M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.
Mme Martine Berthet. Si l’État s’est engagé, il serait temps d’en informer les élus, parce que le silence est pour l’instant total ! Il reste tout de même quatre-vingts kilomètres de digues à entretenir…
problèmes posés par la mise en place d’une forêt primaire dans les ardennes
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, auteure de la question n° 833, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Else Joseph. Nous sommes inquiets face aux perspectives de réalisation d’une forêt primaire dans le nord-est de l’Europe par l’association Francis Hallé. Cette dernière projette de sanctuariser 70 000 hectares de forêt. Ce projet transfrontalier aurait des implications considérables dans mon département, les Ardennes. Outre un flou sur le calendrier, ce projet exclurait les activités humaines pour 7 000 ans !
Adieu les promenades libres, les rêveries innocentes des promeneurs, ou leur joie de découvrir le patrimoine animal ou végétal ! Finis la chasse, la pêche, l’affouage… Va-t-on désormais installer des gradins pour observer la nature ? En effet, dans ce projet, les activités humaines n’auront plus leur place, si ce n’est sur des caillebotis ou lors de visites guidées…
Ce n’est pas la nature que l’on met sous cloche, mais bien l’homme ! Ce dernier est devenu le principal suspect… Pourtant, il a tout fait pour améliorer son rapport avec l’environnement. À ce titre, je peux témoigner du travail effectué par le parc naturel régional (PNR) des Ardennes pour protéger la biodiversité. Il est possible d’assurer le respect de nos activités et de nos traditions tout en respectant l’environnement.
Quand on entend que « les Ardennes ne se caractérisent pas par un caractère économique et touristique important », c’est tout simplement scandaleux ! Que fait-on de l’industrie forestière, soit plus de 350 000 mètres cubes de bois récoltés, alors que l’on développe partout la biomasse bois ? Nous nous interrogeons ! Quid des investissements du conseil départemental des Ardennes dans la voie verte, classée route EuroVelo, au sein de cette belle vallée de la Meuse ?
Si j’étais d’humeur badine, je me poserais cette question : est-ce cela le projet d’industrie verte dont le département des Ardennes doit être pilote ?
Madame la ministre, voilà quelques mois, le ministère a donné son accord de principe à ce projet. Nous attendons une réponse claire de la part du Gouvernement sur cette opération qui punira les Ardennes. Le département ne doit pas être la victime d’un projet déconnecté, nourri par une vision idéologique et irréelle de la nature !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Joseph, le projet en faveur d’une forêt primaire dans les Ardennes est porté par l’association Francis Hallé pour la forêt primaire. Il consiste à dédier une surface de 70 000 hectares à la libre évolution de la forêt sur un territoire relevant de trois États : la Belgique, l’Allemagne et la France.
Les espaces en libre évolution constituent autant de refuges pour la biodiversité spécifique aux milieux forestiers. Ils sont également des points de référence qui feront l’objet d’un suivi scientifique dans la durée, permettant de faire progresser la connaissance des milieux forestiers et de leur biodiversité associée.
Les zones en libre évolution peuvent s’insérer dans des massifs forestiers qui ont, quant à eux, majoritairement vocation à être exploités et gérés, afin d’adapter les forêts au changement climatique, de prévenir le risque incendie et d’approvisionner notre société en matériau bois renouvelable.
L’État est attentif à ce projet de restauration de forêt primaire, qu’il se concrétise dans les Ardennes ou dans tout autre territoire. Nous tenons tout particulièrement au dialogue, qui doit être nécessairement mené entre l’association et l’ensemble des parties prenantes des territoires envisagés.
À ce titre, les acteurs de la filière forêt-bois représentent une force structurante du territoire ; ses besoins ont vocation à être pris en compte. Le bois est une filière d’avenir pour les territoires forestiers de tout le Grand Est, et l’État soutient son développement. Le bois matériau exploité durablement est une ressource d’avenir pour notre économie. Il est essentiel pour décarboner le secteur de la construction.
Le Gouvernement, dans le contexte de changement climatique et de nécessité de prévenir les risques d’incendie, entend également promouvoir et étendre la gestion durable des forêts dans les zones où elle n’est pas pratiquée.
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour la réplique.
Mme Else Joseph. Madame la ministre, je suis un peu déçue : j’attendais une réponse ! Êtes-vous pour ? Êtes-vous contre ? Il faut envoyer un message clair au département ! Vous évoquez la biodiversité, certes, mais, si la forêt n’est plus entretenue, que fait-on face aux problèmes de sécurité posés par les incendies ? Les efforts fournis par mon département ont été considérables.
