Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
M. Jean-Michel Arnaud, Mme Catherine Conconne.
2. Questions d’actualité au Gouvernement
déplacement du président de la république en israël
M. François Bonneau ; M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger ; M. François Bonneau.
M. Jacques Fernique ; M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports ; M. Jacques Fernique.
M. Laurent Somon ; Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité ; M. Laurent Somon.
M. Saïd Omar Oili ; M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
maladie hémorragique épizootique
M. Pierre Médevielle ; M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ; M. Pierre Médevielle.
expérimentation des territoires zéro chômeur
M. Philippe Grosvalet ; M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Michaël Weber ; M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ; M. Michaël Weber.
concurrence fiscale comme moteur de l’évasion fiscale
M. Éric Bocquet ; Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme ; M. Éric Bocquet.
M. Michel Bonnus ; Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques ; M. Michel Bonnus.
territoires zéro chômeur de longue durée
Mme Marion Canalès ; M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion ; Mme Marion Canalès.
dotation d’équipement des territoires ruraux
M. Jean-Marc Boyer ; Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité ; M. Jean-Marc Boyer.
dépendance aux métaux rares chinois
M. Jean-François Longeot ; M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.
Mme Béatrice Gosselin ; M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer ; Mme Béatrice Gosselin.
critiques du conseil de l’europe envers la france
Mme Corinne Narassiguin ; Mme Laurence Boone, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée de l’Europe ; Mme Corinne Narassiguin.
décret du 22 septembre 2023 sur la prolongation de centres d’hébergement d’urgence pour les migrants
Mme Laurence Muller-Bronn ; Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville ; Mme Laurence Muller-Bronn.
M. Damien Michallet ; Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité ; M. Damien Michallet.
Suspension et reprise de la séance
3. Mise au point au sujet de votes
4. Amélioration de l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Amendement n° 166 rectifié ter de Mme Corinne Bourcier. – Adoption.
Amendement n° 87 rectifié bis de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 156 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 196 de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° 64 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Amendement n° 100 rectifié bis de M. Daniel Chasseing. – Rejet.
Amendement n° 65 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 72 rectifié de Mme Brigitte Micouleau. – Retrait.
Amendement n° 73 rectifié de Mme Brigitte Micouleau. – Retrait.
Adoption de l’article.
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales
M. Aurélien Rousseau, ministre de la santé et de la prévention
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales
Amendement n° 52 rectifié de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 135 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 154 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.
Amendement n° 30 rectifié de Mme Élisabeth Doineau. – Devenu sans objet.
Amendement n° 113 rectifié bis de Mme Florence Lassarade. – Retrait.
Amendement n° 197 de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 187 de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° 53 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 36 rectifié ter de Mme Marie-Claude Lermytte. – Rejet.
Amendement n° 41 rectifié ter de Mme Marie-Claude Lermytte. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 103 rectifié quater de M. Daniel Chasseing. – Rejet.
Amendement n° 229 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 116 rectifié de M. Ludovic Haye. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 18 rectifié de M. Franck Menonville. – Rejet.
Amendement n° 62 rectifié de M. Patrice Joly. – Rejet.
Amendement n° 138 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 56 rectifié de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 198 de Mme Anne Souyris. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 57 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet par scrutin public n° 14.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 4 rectifié ter de Mme Nadia Sollogoub. – Retrait.
Article 5 quinquies – Adoption.
Amendement n° 152 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 119 rectifié de M. Ludovic Haye. – Rejet.
Amendement n° 16 de M. François Bonneau. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Amendement n° 140 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 123 rectifié de M. Ludovic Haye. – Retrait.
Amendement n° 141 de Mme Céline Brulin
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
Amendements identiques nos 22 rectifié bis de M. Alain Milon, 32 rectifié quater de M. Laurent Burgoa, 92 rectifié de Mme Véronique Guillotin et 200 de Mme Anne Souyris (suite). – Retrait des quatre amendements.
Amendement n° 141 de Mme Céline Brulin (suite). – Rejet.
Amendement n° 238 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 59 rectifié de Mme Annie Le Houerou. – Adoption.
Amendement n° 189 de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° 237 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 96 rectifié bis de M. Alain Milon. – Adoption.
Amendement n° 95 rectifié bis de M. Alain Milon. – Adoption.
Amendement n° 142 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 66 de M. Bernard Jomier. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 20 rectifié de M. Alain Duffourg. – Non soutenu.
Amendement n° 60 rectifié de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 208 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 223 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 143 de Mme Céline Brulin. – Retrait.
Amendement n° 175 de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 210 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 224 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 144 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 102 rectifié ter de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 120 rectifié de M. Ludovic Haye. – Retrait.
Amendement n° 121 rectifié de M. Ludovic Haye. – Retrait.
Amendement n° 114 rectifié bis de Mme Florence Lassarade. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 148 de Mme Céline Brulin. – Rejet par scrutin public n° 16.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 150 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 149 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 213 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 163 de M. Dominique Théophile. – Adoption.
Amendement n° 225 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 215 rectifié de M. Olivier Bitz. – Retrait.
Amendement n° 216 rectifié de M. Olivier Bitz. – Retrait.
Amendement n° 171 rectifié ter de Mme Martine Berthet. – Retrait.
Amendement n° 164 de M. Dominique Théophile. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 145 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° 193 de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Articles 10 ter et 10 quater (supprimés)
Article 11 (suppression maintenue)
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales
Adoption, par scrutin public n° 18 de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
M. Jean-Michel Arnaud,
Mme Catherine Conconne.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.
déplacement du président de la république en israël
M. le président. La parole est à M. François Bonneau, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonneau. Monsieur le président, madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, nos pensées volent vers l’Orient ensanglanté par les terroristes du Hamas, nourris par la haine, la barbarie et les actes génocidaires.
Depuis 2007, la bande de Gaza est sous la coupe de ce mouvement islamiste qui veut détruire l’État d’Israël. Ses habitants subissent depuis le 7 octobre dernier, à la fois un blocus et des frappes qui font de nombreuses victimes civiles prisonnières des caciques du mouvement. Comment recréer l’espoir d’un monde meilleur chez toute une jeunesse palestinienne, rongée par la corruption d’une partie de ses élites et dont l’horizon se heurte aux murs de l’indifférence ?
La solution à deux États, position exprimée avec constance par la France, paraît dépassée à l’époque où la Cisjordanie est devenue un immense gruyère du fait de la colonisation massive.
À l’heure où le Président de la République veut non seulement soutenir la population et la démocratie israélienne traumatisée et fragilisée par une crise institutionnelle, mais aussi desserrer l’étau mortifère sur Gaza, des questions se posent.
En particulier, l’idée d’une large coalition contre le Hamas interroge. De quelle nature serait-elle ? Avec qui ? Avec quels moyens ? La constituer ne suppose-t-il pas d’intégrer le Hamas à la résolution déjà votée par les Nations unies contre l’État islamique ? L’ONU voterait-elle cette résolution ?
Surtout, comment une telle coalition pourrait-elle protéger l’État d’Israël de ses voisins hostiles et éviter l’embrasement, pour créer à terme les conditions d’un retour à la paix ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.
M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger. Monsieur le sénateur François Bonneau, je vous prie, tout d’abord, de bien vouloir excuser Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, qui est sur le chemin du retour après une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies à New York.
Le Président de la République l’a rappelé, nous exprimons notre solidarité et notre émotion après la terrible épreuve que le peuple d’Israël a subie le 7 octobre dernier, une attaque terroriste sans précédent dans l’histoire de ce pays.
Le Président de la République a tenu à rencontrer les familles des victimes et des disparus français. En effet, trente de nos compatriotes sont décédés et neuf manquent encore à l’appel. La libération de tous les otages, parmi lesquels on compte au moins une Française, est une priorité.
Israël a bien évidemment le droit de se défendre face à un groupe terroriste qui a pour objet sa destruction. Dans le combat contre le terrorisme, les démocraties doivent être unies et solidaires, et c’est d’ailleurs pour cette raison que le Président de la République a évoqué l’idée d’une coalition internationale, à l’instar de celle qui existe pour lutter contre Daech.
Je le rappelle, une coalition internationale concerne non seulement des actions de terrain, mais aussi des échanges d’informations dans le cadre du renseignement, ainsi que la lutte contre le financement du terrorisme et le djihadisme en ligne. Tous ces sujets peuvent faire l’objet d’un travail au sein d’une coalition.
Le Président de la République a aussi rappelé que toutes les actions devaient être menées dans le respect du droit international, du droit de la guerre et du droit humanitaire.
La France soutient les populations palestiniennes, en apportant une aide à hauteur de 20 millions d’euros.
Elle soutient également – je vous remercie de l’avoir rappelé – la solution à deux États, qui est la seule permettant durablement d’imaginer deux peuples vivant côte à côte, en paix et en sécurité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. François Bonneau, pour la réplique.
M. François Bonneau. Monsieur le ministre, sans réponse claire à ces questions, l’écho des pleurs et des lamentations hantera longtemps nos consciences. Il est urgent d’agir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
projet d’autoroute A69
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Jacques Fernique. Monsieur le ministre Clément Beaune, resterez-vous sourd aux appels à arrêter le projet d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Vous annoncez depuis des mois que plusieurs projets routiers seront arrêtés parce que, à l’heure de la planification écologique, on ne peut plus faire comme avant : c’est vous qui le dites, et vous avez raison ! Alors, comment pouvez-vous refuser de remettre en cause l’A69, ce projet autoroutier daté, typique d’un temps révolu où étaient clairement sous-estimés les enjeux écologiques ?
Votre ministère délégué est rattaché à celui de la transition écologique, pour lequel le Conseil national de la protection de la nature est chargé de l’expertise sur la biodiversité. Or ce dernier a émis un avis défavorable sur ce projet autoroutier.
L’autorité environnementale compétente pour ce projet a aussi rendu son avis : elle a jugé ce projet anachronique, car reposant sur des données obsolètes. (Brouhaha à droite.) Par ailleurs, au moins 1 500 scientifiques, certains comptant parmi les plus respectés à l’échelle internationale sur le climat, vous disent que l’A69 est l’un de ces projets auxquels il faut renoncer.
Monsieur le ministre, que vous faut-il de plus ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. Hussein Bourgi. Ils ne savent même pas où c’est !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. Monsieur le sénateur Jacques Fernique, vous connaissez bien ce dossier. Nous avons échangé ensemble en toute honnêteté à de nombreuses reprises sur plusieurs sujets, et je connais votre honnêteté intellectuelle. Mais peut-on rester sourd aux besoins des habitants du Tarn ?
Peut-on rester sourd à la parole de la grande majorité des élus de ce département et de l’ensemble du tracé de l’autoroute A69, qui attendent et réclament cette autoroute depuis de nombreuses années, voire des décennies ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)
Peut-on rester sourd, quand on est un républicain comme vous l’êtes, Monsieur Fernique, à l’impatience des élus de plusieurs sensibilités politiques – Mme Carole Delga et M. Christophe Ramond, du parti socialiste, le maire de Castres, du parti Les Républicains –, que le préfet du Tarn a réunis à ma demande voilà quelques jours ? J’ai même entendu des écologistes, qui font partie de la majorité régionale de Mme Delga, dire qu’il ne s’agissait pas d’un motif de rupture avec cette dernière. C’est donc le signe que l’on peut discuter, même si leur opinion est connue sur ce sujet.
Peut-on rester sourd à tout cela quand, dans une démocratie, on est chargé, comme moi, de faire respecter la décision publique, qui m’importe tout comme elle vous importe ?
Il y a eu 500 réunions publiques, et les élus, dans leur immense majorité, ont confirmé leurs attentes et leurs avis, présentés lors des procédures juridiques que vous avez évoquées. Tous les recours – une dizaine –, et encore un référé voilà quelques jours, ont été écartés par le juge.
Nous sommes dans une démocratie et dans un État de droit : tout le monde a le droit d’avoir une opinion, et la vôtre est respectable ; on peut même manifester pour défendre son opinion.
Mais il y a deux choses qu’on ne peut pas faire. Premièrement, céder à la violence : à cet égard, j’aimerais que vous condamniez les débordements et les violences graves qui ont eu lieu samedi dernier, dans le Tarn, face à nos forces de l’ordre, aux agents de l’État, au service public. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains. – MM. Hussein Bourgi et Rachid Temal applaudissent également.)
M. François Bonhomme. Et Notre-Dame-des-Landes ?
M. Clément Beaune, ministre délégué. Deuxièmement, un républicain et un démocrate – et vous l’êtes – ne peut pas accepter qu’une minorité dicte sa loi à la majorité qui a affirmé et répété sa position. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour la réplique.
M. Jacques Fernique. Que ce soit bien clair, monsieur le ministre, mon groupe déplore, réprouve et condamne ces actes de violence, qui ne sont pas tolérables. Je vous en prie, ne les laissons pas nous empêcher d’être à la hauteur du débat de fond !
Certes, il y a la légitimité d’élus qui ont porté ce vieux projet depuis longtemps. Bien sûr, il y a l’État de droit. Mais il y a aussi l’état d’urgence pour le climat et la biodiversité, la légitimité des générations futures. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Exclamations ironiques à droite.)
Admettre que l’on a pu se fourvoyer, se tromper, fait l’excellence de la démocratie. Il n’est pas trop tard pour être à la hauteur de celle-ci ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
assurance des collectivités
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Saïd Omar Oili applaudit également.)
M. Laurent Somon. Madame la ministre, les maires et les élus locaux expriment de plus en plus un sentiment de lassitude, voire de désespoir, avec pour corollaire un nombre important de démissions. Selon eux, tout devient trop compliqué, trop difficile, et ils sont amputés des moyens que nécessiteraient leurs compétences, lesquelles elles-mêmes se réduisent. « Tout ce qui, hier, était simple devient inaccessible ! », disent-ils.
La liste des difficultés qu’ils rencontrent est longue, mais un nouvel obstacle surgit, avec prégnance, lorsqu’il s’agit de contracter une assurance susceptible de les protéger. Face à la hausse de la sinistralité, les primes d’assurances et les cotisations flambent.
En Meurthe-et-Moselle, Laxou, commune de 15 000 habitants ayant souffert des émeutes de juin, reçoit, sans contact préalable, un courrier de résiliation pure et simple dès le 1er janvier 2024.
Dans le Nord, à Mont d’Halluin, un maire dont la commune est reconnue en état de catastrophe naturelle peine encore, des années plus tard, à obtenir réparation.
Le maire d’Arcueil reçoit, bien que sa commune ne fasse pas partie des villes franciliennes les plus touchées par les émeutes, un avenant faisant passer de 1 500 euros à 2 millions d’euros la franchise à acquitter par la collectivité en cas de dommage !
Alors que les risques se multiplient – émeutes, saccages, inondations, retrait-gonflement des argiles et autres risques climatiques –, des communes, notamment dans la Somme, se retrouvent démunies pour protéger leurs biens. Lorsqu’elles recherchent une assurance susceptible de les protéger, les compagnies – peu nombreuses, et dont le nombre ne cesse de se réduire – leur font faux bond, ne répondent pas aux appels d’offres et affichent des tarifs prohibitifs.
Certaines communes se retrouvent sans assurance et seules face au risque. En effet, sans assurance, elles ne peuvent bénéficier du régime de catastrophe naturelle. On imagine les conséquences financières en cas de sinistre grave…
Face à cette situation, Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre à l’avenir pour que toutes les collectivités puissent s’assurer ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous avez tout à fait raison, de nombreuses collectivités rencontrent de plus en plus de difficultés à s’assurer, pour tout ou partie de leurs biens et de leurs activités. C’est un problème, surtout pour celles qui n’ont pas les moyens de s’autoassurer et de payer les dégâts en cas de sinistre.
Les assureurs sont des entreprises, avec leur modèle économique et leurs contraintes. S’il ne répond pas à un appel d’offres ou s’il résilie un contrat, l’assureur le fait sur la base d’une analyse économique que l’on ne peut pas lui reprocher de faire. C’est généralement lié au fait que le taux de sinistralité de la collectivité est élevé et s’est dégradé.
J’ai récemment reçu la Smacl, un assureur important des collectivités : elle a dû faire face cette année, à la suite des émeutes, à 46 millions d’euros de dégâts au lieu de 4 millions d’euros en temps normal. Heureusement, la Maif a abondé son capital à hauteur de 100 millions d’euros. (M. Fabien Genet s’exclame.)
Le sujet est complexe. Il est urgent, dans une première étape, de créer le dialogue. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Didier Marie ironise.)
Nous avons obtenu en septembre la mise en place d’une médiation de l’assurance, qui est déjà à l’œuvre sur certains dossiers liés aux émeutes. Elle nous a permis, dans certains cas, comme celui de la commune de Mont-Saint-Martin où je me suis rendue la semaine dernière, d’obtenir le report de certaines résiliations et d’esquisser des solutions.
Il nous faudra ensuite mettre des solutions sur la table, comme vous l’appelez de vos vœux. Comment les assureurs pourront-ils trouver leur équilibre sur un marché où la sinistralité, comme vous l’avez dit, explose à cause des catastrophes naturelles ?
Par ailleurs, je me suis saisie de nombreux petits sujets opérationnels, sur lesquels il convient de travailler afin de développer la prévention bâtimentaire et de diminuer cette sinistralité. Pour ce faire, nous avons, avec Bruno Le Maire, demandé un rapport (Exclamations ironiques sur de nombreuses travées.)…
M. Mickaël Vallet. Un observatoire !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. … aux inspections générales et à deux personnalités qualifiées, Alain Chrétien, maire de Vesoul, que je salue, et Jean-Yves Dagès, ancien président de la Fédération nationale Groupama.
Nous aurons le résultat de ce travail d’ici à février prochain, et je viendrai vous le présenter en priorité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour la réplique.
M. Laurent Somon. Cette situation, difficilement acceptable par les maires, contribue à leur découragement dans l’exercice de leurs fonctions.
Déjà, en 2019, notre collègue Sylviane Noël interrogeait le Gouvernement sur cet état de fait. Rien n’a évolué ! Les maires, notamment ceux des plus petites communes, attendent un réel soutien de l’État. Sinon, ils n’auront d’autre choix que d’abandonner.
J’aurais pu citer d’autres communes ayant subi les mêmes constats de désassurance, comme Saint-Brieuc ou Saint-Omer. Ne leur restera-t-il qu’à se vouer aux saints pour se protéger ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
question de l’eau à mayotte
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, la population mahoraise souffre depuis plusieurs mois d’une crise majeure de l’eau, dans un territoire où déjà plus de 100 000 habitants, selon l’Insee, n’ont pas l’eau courante.
J’ai pu mesurer concrètement la semaine dernière, sur le terrain, les premières mesures que le Gouvernement a mises en place et qu’il faudra amplifier en 2024, car la crise est loin de se terminer.
Je veux dire solennellement qu’en période de crise majeure tous les acteurs doivent « tirer dans le même sens ». J’ai pu constater la forte mobilisation des mairies et des centres communaux d’action sociale (CCAS), mais aussi des fonctionnaires de l’État, parmi lesquels les militaires de la sécurité civile.
En période de crise, on doit se serrer les coudes, loin des querelles de chapelle et des ego de chacun.
Pour illustrer mon propos, je rappellerai que les élus de Mayotte, en sortant de leur rencontre avec le Président de la République vendredi dernier, lui ont adressé un courrier commun : nous demandons que de véritables efforts soient faits en faveur des infrastructures de notre territoire, qui souffre d’un retard important s’accompagnant d’une démographie en forte hausse, la plus importante de la République.
Monsieur le ministre, quels investissements le Gouvernement prévoit-il pour sortir de cette crise structurelle de l’eau, avec quelles échéances et quels moyens financiers ?
Pouvez-vous rassurer les collectivités locales, qui s’inquiètent de certaines rumeurs évoquant une reprise en main par l’État de leurs compétences dans le domaine de l’eau ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Saïd Omar Oili, je vous prie d’excuser l’absence du ministre de l’intérieur et des outre-mer ainsi que du ministre délégué chargé des outre-mer. Toutefois, vous le savez, Gérald Darmanin se rendra le 1er novembre prochain à Mayotte, et Philippe Vigier y était le 27 septembre dernier.
Je veux associer à mon propos le ministre de la santé et de la prévention, Aurélien Rousseau, et la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, qui sont également très engagés sur cette question.
Comment en sommes-nous arrivés là ? La situation actuelle est liée à trois facteurs.
Le premier est un déficit pluviométrique, auquel nous devons nous habituer, et qui est la conséquence d’un dérèglement climatique qui s’accentue.
Le deuxième est un afflux de population. Sur ce point, vous avez utilisé des mots qui sont en deçà de la réalité. Les infrastructures d’eau potable de Mayotte n’ont pas été prévues pour un nombre de personnes en situation irrégulière comparable à celui que nous constatons.
Le troisième facteur est un manque de célérité de la part des autorités responsables dans la conduite des travaux, malgré les moyens existants, et ce depuis 2017.
Que faisons-nous face à la crise, face à l’urgence, et pour la pérennité ?
Face à la crise, nous avons mis en place une cellule interministérielle pilotée par la Première ministre, et organisé des distributions de bouteilles d’eau. Je n’insiste pas sur ces points.
Face à l’urgence, nous devons lancer quantité de travaux avant l’été prochain, et nous nous y attelons d’ores et déjà.
Pour la pérennité, nous mettons en place un plan 2024-2027 à hauteur de 400 millions d’euros, comprenant des usines de dessalement, des forages, d’éventuelles retenues collinaires et la réutilisation d’eaux usées. Tous les moyens seront mis en œuvre, tant l’ampleur des travaux nécessaires est importante, avec des taux de fuite oscillant entre 20 % et 35 % sur une partie des réseaux.
Quelle gouvernance mettons-nous en place ?
Monsieur le sénateur, la compétence eau relève des collectivités territoriales. Mais la vérité oblige à dire que tout ce qui aurait dû être fait au cours des dernières années ne l’a pas été.
Il n’y a pas de tabou. Nous n’avons pas décidé une renationalisation, mais nous considérons que nous ne pourrons pas faire face à la crise que nous connaissons sans un appui exceptionnel de l’État. Je pense à cet égard aux sept agents dédiés de mon ministère, ainsi qu’aux moyens du ministère de la santé et de celui des outre-mer. Au-delà, nous devrons nous demander quel est le bon niveau de soutien et d’accompagnement de l’État aux collectivités territoriales. Merci pour votre engagement ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.)
maladie hémorragique épizootique
M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Pierre Médevielle. Monsieur le ministre de l’agriculture, depuis début septembre, les cheptels bovins du Grand Sud-Ouest sont atteints d’une maladie virale à forte contagiosité, la maladie hémorragique épizootique (MHE), transmise par un moucheron du type culicoïde.
Les premières études engagées pour consolider nos données sur la mortalité de cette maladie fournissent des chiffres dans une fourchette allant de 0,3 % à 3 %. Nous notons également de nombreux avortements.
Dans une majorité des cas, la guérison survient au bout de quelques jours, en traitant avec des anti-inflammatoires non stéroïdiens très coûteux.
Dans certains cheptels, plus de 50 % des animaux sont touchés. Les mesures de confinement mises en place dans un rayon de 150 kilomètres autour des foyers n’ont fait qu’aggraver les conséquences économiques de cette crise, puisque les éleveurs se sont vu interdire les marchés italien et espagnol.
Depuis la mi-octobre, ces marchés sont de nouveau autorisés, sous certaines conditions. Cependant l’épizootie progresse, en affectant très lourdement les finances de nos éleveurs.
Monsieur le ministre, nous devrons faire face, dans quelques semaines, à un problème national. Quelles mesures prophylactiques pourraient-elles être mises en place ?
Le Gouvernement a-t-il prévu des mesures financières compensatoires afin d’aider les acteurs de cette filière bovine déjà rudement éprouvée ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Pierre Médevielle, je veux tout d’abord vous remercier de poser cette question. Vous l’avez dit, nos éleveurs sont confrontés pour la première fois à ce virus MHE depuis son apparition avérée, le 19 septembre dernier, avec trois cas, dans les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées. La situation de crise s’aggrave, puisque 39 foyers étaient recensés le 29 septembre dernier, et 1 200 foyers au 20 octobre dernier.
Je veux d’abord adresser un message de solidarité aux éleveurs de ces départements. Je pense en particulier à ceux des Pyrénées-Atlantiques et des Hautes-Pyrénées, qui sont particulièrement touchés.
Notre priorité a été d’agir immédiatement sur les marchés et d’engager des discussions avec les principaux pays importateurs, notamment l’Italie et l’Espagne. À cet égard, je tiens à remercier publiquement mes homologues italien et espagnol. Nous avons en effet pu débloquer la situation en moins de quinze jours, via un certain nombre de mesures sanitaires de précaution que vous avez évoquées, notamment le confinement dans un rayon de 150 kilomètres, ce qui a permis de crédibiliser la démarche sanitaire de la France pour ce qui concerne cette maladie épizootique.
Au-delà de ces éléments essentiels qui ont permis de débloquer 95 % de l’export, nous devons poursuivre notre travail de diplomatie sanitaire avec d’autres pays.
J’en viens aux conséquences économiques, que nous voyons apparaître au fur et à mesure. Elles sont liées aux frais vétérinaires, aux pertes liées à la morbidité et à des déficits de production. Il nous faut encore évaluer avec précision ces pertes pour examiner les dispositifs que nous pourrions mobiliser.
En outre, depuis l’apparition de cette maladie, un comité de crise assure au quotidien le suivi de quarante fermes tests afin d’étudier les risques et l’impact sur les exploitations.
Dans les jours ou les semaines qui viennent, nous disposerons d’un certain nombre de résultats qui nous permettront de construire avec les professionnels les dispositifs dont ils auront besoin pour surmonter la crise.
Au-delà, cet épisode montre que nous avons besoin de repenser notre système sanitaire et son financement. Les MHE vont se multiplier, remontant du sud vers le nord, puisqu’il s’agit d’un effet du dérèglement climatique. Il s’agit là d’un travail de moyen et long terme. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour la réplique.
M. Pierre Médevielle. Je vous remercie, monsieur le ministre, de prendre en compte cette situation urgente. Bien sûr, il est trop tôt pour évaluer ses conséquences financières, car elle évolue très rapidement. Et la crise ukrainienne nous a douloureusement rappelé notre besoin de souveraineté énergétique et, surtout, alimentaire.
La filière bovine est sujette à de nombreuses attaques, depuis trop longtemps. Les cheptels diminuent et les éleveurs souffrent. C’est un nouveau coup dur pour ce fleuron de notre agriculture. Je compte sur le Gouvernement pour aider cette filière et nos éleveurs. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
expérimentation des territoires zéro chômeur
M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. Philippe Grosvalet. « C’est une grande joie, c’est un nouveau départ ! » J’aurais pu commencer ainsi ma première prise de parole dans cet hémicycle, mais ce n’est pas moi qui parle. C’est Véronique, 50 ans, qui vient de signer son contrat à durée indéterminée grâce au projet « territoires zéro chômeur de longue durée » au sein de l’entreprise à but d’emploi de Pontchâteau, en Loire-Atlantique. (Applaudissements sur des travées des groupes RDSE, SER et GEST.)
Comme Véronique, plus de 3 600 personnes éloignées durablement de l’emploi ont pu retrouver toute leur place dans la société, mais surtout leur fierté et leur dignité.
Cette expérimentation repose sur trois principes fondamentaux que le président du fonds national d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, Louis Gallois, rappelle inlassablement : personne n’est inemployable ; ce n’est pas le travail qui manque ; ce n’est pas l’argent qui manque.
Lancée en 2016 sur dix sites, l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » est une véritable réussite. Depuis la loi du 14 décembre 2020 ont été habilités 48 nouveaux territoires, et 98 autres se sont porté candidats. L’Italie et la Belgique s’en sont inspirées, et le Comité européen des régions souhaite l’essaimer dans les pays de l’Union européenne.
Or cette expérience est mise à mal par des choix budgétaires incompréhensibles. En effet, depuis le 1er octobre, la contribution au développement de l’emploi (CDE) est passée de 102 % du Smic à 95 %.
De plus, le budget prévu en 2024 pour cette expérimentation est largement insuffisant, malgré une augmentation apparente. Il manque 20 millions d’euros pour couvrir la baisse de la contribution au développement de l’emploi et accompagner les projets déjà engagés.
Dans ce contexte, monsieur le ministre, quelles sont les mesures envisagées pour permettre le bon développement de ce projet exemplaire et pour faire en sorte que les 3 600 salariés de cette nouvelle entreprise ne soient pas condamnés à revenir à la case départ ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI, INDEP et SER, ainsi que sur quelques travées des groupes GEST et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Monsieur le sénateur Grosvalet, je sais l’engagement qui est, et qui fut le vôtre comme élu local pour la promotion de l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » et le développement des entreprises à but d’emploi.
Vous l’avez dit, nous sommes en l’espèce dans le cadre d’une expérimentation, qui s’appuie sur deux lois : une première avait autorisé la création de dix territoires, une seconde a étendu l’expérimentation, permettant qu’elle se déploie désormais dans soixante territoires. À l’heure où je vous parle, cinquante-huit territoires ont été agréés et j’ai systématiquement agréé, comme ma prédécesseure, les territoires proposés par le fonds national d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, présidé par M. Louis Gallois.
Actuellement, 2 200 équivalents temps plein sont financés pour un budget de l’État de 44 millions d’euros en 2023 ; cela représente un engagement de l’État à hauteur de 20 000 euros par emploi. Nous devons nous donner le temps de l’évaluation – c’est le sens d’annonces récentes – et travailler sur des perspectives plus tenables et plus régulées.
Je m’explique en un mot : le budget de l’État n’est malheureusement pas élastique.
Mme Audrey Linkenheld. Cela dépend pour qui !
M. Rachid Temal. Il y a 20 millions d’euros à trouver…
M. Olivier Dussopt, ministre. Nous avons besoin de moyens pour financer ces aides à l’emploi, mais aussi pour connaître la trajectoire de ces emplois, c’est-à-dire faire en sorte de prévoir, et donc de budgéter. Le financement de l’État, je l’ai dit, s’élève à 20 000 euros par an et par emploi,…
M. Rachid Temal. Ce n’est pas sérieux !
M. Olivier Dussopt, ministre. … auxquels s’ajoutent les financements des conseils départementaux, qui sont tenus de financer…
Une voix sur les travées du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. « Salauds de pauvres ! »
M. Olivier Dussopt, ministre. Je viens d’entendre dire les mots « salauds de pauvres ! » Il est honteux de parler ainsi s’agissant d’une expérience qui permet d’accompagner des gens éloignés de l’emploi. Vous devriez avoir honte d’utiliser ces termes-là ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)
Il ne suffit pas de siéger sur les travées de la gauche pour en avoir les valeurs : vous en êtes la démonstration. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est le comble…
M. Olivier Dussopt, ministre. Pour ce qui concerne la question de M. Grosvalet, nous sommes prêts à travailler à un meilleur pilotage afin d’aller au-delà des soixante expérimentations. Quant au budget pour 2024, il prévoit une augmentation des moyens alloués aux territoires zéro chômeur de longue durée, qui passent de 44 millions à 69 millions d’euros. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
glyphosate
M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Michaël Weber. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, les risques sanitaires liés à l’utilisation du glyphosate, mis en évidence dans plusieurs études scientifiques indépendantes, ont conduit l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à qualifier cette substance de « cancérogène probable » dès 2015.
Dans son avis très controversé, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) cherche maladroitement à en relativiser les risques. À la suite de la publication de cet avis, la Commission européenne a proposé aux États membres de renouveler son autorisation pour une durée de dix ans, alors même que les dangers du glyphosate ne sont plus à démontrer. D’ailleurs, nos concitoyens ne s’y sont pas trompés : deux tiers des Français rejettent son utilisation.
En 2017, la France a voté pour la première fois contre la réautorisation de cet herbicide dans l’Union européenne pour une durée de cinq ans. La voix de la France n’a cependant pas suffi pour obtenir l’interdiction européenne. Le Président de la République s’était à l’époque engagé à sortir la France du glyphosate « au plus tard dans trois ans », engagement qu’il a lui-même enterré dès le fameux grand débat national.
En 2019, les autorités publiques ont mis en place un plan d’action de sortie du glyphosate ; l’efficacité de ce plan s’est révélée malheureusement très relative.
Voilà quelques jours, la France, par manque de courage, décide de s’abstenir lors du vote de la proposition de la Commission européenne sur le renouvellement de la licence d’utilisation du glyphosate pour dix ans dans l’Union ; il n’a manqué que deux voix pour obtenir son interdiction…
Dans quelques jours, un nouveau scrutin devra définir la position européenne. Nous savons qu’en l’absence de majorité la Commission prendra la main sur la décision. Nous devinons, le cas échéant, quelle sera l’issue.
Monsieur le ministre de l’agriculture, c’est une question de santé publique ! Quand comptez-vous prendre vos responsabilités et sortir du double discours ? En définitive, quelle est la position de la France ? Depuis 2015, quels moyens avez-vous mis en œuvre pour accompagner le monde agricole dans la recherche de moyens de substitution ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST – M. Ludovic Haye applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Weber, je vous remercie de votre question, qui me permet de faire le point sur ce sujet du glyphosate, parfois un peu polémique et traité de façon caricaturale. (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. Rachid Temal. Ce n’est pas sérieux !
M. Marc Fesneau, ministre. Oui, ce sujet est polémique et caricaturé, je tiens à le redire !
Je vais vous dire quelle est la position de la France sur les produits phytosanitaires : elle est d’essayer de tenir une trajectoire de réduction de leur utilisation – une trajectoire que nous avons amorcée pour la première fois au cours du quinquennat précédent.
Pour ce qui est en particulier du glyphosate, je rappelle que depuis 2017 nous avons réduit les usages de près de 27 %, ce qu’aucun gouvernement n’avait été capable de faire avant nous, y compris ceux que vous soutenez, monsieur le sénateur, et y compris ceux, de par le monde, qui vous servent de référence ! Nous sommes le seul pays à avoir réussi à réduire les usages du glyphosate. (Protestations sur les travées du groupe GEST. – Mme Cécile Cukierman s’exclame.)
La position de la France s’est exprimée dans le cadre communautaire.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Macron a menti…
M. Marc Fesneau, ministre. Je rappelle qu’il s’agit d’une décision communautaire, prise à l’échelle de la Commission : (MM. Guillaume Gontard et Yannick Jadot protestent.) il a été décidé d’interdire le glyphosate partout où l’on peut trouver d’autres solutions.
Dans certaines situations, il n’y a pas d’autre solution, par exemple dans l’agriculture de conservation des sols. On peut se complaire dans d’inlassables « y’a qu’à, faut qu’on » ; on peut répéter en boucle qu’il y a des solutions de substitution. Mais il faut parfois reconnaître qu’il n’y en a pas, que la recherche est nécessaire, étant entendu que nous sommes bel et bien sur la trajectoire de la réduction.
Par ailleurs, s’il n’y a pas d’autre solution, il n’y a pas d’interdiction : telle est la ligne que nous nous sommes fixée et à laquelle nous nous tiendrons. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. – Applaudissements sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)
Je reviens de la Somme. Des gens expliquent qu’il existe des solutions pour se passer des néonicotinoïdes ; la vérité est qu’elles restent introuvables.
M. Yannick Jadot. Cela s’appelle la bio !
M. Marc Fesneau, ministre. Nous maintenons la position de la France quant à l’interdiction : là n’est pas le sujet. Mais la substitution est beaucoup plus complexe que vous ne semblez le penser. Parlez-en à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) ! (Protestations sur des travées des groupes GEST et SER.)
Nous avons besoin d’y travailler ; tel est le sens des moyens que nous mobilisons pour la recherche et l’innovation, l’objectif étant de réduire progressivement l’utilisation de ces produits. En tout cas, la France est le seul pays au monde à tenir une position de réduction de l’usage du glyphosate, et c’est cette position que nous continuerons à défendre. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Thomas Dossus manifeste son exaspération.)
M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour la réplique.
M. Michaël Weber. Monsieur le ministre, je crois surtout que vous n’êtes pas au rendez-vous de l’histoire. Du courage, s’il vous plaît ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)
concurrence fiscale comme moteur de l’évasion fiscale
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
M. Éric Bocquet. Mille milliards de dollars ! Ce n’est pas une exclamation du capitaine Haddock (Mme Nathalie Goulet applaudit.) : cette somme vertigineuse, 950 milliards d’euros, équivaut aux PIB cumulés du Danemark et de la Belgique, ou encore à trois fois les recettes du budget de notre pays. (M. Didier Marie approuve.)
Cette somme, surtout, correspond aux profits que les grandes entreprises de la planète ont transférés vers les paradis fiscaux sur la seule année 2022, selon le bilan établi par l’Observatoire européen de la fiscalité rendu public lundi matin. Nous apprenons par ailleurs, dans ce rapport, que le taux effectif d’imposition des milliardaires du monde est compris entre 0 % et 0,5 %.
À force de baisser constamment l’impôt sur les sociétés et sur les grands patrimoines, les gouvernements, dont le vôtre, mesdames, messieurs les ministres, rognent eux-mêmes leurs propres recettes.
L’argument libéral – s’il y a évasion fiscale, c’est parce que les impôts sont trop élevés – ne résiste pas à l’examen : malgré la baisse constante des prélèvements sur les entreprises, la fuite des profits ne cesse d’augmenter. Pis encore, elle a lieu au cœur de l’Union européenne, dans des pays comme l’Irlande ou les Pays-Bas.
N’est-il pas temps pour le Gouvernement de mettre un terme décisif à cette concurrence fiscale dévastatrice et d’ouvrir enfin le chantier de l’harmonisation fiscale au sein de l’Union européenne ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Mme Nathalie Goulet et M. André Guiol applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme. Monsieur le sénateur Bocquet, vous m’interrogez sur l’action du Gouvernement en matière de lutte contre la fraude. Je vais donc porter à votre connaissance les éléments transmis par le ministre délégué chargé des comptes publics, M. Thomas Cazenave, qui est retenu en ce moment même à l’Assemblée nationale et vous prie de l’en excuser.
Le Gouvernement a présenté au printemps dernier, sur un sujet que vous connaissez bien, monsieur le sénateur Bocquet, un plan de lutte contre toutes les fraudes aux finances publiques. Vous l’avez dit avec force : lutter contre la fraude, c’est d’abord, évidemment, s’assurer que chacun s’acquitte de sa contribution, mais c’est aussi un enjeu de cohésion sociale et un enjeu de finances publiques.
Ce plan prévoit que 1 500 emplois supplémentaires soient consacrés directement à la lutte contre la fraude fiscale au sein même de la direction générale des finances publiques d’ici à 2027. Mais ce n’est pas tout. Vous le savez, un nouvel arsenal juridique est également prévu, c’est-à-dire une vingtaine de dispositifs supplémentaires qui seront soumis à votre examen – je citerai, par exemple, le renforcement de la lutte contre les prix de transfert abusifs.
Nous avançons : les résultats du contrôle fiscal l’attestent. En 2022, ce sont près de 15 milliards d’euros d’impôts éludés qui ont été mis en recouvrement, un montant en hausse de plus de 25 % par rapport à 2018.
Mme Cécile Cukierman. La France est sauvée !
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. S’en féliciter, oui ; s’en satisfaire, non.
Le Conseil d’évaluation des fraudes s’est réuni pour la première fois le 10 octobre dernier sous la présidence du ministre Cazenave. Il est composé d’une trentaine de membres, directeurs d’administration, experts internationaux, mais aussi parlementaires. À l’occasion de cette réunion, un programme de travail a été arrêté. L’objectif est de produire un rapport d’ici à l’été prochain.
M. Philippe Bas. Encore ?
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Les représentants parlementaires ont été désignés par les présidents des commissions des finances et des affaires sociales de chaque chambre.
Des propositions complémentaires sont envisagées, comme la création d’un cadastre financier mondial ou la conduite de travaux pour une imposition minimale des particuliers les plus fortunés à l’échelle internationale.
Dotés de ces nouveaux outils, nous serons en mesure d’atteindre un objectif que nous partageons : nous montrer intraitables contre les écornifleurs qui pratiquent la fraude fiscale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Cécile Cukierman. Il y a de la marge !
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour la réplique.
M. Éric Bocquet. Des paroles aux actes… Je crains, madame la ministre, que notre pays ne soit une partie du problème du fait des choix de votre majorité.
En faisant adopter dernièrement, à l’Assemblée nationale, un amendement dont l’objet est d’exonérer les fédérations sportives internationales d’impôt sur les sociétés, de cotisation foncière des entreprises et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises afin de les attirer en France, votre majorité alimente cette course folle au moins-disant fiscal, si dommageable pour nos finances publiques et pour la capacité de notre société à relever les grands défis qui sont devant elle. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
radicalisation dans le sport
M. le président. La parole est à M. Michel Bonnus, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Michel Bonnus. Ma question s’adresse à Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
Madame la ministre, dans cette période très troublée, l’équipe de France de rugby nous a donné de la joie, elle nous a rendus fiers, parce qu’elle avait du cœur et parce qu’elle avait envie de bien faire, sur le terrain et en dehors.
Le sport n’a pas son pareil pour véhiculer des valeurs fortes, nobles, celles de l’effort, du travail, du respect, du collectif et de la solidarité. Le sport n’a pas son pareil pour cadrer des enfants, des adolescents, et en faire des adultes responsables, des citoyens attachés aux valeurs de la République. Nous ne remercierons jamais assez les éducateurs et les bénévoles de leur travail. Et je me réjouis que le Président de la République ait annoncé que le sport serait « grande cause nationale » en 2024.
Le sport est un facteur d’émancipation et de liberté, j’en suis intimement convaincu… du moins en théorie. Car le sport, à l’image de notre société, est attaqué ! Pis, il est un des milieux privilégiés de déstabilisation de notre République et de promotion du séparatisme.
Prière dans les vestiaires, port du voile sur les terrains, refus de la mixité, discours prosélyte antirépublicain, les attaques séparatistes se multiplient insidieusement, mais de plus en plus souvent ouvertement, au sein de nos structures sportives. Sénat, Assemblée nationale, chercheurs et sociologues, éducateurs, tous établissent ce constat accablant : la République perd du terrain dans le sport.
Les islamistes ne s’en cachent plus, d’ailleurs : les clubs de sport sont leur principale source de recrutement et d’embrigadement.
Il y a quelques semaines, 69 clubs de basket ont conjointement réclamé la fin de l’interdiction du port du voile en compétition. Un comble !
M. Gabriel Attal, ministre de l’éducation nationale, a fait preuve de fermeté et n’a pas tremblé en interdisant l’abaya dans nos écoles. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP. – Mme Cécile Cukierman s’exclame.)
Madame la ministre, ma question est simple, car pour défendre les valeurs de la République il faut être ferme : êtes-vous prête à interdire toute pratique dérogeant aux principes de laïcité et menaçant notre République ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – MM. Jean-Luc Brault, Pierre Jean Rochette et Joshua Hochart applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques. Monsieur le sénateur Bonnus, le sujet du séparatisme dans le sport exige de la fermeté, de la lucidité, de la vigilance.
M. François Bonhomme. Et de la clarté !
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. C’est en ce sens que j’ai fait diligenter au cours de cette année près de 3 500 contrôles de clubs sportifs, parmi lesquels 27, soit 0,8 %, ont donné lieu au repérage de signaux faibles de séparatisme.
C’est toujours 0,8 % de trop, et il faut en effet prévenir les risques là où ils se trouvent. D’où le plan d’action que j’ai mis en œuvre de manière résolue : 117 référents pour la prévention de la radicalisation déployés dans les services déconcentrés du ministère des sports, des référents citoyenneté mobilisés dans les fédérations, 6 000 contrôles programmés dans les clubs sportifs et un processus de conventionnement lancé entre onze fédérations et le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation.
Le tout s’assortit de moyens supplémentaires consacrés à ces sujets : 20 effectifs de plus en 2023, et 36 en 2024.
Pour ce qui est du port du voile, j’ai salué la décision du Conseil d’État de valider l’article des statuts de la Fédération française de football indiquant que le port du voile pouvait être interdit en compétition pendant le temps et sur les lieux des matchs. J’ai conforté ce régime dans les statuts de la Fédération française de basket-ball, et j’ai fait connaître à chacune des fédérations que dans l’exercice autonome de leur pouvoir réglementaire elles avaient la faculté d’ajuster leurs statuts pour coller à ces dispositions.
M. François Bonhomme. Et le courage, et l’audace ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Nous les accompagnons en ce sens en leur donnant toutes les clés, y compris juridiques, sur ces sujets.
Je le redis très fermement, ma main ne tremblera jamais pour faire utiliser les moyens que le Gouvernement a fait inscrire dans la loi en matière de contrôle du respect du contrat d’engagement républicain : retirer des subventions, suspendre des agréments ou, si nécessaire, fermer des établissements.
