Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme Monique Lubin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’accord national interprofessionnel de partage de la valeur dont nous examinons la transposition aujourd’hui, les partenaires sociaux ont renoué avec leur rôle premier, à savoir la négociation. Cet accord contient un certain nombre d’avancées au profit des salariés pour favoriser le partage de la valeur dans l’entreprise. Dont acte.
Nous sommes évidemment respectueux du dialogue social et des partenaires sociaux. Nous sommes également très soucieux de voir les salariés bénéficier des fruits de l’activité de l’entreprise. Néanmoins, et comme d’habitude, un bémol s’impose : ces négociations ont été extrêmement encadrées par le document d’orientation que le Gouvernement a communiqué en amont aux parties prenantes.
Monsieur le ministre, c’est là que le bât blesse. Ce cadrage a été tellement strict que vous avez exclu d’emblée toute négociation sur les salaires. En revanche, pour ce qui concerne le partage de la valeur, vous avez veillé à ce que soient rigoureusement pris en compte ces quatre items que sont la participation, l’intéressement, l’actionnariat et les primes.
Une fois l’accord conclu par les partenaires sociaux, le projet de loi issu des travaux de l’Assemblée nationale traduisait assez fidèlement dix de ses quinze articles. Il comportait quelques améliorations. Néanmoins, les amendements visant à sécuriser la non-substitution des primes aux salaires ou les amendements ayant pour objet les métiers repères, défendus par les forces de gauche, y ont été écartés par la majorité.
Puis, en commission au Sénat, la majorité de droite a appauvri le texte qui nous a été transmis. Elle a supprimé l’alinéa de l’article 1er prévoyant que, à défaut d’initiative de la partie patronale, la négociation s’engage dans les quinze jours suivant la demande d’une organisation syndicale représentative de la branche. Ce faisant, la majorité sénatoriale a manifesté sa préférence pour une prééminence de la partie patronale des partenaires sociaux.
La suppression de l’article 1er bis est plus symbolique encore. En effet, il transposait l’article 4 de l’ANI, en vertu duquel les branches professionnelles doivent engager des travaux sur la mixité de leurs métiers afin de favoriser une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans l’ensemble des métiers de leur champ. Il s’agissait aussi de permettre l’accompagnement des entreprises de leur secteur en la matière. Pour les droits des femmes, on repassera…
Chers collègues de la majorité, nous savons que vous soutenez les dispositifs de participation et d’intéressement ; mais, si vous le faites, c’est parce que, au fond, vous n’êtes pas franchement favorables à l’augmentation des salaires.
Aussi, nous nous étonnons. Vous avez rejeté une amélioration introduite dans le présent texte par nos collègues députés relative au calendrier de mise en œuvre de ces dispositifs.
L’Assemblée nationale a en effet avancé d’un an la date de l’entrée en vigueur de l’obligation de mettre en place au moins l’un des dispositifs de partage de la valeur pour les entreprises et pour les employeurs de l’économie sociale et solidaire. Pourquoi reporter ce dispositif à 2025 plutôt que de permettre aux travailleurs de bénéficier de ces améliorations dès 2024 ?
Nous espérons que la majorité du Sénat reviendra sur ces positions et qu’elle permettra à tout le moins de rétablir, au cours des débats, la version du texte issue de l’Assemblée nationale. Idéalement, il faudrait également que la chambre haute adopte des mesures afin qu’il ne soit pas possible de substituer les dispositifs de partage de la valeur aux salaires. Ce point est en effet l’une des lacunes de ce texte.
Par ailleurs, ce qu’un tel projet de loi révèle de la politique menée par l’exécutif à l’encontre de notre République sociale nous inquiète. Le Gouvernement procède en sous-main à un changement de paradigme, sous l’effet de glissements successifs défavorables aux travailleurs.
Monsieur le ministre, vos choix en témoignent : vous vous en êtes pris aux droits des chômeurs et des retraités, et vous ne voulez décidément pas parler d’augmentation des salaires. Pourtant, les syndicats, de la CFDT à la CGT en passant par la CFTC et FO, expriment depuis des mois leur volonté de voir s’ouvrir des négociations sur ce sujet.