M. le président. Veuillez conclure.
Mme Else Joseph. Je vous indique qu’un collectif est désormais en place. Il rassemble tout le monde, car nous sommes contre cette forêt primaire.
extension et enfouissement des gravières en basse-ariège
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, auteure de la question n° 839, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Raymonde Poncet Monge. Depuis de nombreuses années, les entreprises du secteur des bâtiments et travaux publics (BTP) multiplient les projets d’exploitation du granulat en Basse-Ariège, où se situe une nappe phréatique classée comme ressource prioritaire par le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) Adour-Garonne.
Les carrières actuelles sont déjà à l’origine de nombreuses retenues d’eau, ressource prélevée directement dans la nappe. L’eau est exposée sur 250 hectares. Pourtant, le schéma régional des carrières prévoit l’extension des carrières de plus de 1 100 hectares afin d’alimenter de grands projets dont l’utilité, comme pour l’A69, est contestable.
Cette exposition des eaux de la grande nappe phréatique ariégeoise revient à l’assécher en l’exposant à évaporation. Selon une étude du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’exposition de 100 hectares d’eau provoque un déficit hydrique d’un million de mètres cubes par an. Ainsi, ce sont plus de 8 millions de mètres cubes d’eau annuels qui seront perdus avec l’extension des exploitations, pénalisant toute la population et les milieux naturels, qui subissent déjà des périodes de stress hydrique.
Il est urgent, dans ce contexte, de revenir sur l’extension des gravières, d’autant plus que le projet inclut également des autorisations d’enfouissement des déchets du BTP malgré l’interdiction figurant dans le code de l’environnement. Ces déchets se dégradent en lixiviats chargés d’aluminium, rendant l’eau impropre à la consommation.
Le risque est donc de polluer définitivement la nappe et de bloquer les ressources en eau d’une grande partie de la région alors même que les sécheresses se multiplient du fait de l’aggravation du dérèglement climatique.
Madame la ministre, pouvez-vous suspendre l’extension des gravières, l’enfouissement des déchets du BTP dans la nappe et réévaluer le projet à l’aune d’une étude sur les futurs besoins en eau des habitants et des habitantes de la région Occitanie ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Poncet Monge, la bonne gestion des ressources minérales représente un enjeu stratégique, notamment le fait de les produire au plus près de la zone de consommation.
Malgré une montée en puissance progressive du recyclage des matériaux, le bassin toulousain est à l’heure actuelle déficitaire en matériaux. Il est dépendant de l’approvisionnement par des granulats alluvionnaires provenant des bassins voisins, en particulier de l’Ariège.
L’exploitation des alluvions nécessite le plus souvent une phase de mise à nu, suivie généralement d’un remblaiement. Les services de l’État sont particulièrement vigilants face aux risques de modification des régimes d’écoulement ou d’altération de la qualité de la nappe.
C’est pourquoi les autorisations délivrées par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) sont accompagnées de prescriptions spécifiques. Le schéma régional des carrières d’Occitanie a ainsi été soumis à évaluation environnementale. Il est compatible avec les dispositions des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) et des schémas d’aménagement et de gestion de l’eau (Sage), et prend en compte le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet).
Par ailleurs, le remblayage des carrières est strictement encadré par la réglementation nationale : les déchets utilisables en la matière doivent être inertes, sous réserve qu’ils soient compatibles avec le fond géochimique local. S’ils sont externes à la carrière, ils doivent respecter des valeurs limites, à la suite d’un test de lixiviation qui recrée le phénomène d’extraction des produits contenus dans les déchets par l’eau.
Pour conclure, madame la sénatrice, sachez que les services de l’État surveillent les résultats d’analyse des eaux souterraines prélevées autour des carrières et collaborent particulièrement sur ce point avec les associations de protection de l’environnement.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour la réplique.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je crois qu’il faut réévaluer les projets à l’aune de l’accélération du dérèglement climatique.
délai de publication des décrets d’application concernant la loi « zéro artificialisation nette »
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, auteur de la question n° 841, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Rémi Cardon. Madame la ministre, j’attire votre attention sur les difficultés de mise en œuvre de l’objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN), malgré l’adoption de notre récente proposition de loi. Il faut admettre que cette dernière a entraîné des bouleversements alors que plusieurs documents de planification de l’aménagement du territoire, notamment les schémas de cohérence territoriale (Scot) et les plans locaux d’urbanisme intercommunal (PLUi), sont d’ores et déjà en cours d’élaboration.