Le sport est un bien précieux ; il doit être préservé des tentations que vous avez décrites, monsieur le sénateur, mais également des propos inutilement polémiques ou inutilement anxiogènes. Voici nos maîtres-mots : lucidité, vigilance et la plus grande des fermetés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)
M. François Bonhomme. Et clarté !
M. le président. La parole est à M. Michel Bonnus, pour la réplique.
M. Michel Bonnus. Rendre les fédérations autonomes sur ce sujet, c’est très dangereux ! Elles ont besoin de vous ; elles ont besoin d’être aidées. J’ai été perturbé, madame la ministre, de vous entendre dire qu’il fallait leur donner les clés et les laisser décider : on ne peut agir ainsi sans danger. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Franck Dhersin et Olivier Cigolotti applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Marion Canalès. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question porte sur l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée », et j’y associe ma collègue Karine Daniel.
Aucun répit, aucun repli : aucun répit face à la crise sociale et au chômage, aucun repli pour cette expérimentation qui a déjà permis à 3 600 personnes de sortir de la privation d’emploi.
Votée à deux reprises à l’unanimité par le Parlement, cette expérimentation a été saluée en 2020 par la ministre du travail de l’époque comme une « solution d’insertion sur mesure ». Elle a été coconstruite avec la société civile, et son utilité sociale et démocratique est citée en exemple par la Commission européenne ; l’Italie et la Belgique en dupliquent le modèle.
À l’été, première saison, vous avez pourtant choisi de baisser la contribution de l’État au financement des emplois créés de près de 1 500 euros par an par équivalent temps plein.
À l’automne, deuxième saison, le budget prévisionnel, certes dynamique, se révèle ne pas être à la hauteur de l’enjeu : il est insuffisant. Il ne permettra pas la montée en puissance pourtant actée du dispositif, gèlera les perspectives d’embauche dans les territoires habilités et dans ceux qui sont prêts à l’être.
Fragiliser le modèle, c’est précipiter l’échec. Pourtant, les résultats positifs sont visibles partout et dépassent largement le cadre de la personne concernée.
En sept ans, à Thiers, dans le Puy-de-Dôme, le taux de réussite au brevet des collèges a grimpé de 12 %. On ne peut pas feindre d’ignorer que l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » a contribué à cette dynamique vertueuse.
Les territoires, les collectivités, sont au rendez-vous.
Le Parlement à l’unanimité est au rendez-vous.
Les acteurs et employeurs privés et publics, ceux de l’économie sociale et solidaire, sont au rendez-vous.
Les effets positifs sont au rendez-vous.
Cela a certes un coût, mais cela n’a pas de prix ! De l’argent, il y en a, monsieur le ministre du travail ; de l’argent, il en faut pour tenir les engagements pris : 20 millions d’euros.
Quels moyens allez-vous mobiliser durablement pour la France qui essaie, qui innove et qui fait la démonstration de sa réussite ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes GEST et CRCE-K.)
M. Bernard Jomier. Vingt millions d’euros !
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice Canalès, une fois n’est pas coutume, permettez-moi de vous répondre par des questions, pour vous faire partager la difficulté à laquelle nous sommes confrontés.
Vous dites que financer un emploi à 95 % n’est pas suffisant. Or 95 % de prise en charge au niveau du Smic, c’est le plus haut taux de financement des emplois aidés connu dans notre pays. Toutes les structures d’insertion par l’activité économique aimeraient pouvoir bénéficier de la même chose !
Vous dites également qu’il faut accompagner tous les développements et toutes les perspectives. Je verse une question à la réflexion collective : en application de la deuxième loi d’expérimentation, que tout le monde a votée à l’unanimité, les départements doivent contribuer au financement des expérimentations à hauteur de 15 % de la part financée par l’État. Tous les départements sont-ils d’accord pour que les 15 % qu’ils doivent apporter représentent des sommes dont ils n’ont pas la maîtrise ? La réponse est non ! Nombre de présidents de département me l’ont dit.
Vous dites encore que le budget prévu pour l’expérimentation est dynamique, mais insuffisant. Il passe de 44 millions d’euros à 69 millions d’euros, soit une augmentation de 53 % ! Là encore, toutes les structures d’insertion par l’activité économique aimeraient pouvoir bénéficier de la même chose.
Mon cabinet a eu de nombreux échanges tout au long du mois d’octobre avec Louis Gallois, qui préside le fonds national d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée et, à ce titre, propose au Gouvernement de nouveaux territoires à labelliser.
Vendredi soir dernier – je tiens le message à votre disposition –, mon directeur de cabinet a proposé à M. Gallois qu’au cours de l’année 2024, en fonction des besoins, nous ajoutions 10 millions d’euros au budget de l’expérimentation, à une condition : que nous puissions anticiper les créations d’emploi, c’est-à-dire disposer de projections, afin de prévoir, tout simplement, à quelle hauteur il faudra porter la mobilisation d’argent public. Il a essuyé un refus ; c’est dommage, mais nous allons continuer à discuter pour voir comment accompagner cette expérimentation, dans un cadre qui est le cadre budgétaire de l’État.
Je l’ai dit : le budget de l’État n’est pas élastique ; ce n’est pas un libre-service dans lequel on peut piocher au gré d’un développement que l’État ne serait pas en mesure de maîtriser. Le niveau d’intervention dont nous parlons est inédit, comme va le montrer l’évaluation qui est en cours. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Audrey Linkenheld. Il manque 20 millions d’euros !
M. Hussein Bourgi. C’est une question de priorité politique !
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour la réplique.
Mme Marion Canalès. Monsieur le ministre, le taux de cofinancement des emplois par l’État va passer de 102 % à 95 %. On ne change pas les règles en cours de route !
Par ailleurs, il existe des pistes pour abonder les finances publiques : rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), taxation des superprofits, etc. (« Et allez ! » sur les travées du groupe Les Républicains.) L’un de nos collègues, il y a quelques instants, a fait des propositions…
De l’argent, il y en a : on peut en trouver ! De l’argent, il en faut pour l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée » et pour les personnes qui en bénéficient ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)
dotation d’équipement des territoires ruraux
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Marc Boyer. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
La moitié des sénateurs de cette assemblée sort d’une campagne électorale, et le constat est très clair : les maires de nos communes rurales ont besoin de notre soutien pour se développer.
Qui mieux que les élus pour connaître leur territoire et leurs besoins ? Qui mieux que les élus pour les soutenir ? Or, en septembre 2017, vous avez supprimé la dotation d’action parlementaire, dite réserve parlementaire, prétendument pour rétablir la confiance dans la vie politique. (M. Jean-Michel Arnaud opine.)
Pourquoi avoir recentralisé le soutien aux communes rurales dans les mains de l’État ? Car, nous le savons tous, la commission d’élus de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et les parlementaires qui y siègent ne disposent que d’un avis consultatif. Pourtant, ce sont eux qui connaissent les territoires.
Cette suppression de la réserve parlementaire a même été vécue comme un abandon, la promesse de fonds de compensation n’ayant jamais été tenue.
Afin de corriger cette erreur et de soutenir au plus près nos communes rurales, le Gouvernement va-t-il rétablir la réserve parlementaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – MM. Hussein Bourgi, Jean-Marc Vayssouze-Faure et Ludovic Haye applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Jean-Marc Boyer, je vous demande de bien vouloir excuser Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Où est-il ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. La DETR, outil essentiel d’aménagement de nos territoires ruraux,…
Des voix sur les travées du groupe Les Républicains. La réserve !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. … a doublé ces dix dernières années (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.) et a permis de soutenir 22 000 projets dans toute la France, dans 15 000 communes, 800 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), 550 syndicats : on a mis sur la table 1 milliard d’euros pour 4 milliards d’euros d’investissements ! Je tenais à souligner cet effet de levier. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Bas. Ce n’est pas la question !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. De surcroît, nous sommes particulièrement exigeants vis-à-vis des préfets (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) quant à la façon dont la DETR est utilisée : elle doit aller partout, et elle va partout, y compris dans la ruralité la plus profonde.
Vous le savez, les préfets consultent obligatoirement la commission d’élus de la DETR de chaque département avant de décider de la répartition de la dotation. Cette gouvernance est essentielle : elle permet de vérifier que l’on distribue la DETR, non sur la base d’un travail administratif réalisé en chambre, mais dans un véritable dialogue avec les élus (Nouveau brouhaha sur les mêmes travées.) ; nous y sommes extrêmement attachés.
Cette commission départementale réunit déjà de nombreux acteurs. Nous ne sommes donc pas favorables à une augmentation du nombre de ses membres : on ne décide pas mieux parce que l’on est plus nombreux autour de la table. En revanche, notre exigence est totale quant à l’information de tous les parlementaires, et même de ceux qui ne siègent pas au sein de cette commission. (M. Olivier Rietmann lève les bras au ciel.)
Mme Sophie Primas. L’information ne suffit pas !
Des voix sur les travées du groupe Les Républicains. Une réponse sur la réserve !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Le préfet doit les appeler tous pour vérifier que la dotation est bien répartie. (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Mathieu Darnaud. Il y a un problème, alors !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Tel est le cas dans de nombreux départements. J’ai effectué 105 visites de départements et participé à 40 assemblées générales de maires : personne ne m’a jamais parlé d’un problème de répartition de la DETR… (Rires sur les mêmes travées, couvrant la voix de l’oratrice.)
M. le président. S’il vous plaît !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Par ailleurs, ma collègue secrétaire d’État Prisca Thevenot a engagé un travail sur la gouvernance du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA). Je suis certaine que nous pouvons y travailler tous ensemble. (MM. Thani Mohamed Soilihi et François Patriat applaudissent. – Nouvelles exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. S’il vous plaît ! C’est moi qui répartis la parole, à défaut de la DETR ! (Sourires.)
La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour la réplique.
M. Jean-Marc Boyer. Je vous remercie, madame la ministre, mais je vous avais interrogée sur la réserve parlementaire…
Il est temps de redonner des moyens à nos territoires ruraux et de soutenir leur développement ; le Sénat l’a déjà demandé via l’adoption d’un amendement que j’ai présenté, en octobre 2020, en vue de rétablir la réserve parlementaire. Cette initiative avait été suivie par le dépôt, en juillet 2022, d’une proposition de loi cosignée par plus de cent sénateurs, visant à instituer une dotation d’action parlementaire au sein de la DETR.
D’autres démarches parlementaires récentes confirment ces initiatives et mettent au grand jour l’injustice de cette suppression pour nos territoires. Notre démocratie a soif de décentralisation !
Notre démocratie demande que l’on renforce le lien entre le local et le national, entre le maire et le parlementaire, et que l’on redonne du pouvoir de décision aux élus nationaux dans un esprit de concertation collégiale, dans la transparence et dans la confiance. Voilà ce que sollicitent les maires des territoires ruraux, et ils méritent d’être exaucés ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP. – MM. Hussein Bourgi et Jean-Marc Vayssouze-Faure applaudissent également.)
dépendance aux métaux rares chinois
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie.
Nous sommes en train de troquer notre ancienne dépendance au pétrole contre une nouvelle dépendance aux métaux rares chinois. Le piège de cette nouvelle dépendance est en train de se refermer : vendredi dernier, le ministère du commerce chinois a annoncé qu’à partir du 1er décembre prochain il réclamerait un permis d’exportation pour certains produits en graphite.
La Chine est le premier producteur de graphite du monde : elle assure près de 70 % de la production mondiale. Plus problématique encore, c’est elle qui raffine 90 % de la production planétaire de graphite.
À l’heure actuelle, sans la Chine il n’y a pas de graphite. Or sans graphite il n’y a pas de batteries, car c’est dans cette matière qu’est faite leur électrode. Et sans batteries, bien entendu, il n’y a pas de transition énergétique !
Au début du mois d’août, la Chine avait restreint l’exportation de gallium et de germanium, métaux rares indispensables à la fabrication des circuits intégrés, des panneaux photovoltaïques ou de la fibre optique.
Nous ne découvrons pas notre dépendance aux métaux rares chinois : l’Union européenne établit depuis 2011 une liste de matières premières critiques. En 2016, j’ai moi-même rendu, avec Marie-Christine Blandin, un rapport d’information pointant la nécessité de recycler les métaux des téléphones portables.
En 2022, M. Philippe Varin a remis au Président de la République un rapport sur la sécurisation de l’approvisionnement en matières premières. En mars dernier, la Commission européenne a proposé deux textes pour faire face à ce défi. En mai, la France a lancé un fonds d’investissement consacré aux minerais et métaux critiques.
Mais tout cela est encore embryonnaire, et c’est maintenant qu’il faut agir. Le Gouvernement travaille-t-il à un plan d’urgence pour faire face à une éventuelle rupture d’approvisionnement en métaux rares ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP. – MM. Rachid Temal et Mickaël Vallet applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.
M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger. Monsieur le sénateur Longeot, vous avez parfaitement raison : la Chine a annoncé le 20 octobre dernier des mesures de contrôle à l’exportation du graphite, qui est une matière première indispensable pour la fabrication de beaucoup de nos batteries, notamment pour la transition énergétique vers le véhicule électrique. Cette annonce fait suite à des décisions déjà rendues en juillet sur d’autres matières premières, comme le gallium et le germanium.
Nous étudions l’impact de cette situation avec la délégation interministérielle aux approvisionnements en minerais et métaux stratégiques, et avec l’Observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles.
Comment répondre à pareilles décisions ? Tout d’abord, en se coordonnant avec l’ensemble des pays de l’Union européenne, plus largement avec nos alliés. Cette question sera notamment posée dans le cadre de la réunion des ministres du commerce du G7 qui se tiendra à Osaka le week-end prochain, à laquelle je me rends.
Nous mettons en place, ensuite, une véritable diplomatie des matières premières : en vue de « dérisquer » notre relation à la Chine, nous souhaitons développer une stratégie de diversification des approvisionnements ; d’où l’intérêt des accords commerciaux et des accords internationaux que nous avons avec d’autres pays ou d’autres régions du monde pour sécuriser, précisément, les approvisionnements vers l’Europe.
Enfin – vous l’avez très justement dit, monsieur le sénateur –, il faut que ces matières puissent être traitées et raffinées à même le sol européen. Telle est la stratégie industrielle à laquelle travaille le Gouvernement. Nous n’hésiterons pas à soutenir financièrement un certain nombre de projets dans le cadre des plans qui sont prévus à cet effet. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Béatrice Gosselin. Ma question porte sur le soutien à la filière pêche, et j’associe ma collègue Vivette Lopez, sénatrice du Gard, à mes propos.
Les pêcheurs vivent une crise sans précédent : aux conséquences du Brexit s’ajoute une envolée des coûts du carburant.
Certes, la filière a bénéficié de 100 millions d’euros, sur les 736 millions d’euros initialement alloués à la France par l’Union européenne dans le cadre de la réserve d’ajustement au Brexit. Mais, le 1er mars 2023, notre pays a demandé le transfert de 504 millions d’euros non dépensés pour financer le programme REPowerEU. Même si toute l’enveloppe n’était pas destinée à la filière, il aurait peut-être été pertinent d’augmenter les fonds consacrés à la pêche.
En effet, de nombreux défis sont à relever.
Il faut tout d’abord pérenniser l’aide aux carburants autrement que par des mesures d’urgence, en reconduisant le régime spécifique pour l’Ukraine en 2024, avec un plafond de 300 000 euros d’aides.
Il convient ensuite d’augmenter le plafond des aides de minimis – actuellement 30 000 euros d’aides par entreprise sur trois ans –, ou de prévoir au moins un dispositif de minimis par navire et non plus par entreprise.
Il importe également – c’est un point très important – d’accompagner la transition énergétique des navires.
Il est nécessaire, enfin, d’améliorer les services publics dans les ports. Le port de Granville attend depuis trois ans un service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire (Sivep), dont l’absence a des conséquences économiques importantes puisqu’il oblige les navires à faire un détour par Saint-Malo !
La pêche est une richesse pour notre économie. Elle fait vivre nos littoraux au travers d’emplois non délocalisables et participe à la souveraineté alimentaire de notre pays. La filière a besoin d’une véritable ambition à court, moyen et long termes.
Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi avoir laissé filer des crédits européens qui auraient été si utiles à la filière ? Quels sont les engagements du Gouvernent pour rassurer nos pêcheurs sur leur avenir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Christine Herzog applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la mer.
M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer. Madame la sénatrice Gosselin, la France n’a pas laissé filer 504 millions d’euros ! Il n’existe pas non plus de cagnotte magique ou cachée…
En réalité, la réserve d’ajustement au Brexit a été bien utilisée et a servi à financer les actions auxquelles elle était destinée. Il s’agissait notamment de faire face aux conséquences directes du Brexit, qu’elles soient sociales, environnementales ou économiques.
Pour ce qui concerne le secrétariat d’État chargé de la mer et les enjeux de pêche, plus de 100 millions d’euros ont été utilisés. La Cour des comptes l’a elle-même reconnu : c’est l’un des ministères qui a le mieux utilisé cette réserve. (M. Rachid Temal ironise.) Je pense, en particulier, au plan d’accompagnement individuel des navires qui ne peuvent pas accéder aux eaux britanniques, ou à l’accompagnement de l’aval de la filière, notamment les mareyeurs.
Nous avons également utilisé d’autres canaux disponibles pour accompagner nos pêcheurs face à l’urgence. Vous le voyez, le fait de ne pas bénéficier de transferts de la réserve d’ajustement au Brexit ne nous a pas empêchés d’agir pour soutenir la filière.
Nous l’avons fait en consacrant plus de 75 millions d’euros pour l’aide aux carburants, avec un renouvellement multiplié par dix. (M. Rachid Temal ironise de nouveau.) Vous avez affirmé à tort que le plafond des aides était fixé à 30 000 euros : non, grâce à l’action de la France, nous avons fait passer ce seuil de 30 000 à 330 000 euros.
Au-delà de la question urgente de l’aide aux carburants, il importe également de réduire notre dépendance aux énergies fossiles. C’est la raison pour laquelle j’ai annoncé en septembre dernier un plan de transition énergétique de la flotte à hauteur de 450 millions d’euros issus de la taxe sur les éoliennes en mer, afin de réduire cette dépendance aux énergies fossiles et de tenir les deux bouts de la chaîne : la souveraineté énergétique et la souveraineté alimentaire.
Vous le voyez, madame la sénatrice, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour faire face aux urgences et pour donner les moyens aux pêcheurs, partout sur le territoire, de continuer à sortir en mer, avec des navires consommant beaucoup moins de carburant. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, pour la réplique.
Mme Béatrice Gosselin. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez comme moi qu’en 2026 il y aura une clause de revoyure des accords du Brexit pour les contrats de pêche. Ce sera donc un gros problème pour la filière si les pêcheurs ne reçoivent pas d’aides ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
critiques du conseil de l’europe envers la france
M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme Corinne Narassiguin. Madame la Première ministre, le 10 octobre dernier, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté à une grande majorité un rapport ainsi qu’une résolution pointant de nombreuses violations par la France de ses obligations relatives à son adhésion au Conseil de l’Europe : usage abusif du 49.3, surpopulation carcérale structurelle, problème avec la doctrine du maintien de l’ordre durant la crise des « gilets jaunes » et pendant les manifestations contre la réforme des retraites, questionnements sur l’indépendance de la justice, concentration des médias qui nuit au pluralisme…
De plus, le 18 octobre dernier, le Conseil d’État s’est opposé à l’interdiction systématique des manifestations propalestiniennes, en contradiction avec une consigne du ministre de l’intérieur adressée aux préfets.
Enfin, votre gouvernement vient d’enclencher le treizième recours au 49.3 sur le projet de loi de finances pour 2024, en battant des records de vitesse ; le quatorzième est imminent sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale… Vous privez les députés de tout débat et de tout vote !
Madame la Première ministre, où emmenez-vous ainsi notre démocratie ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’Europe.
Mme Laurence Boone, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée de l’Europe. Madame la sénatrice Corinne Narassiguin, vous avez évoqué l’adoption du rapport de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.
Comme vous le savez, celui-ci est rédigé par une commission de suivi composée de parlementaires. Ses travaux sont, sans conteste, d’excellente qualité. Néanmoins, vous n’êtes pas sans savoir qu’il s’agit d’une assemblée consultative, dont les rapporteurs choisissent eux-mêmes le thème de leur rapport.
M. Hervé Gillé. Pas de chance !
Mme Laurence Boone, secrétaire d’État. Il n’est donc pas totalement impossible d’envisager que le choix de la thématique ait été guidé par quelques considérations politiques. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.) Ni l’avis du secrétaire général du Conseil de l’Europe ni celui des autres organes décisionnaires ne sont engagés par ce rapport. Cela étant, nous étudions évidemment avec attention les recommandations de cette instance.
Par ailleurs, il ne vous aura sans doute pas échappé que ce rapport saluait également les efforts déployés par la France pour renforcer l’indépendance des autorités judiciaires.
Pour ce qui concerne les données relatives aux forces de l’ordre, je suis quelque peu étonnée. L’inspection générale de la police nationale (IGPN) et l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) recensent le nombre de blessés et de tués pendant les missions de police. En 2022, le taux de blessés était de 5 %, soit quatre cas. Nous allons, bien sûr, continuer de suivre ces dossiers afin d’examiner quelles sont les pistes d’amélioration possible.
Quant au recours au 49.3, je vous rappelle que cette procédure figure dans la Constitution, qui a été adoptée avec un score de près de 86 % en 1958 (Exclamations amusées.), et renforcée en 2008. Il fait donc partie de nos outils constitutionnels. Eh oui, c’est la Constitution ! (Vives protestations sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)
M. Bernard Jomier. Ce n’est pas une réponse !
M. Mickaël Vallet. Vous êtes ministre des sports ? Vous sortez les rames !
M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour la réplique.
Mme Corinne Narassiguin. Madame la secrétaire d’État, vous vous dédouanez bien vite !
La France a également été condamnée à de multiples reprises par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour sa surpopulation carcérale et sa politique migratoire.
Le gouvernement auquel vous appartenez s’apprête à restreindre les droits les plus fondamentaux des personnes migrantes dans le cadre du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, qui sera examiné prochainement.
Par ailleurs, le ministre de l’intérieur, M. Darmanin, a déclaré ce week-end qu’il assumait les condamnations de la CEDH et qu’il était prêt à soutenir les propositions de la droite et des Républicains visant à s’asseoir sur nos obligations européennes, le tout après avoir attaqué la Ligue des droits de l’homme il y a quelques mois !
M. Michel Savin. Il revient à sa famille !
Mme Corinne Narassiguin. Vous emmenez la France pas à pas vers un régime illibéral, et vous le savez ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)
décret du 22 septembre 2023 sur la prolongation de centres d’hébergement d’urgence pour les migrants
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Muller-Bronn. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’intérieur, mais il est absent aujourd’hui.
Madame la secrétaire d’État, en mai dernier, le maire de Saint-Brevin-les-Pins était victime d’un incendie criminel et de violences déclenchées par l’installation d’un centre d’accueil pour migrants.
Mme Laurence Rossignol. Non, par l’extrême droite !
Mme Laurence Muller-Bronn. Il a démissionné, faute d’avoir été soutenu et protégé par les services de l’État, qu’il aurait pourtant alertés.
En réponse à ces défaillances inacceptables, le Gouvernement a fait son mea culpa, et s’est engagé à travailler avec les élus pour assurer leur sécurité et prévenir les tensions, hélas ! prévisibles, notamment dans les projets d’installation d’hébergement d’urgence.
M. Mickaël Vallet. Pourquoi « prévisibles » ?
Mme Laurence Muller-Bronn. Or le Gouvernement fait exactement l’inverse. Il vient de passer en force le 25 septembre dernier, contre l’avis unanime des élus locaux, le décret n° 2023-894 qui impose aux maires l’installation de centres d’hébergement d’urgence dans leur commune, sans leur demander leur avis et – cerise sur le gâteau ! – sans même avoir obligation de les en informer.
Madame la secrétaire d’État, ne s’agit-il pas d’hypocrisie d’État ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté et de la ville.
Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Madame la sénatrice Muller-Bronn, le décret que vous évoquez pérennise un dispositif mis en place en juin 2021, qui a permis de faciliter et d’accélérer certaines opérations spécifiques et temporaires.
Ce décret permet en effet de dispenser d’autorisations d’urbanisme, dans certaines zones, l’implantation, pour une durée maximale de vingt-quatre mois, de certaines constructions temporaires et démontables, telles que les résidences universitaires, les résidences sociales, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale ou les structures d’hébergement d’urgence.
Ce décret permet par exemple, dans une démarche d’urbanisme transitoire, de faciliter l’implantation de constructions temporaires destinées à l’hébergement d’urgence sur du foncier en attente d’urbanisation.
Nous avons également élargi son champ d’application aux constructions à usage de relogement temporaire rendues nécessaires par les opérations réalisées dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).
Ces opérations « à tiroirs », qui doivent rester exceptionnelles, peuvent se révéler incontournables pour la réalisation de certaines opérations de reconstruction du patrimoine social, de réhabilitation lourde ou de démolition dans le cadre de ces programmes. Ces règles ont donc été établies pour l’ensemble des structures d’hébergement, et non de manière spécifique pour les structures accueillant des demandeurs d’asile.
La création de places d’accueil dans le dispositif national d’asile obéit à un schéma national décliné territorialement. Le Gouvernement a soutenu la création de 30 000 nouvelles places depuis 2017, ce qui démontre notre engagement à accueillir de manière digne les demandeurs d’asile.
Pour organiser cet accueil dans les meilleures conditions, les préfets ont pour instruction claire du ministre de l’intérieur d’associer étroitement tous les élus à la création de nouvelles places d’accueil pour les centres d’hébergement. (Marques de dénégation sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour la réplique.
Mme Laurence Muller-Bronn. Madame la secrétaire d’État, cette décision a été prise de façon autoritaire. Les représentants d’élus se sont prononcés à l’unanimité, et par deux fois, contre ce décret qui pérennise pour deux ans, et peut-être plus, une situation prévue pour durer trois mois.
Ce décret dispense de tout contrôle des formalités d’urbanisme des opérations qui échappent donc à l’autorité locale, laquelle n’est même pas consultée, alors qu’elle est pourtant placée en première ligne dans l’organisation du quotidien !
Mme Sophie Primas. Eh oui !
Mme Laurence Muller-Bronn. Vous le savez, ces derniers mois, les projets d’installation en Bretagne, dans la commune de Bruz, ou dans le Tarn, dans la commune de Réalmont, sont des échecs. En effet, en milieu rural, les services publics nécessaires à l’accompagnement, à l’éducation, à l’insertion et à la sécurité sont très insuffisants.
Une nouvelle fois, le Gouvernement crée de la division et déstabilise les équilibres territoriaux avec une violence bien feutrée. Il passe outre l’avis des maires, qui deviennent spectateurs d’une politique dont ils auront pourtant à assumer les risques et les responsabilités à la place de l’État, et surtout les conséquences.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Laurence Muller-Bronn. Si l’État lui-même n’a pas de respect pour l’autorité locale, votre politique ne peut conduire qu’au désordre et à l’échec. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
accueil des gens du voyage
M. le président. La parole est à M. Damien Michallet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Damien Michallet. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Comme lui, j’ai été maire de ma commune et, comme tant d’autres élus locaux, j’ai été confronté à l’occupation illégale de terrains, notamment par les gens du voyage.
Comme tant d’autres élus locaux, je me suis retrouvé désarmé face à ces individus qui sont en réalité de fins connaisseurs de notre législation et qui ratent manifestement une brillante carrière de juriste…
Dans cette situation, que fait l’élu local ? Il s’en remet à la justice ! Or force est de constater que si la saisine du juge aboutit – parfois – à l’expulsion des occupants illégaux, cette décision d’expulsion est rarement assortie d’une autorisation de recours à la force publique.
En mai dernier, le tribunal judiciaire de Vienne a décidé de faire droit à la requête d’une intercommunalité, la communauté d’agglomération Porte de l’Isère (Capi), qui demandait au juge l’expulsion sans délai des personnes, des animaux et des caravanes appartenant à des individus sur la commune de la Verpillière ! Seulement, l’autorité préfectorale ne peut faire procéder à leur évacuation. Pourquoi ? Parce qu’en réalité l’ordonnance mentionne bien l’expulsion, mais l’autorisation du recours à la force publique est rayée d’un coup de crayon du magistrat…
Face à ces situations qui mettent à mal le moral de nos élus locaux, leur légitimité et parfois leur intégrité physique, pouvez-vous nous éclairer sur la doctrine employée par le ministère de l’intérieur pour assurer l’application stricte des décisions d’expulsion ?
Pouvez-vous nous prouver que l’État mettra en place tous les moyens nécessaires pour garantir aux élus que le recours à la justice, en France, n’est pas vain ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Michallet, je pensais que vous alliez aborder la question des rassemblements de gens du voyage.
En réalité, vous évoquez un sujet structurant, à savoir la difficulté – signalée à chacun de mes déplacements – rencontrée par les intercommunalités qui, bien qu’en conformité avec la loi, n’arrivent en effet pas à faire appliquer le droit en vigueur.
Je prendrai contact avec vous à l’issue de cette séance,…
M. Mickaël Vallet. Chanceux !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. … car je suis extrêmement désireuse de voir dans quelle mesure nous pourrions donner à nos juges les moyens d’arbitrer dans le sens que nous souhaitons tous. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
Pour ce qui concerne les rassemblements – je pensais que vous feriez allusion à celui de Cessieu, dans votre département –, les aires présentes dans nos communes ne sont pas forcément adaptées. Certes, ce n’était pas l’objet de votre question, mais j’aurai un certain nombre de réponses à proposer sur le sujet.
Quoi qu’il en soit, je tiens à travailler avec vous pour que les élus locaux voient la loi s’appliquer de manière plus stricte.
M. François Bonhomme. Encore raté !
M. Fabien Genet. Il vous reste trente secondes…
M. le président. La parole est à M. Damien Michallet, pour la réplique.
M. Damien Michallet. C’est bien sûr avec plaisir, madame la ministre, que je vous accueillerai en Isère. Je vois, d’ailleurs, que vous avez bien affûté votre connaissance de ce territoire !
Au-delà de mon seul département, il s’agit d’une problématique nationale, tant pour les grands regroupements que pour les petites communes. J’ai pris pour exemple la non-application d’une ordonnance du tribunal judiciaire de Vienne, qui met à mal toutes les décisions que la justice française pourrait prendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Notre prochaine séance de questions au Gouvernement aura lieu le mercredi 8 novembre à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Loïc Hervé.)
PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Lors des scrutins nos 9 à 12 portant sur la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels, M. Pierre-Jean Verzelen souhaitait voter pour.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue.
Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique des scrutins concernés.
4
Amélioration de l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels (proposition n° 747 [2022-2023], texte de la commission n° 49, rapport n° 48).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 3 bis A.
Article 3 bis A
Le V de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, sont insérées trois phrases ainsi rédigées : « Sous la responsabilité du responsable de l’établissement, il assure l’encadrement de l’équipe soignante de l’établissement et le suivi médical des résidents de l’établissement, pour lesquels il peut réaliser des prescriptions médicales. Il veille à la qualité de la prise en charge médicale des résidents. La fonction de médecin coordonnateur peut être assurée par un ou plusieurs médecins. » ;
2° (Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 166 rectifié ter, présenté par Mmes Bourcier et Paoli-Gagin, M. Capus, Mme Lermytte et MM. Médevielle, Brault, Guerriau, Chasseing, A. Marc et Malhuret, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
1° Après les mots :
l’établissement et
insérer les mots :
peut, pour les résidents qui le souhaitent, assurer
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En deçà d’un nombre de places au sein de l’établissement fixé par décret, la fonction de coordination est occupée par un seul médecin.
II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le médecin coordonnateur assure le suivi médical du résident, ce dernier ou, le cas échéant, son représentant légal ou la personne de confiance désignée en application de l’article L. 311-5-1 peut désigner le médecin coordonnateur comme médecin traitant du résident dans les conditions prévues à l’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale. Au moment de l’admission dans l’établissement, le contrat de séjour ou le document individuel de prise en charge mentionné à l’article L. 311-4 du présent code fait mention du choix du résident, qui peut être modifié à tout moment de son séjour dans l’établissement. »
La parole est à Mme Corinne Bourcier.
Mme Corinne Bourcier. Les médecins coordonnateurs des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) sont limités dans leur prescription aux résidents aux cas d’urgence et aux risques vitaux. Par ailleurs, on estime qu’environ un tiers des Ehpad ne disposent pas de médecin coordonnateur. Dans ces conditions, le suivi médical de leurs résidents peut s’avérer complexe.
L’article 3 bis A, voté en première lecture à l’Assemblée nationale, vise à intégrer au sein des Ehpad le suivi médical des résidents. Toutefois, la rédaction adoptée rend le suivi médical par les médecins coordonnateurs obligatoire et garantit insuffisamment le respect du consentement des résidents.
Aussi, cet amendement vise à ce que le médecin coordonnateur a seulement la possibilité d’assurer le suivi médical des résidents, sans que cela soit obligatoire, et à condition que ceux-ci le souhaitent, afin d’assurer un respect de leur consentement ; à ce que les résidents ou leurs représentants légaux puissent désigner le médecin coordonnateur comme médecin traitant lorsqu’il assure leur suivi médical ; et à ce que la fonction de coordination soit occupée par un seul médecin en deçà d’un nombre de places, fixé par décret, au sein de l’établissement.
M. le président. L’amendement n° 87 rectifié bis, présenté par Mme Guillotin, M. Bilhac, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin et MM. Gold, Grosvalet, Guérini, Laouedj et Roux, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après les mots :
l’établissement et
insérer les mots :
peut, pour les résidents qui le souhaitent, assurer
II. – Alinéa 3
Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le médecin coordonnateur assure le suivi médical du résident, ce dernier ou, le cas échéant, son représentant légal ou la personne de confiance désignée en application de l’article L. 311-5-1 peut désigner le médecin coordonnateur comme médecin traitant du résident dans les conditions prévues à l’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale. Au moment de l’admission dans l’établissement, le contrat de séjour ou le document individuel de prise en charge mentionné à l’article L. 311-4 du présent code fait mention du choix du résident, qui peut être modifié à tout moment de son séjour dans l’établissement. »
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. L’amendement que je présente au nom du groupe du RDSE est quasiment identique à l’amendement précédent, si l’on excepte la mesure sur le plafonnement du nombre de médecins coordonnateurs en Ehpad.
L’amendement vise à laisser la liberté au médecin coordonnateur d’assurer le suivi médical des résidents d’un Ehpad et de faire des prescriptions, sans en faire une obligation. Quand on connaît les difficultés de certains de ces établissements à trouver des médecins pour s’occuper de leurs patients, on ne peut que considérer qu’il s’agit d’un bon amendement !
Pour l’avoir vécu à titre personnel, je peux témoigner que, lorsqu’on est médecin coordonnateur dans un Ehpad, il faut disposer de la liberté de prescrire : une telle faculté permet d’améliorer le suivi du patient.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales. Il ne faut pas faire de confusion entre le rôle du médecin coordonnateur, qui est maintenant chargé du suivi médical des résidents, et la fonction de médecin traitant.
L’article 3 bis A permet de revaloriser le rôle du médecin coordonnateur dans les Ehpad en lui confiant explicitement la responsabilité du suivi médical des résidents. Cette mesure constitue une avancée, saluée par la commission, qui améliorera la qualité de la prise en charge des résidents et contribuera à l’attractivité de la fonction de médecin coordonnateur.
Il ne faut pas oublier qu’un tiers des Ehpad n’ont pas de médecin coordonnateur. Quand un établissement en perd un, il a toutes les peines du monde à en retrouver un.
Toutefois, le médecin coordonnateur ne peut pas assurer un nombre illimité de missions. De nombreuses tâches lui incombent déjà et sa responsabilité est renforcée par cette proposition de loi.
Le problème de cet article – et c’est la raison pour laquelle la commission a supprimé deux alinéas –, ce sont les effets de bord. En donnant la possibilité, qui est, je l’avoue, tentante, à un résident de choisir le médecin coordonnateur comme médecin traitant, il ne faudrait pas que, par effet de bord, le médecin traitant qui avait l’habitude de le suivre en vienne à ne plus se déplacer pour voir son patient.
Le médecin coordonnateur se retrouverait alors avec une charge de travail plus importante, ce qui risquerait de le conduire à se retirer de l’établissement. Si, au contraire, il s’investit pleinement dans l’établissement, il pourrait être amené à délaisser sa patientèle en ville.
Une telle mesure revient donc à déplacer le problème, raison pour laquelle l’avis est défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre de la santé et de la prévention. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 166 rectifié ter et défavorable à l’amendement n° 87 rectifié bis. La notion de seuil est en effet importante pour éviter de « diluer » la fonction de médecin coordonnateur en deçà d’un certain nombre de places.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je vais retirer mon amendement au profit de l’amendement n° 166 rectifié ter, qui a reçu un avis favorable du Gouvernement.
Je comprends que l’on puisse voir le verre à moitié vide, mais je le vois plutôt à moitié plein. À partir du moment où il s’agit d’une liberté tolérée et qu’il n’y a pas d’obligation, cette mesure aurait pu constituer un plus.
Quoi qu’il advienne des amendements, les améliorations apportées par la commission sont déjà satisfaisantes.
M. le président. L’amendement n° 87 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote sur l’amendement n° 166 rectifié ter.
M. Bernard Jomier. Au fond, on constate que le système est en mutation. Il y a quelques années, un médecin coordonnateur en Ehpad n’avait aucun droit de prescription : seuls les médecins traitants intervenaient. On le voit bien, la pénurie a là aussi produit des effets.
La rapporteure a raison, il faut maintenir l’intervention des médecins traitants dans les établissements. Mais il me semble qu’à l’avenir ce seront de plus en plus les médecins coordonnateurs qui assumeront ces fonctions. Alors où faut-il placer la borne pour évoluer sans heurter aucun de ces professionnels ?
L’amendement de Mme Bourcier me paraît assez intéressant, car la détermination d’un seuil correspond bien à la réalité. Il permet de poursuivre la transition sans supprimer, comme l’indique l’exposé des motifs de cet amendement, le droit d’un résident à avoir un médecin traitant qui n’est pas le médecin coordonnateur, ce qui ménage une place à chacun.
La position de la commission est quelque peu défensive : elle fige les choses dans la situation actuelle, peut-être par crainte de cette évolution.
Nous n’aurions pas été favorables à l’amendement de Mme Guillotin qui, si je puis dire, allait un peu plus vite que la musique. En revanche, celui de Mme Bourcier est, j’y insiste, compatible avec l’évolution que nous constatons : nous le voterons donc.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 166 rectifié ter.
(L’amendement est adopté.) – (M. Louis Vogel applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 3 bis A, modifié.
(L’article 3 bis A est adopté.)
Article 3 bis B
(Non modifié)
Au deuxième alinéa du I de l’article L. 4041-4 du code de la santé publique, les mots : « six mois » sont remplacés par les mots : « trois ans ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 160 rectifié est présenté par MM. Mohamed Soilihi et Omar Oili, Mme Havet et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 226 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après l’article L. 4411-2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4411-… ainsi rédigé :
« Art. L. 4411-… – Pour l’application de l’article L. 4041-4 à Mayotte, une société interprofessionnelle de soins ambulatoires doit compter parmi ses associés au moins un médecin et un auxiliaire médical. »
La parole est à M. Olivier Bitz, pour présenter l’amendement n° 160 rectifié.
M. Olivier Bitz. Chacune et chacun le sait ici, les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) sont des outils majeurs pour l’accès aux soins de nos concitoyens. Face aux très grandes difficultés que connaît Mayotte en matière de démographie médicale, il est nécessaire d’apporter aux professionnels qui acceptent de se coordonner des possibilités assouplies et des garanties juridiques afin de favoriser la création de ces structures sur ce territoire spécifique.
Cet amendement permet de créer une société interprofessionnelle de soins ambulatoires (Sisa) avec un seul médecin à Mayotte, ce qui facilitera la création de MSP et limitera les dissolutions subies à la suite du départ de médecins du territoire.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 226.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Compte tenu de la situation sanitaire particulière à Mayotte, la commission a émis un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Nous ne nous opposerons pas à ces amendements, mais nous voudrions faire remarquer que nos collègues mahorais demandent très régulièrement des dispositions particulières dans les textes que nous examinons.
C’est le seul territoire qui fait de telles demandes à peu près systématiquement, ce qui est probablement le signe d’une inadaptation du statut actuel de Mayotte. Quand on demande autant de dispositions dérogatoires à la loi commune, c’est que ce statut ne fonctionne pas.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 160 rectifié et 226.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 3 bis B, modifié.
(L’article 3 bis B est adopté.)
Article 3 bis C
Le chapitre II du titre IV du livre préliminaire de la quatrième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 4042-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 4042-4. – La responsabilité à l’égard des tiers de chaque associé de la société interprofessionnelle de soins ambulatoires est engagée dans la limite de deux fois le montant de son apport dans le capital de la société.
« L’associé qui n’a apporté que son industrie est tenu comme celui dont la participation dans le capital social est la plus faible. »
M. le président. L’amendement n° 156 rectifié, présenté par Mme Guillotin, M. Bilhac, Mmes M. Carrère et N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet, Guérini et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
de deux fois le
par le mot :
du
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale de cet article votée par l’Assemblée nationale.
Les députés ont souhaité sécuriser l’investissement des professionnels de santé qui viennent travailler dans les maisons de santé pluriprofessionnelles et qui acceptent de coordonner leurs activités, en leur apportant des garanties patrimoniales minimales. Ils ont ainsi prévu une limitation de leur responsabilité au montant de leur apport, comme c’est le cas dans certaines sociétés civiles spécifiques telles que les sociétés d’attribution d’immeubles en jouissance à temps partagé ou les sociétés à responsabilité limitée, alors que notre commission a souhaité porter cette responsabilité à deux fois le montant de leur apport.
Le but est d’inciter un maximum de professionnels à s’engager dans les MSP en limitant leur responsabilité en matière d’engagements financiers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à revenir sur la rédaction adoptée par la commission.
Consacrer une responsabilité limitée aux apports pour les associés en Sisa, comme cet amendement le prévoit, constituerait un précédent. Ce serait en effet la première fois qu’une telle mesure serait prévue pour une société civile non immobilière.
Au contraire, la solution, adoptée par la commission lors de l’examen du texte, de supprimer la responsabilité illimitée et de consacrer une responsabilité limitée à deux fois le montant de l’apport constitue un alignement bienvenu sur les régimes les plus favorables au sein des sociétés civiles non immobilières. C’est une solution d’équilibre entre la protection des créanciers et la sécurisation des associés, qui permettra de lever certains freins à la constitution d’une Sisa.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Madame la sénatrice, vous proposez de rétablir la responsabilité limitée des associés des Sisa au montant de leur apport dans la société, comme c’est le cas pour les sociétés d’exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl), souvent utilisées dans les cabinets médicaux de groupe.
Rétablir la responsabilité des dettes des professionnels au montant de leur apport pour les Sisa s’approcherait donc de ce qui existe déjà pour les professions médicales exerçant en groupe. C’est en effet, comme le disait la rapporteure, un précédent. Pour autant, le Gouvernement estime qu’il est indispensable de lever, à chaque fois que cela est possible, les freins à l’engagement des professionnels de santé vers des modes d’exercice coordonné.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. L’exercice coordonné est pour nous fondamental. Dans ce cadre, travailler dans une MSP représente, je le crois, l’avenir.
La construction juridique d’une Sisa n’est pas si simple : les médecins qui ont envie d’en monter une ont souvent recours à des associations qui les aident à franchir le pas sur le plan juridique et à mettre en place une MSP.
Revenir au texte tel qu’il a été voté par l’Assemblée nationale permettrait de lever un frein, bien réel, à l’adhésion à une MSP, et de simplifier la mise en place d’une Sisa.
Nous serons favorables à l’amendement de Mme Guillotin.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 156 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 3 bis C.
(L’article 3 bis C est adopté.)
Article 3 bis D
Après l’article L. 162-12-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-12-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 162-12-2-1. – Afin de favoriser la coordination des soins, l’assuré ou l’ayant droit âgé de seize ans ou plus relevant d’une affection mentionnée au 3° de l’article L. 160-14 nécessitant des soins infirmiers peut déclarer à son organisme gestionnaire de régime de base d’assurance maladie le nom de l’infirmier référent qu’il a choisi, avec l’accord de celui-ci. Le choix de l’infirmier référent suppose, pour les ayants droit mineurs, l’accord de l’un au moins des deux parents ou du titulaire de l’autorité parentale.
« Plusieurs infirmiers exerçant au sein d’un cabinet situé dans les mêmes locaux, au sein d’un même centre de santé mentionné à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique ou au sein d’une même maison de santé mentionnée à l’article L. 6323-3 du même code peuvent être conjointement désignés infirmiers référents.
« L’infirmier référent assure une mission de prévention, de suivi et de recours, en lien étroit avec le médecin traitant et le pharmacien correspondant.
« Pour les ayants droit âgés de moins de seize ans, l’un au moins des deux parents ou le titulaire de l’autorité parentale peut déclarer à l’organisme gestionnaire de régime de base d’assurance maladie le nom de l’infirmier référent qu’il a choisi, avec l’accord de celui-ci.
