M. Max Brisson. J’invite Mme la ministre à se rendre au Pays basque. Elle y verra une intercommunalité XXL et des pôles de proximité. Elle constatera qu’il est nécessaire de renforcer ces derniers afin de permettre aux cent cinquante-huit maires de cette intercommunalité de continuer d’avoir à l’esprit qu’ils comptent pour la République. (M. Philippe Bas applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. Madame la ministre, à titre liminaire, je souhaite rappeler le dévouement inlassable des élus locaux, qui sont au service de nos concitoyens et qui assurent le bon fonctionnement de nos territoires. Symbolisant l’écoute et la proximité, ils œuvrent dans l’intérêt général et agissent pour la République avec courage et désintéressement.
La dotation particulière relative aux conditions d’exercice des mandats locaux (DPEL) a été créée pour assurer aux petites communes rurales les moyens nécessaires à la mise en œuvre de la loi du 3 février 1992 relative aux conditions d’exercice des mandats locaux. Elle est destinée à compenser plus particulièrement les dépenses obligatoires entraînées par les autorisations d’absence et les frais de formation dont bénéficient les élus locaux, ainsi que la revalorisation des indemnités des maires et des adjoints.
La DPEL est attribuée aux communes remplissant deux conditions cumulatives : une population de moins de 1 000 habitants et un potentiel financier par habitant inférieur au potentiel financier par habitant moyen des communes de moins de 1 000 habitants, majoré de 25 %.
Or, dans de nombreuses petites communes rurales, la moindre variation du potentiel financier peut avoir de lourdes incidences et, entre autres, les priver de cette dotation.
Ce critère apparaît parfaitement inadapté aux petites communes. Il faut le rappeler : dans notre République, la démocratie a un coût. Il paraît donc primordial que toutes les petites communes, notamment celles de 500 habitants ou moins, puissent disposer de cette DPEL.
Aussi, madame la ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre afin qu’aucune commune de moins de 500 habitants ne soit exclue du champ des bénéficiaires de la DPEL ? Il s’agit de remédier à une véritable iniquité.
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Menonville, je ne peux que souscrire à vos propos, lorsque vous évoquez le courage et le désintéressement des élus locaux, qui œuvrent tout simplement pour notre République. Nous devons leur adresser un grand merci et je pense que tous les sénateurs sont solidaires de vos propos.
Aux deux critères que vous avez très clairement rappelés, vous souhaitez en ajouter un afin de garantir cette dotation particulière « élu local » à toutes les communes de moins de 500 habitants, et ce quel que soit leur niveau de richesse.
À vrai dire, cette proposition avait été émise lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023. À l’époque, nous considérions – nous le considérons toujours, mais nous pourrons poursuivre ce débat – que garantir la DPEL aux communes de moins de 500 habitants, quel que soit leur potentiel financier, serait source d’iniquité.
En outre, pourquoi un seuil à 500 habitants et pas à 600 ou à 1 000, puisque l’un des deux critères actuels est cette limite de 1 000 habitants ?
Je veux rappeler quelques chiffres. Le prélèvement sur recettes prévu par la loi de finances initiale pour 2023 au titre de la DPEL s’élève à 108 millions d’euros, soit une augmentation de 7,5 millions par rapport à 2022. En outre, les montants des DPEL ont été mis en ligne dès le 31 mars, en même temps que ceux de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
Nous pourrons rouvrir ce débat si vous le souhaitez, mais l’iniquité pourrait aussi venir d’un changement des règles. La définition d’un seuil implique nécessairement que certaines communes se sentent exclues.
Mme le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour la réplique.
M. Franck Menonville. Le véritable problème est celui de la forte variabilité du potentiel financier d’une petite commune dès lors que la démographie évolue.
Mme le président. La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Madame la ministre, je voudrais tout d’abord souligner plusieurs points d’accord avec Philippe Bas, en particulier en ce qui concerne la recentralisation larvée – elle est même parfois assumée. Celle-ci nous apparaît comme un véritable contresens historique, une rupture avec quasiment soixante ans de décentralisation, certes lente, mais qui allait toujours dans la même direction.