Pour certains documents, un recours a été présenté devant le tribunal administratif. Divers litiges entre l’État et nos collectivités pourraient être simplement résolus par la publication – enfin ! – de décrets d’application. Je pense notamment à la fameuse garantie rurale, indispensable pour assurer le minimum de développement dont le secteur a tant besoin.
Voici un exemple, madame la ministre, de l’« en même temps » exercé dans les services de l’État. À Querrieu, ville de la Somme, un projet nécessite 1,3 hectare. Or la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) en attribue un seul par commune. Si un autre projet, dans une autre commune, nécessitait moins d’un hectare, la réponse serait la même : en l’absence de décret, rien pour l’instant ne pourrait être fait.
Il ne faut pas raconter des histoires différentes en fonction des projets et des opportunités. Les difficultés s’accumulant en matière de maintien des services publics et des commerces de proximité, il est temps, sans entrer dans la caricature des conflits entre urbains et ruraux, d’œuvrer à l’apaisement. Il faut apporter des garanties aux projets menés dans ces territoires.
Pour cette raison, madame la ministre, quand publierez-vous les décrets ? Quand on prétend mettre en œuvre la planification écologique, il faut – excusez-moi de le préciser – la coconstruire avec les élus locaux.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Cardon, conformément aux engagements du Gouvernement, par la loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, nous avons ajusté les dispositions de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. L’objectif était de donner une plus grande marge de manœuvre aux territoires.
En parallèle de l’examen de la loi du 20 juillet 2023 au Parlement, plusieurs décrets d’application ont fait l’objet d’une concertation avec le Sénat, l’Assemblée nationale et l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF).
Un premier projet de décret relatif à la mise en œuvre de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols vise à décliner cette mise en œuvre dans les documents de planification et d’urbanisme.
Un second projet de décret relatif à l’évaluation et au suivi de l’artificialisation des sols tend à décliner les dispositifs dans les documents de planification et d’urbanisme à compter de 2031. Ce texte précise la nomenclature définissant les surfaces artificialisées ou non artificialisées, notamment les seuils de référence à partir desquels ces surfaces pourront être qualifiées comme telles.
Ces décrets ont été soumis à l’avis du Conseil national d’évaluation des normes et du Conseil d’État. Ils doivent être signés dans le courant du mois de novembre prochain par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu.
Dans la continuité de ces décrets, les projets d’envergure nationale ou européenne, dont la consommation d’espace sera comptabilisée dans un forfait national, feront l’objet d’un arrêté ministériel avant la fin du mois de mars de 2024. Une première liste sera soumise à consultation des régions et des conférences régionales de gouvernance avant la fin de l’année 2023. Je pense vous avoir ainsi donné les dates et le calendrier.
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour la réplique.
M. Rémi Cardon. On avance… Nous prenons date du calendrier que vous évoquez. J’espère que les échéances sont garanties et que le débat autour de l’ensemble des projets français sera ainsi apaisé.
incertitudes sur les modalités de transfert des compétences eau et assainissement
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, auteure de la question n° 845, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Marie-Pierre Monier. Madame la ministre, malgré les modifications successives de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), les modalités de transfert au 1er janvier 2026 des compétences « eau et assainissement » aux intercommunalités restent problématiques pour nombre de communes et de communautés de communes.
M. Jean-Michel Arnaud. Bravo !
Mme Marie-Pierre Monier. Soyons clairs : les élus ne contestent pas la mutualisation ; ils contestent seulement l’obligation de transfert. D’ailleurs, ils n’ont pas attendu la contrainte législative pour mettre en place des mutualisations choisies, sur la base des difficultés qu’ils rencontrent dans la gestion de l’eau et dans la configuration des besoins de leur territoire.
De nombreuses communes rurales se sont déjà organisées en syndicats sur des bassins versants ou avec des communes voisines, pour partager les ressources en eau ou mutualiser les réseaux d’alimentation ou de traitement. Le 30 mars dernier, les annonces du Président de la République dans le cadre de la présentation du plan Eau ont laissé les élus dans le flou : ils sont en attente de précisions pratiques concernant les « bonnes solutions de mutualisation » et le « modèle pluriel, différencié, qui repose sur l’intelligence des élus de terrain et la diversité du territoire ».