« Les modalités d’application du présent article sont définies par voie réglementaire. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 196, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
relevant d’une affection mentionnée au 3° de l’article L. 160-14 nécessitant des soins infirmiers peut déclarer
par le mot :
indique
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à ouvrir le dispositif d’infirmier référent créé par la proposition de loi à l’ensemble des patientes et des patients ayant un besoin répété et durable de soins infirmiers.
La restriction de l’infirmier référent aux seuls patients relevant d’une affection de longue durée (ALD) n’a pas de sens : le dispositif serait aussi utile à d’autres patients, tous ceux qui l’estiment nécessaire ou utile et ceux dont l’affection est en cours de reconnaissance.
Mes chers collègues, remettons de la souplesse dans le dispositif !
M. le président. L’amendement n° 64, présenté par M. Jomier, Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer les mots :
peut déclarer
par le mot :
déclare
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Je veux d’abord rappeler que notre assemblée est la première à avoir voté, il y a une demi-douzaine d’années, la création de ce dispositif soit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, en 2018, soit dans la loi défendue par Agnès Buzyn en 2019.
Le texte voté par l’Assemblée nationale prévoit que tous les assurés sociaux devront déclarer un infirmier référent, ce qui nous paraît quelque peu excessif : la plupart des assurés n’en ont pas besoin. La rapporteure a restreint cette mesure aux seuls patients en ALD, ce qui nous semble, à l’inverse, trop restrictif.
En effet, un certain nombre de patients qui n’ont pas d’ALD, par exemple des personnes âgées en perte d’autonomie, devraient s’inscrire à ce dispositif naissant. C’est pourquoi nous avons déposé deux amendements qui sont complémentaires – je défendrai le second dans quelques minutes.
Le premier vise à prévoir que les patients en ALD doivent déclarer un infirmier référent ; le second, que d’autres patients en ont la possibilité – il ne s’agit pas d’une obligation, contrairement à la rédaction retenue par l’Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’avis est défavorable tant sur l’amendement n° 196, qui permet à l’ensemble des patients de désigner un infirmier référent, que sur l’amendement n° 64, qui tend à faire de la désignation d’un infirmier référent une obligation pour l’assuré, et non plus une faculté.
Plusieurs organisations représentatives des infirmiers nous ont indiqué qu’il était préférable de centrer la mesure, dans un premier temps, sur les patients ayant un besoin répété et durable de soins infirmiers. Toutes nous ont, par ailleurs, indiqué que la désignation d’un infirmier référent devait demeurer une faculté, accessible facilement aux personnes en ayant besoin.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. La rédaction issue de la commission nous semble mieux correspondre aux réalités du parcours de soins et du recours aux infirmiers référents tels que nous les constatons aujourd’hui.
Avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 100 rectifié bis, présenté par M. Chasseing, Mme Lermytte, MM. J.P. Vogel, Guerriau et Grand, Mme Paoli-Gagin, MM. Brault, Wattebled, Capus, A. Marc, Malhuret, Médevielle et Rochette, Mmes Bourcier et L. Darcos, MM. Guérini, Fialaire, Milon et Hingray, Mme O. Richard et MM. Menonville, Nougein, Levi, Panunzi et Cadec, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après le mot :
déclarer
insérer les mots :
, sur décision de son médecin traitant,
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement, qui ne fait pas référence aux ALD, vise à limiter la désignation d’un infirmier référent à des prises en charge spécifiques, vues et approuvées par le médecin traitant. Il tend à supprimer la désignation d’un infirmier référent par tout assuré ou ayant droit.
La notion d’infirmier référent ne bénéficie pas d’une définition légale ou réglementaire, et son appellation interroge quant au rôle de ce professionnel vis-à-vis du médecin traitant. En effet, la désignation universelle d’un professionnel de santé référent fait doublon avec la désignation d’un médecin traitant et crée une confusion.
Il sera demandé aux patients de consulter en première intention l’infirmier référent, chargé de juger s’il est nécessaire de consulter un médecin, alors que ces deux professionnels ne font pas le même métier.
Si la désignation d’un infirmier référent est subordonnée à la décision du médecin traitant du patient ou du spécialiste qui connaissent les nécessités d’un suivi infirmier selon les pathologies, elle peut alors s’avérer intéressante dans le cadre d’une prise en charge spécifique, relevant d’une décision médicale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La reconnaissance d’une nouvelle fonction d’infirmier référent ne modifie pas la répartition des compétences entre professionnels de santé. Le médecin traitant demeurera le pivot de la prise en charge et du suivi des patients, comme de la coordination des soins.
Toutefois, la désignation d’un infirmier référent peut s’avérer utile pour les patients souffrant d’une ALD et ayant fréquemment besoin de soins infirmiers : elle doit alors être la plus aisée possible.
L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Le patient doit garder le libre choix des professionnels de santé qui le prennent en charge. La désignation d’un référent doit relever de sa décision.
Par ailleurs, les médecins traitants se plaignent déjà beaucoup de la surcharge administrative : une telle mesure ne ferait qu’ajouter une nouvelle gestion d’actes administratifs. Le médecin traitant doit évidemment être tenu informé de la désignation d’un infirmier référent par son patient, mais cela ne doit pas faire peser sur lui davantage de travail.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 100 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 65, présenté par M. Jomier, Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 162-12-2-…. – L’assuré ou l’ayant droit l’assuré ou l’ayant droit âgé de seize ans ou plus peut indiquer à son organisme gestionnaire de régime de base d’assurance maladie le nom de l’infirmier référent qu’il a choisi, avec l’accord de celui-ci. Le choix de l’infirmier référent suppose, pour les ayants droit mineurs, l’accord de l’un au moins des deux parents ou du titulaire de l’autorité parentale.»
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. La rapporteure a indiqué que les organisations infirmières ne souhaitaient pas une ouverture large du dispositif d’infirmier référent, ce qui est tout à fait juste. Elles nous ont dit la même chose, mais elles ont aussi estimé que la limitation de la mesure aux seuls patients en ALD – Daniel Chasseing vient d’évoquer ce point – était trop restrictive.
Un certain nombre de patients chroniques, en perte d’autonomie, ont des pathologies qui ne relèvent pas d’une ALD, mais ont besoin, par exemple, de pansements complexes pendant une durée de six ou huit mois : ils devraient pouvoir bénéficier du dispositif.
L’amendement prévoit que ces patients puissent déclarer un infirmier référent, sans en faire une obligation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je vous remercie, mon cher collègue, de reconnaître que les organisations représentatives des infirmiers nous avaient indiqué lors de nos auditions qu’il était préférable de limiter la mesure.
J’ai bien noté que votre amendement prévoyait une faculté, et non une obligation, de déclaration, mais qui est largement ouverte aux assurés de plus de 16 ans.
Dans la mesure où une telle demande n’a pas été exprimée lors des auditions que j’ai menées, je m’en tiens à la rédaction de la commission qui centre la mesure sur les personnes atteintes d’une ALD.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Même avis que la commission : la rédaction de la commission me paraît correspondre davantage aux réalités du parcours de soins.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Le Gouvernement a toujours été défavorable à ce dispositif – la jurisprudence est donc constante ! – et s’est à chaque fois opposé aux amendements, à tout le moins dans cet hémicycle, portant sur la création de l’infirmier référent.
Je n’ai pas assisté à l’audition à laquelle vous faites référence, madame la rapporteure : je ne sais donc pas exactement ce qui s’y est dit, mais j’ai reçu des courriers et échangé avec certaines organisations – je ne les citerai pas, car ce n’est pas le sujet – qui ont précisément mentionné les situations que j’ai rapportées.
Je constate d’ailleurs que votre réponse ne porte pas sur le fond, que vous ne dites pas que le dispositif n’est pas adapté. Le choix a été fait d’adopter dans un premier temps une mesure très restreinte, car j’ai bien compris que vous souhaitiez d’abord voir ce que cela donnerait. Mais cela manque de cohérence : si l’on estime qu’un infirmier référent a une utilité dans des situations de chronicité, alors il faut reconnaître qu’il a également un intérêt dans les situations de chronicité non couvertes par les ALD.
Comme nous avons apporté une reconnaissance au rôle de pharmacien référent sans qu’il soit encore pleinement déployé – on en est encore très loin –, il faut reconnaître la légitimité du rôle de l’infirmier référent dans un certain nombre de situations et, partant de là, élaborer le dispositif conséquent.
Je maintiens donc mon amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 3 bis D.
(L’article 3 bis D est adopté.)
Article 3 bis
Au deuxième alinéa de l’article L. 1434-12 du code de la santé publique, après le mot : « sociaux », sont insérés les mots : « , dont des professionnels de la santé scolaire, ».
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Je veux souligner le travail de la commission sur ce texte important. L’article 3 bis, sur lequel je m’exprimerai modestement – le mérite revenant à l’ensemble de mes collègues de la commission des affaires sociales –, vise à intégrer les professionnels de la médecine scolaire dans les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
La médecine scolaire a souvent été abordée en commission des finances par notre ancien collègue Gérard Longuet, qui était le rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire ». L’ensemble des personnels, qu’il s’agisse des médecins, des infirmiers, des psychologues et des assistantes sociales, relèvent du ministère de l’éducation nationale, qui est un acteur important avec plus de 20 000 équivalents temps plein.
Un rapport récent de la Cour des comptes mettait malheureusement en évidence le manque d’effectifs, alors même que la santé scolaire est une priorité pour les jeunes.
Les CPTS – il en existe plus de 750 – travaillent en partenariat avec les agences régionales de santé (ARS), les collectivités territoriales et les associations de prévention. Il s’agit de consolider l’action des professionnels de la médecine scolaire et de favoriser l’accès aux soins des enfants et des adolescents.
La commission a indiqué qu’il fallait privilégier la notion de santé scolaire plutôt que celle de médecine scolaire. J’irai dans son sens en ce qui concerne cet article.
M. le président. L’amendement n° 72 rectifié, présenté par Mme Micouleau, M. Burgoa, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Chatillon, Gremillet et Houpert, Mme Josende, M. Lefèvre, Mme Muller-Bronn, M. Piednoir et Mme Richer, est ainsi libellé :
Compléter cet alinéa par les mots :
et est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « La communauté professionnelle territoriale de santé associe des représentants des collectivités et groupements dont le périmètre administratif est concerné. »
La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps cet amendement et le suivant.
M. le président. J’appelle en discussion l’amendement n° 73 rectifié, présenté par Mme Micouleau, M. Burgoa, Mmes Bellurot, Bonfanti-Dossat et Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Chatillon, Gremillet et Houpert, Mme Josende, M. Lefèvre, Mme Muller-Bronn, M. Piednoir et Mme Richer, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le troisième alinéa du même article est complété par les mots : « , après avis des représentants des collectivités et de leurs groupements dont le périmètre administratif est concerné ».
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Laurent Burgoa. L’amendement n° 72 rectifié vise à associer les collectivités à la gouvernance des communautés professionnelles territoriales de santé.
L’amendement n° 73 rectifié vise à préciser que le projet régional de santé élaboré par la CPTS est soumis pour avis aux élus communaux et intercommunaux du territoire concerné.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements traitent du sujet abordé en séance hier, à savoir la représentation des collectivités territoriales au sein des CPTS.
Ces organismes doivent, selon nous, être laissés à l’initiative des professionnels de santé. Il peut bien sûr y avoir des discussions avec les élus locaux, mais je ne vois pas d’intérêt opérationnel à les y intégrer.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Je suis d’accord avec Mme la rapporteure.
Le dialogue entre les CPTS et les élus locaux me semble fondamental, notamment pour partager des éléments de diagnostic sur l’état de la population. Néanmoins, hier, au travers de vos votes, vous avez surtout renforcé leur place et leur rôle au sein des conseils territoriaux de santé (CTS), ce qui est plus pertinent.
Par ailleurs, l’histoire nous l’a montré, y compris lors de l’application de dispositions anciennes, le fait de donner le sentiment que les CPTS étaient des échelons administratifs rebutait les professionnels de santé. Cela ne signifie pas – c’est notamment le cas dans le territoire dont je suis originaire, le Gard – que les CPTS ne sollicitent jamais l’appui, le soutien, des élus ; simplement, en son cœur, le fonctionnement ne doit réunir que les professionnels de santé.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour explication de vote.
M. Laurent Burgoa. Je remercie M. le ministre d’avoir évoqué le département du Gard, l’un des plus beaux départements de France. (Sourires.)
Après l’avoir entendu, ainsi que Mme la rapporteure, je retire ces deux amendements.
M. le président. Les amendements nos 72 rectifié et 73 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix l’article 3 bis.
(L’article 3 bis est adopté.)
Article 4
I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 6111-1-3 est ainsi rédigé :
» Art. L. 6111-1-3. – Les établissements de santé et les autres titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 6122-1 sont responsables collectivement de la permanence des soins en établissement de santé ou au sein des autres titulaires de cette autorisation.
» Ils peuvent, ainsi que les professionnels de santé exerçant en leur sein, être appelés par le directeur général de l’agence régionale de santé à assurer celle-ci ou à y contribuer. Le directeur général de l’agence régionale de santé assure la cohérence de l’organisation de la permanence des soins mentionnée au premier alinéa au regard des impératifs de qualité et de sécurité des soins.
» L’activité des professionnels de santé extérieurs à un établissement de santé ou à un autre titulaire participant à la permanence des soins au sein de cet établissement ou de cet autre titulaire est couverte par le régime de la responsabilité qui s’applique aux agents dudit établissement ou titulaire.
» Les modalités et les conditions d’application du présent article sont définies par décret. Celui-ci précise les modalités de désignation des établissements de santé et des autres titulaires ainsi que les conditions d’engagement et de répartition dans le fonctionnement de la permanence des soins territorialisée entre les établissements de santé, les autres titulaires et les professionnels de santé. » ;
2° (Supprimé)
II. – (Non modifié) L’article L. 6111-1-3 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la présente loi, s’applique à compter de son entrée en vigueur, nonobstant toute clause contractuelle contraire.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’article 4 porte sur la permanence des soins en établissement de santé (PDSES).
La permanence des soins en établissement de santé désigne la prise en charge des patients à la sortie des urgences la nuit, le week-end et les jours fériés. Il s’agit concrètement de l’organisation de lignes de garde et d’astreintes assurées par les praticiens et couvrant près d’une trentaine de spécialités.
Quel problème cet article entend-il résoudre ? Des rapports récents de l’inspection générale des affaires sociales (Igas) le soulignent, il apparaît que le partage de la charge de la PDSES n’est aujourd’hui pas équilibré.
Surtout lorsque le système fonctionne sans lacune majeure, l’organisation actuelle tend à décourager les praticiens de l’hôpital public, qui vont parfois exercer dans le privé, afin, justement, d’échapper aux contraintes des gardes et astreintes. L’Igas a donc plaidé pour un rééquilibrage, de même que la Cour des comptes. La commission soutient également cette démarche, via la participation des établissements privés à la permanence des soins en établissements de santé.
La rédaction de l’amendement n° 222 rectifié de la commission, que je présenterai dans un instant, a exigé quelques ajustements avec M. le ministre ; c’est pour cette raison que je prends la parole à cet instant.
Nous sommes parvenus, je crois, à un bon équilibre, que traduit le sous-amendement du Gouvernement sur notre amendement. Cela nous permettra d’atterrir correctement, si j’ose dire. En effet, les établissements privés sont prêts à participer à la permanence des soins et entendent notre attente à cet égard.
La commission a donc proposé une gradation visant à inclure l’ensemble des établissements dans l’organisation de la permanence des soins, en les responsabilisant collectivement et en invitant les professionnels de santé à y participer. Ensuite, nous donnons au directeur général de l’agence régionale de santé un rôle pour éviter les doublons et s’assurer que la PDSES est effective.
Voilà les éléments d’explication que je souhaitais vous donner avant la discussion de cet article.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. En complément de ce que vient d’expliquer Mme la rapporteure, je précise que, la semaine dernière, parallèlement aux travaux de votre commission, nous avons nous-mêmes cheminé sur la question de la permanence des soins en établissement de santé.
Cette question a été, vous l’avez souligné, largement documentée par l’Igas. La charge est en effet inégalement répartie entre les établissements publics et les établissements privés, avec cette particularité supplémentaire que ces derniers sont des objets juridiques – des établissements de santé – et que les professionnels de santé qui y travaillent sont eux-mêmes libéraux. C’est dans ce contexte que le Gouvernement avait déposé un amendement à la toute fin de la semaine dernière.
Toutefois, la rapporteure et moi avons entre-temps réalisé un travail que je souhaite saluer, puisque, au fond, nous sommes sur la même ligne, notamment pour ce qui a trait à l’idée très importante, me semble-t-il, de gradation.
Il s’agit de poser d’abord un principe, puis d’appeler les établissements et les professionnels à participer à la PDSES en réunissant, le cas échéant, tout ce petit monde, si l’on ne parvient pas à assurer la permanence des soins. Enfin, de façon subsidiaire, on donne la possibilité au directeur général de l’ARS d’appeler les établissements et les professionnels de santé à assurer leur part dans la permanence des soins en établissement de santé. C’est l’un des éléments majeurs de ce texte.
C’est vrai, je le répète, cette réflexion a été quelque peu acrobatique, d’où le terme d’« atterrissage » retenu par la rapporteure. Cela fait sans doute partie des éléments qui justifient les remarques faites hier lors de la discussion générale sur le calendrier, lequel aurait pu être plus favorable à des échanges en amont et sereins.
En tout état de cause, je remercie la rapporteure d’avoir bien voulu s’engager dans ce travail collectif.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, sur l’article.
Mme Émilienne Poumirol. Vous venez de dire, monsieur le ministre, que l’atterrissage était difficile. Pour ma part, je ne peux que m’insurger contre la méthode employée !
Ce n’est pas la première fois que nous nous retrouvons dans cette situation : on nous présente en séance publique un sous-amendement du Gouvernement, certes discuté avec la rapporteure, mais dont la commission n’a pas eu connaissance ; nous n’avons donc pas pu l’étudier. Pour autant, on va tout de même nous demander dans quelques instants de voter sur un sous-amendement qui procède d’un « arrangement », si je puis m’exprimer ainsi, entre la rapporteure et le ministre de la santé. Cette méthode n’est pas acceptable, car cela revient à nier le rôle des parlementaires et de la commission.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, sur l’article.
Mme Céline Brulin. Je rejoins les propos de Mme Poumirol. Nous sommes confrontés à un exercice très compliqué consistant à examiner, sans anticipation, un amendement ayant des conséquences importantes.
Notre collègue Poumirol vient d’expliquer pourquoi il était compliqué pour nous de nous faire un avis à brûle-pourpoint, mais cela l’est davantage encore pour nos concitoyens. Nous ne sommes pas juste en train d’examiner, pour la forme, des amendements destinés à élaborer un texte. L’enjeu est ici de savoir si le dispositif proposé permettra d’améliorer la situation que nous connaissons aujourd’hui, dans laquelle des services d’urgence sont obligés de fermer et les lits d’aval font défaut.
Aussi, monsieur le ministre, puisque vous semblez avoir trouvé un terrain d’entente avec la majorité sénatoriale, je voudrais que vous nous expliquiez clairement, concrètement, si vos propositions comportent des moyens de contraindre le privé à assurer la permanence des soins en établissement de santé. Nous ne pouvons pas rester dans la situation actuelle !
Il me semblait que telle était la vocation initiale de ce texte. Nous avons d’ailleurs entendu en audition des acteurs du monde hospitalier qui ont fait de cette question une priorité – on peut le comprendre, eu égard à la situation que vivent les uns et les autres, aux drames que cela peut provoquer et à l’épuisement subi par le personnel soignant.
Monsieur le ministre, pouvez-vous prendre quelques instants pour nous éclairer, afin de préciser, dans le détail, comment tout ce processus sera mis en œuvre ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je veux prendre quelques instants pour répondre aux remarques de nos deux collègues sur les questions de méthode, que je ne peux que partager.
En effet, si nous avions eu le temps d’analyser la proposition du Gouvernement, d’examiner les autres possibilités et d’échanger, nous ne serions pas dans cette situation, dans laquelle nous avons été contraints d’étudier un sous-amendement quelques minutes avant la reprise de la séance publique. D’ailleurs, notre commission se réunissait ce matin encore et nous aurions tout à fait eu le temps de l’examiner à ce moment-là.
Je ferme cette parenthèse, mais je ne puis donc qu’approuver vos remarques, mes chères collègues. Par la suite, nous tâcherons d’avoir des méthodes différentes.
Sur le fond, l’enjeu a été largement débattu lorsque la rapporteure nous a présenté son rapport en commission et lorsqu’a été évoqué le point essentiel de ce texte, la permanence des soins.
La proposition qui nous est faite, et que vous allez malheureusement découvrir en séance, s’inscrit globalement dans l’esprit des dispositions adoptées en commission après que Corinne Imbert nous a présenté son rapport. Elle clarifie un certain nombre des situations dans lesquelles se trouvent les établissements et les professionnels de santé.
Cela étant, je suis également preneur de réponses aux questions posées par notre collègue Céline Brulin, monsieur le ministre.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 52 rectifié, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 6111-1-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 6111-1-3. – Les établissements de santé et les autres titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 6122-1 ainsi que les professionnels de santé exerçant en leur sein sont dans l’obligation d’assurer la permanence des soins.
« La permanence des soins en établissement de santé est assurée par les établissements de santé, les autres titulaires d’une autorisation de soins ou les professionnels de santé dans leur lieu habituel d’exercice.
« Les modalités et les conditions d’application du présent article, notamment les modalités de désignation des établissements de santé et des autres titulaires ainsi que les conditions d’engagement et de répartition dans le fonctionnement de la permanence des soins territorialisée entre les établissements de santé, les autres titulaires et les professionnels de santé, sont définies par voie réglementaire. » ;
2° Le I de l’article L. 6132-3 est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° L’organisation et la mise en œuvre de la permanence des soins en établissement de santé mentionnée à l’article L. 6111-1-3. »
II. – L’article L. 6111-1-3 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la présente loi, s’applique à compter de son entrée en vigueur, nonobstant toute clause contractuelle contraire.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à rendre obligatoire la permanence des soins pour les établissements privés de santé, puisque le texte qui nous est soumis ne prévoit, en tout cas jusqu’à présent, qu’une faculté et non une obligation.
Nous ne prétendons pas que les cliniques privées sont complètement absentes de la permanence des soins. Elles supportent à peu près 13 % de l’effort, mais, en général, elles assurent les urgences les plus simples, si je puis dire, les patients souffrant des pathologies les plus lourdes ou les plus compliquées étant envoyés vers l’hôpital. Nous disposons de témoignages sûrs de responsables des urgences de grands centres hospitaliers universitaires (CHU) qui en attestent. Les 87 % restants sont donc supportés par l’hôpital public.
En audition, les directeurs d’hôpital et les présidents de commission médicale d’établissement (CME) nous ont affirmé qu’il fallait absolument que les acteurs privés et publics renouent le dialogue, dans chaque territoire, afin que l’on aboutisse à un partage équilibré. Du reste, vous l’avez rappelé, madame la rapporteure, le rapport de la Cour des comptes et celui de l’Igas soulignent ce déséquilibre important, qui ne permet pas d’apporter une réponse de bonne qualité aux problèmes de santé de nos concitoyens.
Il est important pour nous que l’ARS puisse imposer une répartition équilibrée, équitablement partagée, de la PDSES, afin que celle-ci soit effectivement assurée par tous les établissements de santé du territoire, qu’elle ne soit pas simplement volontaire ou facultative. Cela doit véritablement relever, je crois, du directeur général de l’ARS.
Nous avons entendu des médecins et des syndicats médicaux, lors des auditions, affirmer qu’il était hors de question que les professionnels de santé d’une clinique privée chargés de la PDSES soient obligés de se rendre à l’hôpital pour faire leur garde. Cela n’aurait en effet aucun sens, c’est évident – ils ne connaîtraient ni l’équipe ni le matériel. Mais l’obligation de la participation à la PDSES doit néanmoins figurer dans le texte.
M. le président. L’amendement n° 135, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 6314-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « par », est inséré le mot : « tous » ;
2° La première phrase du dernier alinéa est ainsi modifiée :
a) Les mots : « ont vocation à concourir » sont remplacés par le mot : « concourent » ;
b) Les mots : « dans les conditions définies à l’article L. 1435-5 du présent code. » sont supprimés.
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Depuis 2002, l’obligation de garde des médecins a disparu et, aujourd’hui, le volontariat de ces professionnels de santé ne permet pas d’assurer de manière effective la mission de service public de permanence des soins, au regard de la diminution continue du nombre de médecins volontaires.
De ce fait, le soir ou le week-end, les malades n’ont d’autre choix que d’appeler le 15 pour se rendre aux urgences, elles-mêmes débordées. En cas de symptômes jugés insuffisants pour être pris en charge aux urgences, les malades se retrouvent sans aucune réponse médicale, si ce n’est l’automédication.
De notre point de vue, cette situation est inacceptable dans notre pays, lequel – souvenez-vous – était encore reconnu, voilà vingt ans, comme ayant le meilleur système sanitaire du monde. Mais ça, c’était avant…
Nous proposons donc – autre forme de gradation – que les négociations avec les organisations de médecins prévoient une revalorisation des tarifs sans reste à charge supplémentaire pour les patients, en contrepartie d’obligations de permanence des soins. Il s’agit bien, pour faire référence au débat particulièrement nourri que nous avons eu hier soir, d’une négociation et non d’une coercition.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’amendement n° 52 rectifié tend à prévoir un principe fort d’obligation, mais leurs auteurs se gardent de définir pour celle-ci la moindre modalité opérationnelle, prévoyant un renvoi très large au pouvoir réglementaire pour ce faire.
Cette démarche ne me semble pas souhaitable, car elle va à l’encontre de l’approche graduée retenue par la commission : responsabilité collective des établissements de santé, appel aux professionnels de santé, puis rôle renforcé du directeur général de l’ARS pour aboutir au rééquilibrage, au partage plus équitable, que nous souhaitons tous, de la PDSES.
En outre, cet amendement vise à rétablir la mission donnée aux groupements hospitaliers de territoire (GHT) en matière d’organisation de la permanence des soins, sujet que la commission avait préféré disjoindre la semaine dernière.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 135 vise à « écraser » l’article 4, relatif à la permanence des soins en établissement de santé, pour prévoir que tous les médecins assurent la permanence des soins et que les chirurgiens-dentistes, sages-femmes et infirmiers doivent y concourir. Ce n’est pas tout à fait le même sujet.
Les dispositions relatives à la permanence des soins ont été modifiées voilà quelques mois par la loi du 19 mai 2023 portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, dite loi Rist II, qui étend aux sages-femmes et aux infirmiers la participation à la permanence des soins et consacre un principe de responsabilité collective.
Nous reviendrons sur ce sujet lors de la discussion sur l’article 4 bis, qui concerne la permanence des soins ambulatoires ; je regrette que le présent amendement porte sur cet article…
La commission a donc également émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
La discussion que nous aurons dans un instant éclairera cet avis du Gouvernement. J’en profiterai pour répondre aussi précisément que possible aux questions qui m’ont été posées précédemment.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements et de trois sous-amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 222 rectifié, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 6
Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 6111-1-3. – Les établissements de santé sont responsables collectivement de la permanence des soins en établissement dans le cadre de la mise en œuvre du schéma régional de santé et de l’organisation territoriale de la permanence des soins.
« Les professionnels de santé exerçant au sein d’un établissement de santé peuvent contribuer volontairement à la mission de permanence des soins assurée par un autre établissement que celui au sein duquel ils exercent. Leur activité à ce titre est couverte par le régime de la responsabilité qui s’applique aux médecins et agents de l’établissement d’accueil.
« Le directeur général de l’agence régionale de santé assure la cohérence de l’organisation de la permanence des soins mentionnée au premier alinéa du présent article au regard des impératifs de qualité et de sécurité des soins.
« Les établissements de santé ainsi que les professionnels de santé exerçant en leur sein peuvent être appelés par le directeur général de l’agence régionale de santé à assurer la permanence des soins mentionnée au premier alinéa du présent article ou à y contribuer, si celui-ci constate des lacunes dans la couverture des besoins du territoire. Les professionnels de santé exerçant au sein des établissements de santé appelés au titre du présent alinéa participent à la mise en œuvre de cette mission.
« Le directeur général de l’agence régionale de santé assure la cohérence de l’organisation de la permanence des soins mentionnée au premier alinéa du présent article au regard des impératifs de qualité et de sécurité des soins.
« Les dispositions du présent article s’appliquent à l’ensemble des titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 6122-1 ainsi qu’aux professionnels de santé qui y exercent.
« Les modalités et les conditions d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. » ;
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La rédaction de l’article 4 concernant le « rééquilibrage » de la permanence des soins en établissement de santé issue des travaux de l’Assemblée nationale avait soulevé quelques préoccupations, que la commission a entendu prendre en compte.
Ainsi, au-delà des modifications apportées en commission la semaine dernière, le présent amendement vise à : préserver le schéma gradué que la commission a souhaité formuler, en insistant sur la responsabilité première des établissements ; assurer un fonctionnement opérationnel cohérent du présent dispositif et à permettre une participation active des professionnels libéraux, sans imposer de contrainte excessive d’exercice hors de leur établissement ; préciser la mission du directeur général de l’ARS ; simplifier la rédaction de l’article en insérant, plutôt qu’une répétition systématique, un alinéa prévoyant une application à l’ensemble des structures bénéficiant d’une autorisation d’activité de soins ou d’installation d’équipements matériels lourds.
C’est donc bien à un rééquilibrage de la PDSES que cet amendement tend procéder.
Quelques ajustements seront proposés par le ministre au travers des sous-amendements dont nous allons parler dans un instant.
M. le président. Le sous-amendement n° 236, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 222 rectifié, alinéa 3
Après les mots :
établissements de santé
Insérer les mots :
, et les professionnels de santé exerçant en leur sein,
La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. Ce sous-amendement vise à compléter la rédaction retenue par la commission en ajoutant aux établissements les professionnels de santé, afin de poser un principe implicite mais nécessaire.
Néanmoins, la clarification qui va venir dans quelques instants me conduit à le retirer.
M. le président. Le sous-amendement n° 236 est retiré.
Le sous-amendement n° 235 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 222 rectifié, alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Si le directeur général de l’agence régionale de santé constate des carences dans la couverture des besoins du territoire, il réunit les différents établissements de santé et les représentants des professionnels de santé exerçant en leur sein, les invite à répondre aux nécessités d’organisation collective de la permanence des soins et recueille leurs observations. En cas de carences persistantes, il peut désigner les établissements de santé chargés d’assurer la permanence des soins mentionnée au premier alinéa du présent article ou d’y contribuer. Les professionnels de santé exerçant au sein des établissements de santé désignés au titre du présent alinéa participent à la mise en œuvre de cette mission. »
La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. Ce sous-amendement est indéniablement plus structurant, et sa défense va me donner l’occasion de répondre aux questions portant non seulement sur la méthode, mais encore sur le fond.
Sur la méthode, j’ai déjà présenté très sincèrement, hier, mes excuses à la Haute Assemblée pour le calendrier. Je tiens à préciser que ce sujet est aujourd’hui l’un des facteurs les plus puissants de crispation dans la négociation conventionnelle qui a été reprise avec les médecins. L’enjeu principal de ces discussions réside, selon moi, au-delà de tous les autres points, dans l’attractivité du métier de médecin, afin de pouvoir répondre aux besoins en santé de la population.
C’est pourquoi, même si j’en mesure bien les incidences, j’ai souhaité que l’on mette ces deux sujets sur la table, sans décaler le calendrier. En effet, croyez-moi, les syndicats de médecins se demandaient en permanence si le présent texte n’allait pas faire sauter les équilibres atteints au cours de cette négociation conventionnelle. D’où ma volonté de mener de front ces deux discussions, ce qui pose en effet un problème de méthode – je vous en donne acte, madame Poumirol ; vous n’êtes d’ailleurs pas la seule à l’avoir évoqué.
Nous proposons d’abord d’édicter un principe très clair : c’est bien le directeur général de l’agence régionale de santé qui est le responsable sur son territoire de l’organisation de la permanence des soins, à laquelle les établissements et les professionnels de santé, tant du public que du privé, sont contraints de participer.
Néanmoins, et c’est là qu’intervient la gradation, les professionnels de santé souhaitent – ils vous l’ont dit en commission avec, j’imagine, la plus grande sincérité – qu’on les laisse s’organiser, indiquant qu’ils préfèrent toujours participer volontairement à la PDSES plutôt que sous la contrainte de l’administration.
Certains d’entre eux vous diront, par exemple, que Mende est trop éloignée de Montpellier, où l’ARS d’Occitanie a son siège, et qu’il vaut mieux laisser les établissements et professionnels de santé s’organiser. C’est pourquoi nous affirmons le principe consistant à leur confier, d’abord, le soin de le faire.
Ensuite, si le directeur général de l’ARS constate qu’ils n’ont pas organisé la permanence des soins en établissement de santé, alors il les réunit ; en effet, quand on réclame de s’organiser en autonomie, on doit pouvoir être mis face à ses responsabilités. Puis, s’il n’y a toujours pas de permanence des soins trouvée à l’issue de cette réunion, le directeur général de l’ARS arrête le schéma de la PDSES, avec une portée contraignante pour les professionnels et les établissements.
Ainsi n’y a-t-il pas d’ambiguïté : ce texte prévoit bien une portée contraignante pour les professionnels et les établissements de santé. C’est l’un de ses apports essentiels.
En revanche, mon expérience de directeur général de l’agence régionale de santé d’Île-de-France pendant la crise du covid-19 m’a convaincu qu’il ne fallait pas, bien que ce soit a priori une solution séduisante, qu’un spécialiste intervienne ailleurs que dans son établissement, dont il connaît le matériel et le personnel. Prévoir une telle disposition reviendrait à se faire plaisir – pardon d’être trivial. Ce spécialiste n’interviendra donc que dans son établissement. Et s’il veut intervenir à l’extérieur, il ne pourra le faire que sous réserve de la réunion des conditions de sécurité et d’assurance nécessaires.
Tel est le schéma global.
Je veux insister de nouveau sur la pertinence de cette gradation, notamment en tant qu’ancien directeur général de l’ARS d’Île-de-France.
Pendant la crise sanitaire, il y avait des territoires ressortissant à mon agence dans lesquels je n’ai jamais eu à intervenir pour vérifier que les établissements privés déprogrammaient bien des interventions en vue d’ouvrir des lits de réanimation : le sens des responsabilités s’étendait très largement au-delà des seuls professionnels de l’hôpital public. En revanche, j’ai dû contraindre d’autres territoires de le faire, en passant par les directeurs d’établissement ou les présidents de fédération, ou via des moyens plus rustiques qui étaient à ma main. C’est un peu cela que nous décalquons dans cette disposition.
Cela explique aussi pourquoi ces travaux ont été menés parallèlement et en transparence avec les organisations syndicales de professionnels de santé, qui acceptent un tel schéma, dans lequel ils prennent d’abord leurs responsabilités, à défaut de quoi une autorité administrative a la responsabilité de l’organisation de la PDSES.
J’espère avoir répondu à vos questions et éclairé les contraintes de calendrier qui s’imposaient à nous.
M. le président. Le sous-amendement n° 232 rectifié, présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mme Micouleau, MM. Daubresse, Panunzi, Cadec, Burgoa, D. Laurent, de Nicolaÿ, Genet et Belin, Mme Demas, M. Pointereau, Mme Joseph, MM. C. Vial, Cambon, Perrin, Rietmann, Sido et Gremillet et Mme Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :
Amendement n° 222 rectifié, alinéa 6
Après les mots :
impératifs de
insérer les mots :
continuité, de
La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 154 rectifié, présenté par Mme Guillotin, M. Bilhac, Mmes M. Carrère et N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet, Guérini et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 6
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 6111-1-3. – Les établissements de santé et les autres titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 6122-1 ainsi que les professionnels de santé exerçant en leur sein peuvent être appelés par le directeur général de l’agence régionale de santé à assurer ou à contribuer à la permanence des soins au sein de leur établissement de santé habituel. » ;
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Au travers de cet amendement, je souhaite empêcher que l’on déplace les médecins de certaines spécialités médicales – chirurgie, unités de surveillance continue (USC), réanimation, etc. – de leur hôpital privé vers l’hôpital public assurant la permanence des soins pour faire une garde de chirurgie orthopédique, par exemple, ou de médecine générale. Il y va de la sécurité de l’exercice du praticien, pour le patient.
Je ne sais pas si mon amendement permet d’atteindre cet objectif et quelle réponse a été apportée à cette préoccupation dans le texte, mais j’aimerais être rassurée à cet égard.
Par ailleurs, on parle de garde partagée entre établissements. Cela signifie-t-il que, parmi les hôpitaux privés et les hôpitaux publics chargés de la permanence des soins, certains assureront, sur un même territoire, certaines lignes de garde – par exemple, la chirurgie –, quand les autres assureront d’autres lignes de garde, par exemple les urgences générales ? Ou bien y aura-t-il une rotation des gardes entre les établissements ?
M. le président. L’amendement n° 30 rectifié, présenté par Mme Doineau, MM. Levi et Bonnecarrère, Mme de La Provôté, MM. Longeot et Canévet, Mmes Jacquemet, Gatel, Vérien, Romagny, Sollogoub et O. Richard, MM. Kern, Lafon, Fargeot, Capo-Canellas et Bleunven, Mmes Billon et Jacques et M. J.M. Arnaud, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4, première phrase
Après la première occurrence du mot :
santé
insérer le mot :
volontaires
II. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« La permanence des soins en établissement de santé est assurée par les établissements de santé, les autres titulaires d’une autorisation de soins ou les professionnels de santé dans leur lieu habituel d’exercice. »
La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.
Mme Anne-Sophie Romagny. Cet amendement porte sur le même thème.
L’article L. 1435-5 du code de la santé publique confie à l’agence régionale de santé territorialement compétente le soin d’organiser, avec les ordres professionnels concernés, la permanence des soins dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.
Une organisation efficace de la permanence des soins en établissements de santé ne peut être fondée que sur le volontariat. Par ailleurs, pour garantir la sécurité des soins, il est indispensable que les professionnels de santé participant à la permanence des soins en établissement de santé assurent cette permanence dans leur structure et aux côtés des équipes avec lesquelles ils travaillent habituellement.
Pour ne pas déstabiliser cette organisation ainsi que celle des établissements de santé, la permanence des soins en établissement de santé doit donc s’effectuer dans le lieu habituel d’exercice des professionnels de santé volontaires.
Cet amendement a été rédigé en concertation avec la Confédération nationale des unions régionales des professionnels de santé (URPS) de médecins libéraux.
M. le président. L’amendement n° 113 rectifié bis, présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mme Micouleau, MM. Daubresse, Panunzi, Cadec, Burgoa, D. Laurent, de Nicolaÿ, Genet et Belin, Mme Demas, M. Pointereau, Mme Joseph, MM. C. Vial, Cambon, Perrin, Rietmann et Sido et Mme Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée:
Ces modalités et conditions tiennent compte des activités de continuité des soins assurées par les établissements de santé, en dehors des heures ouvrables, la nuit, les week-ends et jours fériés.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement vise à prendre en compte les activités de continuité des soins assurées par les établissements de santé, dont les centres de lutte contre le cancer (CLCC), lors de l’application de ces dispositifs légaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements et sous-amendements ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission n’ayant pas pu examiner le sous-amendement n° 235 rectifié du Gouvernement, je n’exprimerai qu’un avis personnel.
Ce sous-amendement vise à renforcer la gradation voulue par la commission : M. le ministre veut inscrire dans le marbre de la loi le procédé de négociation et de concertation avec les établissements et les professionnels de santé.
La commission avait maintenu la notion d’appel à assurer la permanence des soins ou à y contribuer, adressé tant aux établissements qu’aux professionnels de santé. Le Gouvernement propose, pour sa part, celle d’invitation en cas de carence, ainsi que l’exercice d’une contrainte si la carence persiste.
J’avais considéré que le décret pourrait compléter la rédaction de la commission. Cela étant, à titre personnel, je suis favorable à ce sous-amendement.
Le sous-amendement n° 232 rectifié a pour objet de répondre à l’un des points de vigilance soulevés par Unicancer, et que j’ai relayé dans mon rapport, concernant l’insuffisante prise en compte des contraintes liées à la continuité des soins. Peut-être M. le ministre pourra-t-il apporter des précisions sur le fond au sujet des difficultés de financement en la matière et de la restriction du dispositif aux nouveaux patients.
La commission émet un avis favorable, sous réserve de la modification que M. Burgoa m’avait dit accepter, à savoir modifier les mots « alinéa 6 » par les mots « alinéa 5 ».
M. le président. Monsieur Burgoa, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens proposé par la commission ?
M. Laurent Burgoa. Tout à fait, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 232 rectifié bis, présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mme Micouleau, MM. Daubresse, Panunzi, Cadec, Burgoa, D. Laurent, de Nicolaÿ, Genet et Belin, Mme Demas, M. Pointereau, Mme Joseph, MM. C. Vial, Cambon, Perrin, Rietmann, Sido et Gremillet et Mme Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :
Amendement n° 222 rectifié, alinéa 5
Après les mots :
impératifs de
insérer les mots :
continuité, de
Quel est donc l’avis de la commission sur ce sous-amendement, madame la rapporteure ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Du fait de cette modification, l’avis de la commission est favorable.
J’en viens aux amendements suivants.
La commission demande le retrait des amendements nos 154 rectifié et 30 rectifié, qui sont satisfaits par la nouvelle rédaction de l’article 4 ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L’amendement n° 113 rectifié bis étant satisfait par le sous-amendement n° 232 rectifié bis qu’a présenté M. Burgoa, la commission en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Je demande le retrait des amendements nos 154 rectifié, 30 rectifié et 113 rectifié bis, au profit de l’amendement n° 222 rectifié de la commission, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 235 rectifié du Gouvernement et du sous-amendement n° 232 rectifié bis; auxquels je suis favorable.
Par ailleurs, j’apporterai deux précisions.
D’une part, il est explicitement prévu que les spécialistes soient appelés à se déplacer sur la seule base du volontariat. Une telle pratique existe dans certaines spécialités, et pas dans d’autres. À cet égard, il n’y a pas d’ambiguïté.
D’autre part, l’organisation territoriale sera différente d’un lieu à l’autre. Le directeur général de l’ARS s’assurera de la cohérence globale de la réponse aux besoins entre le privé et le public, et entre les différentes spécialités – et pas seulement à l’échelle de la région – afin de garantir la qualité et la sécurité des soins, et de prévenir toute perte de chance pour les patients.
M. le président. La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour explication de vote.
M. Khalifé Khalifé. Je suis tout à fait d’accord avec M. le ministre au sujet de la crise du covid-19. J’ai eu le privilège de gérer cette situation dans un département, la Moselle, où privé et public se sont alliés pour faire face à cette crise qui y sévissait fortement. En de pareils moments, les personnes savent s’unir.
Pour avoir réfléchi depuis presque vingt-cinq ans à la question du partage entre privé et public, je peux vous assurer que le sujet n’est pas simple.
Lorsqu’il y a sur un territoire un hôpital public et un hôpital privé, pour assurer la permanence des soins dans certains services, par exemple en cardiologie ou en chirurgie, il faut des équipes sur place dans chacun des deux établissements. Soyons conscients des conséquences de nos délibérations dans ce domaine !
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le ministre, je trouve le sous-amendement n° 235 rectifié très intéressant : il permet de mettre un pied dans la porte pour introduire un peu de contrainte.
Tant mieux si la démarche volontaire des établissements qui souhaitent s’organiser entre eux fonctionne ! Malheureusement, on se heurte très vite aux exigences des uns et des autres. Je trouve donc positif de prévoir que l’ARS puisse intervenir afin de résoudre ces problèmes d’organisation.
J’espère que ce principe s’appliquera demain à la médecine de ville, et de façon générale dans les territoires, afin que soit assurée la permanence des soins : pour répondre aux besoins, il convient de contraindre les professionnels à aller dans les endroits dépourvus d’offre de santé.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le ministre, madame la rapporteure, il est difficile de s’y retrouver entre tous ces amendements et sous-amendements ! Nous aurions certainement tiré avantage de discussions plus approfondies en commission.
Contrairement à ce que vient d’indiquer mon collègue Jean-Luc Fichet, je ne vois pas trop où sont les progrès dans votre proposition, monsieur le ministre. Comme vous l’avez indiqué, vous aviez déjà la possibilité, en tant que directeur de l’ARS d’Île-de-France, d’utiliser la contrainte pour organiser la permanence des soins.
Vous dites que cette mesure, comme toute régulation en la matière, provoque une levée de boucliers de la part des syndicats. Si l’on devait laisser votre proposition en l’état, nous les laisserions faire !
Nous en voyons le résultat : les cliniques privées accueillent 13 % des urgences, et les hôpitaux publics 87 % des patients aux pathologies les plus lourdes, ce qui a des conséquences importantes pour ces établissements. En effet, les urgentistes fuient l’hôpital pour rejoindre des centres de soins non programmés, où les permanences ne s’exercent que de huit heures à vingt heures, ni la nuit ni le week-end, tout en étant mieux payées. La création de tels centres est un véritable problème ; votre prédécesseur, M. Braun, en était d’accord.