Face à la hausse vertigineuse du coût de la vie, les augmentations de salaire sont en effet un impératif. Selon les données de l’Urssaf de septembre dernier, à la fin du mois de juin, le salaire mensuel par tête, primes comprises, a augmenté de 5 % en un an. Pendant ce temps, la hausse des prix s’est élevée à 4,4 %. L’économiste Christian Chavagneux souligne ainsi que, pendant de longs mois, les prix ont crû beaucoup plus rapidement que les salaires, l’année 2022 ayant été caractérisée par une forte perte de pouvoir d’achat.
Une négociation sur les salaires se justifie également par la nécessité, plus structurelle, de corriger le déséquilibre en défaveur des revenus du travail que dénonce notamment l’association Oxfam. Ainsi, dans un rapport qu’elle a publié au moment de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale, Oxfam souligne le « déséquilibre croissant du partage de la valeur en faveur des actionnaires et au détriment des travailleurs ». En dix ans, « entre 2011 et 2021, […] la dépense par salarié n’a augmenté que de 22 % tandis que les versements aux actionnaires ont augmenté de 57 % ».
Je parle bien des salaires, lesquels permettent de cotiser aussi bien pour la protection sociale que pour l’assurance chômage et la retraite, c’est-à-dire pour un salaire différé.
Monsieur le ministre, lors des débats sur la réforme des retraites, vous avez remis en question le contrat qui prévoit que l’on cotise non seulement pour payer la pension de ceux qui sont déjà à la retraite, mais également pour se constituer un salaire différé. Tel est le principe du système par répartition.
Or justement, monsieur le ministre, nous avons de grandes divergences d’appréciation avec vous sur l’importance et le rôle des cotisations sociales, lesquelles rendent possible ce salaire différé.
Partager la valeur au moyen de la participation, de l’intéressement, de l’actionnariat ou de primes, comme vous prétendez le faire au travers des dispositions de ce texte, c’est fragiliser l’accès des salariés à ce salaire différé, puisque cela revient à réduire la part des droits acquis en fonction de la rémunération ; c’est également appauvrir la sécurité sociale, puisque cela ne permet pas la croissance nécessaire de ses ressources.
Pour notre part, nous sommes strictement opposés à la désocialisation des rémunérations, en raison de notre attachement au salariat.
Un tel refus de laisser les partenaires sociaux négocier sur les salaires est le signe d’une mainmise sans cesse plus importante de l’État sur les négociations.
L’accord national interprofessionnel du 14 avril 2022 relatif à un paritarisme ambitieux et adapté aux enjeux d’un monde du travail en profonde mutation ne disait pas autre chose dans son article 5.1. Ce dernier acte qu’« avant tout projet de réforme du Gouvernement relevant du champ de l’article L. 1 du code du travail » est émise « une invitation préalable à la négociation entre partenaires sociaux, dans des conditions respectueuses de leurs prérogatives ».
Cependant, les organisations signalent que si « l’article L. 1 du code du travail prévoit la communication aux partenaires sociaux d’un document d’orientation […], sa mise en œuvre l’a progressivement transformé en document de cadrage ». Et de compléter : « Les signataires du présent accord tiennent à réaffirmer très clairement que le document d’orientation du Gouvernement doit laisser toute sa place à la négociation. Si le Gouvernement est fondé à définir l’objectif politique qui est poursuivi, il appartient aux partenaires sociaux de définir les voies et moyens permettant l’atteinte de ces objectifs, y compris en décidant d’aller au-delà du contenu du document d’orientation. »
Il semble bien que cette observation préoccupante n’ait en rien modifié la pratique du Gouvernement.
On sait pourtant le mal que les documents de cadrage font au dialogue entre les partenaires sociaux. Ainsi, ces mêmes partenaires ont vu leurs marges de manœuvre réduites dans le cadre des négociations sur l’assurance chômage : le contenu des lettres de cadrage, ainsi que leur date d’émission, fait de l’exécutif le maître des horloges, ce qui a des conséquences sur les échéances et les délais courants.
Pourtant, le dialogue social existe, et ce malgré les contraintes imposées par l’exécutif : les partenaires sociaux répondent présents, comme en témoigne la signature de l’ANI.
C’est pourquoi les bras nous en sont tombés lorsque, en amont de la tenue par le Gouvernement de sa conférence sociale sur les bas salaires, la Première ministre Élisabeth Borne a évoqué la création d’un haut conseil des rémunérations pour réfléchir, sur le temps long, à la progression des rémunérations et des parcours professionnels.
