Mme Annick Petrus. Cet amendement a pour objet d’offrir une opportunité aux cotisants ultramarins durant seulement deux ans. Il s’agit de leur envoyer un signal en rouvrant une période d’exception permettant de conclure des plans d’apurement des dettes sociales inspirés des plans Irma, appliqués à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, ainsi que des plans dits covid-19.
La possibilité de négocier avec les caisses de recouvrement compétentes des plans d’étalement de la dette de six à soixante mois en fonction des situations permettra de ne pas augmenter le poids de la dette si les cotisants ultramarins s’engagent à régler leurs cotisations courantes tout en résorbant leur passif.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 75 rectifié quater.
Mme Viviane Malet. Cet amendement, identique à celui de ma collègue de Saint-Martin, vise à envoyer un signal clair aux cotisants ultramarins rencontrant des difficultés de paiement de leurs charges sociales.
Largement fragilisées par les mesures de restriction durant la crise du covid, les entreprises ultramarines n’ont pas pu retrouver à brève échéance leur niveau d’activité. En effet, elles ont poursuivi leurs activités dans des conditions ne permettant pas de garantir la rentabilité.
Dès lors, les délais de recours imposés par le cadre de droit commun se révèlent bien trop courts pour leur permettre d’apurer leur passif social dans les meilleures conditions. Ils mériteraient de pouvoir s’étaler sur soixante mois. À défaut, de nombreuses entreprises n’auront pas d’autre choix que de se déclarer en cessation de paiements, ce qui aura des conséquences sur l’emploi et des répercussions inévitables sur les caisses générales de sécurité sociale (CGSS) pour non-paiement de dettes.
Cet amendement a été élaboré avec la Fédération des entreprises des outre-mer (Fedom).
M. le président. La parole est à M. Christopher Szczurek, pour présenter l’amendement n° 996.
M. Christopher Szczurek. Par cet amendement tendant à insérer un article additionnel, nous souhaitons que les employeurs ou les travailleurs indépendants installés dans une collectivité régie par l’article 73 de la Constitution ou à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon puissent continuer à bénéficier du dispositif exceptionnel mis en place par le Gouvernement durant la crise du covid.
Les inévitables mesures mises en place pour tenter de protéger nos compatriotes de la propagation du covid-19 ont fatalement mis en difficulté pour longtemps plusieurs entreprises. Le cadre de droit commun, qui est de nouveau applicable sur ces territoires, ne permet pas l’étalement des dettes sociales au-delà de trente-six mois et maintient les majorations de retard tant que la dette principale n’est pas réglée.
Malheureusement, l’inflation et la hausse brutale des taux d’intérêt ont pris le relais de la crise sanitaire. Le dispositif d’exception nous semble être nécessaire pour que les employeurs ou les travailleurs indépendants puissent garder la tête hors de l’eau.
Sans le maintien de ce dispositif, nous craignons des faillites ou de sérieuses difficultés.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1209.
Mme Monique Lubin. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 1329 rectifié.
M. Bernard Buis. Cet amendement de notre collègue Georges Patient a été élaboré avec la Fédération des entreprises des outre-mer. Il vise à envoyer un signal clair aux cotisants ultramarins rencontrant des difficultés de paiement de leurs charges sociales : le poids de leur dette n’augmentera pas s’ils s’engagent à régler leurs cotisations courantes tout en résorbant leur passif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie nos collègues de défendre les territoires ultramarins. De tels débats reviennent souvent lors de l’examen du PLFSS.
Ces amendements identiques ont pour objet de conclure avec les organismes de recouvrement des plans d’apurement des dettes de cotisations et de contributions sociales.
Je comprends très bien vos inquiétudes pour les entreprises en difficulté. Je sais que l’État et les organismes accompagnent déjà de façon particulière les territoires ultramarins dans ce domaine.
J’entends la différence avec l’Hexagone, aussi je demande au Gouvernement son avis sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Vous proposez de rouvrir pendant deux ans la possibilité de conclure des plans d’apurement sur soixante mois.
Nous avions pris une telle mesure par le passé, pendant la crise sanitaire. Cette dernière était liée – il faut nous le rappeler – à un arrêt total de l’activité. Le dispositif était donc tout à fait exceptionnel. Il a permis de faire face à plus de 6 milliards d’euros de passif social accumulé par les employeurs et par les travailleurs indépendants pendant la crise. Il était nécessaire de prévoir une reprise progressive du remboursement.