Je souhaite que la contrainte organisationnelle soit réelle sur le terrain, dans tous les territoires, et ne soit pas une simple possibilité en cas de constatation d’échec de la mesure. Il est plus simple que les ARS organisent directement la permanence des soins dès le départ.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je salue l’équilibre de cet article, qui prévoit la participation du secteur privé aux gardes, à l’instar du secteur public. C’est une bonne mesure.
L’amendement que j’avais déposé visait à interdire, pour les praticiens à expertise particulière, les déplacements obligatoires d’un établissement à l’autre. Au vu des explications que j’ai entendues et cet amendement étant satisfait, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 154 rectifié est retiré.
La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Les établissements privés ont pris leur part de la permanence des soins pendant la crise sanitaire. Lors des travaux de la commission d’enquête pour l’évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion, Catherine Deroche, Sylvie Vermeillet et moi-même avons constaté qu’ils avaient apporté la contribution correspondant à la place qu’ils occupent dans notre système de soins. Il n’y a donc pas de problème particulier à cet égard.
Il y en a un, en revanche, en matière de permanence des soins. Dans la situation de grandes difficultés et de pénuries que nous connaissons, il faut accroître drastiquement la place des établissements privés.
Le dispositif qui nous est présenté a été modifié avant son arrivée en séance. Le débat manque quelque peu de clarté ! Je souscris à ce qu’a indiqué ma collègue Émilienne Poumirol : vous avez fait le choix d’une discussion entre Gouvernement et majorité sénatoriale, en tenant l’opposition à l’écart. Dont acte. Nous ne sommes pas majoritaires, mais je ne suis pas sûr que cette méthode soit la bonne…
Au fond, l’amendement gouvernemental n° 206, retiré avant la séance, était plus clair et volontariste que l’amendement de la commission sous-amendé par le Gouvernement. Mais sans doute ne convenait-il pas aux acteurs privés… À moins que ce retrait n’ait été motivé par d’autres raisons ? Nous, parlementaires, qui devrons voter dans quelques instants, nous ne le savons pas !
Un autre choix a donc été fait. Vous comprendrez, mes chers collègues, que nous vous laissions approuver ce dispositif. Nous considérons, pour notre part, qu’en l’occurrence ni la méthode ni le résultat ne sont satisfaisants.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. La demande ayant été gentiment formulée par le ministre et par la rapporteure, je vais retirer l’amendement n° 113 rectifié bis.
Contrairement à Bernard Jomier, je trouve la rédaction plus équilibrée que celle de l’amendement n° 206 qu’il a évoqué.
Par ailleurs, je répondrai à nos collègues qui parlent de contrainte que lorsqu’un établissement veut exercer une activité, celle-ci doit être autorisée par l’ARS, laquelle peut aussi retirer cette autorisation.
Mme Émilienne Poumirol. Elles ne le font pas !
M. le président. L’amendement n° 113 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour explication de vote.
Mme Anne-Sophie Romagny. Je ne me permettrai pas de retirer l’amendement n° 30 rectifié, par respect pour ma collègue qui a souhaité le déposer. Mais, à titre personnel, j’aurais choisi son retrait.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. Je ne veux pas qu’il y ait d’ambiguïté.
D’une part, dans un contexte de crise sanitaire, les ressorts ne sont pas forcément ceux prévus par les textes. Par exemple, le directeur général d’une ARS peut retirer une autorisation ou décider de réduire un nombre de lits. Mais, généralement, cette solution n’est pas des plus durables pour l’offre de soins d’un territoire. Toutefois, cette menace peut servir de temps en temps…
Pour être plus explicite, l’amendement n° 222 rectifié vise à inscrire dans l’ordonnancement juridique une possibilité de contrainte qui n’existait pas.
D’autre part, le Gouvernement a retiré son amendement n° 206 avant la séance, parce qu’il est prévu au travers de l’amendement n° 222 rectifié que « les professionnels de santé exerçant au sein des établissements de santé […] participent à la mise en œuvre de cette mission ». Il n’y a pas d’équivoque : sont visés tant les établissements, personnes morales de droit privé, que les professionnels de santé.
Même si je fais entièrement confiance aux directeurs généraux d’ARS qui sont sous mon autorité, je considère que ce n’est pas depuis le siège d’une telle agence que l’on est le plus à même d’organiser une ligne de garde de chirurgie dans un département relevant de son territoire. Si les professionnels trouvent une solution, il faut présumer par principe qu’elle est la bonne, sous réserve de vérifier sa robustesse.
Je l’ai dit à Mme la rapporteure, je considère qu’il ne faut pas trop renvoyer au pouvoir réglementaire, même si cela peut sembler paradoxal. J’ai souhaité que le Parlement délibère sur la totalité du processus, sans « rejouer le match » entre la chambre haute et la chambre basse.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 235 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 232 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 30 rectifié n’a plus d’objet.
L’amendement n° 197, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rétablir le 2° dans la rédaction suivante :
2° Le I de l’article L. 6132-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° L’organisation et la mise en œuvre de la permanence des soins en établissement de santé mentionnée à l’article L. 6111-1-3. »
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à rétablir une disposition supprimée par la commission concernant la compétence des groupements hospitaliers de territoire en matière d’organisation et de mise en œuvre de la permanence des soins.
Renforcer le rôle des GHT en leur donnant la personnalité morale, comme le prévoit la proposition de loi, est une bonne mesure. Nous sommes évidemment d’accord sur le principe, mais il faut aller au bout de la logique.
Cet amendement vise donc à donner à ces groupements la mission d’organiser et de mettre en œuvre la permanence des soins, comme le disposait l’article 4 dans sa rédaction originelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Depuis leur création en 2016 et leur transformation en 2019, le bilan des GHT est contrasté et les situations se révèlent très inégales. Un rapport de la commission des affaires sociales du Sénat le constatait en 2020, enquête de la Cour des comptes à l’appui.
Alors que le Gouvernement entend proposer un rééquilibrage de la permanence des soins entre public et privé, il nous a semblé peu opportun d’attribuer aux GHT une mission nouvelle en ce sens.
Surtout, la commission a retenu un principe de réalité. Là où les GHT sont intégrés et veulent avancer vers une organisation partagée de la permanence des soins en établissement, ils pourront le faire. Mais là où les établissements n’y sont pas favorables, l’obligation contenue dans cette mesure ne facilitera rien.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. En premier lieu, la maturité des GHT est très différente d’un territoire à l’autre. Certains seraient en mesure d’assurer cette compétence, d’autres non.
En second lieu, j’ai une objection plus principielle : les GHT ne regroupent que les établissements publics. En l’état de l’architecture des soins dans notre pays et des rapports entre public et privé, attribuer à un établissement de santé le soin d’organiser le travail des autres créerait, me semble-t-il, davantage de crispations. Le dispositif dont nous avons débattu précédemment, qui attribue cette responsabilité aux ARS, est plus pertinent.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 21 rectifié bis est présenté par M. Milon et Mmes Gruny et Deseyne.
L’amendement n° 31 rectifié quater est présenté par MM. Burgoa, Lefèvre, Bouchet et Sol, Mme Goy-Chavent, MM. H. Leroy, Menonville, Tabarot et Genet, Mme Ventalon, M. D. Laurent, Mme Muller-Bronn, M. Belin, Mme Guidez et MM. Pointereau, Cambon, Hingray, P. Martin et Gremillet.
L’amendement n° 199 rectifié est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6122-7 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « publique » sont insérés les mots : « , notamment lorsque la permanence des soins n’est pas assurée dans les conditions prévues par le schéma mentionné à l’article L. 1434-3. Des conditions particulières peuvent également être imposées pour répondre à des besoins spécifiques de la défense identifiés par ce même schéma » ;
2° Au troisième alinéa, les mots : « l’engagement de mettre » sont remplacés par les mots : « la mise » et après le mot : « et » sont insérés les mots : « l’effectivité de ».
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 21 rectifié bis.
M. Alain Milon. Cet amendement vise à conférer au directeur général de l’agence régionale de santé les moyens de conditionner la délivrance d’une autorisation d’activité de soins ou d’équipement matériel lourd à la participation de son titulaire à la permanence des soins, lorsque l’intérêt de la santé publique le justifie.
Le directeur général de l’ARS arrête, dans le cadre du schéma régional de santé, un volet dédié à l’organisation de la permanence des soins qui fixe pour chaque zone d’implantation des objectifs en nombre d’implantations par spécialité médicale et par modalité d’organisation, avec un schéma cible du nombre de lignes de permanence des soins.
Ce volet est opposable à l’ensemble des titulaires d’autorisations relatives aux activités de soins et aux équipements matériels lourds, ainsi qu’aux établissements et services qui viendraient à solliciter l’octroi de telles autorisations.
Dans ce cadre, l’article L. 6122-7 du code de la santé publique dispose que l’autorisation d’activité de soins peut « être subordonnée à l’engagement de mettre en œuvre des mesures de coopération favorisant l’utilisation commune de moyens et la permanence des soins », répondant ainsi aux besoins spécifiques identifiés dans le schéma régional de santé.
Selon nous, cette rédaction limite cependant le pouvoir contraignant du directeur général d’ARS aux dispositifs de coopération et mérite d’être clarifiée dans le cadre du meilleur partage de la permanence des soins entre les différents offreurs pour tendre vers un objectif d’effectivité. Le présent amendement vise donc à préciser la rédaction de l’article L. 6122-7 du code de la santé publique.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour présenter l’amendement n° 31 rectifié quater.
M. Laurent Burgoa. Cet amendement a été parfaitement défendu par mon collègue Alain Milon.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l’amendement n° 199 rectifié.
Mme Anne Souyris. Défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements identiques visent à renforcer le pouvoir de contrainte des directeurs généraux d’ARS via la subordination de la délivrance d’autorisations d’activités de soins à l’effectivité de la participation à la permanence des soins.
Je comprends la préoccupation de nos collègues, qui répond par ailleurs à une recommandation de la Cour des comptes dans son rapport publié ce mois-ci sur le partage des charges entre secteur public et secteur privé. En effet, la Cour appelle à « des exigences de participation à la permanence des soins » plus strictes en contrepartie des autorisations.
Cependant, au-delà de l’intention affichée, je suis assez réservée concernant l’apport réel de ces amendements identiques. Le droit existant permet d’ores et déjà d’assortir l’autorisation de conditions, notamment liées à l’exercice de la permanence des soins. Il ne me semble pas certain que les modifications proposées, qui font courir un risque de crispations, soient de nature à réellement accroître les pouvoirs des ARS.
La commission demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Vous avez par votre précédent vote accordé davantage de pouvoirs à l’ARS pour l’organisation de la permanence des soins en établissement de santé. Ma remarque peut paraître contre-intuitive, mais lier directement cette permanence à une autorisation ayant une durée de vie spécifique me semble rigidifier le dispositif.
La loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, prévoit d’ores et déjà que la permanence des soins figure dans le faisceau de critères permettant d’autoriser ou non un équipement.
Les apports de ces amendements étant limités, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Nous soutenons, de manière transpartisane, la position de notre collègue Alain Milon.
Notre avis sera favorable sur ces amendements identiques, qui tendent à lier les nouvelles autorisations à la participation à la permanence des soins, et, en parallèle, à simplifier les autorisations d’installation de scanners, d’IRM, etc.
Oui, c’est une contrainte, qui rigidifie probablement le système, mais on se donne ainsi les moyens d’agir !
Vous l’avez rappelé, les établissements privés ont besoin d’une autorisation pour assurer les gardes. Malheureusement, en tant que présidente de service départemental d’incendie et de secours (Sdis) pendant quelques années, j’ai trop souvent entendu les pompiers regretter que les cliniques privées dans lesquelles ils se rendaient les invitaient à se tourner vers l’hôpital sous prétexte que le radiologue était absent ou que le scanner ne fonctionnait pas le soir en question. Les secouristes qui s’étaient rendus dans une clinique X ou Y devaient ainsi parcourir de nouveau trente kilomètres pour se diriger vers un CHU parce que celui-ci les accueillait…
Lier l’autorisation à traiter les urgences et à s’équiper en matériel radiologique lourd à l’obligation pour la structure de participer aux gardes me semble une très bonne disposition.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 21 rectifié bis, 31 rectifié quater et 199 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme Émilienne Poumirol. Très bien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 111 est présenté par M. Chasseing.
L’amendement n° 227 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À l’article L. 6311-4, le mot : « médecins » est remplacé par les mots : « professionnels de santé » ;
2° L’article L. 6314-2 est ainsi modifié :
- À la première phrase, les mots : « du médecin libéral » sont remplacés par les mots : « des professionnels de santé libéraux » ;
- À la deuxième phrase, les mots : « le médecin libéral assure la régulation des appels depuis son cabinet ou son domicile » sont remplacés par les mots : « les professionnels de santé libéraux assurent la régulation des appels depuis leur cabinet ou leur domicile ».
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 111.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement répond à une demande des directeurs de service d’aide médicale urgente (Samu), notamment de celui de Tulle.
Le service d’accès aux soins visant à éviter que les personnes malades ne se rendent à l’hôpital, le premier interlocuteur est un médecin régulateur libéral, qui exerce en concertation avec le médecin régulateur du Samu.
Mais il y avait des problèmes d’assurance.
Il s’agit d’améliorer l’organisation de la permanence des soins et du service d’accès aux soins (SAS). Cela passe par la sécurisation de la responsabilité des professionnels de santé régulateurs dans ces dispositifs, afin de faciliter et d’inciter leur engagement dans l’activité de régulation. Il est souhaitable de leur permettre de bénéficier d’une couverture assurantielle par l’établissement de santé, à l’instar de ce qui existe pour les médecins régulateurs libéraux aux horaires de permanence des soins ambulatoires et en journée dans le cadre du SAS.
Le présent amendement vise donc à étendre à l’ensemble des professionnels libéraux qui assurent la régulation des appels en permanence des soins et, en journée, dans le cadre du service d’accès aux soins, la couverture assurantielle de l’établissement de santé, siège du Samu dans le cadre de cette activité.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 227.
M. Aurélien Rousseau, ministre. Le Gouvernement a déposé cet amendement pour appuyer celui du sénateur Chasseing.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis favorable.
L’article L. 6311-4 du code de la santé publique avait prévu la couverture assurantielle des libéraux assurant la régulation des appels du SAS.
Le présent amendement vise à étendre à l’ensemble des professionnels libéraux la couverture de leur activité de régulation du SAS, mais aussi de régulation des appels du Samu depuis leur domicile ou leur cabinet. Ce sont des dispositions facilitatrice pour le SAS et le Samu.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 111 et 227.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4.
Article 4 bis
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 187, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article L. 1110-4-1, après les mots : « d’État », sont insérés les mots : « participent et » ;
2° L’article L. 6314-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « par », est inséré le mot : « tous » ;
b) La première phrase du dernier alinéa est ainsi modifié :
- les mots : « ont vocation à concourir » sont remplacés par le mot : « concourent » ;
- les mots : « dans les conditions définies à l’article L. 1435-5 du présent code » sont supprimés.
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Faute de médecins disponibles pour réaliser des gardes, les patients sont contraints de reporter des soins, voire d’y renoncer, ou de se rendre aux urgences, qui sont déjà très fortement sous tension. Moins de quatre médecins sur dix avaient réalisé au minimum une garde en 2020, selon le Conseil national de l’ordre des médecins. Autrement dit, le seul volontariat ne permet pas de garantir la permanence, donc la continuité des soins.
C’est pourquoi cet amendement vise à faire en sorte que la participation à la permanence de soins soit partagée par l’ensemble des professionnels de santé.
M. le président. L’amendement n° 53 rectifié bis, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, MM. Jomier et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat, M. Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
La première phrase du premier alinéa de l’article L. 6314-1 du code de la santé publique est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« La mission de service public de permanence des soins est assurée, en collaboration avec les établissements de santé et en concertation avec les professionnels de santé, le cas échéant regroupés sous la forme d’une communauté professionnelle territoriale de santé, par les médecins mentionnés à l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, âgés de moins de cinquante-cinq ans, dans le cadre de leur activité libérale, et aux articles L. 162-5-10 et L. 162-32-1 du même code, dans les conditions définies à l’article L. 1435-5 du présent code, de manière obligatoire si la continuité du service public l’exige. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent alinéa. »
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement va dans le même sens : il vise à rétablir l’obligation de garde pour les médecins libéraux, selon des modalités fixées contractuellement avec l’ARS et en la limitant aux médecins âgés de moins de 55 ans.
Depuis que Jean-François Mattei, alors ministre, a pris la décision de supprimer l’obligation de garde des médecins libéraux – c’était en 2002 –, on observe une érosion de la permanence des soins. Et ce sont toujours les mêmes médecins qui y participent. Même si les syndicats indiquent que 95 % du territoire est couvert, nous connaissons tous des endroits où la couverture n’est pas assurée.
La revalorisation du prix de la consultation n’a pas fait ses preuves, et l’engorgement des urgences est directement lié à un manque de gardes de la part de la médecine libérale. Les maisons médicales de garde ont été une première réponse au besoin de permanence des soins, mais il convient aujourd’hui de revenir sur l’erreur de 2002 et de rendre obligatoire la permanence des soins pour la médecine de ville.
La continuité du service public en matière de permanence des soins relève des ARS. Il convient qu’elle soit assurée par les établissements publics de santé, mais également par la permanence des soins ambulatoires (PDSA).
En complément d’une meilleure répartition des médecins libéraux, cet amendement tend à rendre obligatoire la participation à cette mission, qui sera assurée en collaboration avec des professionnels regroupés, le cas échéant sous la forme d’une communauté professionnelle territoriale de santé.
L’objectif est non pas de dire individuellement à chaque médecin d’assurer un certain nombre de gardes, mais d’assurer une garde sur l’ensemble du territoire.
M. le président. L’amendement n° 36 rectifié ter, présenté par Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme Bourcier, MM. Wattebled, A. Marc et Brault, Mme Paoli-Gagin, MM. Capus et Verzelen, Mme L. Darcos, MM. Guerriau et Daubresse, Mmes Saint-Pé et Guidez, M. Menonville, Mme Josende et MM. Maurey, Longeot et Malhuret, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au second alinéa de l’article L. 1110-4-1 du code de la santé publique, après les mots : « d’État », sont insérés les mots : « assurent et ».
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. L’article 4 bis ayant été supprimé en commission, nous souhaitons rétablir l’obligation à la permanence des soins en précisant qu’il est de la responsabilité collective des établissements de santé, des autres titulaires de l’autorisation sanitaire ainsi que des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des infirmiers diplômés d’État d’assurer cette permanence.
En d’autres termes, cet amendement vise à affirmer dans la loi le caractère absolument essentiel de la permanence des soins, afin que celle-ci ne s’interrompe pas.
M. le président. L’amendement n° 41 rectifié ter, présenté par Mme Lermytte, MM. Malhuret et Chasseing, Mme Bourcier, MM. Wattebled et Guerriau, Mme L. Darcos, M. Verzelen, Mme Josende et MM. Menonville, Maurey et Longeot, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au second alinéa de l’article L. 1110-4-1 du code de la santé publique, après les mots : « d’État », sont insérés les mots : « participent et ».
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement de repli tend à rétablir l’article 4 bis dans sa rédaction issue de l’Assemblée nationale ; les mots : « participent et » seraient alors préférés aux mots : « assurent et ». Le caractère essentiel de la permanence des soins resterait affirmé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ce débat nous renvoie quelques mois en arrière, puisque les dispositions relatives à la permanence des soins du code de la santé publique ont alors été modifiées par la loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, qui étend aux sages-femmes et aux infirmiers la participation à la permanence des soins et consacre un principe de responsabilité collective. Cette évolution législative n’ayant pas encore produit tous ses effets, il semble précipité de légiférer de nouveau.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l’ensemble des amendements tendant à rétablir l’article 4 bis.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Même avis : attendons d’évaluer la mise en œuvre des textes votés récemment.
M. le président. L’amendement n° 103 rectifié quater, présenté par M. Chasseing, Mme Lermytte, MM. Médevielle et Rochette, Mme L. Darcos, M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Brault, Wattebled et Malhuret, Mmes Bourcier et O. Richard et MM. Menonville, Buis, Nougein, Levi, Panunzi et Cadec, est ainsi libellé :
Après l’article 4 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l’article L. 1434-12 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils participent à la mission de service public mentionnée à l’article L. 6314-1. Afin d’assurer cette mission, les cabinets médicaux et les structures mentionnées à l’article L. 6323-3, membres de la communauté professionnelle territoriale de santé, sont organisés de façon à assurer, en alternance du lundi au vendredi, la prise en charge des soins non programmés. »
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Nous avons parlé de la permanence des soins de nuit, les jours fériés et le dimanche à l’hôpital.
Mais il existe une autre permanence des soins à assurer. Imaginez que votre enfant déclare une otite dans la journée, que vous appeliez le cabinet médical et qu’on vous réponde qu’il n’y a pas de consultation disponible ; vous devrez aller aux urgences.
Une CPTS pourrait prévoir qu’un jour par semaine, en alternance, un médecin soit disponible pendant une heure pour prendre des soins non programmés. Cela éviterait d’envoyer des gens aux urgences. Après dix-huit heures, il est souvent difficile d’obtenir un rendez-vous ; je l’ai constaté.
Les ARS devraient imaginer – mon propos n’est pas de prôner une solution autoritaire – une organisation de ce type pour que, s’il y a un problème entre huit heures et vingt heures, une famille puisse trouver un médecin dans une CPTS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.
L’objet des CPTS est justement de travailler avec tous les professionnels de santé, notamment les médecins généralistes, pour dégager des créneaux, afin de répondre à ces demandes de rendez-vous en journée pour des soins non programmés.
Obliger à des astreintes les médecins qui sont déjà organisés en maisons de santé pluriprofessionnelles et membre d’une CPTS serait contre-productif : nous souhaitons tous une meilleure coordination entre professionnels de santé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Avis défavorable.
C’est une des missions socles des CPTS, qui s’organisent pour cela. Certes, elles n’ont pas toutes la même dynamique. Mais ma crainte serait que ceux qui sont partis le plus tôt, qui se sont engagés depuis des années pour assurer les soins non programmés et qui se mettent dans des CPTS ne se retrouvent avec des obligations et des contraintes supplémentaires. Déjà, la mise en place des SAS impose de prendre en compte l’historique des différents acteurs…
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Certes, notre collègue Daniel Chasseing connaît très bien le monde de la médecine générale, dont il est un praticien. Pour autant, j’ai du mal à comprendre cet amendement.
J’imagine que cela concerne essentiellement ce qui se passe en fin de journée. Soyons clairs : les soins non programmés ne sont pas uniquement la mission des CPTS ; c’est aussi le pain quotidien des médecins généralistes, qui, en période hivernale ou d’épidémie, passent leur temps à faire du soin non programmé.
La question qui se pose est celle non pas des soins non programmés, mais de la PDSA à certains horaires. Et il y a en effet une problématique de fin de journée : après dix-huit heures, les médecins ont encore dix patients à voir et ne peuvent en voir davantage. Il s’agit de la tranche horaire de dix heures à vingt et une heures. Ce n’est pas une problématique de nuit profonde.
Je ne comprends pas l’amendement de Daniel Chasseing : organiser en journée la prise en charge des soins non programmés est déjà une mission des professionnels de santé. Nous ne le voterons donc pas.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Dans une CTPS comptant plusieurs médecins, il s’agit non pas d’obliger chaque médecin à prendre des soins non programmés, mais de prévoir une organisation avec une heure par semaine consacrée à cela. Sinon, les patients vont aux urgences.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 103 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 5
L’article L. 632-6 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Chaque année, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale détermine le nombre d’étudiants admis à poursuivre des études de santé à l’issue de la première année du premier cycle des études de médecine, d’odontologie, de maïeutique et de pharmacie ou ultérieurement au cours de ces études et, de façon distincte, le nombre de praticiens à diplôme étranger hors Union européenne autorisés à poursuivre un parcours de consolidation des compétences en médecine ou en odontologie soit dans le cadre du IV de l’article 83 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, soit au titre de l’article L. 4111-2 du code de la santé publique, qui peuvent signer un contrat d’engagement de service public avec une autorité administrative désignée par arrêté des ministres chargés de la santé et de l’enseignement supérieur. » ;
2° À la première phrase du troisième alinéa et à l’avant-dernier alinéa, les mots : « le centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « l’autorité administrative désignée en application du premier alinéa du présent article » ;
3° À la troisième phrase du cinquième alinéa, les mots : « le Centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « l’autorité administrative désignée en application du premier alinéa du présent article » ;
4° Au sixième alinéa, les mots : « le Centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « la même autorité administrative ».
M. le président. L’amendement n° 229, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et, à la première phrase du troisième alinéa, les mots : « médicales ou odontologiques » sont supprimés
La parole est à M. le ministre.
M. Aurélien Rousseau, ministre. Cet amendement vise à étendre aux étudiants de pharmacie et de maïeutique l’allocation mensuelle prévue dans le contrat d’engagement de service public (CESP). Il y a un problème d’attractivité des études en pharmacie et en maïeutique, alors que cela correspond à un enjeu majeur pour la santé des femmes.
Une telle extension garantirait aussi des installations dans les territoires. Je peux en témoigner : en Seine-Saint-Denis, une grande partie des médecins et les sages-femmes installés sont précisément ceux qui ont bénéficié du CESP à l’université Sorbonne Paris Nord.
Cette allocation est un bon dispositif, même si elle ne concerne pas des milliers d’étudiants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis favorable sur cet amendement de coordination et de clarification du droit. Je confirme que l’allocation en question est un bon dispositif.
M. le président. L’amendement n° 116 rectifié, présenté par MM. Haye, Patriat et Lemoyne, Mme Schillinger, MM. Iacovelli, Rohfritsch et Buis, Mmes Havet et Duranton, M. Omar Oili, Mme Cazebonne, M. Fouassin, Mme Nadille, MM. Bitz, Buval, Kulimoetoke, Lévrier, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud et Théophile, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les étudiants ayant signé un contrat d’engagement de service public lors de leur premier cycle bénéficient d’une valorisation de leur engagement dans l’obtention de leur diplôme. Les modalités de cette valorisation sont précisés par décret. » ;
La parole est à M. Olivier Bitz.
M. Olivier Bitz. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.
Si la commission approuve évidemment l’objectif de renforcer l’attractivité du CESP et de favoriser l’installation des étudiants dans les zones sous-denses, elle a jugé que la signature du contrat ne devait pas emporter une valorisation du diplôme des intéressés. Certains étudiants s’installent en zones sous-denses sans avoir souscrit au contrat tandis que d’autres le font après la fin de leurs études, après paiement d’une pénalité forfaitaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Aurélien Rousseau, ministre. Cet amendement nous semble déjà satisfait.
En effet, les étudiants qui souscrivent un CESP bénéficient d’un accompagnement, notamment pour l’accès au troisième cycle de médecine. Ils choisissent leur poste sur une liste spécifique. De plus, la signature d’un CESP est valorisée par des points attribués au parcours de formation de l’étudiant.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Bitz, l’amendement n° 116 rectifié est-il maintenu ?
M. Olivier Bitz. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 116 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Après l’article 5
M. le président. L’amendement n° 18 rectifié, présenté par M. Menonville, Mme N. Goulet, MM. Bonneau, Médevielle et Canévet, Mme Gatel, M. Guerriau, Mmes Romagny et Jacques, M. Cambier, Mme Antoine, M. Kern, Mmes Herzog et Perrot, MM. J.P. Vogel, Levi, J.M. Arnaud, Verzelen et Cigolotti, Mme Saint-Pé et MM. Gremillet et Duffourg, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 632-5 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 632-5-… ainsi rédigé :
« Art. L. 632-5-…. – Le troisième cycle des études médicales est organisé dans des zones géographiques, dont les limites sont fixées par décret, comprenant au moins trois centres hospitaliers et universitaires. Sauf dérogation accordée par l’autorité administrative, les étudiants effectuent leurs études de troisième cycle dans la zone géographique où ils ont achevé leur deuxième cycle. »
La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.
Mme Anne-Sophie Romagny. Cet amendement tend à rétablir la régionalisation des concours d’internat.
Depuis l’entrée en vigueur de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, le concours de l’internat est organisé à l’échelle nationale, selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État. Initialement, il était organisé dans sept interrégions, avant de l’être dans une zone sud et une zone nord, dont les contours étaient définis par arrêté ministériel.
Il s’agit ici de rétablir une organisation par zones géographiques, ce qui permettra d’améliorer la démographie médicale et de lutter contre la désertification médicale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable, car les modalités d’accès et d’organisation du troisième cycle ont récemment été réformées, par un décret de 2016 et un décret de 2021. Il n’est pas souhaitable d’y revenir aussi tôt. La répartition des étudiants à l’échelon national lors de l’accès au troisième cycle permet de plus un meilleur appariement des étudiants en fonction de leurs compétences et de leur projet professionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Avis défavorable.
Nous partageons évidemment votre préoccupation, madame la sénatrice, et nous souhaitons aussi une meilleure répartition des profils de santé sur le territoire national afin de limiter les difficultés d’accès aux soins. C’est tout l’objet des politiques menées par le Gouvernement pour lutter contre les inégalités territoriales et sociales d’accès aux soins. Néanmoins, la régionalisation pourrait entraîner des disparités aussi bien dans la qualité de l’information délivrée que dans la répartition des professions de santé sur le territoire.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 165 est présenté par Mme Schillinger.
L’amendement n° 228 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au cinquième alinéa de l’article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « médecine générale », sont insérés les mots : « de chirurgie dentaire, ou de toute autre spécialité ».
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 165.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à introduire une modification que je défends depuis quelque temps déjà et qui est directement inspirée des retours que j’ai du terrain.
Les collectivités territoriales souhaitent familiariser à leur territoire et fidéliser de jeunes médecins. Attirer des étudiants dès leur formation, au moment de leur stage, constitue l’un des moyens d’y parvenir et de lutter contre les phénomènes de désertification médicale.
L’article L. 1511-8 du code des collectivités territoriales, qui permet aux collectivités en zones sous-denses d’attirer des aides aux transports et à l’hébergement, limite le bénéfice de ces aides aux seuls étudiants en médecine générale. Or les habitants des zones sous-denses rencontrent également des difficultés d’accès à la médecine spécialisée.
Il semble donc de bon sens et cohérent d’étendre cette faculté aux étudiants des autres spécialités. Par exemple, Saint-Louis Agglomération, située en zone tendue, ne peut pas, en l’état, aider des spécialistes à venir réaliser leur stage à l’hôpital de Saint-Louis.
Une telle modification viendrait donc renforcer la capacité des collectivités territoriales à lutter contre les déserts médicaux, et plus particulièrement contre le manque de spécialistes. Elle se heurte toutefois à des motifs d’irrecevabilité. L’adoption du dispositif que je suggère permettra d’y remédier. Je me réjouis donc que le Gouvernement ait déposé un amendement identique au mien.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée, pour présenter l’amendement n° 228.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Nous avons déposé cet amendement pour couvrir celui que Mme Schillinger vient de présenter.
Nous sommes favorables à ce qu’elle propose. Cela permettra aux spécialistes de bénéficier aussi des aides des collectivités. Nous avons besoin de spécialistes dans les territoires : c’est un signal fort que nous leur envoyons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis favorable.
Une telle mesure permettra aux collectivités territoriales d’accompagner les étudiants, quelle que soit leur spécialité, de les inciter à effectuer des stages et de les encourager à s’installer sur leur territoire.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 165 et 228.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 5.
L’amendement n° 62 rectifié, présenté par M. P. Joly, Mmes Poumirol et Le Houerou, MM. Jomier et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Rossignol et Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant l’intérêt de l’élargissement du contrat d’engagement de service public aux élèves en orthophonie.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2023, j’avais suggéré d’expérimenter l’extension des CESP, aujourd’hui destinés aux étudiants en médecine et en odontologie, aux étudiants en orthophonie, afin que ces derniers puissent s’installer dans les territoires ruraux. Malgré un vote unanime de notre assemblée, le Gouvernement, en recourant à l’article 49.3, n’avait pas retenu cette proposition.
Pour autant, la question se pose de manière cruciale. Elle concerne les personnes âgées, qui peuvent être malades sous avoir la maladie d’Alzheimer, avoir fait des accidents vasculaires cérébraux ou souffrir de la maladie de Parkinson. Elle touche aussi les plus jeunes, qui peuvent rencontrer des difficultés très perturbantes pour leur parcours scolaire.
Cet amendement vise à revenir sur ma proposition en demandant l’établissement d’un rapport évaluant l’intérêt d’élargir les CESP aux étudiants d’orthophonie. Il s’agit, pour les territoires concernés, d’identifier très précisément les besoins, afin de savoir si ce dispositif, comme je le pense, est nécessaire pour donner un égal accès aux orthophonistes à l’ensemble des territoires et des populations qui ont besoin d’eux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable, même s’il s’agit d’un sujet intéressant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Avis défavorable, car les étudiants en orthophonie peuvent déjà bénéficier du contrat d’allocation étudiant (CAE). Il n’est donc pas nécessaire de les faire bénéficier du CESP.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 62 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 5 bis
À la troisième phrase du deuxième alinéa du I de l’article L. 631-1 du code de l’éducation, les mots : « capacités de formation et des besoins de santé du territoire, » sont remplacés par les mots : « besoins de santé du territoire, dans la limite des capacités de formation, ».
M. le président. L’amendement n° 138, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le deuxième alinéa de l’article L. 631-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase est complétée par les mots : « afin de garantir la répartition optimale des futurs professionnels de santé sur le territoire au regard des besoins de santé » ;
2° À la troisième phrase, les mots : « capacités de formation et des besoins de santé du territoire, » sont remplacés par les mots : « besoins de santé du territoire en priorité, puis des capacités de formation » ;
3° À la dernière phrase, après le mot : « territoriales », sont insérés les mots : « et sociales ».
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Le 23 avril dernier, dans une interview au journal Le Parisien, le Président de la République indiquait – nous souscrivons évidemment à ce propos – que nous n’avions plus assez de soignants dans le pays. Nous n’avons de cesse de dénoncer cet état de fait, que nous constatons chaque jour dans nos territoires respectifs.
Nous pensons néanmoins que les solutions envisagées dans ce texte ne vont pas assez loin. En 2019, nous avons formulé des propositions ; je pense notamment à la régulation des médecins, qui aurait représenté un grand pas en avant. Le débat d’aujourd’hui montre que la situation n’évolue pas.
Si le numerus clausus a été supprimé en 2019, l’augmentation des moyens financiers et humains dans les universités de médecine n’a pas suffi à enrayer la baisse du nombre de professionnels formés.
Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), le nombre de médecins va continuer à baisser jusqu’en 2030. Le nombre d’étudiants inscrits en médecine est en dessous des besoins, de 20 % en médecine, 14 % en odontologie, 8 % en pharmacie et 4 % en maïeutique.
Actuellement, les jeunes générations de médecins s’installent prioritairement dans leur territoire d’origine, proches d’un hôpital et de services publics de proximité.
Notre amendement a pour objet de lutter contre les inégalités territoriales et sociales d’accès aux soins en définissant le nombre de places dans les formations de santé selon les besoins des territoires, et non pas selon les capacités de formation du système universitaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il est évident que nous manquons de médecins et que nous avons besoin d’en former plus. Encore faut-il – je m’adresse à Mme la ministre – que nous puissions accueillir les étudiants dans les facultés et que ceux-ci puissent tous effectuer leurs stages.
On peut se faire plaisir en promettant de répondre aux besoins des territoires. Mais si c’est pour ne pas accueillir les étudiants dans de bonnes conditions, sans pouvoir leur proposer suffisamment de lieux de stage, nous nous mentons à nous-mêmes.
Notre collègue Pascale Gruny avait déposé un amendement pour encourager la création d’antennes universitaires dans les départements qui ne sont pas le siège du centre hospitalier universitaire (CHU). Cet amendement a été retoqué au titre l’article 40 de la Constitution. Je sais qu’il y a déjà des antennes universitaires ; il en faudrait certainement davantage, sans remettre en cause l’importance du CHU comme lieu de formation.
Le numerus apertus, c’est bien ; mais encore faut-il accueillir les étudiants dans de bonnes conditions et pouvoir leur proposer suffisamment de lieux de stage, sans sacrifier la formation. C’est le défi qui est devant vous, madame la ministre.
Nous avons tous envie que les étudiants soient plus nombreux et mieux formés. Toute la question est de savoir dans quelles conditions.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
La suppression du numerus clausus a été effective à partir de la rentrée 2020. Pour répondre aux besoins de santé de demain, le dispositif a été remplacé par des objectifs nationaux pluriannuels de santé, élaborés en fonction des besoins des territoires, et des capacités de formation – en stage et hors stage –, disponibles jusqu’à la fin du cursus. Les deux dimensions sont liées. Si l’on veut assurer et préserver la qualité de la formation des futurs professionnels de santé, cet équilibre est essentiel.
Depuis 2020, le nombre d’étudiants en médecine a augmenté de 15 %. Mais il faudra encore attendre la fin de leur formation, dans huit ans, pour que notre territoire dispose de plus de médecins. Pour les études menant aux métiers infirmiers, la hausse a été de 18 %, et 6 000 places supplémentaires ont été ouvertes.
Je rappelle aussi, comme je l’ai fait hier en réponse à Mme Gruny, que vingt-cinq contrats ont déjà été signés entre des CHU et des villes non universitaires, comme Arras, Le Havre, Dunkerque, Corte, etc. Nous souhaitons développer ce dispositif, qui fonctionne et permet notamment de doter des territoires dépourvus d’université de médecine de spécialistes.
Avec ma collègue ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, nous souhaitons véritablement accélérer en la matière. En lien avec les doyens, nous avons engagé un travail de prospective à l’horizon de dix, quinze ou vingt ans pour déterminer le nombre de professionnels et de spécialistes dont nous aurons besoin, afin d’ouvrir les bonnes formations au bon endroit. Les statisticiens et les mathématiciens travaillent sur ce sujet, essentiel si l’on veut prendre les bonnes décisions.
Mais, j’y insiste, il est aussi important que nous puissions accueillir les futurs professionnels dans de bonnes conditions : il est donc pertinent de faire en sorte que le nombre d’étudiants progresse au même rythme que le nombre de stages, afin de prévenir tout problème ; si tel n’était pas le cas, vous seriez, je le crois, les premiers à nous le reprocher.
M. le président. L’amendement n° 56 rectifié, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat, M. Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
, dans la limite
par les mots :
en priorité, puis des
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Je ne comprends pas pourquoi cet amendement n’était pas en discussion commune avec le précédent, alors qu’ils sont très proches.
Il s’agit de rétablir la rédaction initiale de l’article tel qu’il a été adopté à l’Assemblée nationale. La priorité doit être donnée aux besoins de santé des territoires, et non plus aux capacités de formation.
Certes, ces dernières ne sont pas suffisantes et doivent être accrues. Les initiatives permettant de développer la formation des généralistes dans des hôpitaux secondaires, dans des cabinets situés dans de petites villes ou dans des lieux plus reculés constituent un élément important.
Toutefois, si l’on veut que l’université ait davantage de moyens, il suffit de lui en donner davantage !
Mme Émilienne Poumirol. Les capacités des universités sont insuffisantes. Dès lors, on adapte le nombre d’étudiants en médecine non pas aux besoins des territoires, mais aux possibilités de formation.
Il est donc essentiel d’accroître les capacités de formation de l’université tout en conservant la qualité et l’excellence des enseignements, la possibilité de réaliser des stages, des stages en ambulatoire, etc. Pour y parvenir, il faut donner des moyens aux universités.
Mais ces mesures n’auront d’effet que dans dix ans, ce qui est le temps requis pour former un médecin. C’est pourquoi nous avions proposé d’autres mesures pour passer ce cap des dix ans.
Et la hausse du nombre d’étudiants reste relativement faible, car les besoins en santé vont fortement s’accroître avec le vieillissement de la population.
M. le président. Ma chère collègue, l’amendement n° 138, qui vient d’être examiné, étant un amendement de rédaction globale de l’article, il ne pouvait pas faire l’objet d’une discussion commune avec le vôtre.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable, puisque cet amendement vise à rétablir la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Avis défavorable.
Si la hausse du numerus apertus était uniquement liée à la question des moyens de l’université, cela se saurait ! Mais les choses ne fonctionnent pas ainsi. Nous devons aussi disposer de capacités d’accueil suffisantes pour permettre aux jeunes étudiants de réaliser leur stage. Il convient donc d’agir en même temps sur deux leviers : les moyens alloués à l’université et les moyens consacrés à l’accueil des étudiants dans les hôpitaux. La question n’est pas uniquement celle des moyens de l’université. Il faut travailler sur les deux dimensions en même temps, en lien avec les doyens.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Nous poursuivons le débat sur le nombre de médecins en France.
Il convient de rappeler que notre pays n’a jamais eu autant de médecins formés : plus de 250 000.
En revanche, il y a une pénurie de médecins en exercice ; leur nombre est en baisse continue.
La formation constitue un levier pour y remédier, mais ce n’est pas le seul : on a beau former plus de médecins, beaucoup n’exercent pas. C’est bien la preuve qu’il y a un autre problème : l’attractivité. Mais les problématiques liées à la formation et à l’attractivité se rejoignent.
C’est pour cette raison que, lors du débat sur la création de la quatrième année du troisième cycle des études de médecine, nous avons insisté sur la manière dont celle-ci devait être conçue. Si elle ne répond pas aux aspirations des jeunes, si ces derniers n’y trouvent pas des conditions d’exercice satisfaisantes, si leurs besoins en termes de logement ou de transports ne sont pas pris en compte et s’ils se retrouvent complètement isolés dans un territoire qu’ils ne connaissent pas, au lieu d’être regroupés avec d’autres praticiens dans une structure collective d’exercice coordonné par exemple, leur expérience sera mauvaise et ne débouchera pas sur l’installation d’un médecin en exercice.
Pour ces raisons, nous avions exprimé notre inquiétude s’agissant du dispositif qui a été adopté. Il est d’ailleurs largement critiqué par les organisations de jeunes professionnels. Alors que l’on forme plus de médecins, on risque en fait d’avoir moins de praticiens en exercice. Pour sortir d’une telle situation, nous devons tenir les deux bouts de la chaîne ensemble : la formation et l’attractivité.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5 bis.
(L’article 5 bis est adopté.)
Article 5 ter
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 198, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le deuxième alinéa du I de l’article L. 631-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase est complétée par les mots : « afin de garantir la répartition optimale des futurs professionnels de santé sur le territoire au regard des besoins de santé » ;
2° À la dernière phrase, après le mot : « territoriales », sont insérés les mots : « et sociales ».
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. La formation, même si nous en parlons beaucoup cet après-midi, est la grande absente de la proposition de loi, et c’est bien dommage !
Nous ne pourrons jamais résoudre les problèmes d’accès aux soins sans placer au cœur de nos efforts la question du nombre de soignants et de soignantes. Même si ces derniers sont de plus en plus nombreux – M. Jomier l’a indiqué –, il en manque ! Les doyens de médecine déclarent ne pas disposer pas des financements nécessaires pour former plus d’étudiants susceptibles d’exercer dans les années à venir. Les besoins sont pourtant considérables.
Par cet amendement, nous vous proposons de renforcer la place qu’occupent les besoins des territoires dans la définition des capacités d’accueil dans les études de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique.
Nous appelons aussi le Gouvernement à construire un accès facilité aux études de santé, en sortant, par exemple, ces études de Parcoursup.
Il est vrai que beaucoup d’étudiants en santé quittent le parcours de formation : tantôt à la fin de leurs études, tantôt en cours d’études, tantôt au tout début de leur formation, parfois après quelques mois. On doit donc s’interroger sur la manière dont ils rentrent dans cette formation, donc sur Parcoursup.
Cet amendement vise donc à inscrire, à l’article L. 631-1 du code de l’éducation, l’objectif d’une « répartition optimale des futurs professionnels de santé sur le territoire au regard des besoins de santé », ainsi que celui de réduction des inégalités territoriales et sociales d’accès aux soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à rétablir l’article 5 ter, qui a été supprimé par la commission.
Dans la mesure où la fixation des objectifs pluriannuels d’admission tient déjà compte des enjeux démographiques et des besoins de santé des territoires, les dispositions proposées apparaissent largement satisfaites.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Avis défavorable, pour les raisons que j’ai déjà exposées à propos des amendements précédents.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 57 rectifié bis, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat, M. Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le premier alinéa du II de l’article L. 632-2 du code de l’éducation est remplacé par dix alinéas ainsi rédigés :
« II. – Le troisième cycle de médecine générale est suivi d’une année de professionnalisation lors de laquelle les étudiants exercent des fonctions de prévention, de diagnostic et de soins, avec pour objectif de parvenir progressivement à une pratique professionnelle autonome. Ils exercent en pratique ambulatoire auprès d’un maître de stage universitaire, dans l’un des territoires mentionnés au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique.