Il s’agit donc bien de créer une instance qui viendrait s’ajouter aux procédures déjà existantes et qui limiterait encore davantage les marges de manœuvre des partenaires sociaux, dans un domaine qui relève pourtant de leurs prérogatives.
En plus des négociations entre les partenaires sociaux, qui ont, par exemple, permis l’adoption de l’ANI relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, d’autres moyens existent – cela a été clairement démontré – pour permettre aux parties prenantes de se mobiliser, de se réunir et de s’exprimer sur la question des salaires, chaque jour – au Parlement comme ailleurs. J’en veux d’ailleurs pour preuve la proposition de résolution que nous avons déposée, sur l’initiative de Thierry Cozic, relative à la tenue d’un Grenelle des salaires.
Je conclurai en réaffirmant notre respect du dialogue social et des accords négociés par les syndicats patronaux et de salariés.
Vous l’avez compris, nous émettons sur ce texte en l’état un certain nombre de réserves. Aussi, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise
TITRE Ier
RENFORCER LE DIALOGUE SOCIAL SUR LES CLASSIFICATIONS
Article 1er
Une négociation en vue de l’examen de la nécessité de réviser les classifications en prenant en compte l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois, est ouverte avant le 31 décembre 2023 au sein des branches n’ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, sur l’article.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 1er, qui transpose l’article 3 de l’ANI, prévoit qu’« une négociation en vue de l’examen de la nécessité de réviser les classifications en prenant en compte l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois, est ouverte avant le 31 décembre 2023 au sein des branches n’ayant pas procédé à cet examen depuis plus de cinq ans ».
Cette mesure en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes par la négociation salariale va évidemment dans le bon sens, et l’on ne peut que s’en réjouir. Elle s’inscrit dans un mouvement global de prise en compte croissante, par le législateur, de la question de la mixité.
Toutefois, ce n’est évidemment pas suffisant. L’objet du présent projet de loi est le partage de la valeur ; mais l’objectif d’égalité professionnelle doit évidemment, à l’avenir, être accompagné d’autres mesures ambitieuses en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le monde professionnel.
Dans son rapport d’initiative citoyenne La Politique d’égalité entre les femmes et les hommes menée par l’État, publié en septembre dernier, la Cour des comptes déplore une « absence de politique globale continue et coordonnée » et des avancées trop lentes et trop limitées. Cela concerne évidemment l’égalité salariale, mais pas uniquement. La Cour relève en effet qu’il existe des causes « plus structurantes d’inégalités, comme la mixité des filières de formation ou des métiers, qui nécessitent des changements socioculturels en matière de responsabilités parentales, d’orientations professionnelles et de valorisation de certaines compétences ».
De fait, l’actualité a permis de placer la question de l’égalité professionnelle, abordée à l’article 1er du présent projet de loi, au cœur des débats. La Première ministre a en effet annoncé hier sa volonté de mettre en place un « nouvel index d’égalité professionnelle » qu’elle voudrait « plus ambitieux, plus transparent, plus fiable », et ce dans un délai de dix-huit mois. Le Sénat devra donc être attentif à la mise en œuvre de cet engagement.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 43 rectifié est présenté par Mmes Lubin et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et S. Robert, MM. Chantrel, Ros et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 57 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 80 rectifié est présenté par Mme Pantel, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère et MM. Fialaire, Gold, Grosvalet, Guérini, Guiol, Laouedj et Roux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après le mot :
classifications
insérer les mots :
et les métiers repères
La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 43 rectifié.
Mme Monique Lubin. Notre amendement vise à transposer dans le texte une demande des partenaires sociaux figurant à l’article 4 de l’accord national interprofessionnel, à savoir une meilleure prise en considération des inégalités salariales entre les femmes et les hommes.
La version actuelle de l’article 4 limite la portée des négociations à la seule révision des classifications professionnelles. Or l’analyse de cette échelle ne suffit pas à montrer la réalité des inégalités salariales entre les hommes et les femmes. Pour ce faire, il est nécessaire de s’intéresser aux rémunérations de chaque métier repère composant ces classifications professionnelles. C’est uniquement à cette échelle qu’il est possible d’appréhender la réalité des inégalités salariales entre les sexes.
Dans ces conditions, notre amendement vise à étendre la portée de la négociation en vue de l’examen de la nécessité de réviser les classifications aux métiers repères.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 57 rectifié.
Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 1er transpose l’article 4 de l’ANI, lequel prévoit que la valeur doit être équitablement partagée entre les femmes et les hommes afin de respecter les obligations d’égalité professionnelle. À l’heure actuelle, je le rappelle, les femmes sont toujours largement pénalisées par les inégalités salariales.
Cet amendement vise à rétablir dans la loi un outil, présent dans l’ANI, rendant plus effectifs les principes énoncés à l’article 1er. Il s’agit de fournir des données sur les métiers repères en vue des négociations prévues sur la révision des classifications. En effet, des inégalités importantes entre les femmes et les hommes peuvent se révéler à l’aide des métiers repères, quand elles apparaissent très atténuées par référence aux seules classifications professionnelles.
Les métiers repères permettent ainsi de mieux appréhender lesdites inégalités, en particulier en matière de discrimination salariale fondée sur le sexe, en distinguant les métiers émergents ou en transformation rapide.
La redéfinition des métiers repères est donc un enjeu en matière de rémunération, d’égalité et de déroulement de carrière.
Puisqu’il faut transposer l’ANI, faisons-le totalement ! Ce dernier précise justement que « les organisations signataires considèrent qu’il convient d’apprécier les niveaux de rémunération au regard non seulement des classifications, mais aussi des métiers repères ».
En conséquence, cet amendement est conforme à l’ANI : il tend à en rétablir un passage et non à en accentuer le déséquilibre !
Mme la présidente. La parole est à Mme Guylène Pantel, pour présenter l’amendement n° 80 rectifié.
Mme Guylène Pantel. L’article 4 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 2023 précise que les organisations signataires considèrent qu’il convient d’apprécier les niveaux de rémunération au regard non seulement des classifications, mais aussi des métiers repères.
Aussi cet amendement vise-t-il à rappeler la nécessité de réviser les métiers repères, qui sont tout aussi importants, notamment en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et d’évolution des rémunérations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces trois amendements visent à ajouter les métiers repères à la négociation de branche sur l’examen de la révision des classifications.
Chères collègues, vous avez raison : les enjeux des métiers repères sont bien évoqués à l’article 4 de l’accord national interprofessionnel.
Par ailleurs, je rappelle, pour ceux qui ne sont pas férus de droit du travail, que les métiers repères regroupent des emplois types ayant des finalités proches et s’articulant autour des mêmes domaines de compétences.
Les partenaires sociaux demandent que les branches lancent des travaux sur la mixité de leurs métiers et précisent que, dans ce cadre, « il convient d’apprécier les niveaux de rémunérations au regard non seulement des classifications, mais aussi des métiers repères. »
Toutefois, je rappelle que l’article 1er du projet de loi prévoit l’ouverture d’une négociation en vue de l’examen de la nécessité de réviser la classification avant le 31 décembre 2023. Il transpose l’article 3 de l’ANI.
Les enjeux de classification sont complexes, comme l’a rappelé précédemment M. le ministre, puisqu’ils intègrent un certain nombre d’indicateurs, dont les métiers repères. Rien n’empêchera les partenaires sociaux d’évoquer les métiers repères dans cette classification.
Ces amendements visent à restreindre le champ de la négociation. En outre, ils ne tendent pas à transposer de façon intégrale l’ANI, puisqu’ils n’ont pas trait à l’article 3 de l’ANI.
Dans ces conditions, la commission y est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis pour les mêmes raisons que celles qu’a avancées Mme la rapporteure.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il ne s’agit pas d’un détail, madame la rapporteure !
Les métiers repères permettront de montrer, à l’aune de différents critères, que, dans les métiers exclusivement féminins, les femmes développent les mêmes compétences que les hommes dans des métiers exclusivement masculins, dont le classement ne pose pas de problème.
Aussi les métiers repères sont-ils un outil absolument essentiel pour éviter que de mêmes compétences employées dans les métiers à dominante féminine soient moins reconnues que dans les métiers à dominante masculine.
Ce sujet soulève de nombreux contentieux. Or le dispositif proposé vous permettrait d’en éviter beaucoup d’autres !
Je ne pense pas que les classifications permettent de distinguer les compétences de l’ambulancier de celles de l’infirmière ou de l’aide-soignante. Aussi, les métiers repères, je le répète, sont un outil essentiel pour assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 43 rectifié, 57 rectifié et 80 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 42 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et S. Robert, MM. Chantrel, Ros et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Remplacer les mots :
en prenant en compte l’objectif d’égalité
par les mots :
, afin notamment d’assurer l’égalité
et la quatrième occurrence du mot :
de
par les mots :
d’améliorer la
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au deuxième alinéa de l’article L. 2241-15 du code du travail, les mots : « prennent en compte » sont remplacés par le mot : « assurent ».