Toutefois, la réponse à ce constat ne réside pas dans la nostalgie de ces « petites Républiques communales », qui ont été citées, dont le périmètre a été dessiné voilà plus de deux siècles, faut-il le rappeler, sur le critère de la marche à pied…
Aujourd’hui, le bloc communal doit assumer des fonctions plus nombreuses, des interactions bien plus fortes entre les territoires et sa part dans la responsabilité collective en matière environnementale et de cohésion sociale. Il doit inventer de nouvelles formes démocratiques et participatives. La démocratie municipale doit d’ailleurs puiser les moyens de la reconquête citoyenne dans ces expérimentations.
Ma question porte sur l’application des normes. Les normes : le mal, le cancer pour reprendre une expression précédemment utilisée.
Mais souvent, nous payons aussi le prix de l’absence de normes qui engendre des retards en France par rapport à d’autres pays occidentaux. Ainsi, nos normes ont été adoptées trop tardivement en matière d’accessibilité pour les personnes handicapées ou de disparition des zones humides – nous constatons aujourd’hui la fragilité de nos sols face à la sécheresse et cela vient aussi de l’absence de normes.
Madame la ministre, j’aimerais avoir votre avis sur l’application de ces normes. Je vous propose la mise en place de commissions départementales réunissant les élus locaux, l’État et les associations représentatives par domaine. Une norme ne peut pas tout prévoir et une telle commission pourrait décider par consensus d’appliquer ou non telle ou telle norme, lorsqu’une situation n’est pas prévue.
Quel est votre avis sur cette proposition précise ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Dantec, vous évoquez le rôle de la commune, cette « petite République » communale à laquelle nous sommes tous attachés.
Je rencontre nombre d’élus locaux et de maires qui tous se plaignent d’un excès de normes et de la complexité de celles-ci. Étonnamment, cela ne semble pas être votre cas.
En réalité, cette situation est étroitement liée à notre République et à la façon dont les lois se sont empilées. Aussi, peut-être devrait-on, un jour, pour un sujet donné, repartir d’une page blanche, mais je reconnais que cela serait extrêmement difficile.
Vous évoquez le manque de normes et le caractère trop tardif de l’adoption de certaines d’entre elles, en citant deux enjeux : l’enjeu démocratique et l’enjeu environnemental.
Pour ces deux enjeux, je vois non pas un retard – il peut en exister, bien sûr, ici ou là –, mais plutôt des axes d’amélioration. Aujourd’hui, l’enjeu démocratique et l’enjeu environnemental sont réellement pris en compte par nos élus locaux, en particulier nos maires – si tel n’était peut-être pas le cas voilà dix ans, cela l’est désormais.
La création d’une commission départementale – une de plus, ai-je envie de dire – destinée à veiller à l’application de ces normes et à en accélérer la mise en œuvre ajouterait de la complexité. (M. Ronan Dantec le conteste.) Si je ne vous ai pas bien compris, monsieur le sénateur, je vous invite à me le dire.
Mme le président. Madame la ministre, ce sera pour une autre occasion, parce que le temps de parole de M. Dantec est épuisé.
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Madame la ministre, la loi du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République ouvrait la possibilité de créer des intercommunalités et répondait à une logique de mutualisation des moyens entre communes. Celles-ci étaient surtout libres de se regrouper. J’ai soutenu cette évolution et dès 1994, en tant que maire, j’ai engagé les travaux pour créer la première communauté de communes de Guyane.
Aujourd’hui, il n’est plus question de liberté. Depuis 2010, les communes doivent obligatoirement adhérer à un EPCI et, en 2015, la loi NOTRe a rationalisé la carte des EPCI par redécoupages et fusions sous le contrôle de l’État.
D’un mouvement volontaire où les communes bâtissaient ensemble un projet et choisissaient les compétences concédées à leur EPCI, nous sommes passés à une contrainte et au transfert obligatoire de certaines attributions.
Nombre de maires vivent difficilement ce qu’ils considèrent comme une dépossession de leurs prérogatives, d’autant plus qu’ils restent, aux yeux de leurs administrés, les premiers responsables du bon fonctionnement des services publics, qu’ils en aient ou non la compétence.