« Leurs conditions matérielles d’exercice sont fixées par décret, après négociation avec les organisations syndicales des étudiants de troisième cycle des études de médecine générale.
« Les étudiants choisissent leur futur lieu d’exercice sur une liste départementale fixée par une commission départementale d’affectation et d’accompagnement à l’exercice de l’année de professionnalisation. Elle est composée :
« 1° D’un représentant de l’unité de formation et de recherche de médecine correspondante ;
« 2° Du directeur de délégation départementale de l’agence régionale de santé ;
« 3° D’un représentant du conseil départemental ;
« 4° D’un représentant du conseil départemental de l’Ordre des médecins ;
« 5° Un représentant départemental de l’union régionale des professionnels de santé ;
« 6° Un représentant départemental de l’Association des maires de France.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent II. »
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Par cet amendement, nous reprenons une disposition qui figurait au premier article de la proposition de loi visant à rétablir l’équité territoriale face aux déserts médicaux et à garantir l’accès à la santé pour tous, texte que nous avions déposé l’an dernier.
Il s’agit d’instaurer une année de professionnalisation obligatoire, et non pas un stage – j’y insiste –, dans les déserts médicaux pour les étudiants en médecine générale en fin de formation, au cours de la fameuse dixième année d’études. L’objectif est triple : professionnalisation, meilleure reconnaissance de la spécialité de médecine générale et lutte contre les déserts médicaux.
Une telle mesure permettrait de déployer 4 000 jeunes médecins généralistes dans les zones sous-denses, soit en moyenne 40 médecins par département. Quand un jeune médecin a connu un territoire, il a souvent tendance à s’y attacher et à s’y installer.
Cette année doit être accompagnée d’un encadrement pédagogique renforcé avec des médecins maîtres de stage. Leur activité sera reconnue comme un exercice de médecine à part entière et sera assortie d’une rémunération nette de 3 500 euros par mois.
Il s’agit donc d’un dispositif hors internat, dont les modalités de mise en œuvre seront discutées avec toutes les parties prenantes, en particulier les organisations syndicales des étudiants de troisième cycle des études de médecine générale.
En outre, notre proposition s’articule autour des départements. Les étudiants choisiraient leur futur lieu d’exercice sur une liste fixée par une commission départementale d’affectation et d’accompagnement. Les mesures relatives au guichet unique départemental d’accompagnement à l’installation des professionnels de santé, dont nous avons débattu hier, s’inscrivent aussi dans cette perspective.
Une telle commission serait composée notamment de représentants de l’union régionale des professionnels de santé, de la délégation départementale de l’agence régionale de santé, du conseil départemental, du conseil départemental de l’ordre des médecins, ainsi que de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF).
Les départements pourraient également gérer les conditions matérielles d’accueil des étudiants, ainsi que l’accompagnement dans l’installation « définitive » des jeunes médecins à l’issue de leur formation.
Cet amendement s’inscrit dans la lignée des propositions que nous avions formulées pour développer la démocratie sanitaire territoriale à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 43 rectifié bis est présenté par MM. Sautarel, Perrin, Rietmann, Brisson, J.P. Vogel, Bacci et Bonhomme, Mme Dumont, MM. Tabarot, Gremillet, H. Leroy, Panunzi, Cadec, E. Blanc, Bouchet et Lefèvre, Mme Ventalon, MM. D. Laurent, Menonville, Genet et de Nicolaÿ, Mmes Noël, Josende et P. Martin, MM. Belin et Anglars, Mme Pluchet, MM. Hingray, Cambon, Folliot, Maurey, Delcros, Darnaud, Sido et de Legge et Mme Bonfanti-Dossat.
L’amendement n° 105 rectifié quinquies est présenté par M. Chasseing, Mme Lermytte, MM. Médevielle et Rochette, Mme L. Darcos, M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Brault, Wattebled et Malhuret, Mmes Bourcier et O. Richard, M. Buis, Mme Romagny et MM. Nougein et Daubet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 632-2 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase du premier alinéa du II est complétée par les mots : « , qui sont systématiquement les premières à être pourvues » ;
2° Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les modalités d’attribution des stages afin que les stages situés dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique soient les premiers à être pourvus. »
La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° 43 rectifié bis.
M. Max Brisson. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 105 rectifié quinquies.
M. Daniel Chasseing. Les étudiants en médecine générale doivent effectuer leur dernière année d’études, la dixième, sous forme de stage.
Si la loi prévoit déjà que ce stage s’effectue en priorité dans les déserts médicaux, on observe que, chaque année, le nombre de lieux de stage proposés est supérieur au nombre d’étudiants, si bien que les zones sous-dotées ne sont pas toutes pourvues.
Cet amendement vise donc à rétablir l’article 5 quater, aux termes duquel les stages situés dans les déserts médicaux devaient être les premiers pourvus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces trois amendements ont pour objet de rétablir l’article 5 quater.
Les auteurs des amendements identiques nos 43 rectifié bis et 105 rectifié quinquies souhaitent rétablir les dispositions transmises par l’Assemblée nationale, visant à prévoir que les stages en zones sous-denses de la quatrième année de médecine générale sont systématiquement les premiers à être pourvus.
Les auteurs de l’amendement n° 57 prônent la création d’une commission départementale d’affectation et d’accompagnement à l’exercice de l’année de professionnalisation qui serait chargée d’établir la liste des stages offerts aux étudiants en zones sous-denses.
La quatrième année du diplôme d’études spécialisées (DES) de médecine générale a été créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, qui a d’ores et déjà prévu que les stages seraient en priorité effectués en zones sous-denses. Il s’agit d’une réforme importante du diplôme, qui reprend largement une proposition de loi du président Retailleau adoptée par le Sénat l’année dernière.
Il n’est pas opportun de revenir sur de telles dispositions. Elles doivent s’appliquer pour la première fois en 2026 pour les étudiants qui se sont engagés dans cette spécialité en 2023. Ces derniers attendent encore des précisions sur le contenu de la quatrième année, sur leur statut et sur les modalités d’organisation des stages. Ces points doivent faire l’objet de textes réglementaires qui n’ont pas encore été pris.
Mes chers collègues, j’appelle votre attention sur un point : si l’on attribue les places dans les zones sous-denses aux premiers de la classe – car c’est bien de cela qu’il s’agit –, il est à craindre que ces derniers n’aient le sentiment d’être punis. (M. Daniel Chasseing proteste.)
Mme Émilienne Poumirol. Mais nos territoires sont beaux !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Évidemment que tous nos territoires sont beaux et méritent d’être découverts. Mais attention : y envoyer d’office les mieux classés pourrait être interprété comme une punition.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements, qui visent à créer une année de professionnalisation après le troisième cycle durant laquelle les étudiants seraient obligatoirement affectés dans les zones sous-denses.
Vous le savez, le Gouvernement est défavorable aux mesures visant à contraindre la liberté d’installation. Il n’est donc pas favorable à la création d’une obligation s’agissant des stages. La contrainte ne fonctionne pas. Je sais que les syndicats des internes en médecine – j’ai rencontré plusieurs de leurs représentants ce matin – suivent avec attention nos débats. Notre objectif est plutôt d’inciter plus fortement les étudiants, avec l’espoir de les convaincre, à choisir volontairement de réaliser leur stage dans les territoires sous-denses : c’est ainsi qu’ils seront tentés de s’y installer et d’y construire une partie de leur vie. C’est le sens de la création de la quatrième année d’internat de médecine générale.
Nous devons collectivement mobiliser tous les leviers disponibles. Nous avons d’ailleurs pris différentes mesures pour soutenir la réalisation de ces stages dans ces zones sous-denses : nous avons ainsi annoncé au mois de juin dernier qu’une indemnité serait attribuée aux jeunes qui réalisent leur stage en zone d’intervention prioritaire (ZIP). Instaurer une obligation serait donc contre-productif.
Pour répondre à Mme la rapporteure, j’indique par ailleurs que la mission chargée de définir les modalités de cette quatrième année poursuit ses travaux. Les étudiants sont associés à la réflexion.
Je rappelle en outre que les collectivités participent déjà à l’accueil des étudiants en zones sous-denses, par leur action en matière de logement et de développement des mobilités. Le cahier des charges de notre plan d’action pour atteindre 4 000 maisons de santé pluriprofessionnelles prévoit d’ailleurs qu’un logement doit être systématiquement prévu pour accueillir les étudiants, de telle sorte que la problématique du logement ne soit plus un sujet.
Le Gouvernement utilise donc tous les leviers pour rendre les stages en zones sous-denses attrayants pour les jeunes étudiants, tant du point de vue financier que des moyens mis à leur disposition. Encore une fois, nous préférons l’incitation à l’obligation.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. J’entends ce qui vient d’être indiqué, mais je me demande quelles perspectives je pourrai donner, lorsque je rentrerai chez moi à l’issue des débats, aux personnes âgées, qui sont nombreuses dans nos territoires ruraux, concernant la prise en charge des maladies qu’elles peuvent avoir. Quelles perspectives pourrai-je donner aux personnes atteintes d’une affection de longue durée ?
Un chirurgien gastro-entérologue m’a expliqué récemment que les malades viennent le consulter plus tardivement qu’il y a trois ou quatre ans et qu’il est parfois trop tard. À l’époque, ces malades auraient pu être guéris ; aujourd’hui, ils sont traités, leur espérance de vie est, certes, prolongée, mais, indéniablement, il y aura eu des pertes de chance.
Quelles perspectives pourrai-je aussi donner aux femmes enceintes de ma commune, alors que les trois maternités accessibles se trouvent à une heure et quart de route, dans les conditions climatiques que l’on connaît dans le centre du Morvan, marquées par le risque de brouillard, de verglas, de neige ?
Quelles perspectives pourrai-je donner, alors que nous n’avons apporté jusqu’à maintenant, dans notre discussion, aucune réelle réponse à l’anxiété et à l’insécurité sanitaire qui prévaut sur notre territoire ?
Il nous reste quelques heures de débat pour examiner un certain nombre d’amendements. Mes chers collègues, prenons nos responsabilités pour apporter des réponses adaptées aux habitants de l’ensemble de nos territoires, afin qu’ils soient traités équitablement. Il y a urgence !
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Cela ne vous étonnera pas, mes chers collègues, je voterai contre ces amendements. Je préfère la logique consistant à renforcer l’attractivité des lieux de stage et à permettre aux docteurs juniors – c’est ainsi qu’on les appelle – de choisir leur stage. Ces derniers iront en majorité dans les zones sous-denses, qui représentent 87 % du territoire.
M. Patrice Joly. Ce n’est pas vrai !
Mme Véronique Guillotin. Ils iront de préférence là où ont été mis en place des dispositifs d’exercice coordonné, là où existent des maisons de santé pluriprofessionnelles, là où ils profiteront d’une dynamique professionnelle.
J’ai confiance en ces jeunes. Mieux vaut leur envoyer un message positif, au lieu de les braquer par des messages négatifs. Il est illusoire de croire que l’on résoudra les problèmes en les obligeant à aller là où ils ne veulent pas.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Je veux saluer le travail de notre rapporteure.
Bien évidemment, nous sommes confrontés à une pénurie. Dans de tels cas, on est toujours tentés de recourir à la contrainte pour surmonter la crise à court terme. Mais cela ne marche jamais, en médecine comme dans les autres secteurs.
En réalité, la question est celle de l’attractivité des métiers. Je sais que nos débats sont très regardés. Il est extrêmement important de faire en sorte que la médecine, notamment la médecine générale, redevienne attractive. C’est le meilleur remède à la pénurie, qui est dramatique.
M. le président. La parole est à Mme Marie Mercier, pour explication de vote.
Mme Marie Mercier. Je voudrais faire deux remarques pour répondre à notre collègue Patrice Joly.
Tout d’abord, la proximité doit rimer avec la qualité des soins. Il ne faut jamais l’oublier. Si une maternité ne pratique pas assez d’accouchements, les patientes ne seront pas bien prises en charge. M. Joly a fait référence au Morvan. Nous avons participé à des visioconférences ensemble, avec l’ARS, pour trouver des solutions. Je dois saluer les efforts réalisés. La mise en place d’un service mobile d’urgence et de réanimation (Smur) obstétrical vise à apporter une réponse à ces femmes qui souhaitent une solution satisfaisante, tant pour l’enfant à naître que pour elles-mêmes.
Ensuite, en ce qui concerne les délais de soins et les pertes de chance, n’oublions pas que la période du Covid et du confinement n’est pas si lointaine. Si l’hôpital a tenu pendant cette période, c’est parce que les interventions programmées ont été repoussées, ce qui a déclenché une perte de chances, d’autant plus qu’il n’y avait plus de prévention non plus. Il a fallu des mois pour rattraper le retard accumulé. Il ne faut pas l’oublier, même si je vous rejoins, monsieur Joly, sur le constat que le délai pour obtenir un rendez-vous s’est accru.
La contrainte suscite l’imagination : nous devons travailler ensemble pour faire en sorte que les patients bénéficient, autant que possible, de possibilités de recours aux soins égales sur tout notre territoire.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je voudrais à mon tour saluer le travail de notre rapporteure, mais il y a un point sur lequel je ne suis pas d’accord avec elle : je ne peux pas entendre qu’envoyer des médecins effectuer leur stage prioritairement dans certaines zones, dans une logique d’aménagement du territoire, serait une « punition » !
Le Parlement et le Gouvernement doivent veiller à faire en sorte qu’il soit possible d’accéder à un médecin dans chaque territoire. C’est pourquoi je suis favorable à ce que les stages soient effectués en priorité dans les zones sous-denses. Les étudiants pourront évidemment choisir la zone. Dans ces zones, les collectivités ont réalisé un travail immense : elles ont construit des maisons de santé ; elles sont capables d’accueillir les médecins et de les loger. Des parcours de soins coordonnés y sont aussi possibles. Les médecins ne seront pas seuls ; ils pourront travailler avec des paramédicaux. Tout est organisé.
À mon sens, nous pourrions également retenir la proposition de Mme Poumirol, qui pourrait s’articuler autour des départements, car les conseillers départementaux connaissent parfaitement le territoire. Le dispositif qu’elle envisage me semble judicieux pour que les médecins soient accueillis dans de bonnes conditions ; l’organisation doit être départementale.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Mon cher collègue, je n’ai fait que vous faire part du sentiment des internes. La rédaction que vous proposez de rétablir est claire : il est indiqué que les zones sous-denses sont « systématiquement les premières à être pourvues ».
Je le rappelle, les modalités d’organisation de la quatrième année de troisième cycle de médecine que nous avons votées prévoient déjà que les stages seront en priorité effectués dans les territoires sous-denses.
Je ne voudrais pas que l’on se méprenne sur mes propos : nos territoires ont tous des atouts, et ils savent d’ailleurs communiquer pour les mettre en avant, afin de donner envie à tous les professionnels, et pas seulement aux médecins, de s’y installer. Toutefois, l’article, tel qu’il était rédigé, revenait sur la rédaction de la proposition de loi de Bruno Retailleau, que nous avions adoptée, et sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.
Prévoir, comme c’est le cas actuellement, que les stages doivent être en priorité effectués en zones sous-denses me semble équilibré. En revanche, prévoir que les premiers du classement y sont systématiquement envoyés me paraît un peu exagéré. Il ne faudrait pas que ce que nous votons se révèle contre-productif.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Ce débat nous ramène d’une certaine manière à celui que nous avons eu hier sur l’attractivité des métiers du soin. Mais je crois que la première des difficultés, c’est le nombre.
Or, pour que des étudiants aient envie de suivre ce type de formation, il faut qu’ils soient motivés ; apporter une nouvelle contrainte dès le démarrage de la formation, même si je peux comprendre certains des arguments qui sont avancés, ne va pas vraiment les motiver.
Je le rappelle, pour préparer la proposition de loi de Bruno Retailleau, nous avons auditionné les syndicats d’étudiants et de nombreux jeunes qui s’étaient engagés dans la filière. Ils avaient des inquiétudes, que ce soit sur certains aspects qualitatifs ou sur le type de structures concernées, et nous avons répondu par diverses mesures.
Ils se posaient aussi beaucoup de questions sur les lieux de stage et je crois que nous avions réussi à adopter un texte équilibré : une priorité est donnée aux zones défavorisées. Cela ne permet peut-être pas de couvrir tout le territoire, mais c’est – je le répète – une position équilibrée.
Enfin, chers collègues du groupe Les Républicains ayant cosigné l’amendement n° 43 rectifié bis, nous avons passé de longs mois à rédiger la proposition de loi de Bruno Retailleau, à la faire voter, puis à attendre les textes d’application. Il me semble donc préférable de ne pas remettre en cause le calendrier prévu, à savoir 2026, en modifiant d’ores et déjà les règles du jeu.
Je veux conclure sur une question importante : notre capacité à désigner des maîtres de stage dans les zones défavorisées. Les différents outils dont nous disposons, par exemple les CPTS, doivent être mobilisés pour cela, car c’est aussi l’une des clés pour lutter contre les difficultés d’accès aux soins.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 57 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 14 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Pour l’adoption | 99 |
Contre | 218 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 43 rectifié bis et 105 rectifié quinquies.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 15 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Pour l’adoption | 117 |
Contre | 218 |
Le Sénat n’a pas adopté.
En conséquence, l’article 5 quater demeure supprimé.
Après l’article 5 quater
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié ter, présenté par Mme Sollogoub, M. Guerriau, Mme Noël, M. J.M. Arnaud, Mme Vérien, M. Laugier, Mme N. Goulet, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Delahaye et Rochette, Mme Gatel, MM. Houpert, Bonnecarrère, Chasseing et Capus, Mme Paoli-Gagin, M. Duffourg, Mme Perrot, M. J.P. Vogel, Mme O. Richard, M. Chevalier, Mme Dumont, MM. Henno, Kern et Lemoyne, Mme Herzog, M. Wattebled, Mme Richer, M. Chatillon, Mmes Romagny et Demas, M. Canévet, Mmes Lermytte et Saint-Pé, MM. Lefèvre et Roux, Mmes Jacquemet, Guidez et Nédélec, MM. Menonville et Cadic, Mme Josende, M. Belin, Mme de La Provôté et MM. L. Vogel, Verzelen, Cigolotti et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 5 quater (Supprimé)
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre III du livre VI de la troisième partie du code de l’éducation est complété par un article L. 632-… ainsi rédigé :
« Art. L. 632-…. Sans préjudice des règles spécifiques prévues par le code de la santé publique et le présent code, les stages rendus obligatoires par les dispositions du présent chapitre peuvent se dérouler sur l’ensemble du territoire français. »
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement de Nadia Sollogoub vise à ouvrir les stages obligatoires réalisés au cours du cursus universitaire aux étudiants de facultés dépendant d’une autre académie. En effet, certains territoires peuvent être plus proches géographiquement d’une université dépendant d’une académie qui n’est pas celle de rattachement. Dans ce cas, les étudiants demandent des dérogations pour étudier au plus près de leur domicile, mais leur cursus ne les fait pas revenir sur leur territoire d’origine, où ils ont pourtant des attaches.
Ainsi, les jeunes étudiants en médecine nivernais dépendent de la faculté de Dijon, mais demandent souvent des dérogations pour étudier à Clermont-Ferrand ou à Tours. Ils sont issus d’un territoire terriblement sous-doté qui a cruellement besoin d’eux. Pourtant, les stages, en particulier ceux de fin de cursus, ne leur sont pas ouverts.
Dans le même temps, alors que la Nièvre dispose de nombreux maîtres de stage, les places de stage restent, pour beaucoup, non pourvues. En effet, les étudiants dijonnais rechignent à aller faire un stage dans la Nièvre, département le plus éloigné de la faculté. Il faudrait pouvoir proposer ces stages aux étudiants volontaires, là où ils se trouvent, et ce n’est pas forcément leur faculté de rattachement.
Aussi, le présent amendement vise à permettre aux territoires qui ne sont pas dotés d’universités de proposer des stages aux étudiants où qu’ils soient.
Toutes les études prouvent que les jeunes diplômés choisiront plus facilement de s’installer là où ils ont des attaches. Il est donc essentiel de leur permettre d’y faire leurs stages et d’y nouer des contacts au cours de leur cursus.
Cette disposition permettra de multiplier les opportunités et de favoriser l’installation de professionnels de santé dans les territoires ruraux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je comprends évidemment l’intention des auteurs de cet amendement, qui vise à répondre à certaines situations dans lesquelles un territoire sous-doté est éloigné de l’université de rattachement et, en conséquence, ne parvient pas à attirer les étudiants.
Toutefois, une telle modification bouleverserait profondément les modalités d’affectation des stages et soulèverait des difficultés opérationnelles : les stages sont aujourd’hui répartis, au début du troisième cycle, par ancienneté et selon le rang de classement ; ils le sont, en fin d’internat, par appariement des classements établis par les étudiants et par les maîtres de stage. Ces modalités de répartition sont difficilement envisageables à l’échelon national.
Des dérogations sont d’ores et déjà possibles, permettant aux étudiants de réaliser des stages hors de leur région de rattachement. Peut-être est-ce plutôt cet outil qu’il faudrait simplifier ; Mme la ministre nous donnera peut-être des informations à cet égard.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. La réglementation prévoit déjà la possibilité pour un étudiant de réaliser des stages hors de sa subdivision d’affectation, hors de sa région, dans les collectivités d’outre-mer ou même, sur dérogation, à l’étranger. Cela permet de garantir l’égalité et la diversité des lieux de stage.
Par ailleurs, des contrats entre un CHU et des villes qui n’ont pas d’université sont possibles.
Avec ces deux modalités, il est possible de faire des stages hors de son CHU et de son université d’origine.
Cet amendement nous paraît donc satisfait. Par conséquent, le Gouvernement en demande le retrait ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour explication de vote.
M. Bruno Belin. J’ai cosigné cet amendement, parce que c’est un véritable enjeu pour les territoires.
On a beaucoup parlé depuis le début de nos débats de la fin du numerus clausus. Mais celui-ci a été remplacé, chacun le sait, par un numerus apertus qui crée de grandes disparités entre les territoires, parce que les universités n’ont ni les mêmes moyens ni le même nombre de places et d’enseignants.
Vous aurez ainsi toujours plus de difficultés à Dijon ou à Clermont-Ferrand que dans les universités parisiennes ou dans celles d’autres grandes métropoles.
Hier, nous avancions des solutions en termes de contrainte ou d’incitation, mais le vrai enjeu pour l’université, c’est d’ouvrir les vannes ! Même si on imposait une contrainte pour les étudiants, elle ne s’appliquerait qu’à ceux qui entrent en première année à partir de maintenant ; nous en verrions donc les résultats en 2033 ou 2034 !
Il faut ouvrir les vannes des universités ; c’est le meilleur moyen pour avoir demain des médecins. Et il faut un rééquilibrage territorial. De ce point de vue, le numerus apertus n’est pas une bonne idée. Il vaudrait mieux donner des moyens suffisants à toutes les universités, à commencer par celles de province et des territoires les plus ruraux.
M. le président. Madame Guidez, l’amendement n° 4 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Jocelyne Guidez. Non, monsieur le président.
Cela dit, puisque la rapporteure comme la ministre nous disent que les outils existent déjà, pourquoi rencontrons-nous un peu partout les mêmes difficultés ? Tout ne se passe pas aussi bien que ce le Gouvernement indique. Il faudrait vraiment, me semble-t-il, convenir qu’il y a un problème.
Pour autant, et en accord avec Nadia Sollogoub, je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié ter est retiré.
Article 5 quinquies
Le chapitre III du titre V du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 6153-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 6153-6. – L’entité dans laquelle l’étudiant mentionné aux 1° et 2° de l’article L. 6153-1 effectue son stage prend les mesures nécessaires pour assurer sa sécurité et protéger sa santé physique et mentale, dans les conditions prévues à l’article L. 4121-1 du code du travail. » – (Adopté.)
Article 5 sexies
(Non modifié)
I. – Pour une durée de cinq ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, une expérimentation visant à encourager l’orientation des lycéens issus de déserts médicaux vers les études de santé est mise en place par le ministère de l’éducation nationale dans trois académies volontaires.
II. – Dans les académies concernées, les lycées situés dans des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou concernées par des difficultés dans l’accès aux soins, au sens du 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique, proposent une option santé aux élèves des classes de première et de terminale de la voie générale.
III. – Au plus tard un an avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation afin de déterminer les conditions appropriées pour son éventuelle généralisation.
M. le président. L’amendement n° 152, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le mot :
santé
insérer les mots :
notamment d’infirmier
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement, comme l’amendement n° 139 que nous examinerons dans quelques instants – je propose d’ailleurs de le présenter dès maintenant – a pour objet d’élargir un peu l’expérimentation qui est envisagée dans l’article. Celle-ci vise à encourager l’orientation des lycéens issus des déserts médicaux vers les études de santé.
L’amendement n° 152 tend à intégrer dans le dispositif les études d’infirmier. À nos yeux, faire passer les étudiants qui se destinent à être infirmiers par Parcoursup a été extrêmement délétère, au point qu’aujourd’hui, le taux d’abandon dans les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) a plus que doublé.
Vous savez tous ce que nous pensons, d’une manière générale, de Parcoursup, mais les effets sont visiblement encore plus délétères s’agissant des études d’infirmiers. L’idée n’est pas forcément de revenir au concours, mais il faut trouver une solution permettant que des jeunes ayant la vocation pour devenir infirmiers ne se retrouvent pas éjectés du processus du fait de l’algorithme de Parcoursup et, à l’inverse, que d’autres n’ayant pas de solution satisfaisante dans Parcoursup se retrouvent étudiants en Ifsi sans vraiment l’avoir choisi.
L’amendement n° 139 va dans le même sens que l’amendement n° 152, mais pour les filières du secteur médico-social. Ce secteur a déjà et aura encore plus dans les années à venir des besoins considérables de recrutement, compte tenu notamment du vieillissement de la population. Il nous semblerait donc souhaitable que l’expérimentation s’applique également à ces filières.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement est satisfait, puisque l’article 5 sexies fait référence aux « études de santé », ce qui inclut toutes les professions médicales et paramédicales.
L’expérimentation d’une orientation des lycéens issus de déserts médicaux vers les études de santé peut constituer un levier utile pour lutter contre la progression des déserts médicaux en France. Cette mesure pourrait aussi contribuer à démocratiser l’accès aux études de santé, qui sont parfois, voire souvent perçues comme élitistes.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Comme vient de le souligner Mme la rapporteure, l’amendement est satisfait par la rédaction de l’article : le métier d’infirmier étant une profession de santé, il est inclus dans le dispositif.
Je crois qu’il est important d’informer collégiens et lycéens le plus tôt possible sur les métiers de la santé.
En ce qui concerne plus directement le métier d’infirmier, nous avons instauré, avec les Ifsi et les rectorats, les cordées de la réussite. Vingt-cinq Ifsi envoient déjà des représentants dans les lycées et les collèges pour informer les jeunes sur ce métier.
Nous souhaitons développer le plus largement possible cette information très en amont pour éviter les problèmes que nous rencontrons parfois – je dis bien parfois – avec Parcoursup et pour se garder des choix par défaut. Faire des études de santé doit être le véritable choix du jeune.
Nous souhaitons développer ce type d’informations très en amont sur toutes les filières, y compris celles du médico-social. C’est pour cela que j’émettrai un avis défavorable sur l’amendement n° 139 lorsqu’il viendra en discussion.
Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 152 ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour explication de vote.
M. Bruno Belin. L’amendement de Mme Brulin me semble intéressant : il met bien en avant le fait que Parcoursup est un boulet !
Mme Céline Brulin. Exactement !
M. Bruno Belin. On parle ici des études d’infirmier, mais il y a un problème équivalent pour les études en pharmacie : au dernier concours d’entrée en deuxième année, 471 places sont restées vacantes ; nous avons alerté Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur le sujet.
Personne aujourd’hui n’est capable d’expliquer à un jeune comment faire pharmacie. Nous manquons déjà d’environ un millier de pharmaciens ; au tournant des années 2030, il en manquera entre 6 000 et 7 000.
Parcoursup est un mauvais point d’entrée pour ces études, et pour les études de santé en général. Nous devons absolument simplifier les choses. C’est pour cela que je trouvais cet amendement intéressant.
Je le répète, Parcoursup est un boulet : prenons-en acte et changeons les choses !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Je ne peux pas laisser dire que Parcoursup est un boulet. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE-K et Les Républicains.)
M. Bruno Belin. Vous êtes bien la seule !
Mme Émilienne Poumirol. C’est pourtant ainsi que Parcoursup est ressenti !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. En ce qui concerne les études de pharmacie, l’année dernière, 1 200 places étaient vacantes. Des mesures ont donc été prises pour améliorer l’accessibilité et la visibilité de la pharmacie. De fait, cette année, vous l’avez dit, 400 places restent vacantes ; c’est encore beaucoup trop.
M. Bruno Belin. Ce sont donc 1 600 places en deux ans !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Cette situation n’est pas seulement le résultat d’un manque de visibilité sur Parcoursup. Nous allons continuer de travailler pour améliorer les choses, mais cela révèle plus globalement les difficultés d’attractivité des métiers de la santé.
Nous ferons des propositions pour améliorer les choses s’agissant des études d’infirmier. Je vous rappelle que nous travaillons en parallèle sur la réforme du métier.
M. Bruno Belin. Je ne doute pas de votre bonne volonté !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 68 rectifié est présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat, M. Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 139 est présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 203 est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Après le mot :
santé
insérer les mots :
ou les métiers du médico-social
La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 68 rectifié.
Mme Annie Le Houerou. Face à la pénurie de personnel qui se fait également sentir dans les établissements médico-sociaux et aux difficultés de recrutement auxquelles les départements sont confrontés, il est important d’encourager l’orientation des lycéens vers ce secteur.
Actuellement, 50 000 postes sont à pourvoir dans les établissements et services des secteurs social, médico-social et sanitaire, public et privé confondus. Si ces besoins ne sont pas nouveaux, ils tendent à s’amplifier : près de 150 000 postes seraient à pourvoir d’ici à 2025, soit près d’un quart des emplois actuels.
De telles tensions touchent toutes les filières et toutes les professions. Elles s’observent particulièrement parmi les professionnels de l’accompagnement et du soin. Les métiers du soin et de l’accompagnement subissent des situations permanentes de sous-effectif. En cause : un manque de reconnaissance des professionnels, la pénibilité du travail, des carrières trop peu attractives, des conditions de travail dégradées, mais aussi une crise de sens plus globale liée à la place accordée à ces métiers dans notre société.
En amont, les formations spécialisées ne font plus le plein. Face à la pénurie de personnel dans les établissements médico-sociaux et devant les difficultés de recrutement, il est important d’encourager l’orientation vers ces secteurs des lycéens, en particulier ceux issus des déserts médicaux, afin de revaloriser ces métiers, qui ont une importance primordiale pour notre société.
Notre amendement tend à répondre à cette urgence.
M. le président. L’amendement n° 139 a déjà été défendu.
La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l’amendement n° 203.
Mme Anne Souyris. Nous manquons de professionnels de santé, alors que tant de jeunes souhaitent devenir médecins, infirmiers ou aides-soignants, et que tant de vocations peuvent voir le jour si nous mettons les moyens suffisants dans l’orientation.
Il faudra – je le répète – construire une voie d’accès facilitée pour les jeunes qui suivront l’option santé prévue à cet article.
En l’occurrence, excusez-moi, madame la ministre, mais Parcoursup est un boulet ! Il est actuellement très compliqué de choisir une formation d’infirmière ou de kinésithérapeute si vous n’avez pas opté pour la dominante scientifique en terminale. Dans ce cas, vous êtes obligé d’être en réorientation en deuxième année si vous voulez entrer dans une formation de ce type. C’est complètement anormal !
Combien de jeunes sont refusés à la sortie du lycée dans les formations qui n’ont pas de capacités suffisantes ! Quel dommage face à la nécessité de former plus de soignantes et de soignants !
Rappelons que l’accès aux soins est aussi une affaire de professionnels du médico-social. C’est pourquoi je vous propose d’encourager la formation des lycéens dans ces deux domaines, la santé et le médico-social, qui sont indissociables et aussi importants l’un que l’autre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.
Mme Émilienne Poumirol. Pourquoi ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. J’y viens, ma chère collègue ; je vous sens impatiente. (Sourires.)
Il y a en fait deux sujets. Dans ces amendements est évoquée la question des métiers du secteur médico-social, alors que la proposition de loi porte sur l’amélioration de l’accès aux soins. C’est donc un peu hors sujet, même si les professionnels du médico-social, par leurs interventions, que ce soit dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou dans les établissements accueillant des personnes handicapées, contribuent naturellement aux soins.
Mais je crois qu’il faut revenir au sens du texte. Celui-ci ouvre une possibilité intéressante : aller parler aux lycéens des métiers de la santé.
Certes, il existe des passerelles entre les métiers de la santé et ceux du médico-social, mais ce ne sont pas tout à fait les mêmes métiers, et je ne crois pas que les métiers du médico-social soient concernés directement par la présente proposition de loi, dont je rappelle tout de même l’intitulé : « améliorer l’accès aux soins ».
Voilà pourquoi la commission est défavorable à ces amendements identiques.
Mme Émilienne Poumirol. C’est tiré par les cheveux !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Pas plus que votre amendement !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Comme je l’ai indiqué lorsque j’ai été sollicitée à propos de l’amendement n° 152, le Gouvernement est également défavorable à ces amendements identiques.
Ainsi que Mme la rapporteure vient de le souligner, nous avons besoin de professionnels dans les deux secteurs, la santé et le médico-social, mais ce ne sont pas les mêmes filières. On ne peut donc pas inclure le médico-social dans l’option santé.
Je confirme que Parcoursup n’est pas un boulet ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Un peu quand même…
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Nous devons continuer d’améliorer les choses.
Si nous voulons donner envie aux jeunes de choisir ces filières, nous devons améliorer l’information en amont ; j’ai parlé tout à l’heure des cordées de la réussite.
Mais nous souhaitons aussi développer le mentorat, parce qu’il est important de bien accompagner dès le début ceux qui choisissent de telles formations. Le taux d’abandon est aujourd’hui trop élevé : 20 % la première année ! Parfois, ces jeunes sont surpris, lors de leur premier stage, par les réalités du métier.
Je le redis, nous devons accentuer nos efforts en faveur à la fois d’une information très en amont et du développement du mentorat. Et il faut aussi améliorer Parcoursup. C’est ce que le ministère de l’enseignement supérieur est en train de faire.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Il se peut que ces amendements soient hors sujet, mais le fait est que nous allons rapidement avoir besoin de recruter énormément, en particulier des infirmiers et des aides-soignants, dans les métiers paramédicaux.
Si ces derniers, qui sont pour partie financés par la sécurité sociale, ne sont pas attractifs, c’est notamment parce que les professionnels ne sont pas assez nombreux.
Nous allons alors au-devant de graves problèmes : le nombre de personnes âgées de 85 ans et plus va doubler d’ici à 2040 ; les besoins d’accompagnement des personnes dépendantes vont donc croître de manière très importante.
C’est pourquoi nous devons former beaucoup d’infirmiers et d’aides-soignants ; c’est un véritable challenge ! Je vous rappelle d’ailleurs que le Président de la République a promis 50 000 emplois dans le secteur du grand âge. C’est seulement à ce prix que nous pourrons prendre en charge de manière décente nos aînés, qu’ils résident en Ehpad ou à domicile.
Il me semble donc important d’aller informer les jeunes dans les lycées sur les métiers du soin et de l’accompagnement.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je voterai contre ces amendements, parce que les filières du médico-social et du soin sont distinctes.
Aujourd’hui, nous avons du mal à recruter. C’est pourquoi il faut aller vers les jeunes pour les informer. Les Ifsi et les régions sont en première ligne pour cela.
Ce que je trouve intéressant dans cet article, c’est de s’adresser en priorité aux lycéens des territoires sous-dotés, qu’ils soient ruraux ou en quartier prioritaire de la politique (QPV) de la ville.
L’intérêt de cette option santé dans les lycées est aussi de lutter contre une forme de déterminisme social et géographique. Beaucoup de parents ou de jeunes s’autocensurent : même si un enfant travaille bien à l’école, ses parents se disent souvent qu’il sera mieux dans une structure proche de la maison, par exemple un institut universitaire de technologie (IUT), plutôt qu’à l’université qui est loin.
Nous réussirons à donner confiance aux parents et aux enfants si nous mettons tout le monde autour de la table : l’éducation nationale, les régions, les départements, etc. Nous devons aussi associer les médecins et les professionnels, parce que nous avons besoin de tutorat. Nous devons également mobiliser des moyens financiers pour aider ces familles, par exemple en termes de mobilité pour les jeunes.
Je tiens énormément à cet article de la proposition de loi ; je crois que c’est une mesure particulièrement importante, notamment en termes d’anticipation.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 68 rectifié, 139 et 203.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 119 rectifié, présenté par MM. Haye, Patriat et Lemoyne, Mme Schillinger, MM. Iacovelli, Rohfritsch et Buis, Mmes Havet et Duranton, M. Omar Oili, Mme Cazebonne, M. Fouassin, Mme Nadille, MM. Bitz, Buval, Kulimoetoke, Lévrier, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud et Théophile, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
volontaires
par les mots :
sur volontariat ou sur proposition du conseil territorial de santé
La parole est à M. Olivier Bitz.
M. Olivier Bitz. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.
L’ajout d’une proposition du CTS pour mettre en œuvre l’expérimentation ne nous paraît pas pertinent. Je vous propose de rester sur les académies volontaires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 16 n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 5 sexies.
(L’article 5 sexies est adopté.)
Après l’article 5 sexies
M. le président. L’amendement n° 140, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 5 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport examinant la possibilité de créer une année préparatoire aux études de médecine s’adressant en priorité aux lycées mentionnés à l’article L. 632-6-1 du code de l’éducation.
L’année préparatoire aux études de médecine est une formation d’une durée d’un an proposant aux étudiants, immédiatement après l’obtention de leur baccalauréat, une remise à niveau en vue de l’entrée en parcours d’accès spécifique santé et du passage du concours d’accès à la deuxième année d’études de médecine. La validation de l’année préparatoire aux études de médecine permet l’inscription l’année suivante en parcours d’accès spécifique santé.
L’année préparatoire aux études de médecine vise à renforcer les connaissances dans les disciplines fondamentales, acquérir des méthodes de travail adaptées au milieu universitaire et initier aux disciplines du domaine de la santé, et plus particulièrement de la médecine.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Madame la rapporteure, tout à l’heure, vous m’avez fait plaisir, et – j’en suis sûre – pas seulement à moi, en évoquant la nécessité de démocratiser les études de santé. Je crois en effet que c’est un levier extrêmement important. Pour le dire de manière très caricaturale, si les étudiants en médecine restent majoritairement des jeunes issus de familles CSP+, venant du cœur des grandes métropoles, nous aurons du mal à faire en sorte qu’ils aillent exercer dans la ruralité, dans des quartiers populaires, dans des banlieues, etc. En résumé, il y a un véritable enjeu de démocratisation.
Je ne suis pas sûre que cela suffise pour que vous acceptiez notre amendement, Madame la rapporteure, puisqu’il s’agit d’une demande de rapport, mais vous comprenez bien que c’est l’un des seuls moyens à notre disposition pour montrer la nécessité de réfléchir, de travailler à la création d’une année préparatoire aux études de médecine, précisément dans cet objectif de démocratisation.
Nous savons que ces premières années de médecine sont très difficiles et que beaucoup de familles font appel à des officines privées, parfois extrêmement coûteuses, pour passer ce cap.
Mme Émilienne Poumirol. C’est en effet très cher !
Mme Céline Brulin. Aussi, réfléchir à une formation publique préparant l’ensemble de nos jeunes à ces cursus, avec un focus particulier sur ceux qui sont dans des territoires où l’offre est insuffisante et où, de fait, ils sont moins nombreux à s’orienter vers ces études de médecine, est une solution particulièrement pertinente, au même titre que d’autres solutions auxquelles nous réfléchissons les uns et les autres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ainsi que Mme Brulin l’a annoncé à demi-mot dans son intervention, l’avis est défavorable, puisqu’il s’agit d’une demande de rapport.
Néanmoins, je partage votre approche, ma chère collègue. J’ai d’ailleurs évoqué tout à l’heure des métiers qui pouvaient apparaître comme élitistes. Aborder les études de santé au lycée peut aussi ouvrir le champ des possibles à certains lycéens.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. J’ai aussi évoqué l’idée d’aller le plus tôt possible dans les lycées pour expliquer à tous les lycéens, ruraux comme urbains, les métiers de la santé.
Une année préparatoire post-bac, avant l’admission au parcours accès santé spécifique (Pass) ne répond cependant pas aux objectifs de la réforme de l’accès aux études de santé. Celle-ci permet aux étudiants ayant obtenu les 60 ECTS, mais non admis en filière à l’issue du Pass, de poursuivre en deuxième année de licence. Ainsi, les étudiants qui ont validé leur année universitaire, mais qui n’ont pas pu accéder à une filière de santé, poursuivent leur parcours et peuvent mobiliser une deuxième candidature au cours de leur cursus : c’est la fameuse licence accès santé (LAS). Créer une année dédiée de préparation sans débouché en cas d’échec constituerait une forme de retour en arrière et ne ferait qu’allonger la durée des études.
Même si nous sommes d’accord avec vous sur la nécessité de faire la promotion des métiers de la santé dès le lycée, voire dès le collège, nous ne pouvons pas accepter votre amendement. Avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. En effet, nous pouvons tous faire le constat qu’il y a moins d’étudiants issus des zones rurales ou des zones plus pauvres.
Nous aurions intérêt à aller voir de plus près les expériences qui ont été menées aux États-Unis et en Australie, où il y a des formations universitaires à la médecine générale dans des zones peu denses qui s’adressent spécifiquement aux étudiants qui en sont originaires. Cet exemple pourrait nous inspirer pour faire des propositions intéressantes.
Plus largement, vous avez parlé du Pass-LAS. Je n’ai absolument pas le même ressenti que vous sur le sujet. J’ai rencontré beaucoup de familles d’élèves ayant échoué en Pass qui sont partis en LAS. Paradoxalement, au bout de trois ans de mise en œuvre de la réforme, beaucoup de jeunes s’inscrivent en LAS en se disant qu’ils ont davantage de chances de pouvoir récupérer le Pass en deuxième année, plutôt que de s’inscrire directement en Pass, où ils risquent l’échec malgré des notes très élevées. (Mme la ministre déléguée acquiesce.) Comme il y a plus de places en LAS, beaucoup de jeunes ont trouvé l’astuce, après que leurs prédécesseurs ont essuyé les plâtres les deux premières années de mise en œuvre de la réforme.
Ainsi, en passant par la LAS, nombre d’étudiants se retrouvent en formation pour être médecin, dentiste ou pharmacien avec une première année d’étude qui aura été beaucoup plus facile, parce qu’il n’y a pas les unités de valeur de médecine. Ils ont alors un rattrapage à faire, mais c’est tout de même plus simple pour eux. Je puis vous assurer qu’actuellement le système est complètement détourné de ses objectifs initiaux.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je m’abstiendrai sur cet amendement.
L’académie Centre-Val de Loire a expérimenté depuis quelques années un dispositif appelé Ambition Paces. Je fais confiance aux personnes qui en sont à l’origine. Elles ont notamment adapté les programmes, avec des cours supplémentaires. Je pense que nous aurions intérêt à regarder de près cette expérience.
M. le président. L’amendement n° 123 rectifié, présenté par MM. Haye, Patriat et Lemoyne, Mme Schillinger, MM. Iacovelli, Rohfritsch et Buis, Mmes Havet et Duranton, M. Omar Oili, Mme Cazebonne, M. Fouassin, Mme Nadille, MM. Bitz, Buval, Kulimoetoke, Lévrier, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud et Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 5 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant la fin de l’année 2024, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dressant un premier bilan de la filière d’excellence santé mise en place par l’agence régionale de santé des Hauts-de-France et le rectorat de région académique Hauts-de-France. Le rapport permettra notamment d’étudier l’opportunité de pérenniser un tel dispositif dans tous les lycées et universités situées dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique.
La parole est à M. Olivier Bitz.
M. Olivier Bitz. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable, car il s’agit d’une demande de rapport.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Bitz, l’amendement n° 123 rectifié est-il maintenu ?
