Mme le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, auteure de la question n° 734, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, le 23 mai 2023, vous avez annoncé la suppression de 500 emplois et la cession de 20 % de l’activité du fret de la SNCF à la concurrence dont, semble-t-il, la ligne du train des primeurs Perpignan-Rungis.
Comme vous le savez, cette ligne est unique en France. Sa suppression en 2019 avait été vécue comme une provocation. Grâce à la mobilisation des élus, des usagers et des syndicalistes, notamment dans le Val-de-Marne, elle a été relancée en octobre 2021. Or je viens d’apprendre qu’elle était de nouveau arrêtée du fait de problèmes liés aux wagons réfrigérés. Le sursis aura été de courte durée.
Maintenir la ligne Perpignan-Rungis dans le giron de Fret SNCF est pourtant une nécessité économique, sociale et écologique : on parle tout de même de 25 000 camions en moins sur les routes.
Cette ligne est cruciale, non seulement pour réduire les émissions de CO2, mais aussi pour assurer la sécurité alimentaire de la population d’Île-de-France : elle peut transporter l’équivalent de presque la moitié de sa consommation de fruits et de légumes frais par an.
Par ailleurs, si elle était prolongée, cette ligne pourrait relier Barcelone à Anvers et l’on en tirerait encore plus d’avantages, y compris pécuniaires.
Nous avions été nombreux à dénoncer les dangers de l’arrêt de cette ligne. L’histoire nous a donné raison et elle a été rétablie. Alors qu’elle est de nouveau suspendue, que comptez-vous faire pour la relancer de manière pérenne ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Cohen, le Gouvernement agit en faveur du fret ferroviaire : permettez-moi, pour vous en convaincre, de vous rappeler quelques éléments de contexte.
Comme l’a annoncé mon collègue chargé des transports, les aides à l’exploitation augmenteront de 30 millions d’euros à partir de 2025 – elles concerneront directement l’activité de fret ferroviaire –, de sorte que leur montant atteindra un niveau sans précédent de 330 millions d’euros. Elles seront pérennisées jusqu’en 2030 pour donner de la visibilité aux entreprises.
Par ailleurs, 4 milliards d’euros seront investis dans les infrastructures de fret ferroviaire sur la période allant de 2023 à 2032, ce qui correspond, me semble-t-il, aux attentes du secteur.
Pour ce qui concerne Fret SNCF, l’État fait tout pour éviter le pire scénario, à savoir l’obligation pour l’opérateur de rembourser près de 5 milliards d’euros. Une telle décision conduirait sa liquidation immédiate, supprimerait de nombreux emplois et jetterait plus d’un million de camions supplémentaires sur les routes chaque année.
Plutôt que de prendre le risque de voir disparaître Fret SNCF, la solution privilégiée est de mener une transformation de l’entreprise, qui, à terme, permettra d’écarter tout risque de remboursement de ces 5 milliards d’euros.
Cette solution garantit le respect des trois lignes rouges que le Gouvernement s’était fixées, à savoir l’absence de tout licenciement, l’absence de privatisation, puisque le groupe SNCF conservera la majorité du capital, et l’absence de report modal sur la route.
Quant au cas spécifique du service Perpignan-Rungis, qui fait partie des contrats que Fret SNCF ne pourrait plus opérer, l’État lancera très prochainement un nouvel appel à manifestation d’intérêt pour identifier un repreneur. Le train des primeurs, qui a été sauvé par l’État en 2021, continuera de rouler quelle que soit la nouvelle étiquette de l’opérateur.
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.
Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, il faut déclarer la ligne Perpignan-Rungis d’intérêt général : c’est une urgence.
Si vous souhaitez relancer le fret ferroviaire, écoutez le Sénat : selon notre rapport d’information de 2021, il faudrait investir 1 milliard d’euros par an dans le réseau.
Écoutez aussi nos collègues députés, qui ont approuvé le principe d’une commission d’enquête relative à la libéralisation du fret ferroviaire et ses conséquences pour l’avenir, à la demande du groupe communiste de l’Assemblée nationale : cette libéralisation serait une catastrophe.
aménagement de la gare de bry-villiers-champigny-grand paris express
Mme le président. La parole est à M. Laurent Lafon, auteur de la question n° 774, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.