Les cotisants des territoires ultramarins ont ainsi bénéficié, au même titre que tous les autres cotisants, de cette politique. D’ailleurs, plus de 76 000 plans leur ont été accordés au deuxième semestre de l’année 2022.
Un calendrier adapté aux outre-mer a été adopté pour reprendre progressivement les actions de recouvrement, avec d’importantes marges de manœuvre pour s’adapter aux situations individuelles et pour tenir compte des difficultés rencontrées par les cotisants.
La reprise des actions de mise en recouvrement, qui avaient été suspendues pendant la crise sanitaire, est très progressive, selon un calendrier adapté en outre-mer.
Nous persévérons dans cette approche, sachant que rien n’interdit à l’organisme contacté par un cotisant qui ne parviendrait pas à respecter le plan d’apurement de lui proposer un nouvel échéancier et qu’en cas de difficulté, il est toujours possible de demander des délais de paiement supplémentaires.
Il importe toutefois de revenir à un cadre normalisé pour éviter le risque d’accumulation d’une dette sociale.
Le cas des cotisants en difficulté – vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs – est considéré avec bienveillance, en particulier dans les territoires ultramarins.
Il serait disproportionné, contre-productif et probablement dangereux pour les cotisants eux-mêmes de pérenniser le cadre que nous avons conçu au plus fort de la crise sanitaire, alors que nous connaissions – je le rappelle – un arrêt total de l’activité.
Nous donnons des consignes à l’ensemble des administrations pour que le nouveau cadre soit mis en place progressivement, pour que les cotisants en difficulté soient accompagnés et que des solutions soient trouvées, mais je suis défavorable à une disposition qui aurait pour effet d’en revenir au dispositif que nous avions instauré en plein cœur de la crise sanitaire.
Nous devons sortir peu à peu des dispositifs exceptionnels, ce qui, encore une fois, n’empêche pas de procéder de manière progressive, en accompagnant avec bienveillance celles et ceux qui, localement, rencontrent des difficultés et en s’assurant qu’ils parviendront à les surmonter à terme.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. J’ai écouté les arguments de M. le ministre, et tout en comprenant les évolutions qu’il appelle de ses vœux, je souhaite apporter mon soutien, non pas en tant que président de la commission, mais à titre personnel, à ces cinq amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Je tiens moi aussi à apporter mon soutien à ces amendements. Je souhaitais du reste cosigner l’un d’entre eux, mais il y a eu un loupé, si bien que mon nom ne figure pas sur la liste des cosignataires.
J’entends bien les explications données par le ministre, mais chacun connaît les difficultés singulières des territoires ultramarins, les conditions économiques et sociales particulièrement dégradées qui sont les leurs, ainsi que les effets de l’éloignement et de la discontinuité territoriale. J’estime donc qu’une aide particulière sera la bienvenue.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Ces amendements largement cosignés sur différentes travées de notre assemblée visaient d’abord à appeler l’attention du Gouvernement sur la situation d’un certain nombre d’entreprises.
Je salue les propos du ministre, qui a indiqué que des instructions avaient été données afin que chaque cas soit apprécié individuellement, ce que les services ne manqueront pas de faire.
Si toutefois ces amendements étaient adoptés, et il est vraisemblable qu’ils le seront, il faudra y voir non pas un drame majeur, monsieur le ministre, mais un appel. Vous avez déjà fourni un début de réponse. Je ne doute pas que la suite de la navette sur ce PLFSS permettra de dissiper les craintes et qu’elle sera peut-être pour vous l’occasion de mettre de nouveaux éléments sur la table.
Quoi qu’il en soit, tel était l’état d’esprit des signataires du groupe RDPI de l’amendement n° 1329 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je soutiens résolument l’amendement n° 75 rectifié quater déposé par Mme Malet, que j’ai du reste cosigné.
Toutes les entreprises, qu’elles soient établies en métropole ou en outre-mer et quelle que soit leur taille, ont connu des difficultés du fait de l’arrêt de l’activité qui est intervenu à compter du 15 mars 2020.
La disposition proposée aura certes des incidences financières complexes sur le volet recettes de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais au vu des arguments de mes collègues, en particulier du président de la commission des affaires sociales, je soutiendrai ces amendements, tout en vous remerciant de l’attention particulière que vous portez à cette question, monsieur le ministre.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 54 rectifié bis, 75 rectifié quater, 996, 1209 et 1329 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Article 8 bis (nouveau)
I. – L’article 231 A du code général des impôts est ainsi rétabli :
« Art. 231 A. – Les rémunérations versées par l’employeur membre d’un assujetti unique mentionné à l’article 256 C sont exonérées de taxe sur les salaires lorsque les conditions cumulatives suivantes sont remplies :
« 1° Cet employeur ne serait pas assujetti à la taxe sur les salaires s’il n’était pas membre de cet assujetti unique ;
« 2° Au titre de l’année civile précédant celle du paiement des rémunérations, le chiffre d’affaires des opérations réalisées par cet assujetti unique qui ouvrent droit à déduction en application de l’article 271 est au moins égal à 90 % du montant total de son chiffre d’affaires imposable à la taxe sur la valeur ajoutée.