M. Olivier Bitz. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 123 rectifié est retiré.
Article 6
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 6132-1 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase, les mots : « n’est pas » sont remplacés par les mots : « peut être » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’ensemble des établissements parties à un groupement hospitalier de territoire fusionnent dans les conditions prévues à l’article L. 6141-7-1, l’établissement issu de la fusion n’est pas tenu d’être partie à la convention mentionnée au premier alinéa du présent I. » ;
1° bis (nouveau) L’article L. 6132-7 est complété par un 10° ainsi rédigé :
« 10° Les conditions dans lesquelles un groupement hospitalier de territoire, sur demande conjointe de l’ensemble des établissements parties et accord du directeur général de l’agence régionale de santé, peut être doté de la personnalité morale, ainsi que les modalités de conciliation des prérogatives respectives du groupement et des établissements parties. » ;
2° L’article L. 6143-1 est ainsi modifié :
a) Après le 8°, il est inséré un 9° ainsi rédigé :
« 9° Le plan pluriannuel d’investissement. » ;
a bis) Après le dixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – l’état des prévisions de recettes et de dépenses, le plan global de financement pluriannuel ainsi que le programme d’investissement ; »
a ter) Après le quatorzième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le conseil de surveillance se voit présenter annuellement :
« – les observations du directeur général de l’agence régionale de santé sur l’état de santé de la population du territoire et sur l’offre de soins disponible sur ce dernier ;
« – les actions universitaires, d’enseignement et de recherche menées par le centre hospitalier universitaire avec lequel l’établissement a conclu une convention au titre de l’article L. 6142-5 ;
« – le bilan des actions mises en œuvre par l’établissement pour améliorer l’accès aux soins et la gradation des soins, en lien avec la politique du groupement hospitalier de territoire. » ;
b) (Supprimé)
c) Le dernier alinéa est ainsi modifié :
– la première phrase est supprimée ;
– au début de la seconde phrase, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « Le conseil de surveillance » ;
3° L’article L. 6143-7 est ainsi modifié :
a) Le 4° est complété par les mots : « et le soumet à l’approbation du conseil de surveillance » ;
b) Après la référence : « L. 6145-1 », la fin du 5° est ainsi rédigée : « et le plan global de financement pluriannuel, après avis du conseil de surveillance ; »
c) (Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 141, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. L’alinéa 3 de l’article 6 prévoit que les groupements hospitaliers de territoire (GHT) pourront se doter de la personnalité morale dans des conditions qui ne sont pas détaillées ici ; elles seront définies par décret.
Or, à la création des GHT, une telle possibilité a été repoussée pour éviter des déséquilibres territoriaux, et pour que la mutualisation de moyens au service des patients soit préservée.
L’amendement n° 238, qui vient d’être déposé par le Gouvernement et qui sera examiné dans quelques instants, nous renforce dans nos craintes. Il s’agirait ni plus ni moins d’une fusion. La création d’une personne morale peut donner l’illusion d’une dynamique de coopération, mais elle ne résout en rien la question des moyens.
Pour ces motifs, nous demandons la suppression de l’alinéa concerné.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 22 rectifié bis est présenté par M. Milon et Mmes Gruny, Deseyne et Lassarade.
L’amendement n° 32 rectifié quater est présenté par MM. Burgoa, Lefèvre, Bouchet et Sol, Mme Goy-Chavent, MM. H. Leroy, Menonville, Tabarot et Genet, Mme Ventalon, M. D. Laurent, Mme Muller-Bronn, M. Belin, Mme Guidez, MM. Pointereau, Cambon, Hingray et Folliot, Mme Puissat et MM. P. Martin et Gremillet.
L’amendement n° 92 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac et Daubet, Mmes M. Carrère et N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet, Guérini, Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° 200 est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) La seconde phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Les membres peuvent décider de doter le groupement hospitalier de territoire de la personnalité morale dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. Dans cette hypothèse, le groupement hospitalier de territoire est une personne morale de droit public à statut particulier défini par décret en Conseil d’État. » ;
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 22 rectifié bis.
M. Alain Milon. Le présent amendement vise à préciser la rédaction de la disposition relative à la création d’un droit pour les GHT d’opter pour une personnalité morale.
Créés par une loi de 2016 – j’en étais le rapporteur au Sénat –, les GHT, qui regroupent des établissements publics, n’ont pas aujourd’hui la possibilité de se constituer en personne morale. À l’époque, le législateur considérait que la création et l’adhésion obligatoire à un GHT étaient une première étape suffisamment contraignante pour entraîner une recomposition de l’offre publique de soins.
Ces groupements ont confirmé depuis toute leur utilité, notamment à l’occasion de la crise sanitaire, comme l’a relevé le rapport du Sénat sur la situation de l’hôpital et le système de santé en France du mois de mars 2022.
Sept ans après leur création, il apparaît nécessaire de les doter d’outils complémentaires pour simplifier de nombreuses procédures et renforcer l’organisation territoriale des soins. L’article 6 de la proposition de loi crée ainsi un droit permettant d’opter pour la personnalité morale, pour ceux qui le souhaitent, afin de mieux répondre à leur mission.
Toutefois, il convient de préciser la rédaction sur la nature juridique exacte de la personnalité morale du GHT.
Une personnalité morale à statut particulier permettrait de préserver l’autonomie et la personnalité juridique propre des établissements parties de ces groupements, tout en ouvrant la voie à des simplifications majeures et à la mise en cohérence de certaines autorisations, aujourd’hui délivrées à l’échelle d’un établissement, pour des activités de soins pourtant territorialisées et organisées dans le cadre du projet médico-soignant du GHT.
Le présent amendement a donc pour objet de préciser les dispositions relatives à la possibilité pour les groupements hospitaliers de territoire qui le souhaitent d’opter pour la personnalité morale, en indiquant qu’il s’agirait d’une personnalité morale de droit public à statut particulier amenée à être définie par décret en conseil d’État.
Je vous l’avoue, je ne suis pas le seul auteur de cet amendement, qui a été inspiré par la Fédération hospitalière de France (FHF).
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour présenter l’amendement n° 32 rectifié quater.
M. Laurent Burgoa. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être parfaitement défendu par Alain Milon.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 92 rectifié.
Mme Véronique Guillotin. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l’amendement n° 200.
Mme Anne Souyris. Il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 238, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I - Alinéa 3
Après les mots :
peut être
insérer les mots :
, dans les conditions prévues à l’article L. 6132-5-2,
II.- Alinéas 4 et 5
Supprimer ces alinéas.
III. – Alinéa 7
Après les mots :
personnalité morale
insérer les mots :
, en application des dispositions de l’article L. 6132-5-2
IV – Après l’alinéa 7
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
Après l’article L. 6132-5-1, il est inséré un article L. 6132-5-… ainsi rédigé :
« Art. L. 6132-5-…. – Le groupement hospitalier de territoire peut être doté de la personnalité morale dans les cas suivants :
« 1° lorsque l’ensemble des établissements parties à un groupement hospitalier de territoire fusionnent dans les conditions prévues à l’article L. 6141-7-1. Dans ce cas, l’établissement issu de la fusion n’est pas tenu d’être partie à la convention mentionnée au premier alinéa du I de l’article L. 6132-1 ;
« 2° lorsque les établissements parties à un groupement hospitalier de territoire ont créé les instances prévues aux articles L. 6132-2-3 et L. 6132-2-6, constituent, à l’exclusion de tout autre membre, un groupement de coopération sanitaire mentionné à l’article L. 6133-1 pour exercer au moins les compétences mentionnées aux articles L. 6132-3 et L. 6132-5-1 et dont l’administrateur est l’un des représentants légaux des membres du groupement hospitalier de territoire. »
La parole est à Mme la ministre déléguée. (Marques de mécontentement sur les travées du groupe SER.)
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, laissez-moi d’abord faire amende honorable pour le dépôt tardif en séance de cet amendement.
M. Milon souhaite que la personnalité juridique spécifique du GHT soit définie par décret. Par cet amendement, nous vous proposons une solution directement opérationnelle.
Ainsi, nous proposons la création d’un groupement de coopération sanitaire (GCS) adapté qui rende la personnalité morale du GHT moins contraignante, plus opérante, et de surcroît plus rapidement, puisqu’il n’y aura pas besoin de décret en Conseil d’État.
Je vous présente de nouveau mes excuses d’avoir déposé cet amendement si tard,…
Mme Émilienne Poumirol. Cela montre que le texte n’était pas bien préparé !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. … et je sollicite le retrait des amendements nos 22 rectifié bis, 32 rectifié quater, 92 rectifié et 200 au profit de l’amendement n° 238.
Enfin, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 241, qui vise à supprimer le droit d’option du GHT
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable sur l’amendement n° 141, qui a pour objet de supprimer l’ouverture au GHT d’un droit d’option pour l’octroi de la personnalité morale. C’est contraire à la position de la commission, qui a soutenu cette possibilité.
J’en viens aux quatre amendements identiques. J’entends les préoccupations de nos collègues quant à la coexistence des personnalités morales des établissements avec la nouvelle, dont serait doté le GHT. J’avais d’ailleurs interrogé le Gouvernement sur sa vision de cette nouvelle personnalité morale, qui viendrait en quelque sort se superposer à celle des établissements parties quand elle ne résulte pas d’une fusion de ces derniers.
C’est pourquoi nous avons inscrit dans le texte la semaine passée qu’un décret en Conseil d’État préciserait les conditions dans lesquelles un groupement hospitalier de territoire pourrait accéder à la personnalité morale, en prévoyant la demande conjointe de l’ensemble des établissements parties et le nécessaire accord du directeur général de l’agence régionale de santé, ainsi que les modalités de conciliation des prérogatives respectives du groupement et des établissements parties.
Une personnalité morale à statut particulier peut sembler une idée séduisante, mais d’une portée qui a semblé peu opérante à la commission. C’est pourquoi cette dernière n’a pas jugé cette option comme pouvant constituer une solution juridique solide.
Par ailleurs, il n’est pas certain que la multiplication des statuts particuliers soit pertinente dans un paysage hospitalier déjà bien complexe.
Pour ces raisons, la commission est défavorable aux quatre amendements identiques et en suggère le retrait.
J’en viens à l’amendement du Gouvernement, qui n’a pas été examiné, sauf erreur de ma part, en commission.
Mme Émilienne Poumirol. C’est la deuxième fois !
M. Bernard Jomier. Après l’article 4, l’article 6 !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Techniquement, cet amendement est intéressant. Je regrette évidemment qu’il n’ait pas pu être examiné par la commission en même temps que les quatre amendements identiques.
Mme Monique Lubin. « Avis défavorable » !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Non, je ne dirais pas forcément cela. Techniquement, on ne peut qu’être favorable à cet amendement. Reste que, politiquement, j’entends le mécontentement qui s’exprime.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat ; c’est un avis personnel.
Mme Émilienne Poumirol. Il ne peut être que personnel !
M. Bernard Jomier. Cette manière de travailler est inadmissible !
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Sur la forme, je partage l’émotion de tous nos collègues. Ce n’est pas possible de travailler ainsi ! Nous avons démarré la discussion en disant que ce texte était un assemblage de rustines collées les unes après les autres. Les conditions dans lesquelles nous l’examinons le confirment.
Sur le fond, quand les GHT ont été créés, il a été décidé de ne pas leur donner de personnalité morale en raison d’oppositions, par exemple parmi les organisations syndicales ou les élus locaux, qui craignaient que cela ne conduise à terme à une fusion des hôpitaux au sein d’un même GHT, avec au passage des suppressions de lits et une dégradation du service public.
Aujourd’hui, le texte ouvre la possibilité pour les GHT de se doter de la personnalité morale. Et l’adoption de l’amendement que vous nous présentez comme étant de précision ouvrirait la voie à la création, par exemple, d’une commission médicale d’établissement unique. En fait, avec cet amendement, vous êtes en train de renforcer les craintes que nous avions lors de la création des GHT.
J’ai coutume de dire de manière un peu triviale que ce n’est pas en ajoutant de la misère à de la misère que l’on crée de la richesse. Face à la situation très compliquée que vivent nos établissements hospitaliers, si vous pensez que la solution est de faire des GHT des hôpitaux très intégrés, vous vous trompez, madame la ministre.
En effet, vous pouvez être sûre que cela va conduire à des fermetures de lits, de services, à des diminutions de service, tous les hôpitaux étant aujourd’hui en déficit structurel. Votre amendement prétendument « de précision » nous inspire les plus grandes craintes.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je ne doute pas un seul instant de la bonne volonté du Gouvernement de trouver une solution au problème que nous soulevons. Mais il serait sans doute utile que M. le président de la commission nous réunisse quelques minutes, afin que nous puissions étudier l’amendement de Mme la ministre et que celle-ci puisse nous l’expliquer.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je vous propose que nous suspendions la séance pour que la commission puisse se réunir.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l’examen de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 6.
Article 6 (suite)
M. le président. Durant la suspension, la commission des affaires sociales s’est réunie pour examiner l’amendement n° 238, présenté par le Gouvernement.
Quel est donc l’avis de la commission sur cet amendement ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission s’est en effet réunie durant la suspension pour examiner l’amendement du Gouvernement. Je ne reviendrai pas sur la méthode : nous avons tous, je pense, exprimé nos regrets.
Ainsi que je l’ai rappelé devant la commission, la vraie question politique qui se posait s’agissant du début de l’article 6 était celle de l’ouverture ou non d’un droit d’option au GHT. La commission a validé ce point la semaine dernière et maintient sans ambiguïté sa position.
La problématique soulevée par cet amendement est d’ordre juridique, et le débat porte sur des aspects techniques, plus que sur des points politiquement durs.
Depuis plusieurs semaines, la commission a cherché à clarifier certains éléments concernant les modalités concrètes de mise en œuvre de ce droit d’option. Je l’ai indiqué, nous avons regretté que le Gouvernement ait été aux abonnés absents à cet égard.
L’amendement n° 238 a un atout : le dispositif proposé répond aux préoccupations de nos collègues auteurs des amendements nos 22 rectifié bis, 32 rectifié quater, 92 rectifié et 200 quant au besoin d’une personnalité morale qui ne soit pas celle du droit commun. L’enjeu est d’éviter un chevauchement de cette personnalité morale et de celle des établissements publics. Je l’ai souligné, la commission a inscrit le principe de conciliation des prérogatives du groupement et de celles des établissements parties.
Dans cet amendement, il est envisagé d’aller plus loin, en prévoyant deux cas de personnalité, avec fusion, ou non, des établissements. Pour le cas hors fusion – le plus sensible –, la disposition prévue renvoie précisément à un modèle de regroupement de coopération sanitaire, cependant dérogatoire. Cette solution juridique me paraît a priori valable.
Toutefois, et nous en avons débattu en commission durant la suspension, j’ai quelques réserves sur cet amendement, au sujet des cas hors fusion, réserves que plusieurs de mes collègues partagent d’ailleurs. En particulier, les conditions d’éligibilité à cette personnalité morale me paraissent particulièrement restrictives. Or la position du Gouvernement en la matière n’évolue pas à ce stade. Il me semble qu’ouvrir ce droit aux seuls établissements déjà bien intégrés et dotés de commissions uniques conduirait à limiter très fortement le nombre de groupements auxquels nous offrons ce soir de nouvelles modalités. En d’autres termes, veillons à ne pas raffiner l’édifice juridique pour quelques établissements seulement.
Ce sont ici des questions dont j’aurais aimé discuter plus en amont avec les directeurs, les présidents de CME et la FHF, qui sont tout de même les principaux acteurs concernés. Je ne doute pas que la commission mixte paritaire nous permette d’ajuster la mesure avec nos collègues députés.
Sous ces réserves, la commission a, sur ma proposition, émis un avis favorable sur l’amendement n° 238 ; elle demande donc le retrait des amendements nos 22 rectifié bis, 32 rectifié quater, 92 rectifié et 200.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, tout d’abord, je vous remercie d’avoir accepté que je vienne expliquer l’amendement n° 238 en commission ; nous souhaitions avant tout permettre aux GHT d’évoluer plus rapidement.
Je regrette tout comme vous que cet amendement ait été déposé aussi brutalement, si je puis m’exprimer ainsi, sans vous avoir été présenté au préalable.
Comme vous l’avez souligné, madame la rapporteure, nous allons continuer les échanges avec les fédérations et les directeurs d’hôpital pour avancer sur ces questions. Cependant, il me semblait important de pouvoir poser le principe du GCS. Le dispositif envisagé me paraît plus pertinent que les mesures proposées par les auteurs des amendements identiques nos 22 rectifié bis, 32 rectifié quater, 92 rectifié et 200, même si nous nous rejoignons sur les objectifs.
M. le président. Monsieur Milon, l’amendement n° 22 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Alain Milon. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 22 rectifié bis est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 32 rectifié quater, monsieur Burgoa ?
M. Laurent Burgoa. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 32 rectifié quater est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 92 rectifié, madame Guillotin ?
Mme Véronique Guillotin. Je le retire aussi.
M. le président. L’amendement n° 92 rectifié est retiré.
Quid de l’amendement n° 200, madame Souyris ?
Mme Anne Souyris. Cet amendement était transpartisan : je vais donc le retirer. Néanmoins, considérant que la méthode est absolument inadéquate – quatre mois se sont écoulés entre le vote de la loi à l’Assemblée nationale en juin et son examen au Sénat ! –, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’abstiendra sur l’amendement n° 238.
M. le président. L’amendement n° 200 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 141.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote sur l’amendement n° 238.
M. Bernard Jomier. Pour nous, la forme et le fond de cet amendement ne sont pas si dissociés.
Même si le dispositif envisagé à l’amendement n° 238 résout des questions techniques, il n’en demeure pas moins que c’est l’évolution des GHT qui est en question.
Comme vient de le souligner Mme Souyris, le texte a été adopté le 15 juin dernier à l’Assemblée nationale. Or, pendant quatre mois et dix jours, le Gouvernement n’a pas cru utile de proposer une modification. C’est la deuxième fois – sur l’article 4, puis sur l’article 6 – que des articles sont quasiment réécrits de fond en comble pendant la séance.
Pendant la discussion générale, le ministre de la santé – et je rends hommage à sa sincérité et son honnêteté – nous a en effet présenté des excuses quant aux conditions d’examen du texte. Mais il n’est pas possible pour nous de souscrire à de telles conditions de travail.
Là où la forme rejoint le fond, c’est que les intentions du Gouvernement ne sont absolument pas claires. Les deux articles en question concernent, d’une part, la permanence des soins des établissements de santé et, d’autre part, l’évolution des GHT, dont il faut souligner le polymorphisme : le bilan sur les fonctions supports ou sur les champs d’intervention est très hétérogène ! La méthode du Gouvernement sur ces deux articles traduit son hésitation : vous vous présentez devant le législateur, distribuez en catastrophe de nouvelles rédactions pendant la séance et obtenez l’accord de la commission réunie en urgence in extremis.
Il n’est pas possible de légiférer dans de telles conditions. Nous ne voterons donc pas cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 59 rectifié, présenté par Mmes Le Houerou et Poumirol, MM. Jomier et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Supprimer les mots :
de l’ensemble
2° Après les mots :
parties et
insérer les mots :
sous réserve d’un avis favorable émis par délibération concordante de l’ensemble des conseils de surveillance, avec l’
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Je rejoins les propos de mon collègue. L’évolution des GHT est un enjeu majeur ; nous regrettons que le sujet soit traité d’une telle manière.
Cet amendement concerne l’obligation d’un accord unanime des membres du GHT pour obtenir la personnalité morale.
Dans l’article 6 de la proposition de loi, il est prévu d’accorder au GHT la possibilité de se doter de la personnalité morale. Cette mesure intéresse certains groupements souhaitant améliorer leur gestion.
La démarche a été proposée à plusieurs reprises par la Cour des comptes, selon laquelle l’absence de personnalité morale pour les GHT les prive de ressources juridiques et financières nécessaires à l’exécution des missions qui leur sont déléguées par les établissements signataires de la convention constitutive. La responsabilité de ces missions repose essentiellement sur l’établissement support, tandis que le GHT joue un rôle formel et qu’il est dépourvu des outils nécessaires à une gestion optimale.
Autoriser les GHT à acquérir la personnalité morale leur confère une identité juridique distincte, assortie de responsabilités redéfinies sur le plan légal et financier.
Toutefois, il est fondamental que cette démarche ne puisse être engagée qu’à la suite d’un accord unanime des membres du GHT, c’est-à-dire après avis favorable obtenu par délibération concordante de l’ensemble des conseils de surveillance des établissements qui le composent.
Cette condition garantit que la décision d’obtenir la personnalité morale soit partagée par l’ensemble des membres sans prédominance de l’établissement support. Une telle procédure préserverait l’unité et la cohésion au sein du groupement. Il s’agit d’une mesure de bon sens. Il est important que le projet de santé du territoire soit partagé par l’ensemble des membres du GHT.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. En commission, nous avons souhaité préciser dans le texte que l’accès à la personnalité morale ne peut résulter que d’une volonté conjointe des établissements.
C’est pourquoi nous avons précisé la semaine dernière qu’un décret en conseil d’État précisera « les conditions dans lesquelles un groupement hospitalier de territoire, sur demande conjointe de l’ensemble des établissements parties et accord du directeur général de l’agence régionale de santé, peut être doté de la personnalité morale ».
Le présent amendement vise à prévoir l’accord de l’ensemble des conseils de surveillance, une précision que je considère comme bienvenue. La commission s’était prononcée en faveur de l’amendement, sous réserve d’une rectification, que Mme Le Houerou a bien voulu apporter.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Il est en effet nécessaire que le conseil de surveillance des établissements membres du GHT puisse délibérer sur le fait de doter le groupement d’une personnalité morale.
Avis favorable.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 189, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 9 à 12
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
a) Après le 8°, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« …° Le plan pluriannuel d’investissement ;
« …° L’état des prévisions de recettes et de dépenses ;
« …° Le plan global de financement pluriannuel ;
« …° Le programme d’investissement. » ;
II. – Alinéa 24
Remplacer le mot :
avis
par le mot :
délibération
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Depuis 2009, la gouvernance des hôpitaux repose plus sur le directoire que sur le conseil de surveillance, dont la compétence de surveillance est, au fond, extrêmement réduite.
Ayant présidé le conseil de surveillance de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) durant six ans aux côtés de la maire de Paris, je peux en témoigner : pour redonner de l’intérêt aux conseils de surveillance et réinstaurer une démocratie sanitaire et sociale au sein des groupes hospitaliers universitaires (GHU), il faudrait leur permettre de s’exprimer clairement, et pas seulement par un simple avis sur l’ensemble des textes stratégiques, y compris financiers.
Cet amendement, me dira-t-on, induit un risque de blocage si les textes ne sont pas adoptés ? Tant mieux ! Sans cela, la présentation au conseil de surveillance des textes stratégiques ne revêt aucun enjeu, et écouter son avis n’a pas davantage d’intérêt. Et, au fond, quel conseil prendra vraiment le risque de bloquer son hôpital ?
M. le président. L’amendement n° 237, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 9° Le bilan des actions mises en œuvre par l’établissement pour améliorer l’accès aux soins et la gradation des soins, en lien avec la politique du groupement hospitalier de territoire. » ;
II. – Alinéa 12
Après le mot :
pluriannuel
insérer les mots :
, le plan pluriannuel d’investissement
III. – Alinéa 17
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Cet amendement est identique à l’amendement n° 207, que vous avez examiné en commission et qui a été retiré par erreur. Il vise à rééquilibrer les prérogatives stratégiques du conseil de surveillance, en renforçant son pouvoir délibératif en matière d’accès aux soins. Il tend également à rétablir la délibération du conseil de surveillance sur le bilan des actions mises en œuvre par l’établissement pour améliorer l’accès aux soins et la gradation des soins.
En effet, la régulation d’un sujet aussi central par la simple information serait contraire au positionnement stratégique du conseil de surveillance.
Cet amendement vise également à positionner le programme pluriannuel d’investissement en avis aux côtés des événements relatifs à l’exploitation, afin d’avoir des prérogatives homogènes du conseil de surveillance sur les éléments du pilotage financier et d’éviter tout risque de blocage pour le fonctionnement des hôpitaux publics.
M. le président. L’amendement n° 96 rectifié bis, présenté par M. Milon et Mmes Gruny, Deseyne et Lassarade, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Après le mot :
bilan
insérer les mots :
élaboré conjointement par le directeur et le président de la commission médicale d’établissement,
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Il s’agit d’améliorer l’alinéa 17 de l’article 6. En cohérence avec les textes législatifs et réglementaires issus de la mission Claris, cette précision vise à valoriser le travail mené conjointement par le directeur et le président de la CME pour améliorer l’accès aux soins et la gradation des soins, en lien avec la politique du groupement hospitalier de territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable sur l’amendement n° 189.
En effet, l’article 6 me paraît constituer une avancée pour les compétences et le rôle du conseil de surveillance en matière de contrôle et de pilotage stratégique des établissements de santé. Cependant, vous l’avez vu, la rédaction du texte initial a évolué dès l’Assemblée nationale, le rapporteur ayant bien entendu les alertes concernant les risques de blocage qui apparaîtraient en cas de rejet par le conseil de certains documents budgétaires indispensables à la gestion de l’établissement. Le présent amendement va très loin dans la redéfinition des missions du conseil de surveillance. Mais quid du fonctionnement de l’hôpital en cas de rejet de son état prévisionnel de recettes et de dépenses (EPRD), soit son budget ? Ce cas n’est pas envisagé. Or il y a un risque concret.
Il convient de préserver l’équilibre entre les rôles du conseil de surveillance et du directoire dans la gestion des hôpitaux. Chacun son rôle, chacun ses compétences.
L’amendement n° 237 vise à revenir sur les clarifications introduites par la commission ; je vous l’avoue, je le regrette. Le Gouvernement souhaite renvoyer à un avis, et non à une délibération, le plan pluriannuel d’investissement. Or cette délibération ne me paraissait pas bloquante et renforçait par ailleurs le rôle du conseil de surveillance sur les orientations financières de l’établissement. C’est au demeurant le sentiment qui ressort des auditions que j’ai menées avec les responsables de directions et des présidents de CME. À titre personnel, mais en cohérence avec l’avis que la commission avait émis sur l’amendement n° 207, je suis défavorable à cet amendement.
Enfin, l’amendement n° 96 rectifié bis, comme l’amendement n° 95 rectifié bis, que nous examinerons dans quelques instants, vise à insister sur le rôle du binôme formé par le directeur et le président de CME. La politique de l’établissement en matière d’accès aux soins et de gradation des soins est par nature médicale. La présentation des actions qui y ont trait doit donc être partagée entre les responsables administratifs et médicaux. C’est une demande de la conférence des présidents de CME. J’approuve donc une telle précision, qui met en valeur l’action conjointe du binôme. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Avis défavorable sur l’amendement n° 189. La volonté que vous défendez est en contradiction avec la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), qui a positionné le conseil de surveillance comme une instance stratégique et de contrôle et non comme une instance gestionnaire. De plus, il existe un risque très sérieux de blocage de nature à entraver le bon fonctionnement des hôpitaux publics en cas de vote négatif.
Sur l’amendement n° 96 rectifié bis, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. L’amendement n° 95 rectifié bis, présenté par M. Milon et Mmes Gruny, Deseyne et Lassarade, est ainsi libellé :
1° Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Le contrat de gouvernance élaboré par le directeur et le président de la commission médicale d’établissement. » ;
2° Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 6143-7-3 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Un contrat de gouvernance est élaboré par le directeur et le président de la commission médicale d’établissement. Il associe à la charte de gouvernance mentionnée au III une feuille de route stratégique présentant chaque année les modalités de mise en œuvre du projet d’établissement, incluant notamment le projet de gouvernance et de management participatif, en prenant appui sur leurs responsabilités respectives et partagées. »
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Par cet amendement, nous proposons qu’un contrat de gouvernance soit élaboré par le directeur et le président de CME et présenté devant le conseil de surveillance. Ce contrat vise à consacrer un engagement sur les objectifs partagés de la gouvernance médicale et administrative de l’établissement devant la représentation hospitalière, mais aussi devant des représentants des élus et usagers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Une telle proposition prolonge l’une des recommandations du rapport Claris et va dans le sens d’une gouvernance médico-administrative partagée. Je note qu’elle est également soutenue par la conférence des présidents de CME des centres hospitaliers. Le dispositif proposé accompagne et approfondit la pratique de la charte de gouvernance, qui peine parfois à être mise en œuvre. Je suis favorable à la reconnaissance du rôle conjoint du binôme formé par le directeur et le président de CME, comme je l’indiquais lors de l’examen de l’amendement précédent.
Il s’agit ici de compléter la charte de gouvernance par une feuille de route stratégique coconstruite par le directeur et le président de CME et présentée par le binôme qui en est responsable au conseil de surveillance pour être votée. Cette démarche paraît bienvenue.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Nous partageons le fond et l’objectif à atteindre, puisque, lors de ses vœux aux soignants le 6 janvier dernier, le Président de la République a invité à favoriser ce travail conjoint entre le président de CME et le directeur d’hôpital.
Cependant, ce qui est envisagé dans l’amendement va plus loin que la charte, en visant à instaurer un contrat de gouvernance. Les travaux sur ce point sont en cours, avec toutes les parties prenantes : une telle proposition me paraît donc prématurée.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 142, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 15
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Sur la base de ces observations, le directeur général de l’agence régionale de santé décline, le cas échéant, les moyens supplémentaires nécessaires pour améliorer significativement l’état de santé de la population ainsi que l’offre de soins du territoire.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. L’article 6 prévoit que le directeur général de l’ARS présente au moins une fois par an au conseil de surveillance des observations sur l’état de santé de la population et l’offre de soins du territoire dans lequel évolue l’établissement de santé publique.
La commission des affaires sociales a supprimé les dispositions précisant que le CTS élabore le projet territorial de santé et a ajouté que le directeur de l’ARS présente des observations sur l’état de santé de la population et sur la situation de l’offre de soins, notamment concernant l’organisation de la permanence des soins.
Notre amendement vise à préciser que ces observations s’accompagnent de propositions de moyens supplémentaires pour atteindre des objectifs d’amélioration de l’état de santé de la population et de l’offre de soins. Il s’agit, en quelque sorte, de sortir de la logique de cadrage des dépenses pour redonner un peu d’oxygène aux établissements de santé, qui subissent des enveloppes fermées et des objectifs toujours plus hauts.
Cet amendement fait écho à ce que l’Assemblée nationale vient de décider en refusant l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), ce qui témoigne, je le crois, d’un très grand malaise dans le secteur hospitalier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le complément qu’il est proposé d’apporter me paraît d’une portée limitée : ce débat ne manquera pas d’avoir lieu sur le fondement de la présentation de l’état de santé de la population et de l’offre de soins disponible. Comment imaginer que le conseil de surveillance ne confronte pas les données présentées et n’interroge pas le directeur général de l’ARS ?
Par ailleurs, je pense qu’il faut éviter les lois un peu trop bavardes. L’offre de soins évoquée renvoie à la fois à l’offre disponible et à l’offre souhaitable : lorsque l’on parle de lits d’hôpitaux, c’est à la fois le capacitaire théorique, réel, et le besoin estimé qui sont étudiés.
Je pense que cet amendement n’apporte rien de plus au débat. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Je comprends l’intérêt d’un tel complément, mais, dans les faits, l’amendement est satisfait : les ARS siègent dans les conseils de surveillance, et tous les membres peuvent discuter ouvertement avec les représentants de celles-ci. Évitons les lois bavardes : l’intérêt est réel, mais cela se pratique déjà à chaque conseil de surveillance ; je peux en témoigner, car j’y siège régulièrement.
Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 6, modifié.
(L’article 6 est adopté.)
Article 6 bis A
(Supprimé)
Article 6 bis B
L’article L. 6143-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Le septième alinéa est ainsi rédigé :
« Peuvent participer aux réunions du conseil de surveillance, avec voix consultative, les députés élus dans les circonscriptions où sont situés les établissements de l’établissement public de santé ainsi que les sénateurs élus dans le département où est situé le siège de l’établissement principal de l’établissement public de santé. » ;
3° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Par dérogation au I, la composition du conseil de surveillance des établissements publics de santé nationaux est fixée par voie réglementaire. Elle comprend, avec voix délibérative, une représentation de l’Assemblée nationale et du Sénat désignée par chaque assemblée. » – (Adopté.)
Article 6 ter
Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, sont validés l’inscription sur la liste d’aptitude et les titularisations, au 1er janvier 2021, des trente-neuf élèves-directeurs ayant suivi la formation initiale dispensée après l’admission au concours ouvert au titre de l’année 2018 pour le recrutement des directeurs d’établissements sanitaires, sociaux, et médico-sociaux ainsi que les certificats d’aptitude aux fonctions de directeur d’établissement ou de service d’intervention sociale délivrés aux intéressés, en tant que leur légalité serait remise en cause sur le fondement de la méconnaissance par le jury du concours externe d’accès au cycle de formation des élèves-directeurs d’établissements sanitaires, sociaux, et médico-sociaux ouvert au titre de l’année 2018 de l’article 7 de l’arrêté du 26 décembre 2007 relatif au programme et aux modalités des concours d’admission au cycle de formation des élèves-directeurs d’établissements sanitaires, sociaux, et médico-sociaux, de l’irrégularité de la délibération du 28 novembre 2018 du jury susmentionné fixant la liste des candidats admis au concours externe de directeur d’établissements sanitaires, sociaux, et médico-sociaux ou de celle de l’arrêté du 11 février 2019 établissant la liste des élèves-directeurs et élèves-directrices d’établissements sanitaires, sociaux, et médico-sociaux à l’École des hautes études en santé publique à compter du 1er janvier 2019.
M. le président. L’amendement n° 66, présenté par M. Jomier, Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Il s’agit d’un amendement de suppression : nous considérons que l’article 6 ter n’a aucun lien avec le texte.
Cependant, si Mme la rapporteure ou le Gouvernement parviennent à nous convaincre du contraire et nous démontrent que cet article, dont l’objet est de valider rétroactivement les résultats d’un concours pour l’accès au corps des directeurs d’établissements sanitaires sociaux et médico-sociaux, a un rapport avec la question de l’accès aux soins et de l’engagement territorial des professionnels, nous retirerons volontiers notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. D’une part, cet article n’a pas été considéré comme un cavalier législatif. D’autre part, une validation législative rapide est la seule mesure qui permette de sécuriser la situation professionnelle des trente-neuf lauréats du concours externe de directeur d’établissement sanitaire, social et médico-social de 2019.
Ceux-ci sont menacés par des recours relatifs à une irrégularité sur leur concours dont ils ne sont en rien responsables et qui pourraient les conduire à devoir renoncer à l’exercice du métier qu’ils pratiquent désormais depuis trois ans. Le principe de sécurité juridique, de même que l’intérêt général nous appellent à protéger leur situation professionnelle.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Avis défavorable.
Pour rappel, la présente proposition loi a pour objet d’améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels. Or les personnes concernées sont chargées de la direction des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Dans le cadre de leurs fonctions, ces directeurs participent ainsi pleinement à l’échelon territorial le plus fin à l’organisation de l’accès aux soins en faveur des populations fragiles accueillies dans ces structures.
Supprimer cet article reviendrait à ne pas pouvoir empêcher l’annulation de la nomination des trente-neuf directeurs concernés. Cela désorganiserait autant d’établissements, ce qui ne serait pas sans incidence sur la bonne prise en charge des populations qui y sont accueillies. Dans un contexte d’importantes difficultés en matière de recrutement des directeurs d’établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, cette désorganisation serait nécessairement durable, là encore – je le répète – au détriment de la prise en charge de ces populations fragiles et de leur accès aux soins. J’espère vous avoir convaincus. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je remercie Mme la rapporteure et Mme la ministre de leurs explications, qu’elles ne qualifieront pas elles-mêmes d’extrêmement convaincantes. (Nouveaux sourires.)
On comprend évidemment le problème que cet article vise à corriger. Je rappelle tout de même au Gouvernement qu’il dispose de l’outil que constituent les projets de loi « portant diverses dispositions », d’ordre social par exemple, pour régler ce genre de cas.
Or, ici, vous usez d’un faux nez et vous glissez une disposition gouvernementale dans un texte d’origine parlementaire. Toutefois, comme nous sommes de bonne composition, nous retirons notre amendement.
M. le président. L’amendement n° 66 est retiré.
Je mets aux voix l’article 6 ter.
(L’article 6 ter est adopté.)
Article 7
I. – La section 5 bis du chapitre III du titre Ier du livre III du code de l’action sociale et des familles est complétée par un article L. 313-23-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 313-23-4. – Les établissements et services relevant des 1°, 4°, 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 ne peuvent avoir recours, dans le cadre des contrats de mise à disposition qu’ils concluent avec des entreprises de travail temporaire, à des médecins, des infirmiers, des aides-soignants, des éducateurs spécialisés, des assistants de service social, des moniteurs-éducateurs et des accompagnants éducatifs et sociaux qu’à la condition que ceux-ci aient exercé leur activité dans un cadre autre qu’un contrat de mission conclu avec une de ces entreprises de travail temporaire pendant une durée minimale au cours des douze derniers mois. Cette durée est appréciée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État qui tiennent compte des conditions préalables d’exercice de son activité par le professionnel.
« À titre dérogatoire, l’interdiction établie au premier alinéa du présent article ne s’applique pas aux contrats de mise à disposition de personnels dotés du statut d’étudiant en santé conclus avec des entreprises de travail temporaire établies en France ou à l’étranger.
« Les entreprises de travail temporaires mentionnées au même premier alinéa vérifient le respect de la condition fixée audit premier alinéa et en attestent auprès des établissements et services médico-sociaux au plus tard lors de la signature du contrat de mise à disposition. Les modalités d’application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Un décret en Conseil d’État prévoit les sanctions applicables en cas de manquement constaté à l’interdiction prévue au présent article. »
II. – Le chapitre V du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique est ainsi rétabli :
« CHAPITRE V
« Mise à disposition temporaire de professionnels de santé auprès des établissements de santé
« Art. L. 6115-1 A (nouveau). – En vue de garantir la continuité des soins à l’échelle du territoire, les établissements de santé signalent à l’agence régionale de santé tout risque identifié concernant leur capacité à assurer l’intégralité de leur activité programmée et remplir leurs obligations de permanence des soins. Ils indiquent les effectifs médicaux et paramédicaux susceptibles de permettre le maintien de ces activités.
« Art. L. 6115-1. – Les établissements de santé et les laboratoires de biologie médicale ne peuvent avoir recours, dans le cadre des contrats de mise à disposition qu’ils concluent avec des entreprises de travail temporaire, à des médecins, des chirurgiens-dentistes, des pharmaciens, des sages-femmes ou des professionnels de santé relevant du livre III de la quatrième partie qu’à la condition que ceux-ci aient exercé leur activité dans un cadre autre qu’un contrat de mission conclu avec une de ces entreprises de travail temporaire pendant une durée minimale au cours des douze derniers mois. Cette durée est appréciée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État qui tiennent compte des conditions préalables d’exercice de son activité par le professionnel.
« À titre dérogatoire, l’interdiction établie au premier alinéa du présent article ne s’applique pas aux contrats de mise à disposition de personnels dotés du statut d’étudiant en santé conclus avec des entreprises de travail temporaire établies en France ou à l’étranger.
« Les entreprises de travail temporaires mentionnées au même premier alinéa vérifient le respect de la condition fixée audit alinéa et en attestent auprès des établissements de santé et des laboratoires de biologie médicale au plus tard lors de la signature du contrat de mise à disposition. Les modalités d’application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Un décret en Conseil d’État prévoit les sanctions applicables en cas de manquement constaté à l’interdiction prévue au présent article. »
III. – (Non modifié) Les I et II du présent article s’appliquent aux contrats de mise à disposition conclus en application de l’article L. 1251-42 du code du travail à compter du premier jour du quatrième mois suivant la promulgation de la présente loi.
M. le président. L’amendement n° 20 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 60 rectifié, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, MM. Jomier et Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat, M. Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – La section 5 bis du chapitre III du titre Ier du livre III du code de l’action sociale et des familles est complétée par un article L. 313-23-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 313-23-4. – Les établissements et services relevant des 1°, 4° , 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 peuvent avoir recours, dans le cadre des contrats de mise à disposition qu’ils concluent avec des entreprises de travail temporaire, à des médecins, des infirmiers, des aides-soignants, des éducateurs spécialisés, des assistants de service social, des moniteurs-éducateurs et des accompagnants éducatifs et sociaux à condition que les contrats de missions conclus avec une de ces entreprises de travail temporaire soient limités à un nombre de jours par an déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« À titre dérogatoire, l’interdiction établie au premier alinéa du présent article ne s’applique pas aux contrats de mise à disposition de personnels dotés du statut d’étudiant en santé conclus avec des entreprises de travail temporaire établies en France ou à l’étranger.
« Les entreprises de travail temporaires mentionnées au même premier alinéa vérifient le respect de la condition fixée audit premier alinéa et en attestent auprès des établissements et services médico-sociaux au plus tard lors de la signature du contrat de mise à disposition. Les modalités d’application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Ce décret prévoit les sanctions applicables en cas de manquement constaté à l’interdiction prévue au présent article. »
II. – Le chapitre V du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique est ainsi rétabli :
« CHAPITRE V
« Mise à disposition temporaire de professionnels de santé auprès des établissements de santé
« Art. L. 6115-1. – Les établissements de santé et les laboratoires de biologie médicale ne peuvent avoir recours, dans le cadre des contrats de mise à disposition qu’ils concluent avec des entreprises de travail temporaire, à des médecins, des chirurgiens-dentistes, des pharmaciens, des sages-femmes ou des professionnels de santé relevant du livre III de la quatrième partie à condition que les contrats de missions conclus avec une de ces entreprises de travail temporaire soient limités à un nombre de jours par an déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Les entreprises de travail temporaires mentionnées au premier alinéa vérifient le respect de la condition fixée au même premier alinéa et en attestent auprès des établissements de santé et des laboratoires de biologie médicale au plus tard lors de la signature du contrat de mise à disposition. Les modalités d’application du présent alinéa sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Ce décret prévoit les sanctions applicables en cas de manquement constaté à l’interdiction prévue au présent article. »
III. – Les I et II du présent article s’appliquent aux contrats de mise à disposition conclus en application de l’article L. 1251-42 du code du travail à compter du premier jour du quatrième mois suivant la promulgation de la présente loi.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Face à la pénurie de médecins que connaît la France, le recours à l’intérim par les établissements de santé et les établissements médico-sociaux a connu ces dernières années une croissance exponentielle.
Le recours à l’intérim a un impact financier majeur sur les budgets des établissements de santé et entraîne une déstabilisation des services hospitaliers et des équipes médicales et soignantes, susceptible de nuire à la qualité des soins.
Les dispositions de la loi Rist du 26 avril 2021 visant à lutter contre les dérives de l’intérim permettent notamment de bloquer les rémunérations, qui sont parfois indécentes, quand elles dépassent un plafond réglementaire ; ce dernier a été abaissé et mis en place au printemps dernier.
Néanmoins, il nous apparaît complémentaire de limiter l’exercice de l’intérim médical à un nombre de jours par an pour tous les professionnels, qu’ils soient médicaux ou paramédicaux.
Face au phénomène de « mercenariat médical » – je ne sais pas comment l’appeler autrement –, il est important de remettre l’éthique au cœur du fonctionnement des services hospitaliers et de valoriser les personnels qui s’impliquent durablement au sein des services.
Notre proposition vise donc les contrats d’intérim au sens strict du terme, c’est-à-dire ceux qui sont conclus par des agences d’intérim, et non l’ensemble des contrats courts ou des contrats de gré à gré conclus pour un remplacement. En effet, il nous semble que les agences d’intérim jouent un rôle délétère et qu’elles n’ont pas d’autre objectif que de faire du profit. Nous souhaitons lutter contre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Si je partage l’intention des auteurs de cet amendement, j’émets néanmoins un avis défavorable, car la demande est pleinement satisfaite par la rédaction de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Nous nous intéressons de près à la question de l’intérim dans les établissements publics hospitaliers, mais le problème, ce sont les établissements privés. N’étant soumis à aucune règle, ils attirent à eux tous les intérimaires du public.
J’ai demandé à la FHF Provence-Alpes-Côte d’Azur de réfléchir à une solution à ce problème, mais il n’y en a aucune, s’agissant d’un secteur privé et libéral.
Cet amendement est important, mais il entraînera très probablement un départ encore un peu plus massif des intérimaires vers le secteur privé.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 208, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
1° Après la référence :
1°,
insérer la référence :
2°,
2° Remplacer les mots :
au cours des douze derniers mois. Cette durée est appréciée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État qui tiennent compte des conditions préalables d’exercice de son activité par le professionnel.
par les mots :
appréciée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
II. – Alinéa 10
Remplacer les mots :
au cours des douze derniers mois. Cette durée est appréciée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État qui tiennent compte des conditions préalables d’exercice de son activité par le professionnel.
par les mots :
appréciée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Cet amendement vise à interdire l’intérim en début de carrière aux professionnels médicaux et paramédicaux.
L’intérim peut être nécessaire au fonctionnement de l’hôpital, mais il ne doit pas devenir la seule et unique pratique, notamment des jeunes professionnels. En interdisant l’intérim en début de carrière, nous entendons ne pas laisser se développer une culture de l’intérim dans l’exercice quotidien de la médecine.
Il s’agit d’une demande forte des professionnels de santé qui exercent dans les hôpitaux. Ils disent très clairement qu’il n’est pas facile de mener à bien des projets au sein d’un service avec des jeunes dont la seule vocation est de faire de l’intérim.