M. Laurent Lafon. Madame la ministre, le chantier de la nouvelle gare d’interconnexion Bry-Villiers-Champigny du Grand Paris Express est menacé d’un nouveau report, ce qui renvoie les usagers et les élus locaux à l’horizon de 2030 pour toute perspective d’ouverture. La gestion de SNCF Réseau a été mise en cause, l’opérateur ayant pris la décision de « mutualiser la conduite de ces travaux sur des périodes triennales », durant lesquelles le chantier de la nouvelle gare d’interconnexion sera nécessairement affecté, perturbé, voire mis à l’arrêt.
Une telle décision, prise unilatéralement par SNCF Réseau, sans aucune concertation avec Île-de-France Mobilités ou les maires des communes concernées, n’est pas acceptable, alors même que les financements sont au rendez-vous.
Le non-respect des échéances fixées par la commande publique pour une livraison attendue en 2027, du fait d’un premier report de deux ans, aura de lourdes conséquences pour nos territoires. En effet, le projet d’interconnexion n’a de sens que s’il comprend l’ensemble des offres de transports, en particulier l’interconnexion entre la ligne 15 du Grand Paris Express, le RER E et la ligne P du Transilien. J’ajoute que les 1,5 million de voyageurs quotidiens de la ligne 15 passeront par la gare de Villiers-sur-Marne dès 2025.
Un tel report remettrait en cause l’accès facilité à l’emploi, à la santé et à l’enseignement. Il affecterait en effet un pôle majeur situé à proximité de l’interconnexion, qui est l’un des principaux projets portés par la métropole du Grand Paris, avec 6 000 emplois à la clé, un palais des congrès, le centre d’exploitation de Champigny dédié à l’entretien et à la réparation d’une partie des trains de la ligne 15, le siège des Compagnons du tour de France ou encore le futur pôle de l’image.
Cette décision aurait aussi des conséquences en matière environnementale, car il serait illusoire de penser atteindre nos objectifs de diminution du nombre de véhicules sur l’autoroute A4. Les usagers en provenance de Seine-et-Marne, qui auraient dû s’arrêter à Villiers-sur-Marne pour prendre leur correspondance, devront poursuivre leur route en voiture. On irait ainsi à rebours d’une politique sérieuse et exigeante de réduction de notre empreinte carbone et de diminution de la pollution atmosphérique, par la mise en place de zones à faibles émissions (ZFE), rendues obligatoires avant le 31 décembre 2024.
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le président Lafon, la nouvelle gare SNCF de Bry-Villiers-Champigny permettra de se déplacer de banlieue à banlieue sans passer par le centre de Paris, en connectant le RER E, la ligne P et le Grand Paris Express via la ligne 15 sud et la ligne de bus Altival, qui doit relier Chennevières-sur-Marne et Noisy-le-Grand.
Sa mise en service avait été décalée à l’horizon 2027, mais de nombreuses contraintes techniques conduisent SNCF Réseau, maître d’ouvrage du projet, à réexaminer ce calendrier prévisionnel.
Tout d’abord, il faut s’assurer de la disponibilité des ressources humaines, en particulier d’une main-d’œuvre qualifiée par ailleurs très sollicitée compte tenu de l’accumulation de travaux prévus sur l’axe – je pense notamment au projet Est-Ouest liaison express (Eole) – et plus globalement à l’échelle de la région d’Île-de-France.
Ensuite, il faut mesurer l’acceptabilité du volume des interruptions temporaires de circulation, nécessaires à la réalisation de ce projet, dans le calendrier prévu. Par leurs incidences, ces travaux peuvent avoir des conséquences lourdes sur le quotidien des usagers.
En tout état de cause, le financement du projet n’est pas remis en question – vous l’avez dit et c’est bien heureux. Le comité axe Est du réseau francilien, qui s’est réuni hier, lundi 3 juillet, et auquel vous étiez d’ailleurs associé comme de nombreux élus, a permis de présenter le détail de cette situation et de nouer un dialogue entre, d’une part, la SNCF et Île-de-France Mobilités et, de l’autre, les élus.
Le Gouvernement est attentif à ce qu’un équilibre soit trouvé entre la sécurisation des transports du quotidien et la nécessité d’améliorer rapidement et efficacement l’offre structurelle, grâce à l’interconnexion de la gare de Bry-Villiers-Champigny.
accompagnement des communes pour la réhabilitation des ponts
Mme le président. La parole est à M. Denis Bouad, auteur de la question n° 745, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Denis Bouad. En 2019, un rapport d’information sénatorial préconisait un plan Marshall pour sécuriser nos ouvrages d’art. Il suggérait notamment de créer un fonds d’aide aux collectivités territoriales à hauteur de 130 millions d’euros par an pendant dix ans.
La mise en œuvre du programme national Ponts, piloté par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), s’inscrit dans cette logique. Toutefois, avec 40 millions d’euros engagés sur trois ans, on est très loin des recommandations émises par le Sénat. Ce montant reste insuffisant, ne serait-ce que pour enrayer la spirale de dégradation de nos ponts.
Madame la ministre, afin d’illustrer cette situation par un exemple de terrain, je citerai le cas de Molières-sur-Cèze, dans le Gard.
Cette commune s’est portée candidate au programme national et a ainsi bénéficié d’un diagnostic gratuit du Cerema portant sur une passerelle piétonne. L’étude a remis en cause la sécurité de cette passerelle, compte tenu de l’érosion de ses piliers.
La commune a alors fermé ladite passerelle au public. Elle s’est logiquement rapprochée des services de l’État afin de connaître les aides disponibles pour sécuriser l’ouvrage. On lui a clairement indiqué qu’elle ne pouvait prétendre à aucune aide de l’État.
Molières-sur-Cèze est une ancienne commune minière de 1 200 habitants, qui connaît un très fort niveau de précarité. Qu’il s’agisse de la sécurisation des ruisseaux couverts, de la rénovation des réseaux d’eau potable ou de son fort niveau d’endettement, cette collectivité est confrontée à de nombreux défis et ses moyens financiers sont extrêmement limités. Il va de soi qu’avec une capacité d’autofinancement quasi nulle elle n’est pas en mesure de réaliser les travaux nécessaires à la sécurisation de cette passerelle.
L’État envisage-t-il d’engager les moyens financiers nécessaires à la sécurisation des ouvrages d’art de nos communes ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Bouad, vous attirez notre attention sur les moyens accordés par l’État à la rénovation des ponts, qui représentent un sujet essentiel dans nos communes rurales.
Comme vous l’avez rappelé, dès 2020, le Gouvernement a mobilisé une enveloppe de 40 millions d’euros pour accompagner les collectivités dans la connaissance et l’entretien de leurs ouvrages. Grâce à l’appui du Cerema, plus de 45 000 ouvrages ont ainsi été recensés. Dès 2021, 11 540 communes ont pu être accompagnées pour réaliser un carnet de santé de leurs ouvrages et ont bénéficié d’un soutien en ingénierie.
Au regard des besoins et du succès de cette édition, nous avons, avec mes collègues Christophe Béchu et Clément Beaune, annoncé que le programme national Ponts bénéficierait d’un abondement de 10 millions d’euros supplémentaires pour poursuivre son action. Ainsi, 20 000 communes de moins de 10 000 habitants, dont le potentiel fiscal est inférieur à 3 millions d’euros, seront éligibles au programme national Ponts 2 (PNP 2), couvrant les années 2023 à 2025. Les 4 000 premières communes à se porter candidates seront retenues.
En complément, le Gouvernement mobilisera une aide au financement des travaux pour les communes éligibles aux deux vagues du programme. Ce dispositif sera présenté dans les jours ou les semaines à venir.
Je puis vous assurer que le Gouvernement reste attentif à ce sujet central pour les communes, notamment rurales : il s’agit là d’un enjeu d’accessibilité, de patrimoine et de sécurité.
délais pour l’obtention des cartes d’identité et passeports
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, auteur de la question n° 746, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Jean-Claude Anglars. Madame la ministre, en ce début juillet, les jeunes ont besoin d’un titre d’identité à de nombreuses occasions, que ce soit pour passer un examen, effectuer un déplacement professionnel ou tout simplement partir en vacances. Pourtant, depuis déjà deux ans, les démarches pour obtenir une carte d’identité ou un passeport s’apparentent à un parcours du combattant. Cette situation, qui dure, n’est pas acceptable pour nos concitoyens.
Vous me répondrez que, après la crise du covid-19, il a fallu du temps pour absorber les demandes de renouvellement qui s’étaient accumulées. Sans doute énumérerez-vous aussi les mesures prises par le Gouvernement.
Je ne les conteste pas, mais je constate, à l’instar des Français, que la situation ne s’améliore en rien. Certaines mesures prises sont tout simplement insatisfaisantes, comme l’organisation des rendez-vous dans les territoires ruraux, où l’on doit parcourir plusieurs dizaines de kilomètres pour se rendre à l’antenne des services de l’état civil. D’autres sont insuffisantes, comme la mise à disposition d’équipements supplémentaires, qui ne peuvent évidemment pas remplacer le contact humain.
L’absence d’amélioration de la situation, que nos concitoyens subissent depuis deux ans, ne peut que remettre en cause à leurs yeux l’efficacité de l’action de l’État. Alors que les services publics de proximité sont un enjeu dont nous débattons régulièrement, le Gouvernement doit se saisir urgemment de ce problème.
Cette semaine encore, une habitante de Saint-Côme-d’Olt, dans la vallée du Lot, en Aveyron, m’indiquait que le délai pour son premier rendez-vous en mairie – ce n’est d’ailleurs pas celle de son lieu de résidence – était supérieur à trois mois.
Au-delà des mesures déjà prises, quelles solutions le Gouvernement compte-t-il proposer pour réduire drastiquement les délais d’attente des Français ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Anglars, face à la hausse massive du nombre des demandes de titres d’identité et face à l’allongement des délais en mairie, le Gouvernement et les communes ont accompli d’importants efforts depuis le printemps 2022.
Depuis la mi-janvier 2023, avec les services de Beauvau, les préfets et les collectivités territoriales, nous travaillons d’arrache-pied.
Je ne souscris pas du tout pas à votre discours quand vous affirmez que rien ne change. Au contraire, on constate une réelle amélioration : les délais sont passés de soixante-dix jours au 15 janvier dernier à quarante jours aujourd’hui et ils ne seront plus que de trente jours à la fin de ce mois. Les délais d’attente en mairie sont donc largement réduits.
Laissez-moi revenir en quelques mots sur tous les moyens qui ont été déployés.
Je salue bien sûr le travail, l’investissement et la solidarité des collectivités territoriales.
Le 27 mars dernier, Mme la Première ministre a lancé un nouveau plan d’urgence, grâce auquel les moyens dédiés à cette question ont été portés de 45 à 100 millions d’euros. Il doit permettre un retour à des conditions normales, pour nos concitoyens, avant la fin de l’été. Nous sommes sur le chemin. J’examinerai en détail la situation du Lot dès que je serai de retour au ministère.
Ce nouveau plan d’urgence s’accompagne d’un soutien financier significatif. Près de 700 dispositifs supplémentaires de recueil de dossiers ont été déployés depuis le début de 2023. En outre, des contrats urgence titres (CUT) ont été conclus avec des communes qui se sont portées volontaires pour augmenter leur capacité de rendez-vous de plus de 20 % aux mois de mai et juin.
L’État accompagne financièrement les communes qui s’engagent grâce à la dotation pour les titres sécurisés (DTS), dont le montant a, récemment encore, augmenté très significativement.
Des opérations dites coup de poing, consistant à proposer aux communes des dispositifs de recueil temporaires, sont également menées dans trente et une d’entre elles, réparties dans toute la France, afin d’accueillir les usagers de manière plus massive à la veille des congés estivaux.
Enfin, pour maintenir des délais de traitement…
Mme le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. … adaptés à la cible, les effectifs des services d’instruction de l’État ont été renforcés à hauteur de 325 agents pour 2023.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour la réplique.
M. Jean-Claude Anglars. Madame la ministre, j’ai bien noté les délais que vous indiquez : les problèmes devraient être réglés cet été.
Puisque vous souhaitez donner un « coup de poing », faites-le dans l’Aveyron (Sourires.), où vous pourrez constater que les délais sont encore très longs.
insuffisance du nombre d’inspecteurs du permis de conduire
Mme le président. La parole est à Mme Anne Ventalon, auteure de la question n° 777, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Anne Ventalon. Madame la ministre, si 41 % des jeunes de 18 à 24 ans habitant dans l’agglomération parisienne disposent du permis B, le chiffre est de 85 % en milieu rural. Un tel écart s’explique tout simplement par le fait que, dans les territoires ruraux, l’usage de la voiture est indispensable à toute vie sociale et familiale. Pour les jeunes, l’obtention du permis de conduire y constitue un prérequis à l’insertion professionnelle et à la formation.
Toutefois, le faible nombre d’inspecteurs du permis de conduire rend le passage de l’examen long et compliqué.
Prise d’assaut, la plateforme RDV permis distille les dates d’examen au compte-gouttes, quand elle ne dysfonctionne pas, congestionnée qu’elle est par l’afflux de demandes. Quant aux candidats recalés, ils doivent attendre trois à six mois avant d’obtenir une nouvelle convocation.
Il y a donc une pénurie d’inspecteurs du permis de conduire. En Ardèche, ces professionnels ne sont que 5 pour quelque 6 200 candidats.
Indépendamment du débat auquel le sujet donne lieu, l’abaissement à 17 ans de l’âge minimal requis pour l’apprentissage de la conduite aggravera mécaniquement la crise actuelle, dans la mesure où une nouvelle classe d’âge sera appelée à passer cet examen. Les dispositions de la loi visant à faciliter le passage et l’obtention de l’examen du permis de conduire, qui vient d’être promulguée, sont certes salutaires ; mais elles resteront insuffisantes si elles ne s’accompagnent pas d’une véritable augmentation du nombre des créneaux d’examen.
Madame la ministre, le Gouvernement prévoit-il d’augmenter sensiblement le nombre d’inspecteurs du permis de conduire ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Ventalon, pour remédier à l’augmentation des délais de passage de l’examen pratique du permis de conduire, plusieurs mesures ont d’ores et déjà été mises en œuvre.
Premièrement, le périmètre des agents habilités à faire passer les examens a été élargi. Deuxièmement, deux cohortes d’agents contractuels du groupe La Poste ont été recrutées, soit soixante personnes depuis 2021, et une troisième cohorte complétera le dispositif de recrutement. Troisièmement, les différents mécanismes d’incitation ont permis d’accroître l’offre de créneaux d’examen : le nombre de créneaux supplémentaires dépasse désormais les 100 000 chaque année. Quatrièmement, les inspecteurs retraités volontaires peuvent être sollicités localement pour réaliser des examens du permis de conduire.
De plus, la décision d’organiser le recrutement de 100 inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière supplémentaires a été prise pour la période allant de 2023 à 2026.
Les recrutements menés en 2023 permettront de déployer dans les départements plus de 50 inspecteurs du permis de conduire, qui s’ajouteront aux effectifs actuels. Ils seront appuyés par les 26 examinateurs supplémentaires en cours de formation.
Dans votre département, l’effectif cible d’inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière était en effet de 5. Le seuil des formateurs, qui correspond au ratio entre le nombre de candidats à examiner et le nombre de formateurs est de 5,3 pour le mois de juin, ce qui traduit une offre de places en adéquation avec les capacités de formation des auto-écoles.