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Malgré certaines avancées récentes, les inégalités professionnelles entre les femmes et les hommes persistent et entravent indéniablement le développement d’un monde professionnel égalitaire, et donc d’une société plus juste.
Les femmes sont les principales victimes de ces inégalités. En 2022, la newsletter féministe Les Glorieuses a estimé que, à partir du 4 novembre à neuf heures dix, les femmes travaillaient gratuitement. Elles se heurtent également, tout au long de leur carrière, à des inégalités d’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion.
Aussi, les négociations sur la révision des classifications doivent viser à assurer l’égalité professionnelle.
Cet amendement tend donc à modifier la rédaction frileuse de cet article 1er, adopté en commission des affaires sociales, en proposant une rédaction plus contraignante.
La commission a en partie justifié sa rédaction en rappelant que l’article L. 2241-15 du code du travail relatif au dialogue social de branche en matière de classifications prévoit que les « négociations prennent en compte l’objectif d’égalité professionnelle », sans devoir assurer ce même objectif.
Cet amendement vise donc à modifier à la fois cet article du code du travail et la rédaction de l’article 1er de ce projet de loi afin de les rendre plus contraignants. Il tend ainsi à rendre obligatoire la prise en compte, lors des négociations, des enjeux relatifs aux inégalités professionnelles entre les femmes et les hommes.
Mme la présidente. L’amendement n° 36, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
en prenant en compte l’objectif d’égalité
par les mots :
, afin notamment d’assurer l’égalité
et la quatrième occurrence du mot :
de
par les mots :
d’améliorer la
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Notre amendement vise à rétablir la rédaction adoptée à l’Assemblée nationale concernant les négociations de révision des classifications.
En effet, il était prévu dans ce texte que les négociations devaient « assurer l’égalité ». La rédaction de notre collègue rapporteure est plus faible, puisque les négociations doivent seulement « tenir compte de l’objectif d’égalité ».
Sur le fond, nous partageons la même volonté, mais nous considérons que cette rédaction n’est qu’un simple vœu pieux.
En effet, les inégalités entre les femmes et les hommes perdurent, alors même que l’égalité professionnelle figure depuis quarante ans dans la loi ! Selon l’Insee, en 2019, l’écart de salaires entre les hommes et les femmes s’est encore élevé à 22 %.
Les organisations syndicales ont demandé au Gouvernement une refonte de l’index de l’égalité professionnelle et une transposition dans la loi de la directive européenne relative à la transparence des rémunérations, dite Pay Transparency, qui vise à lutter contre la discrimination en matière de rémunérations et à contribuer à combler l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes.
Il nous semble en effet indispensable d’aller plus loin sur ce sujet. En attendant, nous proposons le passage d’une obligation de moyens à une obligation de résultat s’agissant de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. En commission, nous sommes revenus sur ces termes, mais nous n’avons fait que reprendre ceux de l’article L. 2241-15 du code du travail, dont les partenaires sociaux n’ont pas demandé la modification.
J’ai bien conscience que l’enjeu est de taille. Malheureusement, ce n’est pas en changeant les termes que nous obtiendrons davantage de résultats.
Nous nous devons de respecter le texte du code du travail et l’ANI ; tel est notre objectif. Ce n’est pas en modifiant cet article que nous parviendrons, seuls, à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Je respecte le code du travail : avec cet article, je reviens à sa rédaction initiale.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Je confirme – et cela vaut réponse à Mme la sénatrice Marie-Do Aeschlimann – que Mme la Première ministre et moi-même nous sommes engagés hier avec les partenaires sociaux à transposer la directive européenne mentionnée par Mme Silvani dans un délai maximum de dix-huit mois, alors que la loi nous permettrait d’attendre jusqu’en 2026.
Nous profiterons de cette transposition pour faire un bilan de l’index de l’égalité professionnelle et pour y apporter des améliorations.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 37 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 44 rectifié est présenté par Mmes Lubin et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol, Rossignol et S. Robert, MM. Chantrel, Ros et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 90 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
À défaut d’initiative de la partie patronale, la négociation s’engage dans un délai de quinze jours à compter de la demande d’une organisation syndicale représentative dans la branche.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 37.