L’intérim peut être une réponse à certains moments, mais cela ne doit pas être la seule pratique dans les hôpitaux. Nous ne souhaitons pas qu’il se développe pour que les professionnels de santé puissent retrouver du sens à exercer leur métier.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 12 rectifié est présenté par Mmes Guidez et Antoine, M. J.M. Arnaud, Mme Billon, MM. Bleunven, Burgoa, Cadec, Canévet, Capo-Canellas, Chatillon, Chevalier, Cigolotti et Courtial, Mme L. Darcos, M. Delahaye, Mme de La Provôté, MM. Duffourg et Fouassin, Mme Gatel, MM. Guérini, Gremillet, Guerriau et Henno, Mmes Herzog, Jacques et Josende, M. Laugier, Mme Lermytte, MM. H. Leroy et Longeot, Mme Lopez, MM. P. Martin et Panunzi, Mmes Phinera-Horth, O. Richard, Romagny, Saint-Pé et Sollogoub et M. Wattebled.
L’amendement n° 67 est présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, M. P. Joly, Mme Narassiguin, M. Ziane, Mme Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Après la référence :
1°,
insérer la référence :
2°,
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié.
Mme Jocelyne Guidez. Le recours à l’intérim dans les établissements de santé, les établissements sociaux et médico-sociaux, publics et privés, n’a cessé de croître au cours des deux dernières décennies. Il a plus que doublé de 2000 à 2021 dans les établissements de santé et a été multiplié par dix dans les établissements du secteur social et médico-social.
L’objet du présent amendement est d’étendre le périmètre de cet article au champ des établissements accompagnant des enfants en situation de handicap ; ils connaissent les mêmes difficultés que le secteur médico-social. Une telle mesure est attendue par les acteurs du secteur.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 67.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à étendre le périmètre de la régulation de l’intérim au champ des établissements qui accompagnent des enfants en situation de handicap, ces établissements connaissant les mêmes difficultés que le secteur médico-social.
Une telle modification est très attendue par les acteurs du secteur. Des directeurs de ce type d’établissements m’ont sollicitée à plusieurs reprises, car ils n’arrivent plus à trouver des infirmières et des aides-soignantes. Les tarifs prohibitifs des intérimaires grèvent très lourdement leurs budgets.
Entre 2000 et 2021, le recours à l’intérim a doublé dans les établissements de santé en général, mais il a été multiplié par dix dans les établissements du secteur social et médico-social.
Madame la ministre, nous non plus ne voulons pas que les jeunes n’exercent qu’en intérim, mais le fait de cibler les jeunes paraît discriminatoire. Plusieurs mesures semblent les viser spécifiquement, ce qui est un peu gênant, alors qu’ils ne sont en rien responsables de la situation de pénurie dans laquelle nous nous trouvons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’un des volets de l’amendement n° 208 porte sur la question de l’extension de la mesure aux établissements médico-sociaux d’enseignement, qui est traitée par les amendements nos 12 rectifié et 67 de Mmes Guidez et Poumirol ; j’y reviendrai.
Pour le reste, l’amendement du Gouvernement vise à revenir sur les dispositions adoptées la semaine passée, à savoir le plafonnement de l’intérim tout au long de la carrière. La commission n’interdit pas l’intérim en contrat de mise à disposition tout au long de la carrière ; elle le plafonne. C’est, me semble-t-il, une intention que vous pouvez partager, madame la ministre. Il s’agit de lutter contre le mercenariat. Pour cela, il faut interdire l’exercice exclusivement sous forme de mise à disposition. La commission est donc défavorable à cet amendement.
En revanche, la commission émet un avis favorable sur les amendements identiques nos 12 rectifié et 67. Il apparaît utile que la mesure d’encadrement de l’intérim vise un ensemble cohérent d’établissements médico-sociaux dans lesquels elle a vocation à s’appliquer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 12 rectifié et 67 ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Réguler l’intérim tout au long de la carrière n’est pas incompatible avec le souhait de ne pas développer la culture de l’intérim.
Je le répète, l’amendement du Gouvernement vise à interdire l’intérim en début de carrière. Il ne cible pas les jeunes. Simplement, il se trouve qu’on est plus jeune en début qu’en milieu de carrière.
Aujourd’hui, les jeunes souhaitent commencer par de l’intérim et ne font ensuite que de l’intérim. On voit bien le danger pour l’hôpital de ne disposer que de professionnels travaillant de façon intérimaire. Notre amendement vise donc à ne pas laisser s’installer la culture de l’intérim dès leur formation, en tout cas en début de parcours. Ce n’est pas incompatible avec ce que vous défendez, madame la rapporteure.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements identiques nos 12 rectifié et 67.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Ce débat est fondamental. Il est difficile pour les jeunes, à la fin de leurs études, de choisir un endroit où enseigner de façon stable. Il s’agit là d’une évolution culturelle, madame la ministre. Lutter contre cette évolution finit par apparaître comme une mesure anti-jeunes.
On ne reproche pas à un jeune médecin libéral de faire des remplacements avant de décider où se fixer et s’installer. On estime que cette pratique est normale. Évidemment, si tous les médecins ne faisaient que des remplacements tout au long de leur vie professionnelle, ce serait compliqué ; plus personne ne s’installerait.
Cela étant, pourquoi refuserait-on la possibilité de faire de l’intérim à une infirmière ayant achevé ses études et ne souhaitant pas occuper immédiatement un poste fixe à l’hôpital ?
Il existe une autre solution : celle qu’a proposée Émilienne Poumirol. Pourquoi ne pas prévoir, y compris pour les jeunes, un nombre limité de jours d’intérim, qui serait fixé par décret ? Une fois le crédit épuisé, il ne serait plus possible de faire de l’intérim.
Les organisations de jeunes ont appelé à la suppression du dispositif que vous proposez, madame la ministre, parce qu’elles ont bien compris que les jeunes étaient visés,…
M. Bernard Jomier. … comme le confirment vos propos. Vous indiquez ne pas vouloir que les jeunes entrent dans la vie professionnelle par l’intérim. Je vous dis qu’il faut respecter ce temps-là. Nous sommes en désaccord avec votre position.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Nous avons évidemment étudié avec attention la proposition que vous évoquez, mais il est techniquement impossible de contrôler le nombre de jours d’intérim effectués tout au long d’une carrière ; vous le savez très bien. Nous aurions aimé pouvoir retenir une telle solution, mais ce n’est pas possible.
La mesure que nous proposons n’est pas anti-jeunes ou anti-intérim. Un médecin qui effectue un remplacement travaille seul ; un intérimaire à l’hôpital travaille en équipe. Lorsque les équipes changent continuellement, il est difficile pour elles d’avoir des projets à l’échelle d’un service et de donner du sens à leur travail.
Notre amendement vise à répondre à une demande des professionnels en exercice, y compris des infirmières. Il est difficile pour les infirmières qui travaillent dans un service depuis quinze ans et qui changent continuellement de collègues de construire un projet d’équipe à l’échelle de leur service. Nous voulons pallier le manque de sens et d’attractivité de ces professions.
Je suis intimement persuadée que l’intérim n’est pas une manière d’exercer dans la durée. À un moment, on a envie de se poser, de s’installer. Notre amendement n’est donc pas une mesure anti-jeunes. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit !
L’intérim ne doit pas devenir le mode d’exercice par défaut. Pour conserver un travail en équipe, pour redonner du sens à l’échelle d’un service, on ne peut pas avoir des professionnels qui changent tous les jours ; ce n’est pas possible. Nous souhaitons préserver l’unité du service ; nous ne disons rien d’autre.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, ces amendements me posent problème. Je me demande s’ils ne seront pas contre-productifs. On l’a vu, l’intérim est possible dans le secteur privé, mais pas dans le secteur public.
Je ne sais pas si la proposition du Gouvernement constitue ou non une mesure anti-jeunes, mais elle pourrait bien devenir une mesure anti-secteur public ! Si l’on interdit l’intérim dans le secteur public aux jeunes en début de carrière pour ne pas leur donner l’habitude d’en faire, ils en feront dans le privé. Qu’est-ce que cela va changer ?
M. Bernard Jomier. Voilà !
Mme Véronique Guillotin. Je n’ai pas de position dogmatique sur ce sujet : je me demande juste si la mesure sera efficace ou contre-productive. Notre groupe s’abstiendra sur cet amendement.
Il serait bon de faire un bilan de la mesure, à l’issue d’une période d’un an ou deux, afin de savoir si elle a un impact positif sur l’intérim à l’hôpital public.
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin, pour explication de vote.
Mme Béatrice Gosselin. Que l’on soit jeune ou moins jeune, faire de l’intérim, c’est prendre le risque de déséquilibrer une équipe. Ce n’est confortable pour personne. La difficulté est la même dans le privé et dans le public. Je ne vois pas trop où est le problème.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 12 rectifié et 67.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 223, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Capacité des établissements à assurer leur activité au regard du nombre de professionnels de santé disponibles
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Nous sommes défavorables à cet amendement, qui n’est pas à proprement parler seulement « rédactionnel ».
Vous proposez de remplacer le titre « Mise à disposition temporaire de professionnels de santé auprès des établissements de santé » par « « Capacité des établissements à assurer leur activité au regard du nombre de professionnels de santé disponibles ». Ce titre ne l’emporte pas sur les alinéas suivants, qui traitent exclusivement des questions de mise à disposition temporaire des professionnels de santé auprès des établissements de santé. De plus, et vous en conviendrez, ce titre ne saurait résumer à lui seul la capacité des établissements à assurer leur activité. Je propose de conserver la formulation actuelle de l’alinéa 8.
M. le président. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Article 8
L’article L. 6161-3 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) À la deuxième phrase, après le mot : « santé », sont insérés les mots : « ainsi qu’aux services d’inspection et de contrôle dans le cadre de leurs contrôles, » ;
c) La dernière phrase est complétée par les mots : « ainsi qu’aux services d’inspection et de contrôle désignés par décret, dans le cadre d’un contrôle de gestion et des comptes qu’ils peuvent exercer sur ces établissements » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le premier alinéa est applicable, dans les mêmes conditions, à tout organisme, toute société ou tout groupe disposant d’un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion dans un établissement de santé privé ou d’un pouvoir de contrôle de celui-ci, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, ainsi qu’aux structures satellites qui entretiennent des liens juridiques et financiers avec cet établissement, notamment les sociétés civiles immobilières. »
M. le président. L’amendement n° 143, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
a) À la première phrase, après le mot : « privés », sont insérés les mots : « et établissements et services médico-sociaux » ;
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 8 prévoit la transmission des comptes certifiés des établissements de santé privés et des groupes les détenant aux juridictions financières et aux inspections générales.
La nécessité de renforcer les contrôles des cliniques privées et des groupes pouvant les détenir était apparue lors des auditions que la commission des affaires sociales a réalisées dans le cadre de ses travaux sur le contrôle des Ehpad.
L’affaire Orpea a démontré la dérive des Ehpad privés à but lucratif, les sociétés satellites et les sociétés mères tissant des liens tellement complexes qu’il est impossible pour les personnes chargées d’effectuer des contrôles de mener à bien leur mission.
Depuis le scandale Orpea, les contrôles des groupes privés exerçant dans le domaine sanitaire et social et bénéficiant de fonds publics ont été largement renforcés.
Notre amendement vise à préciser que les dispositions de l’article 8 s’appliquent également aux établissements et services médico-sociaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Selon moi, cet amendement est satisfait par le droit existant ; je vous renvoie aux articles L. 314-7 et suivants du code de l’action sociale et des familles. J’en demande donc le retrait ; faute de quoi l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Apourceau-Poly, l’amendement n° 143 est-il maintenu ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 143 est retiré.
L’amendement n° 175, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la dernière phrase, après le mot : « contrôle », sont insérés les mots : « , telle que la déclaration des liens d’intérêts mentionnée à l’article L. 1451-1 du présent code, » ;
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à renforcer le contrôle juridique et financier des établissements de santé privés. Il tend à prévoir la fourniture par ces établissements de la déclaration des liens d’intérêt, afin de prévenir les maltraitances, les fraudes et détournements de fonds publics.
Nous nous souvenons toutes et tous du scandale Orpea, ce gestionnaire d’Ehpad qui a réalisé 20 millions d’euros d’économies grâce à l’instauration d’une maltraitance. Les contrôles doivent être encore renforcés.
La proposition de loi permet de faire un grand pas en ce sens en étendant aux établissements de santé les dispositions prévues dans la loi de finances pour 2023.
Les établissements de santé ne devraient pas être à but lucratif. Il faut prévenir tout conflit d’intérêts en lien avec la gestion de ces établissements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il ne semble pas opportun de prévoir la liste des documents ayant vocation à être mis à disposition, au risque in fine d’être limitatif et de réduire en réalité les pouvoirs de contrôle des juridictions financières et des corps d’inspection. Soyons efficaces et pragmatiques.
Selon moi, les pouvoirs des juridictions financières et des corps d’inspection, clarifiés et renforcés aux articles 8, 8 bis et par l’amendement de la commission, couvrent le besoin de contrôle des établissements.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Madame la sénatrice, je comprends que vous partagez notre objectif de renforcer le contrôle des établissements de santé privés à but lucratif.
Votre proposition est intéressante, mais elle mérite d’être expertisée. Il m’apparaît prématuré d’inscrire une telle obligation dans les textes avant un examen plus approfondi du sujet, les dirigeants des établissements de santé privés ne figurant pas aujourd’hui dans le champ de ceux qui doivent obligatoirement fournir une déclaration publique d’intérêt (DPI).
Sur le fond, nous cherchons à atteindre le même objectif. L’article 8, tel qu’il vous est soumis, renforce déjà considérablement les pouvoirs de contrôle sur ces structures.
Au bénéfice de ces explications, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Pour notre part, nous soutiendrons cet amendement, comme nous aurions soutenu celui du groupe CRCE-K s’il avait été maintenu, parce qu’il nous semble particulièrement important d’envoyer des signaux forts à l’ensemble des groupes et des fonds de pension qui ont racheté ces dernières années l’ensemble, ou quasiment l’ensemble des cliniques privées de notre territoire.
Chacun se souvient du rapport d’information de Bernard Bonne et de Michèle Meunier sur Orpea, mais nous connaissons d’autres dérives du même genre. La logique des groupes et des fonds de pension qui gèrent les cliniques privées repose sur la marchandisation de la santé, contre laquelle il nous faut lutter.
Je rappelle que sur le site internet de Ramsay Santé, il est question de « clients » et non de « patients ». Cette dérive est un grand danger. Aussi, il nous semble fondamental de lutter contre cette dérive marchande et de contrôler au maximum ces cliniques privées.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je soutiendrai évidemment cet amendement.
Je n’ai pas parfaitement compris l’argument de Mme la rapporteure. Il n’y a pas de raison de limiter le nombre de documents susceptibles d’être demandés. Établir une liste n’aurait donc pas d’effet limitatif, la déclaration des liens d’intérêts étant l’un des documents qui peuvent être demandés.
Madame la ministre, si nous voulons atteindre notre objectif, il faut s’en donner les moyens et faire savoir que le Gouvernement, sous l’impulsion des parlementaires, mettra en place un certain nombre de contrôles.
M. le président. L’amendement n° 219 rectifié ter, présenté par Mmes Petrus, Jacques, Malet, Phinera-Horth et Tetuanui, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1442-5 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La mission de permanence des soins mentionnée à l’article L. 6314-1 commune à la Guadeloupe, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin peut comporter un volet particulier à ces collectivités. »
La parole est à Mme Annick Petrus.
Mme Annick Petrus. Cet amendement tend à prévoir la modification des dispositions relatives à l’outre-mer du code de la santé publique.
La permanence des soins est un dispositif de prise en charge des demandes de soins non programmées par les médecins généralistes aux horaires de fermeture des cabinets libéraux, c’est-à-dire le soir, la nuit, le week-end et les jours fériés. Elle n’est pas mise en place à Saint-Martin, ce qui n’est pas du tout acceptable.
Ce dispositif est organisé par les agences régionales de santé avec l’aide des comités départementaux de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires (Codamups-ts).
Un cahier des charges régional de la permanence des soins, arrêté par le directeur général de l’ARS, porte les principes d’organisation et de rémunération de cette permanence sur le territoire régional.
Les territoires de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, bien qu’ils soient devenus des collectivités d’outre-mer en 2007, sont restés rattachés à la Guadeloupe pour les questions de santé publique et donc à l’agence régionale de santé de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy. L’agence de santé, dont le siège est en Guadeloupe, dispose d’une délégation territoriale pour ces deux îles.
Saint-Martin connaît des difficultés dans l’organisation de l’aide médicale d’urgence liées à son éloignement géographique. Il est donc essentiel d’y remédier.
Certes, une liste de médecins volontaires pour assurer les gardes est effective, mais la création d’une sous-commission locale de l’aide médicale d’urgence et de la permanence des soins n’a jamais abouti.
La création de cette structure sur le territoire de Saint-Martin permettra de mieux coordonner les propositions et les actions locales.
Cet amendement vise donc à améliorer les délais de réponse pour garantir la sécurité des soins dans les îles du Nord par la création d’un Codamups-ts spécifique. Son adoption permettrait de répondre à un besoin des Saint-Martinois. Surtout, la solution proposée permettrait d’éviter d’avoir à se rendre aux urgences du centre hospitalier Louis-Constant Fleming le soir, le week-end et les jours fériés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je comprends la préoccupation de notre collègue de Saint-Martin concernant la bonne prise en compte des spécificités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy dans l’organisation de la permanence des soins.
Cette proposition accompagne les conclusions du comité interministériel sur les outre-mer. Je vous propose donc de soutenir l’initiative de nos collègues de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
La solution ne consiste sans doute pas seulement à créer un Codamups-ts spécifique. Il faut aussi prévoir des dérogations au droit et des adaptations concrètes aux réalités des territoires.
Des sujets concrets ont déjà été évoqués au mois d’avril lors de la discussion d’une proposition de loi organique. Le Gouvernement est attendu sur ces sujets.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Madame la sénatrice, vous le savez, lors du comité interministériel sur les outre-mer qui s’est tenu en juillet dernier, le Gouvernement s’est engagé – c’est sa proposition n° 52 – à faire évoluer le cadre juridique applicable à l’ARS Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Votre proposition maintient le caractère commun à la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy de la mission de permanence des soins tout en prévoyant la possibilité d’une déclinaison particulière pour tenir compte des spécificités territoriales. Nous sommes donc favorables à votre amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 8.
Article 8 bis
(Non modifié)
L’article L. 6116-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Sont également soumises à ce contrôle :
« 1° Les personnes morales gestionnaires de ces établissements, pour leurs activités consacrées à cette gestion ;
« 2° Les personnes morales qui exercent, directement ou indirectement, le contrôle exclusif ou conjoint des personnes mentionnées au 1° du présent article ;
« 3° Les autres personnes morales qui sont contrôlées par les personnes mentionnées au même 1° et qui concourent à la gestion des établissements mentionnés au premier alinéa ou leur fournissent des biens et des services, pour leurs activités consacrées à cette gestion. » ;
2° Au second alinéa, les mots : « de ces contrôles » sont remplacés par les mots : « des contrôles prévus au présent article ». – (Adopté.)
Après l’article 8 bis
M. le président. L’amendement n° 210, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l’article L. 6151-3 du code de la santé publique, il est inséré l’article L. 6151-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 6151-4. – Les personnels enseignants et hospitaliers titulaires et stagiaires mentionnés à l’article L. 952-21 du code de l’éducation sont affiliés pour la partie hospitalière de leur activité au régime de retraite complémentaire prévu à l’article L. 921-2-1 du code de la sécurité sociale. »
II. - Le deuxième alinéa du I de l’article 76 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa, sont exclus de cette assiette :
« 1° La participation d’un employeur public au financement d’un contrat collectif de protection sociale complémentaire auquel la souscription des agents est rendue obligatoire en application d’un accord prévu à l’article L. 827-2 du code général de la fonction publique ou de l’arrêté mentionné au II de l’article L. 4123-3 du code de la défense ;
« 2° Les éléments de rémunération perçus par les personnels enseignants et hospitaliers titulaires mentionnés à l’article L. 952-21 du code de l’éducation au titre de leur activité hospitalière. ».
III. - L’article 112 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 est abrogé.
IV. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur à compter du 1er septembre 2024.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Cet amendement vise à permettre aux personnels hospitalo-universitaires de cotiser pour leur retraite sur la totalité de leur rémunération.
En effet, ces agents, qui bénéficient à la fois d’une rémunération versée au titre de leur activité d’enseignement et de recherche et d’une rémunération versée au titre de leur activité hospitalière, ne cotisent jusqu’à présent pour leur retraite qu’au titre de leur seule activité universitaire.
La mise en place d’une cotisation au régime de l’institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (Ircantec) sur leurs émoluments hospitaliers permettra de corriger cette anomalie et de leur assurer un taux de remplacement similaire à celui des praticiens hospitaliers.
Cette évolution, préconisée dans le rapport remis par la professeure Catherine Uzan, apparaît indispensable pour maintenir l’attractivité des métiers hospitalo-universitaires. C’est la reconnaissance d’une juste retraite pour des personnels engagés au quotidien dans une triple mission d’enseignement, de recherche et de soins. C’est une mesure d’attractivité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission partage le souci de valoriser les carrières hospitalières. Le présent amendement vise à corriger une inégalité : à salaire égal, les droits à pension des praticiens hospitalo-universitaires sont inférieurs à ceux des praticiens hospitaliers.
La commission a émis un avis favorable sur cet amendement sous réserve d’une modification. En effet, l’amendement tend à prévoir l’affiliation à un régime de retraite. Il convient donc de prévoir l’inscription des dispositions codifiées au sein du code de la sécurité sociale, à l’article L. 921-2-1 ou dans un article nouveau qui le suivrait immédiatement.
Une question se pose néanmoins : à combien la différence de cotisations s’élève-t-elle pour les centres hospitaliers universitaires ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 8 bis.
L’amendement n° 224, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 8 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code des juridictions financières est ainsi modifié :
1° À la première phrase des articles L. 111-7, L. 211-7 et L. 252-9-1, après le mot : « contrôler », sont insérés les mots : « les centres de santé mentionnés à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique, » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 262-10, après le mot : « contrôler », sont insérés les mots : « les centres de santé mentionnés à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique, » ;
3° À la première phrase de l’article L. 272-8, après le mot : « contrôle », sont insérés les mots : « sur les centres de santé mentionnés à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique, ».
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de clarification du champ du contrôle des juridictions financières sur les centres de santé.
Il ressort des échanges conduits avec la Cour des comptes que la compétence des juridictions financières en matière de contrôle des centres de santé n’est aujourd’hui pas explicitement reconnue. Or de récents scandales ont montré la nécessité de prévenir des dysfonctionnements importants dans leur gestion et des risques importants pour la qualité des soins.
Si la loi du 19 mai 2023 visant à améliorer l’encadrement des centres de santé a rétabli un agrément pour certaines activités et renforcé les pouvoirs de contrôle du directeur général de l’agence régionale de santé sur la gestion des centres et les pratiques sanitaires des professionnels qui y exercent, il convient d’assurer la compétence des juridictions financières sur des structures financées directement et indirectement par l’assurance maladie.
Le présent amendement vise ainsi à combler cette lacune.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Renforcer le contrôle des juridictions financières sur les centres de santé peut être un outil supplémentaire de lutte contre les dérives.
C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 8 bis.
Article 9
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 4111-2, il est inséré un article L. 4111-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4111-2-1. – Par dérogation à l’article L. 4111-1, l’autorité compétente peut, après avis d’une commission comprenant notamment des professionnels de santé, dont des représentants de l’ordre compétent, délivrer une attestation permettant un exercice provisoire, pour la profession de médecin dans la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, pour la profession de chirurgien-dentiste, le cas échéant dans la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, ou pour la profession de sage-femme, dans un établissement public ou un établissement privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social, aux titulaires d’un titre de formation délivré par un État non-membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen et permettant l’exercice de l’une des professions mentionnées au même article L. 4111-1 dans cet État qui exercent cette profession, qui établissent leur expérience professionnelle par tout moyen et qui disposent d’un niveau de connaissance de la langue française suffisant pour exercer leur activité en France. Ces professionnels s’engagent également à passer les épreuves de vérification des connaissances mentionnées à l’article L. 4111-2.
« La durée de validité de cette attestation, renouvelable une fois, ne peut excéder treize mois.
« Pour les professions de chirurgien-dentiste et de sage-femme, la commission mentionnée au premier alinéa du présent article est nationale.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. » ;
2° Après l’article L. 4221-12, il est inséré un article L. 4221-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4221-12-1. – Par dérogation à l’article L. 4221-1, l’autorité compétente peut, après avis d’une commission nationale comprenant notamment des professionnels de santé, dont des représentants de l’ordre compétent, délivrer une attestation permettant un exercice provisoire, pour la profession de pharmacien dans la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, dans un établissement public ou un établissement privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social, aux titulaires d’un titre de formation délivré par un État non-membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen et permettant l’exercice de la profession mentionnée au même article L. 4221-1 dans cet État qui exercent cette profession, qui établissent leur expérience professionnelle par tout moyen et qui disposent d’un niveau de connaissance de la langue française suffisant pour exercer leur activité en France. Ces professionnels s’engagent également à passer les épreuves de vérification des connaissances mentionnées à l’article L. 4221-12.
« La durée de validité de cette attestation, renouvelable une fois, ne peut excéder treize mois.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. »
M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, sur l’article.
M. Fabien Genet. Les articles 9 et 10 visent à mieux intégrer les praticiens à diplôme hors Union européenne, les Padhue, dans notre système de santé.
Je crois utile de rendre hommage à ces praticiens, qui représentent un pan peu connu de l’hôpital, pourtant indispensable à son fonctionnement. Dans de nombreux établissements, ce sont eux qui permettent le fonctionnement des services.
Reconnaissons que leur contribution au système de santé n’a pas toujours été reconnue à sa juste valeur, et la réforme introduite par la loi du 24 juillet 2019 visant à sécuriser leur statut et à leur apporter des garanties relatives aux deux années obligatoires de parcours de consolidation des compétences n’a pas tout de suite fonctionné correctement, c’est le moins que l’on puisse dire !
Notre commission des affaires sociales et sa rapporteure ont bien travaillé le sujet et amélioré les dispositions relatives aux Padhue.
Pour en revenir au contexte, je profiterai de l’examen de ces dispositions pour relayer de nouveau, comme tant de collègues sur ces travées, l’attente parfois désespérée des patients de nos déserts médicaux, qui n’ont plus de médecin traitant et qui se voient opposer des délais de plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste à plus de cent kilomètres de leur habitation.
Tous ces patients maltraités, voire pas traités du tout, par notre système de santé n’ont pas besoin de mathématiciens, madame la ministre, pour mesurer les besoins en médecins, en dentistes ou en psychiatres !
C’est pourquoi je vous alerte de nouveau sur les délais causés par les procédures d’accréditation de certains diplômés étrangers.
Mme Nathalie Goulet, sénatrice de l’Orne, a interrogé le Gouvernement hier soir sur le Centre national de gestion. Pour ma part, je vous ai déjà alertée sur l’attente de plusieurs mois, voire de plusieurs années, de praticiens relevant de la procédure dite Hocsman, dont le diplôme a été obtenu dans un État tiers reconnu par un État membre de l’Union européenne. Ces médecins attendent durant des mois la validation de leur dossier, alors que les patients ne se soignent pas.
Il y a donc urgence à favoriser leur exercice en France. C’est pourquoi, au-delà des mesures législatives qui seront examinées ce soir, nous vous demandons, madame la ministre, de tout mettre en œuvre pour permettre à ces centaines de médecins de soigner nos concitoyens dans les plus brefs délais, dans le respect, naturellement, des compétences et de la formation requise pour garantir la sécurité.
M. le président. L’amendement n° 144, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 3 et 8
Après le mot :
médico-social
insérer les mots :
ou au sein des équipes de soins mentionnés à l’article L. 1411-11-1
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. La situation des Padhue est particulièrement grave et nécessite une intervention rapide du Gouvernement. En effet, à l’heure actuelle, des Padhue, qui sont en poste, sont menacés de voir leur contrat interrompu si leurs noms ne s’affichent pas sur la liste des prochains lauréats des épreuves de vérification des compétences.
Notre collègue vient de le rappeler à l’instant, les Padhue exercent dans nos hôpitaux, y compris lorsque des personnels soignants, pourtant tout à fait soucieux de l’intérêt général, démissionnent en raison de leurs conditions de travail et du manque de personnel.
Une triple épidémie – covid 19, bronchiolite et grippe – a submergé nos hôpitaux, où les Padhue ont effectué des gardes, des astreintes et des formations universitaires. Durant leurs congés, ces praticiens préparent les épreuves classantes, dans la peur de l’échec qui remettrait en cause leur statut. En effet, ils seraient, le cas échéant, contraints d’exercer en qualité de faisant fonction d’interne, pour 1 400 euros par mois.
Le maintien du statu quo actuel n’est pas tenable, ni pour les établissements de santé ni pour ces praticiens, auxquels on impose des contrats de travail très précaires, de gré à gré, qui s’accompagnent de salaires inacceptables.
Pourtant, nous le répétons tous, nous faisons face à une pénurie de médecins, et les réformes adoptées n’auront pas d’effet réel avant une dizaine d’années. Il y a donc urgence à sortir les Padhue de l’invisibilité et à régulariser leur situation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je partage l’objectif de faciliter l’exercice en ambulatoire des Padhue qui ne disposent pas encore d’une autorisation de plein exercice. Toutefois, je crois que ceux d’entre eux qui bénéficient d’une attestation provisoire et qui n’ont pas encore réussi les épreuves de vérification des connaissances doivent profiter d’un niveau élevé d’encadrement.
La commission a donc facilité l’exercice des Padhue en ambulatoire, mais après la réussite aux EVC, les épreuves de vérification des connaissances, et le parcours de consolidation.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Cet amendement, sur lequel je vais émettre un avis défavorable, n’a pas vraiment été défendu par Mme Brulin au cours de son intervention.
En effet, il tend à faciliter l’exercice en ambulatoire des Padhue avant même le passage de leurs examens. Sur ce point, nous partageons l’avis de Mme la rapporteure : si nous souhaitons développer la pratique des Padhue en ambulatoire, cela doit se faire après le stage en milieu hospitalier et la validation des EVC, tout comme c’est le cas pour nos étudiants.
S’agissant de la situation des Padhue, nous avons tous conscience de l’urgence d’agir. C’est la raison pour laquelle, depuis maintenant quinze mois, nous avons réglé la problématique des 3 000 Padhue qui étaient « en stock », si j’ose dire, avant l’adoption de la loi de 2019.
Les dispositions dont nous discutons ce soir dans le cadre de l’article 9 répondent aux préoccupations que vous avez exprimées dans vos propos liminaires, madame la sénatrice.
M. le président. L’amendement n° 102 rectifié ter, présenté par M. Chasseing, Mme Lermytte, MM. Médevielle et Rochette, Mme L. Darcos, M. Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Brault et Wattebled, Mmes Bourcier et O. Richard, MM. Menonville, Nougein, Levi, Panunzi et Cadec et Mme Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Après les mots :
médico-social
insérer les mots :
, avec l’accord du médecin coordinateur ou du médecin traitant,
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. L’article 9 tend à faciliter l’exercice des médecins étrangers, appelés praticiens à diplôme hors Union européenne, ou Padhue, sur le territoire national, en créant une autorisation temporaire d’exercice en établissement de santé ou en établissement médico-social ou social, public ou privé, à but non lucratif.
Une telle autorisation permettra aux Padhue de s’inscrire dans une démarche de reconnaissance de leur diplôme par une commission nationale.
Cet amendement vise simplement à préciser que l’autorisation temporaire de travailler en établissement de santé ou dans le secteur médico-social pour les médecins, les chirurgiens-dentistes et les sages-femmes ne peut se faire qu’avec l’accord du médecin-chef de service ou du médecin coordinateur ou du médecin traitant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il ne paraît pas nécessaire, compte tenu des garanties existantes, de soumettre l’exercice des Padhue à l’avis préalable du médecin traitant ou du médecin coordonnateur.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Daniel Chasseing. Je retire l’amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 102 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 120 rectifié, présenté par MM. Haye, Patriat et Lemoyne, Mme Schillinger, MM. Iacovelli, Rohfritsch et Buis, Mmes Havet et Duranton, M. Omar Oili, Mme Cazebonne, M. Fouassin, Mme Nadille, MM. Bitz, Buval, Kulimoetoke, Lévrier, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud et Théophile, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 9
Compléter ces alinéas par une phrase ainsi rédigée :
Lorsque le professionnel de santé exerce dans une zone mentionnée au 1° de l’article L. 1434-4, le renouvellement est automatique.
La parole est à M. Olivier Bitz.
M. Olivier Bitz. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Bitz. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 120 rectifié est retiré.
L’amendement n° 121 rectifié, présenté par MM. Haye, Patriat et Lemoyne, Mme Schillinger, MM. Iacovelli, Rohfritsch et Buis, Mmes Havet et Duranton, M. Omar Oili, Mme Cazebonne, M. Fouassin, Mme Nadille, MM. Bitz, Buval, Kulimoetoke, Lévrier, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud et Théophile, est ainsi libellé :
I.- Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le professionnel de santé a satisfait aux épreuves de vérification des connaissances mentionnées à l’article L. 4111-2 avant la fin de l’échéance de l’autorisation temporaire d’exercice, et sauf opposition expresse de l’autorité compétente, l’autorisation temporaire d’exercice est automatiquement renouvelée en autorisation individuelle d’exercice telle que mentionnée au I du même article L. 4111-2.
II.- Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le professionnel de santé a satisfait aux épreuves de vérification des connaissances mentionnées à l’article L. 4221-12 avant la fin de l’échéance de l’autorisation temporaire d’exercice, et sauf opposition expresse de l’autorité compétente, l’autorisation temporaire d’exercice est automatiquement renouvelée en autorisation individuelle d’exercice telle que mentionnée au premier alinéa du même article L. 4221-12.
La parole est à M. Olivier Bitz.
M. Olivier Bitz. Je retire également cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 121 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 13 est présenté par M. Bonneau.
L’amendement n° 170 rectifié ter est présenté par Mmes Berthet, Muller-Bronn et Jacques, M. Favreau, Mmes Aeschlimann et Dumont et M. Sido.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8, première phrase
Supprimer les mots :
dans un établissement public ou un établissement privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social,
L’amendement n° 13 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 170 rectifié ter.
Mme Martine Berthet. L’article 9 de la proposition de loi crée une autorisation provisoire d’exercice pour les praticiens à diplôme hors Union européenne recrutés dans les établissements de santé.
Or c’est l’ensemble des métiers de la pharmacie qui rencontre des difficultés importantes de recrutement, et les besoins en pharmaciens sont également très forts pour l’officine, la distribution en gros et l’industrie.
Cet amendement a donc pour objet de ne pas restreindre ce dispositif aux établissements de santé et d’étendre l’autorisation provisoire à d’autres métiers de la pharmacie. Je pense aux pharmaciens d’officine et d’établissements pharmaceutiques, de l’industrie et de la distribution en gros, à l’exclusion bien sûr des biologistes médicaux exerçant dans des laboratoires privés, et cela afin d’éviter de créer une disparité avec les médecins biologistes de ville qui ne pourraient pas bénéficier de ce dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission sera favorable à cet amendement, compte tenu des tensions démographiques que connaît la profession. L’offre paraît en effet particulièrement fragile dans certains territoires et dans tous les métiers de la pharmacie.
J’émets donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Le Gouvernement sera défavorable à cet amendement, pour la raison invoquée tout à l’heure à propos des médecins : l’autorisation devra intervenir au bout des treize mois, pas avant.
Une fois que les pharmaciens, tout comme les médecins, auront validé leurs EVC et se seront formés à l’hôpital, ils pourront pratiquer. Il s’agit d’établir un parallélisme et une égalité de traitement entre les professionnels de santé.
M. le président. L’amendement n° 114 rectifié bis, présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mme Micouleau, MM. Daubresse, Panunzi, Cadec, Burgoa, D. Laurent, de Nicolaÿ, Genet et Belin, Mme Demas, M. Pointereau, Mme Joseph, MM. C. Vial, Cambon, Perrin, Rietmann et Sido et Mme Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par les mots :
dans le respect de l’autonomie de gestion de l’ensemble des établissements de santé
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. L’article 9 tend à créer une nouvelle autorisation provisoire d’exercice pour les praticiens à diplôme hors Union européenne en établissement de santé, en établissement médico-social ou social, public ou privé à but non lucratif.
Les centres de lutte contre le cancer, les CLCC, sont concernés par cette mesure. Il est nécessaire que l’application de ces dispositions se fasse dans le respect de l’autonomie des CLCC.
À titre d’exemple, le statut de praticien associé octroyé aux médecins étrangers est accordé à la suite d’un parcours de consolidation de compétences pouvant être réalisé au sein d’un centre de lutte contre le cancer.
Or, à la suite de ce parcours, le praticien étranger est automatiquement affecté dans le CHU de la subdivision locale et ne peut être mis à disposition d’un CLCC que par voie de convention entre celui-ci et le centre hospitalier public.
Il s’agit d’un exemple des mesures d’application qui empêchent les centres de lutte contre le cancer, établissements se consacrant entièrement au service public de la santé, de recruter directement ces praticiens. Ce type de schéma ne doit évidemment pas s’étendre à d’autres dispositifs.
Cet amendement vise donc à garantir que les textes d’application de ces dispositions respecteront l’autonomie de tous les établissements de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Mon cher collègue, l’effet juridique de cet amendement paraît incertain. Au surplus, les CLCC sont bien inclus dans les organismes susceptibles de recevoir des Padhue bénéficiant de l’attestation temporaire.
La commission vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, elle se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. L’avis du Gouvernement est sensiblement le même que celui de la commission.
Il me semble en effet que l’amendement est d’ores et déjà satisfait, dans la mesure où les CLCC figurent bien dans la liste des établissements concernés, dans le cadre d’une autonomie de gestion de l’ensemble des établissements de santé.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Milon, l’amendement n° 114 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Alain Milon. Je vais évidemment retirer cet amendement. Toutefois, je le précise, il a été inspiré par les centres de lutte contre le cancer. Il faudra donc vérifier ce point de près.
Cela dit, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 114 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 9, modifié.
(L’article 9 est adopté.)
Article 10
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 148, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
La sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complétée par un article L. 421-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 421-13-1. – L’étranger qui occupe, dans un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social, un emploi pour une durée égale ou supérieure à trois mois au titre d’une des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-1 du code de la santé publique, qui est titulaire de l’attestation prévue aux articles L. 4111-2-1 et L. 4221-12-1 ou des dispositions dérogatoires liées aux territoires mentionnés à l’article L. 4131-5 du même code et dont la rémunération est supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d’État se voit délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention “talent-professions médicales et de la pharmacie” d’une durée maximale de treize mois, renouvelable.
« L’étranger qui bénéficie d’une décision d’affectation, d’une attestation permettant un exercice temporaire ou d’une autorisation d’exercer mentionnées aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du même code, qui occupe un emploi au titre des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-12-1 dudit code et dont la rémunération est supérieure au seuil prévu au premier alinéa du présent article se voit délivrer une carte pluriannuelle portant la mention “talent-professions médicales et de la pharmacie” d’une durée maximale de quatre ans.
« Les cartes mentionnées aux deux premiers alinéas permettent l’exercice de l’activité professionnelle ayant justifié leur délivrance. »
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale, la suppression de cet article par la commission des affaires sociales du Sénat, qui a souhaité le renvoyer en discussion dans le cadre de l’examen du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, n’est pas une bonne nouvelle à nos yeux.
En effet, nous craignons une instrumentalisation des praticiens étrangers qui exercent dans nos hôpitaux, nos cabinets et nos Ehpad dans des conditions pourtant bien différentes de leurs confrères diplômés dans l’Union européenne.
Selon nous, cette inégalité reposant sur la nationalité et non pas sur les compétences n’est pas acceptable, et encore moins dans le contexte de pénurie que nous connaissons.
Nous considérons que la question des conditions de séjour des Padhue doit faire l’objet d’un débat à l’occasion de l’examen d’un texte sur la santé, et non pas sur le contrôle de l’immigration.
La précarité administrative rencontrée par de nombreux médecins, qui portent à bout de bras, je l’ai dit, nos hôpitaux publics, ne justifie pas l’ajout d’une précarité administrative.
Pour ces raisons, nous proposons d’abaisser à trois mois l’occupation d’un emploi dans un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social, pour bénéficier d’une carte de séjour pluriannuelle nommée « talent-professions médicales et de la pharmacie », d’une durée maximale de treize mois.
Par ailleurs, nous considérons que cette durée de treize mois est insuffisante et devrait a minima être étendue au nombre de droits à concourir aux épreuves de vérification des compétences de la personne.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 88 rectifié est présenté par Mme Guillotin, M. Bilhac, Mme M. Carrère, M. Daubet, Mme N. Delattre, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet, Guérini et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° 176 est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 209 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
La sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complétée par un article L. 421-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 421-13-1. – L’étranger qui occupe, dans un établissement public ou privé à but non lucratif de santé, social ou médico-social, un emploi pour une durée égale ou supérieure à un an au titre d’une des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-1 du code de la santé publique, qui est titulaire de l’attestation prévue aux articles L. 4111-2-1 et L. 4221-12-1 du même code et dont la rémunération est supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d’État se voit délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention “talent-professions médicales et de la pharmacie” d’une durée maximale de treize mois.
« L’étranger qui bénéficie d’une décision d’affectation, d’une attestation permettant un exercice temporaire ou d’une autorisation d’exercer mentionnées aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du même code, qui occupe un emploi au titre des professions mentionnées aux articles L. 4111-1 et L. 4221-12-1 dudit code et dont la rémunération est supérieure au seuil prévu au premier alinéa du présent article se voit délivrer une carte pluriannuelle portant la mention “talent-professions médicales et de la pharmacie” d’une durée maximale de quatre ans.
« Les cartes mentionnées aux deux premiers alinéas permettent l’exercice de l’activité professionnelle ayant justifié leur délivrance. »
La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 88 rectifié.
Mme Véronique Guillotin. L’article 10 prévoit la création de deux cartes de séjour pluriannuelles « talent-professions médicales et de la pharmacie », pour répondre au besoin de recrutement des praticiens diplômés hors de l’Union européenne dans les établissements de santé, publics ou privés à but non lucratif.
La première est d’une durée de treize mois pour les Padhue ayant obtenu l’autorisation d’exercice temporaire créée à l’article 9. La seconde est d’une durée de quatre ans, pour ceux qui ont réussi les épreuves de vérification des connaissances.
Notre commission a supprimé cet article, considérant que ces dispositions relèvent de la compétence de la commission des lois, qui les a d’ailleurs supprimées à l’occasion de l’examen du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration.
Nous pensons au contraire que la question des conditions de séjour des Padhue, qui sont devenus indispensables au fonctionnement de certains de nos établissements de santé, doit être examinée à l’occasion d’un texte sur la santé. C’est pourquoi nous proposons de réintroduire cet article.
Sans doute conviendrait-il également d’avoir une réflexion éthique sur les Padhue. En effet, à l’échelon européen, on observe un transfert des compétences, qui se fait au détriment de certains pays. Ainsi, les médecins moldaves sont aspirés par la Roumanie, tandis que les médecins roumains viennent chez nous… Quant aux médecins français, ils vont au Luxembourg ou en Suisse. Sans doute devrions-nous, un jour, débattre de ces questions et nous interroger sur l’éthique de ce grand marché.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l’amendement n° 176.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à rétablir la création d’une nouvelle carte de séjour pluriannuelle portant la mention « talent-professions médicales et de la pharmacie », avec un périmètre élargi.
Nous manquons de professionnels de santé. Nous avons besoin de permettre à des professionnels de santé étrangers de venir en France et d’y vivre dignement. C’est une demande des acteurs du secteur et c’est une demande du groupe écologiste.
On me dira qu’il s’agit d’une question traitée par la commission des lois. Toutefois, il s’agit également d’une question de santé et d’accès aux soins dans la dignité, surtout dans une démocratie.
Me réjouissant que le Gouvernement ait déposé un amendement identique, je vous invite, mes chers collègues, à adopter ces dispositions.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée, pour présenter l’amendement n° 209.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Aux yeux du Gouvernement, il est indispensable de rétablir l’article 10. Il s’agit, comme cela vient d’être dit, d’un sujet de santé et d’accès aux soins.
Tous, ici, vous nous avez au moins une fois sollicités pour un problème de Padhue dans l’un de vos hôpitaux. La carte de séjour « talent-professions médicales et de la pharmacie » ne concernera que les Padhue, c’est-à-dire les médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes et sages-femmes diplômés en dehors de l’Union européenne.
La délivrance de cette carte sera encadrée par une procédure précise.
Tout d’abord, la carte de séjour de treize mois ne pourra être donnée qu’après l’obtention d’une autorisation d’exercice temporaire de treize mois donnés par le directeur général de l’ARS, après avis d’une commission composée de professionnels de santé.