Cela étant, je vais regarder de plus près la situation de l’Ardèche. Vous le soulignez avec raison : l’arrivée d’une nouvelle classe d’âge augmentera le nombre des demandeurs. Nous devons poursuivre l’amélioration des conditions de passage de l’épreuve pratique du permis de conduire à l’aune de cette probable évolution.
Mme le président. La parole est à Mme Anne Ventalon, pour la réplique.
Mme Anne Ventalon. Madame la ministre, je vous remercie de ces annonces et de l’attention que vous voudrez bien porter à la situation particulière de l’Ardèche.
Les gérants d’auto-école se trouvent dans une situation critique : ils ne peuvent pas répondre aux besoins de leurs élèves, même s’ils mesurent l’importance de ce sésame rose, gage d’émancipation personnelle et professionnelle.
disparités dans la répartition des effectifs de magistrats et de greffiers portant préjudice aux juridictions de la cour d’appel d’orléans
Mme le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question n° 667, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la ministre, j’appelle votre attention sur les disparités existant sur le territoire national quant au nombre de magistrats et autres personnels affectés aux différentes juridictions, eu égard aux populations de leur ressort.
Un rapport général des États généraux de la justice indique ainsi aux pages 22 et 23 que, faute de répondre à des paramètres explicites, l’allocation territoriale des effectifs « suscite des interrogations sur les disparités constatées entre l’évolution de l’activité des juridictions et la répartition des moyens ».
Le même rapport précise que la ventilation des effectifs entre siège, parquet et greffe par nature de juridiction pour 100 000 habitants et selon le flux d’activité met en lumière des « déséquilibres significatifs non explicables et en tout cas non expliqués par l’administration centrale dans la répartition des ressources entre les différents ressorts des cours d’appel ».
Un tableau permet de constater quelles sont les juridictions bien dotées, moins bien dotées ou encore moins bien dotées. Or il se trouve que la cour d’appel d’Orléans arrive en dernière position ; c’est donc la cour d’appel qui dispose du moins de postes de magistrats du siège et du parquet, de greffiers et de moyens.
Un rééquilibrage paraît bien entendu nécessaire : la cour d’appel d’Orléans et les juridictions qui en dépendent doivent être dotées des effectifs et des moyens dont elles ont besoin.
Je vous remercie, madame la ministre, des réponses que vous pourrez m’apporter.
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée, à qui je souhaite la bienvenue.
Mme Isabelle Rome, ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances. Monsieur le sénateur, le plan particulièrement ambitieux que nous mettons en œuvre prouve que le renforcement des effectifs des juridictions est au cœur de nos préoccupations.
Grâce au projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, voté par le Sénat le mois dernier – hélas sans votre soutien ! –, 10 000 emplois supplémentaires viendront renforcer, en l’espace de cinq ans, non seulement les services judiciaires, mais aussi l’administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse.
Pour ce qui concerne les effectifs, nous allons créer au moins 1 500 postes de magistrat et 1 500 postes de greffier en cinq ans. Au cours de cette période, nous allons recruter autant qu’au cours des vingt dernières années !
La répartition de ces renforts entre les différentes cours d’appel est un sujet de premier plan. Elle prendra en compte une pluralité de facteurs, comme, bien sûr, l’évolution démographique, l’activité des juridictions dans le temps long ou encore l’état des stocks.
Le Gouvernement engagera une gestion rigoureuse des moyens supplémentaires que la représentation nationale s’apprête à allouer à l’institution judiciaire.
Enfin, sans attendre le vote du projet de loi d’orientation et de programmation, nous avons commencé à résorber la vacance grâce au budget très important voté pour l’année 2023.
Ainsi, pour l’ensemble du ressort de la cour d’appel d’Orléans, nous ne compterons plus que cinq postes vacants au 1er septembre 2023, contre huit au 1er septembre 2022, pour un effectif total de 159 magistrats.
Même si vous n’avez pas souhaité soutenir ces efforts historiques, vous pouvez constater que nous avançons dans le bon sens en suivant une méthode claire : réduction des postes vacants, puis augmentation des effectifs. D’ici à 2027, l’ensemble des juridictions françaises auront été renforcées dans des proportions considérables.