Or, au regard des compétences exercées, le rôle du maire et de son conseil municipal est presque devenu secondaire derrière celui du président de l’intercommunalité.
Aussi ne faudrait-il pas rééquilibrer les pouvoirs au sein des EPCI, en créant un conseil des maires dont le rôle serait de contrôler l’action de l’exécutif communautaire ?
Ne faudrait-il pas également modifier le mode d’élection du conseil communautaire qui fait la part trop belle à la ville principale, à telle enseigne que de nombreux maires considèrent les EPCI comme la succursale de celle-ci ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Patient, vous avez raison, le maire est, aux yeux de nos concitoyens, le premier responsable des services publics, que la commune en ait ou pas la compétence !
Je tiens à rappeler l’organisation des EPCI et les outils qui sont à leur disposition pour mieux associer les maires, même si cela ne fonctionne pas toujours ainsi – vous avez raison de le souligner.
Il existe tout d’abord une conférence des maires. Outil de gouvernance complémentaire au conseil communautaire, elle doit obligatoirement être créée dans tous les EPCI. Est-elle créée ou utilisée ? Les maires s’en saisissent-ils ? Le président de l’EPCI la fait-il fonctionner correctement ? Je suis d’accord avec vous, ces questions se posent, mais il est bon de rappeler que cet outil existe.
Il existe ensuite un pacte de gouvernance entre les communes et l’EPCI. Fruit d’un débat organisé en début de mandature et d’une délibération du conseil communautaire, il définit les relations entre l’EPCI et les communes qui en sont membres. Un certain nombre de choses peut être décidé grâce à ce pacte.
Enfin, la présence au conseil communautaire des maires des communes de moins de 1 000 habitants est garantie.
Au-delà de ces outils juridiques, je reste convaincue que des mesures complémentaires permettant d’associer pleinement les maires aux décisions des EPCI peuvent être mises en œuvre au niveau local.
Les outils sont donc là. Pour autant, cela fonctionne-t-il très bien ? Pas partout. Je le répète, beaucoup d’intercommunalités fonctionnent très bien, mais des axes d’amélioration existent.
Lorsqu’un maire a le sentiment d’être dessaisi de ses compétences et de ne pas exister au sein de l’EPCI, son interlocuteur privilégié est évidemment le préfet. Je suis également présente en dernier recours et je rencontre, chaque semaine, nombre d’élus locaux et de maires.
Mme le président. La parole est à M. Patrick Kanner.
M. Patrick Kanner. Madame la ministre, je souhaite vous parler des budgets des communes, parce qu’aucune politique ne peut être menée sans les moyens correspondants.
Or la situation se dégrade du fait des choix opérés par votre gouvernement. Ainsi, dans mon département, M. Lucien Serpillon, maire de Saint-Remy-du-Nord, commune de l’Avesnois comptant 1 100 habitants, et son équipe municipale ont renoncé à leurs indemnités des mois de mars à décembre pour assurer l’équilibre budgétaire à la fin de l’année.
Si la situation financière de nos communes va de mal en pis, c’est notamment en raison de la baisse constante des aides de l’État et de l’absence de correspondance entre les moyens de ce dernier et les demandes des collectivités locales.
Si je reprends l’exemple de Saint-Remy-du-Nord, la DGF y a été divisée par deux ! D’autres décisions que vous avez prises ont ébranlé un peu plus les équilibres précaires que les communes parvenaient à trouver de justesse. Je pense notamment à la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui est un nouveau coup porté à l’autonomie fiscale de nos communes.
Comment imaginer une autonomie financière pour les collectivités locales, un principe pourtant défini à l’article 72-2 de la Constitution, sans un minimum d’autonomie fiscale ?
Dans le même temps, l’inflation grignote les moyens des communes, notamment l’augmentation des coûts de l’énergie. À l’Assemblée nationale, vous n’avez pas voulu soutenir la proposition de loi de mon collègue député Philippe Brun visant à la nationalisation du groupe Électricité de France, dont l’adoption aurait pourtant permis de préserver les collectivités locales de cette inflation des coûts de l’énergie.