Pour ce faire, le directeur général de l’ARS et cette commission se seront assurés de la contractualisation du Padhue avec un établissement de santé ou médico-social français, public ou privé à but non lucratif, où le besoin en ressources humaines médicales est avéré.
Ensuite, la carte de séjour « talent-professions médicales et de la pharmacie » de treize mois est assortie d’une obligation d’inscription à la procédure des EVC, avec la possibilité de renouveler une fois à ce titre de séjour de treize mois en cas de premier échec aux EVC.
Enfin, la carte de séjour « talent-professions médicales et de la pharmacie » de quatre ans ne serait délivrée qu’aux Padhue lauréats de ces EVC et intégrant un parcours de consolidation, qui aboutira finalement à l’obtention de la reconnaissance du titre de médecin en France.
Créé en 2016, le passeport « talent », maintenant appelé « carte de séjour talent », est destiné aux étrangers qui souhaitent, par leur dynamisme et leur talent, contribuer à l’attractivité de la France. Il s’agit d’un dispositif permettant d’obtenir directement un titre de séjour pluriannuel de la durée du contrat de travail, évitant ainsi les procédures de renouvellement de titre de séjour.
Jusqu’à présent, les Padhue ne pouvaient pas bénéficier de ce dispositif. Or, dans un contexte de forte tension sur les ressources médicales, les Padhue contribuent pleinement au maintien de l’offre de soin dans de nombreux territoires, et la capacité à attirer des professionnels médicaux étrangers très qualifiés et à faciliter leur maintien sur le territoire constitue un levier d’amélioration de l’accès aux soins.
C’est pourquoi la création de cette carte de séjour talent dédiée aux Padhue est indissociable des procédures portées par les articles 9 et 10 bis, qui permettent de mettre en œuvre une régulation de l’intégration des Padhue dans notre système de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces dispositions touchent aux conditions de séjour des Padhue. Elles étaient incluses dans le projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration déposé par le Gouvernement. Elles relèvent de la compétence de la commission des lois, qui les a examinées et amendées.
Ces mesures trouveraient davantage leur place dans le projet de loi relatif à l’immigration que dans un texte relatif au système de santé. C’est la raison pour laquelle la commission les a supprimées.
J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 148 ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 148, au profit des amendements identiques nos 88 rectifié, 176 et 209.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. En tant que président de la commission des affaires sociales, je veux rappeler que la position exprimée par la commission sur ces amendements ne porte pas sur le fond.
Nous considérons que ce sujet doit être renvoyé à la commission des lois, d’autant qu’un texte dont cette instance a été saisie sera examiné dans quinze jours. Il ne s’agit donc pas de dire : « Un jour, nous serons amenés à traiter ce sujet ! »
Ainsi, par cohérence avec cette ligne d’organisation, nous avons pris la décision de supprimer cet article. Je le répète, il ne s’agit pas d’une position sur le fond. La commission des lois doit être aux premières lignes sur cette thématique.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 148.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 16 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Pour l’adoption | 81 |
Contre | 244 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 88 rectifié, 176 et 209.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 17 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 154 |
Contre | 188 |
Le Sénat n’a pas adopté.
En conséquence, l’article 10 demeure supprimé.
Après l’article 10
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 14 est présenté par M. Bonneau.
L’amendement n° 169 rectifié ter est présenté par Mmes Berthet, Jacques et Muller-Bronn, M. Favreau, Mme Aeschlimann, M. Sido et Mme Dumont.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa de l’article L. 4221-1, les mots : « à l’article L. 4221-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 4221-2 et L. 4221-4 » ;
2° L’article L. 4221-4 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « pharmacien », la fin du premier alinéa est supprimée ;
b) Aux deuxième et dernier alinéas, les mots : « l’un de ces États » sont remplacés par les mots : « un État membre de l’Union européenne ou un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen » ;
3° À l’article L. 4221-9, après les mots : « l’un de ces États » sont insérés les mots : « à l’exclusion de ceux prévus à l’article L. 4221-4 ».
L’amendement n° 14 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 169 rectifié ter.
Mme Martine Berthet. À ce jour, les pharmaciens non européens diplômés au sein d’un État membre de l’Union européenne doivent obligatoirement passer par le Centre national de gestion (CNG) pour obtenir une autorisation d’exercice en application de l’article L. 4221-9 du code de la santé publique – cet article concerne tous les diplômes européens, conformément à la directive 2005/36/CE.
En 2009, la condition de nationalité a été levée pour toute personne titulaire d’un diplôme français et pour les titulaires d’un diplôme européen eux-mêmes ressortissants d’un État membre de l’Union européenne ou assimilés.
L’amendement que je propose vise à permettre aux pharmaciens dont les compétences sont déjà reconnues de s’inscrire directement au tableau de l’ordre national des pharmaciens.
Une inscription à ce tableau est toujours soumise à une vérification de la compétence du professionnel demandeur : diplôme, expérience professionnelle, niveau de langue. En revanche, l’obtention d’une autorisation d’exercice resterait obligatoire pour les professionnels ressortissants d’un État autre que les États membres de l’Union européenne ou assimilés ne bénéficiant pas d’un diplôme européen à reconnaissance automatique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Dans la mesure où la condition de nationalité demeure applicable aux médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes titulaires d’un diplôme européen à reconnaissance automatique, la commission n’a pas souhaité modifier les règles applicables aux pharmaciens.
Elle demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Berthet, l’amendement n° 169 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Martine Berthet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 169 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 150, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la procédure simplifiée d’autorisation de plein exercice basée sur le principe des listes d’aptitude établies par des commissions territoriales d’autorisation d’exercice à titre provisoire des praticiens de santé à diplôme hors Union européenne en Guyane, Martinique, Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le rapport évalue les conséquences en matière de continuité et d’accès aux soins pour les populations et la possibilité de pérenniser le dispositif au-delà de 2025.
Le rapport évalue enfin l’opportunité de généraliser la procédure simplifiée d’autorisation d’exercice à l’ensemble du territoire.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Il s’agit d’une demande de rapport, je vous prie de m’en excuser ! En fait, c’est pour nous une manière de demander que soit évaluée la procédure simplifiée d’autorisation de plein exercice à titre provisoire des praticiens à diplôme hors Union européenne qui a été mise en œuvre dans les Antilles et en Guyane.
Une telle évaluation doit permettre d’envisager de généraliser cette procédure à l’ensemble du territoire et à l’ensemble des Padhue.
Je rappelle qu’un décret du 31 mars 2020 a instauré une procédure particulière pour les Antilles-Guyane, créant une liste d’aptitude pour 400 praticiens. Seulement, cette procédure d’autorisation d’exercice n’est que temporaire : elle arrive à son terme le 31 décembre 2025.
Madame la ministre, pouvez-vous apporter une réponse à ces praticiens dont le renfort a permis de surmonter la crise de la covid ? Devront-ils quitter notre territoire après le 31 décembre 2025 ou pourront-ils continuer d’exercer, en outre-mer, mais également en métropole ?
Cette procédure mise en place en situation d’urgence semble avoir fait ses preuves ; aussi les Padhue proposent-ils de généraliser le dispositif à la métropole, afin de le pérenniser, ce qui permettrait de sortir les praticiens concernés de la précarité administrative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je laisse Mme la ministre répondre à notre collègue.
Pour le reste, conformément à sa doctrine habituelle, la commission a émis un avis défavorable sur cette demande de rapport.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Je vais émettre un avis défavorable, puisqu’il s’agit d’une demande de rapport.
Nous sommes toutefois d’ores et déjà favorables à une prolongation du dispositif au-delà du 31 décembre 2025 et soutenons un amendement en ce sens. Cette volonté s’appuie sur un bilan de la mesure et sur une évaluation des renforts médicaux nécessaires dans ces territoires.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Madame Brulin, l’amendement n° 150 est-il maintenu ?
Mme Céline Brulin. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 150.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 10 bis
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 4111-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « le directeur général du Centre national de gestion » sont remplacés par les mots : « l’autorité compétente désignée par décret en Conseil d’État » et, après le mot : « commission », sont insérés les mots : « nationale, majoritairement composée de professionnels de santé et » ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– la deuxième phrase est supprimée ;
– après le mot : « par », la fin de la dernière phrase est ainsi rédigée : « voie réglementaire. » ;
c) Le quatrième alinéa est supprimé ;
d) Le sixième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « de deux ans » sont supprimés ;
– l’avant-dernière phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « À l’issue d’un stage d’évaluation, dont la durée est déterminée par voie réglementaire, la commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider de la réalisation d’un stage complémentaire. La décision d’autoriser individuellement les lauréats candidats intervient dans un délai fixé par voie réglementaire à compter de la proclamation des résultats des épreuves mentionnées au deuxième alinéa. » ;
e) Le septième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « d’une année » et, à la fin, les mots : « , dans les lieux de stage agréés et auprès d’un praticien agréé maître de stage » sont supprimés ;
– après le mot : « alinéa », la fin de la troisième phrase est supprimée ;
– après la même troisième phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « À l’issue d’un stage d’évaluation, dont la durée est déterminée par voie réglementaire, la commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider de la réalisation d’un stage complémentaire. La décision d’autoriser individuellement les lauréats candidats intervient dans un délai fixé par voie réglementaire à compter de la proclamation des résultats des épreuves mentionnées au deuxième alinéa. » ;
f) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « d’une année » sont remplacés par les mots : « , le cas échéant dans leur spécialité » et, à la fin, les mots : « , dans un établissement de santé » sont supprimés ;
– après le mot : « fixé », la fin de la troisième phrase est ainsi rédigée : « en application du deuxième alinéa. » ;
– après la même troisième phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « À l’issue d’un stage d’évaluation, dont la durée est déterminée par voie réglementaire, la commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider la réalisation d’un stage complémentaire. La décision d’autoriser individuellement les lauréats candidats intervient dans un délai fixé par voie réglementaire à compter de la proclamation des résultats des épreuves mentionnées au deuxième alinéa. » ;
2° L’article L. 4221-12 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « le directeur général du Centre national de gestion peut, après avis d’une commission, composée notamment de professionnels de santé » sont remplacés par les mots : « l’autorité compétente désignée par décret en Conseil d’État peut, après avis d’une commission nationale, majoritairement composée de professionnels de santé et comprenant notamment des délégués des conseils nationaux des ordres et des organisations nationales des professions intéressées » ;
b) Après le mot : « épreuves », la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « pour chaque profession et, le cas échéant, pour chaque spécialité est fixé par voie réglementaire. » ;
c) Le cinquième alinéa est supprimé ;
d) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « de deux ans » sont supprimés ;
– après le mot : « santé, », la fin de la troisième phrase est ainsi rédigée : « comprenant un nombre de postes égal à celui fixé en application du deuxième alinéa. » ;
– après la même troisième phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « À l’issue d’un stage d’évaluation, dont la durée est déterminée par voie réglementaire, la commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider la réalisation d’un stage complémentaire. La décision d’autoriser individuellement les lauréats candidats intervient dans un délai fixé par voie réglementaire à compter de la proclamation des résultats des épreuves mentionnées au deuxième alinéa. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 149, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 3 et 20
Supprimer les mots :
, majoritairement composée de professionnels de santé et
II. - Alinéa 10
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
trois
et les mots :
la commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider de la réalisation d’un stage complémentaire
par les mots et la phrase :
une commission régionale comprenant des professionnels de santé décide de la réalisation d’un stage complémentaire et émet un avis sur l’aptitude du lauréat candidat à exercer. La commission mentionnée au premier alinéa peut décider la réalisation d’un stage complémentaire.
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Notre groupe a rencontré des praticiens diplômés hors Union européenne, et les échanges que nous avons eus témoignent du caractère totalement inacceptable de leur situation administrative et professionnelle.
Je souhaite vous faire part, mes chers collègues, de quelques-unes de ces situations.
Premier exemple, le docteur A – appelons-le ainsi –, effectue des gardes et des astreintes dans un hôpital d’Île-de-France. Il forme des internes et les « séniorise » en l’absence des titulaires, alors que lui-même est sous le coup d’un non-renouvellement de contrat au 31 décembre suivant.
Ce praticien, qui prend en charge des gardes de services entiers lorsque le médecin senior est absent, perçoit un salaire de 2 100 euros par mois.
Deuxième exemple, la docteur L est elle aussi sous le coup d’un non-renouvellement de contrat. Elle exerce en psychiatrie et, sur son temps personnel, suit un cursus de master à l’université. La seule chose qui lui est proposée est de passer d’un contrat de praticien attaché au statut de faisant fonction d’interne. En l’absence de places disponibles en psychiatrie, elle a dû passer les épreuves de vérification des compétences de médecine générale et ne pourra s’inscrire aux épreuves de vérification des connaissances de psychiatrie qu’en 2025.
Troisième exemple, le docteur C, praticien à Cayenne, ne peut actuellement exercer en plein exercice que s’il demeure aux Antilles-Guyane, et cela seulement jusqu’en décembre 2025. Après cette date, il ne sait pas s’il pourra continuer d’exercer ou s’il devra quitter le territoire guyanais.
Ces trois situations différentes le montrent, les conditions d’exercice des Padhue sont difficiles et se doublent d’un quotidien administratif kafkaïen : rémunération en deçà de leur qualification,…
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Silvana Silvani. … contrats précaires dans le temps et relation déséquilibrée avec les directions d’hôpitaux, qui les confrontent à un chantage – exercer au rabais comme interne ou bien quitter le territoire.
M. le président. Vous avez épuisé votre temps de parole, ma chère collègue.
L’amendement n° 213, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
trois
et les mots :
la commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider de la réalisation d’un stage complémentaire.
par les mots et la phrase :
une commission régionale comprenant des professionnels de santé décide de la réalisation d’un stage complémentaire et émet un avis sur l’aptitude du lauréat candidat à exercer. La commission mentionnée au premier alinéa peut décider de la réalisation d’un stage complémentaire.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Cet amendement est à peu près identique à celui qui vient d’être présenté, mais je ne pense pas le défendre tout à fait de la même façon…
Il s’agit de rétablir la rédaction de l’article 10 bis de la proposition de loi avant son examen par la commission des affaires sociales du Sénat, notamment pour ce qui est de la commission d’autorisation d’exercice chargée de porter un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences des lauréats des épreuves de vérification des connaissances.
Cet amendement vise à écrire dans la loi que cette commission est régionale et qu’elle est composée de professionnels de santé. L’objectif est d’installer cette commission à une échelle régionale et, ainsi, de fluidifier la gestion des dossiers quant à la détermination du parcours pédagogique des Padhue – les cas cités par Mme la sénatrice Silvani ont montré combien un tel effort était nécessaire.
La commission chargée d’émettre un avis final d’autorisation d’exercice restera une commission de niveau national.
L’idée est de pourvoir à la réduction des délais, qui sont trop longs, comme cela a été souligné à juste titre un peu plus tôt au cours du débat à propos des délais d’instruction du CNG. Je rappelle néanmoins que le CNG a dû, ces derniers mois, examiner le stock qui n’avait pas été traité en 2019, en 2020 et en 2021…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces deux amendements ont pour objet de revenir sur la rédaction du texte de la commission.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 149 ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 149.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
M. le président. L’amendement n° 163, présenté par M. Théophile, Mme Nadille, M. Bitz et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 18
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes autorisées à exercer en application des dispositions de l’article L. 4131-5 du code de la santé publique et justifiant de cinq années d’exercice dans les territoires mentionnés à ce même article, à condition d’être lauréates des épreuves de vérification des connaissances peuvent être dispensées du parcours de consolidation des compétences prévu au cinquième alinéa du présent article. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de mise en œuvre du présent alinéa. » ;
La parole est à Mme Solanges Nadille.
Mme Solanges Nadille. Depuis 2020, des médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes sont autorisés à exercer dans certains territoires d’outre-mer en vertu du système dérogatoire prévu à l’article L. 4131-5 du code de la santé publique. Ces professionnels exercent dans des structures de santé et contribuent à dispenser des soins de qualité dans des territoires qui en manquent parfois cruellement.
Le présent amendement tend ainsi à valoriser cet engagement et cette expérience, en instituant un traitement différencié pour ceux qui justifient de cinq années d’exercice dans ces territoires.
Sans revenir sur le principe du concours, nous proposons que la commission nationale d’autorisation d’exercice, qui donne son avis, puisse se prononcer sur un lauréat des épreuves de vérification des connaissances avant même la réalisation du stage d’évaluation prévu dans la procédure de droit commun. La commission nationale d’autorisation d’exercice pourra dès lors soit attribuer l’autorisation d’exercice soit prescrire un stage, avant de se prononcer de nouveau.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Dans la mesure où la durée minimale de cinq ans ici retenue paraît offrir des garanties suffisantes et se révèle très supérieure à celle des parcours de consolidation des compétences (PCC), la commission a émis un avis favorable sur cet amendement, dont l’adoption est susceptible de contribuer à répondre aux besoins importants constatés dans ces territoires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Madame la sénatrice, vous proposez de dispenser du parcours de consolidation des compétences les praticiens disposant d’une autorisation d’exercice en application du dispositif dérogatoire mis en œuvre dans certains territoires d’outre-mer, justifiant de cinq années d’exercice et ayant réussi les EVC.
En effet, les praticiens relevant de ce dispositif doivent pouvoir bénéficier d’un traitement différencié. Durant ces années, les professionnels visés ici exercent dans des structures de santé et participent à dispenser des soins de qualité sur les territoires de la République. Ils ont par ailleurs pu acquérir une solide connaissance du système de santé français.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 225, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 18
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le parcours de consolidation de compétences mentionné aux cinquième, sixième et septième alinéas du présent I peut notamment être réalisé au sein des établissements de santé publics ou privés à but non lucratif de santé, des établissements sociaux ou médico-sociaux ou au sein des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 6323-1 et L. 6323-3. »
II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le parcours de consolidation de compétences mentionné au cinquième alinéa peut notamment être réalisé au sein des établissements de santé publics ou privés à but non lucratif de santé, des établissements sociaux ou médico-sociaux ou au sein des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 6323-1 et L. 6323-3. »
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le présent amendement vise à autoriser les Padhue à réaliser les parcours de consolidation des compétences (PCC) préalables à leur autorisation de plein exercice en ambulatoire au sein de maisons de santé pluriprofessionnelles ou de centres de santé.
Les Padhue pourront ainsi, durant leur parcours de consolidation des compétences, contribuer à améliorer l’accès aux soins dans certains territoires.
Les maisons de santé pluriprofessionnelles et les centres de santé constituent des structures d’exercice coordonné particulièrement intégrées, au sein desquelles les professionnels de santé partagent souvent une patientèle commune. Ils paraissent ainsi offrir le niveau d’encadrement indispensable à l’organisation de ces parcours de consolidation des compétences.
M. le président. L’amendement n° 215 rectifié, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Havet et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 18
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le parcours de consolidation de compétences mentionné aux cinquième, sixième et septième alinéas peut notamment être réalisé au sein des établissements de santé publics ou privés à but non lucratif de santé, des établissements sociaux ou médico-sociaux ou au sein des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 6323-1 et L. 6323-3. »
La parole est à M. Olivier Bitz.
M. Olivier Bitz. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 216 rectifié. En effet, ces deux amendements visent à élargir la liste des lieux dans lesquels peuvent être effectués les stages réalisés par les Padhue dans le cadre de leur parcours de consolidation des compétences.
Nous proposons que ces stages puissent être réalisés dans les établissements de santé publics ou privés à but non lucratif, comme c’est actuellement le cas, mais également, pour ce qui est des Padhue médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, dans les maisons de santé pluriprofessionnelles et les centres de santé, ainsi que, pour ce qui est des Padhue pharmaciens et sages-femmes, dans les officines.
M. le président. L’amendement n° 216 rectifié, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Havet et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le parcours de consolidation de compétences mentionné au cinquième alinéa peut notamment être réalisé au sein des établissements de santé publics ou privés à but non lucratif de santé, des établissements sociaux ou médico-sociaux ou au sein des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 6323-1 et L. 6323-3. »
Cet amendement est déjà défendu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 215 rectifié et 216 rectifié ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces deux amendements tendent, comme celui de la commission, à autoriser l’exercice en ambulatoire durant les parcours de consolidation des compétences. Le premier vise les médecins, les chirurgiens-dentistes et les sages-femmes, le second les pharmaciens.
Leurs dispositions ne s’écartent de celles de l’amendement de la commission que sur des aspects rédactionnels. J’en demande donc le retrait au profit de l’amendement n° 225, dont l’adoption répondrait au souhait, qui s’est exprimé tout à l’heure, de permettre aux Padhue d’exercer en ambulatoire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Nous avons tenu cette position depuis le début de nos débats en séance : élargir le périmètre des stages, c’est aussi permettre, à l’avenir, des installations dans d’autres territoires. Nous sommes donc cohérents avec ce que nous avons défendu.
Il s’agit de permettre, après validation des EVC, donc après une première phase de treize mois passés dans un établissement, l’élargissement du périmètre des terrains de stage. Ainsi nous donnons-nous une chance supplémentaire d’améliorer la réponse aux besoins de santé sur tous les territoires en créant cette faculté, qui n’est pas une obligation.
J’émets donc un avis favorable sur ces trois amendements.
M. le président. Monsieur Bitz, les amendements nos 215 rectifié et 216 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Olivier Bitz. Non, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 215 rectifié et 216 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix l’amendement n° 225.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 171 rectifié ter, présenté par Mmes Berthet, Muller-Bronn et Jacques, M. Favreau, Mmes Aeschlimann et Dumont et M. Sido, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- à la deuxième phrase, remplacer le mot : « Ils » par les mots : « Pour les établissements de santé, les lauréats »
La parole est à Mme Martine Berthet.
Mme Martine Berthet. Cet amendement a pour objet de préciser que seuls les lauréats qui souhaitent exercer en établissement de santé sont affectés sur un poste par décision du ministre de la santé ou, sur délégation, du directeur général du Centre national de gestion.
Une telle précision permettra de ne pas restreindre le bénéfice de ce dispositif aux établissements de santé, c’est-à-dire d’étendre cette autorisation d’exercice aux autres métiers de la pharmacie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Mes chers collègues, plusieurs amendements que la commission vous a invités à adopter visent à prévoir explicitement la possibilité d’une affectation en ambulatoire.
Le présent amendement apparaît par conséquent largement satisfait. J’en sollicite le retrait ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Berthet, l’amendement n° 171 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Martine Berthet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 171 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 164, présenté par M. Théophile, Mme Nadille, M. Bitz et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes autorisées à exercer en application des dispositions de l’article L. 4221-14-3 du code de la santé publique et justifiant de cinq années d’exercice dans les territoires mentionnés à ce même article, à condition d’être lauréates des épreuves de vérification des connaissances peuvent être dispensées du parcours de consolidation des compétences prévu au cinquième alinéa du présent article. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de mise en œuvre du présent alinéa. »
La parole est à Mme Solanges Nadille.
Mme Solanges Nadille. Les dispositions de cet amendement font pendant à celles de l’amendement n° 163 que je viens de présenter. Elles ont pour objet les pharmaciens visés à l’article L. 4221-14-3 du code de la santé publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Comme tout à l’heure pour l’amendement n° 163, et pour les mêmes raisons, j’émets un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 10 bis, modifié.
(L’article 10 bis est adopté.)
Après l’article 10 bis
M. le président. L’amendement n° 162, présenté par M. Théophile, Mme Nadille, M. Bitz et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 10 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 4131-5 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, l’année : « 2025 » est remplacée par l’année : « 2030 » et les mots : « et de la Martinique » sont remplacés par les mots : «, de la Martinique et de Mayotte » ;
b) Les deuxième à quatrième alinéas sont remplacés un alinéa ainsi rédigé :
« Une seule commission territoriale d’autorisation d’exercice est constituée pour la Guyane, la Martinique, la Guadeloupe, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. » ;
c) Au huitième alinéa, les mots : « des commissions territoriales constituées » sont remplacés par les mots « de la commission territoriale constituée » ;
2° L’article L. 4221-14-3 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, l’année : « 2025 » est remplacée par l’année : « 2030 » et les mots : « et de la Martinique » sont remplacés par les mots : «, de la Martinique et de Mayotte ».
b) Les deuxième à quatrième alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Une seule commission territoriale d’autorisation d’exercice est constituée pour la Guyane, pour la Martinique, pour la Guadeloupe, pour Mayotte et pour Saint-Pierre-et-Miquelon. » ;
c) Au huitième alinéa, les mots : « des commissions territoriales » sont remplacés par les mots : « de la commission territoriale ».
La parole est à Mme Solanges Nadille.
Mme Solanges Nadille. Cet amendement de mon collègue Dominique Théophile vise à faire évoluer le dispositif dérogatoire d’autorisation de plein exercice applicable aux Padhue souhaitant exercer en outre-mer.
Les directeurs généraux des agences régionales de santé de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique, ainsi que le représentant de l’État à Saint-Pierre-et-Miquelon, peuvent en effet, depuis 2020, autoriser des praticiens étrangers à exercer dans une structure de santé déterminée.
L’objet de cet amendement est triple.
Premièrement, la dérogation serait étendue à Mayotte, où les besoins sont particulièrement importants
Deuxièmement, compte tenu de son bilan positif et pour satisfaire les besoins en renforts médicaux, le dispositif existant serait prolongé pour cinq ans, c’est-à-dire jusqu’en 2030.
Troisièmement, et dans un souci de simplification des procédures administratives, serait créée une commission territoriale unique d’autorisation d’exercice pour la Guyane, la Martinique, la Guadeloupe, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Compte tenu des besoins importants constatés dans ces territoires, comme à Mayotte, et dans la mesure où elle a jugé que la fusion des deux commissions serait une mesure utile de simplification administrative, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. L’extension du dispositif à Mayotte au regard des besoins en ressources médicales qui s’y expriment, d’une part, et sa prolongation jusqu’en 2030, d’autre part, paraissent répondre utilement aux enjeux de ces territoires, s’agissant d’une mesure dont l’évaluation a démontré l’efficacité.
J’émets donc un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 10 bis.
L’amendement n° 145, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport examinant sous quelles conditions en termes de moyens humains et financiers, mais également en termes d’organisation, pourrait être rétablie l’obligation de permanence des soins sur l’ensemble du territoire.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 193, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 10 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la possibilité de déployer à titre expérimental des Écoles normales des métiers de la santé, véritables lycées spécialisés post-baccalauréat, permettant d’assurer la diversification sociale et territoriale des étudiants accédant aux filières de formation médicales et paramédicales. Au sein de l’Assemblée nationale, ce rapport fait l’objet d’un examen par les commissions des affaires sociales et des affaires culturelles et de l’éducation.
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Madame la rapporteure, je sais bien que la position constante de la commission est de ne pas demander de rapport au Gouvernement.
Mes chers collègues, ne trouvez-vous pas que la création d’écoles normales des métiers de la santé serait une bonne idée pour faire face à la pénurie de soignantes et de soignants et pour répondre à la nécessité d’accroître nos capacités de formation aux métiers de la santé et du secteur médico-social ? Nous avons besoin d’un effort massif, symbolique et significatif en matière de formation de soignantes et de soignants.
Il y a là, pour notre société, un enjeu majeur, comme l’était la formation d’institutrices et d’instituteurs sous la IIIe République. Mettons donc dans la formation des soignants les moyens qu’a pu mettre la IIIe République dans les écoles normales d’instituteurs !
Cette question mérite d’être étudiée par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Sans surprise, puisqu’il s’agit d’une demande de rapport, l’avis de la commission est défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 193.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 10 ter
(Supprimé)
Article 10 quater
(Supprimé)
Article 11
(Suppression maintenue)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Nous voilà parvenus au terme de l’examen d’un texte qui ne contenait pas les réponses attendues, ses dispositions n’étant pas à la hauteur des besoins des populations situées dans les territoires sous-dotés.
Ce texte avait été enrichi, modestement, mais utilement, par les nombreux amendements adoptés par l’Assemblée nationale. Deux jours de débats ici, le Gouvernement étant soutenu par la majorité sénatoriale – ou peut-être est-ce l’inverse… –, ont anéanti les quelques avancées obtenues pour leur substituer des dispositions certes utiles, mais insuffisantes, relatives aux moyens matériels, aux procédures de concertation et de consultation, aux CTS, aux CPTS et à l’exercice coordonné.
Il n’y a donc rien de suffisant dans ce texte, au regard des besoins en personnel médical qui sont les nôtres dès aujourd’hui ou qui le seront dès demain, et non dans trois ans, dans huit ans, dans onze ans, comme je l’ai entendu.
En conséquence, je ne voterai pas ce texte indigent.
Faut-il rappeler que, dans les territoires ruraux, l’espérance de vie est de deux ans inférieure à la moyenne nationale et que cette différence est liée en particulier aux difficultés d’accès à la médecine, comme l’a démontré une étude de l’Association des maires ruraux de France (AMRF) ? C’est inacceptable ! Que le principe d’un égal accès de tous aux services médicaux soit battu en brèche, au prix d’une moindre consommation par certains desdits services, c’est inacceptable !
Une telle situation entraîne une perte de chances face à la maladie qui représente 14 000 décès supplémentaires par an dans les territoires ruraux par rapport au chiffre qui serait attendu si l’accès à la médecine y était le même qu’ailleurs. C’est inacceptable !
Entendez le désarroi des populations abandonnées : il y a urgence à agir. Au secours, madame la ministre !
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Je regrette que l’examen en séance n’ait pas permis d’étoffer ce texte, qui manque selon nous et d’ambition et de mesures fortes pour lutter contre les déserts médicaux.
Nous avons pourtant tous souligné, comme mon collègue Patrice Joly, l’inquiétude et parfois même la désespérance de nos concitoyens, partout sur le territoire, face à la difficulté de trouver un médecin et à la longueur des délais de consultation.
Nous avons tous dénoncé les inégalités territoriales d’accès à la santé, qui conduisent trop souvent à renoncer aux soins. J’ajoute à ce tableau la détresse des élus, qui ne savent plus quoi répondre à leurs concitoyens.
Pour autant, toutes les mesures ambitieuses de ce texte ont été rejetées.
Nous avions proposé de réformer la permanence des soins ambulatoires et la permanence des soins en établissements de santé. Nous voulions lutter contre le mercenariat médical en limitant l’intérim médical. Nous voulions instaurer une certaine régulation à l’installation par le conventionnement sélectif. Nous souhaitions promouvoir – et nous défendons avec force – l’exercice coordonné de la médecine, qui est certainement l’avenir.
Ces mesures, madame la ministre, vous les contestez en les qualifiant de « contraignantes ». Peut-être le sont-elles, mais elles respectent un parfait équilibre entre la liberté des médecins et l’intérêt général.
Je veux dire de nouveau ce que j’ai dit hier à propos de la médecine dite libérale : en réalité, les médecins sont payés par de l’argent public, qui est celui de nos cotisations, celui de la sécurité sociale. En ce sens, la médecine est non pas un commerce, mais un service public.
Toutes nos propositions ont été écartées. Aussi, malgré quelques avancées que je ne nie pas, ce texte reste-t-il insuffisant : il n’aura pas de véritable portée.
Comment voterions-nous un texte qui n’a pas les moyens de ses ambitions ? Notre responsabilité d’élus nous oblige : il est de notre devoir de changer la vie des Français en mettant fin à cette situation intolérable, qui voit prospérer dans notre pays les inégalités de santé. Or ce texte ne permettra pas de répondre à une telle attente.
M. le président. La parole est à M. Jean Sol, pour explication de vote.
M. Jean Sol. Nous parvenons au terme de l’examen d’une proposition de loi qui a fait l’objet de vives critiques.
Le tour de force de ce texte est d’avoir fait du soignant le cœur du problème, alors qu’il devrait être une partie de la solution. Heureusement, le Sénat aura, au cours de la discussion de ce texte, remis du bon sens dans certaines des dispositions proposées, comme l’expérimentation des antennes d’officine ou la création de la fonction d’infirmier référent.
Nous avons par ailleurs soutenu la suppression des mesures du texte qui étaient superflues et inutilement irritantes à l’endroit des professionnels de santé.
En cet instant, je tiens à saluer le travail de notre rapporteure, Corinne Imbert, qui l’a accompli dans un temps contraint.
Trois mesures importantes sont à mettre à l’actif de notre assemblée.
L’article 1er a été réécrit, afin de simplifier, plutôt que de complexifier, le fonctionnement des conseils territoriaux de santé ; sa composition resserrée est ainsi centrée sur les acteurs du soin. L’article 2 quinquies, qui prévoyait la création d’un indicateur territorial de l’offre de soins, a été supprimé, tout comme l’article 3, qui rendait obligatoire l’adhésion des professionnels de santé aux communautés professionnelles territoriales de santé.
Le groupe Les Républicains votera en faveur de ce texte profondément modifié. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Burgoa. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Sur toutes les travées se sont exprimées – certes pas toujours pour les mêmes raisons – des critiques à l’encontre de cette proposition de loi. Ce qui ressort de nos débats, c’est que ce texte ne va en définitive satisfaire personne et ne va répondre à aucune des questions qui nous sont posées, ou presque.
Pour être parfaitement honnête, je me dois de faire mention de quelques timides mesures qui ne sont pas totalement inintéressantes. Mais, pour l’essentiel, les dispositions proposées relèvent de l’affichage ou sont d’ordre technocratique, loin, très loin, des enjeux d’accès aux soins que nous avons à traiter au moment où la situation se dégrade dangereusement dans le pays.
Ce sentiment a été renforcé par les péripéties que nous avons connues autour des articles 4 et 6. Bien que le ministre de la santé ait commencé par essayer de faire amende honorable sur la manière dont s’étaient engagées les choses, nous avons observé que l’improvisation continuait de régner quasiment jusqu’au bout…
Surtout, alors que les fractures sociales et territoriales s’accroissent, alors que 6 millions de Français n’ont plus de médecin – je pourrais gloser sur les indicateurs extrêmement inquiétants qui suscitent colère, désarroi et sentiment d’abandon chez nos concitoyens, que je vous prie d’écouter enfin –, il n’y a rien de vraiment sérieux, dans ce texte, pour s’attaquer tant à la situation de la médecine de ville qu’à celle de l’hôpital.
Dans ce contexte, on dit souvent qu’il est difficile, à l’Assemblée nationale, de trouver des majorités – l’usage répété du 49.3 est là pour nous le rappeler. En l’espèce, précisément, il s’est trouvé des majorités à l’Assemblée nationale pour tenter d’expérimenter et d’avancer vers des solutions à ces problèmes.
Malheureusement, le Sénat, qui se veut la chambre des territoires, n’a pas emboîté le pas à l’Assemblée nationale : je crains que les patients, mais aussi les médecins, qui souffrent eux-mêmes de la désertification médicale, ne se retrouvent tout aussi démunis demain qu’ils l’étaient ce soir.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je l’ai souligné lors de la discussion des amendements, nous n’avons pas les outils nécessaires pour affronter les enjeux de santé publique à venir.
Ce texte aurait pu être une première pierre de l’édifice – de la cathédrale, comme l’évoquait M. le ministre –, mais cela n’a pas été le cas, et c’est dommage. Même s’il y manquait la santé environnementale, la réduction des inégalités de santé et la santé communautaire, cette proposition de loi comprenait des mesures intéressantes, pertinentes et utiles pour un service public de la santé devant d’être repensé et rénové de toute urgence.
Or le texte que nous allons voter – quelle déception ! – n’a plus rien à voir avec celui qui a été déposé sur le bureau du Sénat.
Il s’agissait de refonder la démocratie sanitaire dans nos territoires, mais nous n’avons même pas eu l’occasion d’en débattre ! Nous voulions au moins inscrire cette notion dans la loi : malgré l’avis de sagesse du ministre Aurélien Rousseau, que je remercie, la commission nous a opposé un avis défavorable.
Nous voulions élargir les conseils territoriaux de santé aux acteurs de terrain, rendre publiques leurs réunions, y faire entrer la santé environnementale : nos efforts furent vains…
Nous voulions rendre aux conseils de surveillance des hôpitaux leurs pouvoirs de délibération sur la stratégie des établissements : avis défavorable de la commission !
Nous voulions tenter d’améliorer la territorialisation des politiques de santé, faciliter le lien entre médecine de ville et hôpital, en faisant entrer les représentants des hôpitaux dans les CTS et les CPTS : avis toujours défavorable de la commission !
Quant à faire du CTS le pilote du projet territorial de santé, cette proposition a été rejetée, malgré, encore une fois, un avis favorable du ministre.
Nous voulions répondre à la pénurie de professionnels de santé, réguler l’installation de médecins dans les zones sous-denses et développer la formation, grande absente de ce texte malgré notre proposition d’ouvrir des écoles normales des métiers de la santé. Rien de tout cela n’a été à l’ordre du jour !
C’est pire que dans le mythe de Sisyphe, car la santé est restée au pied de la montagne. En somme, la commission a fermé le débat sur l’ensemble des amendements, y compris sur ceux qui venaient de la majorité sénatoriale. Quel dommage et quelle ironie, alors que l’article 1er s’attachait à dynamiser la démocratie sanitaire ! (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Il faut conclure !
Mme Anne Souyris. Quel est l’intérêt de cette proposition de loi ?
M. le président. Il faut vraiment conclure !
Mme Anne Souyris. À cette question, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires…
M. Olivier Bitz. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous savions bien, lorsque nous avons entamé la discussion de ce texte, que ce ne serait pas le grand soir concernant l’accès aux soins sur nos territoires. Nous savions bien également qu’il ne s’agissait pas non plus d’un texte aux ambitions démesurées.
Au terme de cette discussion, comme nous nous y attendions, il n’y a effectivement pas eu de révolution sur le sujet.
Pour notre part, nous regrettons que le Sénat, qui représente les territoires, se tienne en retrait sur un certain nombre de propositions adoptées à l’Assemblée nationale.
Pour autant, et cela a été souligné sur toutes les travées, la situation est tellement dramatique sur l’ensemble des territoires que toutes les avancées sur ce sujet sont bonnes à prendre.
Je me félicite par ailleurs qu’un certain nombre de dispositifs proposés par mon groupe aient pu être adoptés. Je pense, notamment, aux dispositions concernant Mayotte ou les Padhue.
Le groupe RDPI a bien conscience que ce texte ne résoudra pas tous les problèmes. Quoi qu’il en soit, nous préférons nous concentrer sur ses aspects positifs, donc nous le voterons.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Comme en témoigne mon intervention dans la discussion générale, j’abordais cette proposition de loi avec beaucoup d’inquiétudes. J’avais en effet le sentiment que ce texte pouvait être explosif.
Néanmoins, force est de reconnaître que, grâce au travail de Mme la rapporteure et de la commission, les débats que nous avons menés dans l’hémicycle ont abouti à un équilibre plutôt satisfaisant ; je m’en félicite.
Je le répète, 87 % de notre territoire sont aujourd’hui un désert médical. Je suis persuadée que les mesures coercitives, demandées par une partie de l’hémicycle, n’auraient pas été bonnes. Ces mesures de coercition, de contrainte, de limitation et de régulation auraient, à mon sens, aggravé la situation des professionnels de santé ; elles auraient eu un effet négatif sur les territoires.
Je salue la qualité d’écoute et d’échange des deux ministres qui se sont succédé dans notre hémicycle et avec lesquels nous avons pu construire un texte équilibré.
À l’issue de nos travaux, nous enregistrons quelques avancées intéressantes. Je pense, notamment, aux mesures qui concernent les lycées en santé ; j’y suis extrêmement attachée.
Je regrette toutefois que la disposition sur les fonctionnaires territoriaux n’ait pas été acceptée et que les Padhue aient été retirés de ce texte – nous aurons l’occasion d’en reparler.
En revanche, les mesures d’attractivité sont à saluer. Dans sa grande majorité, le groupe RDSE votera en faveur de ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Lermytte. Comme toujours, l’examen d’un texte sur l’accès aux soins a suscité beaucoup de débats dans l’hémicycle.
Si nous partageons tous l’objectif de renforcer l’accès aux soins, nos avis divergent sur les moyens d’y parvenir et sur le niveau de contrainte et de régulation nécessaires. Sur ce dernier point, nous sommes favorables à des mesures d’équilibre. Le texte, dans sa version actuelle, va dans ce sens.
Il comporte, en outre, plusieurs avancées concrètes en matière d’accès aux soins : lutte contre le nomadisme médical, suppression de la majoration du ticket modérateur dans certains cas, élargissement du contrat d’engagement de service public aux étudiants, mesures en faveur des Padhue.
Même s’il ne marque évidemment pas la fin des efforts encore nombreux à mener en faveur de l’accès aux soins, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Doineau. Je souhaite tout d’abord saluer notre rapporteure, Corinne Imbert. Il n’a certainement pas été facile pour elle de travailler en si peu de temps sur un texte qui, vous le savez, ne suscitait pas mon enthousiasme…
Le groupe Union Centriste, dans sa majorité, votera cette proposition de loi.
Je remercie également les ministres de leurs interventions. Elles ont permis d’éclairer le débat sur un certain nombre de sujets.
Pour autant, à titre personnel, je dirai : hélas, trois fois hélas !
Hélas, d’abord, car ce texte est, à mon sens, quelque peu dirigé contre les professionnels de santé – son intitulé en témoigne, puisqu’il s’agit d’améliorer « l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels ». Nous étions pourtant bien contents de les trouver pendant la crise sanitaire ; nous sommes aussi bien contents de les trouver lorsqu’il s’agit de faire du cumul emploi-retraite et d’effectuer des heures supplémentaires ! Pourtant, on leur impose ce texte à la veille des négociations conventionnelles : c’est très malvenu…
Hélas, ensuite, pour nos concitoyens. En effet, cette proposition de loi est un peu pour eux un miroir aux alouettes. Ce texte n’est que mirage, il ne contient aucune mesure susceptible de sauver le pays des déserts médicaux et de résoudre les difficultés des Français en termes d’accès aux soins.
Hélas, enfin, pour le Parlement, car toutes ces dispositions auraient pu être examinées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nul besoin ici d’une proposition de loi hétéroclite, mal ficelée et comportant des mesures sans lien les unes avec les autres !
Ce débat aurait pu nous offrir l’occasion de formuler des propositions. Comme nous l’avons déploré hier soir, le remède est ici pire que le mal : hélas, hélas, hélas…
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je veux, au nom de la commission, remercier notre rapporteure, Corinne Imbert, grande spécialiste des sujets de santé, qui a réalisé un travail remarquable dans des conditions extrêmement difficiles. (Applaudissements.) Je salue par la même occasion les services du Sénat, qui l’ont accompagné avec efficacité.
Je salue également la qualité des échanges que nous avons menés avec Mme Firmin Le Bodo et M. Rousseau. Nous avons pu, au fur et à mesure des débats, discuter ensemble pour essayer de trouver des solutions. J’ai apprécié cette relation de travail privilégié.
Toutefois, il y a un « mais », notamment sur les enjeux de ce texte… Depuis deux jours, nous abordons de grandes problématiques : désertification, situation des professionnels, inquiétudes de nos populations et des élus locaux. Or, pour répondre à ces enjeux, le Gouvernement n’a pas présenté un projet de loi, mais s’est contenté de soutenir une proposition de loi issue des rangs de l’Assemblée nationale.
Ces sujets appelaient une mobilisation plus forte de la part du Gouvernement et des parlementaires. Pour notre part, nous aurions préféré examiner un projet de loi digne de ce nom, qui traite dans sa globalité – c’est bien l’objectif – les enjeux en matière de santé et de désertification sur le territoire.
Certes, cette proposition de loi comporte un certain nombre de dispositions intéressantes. Mais, une fois de plus, nous avons affaire à une litanie de mesures qui, par manque de vision globale, ne régleront qu’en partie, voire pas du tout, les problèmes auxquels le pays est confronté. L’enjeu était pourtant fondamental pour tous.
Pendant ces deux jours de débats, j’ai beaucoup parlé de confiance. Or je ne suis pas certain, malgré nos travaux communs, que ce texte parvienne à redonner de la confiance à nos citoyens, aux élus et aux professionnels en matière de santé publique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 18 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Pour l’adoption | 235 |
Contre | 80 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Je salue le travail de la commission et de Mme la rapporteure. Je me félicite également de la teneur de nos échanges : nous avons eu de vrais débats, particulièrement intéressants, sur des sujets qui nous concernent tous.
5
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 26 octobre 2023:
À dix heures trente, quatorze heures trente et le soir :
Deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Panama relatif à l’exercice d’activités professionnelles rémunérées par les membres des familles des agents des missions officielles de chaque État dans l’autre (procédure accélérée ; texte de la commission n° 41, 2023-2024) ;
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Macédoine du Nord portant application de l’accord du 18 septembre 2007 concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier, signé à Skopje le 5 juillet 2021 (texte de la commission n° 43, 2023-2024) ;
Projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Danemark pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et la prévention de l’évasion et de la fraude fiscales et la ratification de la convention entre la République française et la République hellénique pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et pour la prévention de l’évasion et de la fraude fiscales (procédure accélérée ; texte de la commission n° 36, 2023-2024)
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures d’urgence pour lutter contre l’inflation concernant les produits de grande consommation (texte de la commission n° 39, 2023-2024).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures quarante-cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER