur déclaration sociale nominative, ont pensé renoncer devant l’importance des sommes à payer.
Les entreprises aussi connaissent des moments difficiles ; ainsi de la période d’inflation que nous traversons. Les crises, elles les subissent.
M. Christian Redon-Sarrazy. Et les salariés ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Votre solution, mon cher collègue – toujours plus de cotisations ! –, a des airs de miracle ; mais elle n’est qu’un mirage.
Elle n’est en tout cas pas la bonne, me semble-t-il – nous pourrons en débattre, aujourd’hui comme demain.
J’adore votre voix radiophonique et votre capacité à emporter la conviction de vos auditeurs ! (Sourires. – Mme Silvana Silvani fait semblant de jouer du violon.) Je suis néanmoins au regret d’émettre, au nom de la commission, un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Monsieur le sénateur, c’est en effet un choc fiscal que vous nous proposez : 8 milliards d’euros d’alourdissement du coût du travail.
Nous faisons et nous défendons tout l’inverse, y compris dans le projet de loi de finances dont nous aurons prochainement à débattre : nous continuons à baisser les impôts de production, non pour des raisons idéologiques, mais parce que nous voulons atteindre le plein emploi.
Je vous renvoie à un chiffre que vous avez cité dans votre intervention : 8 milliards d’euros d’augmentation du coût du travail, ce sont 60 000 emplois détruits.
Avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je remercie le groupe communiste d’avoir repris, pour partie, l’amendement que j’avais déposé lors de la discussion du projet de loi sur les retraites – je me contentais d’une hausse d’un demi-point. (M. Pascal Savoldelli lève le pouce.)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. On nous oppose qu’une telle hausse alourdirait le prix du travail. Reste que, pour le moment, en repoussant l’âge de départ à la retraite, nous n’avons fait qu’alourdir la charge qui pèse sur les salariés.
Il s’agit donc d’une mesure d’équilibre : il me semble nécessaire aujourd’hui, dans ce pays, d’envoyer un signal d’apaisement en prenant des mesures d’apaisement.
Mme Émilienne Poumirol. Tout à fait.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. On a demandé aux entreprises de faire un effort en matière d’emploi des seniors ; j’attends toujours !
Mmes Cathy Apourceau-Poly, Audrey Linkenheld et Monique Lubin. Eh oui !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Lors des dernières négociations sur l’assurance chômage, le patronat a d’ailleurs repoussé la discussion sur les seniors.
L’effort que doivent faire les entreprises, car elles doivent en faire un, est modeste. J’avais donné des chiffres : pour une petite entreprise de cinq salariés qui se trouvait être celle du vice-président d’une union patronale, la mesure représentait 1 250 euros, au maximum 1 500 euros… par an !
Mme Émilienne Poumirol. Par an !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Ce n’est rien du tout ! Vous dites qu’une telle augmentation détruirait des emplois, madame la rapporteure générale, monsieur le ministre, mais je demande à voir et je suis même convaincu du contraire.
Mme Audrey Linkenheld. Et ce n’est pas idéologique !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Sans doute me montrerez-vous des études du Conseil d’analyse économique faisant état d’un risque de destruction d’emplois. Je demande à voir ! Je n’y crois pas le moins du monde.
D’autres facteurs entrent en ligne de compte, à commencer par la confiance des salariés. L’entreprise est une communauté : si les salariés n’ont plus confiance dans l’avenir, ils travaillent moins bien. On le voit bien : la productivité a baissé. Les conditions de travail jouent énormément également.
Je suggère que l’on prenne une autre disposition dans le même sens. En discussion générale, j’ai proposé un swap entre les cotisations de retraite complémentaire que prennent en charge les employeurs et leurs cotisations de retraite de base.
Madame la rapporteure générale, monsieur le ministre, j’espère que vous saurez vous montrer favorables à cette proposition : la solution pourrait venir de là. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Il n’y a rien de magique dans cet amendement, comme il n’y a rien de magique, heureusement, dans les dispositions que nous proposons de substituer aux mesures défendues par le Gouvernement et par la droite sénatoriale.
Il n’y a pas une unique vérité absolue, monsieur le ministre ! Prétendre le contraire serait remettre en cause la légitimité des grands débats qui ont opposé entre eux les économistes ces dernières années.
Quant à la question du coût du travail et de son effet sur les créations ou destructions d’emplois, elle ne se résume pas – heureusement ! – à celle du montant des cotisations sociales.
Madame la rapporteure générale, je vous ai bien écoutée. Au-delà de nos accords ou de nos désaccords, ne tombons pas dans l’écueil qui consisterait à satisfaire et à encourager un individualisme déjà bien développé dans notre pays.
Nombreux sont ceux, plus encore dans cette période de crise, qui voudraient tout, tout de suite, maintenant.
Comme nous avons oublié de rappeler que les cotisations ne sont pas des charges, mais du salaire différé, nous avons laissé petit à petit s’installer l’idée, dans la tête des salariés, que cet argent leur était pris et qu’ils n’en bénéficieraient pas. (M. le président de la commission approuve.)
Madame la rapporteure générale, vous avez livré le témoignage de certains salariés ; mais on peut aussi rencontrer des salariés qui n’ont pas d’enfants, paient des impôts et se demandent pourquoi ils ont à financer le système scolaire… (Mme la rapporteure générale acquiesce.) Et nous pourrions raisonner ainsi pour toute une série de financements publics…
Tâchons de conserver, même dans la contradiction, notre capacité à faire communauté.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Madame la rapporteure générale, vous l’avez dit, les salariés ne sont pas dupes.
Il est nécessaire de rappeler que les cotisations sociales ne sont pas des charges : elles apportent de la protection et du salaire différé – on a tendance à l’oublier.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes d’accord.
Mme Monique Lubin. Quand on le leur explique bien, les salariés le comprennent parfaitement et ils adhèrent à ce système.
Je remercie notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe pour le courage de son exposé : ce n’est pas toujours aux mêmes de faire des efforts.
À condition que les efforts soient partagés, donc, je suis certaine que les salariés accepteront une légère augmentation de leurs cotisations, laquelle, rapportée à la masse des cotisants, représentera une manne considérable.
Il faut aussi que les employeurs soient mis à contribution. On me dit qu’ils cesseraient immédiatement de recruter ; mais qu’avons-nous tous constaté ces dernières années, au sortir de la crise du covid-19 ? Les employeurs se plaignaient beaucoup de la pénurie de main-d’œuvre, à la suite de quoi, miraculeusement, des emplois qui étaient fort mal rémunérés ont été soudain revalorisés. Il a fallu augmenter les salaires – et, par voie de conséquence, les employeurs ont cotisé davantage – pour attirer des salariés bien formés et faire tourner les entreprises.
L’entreprise est une communauté. Pour que l’économie fonctionne, il faut que les salariés soient bien traités et bien payés et que tous cotisent, employeurs comme employés.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Mme la rapporteure générale, évoque un choc sur la feuille de paie des salariés ; M. le ministre parle d’un choc fiscal.
Mais le principal choc, pour les salariés, c’est de devoir travailler deux années de plus ! Allez à leur rencontre et vous verrez que c’est ce que la majorité d’entre eux ont compris.
Par ailleurs, nous tirerons tous les enseignements de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). La conclusion finira peut-être même, de proche en proche, par s’imposer à l’ensemble de l’hémicycle : c’est une erreur qui a été faite.
Si notre collègue Vanlerenberghe souhaite sous-amender notre amendement afin de n’augmenter le taux de cotisation patronale que de 0,5 point, je l’invite à le faire. (Sourires sur les travées du groupe CRCE-K.)
Cela fera un demi-choc fiscal pour M. le ministre, qui pourra tout de même passer une nuit apaisante (M. le ministre délégué s’en amuse.) : nous ferions entrer 6 milliards d’euros dans les caisses publiques !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Plutôt 4 milliards…
M. Pascal Savoldelli. Notre groupe voterait volontiers un tel sous-amendement ; et nous ne serions pas seuls.
Mme Émilienne Poumirol. Nous le voterions également !
M. Pascal Savoldelli. Voilà une proposition constructive, formulée dans un esprit de responsabilité. Il n’y a là ni magie ni radiophonie ! (Sourires.)
Derrière cette question, l’enjeu est celui du financement de la sécurité sociale.
En fait de choc, je garde en mémoire le moment où, à l’occasion de la réforme des retraites, on a dégainé des articles du règlement pour tuer le débat parlementaire.
M. Bruno Retailleau. Je plaide coupable… (Sourires.)
M. Pascal Savoldelli. L’amendement dont nous sommes en train de parler comptait parmi les 1 100 amendements dont le sort a été réglé en moins de deux minutes avant réécriture de l’article 7 ; et ce dernier, qui a reculé de deux ans l’âge de départ à la retraite, a été et reste un choc pour les salariés.
Je mentionne pour conclure un trou dans la raquette parmi les trous dans la raquette : je veux parler de l’emploi des seniors. Allez rencontrer des seniors, madame la rapporteure générale : ils vous diront les énormes difficultés qu’ils rencontrent. (Marques d’approbation aux bancs des ministres et de la commission.)
Voici donc une proposition constructive, mes chers collègues : votons notre amendement sous-amendé en optant pour une augmentation du taux de 0,5 point. Nous le ferons pour notre part avec enthousiasme.
M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour explication de vote.
M. Alain Joyandet. Mon cher collègue Vanlerenberghe, vous dites que 1 850 euros par an pour une petite entreprise de cinq salariés, ce n’est rien.
Or, pour payer ces 1 850 euros de cotisations, une entreprise artisanale qui dégage un bénéfice égal à 5 % de son chiffre d’affaires devra réaliser 37 000 euros de chiffre d’affaires.
Allez dire à un artisan qui emploie cinq salariés qu’il doit faire 37 000 euros de chiffre d’affaires et tâcher, s’il le peut, de dégager un bénéfice ! Les petites entreprises n’en peuvent plus… (Mme Monique Lubin proteste.)
Cela ne cesse jamais : chacun a sa petite idée et prétend qu’elle ne coûte pas cher.
Dans ma région, la présidente du conseil régional vient encore d’augmenter les prélèvements fiscaux. « C’est le coût d’un café tous les matins », dit-elle : aucun problème ! Mais faites le calcul à la fin de l’année… Et l’intercommunalité du coin fait pareil, l’État ne se prive pas, etc. (M. le ministre délégué s’exclame.)