Madame la ministre, vous ne voulez ni rétablir la CVAE, ni augmenter la DGF, ni nationaliser EDF ; vous refusez toutes les solutions qui auraient le mérite de soulager les communes. Ma question est donc simple : comment lutter contre cette évolution mortifère qui consiste à passer d’une décentralisation providence à une décentralisation pénitence ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Kanner, vous évoquez trois sujets : la baisse de la DGF de la commune que vous citez en exemple, la suppression de la CVAE et la nationalisation d’EDF.
Pour ce qui relève du premier sujet, seulement 6 % des 35 000 communes en France ont vu leur DGF baisser en 2023. J’ai pour habitude de voir le verre à moitié plein plutôt que le verre à moitié vide : la DGF de 94 % des communes françaises est stable ou progresse en 2023. Et cela est possible grâce à l’augmentation de l’enveloppe totale de 320 millions d’euros que nous avons proposée – on peut toujours dire qu’il aurait fallu davantage, mais le fait est là.
La décision de ce maire de ne pas toucher ses indemnités pour équilibrer son budget l’honore. Nous devons probablement travailler afin que cela ne soit pas nécessaire en 2024.
Vous dites que nous ne voulons pas augmenter la DGF. Je rappelle que, pour la première fois depuis longtemps, elle a progressé en 2023 et que, dans le cadre de l’élaboration du prochain projet de loi de finances, Christophe Béchu et moi-même sommes à l’œuvre pour qu’elle augmente en 2024 – je peux vous dire que les réunions se multiplient à ce sujet.
Cette hausse ne sera certainement pas à la hauteur de l’inflation, parce que nous considérons que nous devons en compenser une partie, mais pas la totalité. En effet, que penseriez-vous d’un gouvernement qui rendrait cette inflation, qui est liée à la guerre aux portes de l’Europe dont le pays fait les frais, totalement indolore pour les collectivités ?
À propos de la suppression de la CVAE, tout le monde a compris dans cet hémicycle qu’elle poursuit un objectif majeur : la réindustrialisation et la compétitivité de la France. Oui, cette suppression a des effets de bord, puisque la CVAE était un levier fiscal pour l’intercommunalité.
Toutefois, elle a été compensée par une part de TVA. De ce fait, les intercommunalités, qui ont effectivement fait les frais de cette suppression, perçoivent une compensation d’un montant bien plus élevé que celui de leur ancienne CVAE.
Enfin, je ne dirai rien sur la nationalisation d’EDF, car le débat a eu lieu.
Mme le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Madame la ministre, ces dix dernières années ont été marquées par une succession de réformes et de mesures qui ont des effets sur les communes au quotidien : loi NOTRe, loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite Engagement et proximité, ou encore loi 3DS, pour ne citer que ces trois exemples.
À cela s’ajoute une réduction des moyens financiers qui influe sur la gestion communale, les services rendus aux populations et l’autonomie des collectivités : réduction des dotations, réforme de la DGF, suppression de la taxe d’habitation et de la CVAE…
Finalement, en un peu plus de dix ans, des milliards ont été ponctionnés sur les budgets communaux. La hausse des prix et la crise de l’énergie aggravent tout cela, certaines communes n’étant même plus capables de voter un budget à l’équilibre.
Presque chaque année également, de nouvelles normes sont imposées, sans concertation ni discussion préalable avec celles et ceux qui sont chargés de les appliquer : je parle ici des maires.
Pourtant, grâce aux maires et aux élus locaux qui sont au plus près des populations, le couple commune-services publics est le cœur battant de la République.
Faut-il rappeler comment les maires et leur administration étaient en première ligne durant le covid afin de protéger leur population ?
Faut-il rappeler que, dans bien des territoires, la mairie est le seul service public qui reste, la seule porte encore ouverte pour accueillir, aider et conseiller nos concitoyens ?
Tantôt des héros, tantôt mis devant le fait accompli de décisions venues d’en haut, les maires et les élus locaux ont parfois le sentiment d’être, eux aussi, les variables d’ajustement des choix et des orientations du Gouvernement.
Ce manque de considération aggrave le mal-être des maires et ne permet pas à nos territoires de se développer.
Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour conforter l’action des maires et garantir l’autonomie et les libertés communales ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Gréaume, je ne partage pas votre propos selon lequel des milliards d’euros ont été ponctionnés sur les budgets communaux ces dernières années et je voudrais citer quelques chiffres.
Depuis 2017, la DGF a été stabilisée. Elle progresse en 2023 et nous travaillons à son augmentation pour 2024.
Ensuite, en matière d’investissement, la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) a doublé depuis dix ans. En 2022, la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et la DETR représentaient 2,2 milliards d’euros. En 2023, 2 milliards d’euros supplémentaires ont été prévus, soit 4,2 milliards d’euros d’investissement dans nos communes.
M. Jean-Raymond Hugonet. Vous parlez d’investissement, mais le problème, c’est d’abord le fonctionnement !
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. On peut considérer que cela n’est pas suffisant ou que nous pourrions faire différemment. Mais ce gouvernement œuvre en faveur de la transition écologique et a décidé de consacrer 2 milliards d’euros supplémentaires aux investissements cette année.
Vous avez tout à fait raison, le couple commune-services publics est le cœur battant de la République.
À ce sujet, j’ai le sentiment que l’accompagnement financier a été conforté – encore une fois, il est toujours possible de faire mieux et je suis toujours à l’écoute – grâce au fonds vert, aux 2 milliards d’euros supplémentaires d’investissement et à l’augmentation de la DGF pour la première fois depuis treize ans.
Le réseau préfectoral est renforcé par la réouverture de six sous-préfectures. Les maisons France Services sont aujourd’hui à moins de trente minutes pour tous nos concitoyens et très souvent à moins de vingt minutes.
La mise en place de l’ANCT progresse ; l’agence est le guichet unique de l’ingénierie. Jeudi prochain, la Première ministre annoncera le plan France Ruralités, qui permettra notamment, en lien avec les départements et les pôles d’équilibre territorial et rural (PETR), d’approfondir cet effort pour continuer d’aller au chevet de nos communes rurales. Ce plan permettra d’approfondir l’accompagnement de nos villages, en complément de ce que je qualifierais d’accompagnement financier renforcé.
Mme le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour la réplique.
Mme Michelle Gréaume. Madame la ministre, ce que les élus nous disent, c’est que la DGF, qui représente des milliards d’euros, est essentielle au fonctionnement des communes. Je veux bien entendre que des aides pour l’investissement existent, mais, aujourd’hui, les communes sont étranglées et il est urgent de faire quelque chose.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-Michel Arnaud. Madame la ministre, il a été rappelé tout à l’heure que la commune est la petite République dans la grande. J’ai aussi tendance à dire que les maires sont à portée de connexion : en effet, comme nous le constatons très régulièrement dans le cadre de la mission d’information sur l’avenir de la commune et du maire en France, ils sont en prise avec le réel, le quotidien de nos concitoyens.
Mais, madame la ministre, vous avez également tenu des propos auxquels nous sommes tous sensibles au Sénat : vous avez déclaré que vous étiez la ministre du « faire ». Or pour faire, il faut dans nos communes des moyens d’ingénierie pour porter les initiatives locales.
Vous avez rappelé à l’instant que l’ANCT est capable d’apporter des solutions en la matière. En réalité, dans nos territoires, on constate surtout que l’ANCT est capable de lancer des appels à projets. Il s’agit donc plutôt d’un collier de perles d’appels à projets que tous les maires doivent porter autour du cou, alors qu’ils attendent plutôt du concret, de l’ingénierie de proximité, pour disposer d’un accompagnement, au coup par coup ou dans le cadre d’un projet territorial, qui leur permette de faire émerger leur projet.
Ma question est donc la suivante, madame la ministre : qu’attendez-vous pour agir et que le Gouvernement propose-t-il pour accompagner les maires, notamment dans les territoires ruraux, et pour leur offrir l’ingénierie dont ils ont besoin pour que leurs projets aboutissent, soient opérationnels, au service de leurs concitoyens ?
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Arnaud, je pensais que vous alliez m’interroger sur vos territoires de montagne, sujet dont nous n’avions pas débattu ensemble depuis longtemps. (Sourires.)
En matière d’ingénierie, je voudrais rappeler que l’ANCT est chargée, avec les commissariats de massif, de l’ensemble des indemnisations offertes aux acteurs des stations de montagne, notamment aux entreprises, affectés par la pandémie de covid-19. Ces agents – l’ANCT et les commissaires de massif – apportent de l’ingénierie sur le territoire ; ils gèrent les dispositifs du plan Avenir Montagnes, qui a permis le déploiement de 31 millions d’euros d’ingénierie. Cela a permis d’accompagner en ingénierie 62 territoires grâce au recrutement de chefs de projets. L’ingénierie dans les territoires de montagne est donc une réalité.
Au sein du plan France Ruralités, qui sera détaillé jeudi prochain, on trouvera encore et toujours de l’ingénierie pour nos territoires ruraux, ainsi que nos territoires de montagne. Nous allons travailler sur l’accessibilité, la mobilité et la lutte contre les logements vacants, mais aussi sur les transitions écologiques et la rémunération des aménités rurales, ainsi, bien entendu, que sur ce sujet qui nous tient tous à cœur qu’est la cohésion sociale et territoriale dans nos territoires de montagne comme dans nos campagnes.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.
M. Mathieu Darnaud. Et même complètement à côté de la plaque !
M. Jean-Michel Arnaud. … mais je veux d’abord répondre à votre réponse, en vous remerciant du travail que vous avez engagé sur la montagne. Vous avez ainsi confié au député Joël Giraud, ancien secrétaire d’État chargé de la ruralité, une mission sur la montagne ; j’en suis heureux.
Ma question portait néanmoins plutôt sur les moyens accordés, de manière générale, aux collectivités locales pour permettre l’aboutissement de leurs projets. J’ai voulu vous envoyer une nouvelle fois un signe fort, en vous disant ceci : essayez de limiter les appels à projets, faites plutôt en sorte de reconstituer des moyens dans les territoires, notamment des services d’État de proximité capables d’accompagner au quotidien les projets locaux, au-delà des sous-préfets qui ont pu essaimer ici ou là, dans certains départements, et de les faire aboutir.
Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Votre question ne portait certes pas intégralement sur le besoin d’ingénierie dans les territoires, mais j’avais compris que c’était l’une de ses composantes.
Une autre est celle que vous avez reprise à l’instant : vous voulez que cette ingénierie ne soit pas offerte sous la forme d’appels à projets. Je ne citerai en réponse que le fonds vert, au travers duquel de l’ingénierie est mise à disposition des maires sans appel à projets. Cette offre n’est aujourd’hui pas entièrement utilisée ; les maires peuvent y avoir recours avant de solliciter le fonds vert pour de l’investissement.
Vous pouvez donc constater ceci : certes, il y en a encore, mais Christophe Béchu et moi-même défendons véritablement la mise à disposition croissante de l’ingénierie sans passer par des appels à projets.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.
M. Jean-Michel Arnaud. Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse ; toutefois, sauf erreur de ma part – il se peut que j’aie mal révisé mes fiches –, il me semble que le fonds vert offre seulement des crédits complémentaires, adossés aux financements de la DSIL et de la DETR, avec simplement une « greenisation », si vous me permettez ce néologisme, des critères d’éligibilité.
De surcroît, le fonds vert est à la main des préfectures de région, ce qui n’est pas idéal en matière de proximité, si l’on veut accompagner avec une finesse presque chirurgicale les initiatives locales.
Cela étant dit, je loue votre travail et votre engagement : vous essayez d’offrir un accompagnement régulier en matière d’ingénierie plutôt que de tout soumettre à des appels à projets. Je vérifierai les résultats « sur champ », si vous me permettez l’expression, car j’espère que vos engagements seront suivis d’effet dans les territoires.