Il reste un peu moins de trente mois avant janvier 2026. Madame la ministre, j’aimerais donc que vous m’indiquiez sous quelle forme réglementaire ou législative et dans quel délai seront mises en place les nouvelles possibilités de différenciation, avec quelles modalités d’organisation. Cela impliquera-t-il un retour à un transfert optionnel des compétences « eau et assainissement » aux intercommunalités ? (M. Jean-Michel Arnaud applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Monier, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement représente un enjeu fondamental sur l’ensemble du territoire national. L’échelon communautaire a été choisi par le législateur pour remédier aux difficultés sanitaires, économiques et écologiques engendrées par l’émiettement des services. La mutualisation des moyens financiers et d’expertise à cette échelle permet – nous en sommes convaincus – d’améliorer la résilience et de moderniser les réseaux de distribution d’eau potable et d’assainissement.
À plusieurs reprises, le législateur et le Gouvernement ont apporté des souplesses, en 2018, avec l’activation d’une « minorité de blocage », ou dans le cadre du texte Engagement et Proximité ou de la loi 3DS, permettant, par exemple, le maintien de syndicats intracommunautaires. De la souplesse a donc été apportée.
Face aux tensions liées aux épisodes successifs de sécheresse, une gestion de l’approvisionnement en eau destinée à la consommation humaine à une échelle dépassant les frontières de l’intercommunalité peut se révéler pertinente dans certains territoires.
Sans revenir sur la répartition des compétences, le Gouvernement est favorable à l’introduction de nouvelles souplesses.
La première serait d’étendre le maintien par délégation aux syndicats intracommunautaires à tous ceux qui existeront au 1er janvier 2026.
La deuxième serait de faciliter l’intervention des départements en leur permettant d’adhérer à des syndicats mixtes ouverts exerçant des compétences en matière d’eau potable ou de se voir déléguer la maîtrise d’ouvrage par un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ou un syndicat mixte compétent en matière de production, transport et stockage d’eau destinée à la consommation humaine.
Voilà les deux ajustements envisagés.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour la réplique.
Mme Marie-Pierre Monier. Bien évidemment que les enjeux sont importants pour l’eau et l’assainissement. Vous l’avez dit, des assouplissements ont été introduits, notamment grâce au travail du Sénat, afin de repousser la date de prise de compétence.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Marie-Pierre Monier. Mais, franchement, sur le terrain, il faut faire confiance aux élus, qui connaissent très bien leur réseau, particulièrement dans les petites communes rurales.
absence de protection fonctionnelle pour les conseillers municipaux sans délégation
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 862, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Jean-Michel Arnaud. Les agressions de maires et de conseillers municipaux étaient, selon les estimations de l’Association des maires de France, en hausse de 15 % en février 2023.
Face à de tels actes, conformément au code général des collectivités territoriales, « la commune est tenue de protéger le maire ou les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation contre les violences, menaces ou outrages ».
Tout acte de violence envers certains élus locaux entraîne donc l’activation automatique de la protection fonctionnelle. J’ai bien dit « certains élus locaux » ! En effet, en l’état actuel du droit, les conseillers municipaux sans délégation ne sont pas systématiquement couverts par ladite protection, alors que les risques encourus peuvent être équivalents à ceux qui sont encourus par les maires ou les adjoints.
Dans l’optique d’assurer la sécurité des élus municipaux, le Sénat a récemment adopté, à l’unanimité, la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires. Néanmoins, à l’occasion de l’examen du texte, nous n’avons pas pu légiférer sur la protection fonctionnelle en faveur des conseillers municipaux sans délégation, l’article 40 de la Constitution nous ayant été opposé.
À l’heure actuelle, il appartient donc au juge de se prononcer sur l’application du dispositif en prenant en compte la jurisprudence de 2011, qui consacre, en tant que principe général du droit, « l’octroi de la protection fonctionnelle à tout agent public quel que soit le mode d’accès à leurs fonctions ».
Vous l’avez compris, seul le Gouvernement peut prendre la décision d’étendre la protection fonctionnelle à l’ensemble des élus municipaux.
Madame la ministre, le Gouvernement a-t-il l’intention d’élargir le dispositif aux conseillers municipaux sans délégation ? Est-il disposé, comme cela a été récemment demandé en commission des lois, à lever le gage d’un amendement parlementaire relatif à sur cette problématique ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Arnaud, les élus municipaux bénéficient d’un régime de protection qui s’apparente à la protection fonctionnelle applicable aux agents publics. Les collectivités territoriales, établissements publics de coopération intercommunale et certains syndicats mixtes sont ainsi tenus d’accorder leur protection à certains de leurs élus en cas de faits n’ayant pas le caractère de faute personnelle détachable du service ou des fonctions.
Ce régime s’applique dans les cas suivants.
Premièrement, l’élu fait l’objet de poursuites judiciaires civiles ou pénales pour des faits qui n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice de ses fonctions. S’agissant des élus des conseils municipaux, la protection fonctionnelle relève de l’État lorsque l’élu agit en qualité d’agent de l’État.
Deuxièmement, l’élu est victime de violences ou d’outrages à l’occasion ou du fait de ses fonctions.
Troisièmement, cette protection peut également, à leur demande, être accordée aux conjoints, enfants et ascendants directs des élus décédés dans l’exercice ou du fait de leurs fonctions à raison des faits à l’origine du décès.
Comme je m’y suis engagée lors de l’adoption en première lecture de la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires, le sujet de l’extension de la protection fonctionnelle sera travaillé lors de la navette parlementaire.
Enfin, comme vous le savez, le bénéfice de la protection fonctionnelle doit, en l’état actuel du droit, faire l’objet d’une délibération expresse de l’organe délibérant.
Toutefois, le Gouvernement soutient la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires, déposée par M. François-Noël Buffet, Mme Françoise Gatel et M. Mathieu Darnaud, examinée récemment par le Sénat, qui prévoit certaines évolutions, notamment le fait de rendre l’activation de la protection fonctionnelle automatique.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.
M. Jean-Michel Arnaud. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Cela étant, l’extension prévue ne vise que les conseillers départementaux et régionaux ayant une délégation. Les conseillers municipaux de base ne sont donc pas concernés !
Or, dans de nombreux départements de France, dont le mien, un certain nombre de conseillers municipaux, parce qu’ils sont conseillers municipaux, sont menacés, invectivés, voire agressés, alors qu’ils ne peuvent pas bénéficier de la protection fonctionnelle.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Michel Arnaud. Le Gouvernement doit mobiliser les moyens financiers nécessaires pour mettre en œuvre une telle protection.
financement des réseaux express métropolitains
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, auteur de la question n° 860, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Jean-Pierre Corbisez. Ma question concerne la problématique du financement des réseaux de transport ferroviaire.
Le Gouvernement a fait du développement du train un enjeu de sa transition énergétique, afin de décarboner les transports, l’un des postes pesant le plus lourd dans nos bilans d’émission de gaz à effet de serre.
Voilà un an, le Président de la République annonçait sa volonté de relancer les RER métropolitains, volonté traduite par les premiers engagements financiers présentés lors du récent Conseil de la planification écologique.
Le projet de service express métropolitain de l’étoile ferroviaire de Lille est inscrit dans ces financements. En tant qu’élu des Hauts-de-France, je ne peux que m’en féliciter.
Néanmoins, pour dire les choses trivialement, le compte n’y est pas, tant s’en faut. !
Le montant annoncé des subventions, à savoir 700 millions d’euros, interroge d’ailleurs sur la volonté réelle du Gouvernement d’accompagner cette révolution du train défendue par le Président de la République.
Le projet de service express métropolitain de Lille a en effet été évalué de 7 milliards d’euros à 9 milliards d’euros. Au-delà de la création d’une ligne entre Lille et Hénin-Beaumont, nécessaire pour désengorger les autoroutes et les voies rapides reliant Lille au Bassin minier, il est également prévu d’implanter une nouvelle gare à Lille.
L’enveloppe annoncée dans le cadre de la négociation du contrat de plan État-région ne couvre, a minima, que 10 % du projet. Elle permettra au mieux de couvrir les études préalables et les premiers investissements.
Dans ces conditions, comment imaginer la faisabilité d’un tel projet ? La région des Hauts-de-France ne sera jamais en mesure de boucler les financements, même avec le soutien d’autres collectivités.
Quelles mesures entendez-vous prendre pour accompagner la région des Hauts-de-France dans la réalisation de ce projet nécessaire au bien-être de ses habitants et à la transition écologique de ce territoire, marqué durement par une douloureuse histoire industrielle et sociale ?