« Pour l’application de l’exonération au titre des rémunérations versées lors de l’année civile de constitution de l’assujetti unique, la condition mentionnée au 2° du présent article s’apprécie par référence au chiffre d’affaires de cette année civile. »
II. – Le I s’applique à la taxe sur les salaires due au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2024.
M. le président. L’amendement n° 1171, présenté par M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Ouizille et Michau, Mmes Bonnefoy, Harribey et G. Jourda, MM. Temal, Durain, Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à supprimer l’article 8 bis, introduit par le Gouvernement afin d’instaurer une exonération de taxe sur les salaires sous certaines conditions.
Les besoins de santé augmentent : le nombre d’affections de longue durée ne fait que croître, celui des arrêts maladie et des maladies professionnelles va également progresser en raison de la réforme des retraites voulue par le Gouvernement et l’hôpital public ne parvient pas à résorber la dette sanitaire accumulée au cours de ces trois dernières années.
Alors qu’il faudrait investir massivement pour soutenir et moderniser notre système de santé, le sous-Ondam hospitalier rectifié pour 2023 ne permet pas même de couvrir la hausse des charges des établissements publics de santé, qui, en lien avec l’inflation, s’établit à 15 %.
Alors qu’il y a urgence à reprogrammer l’examen de la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, dite proposition de loi Grand âge et autonomie, aucune mesure d’envergure ne figure dans ce texte pour faire face aux enjeux de la perte d’autonomie et de la dépendance.
Alors que les besoins en santé sont immenses, le Gouvernement saborde la sécurité sociale en tarissant ses financements par des politiques massives d’exonération de cotisations sociales et en refusant de collecter de nouvelles recettes.
Je rappelle que 66 % des recettes fiscales et sociales de la puissance publique proviennent aujourd’hui des ménages, quand seulement 34 % émanent des entreprises.
Cette aggravation du déficit de la sécurité sociale ne fait qu’illustrer ce que nous dénonçons, à savoir le creusement du déficit de la sécurité sociale du fait de choix politiques conduisant à accumuler les exonérations de cotisations sociales sans les compenser et en refusant de collecter de nouvelles recettes.
En creusant le déficit de la sécurité sociale sans compensation et sans nouvelles recettes, le Gouvernement se retrouve dans l’incapacité de répondre aux besoins sociaux, au premier rang desquels la santé.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons de supprimer cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’instauration d’une exonération de taxe sur les salaires pour les entreprises faisant partie d’un « groupe TVA » prévue à l’article 8 bis vise précisément à préserver les ressources de la sécurité sociale.
En effet, le « groupe TVA », instauré au début de 2022, a pour fonction de permettre à des entreprises ayant des liens étroits de former un seul assujetti au regard de la TVA, leur chiffre d’affaires interne au groupe n’étant pas taxé. N’étant pas redevables de la TVA, ces entreprises peuvent devenir redevables de taxe sur les salaires, ce qui réduit l’intérêt du « groupe TVA ».
Le présent article n’aura pas pour effet de réduire les ressources de la sécurité sociale, puisqu’il n’exonère de taxe sur les salaires que des entreprises qui n’y étaient pas assujetties avant leur inclusion au sein d’un « groupe TVA ».
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Comme cela vient d’être indiqué, cet article sera sans effet sur les finances de la sécurité sociale, puisqu’il permet de garantir à des entreprises qui, prises isolément, étaient exonérées de taxe sur les salaires, qu’elles continueront de l’être si elles se regroupent pour des raisons d’efficacité économique ou de simplification. Il s’agit simplement de sécuriser le statut de ces entreprises.
L’avis est défavorable.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 100 amendements au cours de la journée ; il en reste 742 à étudier sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
3
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 14 novembre 2023 :
À quatorze heures trente, le soir et la nuit :
Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur le projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (procédure accélérée ; texte de la commission n° 434 rectifié, 2022-2023) ;
Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2024 (texte n° 77, 2023-2024).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mardi 14 novembre 2023, à zéro heure quarante.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER